Polyhandicap

2024


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Communications

Économie du handicap

Naomie Mahmoudi
Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM),
Laboratoire interdisciplinaire de recherches en sciences de l’action (Lirsa), Paris
Mathieu Narcy
Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM),
Laboratoire interdisciplinaire de recherches en sciences de l’action (Lirsa),
Centre d’Études de l’Emploi et du Travail (CEET), Paris
Le modèle médical et le modèle social occupent une place prépondérante dans la définition et la théorisation du handicap. Le modèle médical, qui s’est développé après la première guerre mondiale, considère que le handicap est le résultat d’une déficience corporelle d’un individu, physique ou mentale, limitant sa participation sociale. Il préconise ainsi des interventions essentiellement d’ordre médical visant à traiter le handicap ou du moins à réadapter l’individu afin qu’il puisse participer à la société au même titre que les personnes « valides ». Cette vision exclusivement médicale du handicap n’a pas contribué à susciter de nombreuses recherches en sciences sociales, plus particulièrement en économie.
Néanmoins, au cours des années 1970-80, différents mouvements de personnes handicapées ont opposé à cette vision médicale du handicap une vision strictement sociale. En effet, alors que, dans le modèle médical, c’est la déficience qui cause le handicap, le modèle social considère, quant à lui, que le handicap résulte uniquement d’une inadéquation de l’environnement économique et social à cette déficience. L’origine du handicap serait donc extérieure à l’individu. Par conséquent, ce modèle préconise des changements dans cet environnement afin de mieux intégrer les personnes en situation de handicap.
La vision contemporaine du handicap s’inspire de ces deux modèles comme l’illustre la définition du handicap de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Elle considère ainsi qu’« est handicapée toute personne dont l’intégrité physique ou mentale est passagèrement ou définitivement diminuée, soit congénitalement, soit sous l’effet de l’âge ou d’un accident, en sorte que son autonomie, son aptitude à fréquenter l’école ou à occuper un emploi s’en trouvent compromises ». En France, la loi du 11 février 20051 portant sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées définit le handicap, en accord avec ce modèle biopsychosocial, comme « toute limitation d’activité ou restriction à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant ». Cette évolution de la définition du handicap a contribué à développer l’économie du handicap.
L’économie du handicap correspond à une branche de l’économie dont l’un des principaux objectifs est d’évaluer les coûts du handicap tant collectivement qu’individuellement. Ces coûts peuvent être de trois types : directs, indirects, et intangibles. Les coûts directs correspondent à la valeur des ressources qui servent directement à prendre en charge les personnes en situation de handicap. Il s’agit ainsi des coûts médicaux (dépenses de santé) et des coûts non médicaux (aide informelle, secteur médico-social, aménagements du domicile, etc.). Les coûts indirects reflètent les opportunités perdues, notamment en termes d’emploi et de revenus, par la personne en situation de handicap et son entourage. Ils se mesurent le plus souvent par la perte de production et de productivité engendrée par le handicap et sa prise en charge par les proches aidants. Ces coûts indirects intègrent également le coût d’opportunité du temps pour accéder à différents services, dont les services de santé. Les coûts intangibles reflètent les pertes de bien-être et de qualité de vie des personnes en situation de handicap et de leur entourage.
Au sein de la plupart des pays développés, de nombreux travaux en économie ont cherché à évaluer les coûts directs collectifs associés au handicap, et notamment les coûts médicaux. En effet, ces derniers peuvent être mesurés au travers des dépenses de santé et être ainsi facilement calculés à l’échelle d’une population. Une part importante de la littérature consacrée à l’économie du handicap a également porté sur l’étude des coûts indirects mais, cette fois-ci, plutôt au niveau individuel. Elle s’est principalement focalisée sur l’analyse de la situation sur le marché du travail en termes de statut d’emploi et de revenus perçus des personnes souffrant d’un handicap. Dans cette optique, plusieurs études ont cherché à déterminer dans quelle mesure les difficultés d’emploi des personnes en situation de handicap étaient le résultat d’un comportement discriminatoire de la part des employeurs, en recourant notamment à la méthode du testing. Plus récemment, face à l’importance de l’aide informelle dans le soutien, notamment aux personnes âgées en perte d’autonomie, mais également aux enfants et adultes en situation de handicap, des travaux en économie se sont développés afin de tenter de mesurer les coûts directs et indirects de cette aide. L’évaluation monétaire des coûts directs constitue un défi méthodologique pour les économistes dans la mesure où ils la considèrent comme un transfert non marchand entre un producteur (l’aidant) et un bénéficiaire (l’aidé). Concernant les coûts indirects, les études se sont focalisées sur les conséquences de l’aide informelle sur l’offre de travail des proches aidants et sur leur santé. Enfin, outre l’évaluation des coûts associés au handicap, l’économie du handicap a également pour objectif d’évaluer l’efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour compenser le handicap et pour favoriser l’insertion des personnes en situation de handicap dans la société.
Les études menées dans le champ de l’économie du handicap distinguent souvent le handicap selon sa nature, son origine et son degré de sévérité. En revanche, le polyhandicap, qui associe des déficiences mentales et motrices sévères, n’a pas fait l’objet d’une attention particulière de la part des économistes. Ceci s’explique par le fait que ce type de handicap est trop sévère pour permettre à la personne qui en souffre d’accumuler du capital humain et donc in fine d’envisager une insertion sur le marché du travail.
En France, l’économie du handicap est assez peu développée, notamment en comparaison des pays anglo-saxons. Néanmoins, depuis la loi de 2005, plusieurs études menées en économie se sont développées en ayant pour objet de recherche le handicap. Certaines d’entre elles portent sur les conséquences d’un handicap en termes d’emploi (voir, par exemple : Barnay et coll., 2015renvoi vers). D’autres ont cherché à déterminer dans quelle mesure les lois de 19872 et de 2005 ont permis d’améliorer l’emploi des personnes en situation de handicap (Barnay et coll., 2019renvoi vers et 2022renvoi vers). Enfin, l’évaluation monétaire des coûts directs de l’aide informelle a également fait l’objet de quelques travaux de recherche : certaines ont concerné l’aide apportée aux personnes âgées en perte d’autonomie (Paraponaris et coll., 2012renvoi vers ; Davin et coll., 2015renvoi vers) et d’autres celle apportée en soutien d’un proche ayant une maladie chronique invalidante (Gervès-Pinquié et coll., 2014renvoi vers). En revanche, en France, il n’existe pas, à notre connaissance, d’études s’intéressant aux conséquences du handicap sur l’offre de travail et la santé des proches aidants. De même, les coûts directs et indirects engendrés par un handicap survenu à la naissance ou durant l’enfance n’ont pas fait l’objet d’analyse spécifique. Pourtant, ces coûts sont susceptibles d’être plus importants que ceux résultant d’un handicap survenant à l’âge adulte pour au moins deux raisons. D’une part, un capital santé dégradé va impacter les performances scolaires et donc par conséquence les performances économiques à l’âge adulte (Grossmann, 1972renvoi vers). D’autre part, les coûts directs et indirects de l’aide informelle pourraient être plus élevés en raison notamment des effets potentiellement plus négatifs sur l’offre de travail des parents aidants, plus particulièrement des mères.
Cette contribution a pour objectif de réaliser une revue de littérature non exhaustive des études ayant cherché à évaluer les coûts directs et indirects du handicap. Cette revue de la littérature est restreinte aux seules évaluations des coûts au niveau individuel. En outre, étant donné que l’importance de ces coûts peut dépendre du moment de survenue du handicap, nous avons choisi de distinguer les études considérant spécifiquement les effets d’un handicap de naissance ou survenant durant l’enfance de celles considérant ceux d’un handicap survenu à l’âge adulte. Pour les études évaluant les coûts associés à un handicap survenu durant l’enfance, nous nous référons largement à la revue de la littérature réalisée par Stabile et Allin (2012renvoi vers).

Coûts d’un handicap de naissance ou survenant durant l’enfance

Des effets négatifs sur les performances scolaires et les performances économiques à l’âge adulte

Le modèle théorique développé par Grossman (Grossmann, 1972renvoi vers) considère que la santé est un capital dans lequel les individus peuvent investir tout au long de leur vie, notamment pour en ralentir le déclin. Il suppose en outre que le niveau du capital santé durant l’enfance influence celui à l’âge adulte et que le niveau de capital santé détermine, au moins en partie, les capacités des individus à chaque période de leur vie, et donc notamment leurs performances scolaires durant l’enfance et leurs performances économiques à l’âge adulte. Par conséquent, selon ce modèle, plus un handicap survient tôt dans la vie, plus il est susceptible d’avoir des effets négatifs sur les performances futures des individus qui en sont victimes. Ainsi, les performances économiques à l’âge adulte sont doublement affectées par ce handicap : directement via un capital santé dégradé et indirectement via une accumulation moindre de capital humain durant l’enfance.
De nombreuses études empiriques, majoritairement anglo-saxonnes, ont cherché à déterminer dans quelle mesure les performances scolaires et économiques pouvaient être réduites en raison d’un handicap survenu dès la naissance. Toutefois, ces études ne considèrent pas les effets d’un handicap objectivé par expertise médicale mais uniquement des indicateurs d’état de santé susceptibles d’influencer la probabilité de souffrir d’un handicap de naissance. La part la plus importante de ces études évalue les conséquences d’un faible poids à la naissance. Celui-ci est considéré comme bas et très bas s’il est inférieur respectivement à 2,5 kg et 1,5 kg. D’autres études prennent en compte le fait d’être né prématurément, c’est-à-dire avant la 37e semaine de grossesse. Enfin, certaines études mobilisent le score d’Apgar qui mesure l’état de santé du nourrisson sur une échelle allant de 0 à 10, un score inférieur à 7 étant considéré comme étant associé à une plus forte probabilité de souffrir d’un handicap de naissance. En d’autres termes, les études n’évaluent pas les effets à proprement parler d’un handicap de naissance sur les performances scolaires et économiques à l’âge adulte mais plutôt les effets d’un état de santé dégradé dès la naissance susceptible de refléter l’existence d’un handicap.
Au niveau méthodologique, identifier un effet causal d’un mauvais état de santé à la naissance sur les performances scolaires et économiques à l’âge adulte nécessite de pouvoir distinguer l’effet propre de cet état de celui qui peut provenir du statut socioéconomique des parents. En effet, les mesures d’état de santé considérées dépendent fortement de l’origine sociale des parents. L’étude de Moisy (2017renvoi vers) montre ainsi qu’en France, les cadres donnent moins fréquemment naissance que les ouvriers à des bébés dont le poids est inférieur à 2,5 kg. Or, l’origine sociale des parents influence également la réussite scolaire des enfants et donc leur situation professionnelle à l’âge adulte, comme le révèlent les enquêtes Pisa menées au sein des différents pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Par conséquent, pour neutraliser l’effet de l’origine sociale, de nombreuses études ont effectué des comparaisons au sein de mêmes fratries, et même certaines fois entre jumeaux.
Plusieurs études montrent qu’un faible poids à la naissance contribue à accumuler moins d’années d’éducation et occasionne une insertion professionnelle plus difficile à l’âge adulte. Par exemple, l’étude de Behrman et Rosenzweig (2004renvoi vers) révèle, en comparant le poids à la naissance d’enfants américains appartenant à une même fratrie, qu’une hausse d’un pound de ce poids (soit 454 g) augmente le nombre d’années d’éducation de 4 mois en moyenne. Une autre étude menée en Grande-Bretagne confirme cet effet négatif du poids à la naissance sur les performances scolaires mais montre aussi qu’un faible poids à la naissance est associé à une probabilité plus faible d’être en emploi à l’âge de 33 ans et à des salaires moins élevés (Currie et Hyson, 1999renvoi vers). Une étude norvégienne conclut également, en comparant le poids à la naissance entre jumeaux, qu’il est négativement corrélé aux niveaux de quotient intellectuel (QI), d’éducation et de salaire (Black et coll., 2007renvoi vers). Cet effet négatif d’un mauvais état de santé à la naissance sur les performances scolaires et économiques à l’âge adulte est confirmé en se référant au score d’Apgar. Par exemple, Oreopoulos et coll. (2008renvoi vers) mettent en évidence qu’un faible score impacte négativement l’état de santé mesuré à l’âge de 17 ans, la réussite scolaire et le niveau de bien-être ressenti à l’âge adulte.
Plusieurs autres études se sont intéressées aux conséquences, non pas d’un handicap de naissance, mais d’un handicap survenant plus tard dans l’enfance ou l’adolescence. Ces études ont, dans leur grande majorité, cherché à évaluer les effets sur les seules performances scolaires. Comme pour les études analysant les effets d’un handicap de naissance, plusieurs d’entre elles ont mobilisé des mesures d’état de santé des enfants ou adolescents. Ces mesures peuvent être objectives comme subjectives. Par exemple, Case et Paxson (2011renvoi vers) examinent la situation professionnelle des salariés du secteur public américain et montrent que ceux ayant connu au moins 4 semaines d’hospitalisation avant l’âge de 16 ans ont de moins bonnes perspectives de promotion. Le même type de résultat est obtenu par Smith (2009renvoi vers) mais en mobilisant une mesure auto-déclarée et rétrospective de l’état de santé. Ainsi, les salariés âgés de 25 à 40 ans considérant que leur santé était mauvais à l’âge de 16 ans ont de moins bonnes carrières salariales que ceux qui l’évaluent au contraire comme bonne. Plus récemment, étant donné la prévalence croissante de l’asthme chez les jeunes américains, plusieurs études se sont intéressées à ses conséquences sur la réussite scolaire et sur le marché du travail. Elles mettent en évidence que ce handicap conduit à une perte importante de capital humain et de productivité (voir, par exemple : Fletcher et coll., 2010renvoi vers).
Les études ont également souvent fait une distinction entre handicap physique et handicap psychique. Concernant ce dernier, deux grands types de troubles mentaux sont considérés. Il s’agit, d’une part, des troubles anxio-dépressifs et, d’autre part, de troubles comportementaux comme le Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH). Il ressort des différentes études que les premiers occasionnent nettement moins d’effets négatifs sur les performances scolaires que les seconds (Miech et coll., 1999renvoi vers). Néanmoins, les troubles mentaux sont plus difficiles à repérer, notamment par les parents, que les handicaps physiques. Il est donc possible qu’ils soient plus fréquemment diagnostiqués au sein des familles les plus favorisées. Par conséquent, il est nécessaire de tenir compte de ce bais de sélection potentiel afin d’identifier un effet causal d’un handicap mental sur les performances scolaires et économiques à l’âge adulte. L’étude de Currie et Stabile (2006renvoi vers) corrige ce biais en comparant ces performances au sein de mêmes fratries. Ils trouvent ainsi que les enfants souffrant de TDAH ont de moins bons scores obtenus en mathématiques et en lecture ainsi qu’une probabilité plus élevée de redoubler. Leur étude révèle par ailleurs que ces effets négatifs sont plus élevés que ceux observés pour un handicap physique. Cet effet plus néfaste des handicaps mentaux est confirmé par d’autres études, comme, par exemple, celle de Smith et Smith (2010renvoi vers) qui montre également des effets plus négatifs sur les salaires perçus durant la vie professionnelle.

Des coûts directs et indirects plus élevés supportés par les familles

Une littérature abondante concerne l’évaluation des coûts directs et indirects supportés par les familles ayant un enfant en situation de handicap. Les coûts directs correspondent à l’ensemble des dépenses engagées par les familles pour assurer la prise en charge du handicap de leur enfant. Ils dépendent non seulement du type de handicap et de son degré de sévérité, mais également du contexte institutionnel dans lequel les familles évoluent, notamment du type de régime de protection sociale qui détermine dans quelle mesure les coûts médicaux peuvent être pris en charge ainsi que de la disponibilité et de la qualité de l’aide formelle. Par conséquent, réaliser des comparaisons internationales de l’importance de ces coûts n’est pas aisé. En outre, les études ne considèrent pas toujours les mêmes composantes de ces coûts, notamment concernant les coûts médicaux. En effet, certaines études ne considèrent que le reste-à-charge, c’est-à-dire le montant des dépenses de santé après remboursement par le système de protection sociale. D’autres, au contraire, prennent en compte l’ensemble des dépenses de santé, qu’elles soient remboursées ou non.
La plupart des études ayant cherché à évaluer les coûts directs supportés par les familles ayant un enfant en situation de handicap ont été menées aux États-Unis. Par conséquent, ces évaluations dépendent étroitement des spécificités du système de santé américain et sont donc difficilement transposables à d’autres pays. Il ressort de ces études que les familles ayant un enfant en situation de handicap connaissent davantage de difficultés financières que celles n’en ayant pas. Par exemple, Parish et coll. (2008renvoi vers) montrent que, « toutes choses égales par ailleurs » (notamment, à revenus équivalents), elles sont deux fois plus nombreuses à déclarer avoir des difficultés matérielles. Ces plus grandes difficultés matérielles résultent principalement de coûts médicaux plus importants. En effet, les enfants en situation de handicap se rendent, au cours d’une année, trois fois plus fréquemment chez le médecin que les enfants sans problème de santé et leur taux d’hospitalisation est quatre fois plus élevé (11,4 % contre 2,8 %) avec, en outre, des durées d’hospitalisation plus longues (Newacheck et coll., 2004renvoi vers).
Les coûts directs dépendent également fortement du type de handicap et de son degré de sévérité. L’étude de Kleinman et coll. (2009renvoi vers) montre que les employés ayant un enfant souffrant de TDAH ont des coûts médicaux trois fois plus élevés que les employés n’ayant pas d’enfant souffrant de ce type de trouble. La revue de la littérature réalisée par Anderson et coll. (2007renvoi vers) révèle que les familles ayant un enfant souffrant d’un handicap très sévère (spina-bifada ou paralysie cérébrale) ont des coûts de prise en charge particulièrement élevés. D’ailleurs, certaines études considèrent que le handicap mental est plus coûteux que le handicap physique (Busch et Barry, 2007renvoi vers). Néanmoins, cette différence est susceptible d’être spécifique aux États-Unis puisqu’elle résulterait, au moins en partie, d’une moins bonne prise en charge du handicap mental par le système de santé américain.
À ces coûts directs résultant de l’aide informelle s’ajoutent des coûts indirects. La littérature s’est ainsi principalement concentrée sur les effets de la présence d’un enfant en situation de handicap sur l’offre de travail des parents, et plus particulièrement des mères. Ces effets peuvent être analysés dans le cadre du modèle théorique de l’offre de travail de Becker (Becker, 1965renvoi vers). Ce modèle considère en effet que l’activité d’aide informelle relève d’arbitrages effectués par les parents entre les temps d’aide, temps de travail, temps de loisirs et temps de consommation. Selon ce modèle, l’offre de travail des parents dépend simultanément du degré de sévérité du handicap qui conditionne les coûts financiers et en temps de sa prise en charge ainsi que de la disponibilité et de la qualité perçue de l’aide formelle. Au final, ce modèle prévoit un effet ambigu de la présence d’un enfant en situation de handicap sur l’offre de travail des parents. D’une part, cette présence peut avoir un effet négatif si le handicap nécessite un temps de présence et de soins très important associé à une aide formelle insuffisante et/ou de faible qualité. Dans ce cas, s’occuper d’un enfant en situation de handicap peut s’avérer non conciliable avec un emploi (à plein temps ou non). D’autre part, la présence d’un enfant en situation de handicap peut avoir un effet positif sur l’offre de travail des parents si le handicap engendre des coûts financiers trop élevés pour qu’ils puissent être assumés sans que les parents augmentent leur temps de travail.
La plupart des études empiriques se sont focalisées sur l’effet de la présence d’un enfant en situation de handicap sur l’offre de travail des seules mères. Sur le plan méthodologique, pour identifier un effet causal, il faut, d’une part, être en mesure de neutraliser les effets de caractéristiques inobservables qui influenceraient simultanément la probabilité des mères d’être en emploi et celle d’avoir un enfant en situation de handicap (par exemple, caractéristiques génétiques). D’autre part, il faut s’assurer que, si la mère décide de s’arrêter de travailler après avoir donné naissance à un enfant en situation de handicap, elle n’aurait quand même pas fait ce choix si cet enfant était né en bonne santé. C’est pourquoi de nombreuses études se sont efforcées de tenir compte de ces deux biais, soit en mobilisant des données de panel, soit en effectuant des comparaisons au sein d’une même fratrie.
Plusieurs études, essentiellement américaines, ont analysé l’effet de la présence ou de la naissance d’un enfant en situation de handicap ou ayant une santé altérée sur l’offre de travail des mères, en distinguant souvent le passage à temps partiel et l’arrêt total de l’activité professionnelle. Certaines de ces études se sont focalisées sur des handicaps spécifiques comme le spina-bifada (Tilford et coll., 2009renvoi vers), la trisomie 21 (Barnett et Boyce, 1995renvoi vers), l’asthme (Baydar et coll., 2007renvoi vers) ou le TDAH (Swensen et coll., 2003renvoi vers). Toutes ces études mettent en évidence qu’avoir un enfant souffrant d’un handicap ou ayant un état de santé altéré pénalise fortement l’offre de travail des mères, et ce d’autant plus lorsque ce handicap est sévère. Par exemple, Norberg (1998renvoi vers) montre que les mères ont une probabilité de ne pas retourner en emploi après la naissance d’un enfant à fort risque de handicap (approximé par différentes caractéristiques comme le fait d’être prématuré, d’avoir été hospitalisé à la naissance, etc.) deux fois plus élevée qu’après la naissance d’un frère ou d’une sœur sans problème de santé.
Parmi ces études, certaines ont mobilisé des données subjectives dans lesquelles il est demandé directement aux mères (ou plus globalement aux parents) si elles ont arrêté ou réduit leur activité professionnelle en raison du handicap ou du problème de santé de leur enfant. Ces études permettent ainsi de s’assurer que l’effet sur l’activité professionnelle est bien spécifiquement le résultat du problème de santé de l’enfant et que les mères ne se seraient pas de toute façon arrêtées de travailler même si leur enfant n’avait pas connu de problème de santé. Par exemple, dans l’étude menée par Lukemeyer et coll. (2000renvoi vers), 40 % des mères ayant un enfant souffrant d’un handicap sévère déclarent que ce handicap les a conduites à réduire le nombre d’heures travaillées et une sur trois déclare que ce handicap les empêche de travailler.
Certaines études suggèrent également que l’offre de travail des parents est davantage pénalisée par la présence d’un handicap mental que physique. Dans l’étude de Busch et Barry (2007renvoi vers), 35 % des familles interrogées déclarent une réduction de leur offre de travail en cas de handicap mental contre « seulement » 25 % en cas de handicap physique. En outre, le handicap mental engendre une cessation totale d’activité dans 15 % des familles contre 10 % pour le handicap physique.
Quelques études ont considéré l’effet d’un handicap sur l’offre de travail des pères. Il en ressort que cette dernière est nettement moins impactée que celle des mères (voir, par exemple : Noonan et coll., 2005renvoi vers). Plusieurs études révèlent également que l’activité professionnelle des mères vivant en couple est globalement moins affectée par la présence d’un enfant en situation de handicap que celle des mères célibataires (Baydar et coll., 2007renvoi vers).
Enfin, quelques études se sont intéressées aux effets sur la santé des parents et sur leur probabilité de séparation après la naissance d’un enfant en situation de handicap. Selon Burton et coll. (2008renvoi vers), avoir un enfant ayant une limitation d’activité a un effet négatif sur le niveau d’état de santé auto-déclarée des mères mais pas sur celui des pères. D’autres études mettent en évidence un effet particulièrement négatif sur la santé mentale des parents qui ressentent davantage de stress. C’est le cas, par exemple, de l’étude de Gallagher et coll. (2010renvoi vers) qui mesure le niveau de stress par la qualité du sommeil. La naissance d’un enfant avec un handicap sévère augmente également les risques de séparation des parents. Reichman et coll. (2004renvoi vers) montrent ainsi que, pour les parents en couple au moment de la naissance, la probabilité de l’être encore entre le 12e et le 18e mois après la naissance est réduite de 10 points de pourcentage en cas de handicap sévère de l’enfant.

La difficile évaluation monétaire de l’aide informelle

L’évaluation monétaire du temps consacré par les parents à s’occuper d’un enfant en situation de handicap (ou plus généralement par les proches à s’occuper d’un membre de leur famille dont l’état de santé et/ou l’âge ne lui permet pas d’être totalement autonome) constitue un défi méthodologique pour les économistes. En effet, il n’existe pas, par définition, un prix de marché de l’aide informelle qui permettrait d’en déduire directement sa valeur monétaire et donc son coût. Pourtant, objectiver l’importance de cette aide à travers son évaluation monétaire revêt un fort intérêt sociétal afin d’appuyer les décisions publiques pour une allocation juste et efficace des ressources collectives.
Dans la littérature, deux grands types de méthodes ont été mobilisés pour tenter d’évaluer monétairement l’importance de l’aide informelle (van den Berg et coll., 2004renvoi vers). Il s’agit, d’une part, des méthodes dites de préférences révélées et, d’autre part, de celles dites des préférences déclarées. Le principe du premier type de méthodes consiste à évaluer monétairement le coût de l’aide informelle en se fondant sur le prix de marché d’un substitut marchand. La méthode des coûts d’opportunité considère comme substitut la meilleure alternative possible à laquelle l’aidant doit renoncer pour réaliser une heure d’aide informelle. Dans la plupart des cas, les études ayant mobilisé cette méthode choisissent le travail comme meilleure alternative possible puisqu’elle est facilement évaluable en considérant le niveau de salaire potentiellement perdu. La méthode des biens proxy considère, quant à elle, que le coût d’une heure d’aide informelle correspond au coût de remplacement de cette aide par une aide formelle. En d’autres termes, ce coût correspond aux dépenses que les proches auraient dû engager si cette aide avait été assurée par un professionnel.
Les méthodes des préférences révélées présentent néanmoins plusieurs limites dans leur capacité à évaluer correctement le coût monétaire d’une heure d’aide informelle. La méthode des coûts d’opportunité est par exemple non pertinente lorsque l’aidant ne travaille pas. De même, celle des biens proxy repose sur l’hypothèse restrictive selon laquelle aide informelle et aide formelle sont parfaitement substituables. Plus généralement, ces deux méthodes évaluent le coût monétaire de l’aide informelle sans être en mesure de prendre en compte, dans ce coût, la perte d’utilité que peut subir le proche aidant. C’est pourquoi d’autres types de méthodes se sont développés en se fondant sur les préférences déclarées des proches aidants. Ces méthodes, bien que par définition subjectives, présentent l’avantage de ne pas limiter la valeur économique de l’aide informelle à sa valeur d’usage mais d’incorporer également sa valeur de non usage. La méthode d’évaluation contingente consiste ainsi à faire déclarer aux aidants, soit leur consentement à payer (CAP) pour abandonner une heure d’aide informelle, soit leur consentement à recevoir (CAR) pour réaliser une heure supplémentaire de cette aide. Cette méthode présente néanmoins les biais inhérents aux préférences déclarées (biais hypothétique, biais stratégique, biais cognitifs, etc.). La méthode de l’analyse conjointe permet d’éliminer ou de limiter plusieurs de ces biais. Elle permet en outre de considérer des modes de compensation de l’aide informelle autres que monétaires comme, par exemple, le temps de répit. Elle consiste en effet à présenter aux aidants plusieurs scénarii fictifs d’aide informelle et à leur demander d’exprimer leurs préférences vis-à-vis de ces scénarii. Cette révélation des préférences peut s’effectuer selon différentes variantes : attribuer une note à chaque scénario, les classer par ordre de préférence, choisir le préféré ou réaliser des comparaisons deux à deux et désigner le préféré.
Concernant les études ayant cherché à mesurer le coût monétaire de l’aide informelle, il n’en existe pas, à notre connaissance, spécifiquement consacrées à l’aide apportée par les parents à leur enfant en situation de handicap. Plusieurs études ont été pourtant réalisées en s’appuyant sur des enquêtes menées auprès d’associations d’aidants informels (voir, par exemple, pour les Pays-Bas : van den Berg et coll., 2005renvoi vers ; et, pour l’Écosse : Mentzakis et coll., 2011renvoi vers). Or, alors que l’âge de l’aidé est connu, ces études n’évaluent pas spécifiquement le coût de l’aide informelle apportée à un enfant en situation de handicap. Elles distinguent en revanche le type de handicap dont souffre l’aidé (mental ou physique) ainsi que le degré de proximité de l’aidant (famille ou non). Il existe également des études s’intéressant au coût de l’aide informelle associée à une maladie chronique invalidante comme, par exemple, l’arthrite rhumatoïde (van den Berg et coll., 2005renvoi vers).
En France, plusieurs études existent sur l’évaluation monétaire de l’aide informelle auprès de personnes âgées. Par exemple, au niveau macro-économique, l’étude de Paraponaris et coll. (2012renvoi vers) évalue, à partir de la méthode des biens proxy et des données issues de l’enquête Handicaps-Incapacités-Dépendance (HID) réalisée par l’Insee (Institut National de la Statistique et des Études Économiques) en 1999, à environ 6 milliards d’euros l’aide informelle annuelle dont bénéficient les personnes âgées de 60 ans et plus vivant à domicile. Elle est même supérieure à l’aide formelle qu’ils évaluent à 4 milliards d’euros. Dans une approche micro-économique, Davin et coll. (2015renvoi vers) montrent, à partir des données issues de l’enquête Handicap-Santé-Aidants informels (HSA) réalisée conjointement par l’Insee et la Drees (Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques) en 2008, que les proches aidants auprès de personnes âgées de plus de 75 ans vivant à domicile ont un CAP pour renoncer à une heure d’aide informelle évaluée à 13,6 euros en moyenne. Les auteurs montrent en outre que ce CAP dépend des caractéristiques de l’aidant (notamment de son état de santé), des caractéristiques de l’aidé (notamment de ses revenus) et du lien entre l’aidant et l’aidé. Il ne dépend en revanche pas des caractéristiques de l’aide apportée. Il existe également quelques études ayant évalué le coût de l’aide informelle destinée à des proches souffrant d’une maladie chronique invalidante. Par exemple, Gervès-Pinquié et coll. (2014renvoi vers) évaluent à 12 euros le CAP d’un proche aidant auprès d’une personne souffrant de la maladie d’Alzheimer pour renoncer à une heure d’aide informelle.
Globalement, il ressort de ces différentes études que l’évaluation monétaire de l’aide informelle est plus faible lorsqu’elle est obtenue à partir de méthodes se fondant sur les préférences déclarées qu’à partir de celles reposant sur les préférences révélées. Cela suggère ainsi que les aidants retirent, malgré tout, une certaine utilité à apporter leur aide (engagement, réciprocité, fierté, etc.). Par ailleurs, certaines études qui mobilisent l’analyse conjointe révèlent que la compensation de l’aide informelle ne serait pas que monétaire mais que les aidants sont disposés à bénéficier d’autres formes de soutien, comme le fait de pouvoir profiter de temps de répit, ce qui peut avoir des implications importantes en termes de politiques publiques.

Coûts d’un handicap survenant à l’âge adulte

Les études économiques relatives aux adultes en situation de handicap se sont principalement focalisées sur leur situation d’emploi, en particulier sur le marché du travail ordinaire. Deux environnements de travail peuvent être en effet distingués : le milieu de travail dit ordinaire et le secteur protégé. Le marché du travail ordinaire correspond au marché du travail classique : il regroupe ainsi les entreprises et associations privées et publiques dont les entreprises adaptées. Parallèlement coexiste le secteur protégé, qui comprend les Établissements et Services d’Aide par le Travail (ESAT). Il s’agit d’établissements médico-sociaux proposant des activités productives à des adultes en situation de handicap (généralement mental voire psychique) dont la capacité de travail est inférieure à un tiers de celle des travailleurs non handicapés. Ces travailleurs sont alors considérés comme des usagers des établissements et services médico-sociaux (et non comme des salariés). La Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) est chargée de statuer sur le milieu de travail le plus adapté à la personne en situation de handicap. Toutefois, dans toutes les sphères dont l’emploi, l’objectif des politiques publiques reste de favoriser en priorité l’accessibilité et l’inclusion des personnes en situation de handicap dans le milieu ordinaire, en vertu de la loi du 11 février 2005. Pour cette raison, nous nous concentrerons ici sur les études relatives à l’emploi des personnes en situation de handicap dans le milieu ordinaire, le secteur protégé n’ayant, à notre connaissance, pas encore fait l’objet d’études en économie. Or, ne peuvent être en emploi que les personnes en situation de handicap dont les capacités, mais également l’environnement, permettent la recherche d’emploi, l’accès à l’emploi et le maintien en emploi. Seule une partie des adultes en situation de handicap a donc pour le moment suscité l’intérêt des économistes, ceux ayant un handicap faible à modéré de naissance, ou un handicap survenu au cours de la vie (à la suite par exemple d’une maladie ou d’un accident, lié ou non à une activité professionnelle).
Bien que l’emploi soit le lieu privilégié pour favoriser l’intégration sociale et l’indépendance économique, son accès et son maintien sont restreints pour les personnes en situation de handicap, ce qui a entraîné l’instauration d’un ensemble de politiques publiques d’emploi en leur faveur.

Difficultés d’emploi des personnes en situation de handicap

Le risque d’exclusion sociale et de pauvreté est exacerbé pour les personnes en situation de handicap (United Nations, 2018renvoi vers), ce qui s’expliquerait principalement par leur éloignement du marché du travail. En France, leur taux d’activité est plus faible et leur taux de chômage plus élevé que pour l’ensemble de la population. Parmi les différentes mesures du handicap utilisées dans les données d’enquête et administratives françaises, la reconnaissance administrative d’un handicap est la plus fréquente. Selon la Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques (Dares)3 , en 2022, parmi les personnes en âge de travailler (âgées donc de 15 à 64 ans), le taux d’activité de celles ayant une reconnaissance administrative d’un handicap s’établissait à 44 %, contre 74 % pour l’ensemble de la population de la même tranche d’âge. Leur taux de chômage était quant à lui presque deux fois plus élevé, s’élevant à 12 % contre 7 % pour l’ensemble de la population. Par ailleurs, les caractéristiques des personnes en situation de handicap en emploi se distinguent de celles de la population générale en emploi : il s’agit davantage de femmes, de personnes âgées (de 50 à 64 ans), occupant des emplois d’employés ou d’ouvriers et travaillant davantage à temps partiel (Drees, 2023renvoi vers).
Le faible taux d’emploi des personnes en situation de handicap peut s’expliquer par l’existence de divers obstacles. D’une part, il peut exister des obstacles environnementaux ne permettant pas une accessibilité suffisante aux espaces publics, aux logements, aux transports ou encore aux techniques de l’information et de la communication. D’autre part, l’offre de travail et la demande de travail peuvent elles-mêmes constituer des freins à l’emploi.

Des barrières du côté de l’offre de travail

Tout d’abord, l’état de santé des personnes en situation de handicap peut limiter leur capacité de travailler4 , et en particulier leur probabilité de travailler à temps plein (Schur, 2003renvoi vers). Cette limitation varie toutefois selon le type et le degré de handicap. Elle est plus importante en cas de forme grave de handicap (Mussida, 2016renvoi vers) et plus faible lorsque le handicap est auditif puisque ce handicap apparaît généralement à un âge avancé, ce qui n’empêche alors pas d’intégrer le marché du travail dans un premier temps (Boman et coll., 2015renvoi vers). Bien évidemment, cette limitation dépend également des moyens mis à la disposition des personnes en situation de handicap pour compenser au mieux leur situation de handicap (aides humaines et/ou techniques). Par ailleurs, le handicap peut augmenter le temps consacré aux tâches de la vie quotidienne et aux rendez-vous médicaux, et ainsi réduire le temps disponible pouvant être alloué à la recherche d’emploi et à l’exercice d’une activité professionnelle (Revillard, 2019renvoi vers).
Le niveau d’éducation moyen plus faible des personnes en situation de handicap, qui peut en partie s’expliquer par le manque d’inclusion du système éducatif malgré des progrès réalisés en ce sens, auquel s’ajoutent leurs capacités productives en moyenne plus faibles, peuvent également expliquer leur moins bonne situation professionnelle. Peuvent alors en résulter des perspectives salariales plus faibles (et donc des emplois visés moins qualifiés) dont le montant concurrencerait davantage celui des prestations d’invalidité et risquerait de créer une trappe à l’inactivité. Il est à ce titre important de préciser que certains emplois peu qualifiés sont plus susceptibles de générer et/ou d’accroître le handicap (par exemple, la prévalence des accidents du travail et des maladies professionnelles dans les emplois d’ouvriers).
Enfin, les personnes en situation de handicap peuvent souhaiter travailler mais décider de ne pas rechercher d’emploi si elles anticipent qu’elles n’en trouveront pas compte tenu de l’ensemble des obstacles qui peuvent se dresser devant elles (anticipations réalisatrices).
Cependant, le faible taux d’emploi des personnes en situation de handicap n’est pas seulement dû à des obstacles émanant de l’offre de travail, c’est-à-dire des personnes en situation de handicap elles-mêmes, la demande de travail peut également en être vectrice.

Des barrières du côté de la demande de travail

Du côté de la demande de travail, la discrimination et le manque d’adaptation de l’environnement de travail sont les principaux obstacles à l’emploi des personnes en situation de handicap. Puisque l’absence d’aménagement de l’emploi (poste de travail, horaires, etc.) peut être considérée comme un acte discriminatoire, nous nous concentrerons ici uniquement sur la discrimination.
Sur le marché du travail, la discrimination est définie par Heckman (1998renvoi vers) comme la différence de traitement faite par une entreprise (en termes d’accès à l’emploi, de salaire, de promotion, etc.) entre deux individus appartenant à des groupes sociodémographiques différents et présentant des caractéristiques productives parfaitement identiques. Celle-ci est prohibée à l’article L. 1132-1 du Code du travail.
Le handicap comme critère potentiel de discrimination est relativement peu étudié alors qu’il est, depuis des années, le premier motif de saisine de la Défenseure des droits dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Deux raisons principales peuvent l’expliquer. Il est tout d’abord difficile d’appréhender le handicap dans sa globalité puisque chaque situation de handicap est singulière : il existe différentes formes de handicap puisqu’il diffère selon sa nature, son degré de sévérité et le moment de sa survenue au cours de la vie. Le handicap peut également être visible ou invisible (80 % des handicaps déclarés en France sont invisibles5 ). Une seconde explication peut se trouver dans la difficulté de mettre en évidence une telle discrimination. Au sens de la définition de Heckman, cela requiert de raisonner à productivité identique alors que le handicap peut altérer les capacités productives6 .
Parmi les différents types de discriminations pouvant exister sur le marché du travail, la discrimination dans l’accès à l’emploi et la discrimination salariale ont été les plus étudiées. La méthode du test de correspondance (appelée méthode du testing) s’est imposée dans la littérature comme la méthode à privilégier pour objectiver l’existence d’une discrimination dans l’accès à l’emploi. Elle consiste à envoyer à l’employeur plusieurs candidatures fictives, similaires en tous points (en termes de style, expérience, niveau d’éducation, etc.) à la différence du critère que l’on souhaite étudier. Ainsi, elle présente l’avantage de pouvoir mesurer l’ampleur des discriminations en raisonnant à productivité identique puisque le seul critère qui distinguerait ces candidatures serait, dans le cas du handicap, le signal ou non du handicap (au travers par exemple de la mention de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé dans le CV et/ou la lettre de motivation du candidat fictif en situation de handicap).
À l’étranger, elle a permis de mettre en lumière l’existence d’une discrimination à l’embauche en raison de différents types de handicap : moteur (en particulier le fait d’être en fauteuil roulant), mental, auditif ou encore visuel comme en témoigne la méta-analyse de Lippens et coll. (2023renvoi vers). Ces auteurs ont d’ailleurs fait ressortir un résultat global de l’ensemble des 13 études qu’ils ont recensées : un candidat fictif à l’emploi en situation de handicap a 41 % de chances en moins qu’un candidat de référence fictif de recevoir une réponse positive à sa candidature de la part de l’employeur.
En France, en revanche, nous dénombrons seulement trois types de handicap étudiés : le handicap moteur et plus précisément le fait d’être en fauteuil roulant (Ravaud et coll., 1992renvoi vers ; Mbaye, 2018renvoi vers ; Mahmoudi, 2021renvoi vers), le handicap auditif (L’Horty et coll., 2022renvoi vers) et le handicap visuel (Chareyron et coll., 2022renvoi vers). Ces études, portant sur des professions différentes, mettent toute en évidence une différence statistiquement significative de traitement des personnes en situation de handicap de la part des employeurs en France. Les femmes en situation de handicap sont par ailleurs particulièrement pénalisées dans l’accès à l’emploi, cumulant ainsi deux désavantages, leur sexe et leur handicap (Mahmoudi, 2021renvoi vers).
La discrimination salariale à l’encontre des personnes en situation de handicap a également fait l’objet de quelques études à l’étranger, mais aucune en France. Pour l’évaluer, les économistes utilisent les méthodes de décomposition de type Oaxaca-Blinder qui consiste à décomposer l’écart entre le salaire moyen des personnes en situation de handicap et celui des personnes valides en deux parties. La première partie dite « expliquée » correspond à la part de cet écart qui résulte de différences de caractéristiques affectant la productivité entre les deux populations. La deuxième partie qualifiée de « non expliquée » résulte d’éventuelles différences de rendements de ces caractéristiques et peut, sous certaines conditions, être assimilée à la discrimination salariale. Plusieurs études, portant essentiellement sur le marché du travail américain ou britannique, ont montré l’existence de telles discriminations salariales (par exemple : Baldwin et Johnson, 1995renvoi vers ; Kidd et coll., 2000renvoi vers ; DeLeire, 2001renvoi vers ; Baldwin et Choe, 2014renvoi vers ; Kruse et coll., 2018renvoi vers). Là encore, la discrimination salariale serait plus importante pour les femmes en situation de handicap (Baldwin et Johnson, 1995renvoi vers ; Schur, 2003renvoi vers).
Afin de promouvoir l’emploi, le maintien dans l’emploi et l’égalité de traitement dans l’emploi des personnes en situation de handicap, un ensemble de politiques publiques a été mis en œuvre ces dernières décennies, à la croisée entre les politiques de l’emploi et les politiques du handicap. L’efficacité de certaines d’entre elles a été évaluée par les économistes.

Évaluation des effets de politiques publiques sur l’emploi des personnes en situation de handicap

Politiques en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés

En France, deux types de politiques publiques coexistent. Il y a, d’une part, des politiques coercitives ciblant la demande de travail, dont le non-respect fait alors l’objet de sanctions : l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (OETH) ; le principe de non-discrimination en raison du handicap ; l’obligation d’aménagement du poste de travail ; ou encore l’obligation de négocier des mesures relatives à l’insertion professionnelle. D’autre part, des politiques d’incitations sont mises en œuvre ciblant la demande de travail (par exemple : aide à l’accueil et l’intégration et/ou à l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap) et l’offre de travail (par exemple : aide à la formation professionnelle, aide à l’emploi).
Sur le plan empirique, les études ont essentiellement cherché à évaluer les effets des politiques coercitives, en particulier celles imposant un quota d’emploi de travailleurs handicapés. De nombreux pays ont instauré une telle politique de quota, comme l’Allemagne, l’Espagne ou encore le Japon. Elle repose sur l’hypothèse que, sans un taux d’embauche minimum imposé, les travailleurs handicapés n’auraient que peu, voire pas de chance d’obtenir, un emploi sur le marché du travail ordinaire. En France, en vertu de la loi du 10 juillet 1987, toute entreprise d’au moins 20 salariés a l’obligation d’embaucher au minimum 6 % de son effectif salarial total en situation de handicap, sous peine de devoir verser une contribution financière annuelle (à l’AGEFIPH7 pour les entreprises privées ou au FIPHFP8 dans la fonction publique). Avant l’entrée en vigueur de la loi du 5 septembre 20189 , l’unité d’assujettissement était l’établissement. Cette politique est plus connue sous le nom d’Obligation d’Emploi de Travailleurs Handicapés (OETH).
Plusieurs études à l’étranger ont montré l’efficacité (assez modérée) de ces quotas sur l’emploi des personnes en situation de handicap (Lalive et coll., 2013renvoi vers ; Malo et Pagán, 2014renvoi vers ; Mori et Sakamoto, 2018renvoi vers), même s’ils ne sont pas toujours atteints (Krekó, 2019renvoi vers).
En France, les conclusions semblent avoir évolué au fil des réformes de l’OETH. La seule étude publiée ayant mesuré l’efficacité de ce système de quota a été réalisée par Barnay et coll. (2019renvoi vers) et porte sur la première version du quota (loi du 10 juillet 1987). En appliquant une approche en triple différence aux données de panel de l’enquête Santé et Itinéraire Professionnel (enquête SIP), ils concluent que l’instauration du quota a eu un impact négatif sur l’emploi des travailleurs handicapés dans le secteur privé. Plus précisément, cette réforme a réduit de manière statistiquement significative le taux d’emploi des travailleurs 5 ans après la survenue de leur handicap de 21,5 points de pourcentage dans ce secteur. Une hypothèse avancée par les auteurs est qu’une grande partie des entreprises privées préférerait payer la pénalité financière plutôt que d’embaucher des travailleurs handicapés. En revanche, l’effet est neutre dans le secteur public (sachant qu’en 1987, le quota d’emploi et la pénalité pour non-respect de ce quota ne s’appliquaient qu’au secteur privé).
Plus récemment, la seconde version de l’OETH issue de la loi du 11 février 2005 a également fait l’objet d’une évaluation. En utilisant à nouveau la méthode de la triple différence aux données de panel de l’enquête SIP, Barnay et coll. (2022renvoi vers) concluent que cette réforme a eu cette fois-ci un effet positif en améliorant le taux d’emploi des personnes en situation de handicap, surtout dans le secteur privé.

Politiques de compensation du handicap

Le « droit à la compensation » du handicap a été instauré par la loi du 11 février 2005. Il s’agit de toute aide (financière, humaine, matérielle, etc.) apportée à la personne en situation de handicap afin d’améliorer sa vie quotidienne. En France, les principales aides financières pouvant être attribuées aux adultes en situation de handicap sont l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), l’Allocation Supplémentaire d’Invalidité (ASI), la pension d’invalidité, la Prestation de Compensation du Handicap (PCH), la Majoration pour Tierce Personne (MTP) et la rente pour incapacité permanente partielle.
L’effet des prestations d’invalidité sur l’emploi a été largement étudié, comme en témoigne la revue de littérature de Dal Bianco (2019renvoi vers). Le nombre de pays ayant un programme de prestations d’invalidité dans leur législation est en effet croissant et important depuis les années 1960 (International Institute for Labour Studies, 2014renvoi vers). Tout l’enjeu de ces prestations est d’assurer la sécurité d’un revenu minimum aux personnes en situation de handicap, sans pour autant créer une trappe à l’inactivité pour celles dont la capacité de travailler n’est pas totalement altérée. Leurs effets théoriques sur l’emploi sont toutefois ambigus. Nous pouvons nous attendre à un effet positif si l’effet de substitution l’emporte sur l’effet revenu. Dans ce cas, les prestations d’invalidité constitueraient une sorte de matelas financier permettant de libérer davantage de temps pour la recherche et l’exercice d’un emploi (par exemple en employant une aide-ménagère). À l’inverse, elles pourraient avoir un effet négatif si l’effet de revenu l’emporte sur l’effet de substitution, créant ainsi à une trappe à inactivité.
À l’étranger, la littérature économique a apporté de nombreuses preuves que ces prestations ont généralement un effet négatif sur la participation au marché du travail des bénéficiaires, mais également sur leur salaire (Bound, 1989renvoi vers ; Campolieti, 2001renvoi vers ; Chen et van der Klaauw, 2008renvoi vers ; Maestas et coll., 2013renvoi vers ; French et Song, 2014renvoi vers ; Autor et coll., 2015renvoi vers et 2016renvoi vers ; Gelber et coll., 2017renvoi vers). L’effet sur l’emploi jouerait sur la marge extensive (baisse de la probabilité d’emploi), mais également sur la marge intensive (baisse du temps de travail). En France à notre connaissance, une étude s’est intéressée aux effets des prestations d’invalidité, en l’occurrence l’AAH, sur la situation d’emploi des bénéficiaires. Elle aboutit aux mêmes conclusions en se focalisant sur les jeunes peu qualifiés (Chareyron et coll., 2022renvoi vers).
Enfin, cet effet négatif sur l’emploi concernerait davantage ceux qui sont davantage à la frontière entre l’emploi et le non-emploi, à savoir les femmes, les jeunes, les peu qualifiés et les personnes ayant un handicap léger/modéré (par exemple : Hanel, 2012renvoi vers ; Maestas et coll., 2013renvoi vers ; French et Song, 2014renvoi vers ; Müller et Boes, 2020renvoi vers).
Il ne faut pour autant pas négliger l’importance de telles aides financières destinées aux personnes en situation de handicap. L’étude française menée par Espagnacq et coll. (2023renvoi vers) montre que pour les personnes souffrant d’une affection de longue durée, plus précisément de scléroses en plaques, les revenus de remplacement qu’ils perçoivent leur permettent en partie de compenser la perte de revenu qu’entraîne cette maladie (elle montre également que l’impact sur le long terme de cette maladie sur le taux d’emploi est négatif).

Conclusion et recommandations

Même si, en France, la littérature économique sur le handicap est croissante depuis quelques années, plusieurs domaines restent néanmoins non explorés ou trop peu, à la différence de ce que l’on peut observer dans d’autres pays, notamment aux États-Unis.
Tout d’abord, les études françaises devraient chercher à analyser les conséquences d’un handicap survenu spécifiquement durant l’enfance. Il est en effet important de mieux connaître les conséquences en France d’un handicap survenu tôt dans la vie, non seulement sur les performances scolaires des enfants, mais également leurs performances sur le marché du travail à l’âge adulte. En outre, alors que plusieurs travaux se sont intéressés à l’aide informelle apportée aux personnes âgées, il n’en existe pas concernant celle apportée par les parents à leur enfant en situation de handicap. Or, les coûts de cette aide, plus particulièrement indirects, sont susceptibles d’être plus importants, avec notamment des effets plus négatifs sur l’offre de travail des parents. Il serait donc judicieux de développer des recherches évaluant les conséquences économiques sur la famille de la présence d’un enfant en situation de handicap.
Ensuite, il serait intéressant d’analyser les conséquences économiques du handicap en mobilisant davantage de mesures médicales permettant de caractériser précisément le type de handicap dont souffre la personne. Cela permettrait de déterminer dans quelle mesure les coûts du handicap peuvent différer selon son type, ce qui pourrait avoir des implications fortes en termes de politiques de compensation à mettre en œuvre. La mise à disposition récente, à des fins de recherche, de données médico-administratives, comme celles issues du Système National des Données de Santé, peut permettre de telles études. En effet, des possibilités sont désormais offertes aux chercheurs afin que ces données puissent être appariées à d’autres sources selon l’objectif de la recherche visé.
Enfin, les chercheurs souhaitant s’intéresser à l’emploi des personnes en situation de handicap pourraient se pencher sur le secteur protégé, grand absent de la littérature économique française. D’autres thématiques que l’emploi des personnes en situation de handicap pourraient par ailleurs être explorées et portées ainsi sur des handicaps plus sévères (par exemple : questions d’accessibilité, etc.). À ce titre, les conséquences du polyhandicap pour les personnes qui en souffrent et leurs proches aidants mériteraient également une attention particulière.
Outre les données médico-administratives, les données d’enquête peuvent être mobilisées pour développer des recherches dans le champ de l’économie du handicap. Toutefois, bien qu’il existe en France des enquêtes spécifiquement consacrées au handicap, elles ne sont malheureusement pas assez souvent reconduites ou le sont à des intervalles de temps très importants10 . Concernant les enquêtes nationales, le handicap y est peu présent et, quand il l’est, le faible nombre de variables, non unifiées11 d’une enquête à l’autre, empêche généralement d’appréhender la pluralité des situations de handicap (pour ventiler par exemple les résultats selon le type de handicap). Il est donc difficile d’avoir une estimation précise de la population en situation de handicap et de l’étudier. À cette difficulté s’ajoute le fait que, lorsque l’on se base sur une mesure déclarative du handicap, les personnes en situation de handicap peuvent choisir de ne pas signaler leur handicap ou ne pas être conscientes de leur handicap. Par conséquent, si l’on souhaite que le champ du handicap soit davantage exploré en économie, un effort supplémentaire de la part des producteurs de données est nécessaire. La création en 2020 d’un groupe des producteurs de données statistiques sur le handicap et l’autonomie12 donne l’espoir d’une meilleure coordination de ces producteurs.

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