2010


ANALYSE

8-

Prévention de l’initiation à l’injection et transitions vers d’autres modes d’administration

Ce chapitre sur la prévention s’inscrit dans un contexte marqué par une forte prévalence de l’hépatite C parmi les usagers de drogues par injection. Cette forte prévalence est principalement liée au partage du matériel de préparation de l’injection qui constitue un risque majeur de transmission du VHC (Prithwish et coll., 2008renvoi vers). Les données de la littérature indiquent que ces contaminations surviendraient tôt dans les trajectoires des usagers de drogues par injection, probablement dès les premières injections et dans un contexte à haut risque de contamination. Plusieurs études ont en effet montré que les injecteurs récents présentaient des taux de séroconversion pour le VIH et le VHC supérieurs aux usagers de drogues par injection plus expérimentés (Nicolosi et coll., 1992renvoi vers; van Ameijden et coll., 1992renvoi vers; Garfein et coll., 1998renvoi vers). D’autres sources indiquent que les jeunes usagers de drogues par injection adopteraient des pratiques d’injection à risque plus fréquentes que les usagers de drogues par injection plus âgés (Thorpe et coll., 2002renvoi vers; Des Jarlais et coll., 2003renvoi vers).
En France, la problématique de la première injection et des transitions vers d’autres modes d’administration (TMA) a été peu investie. Mais l’évolution des pratiques et des profils d’usagers observée ces dernières années semble indiquer un renouvellement de la problématique de l’injection. Après une période marquée par une diminution des pratiques d’injection, différentes sources de données (Cadet-Taïrou et coll., 2008renvoi vers et 2010renvoi vers) suggèrent un accroissement du recours à l’injection chez certaines populations, notamment l’injection de stimulants qui n’atteignait pas auparavant les proportions observées aujourd’hui. On observe également une diversification des profils d’usagers d’héroïne avec l’apparition de sous-groupes de jeunes consommateurs en situation de précarité (dont certains en errance), des usagers ayant une consommation et/ou des pratiques d’injection occasionnelles, ainsi que des jeunes usagers plus intégrés socialement qui fréquentent le milieu festif (Reynaud-Maurupt et Verchere, 2002renvoi vers). Or, même des passages courts par l’injection peuvent se révéler catastrophiques pour la contamination virale (Roy et coll., 2002renvoi vers).
Plus récemment, une évolution des contextes d’initiation a été observée, notamment en milieu festif avec des circonstances d’initiations à l’injection qualifiées de « sauvages » (mauvaise hygiène, initiation solitaire ou avec des pairs à peine plus expérimentés). D’autres remontées du terrain témoignent de modes d’entrée dans l’injection plus solitaires qu’auparavant, notamment liés à l’accessibilité du Stéribox®. Dans le contexte français marqué par l’arrivée et la diffusion massive des traitements de substitution, il a également été observé des usages du traitement de substitution directement par l’injection et à l’inverse, des modes d’entrée dans l’injection avec la buprénorphine (Guichard et coll., 2004renvoi vers et 2006renvoi vers).
Les outils développés en France dans le cadre de la politique de réduction des risques liés au VIH ont montré une moindre efficacité au regard de la forte contagiosité du VHC, notamment sur la poursuite des pratiques à risque lors des injections et sur leur capacité à atteindre les plus jeunes.
Des études menées antérieurement en lien avec la problématique du VIH soulignaient que la diminution à long terme de l’incidence du VIH parmi les usagers de drogues par injection dépendait de la capacité à limiter le nombre d’injections parmi les usagers de drogues et, en même temps, à réduire les pratiques d’injection à risques parmi les injecteurs récents (moins de 4 ans) (Chitwood et coll., 2001renvoi vers; Kelley et Chitwood, 2004renvoi vers). En pratique, c’est la stratégie de réduction des risques qui a prévalu et qui a, d’une certaine manière, « suffit » à contenir l’épidémie du VIH. Aujourd’hui, compte tenu de la plus forte contagiosité du VHC, il paraît raisonnable de penser que le développement de stratégies visant à réduire la fréquence d’injection, prévenir ou différer son initiation (pour qu’elle se déroule dans des contextes moins risqués) pourrait permettre d’infléchir l’épidémie de l’hépatite C (Lert, 2006renvoi vers).
Dans ce contexte, les stratégies d’actions empruntant aux transitions vers d’autres modes d’administration offrent une piste d’action prometteuse à côté des outils existants. Elles se définissent comme « le passage d’un mode d’administration exclusif ou principal vers un autre mode d’administration ». Pour pouvoir être qualifié de transitoire, ce changement doit se maintenir sur une période d’au moins un mois (Griffiths et coll., 1992renvoi vers; Darke et coll., 1999renvoi vers). Initialement développées en contextes anglo-saxons autour de la problématique du VIH et du risque sexuel, les stratégies d’intervention liées aux transitions vers d’autres modes d’administration sont peu connues en France. Les données de la littérature font état de trajectoires d’usagers principalement marquées par le passage de la voie non injectable à l’injection (Swift et coll., 1997renvoi vers). C’est pourquoi l’accent est mis dans la littérature sur le passage de la voie non injectable à l’injection. L’évolution des trajectoires de consommation est particulièrement complexe, mais globalement, parmi les jeunes polyconsommateurs, c’est dans la période qui se situe entre le début et la fin de l’adolescence que les usages s’intensifient (Maycock, 2005renvoi vers). Compte tenu du contexte français, la présente analyse privilégiera la problématique de l’initiation à l’injection.

Première injection : bilan de la littérature

Avant d’aborder les programmes d’intervention, cette première partie de l’analyse tente de dégager les principaux facteurs de risque d’initiation à l’injection.
Dans la littérature, les études s’intéressent soit à l’initiation à l’injection, soit aux transitions vers l’injection. Il s’agit de deux concepts distincts qu’il importe de clarifier dès à présent. L’initiation renvoie au fait de « s’injecter au moins une première fois ». Comme l’ont souligné Lankenau et Sanders (2004renvoi vers), le fait de s’injecter une première fois n’implique pas l’adoption de cette pratique ou de devenir un injecteur régulier. Alors que la notion de transitions, comme on l’a vu auparavant, implique le passage d’un mode d’administration vers un autre sur une période d’au moins un mois. Il s’agit donc alors d’une pratique plus « installée ». Si les études portant sur la première injection sont relativement nombreuses, peu se sont intéressées au fait de devenir un injecteur régulier.

Principaux facteurs associés à l’initiation à l’injection

Il convient de préciser que la plupart des études rapportées dans cette partie de l’analyse sont de nature épidémiologique, le plus souvent basées sur une méthodologie transversale ou cas-témoin. Ainsi, le protocole des études citées ne sera précisé que lorsqu’il s’agira d’études prospectives. Cette revue ne prétend pas à l’exhaustivité, seuls les principaux facteurs associés à l’injection sont rapportés. Précisons également que l’ordre de présentation de ces facteurs est non seulement indépendant de leur niveau d’importance mais que ces facteurs n’ont de sens que par leur mise en perspective et resitués dans les trajectoires des usagers de drogues par injection.
Parmi des usagers consommateurs, l’âge, plus exactement le jeune âge, est une variable qui semble être associée à l’initiation. Deux études de cohorte (Van Ameijden et Coutinho, 2001renvoi vers; Roy et coll., 2003renvoi vers) dégagent un risque d’initiation qui diminue significativement avec l’avancée en âge. Dans une cohorte new-yorkaise, ce risque n’apparaît que dans les analyses univariées (Neaigus et coll., 2006renvoi vers). Une étude cas-témoins de Floride montre également que l’initiation à l’injection est significativement associée à un plus jeune âge (Sanchez et coll., 2006renvoi vers).
Concernant les profils de consommation, plusieurs études de cohorte ont porté sur la consommation précoce de drogues. De façon générale, elles montrent que les usagers qui débutent leur consommation de façon précoce (<18 ans) présentent plus de risques de s’initier à l’injection, même si des résultats contradictoires sont à noter. L’étude conduite à New-York montre que l’entrée dans la consommation d’héroïne à un âge précoce est fortement associée à l’initiation de l’injection (Neaigus et coll., 2006renvoi vers), alors que les dernières analyses de Roy et coll. (2007arenvoi vers) ne dégagent aucun effet de cette variable avant l’âge de 14 ans. L’étude transversale de Baltimore montre une association entre la précocité de consommation d’alcool, d’inhalants et de cannabis et l’initiation à l’injection (Sherman et coll., 2005renvoi vers) tandis que l’étude thaïlandaise montre que la consommation de substances psychoactives à partir d’un âge plus avancé (>16 ans) est protectrice de l’initiation (Cheng et coll., 2006renvoi vers).
L’examen de l’association entre les différentes dimensions liées à la dépendance et l’initiation à l’injection montre que la polyconsommation (>4 substances), la consommation quotidienne d’alcool (Roy et coll., 2007arenvoi vers) ou d’héroïne (Neaigus et coll., 2006renvoi vers; Kuo et coll., 2007renvoi vers), ainsi que l’usage prolongé ou intensif d’une drogue (Irwin et coll., 1996renvoi vers; Van Ameijden et Coutinho, 2001renvoi vers; Sherman et coll., 2005renvoi vers) sont des facteurs associés à l’initiation à l’injection. Cependant, la seule étude de cohorte à avoir mesuré le niveau de dépendance (severity of dependence scale) ne dégage aucun effet sur l’initiation (Neaigus et coll., 2006renvoi vers). Il convient donc de rester prudent sur la relation entre dépendance ou usage intensif et entrée dans l’injection. En effet, plusieurs études ont montré qu’une proportion importante d’usagers d’héroïne ou d’amphétamines consommaient dès la première fois par injection (Stenbacka, 1990renvoi vers; Neaigus et coll., 1998renvoi vers; Day et coll., 2005renvoi vers). L’étude de Roy et coll. (2003renvoi vers) montre que 31 % des jeunes s’étaient initiés à l’injection avec un produit jamais consommé auparavant. Il a été établi que des usagers d’héroïne consommant par inhalation pouvaient également développer une dépendance sans jamais passer à l’injection (Sotheran et coll., 1999renvoi vers).
L’influence du genre sur les pratiques d’initiation est un domaine d’étude récent qui montre des effets assez contradictoires sur les modes de transition. Les femmes consommatrices d’héroïne sont généralement considérées moins susceptibles de passer à l’injection que leurs homologues masculins (Griffiths et coll., 1994renvoi vers; Strang et coll., 1999renvoi vers). Deux études cas-témoins (Sanchez et coll., 2006renvoi vers) et une transversale (Sherman et coll., 2005renvoi vers) montrent une plus grande probabilité d’initiation parmi les hommes. Cependant, aucune des études longitudinales menées auprès des jeunes n’indique d’association avec le sexe. On observe toutefois que les adolescentes montréalaises ont une probabilité plus forte de s’initier à l’injection lorsque leurs amis injectent, résultat qu’on ne retrouve pas chez les jeunes garçons (Roy et coll., 2003renvoi vers).
Il ressort de certaines études que les jeunes qui s’initient à l’injection sont plus souvent inscrits dans un mode de vie précaire (faibles revenus) ou fortement marginalisé que ceux qui consomment par voie non injectable. La vie dans la rue apparaît fortement associée à l’injection dans trois études longitudinales (Roy et coll., 2003renvoi vers et 2007arenvoi vers; Fisher et coll., 2006renvoi vers; Neaigus et coll., 2006renvoi vers) ainsi que l’appartenance à un réseau social plus ou moins impliqué dans des activités criminelles ou liées à des pratiques d’échanges de relations sexuelles contre de l’argent ou de la drogue (Fisher et coll., 2006renvoi vers; Sanchez et coll., 2006renvoi vers). À l’inverse, les usagers qui présentent un mode de vie plus intégré, notamment par l’emploi, sont moins enclins à s’initier à l’injection (Cheng et coll., 2006renvoi vers), car ils jugent qu’ils ont trop à perdre (maison, travail, conjoint, relations sociales...) (Neaigus et coll., 1998renvoi vers).
Il ressort de la littérature que l’initiation à l’injection est fortement associée à des antécédents carcéraux (Dinwiddie et coll., 1992renvoi vers; De la Fuente et coll., 1997renvoi vers; Cheng et coll., 2006renvoi vers) ou à des démêlés avec la justice (Stenbacka et coll., 1993renvoi vers). Dans l’étude d’Allwright et coll. (2000renvoi vers), 1/5 des détenus irlandais interrogés déclare avoir commencé à s’injecter en prison.
Certains auteurs ont examiné l’association entre les antécédents personnels (comportements déviants, évènements de vie traumatisants) et l’initiation à l’injection de drogues. Ils remarquent que l’existence de conduites de décrochage, d’absentéisme scolaires, de violences à l’école, de fugues ainsi que des démêlés avec la justice survenus tôt dans l’adolescence sont plus fréquents parmi les jeunes qui se sont injectés que parmi les non injecteurs (Abelson et coll., 2006renvoi vers). Parmi les évènements traumatisants analysés, les études montrent que le divorce des parents (Neisen, 1993renvoi vers; Stenbacka et coll., 1993renvoi vers), les violences physiques (Fuller et coll., 2001renvoi vers; Cheng et coll., 2006renvoi vers; Neaigus et coll., 2006renvoi vers), les abus sexuels (Roy et coll., 2003renvoi vers; Ompad et coll., 2005renvoi vers; Cheng et coll., 2006renvoi vers; Roy et coll., 2007arenvoi vers;), et des situations d’institutionnalisation forcée (Martinez et coll., 1998renvoi vers) survenus à un jeune âge sont plus fréquemment rapportés parmi les jeunes injecteurs que parmi les non injecteurs. L’injection serait un moyen de « faire face » à des problèmes émotionnels, à une perception positive du geste ou simplement au fait d’avoir la possibilité de le faire (Kelley et coll., 2004renvoi vers).
Sur l’ensemble des facteurs et des études examiné, les influences du réseau social et du milieu de la drogue ressortent unanimement comme des déterminants de l’initiation à l’injection (Gamella, 1994renvoi vers; Crofts et coll., 1996renvoi vers; Irwin et coll., 1996renvoi vers; Van Ameijden et Coutinho, 2001renvoi vers; Roy et coll., 2002renvoi vers; Roy et coll., 2003renvoi vers; Day et coll., 2005renvoi vers; Novelli et coll., 2005renvoi vers; Sanchez et coll., 2006renvoi vers; Kermode et coll., 2007renvoi vers; Wood, 2007renvoi vers). Plus précisément, avoir un partenaire sexuel qui s’injecte (Van Ameijden et Coutinho, 2001renvoi vers), avoir un ami qui s’injecte (Roy et coll., 2003renvoi vers), consommer en groupe (Kuo et coll., 2007renvoi vers), avoir des amis qui perçoivent positivement l’injection ou fréquenter des injecteurs sont très corrélés à l’initiation.
L’histoire familiale et personnelle de consommation/d’injection de drogues constitue un autre groupe de facteurs auquel les chercheurs se sont intéressés. Les études s’y rapportant montrent des résultats contradictoires. Parmi les études de cohorte, deux études montrent qu’une consommation abusive de psychotropes par les parents est plus fréquemment observée parmi les injecteurs que les non injecteurs (Sherman et coll., 2005renvoi vers). Aucun effet n’est relevé parmi les personnes comptant un membre de la famille injecteur dans la cohorte New Yorkaise (Neaigus et coll., 2006renvoi vers), alors que dans l’étude d’Abelson et coll. (2006renvoi vers), il apparaît qu’avoir un membre de sa famille qui injecte est associé de manière indépendante à un passage précoce à l’injection. Dans les autres études, on observe des fréquences d’initiation à l’injection par un membre de la famille variant de 6 à 21 %. Ces résultats peuvent indiquer que dans un réseau social aussi fermé que le cercle familial, l’implication des membres de la famille dans l’univers de la drogue peut agir de façon contraire (par incitation ou dissuasion) sur le jeune consommateur.
Enfin, certains facteurs socio-environnementaux, dont le marché de la drogue, ont une influence sur les modes de consommation. Plusieurs études écologiques ont documenté comment les variations du marché de la drogue (prix, qualité, forme) pouvaient déterminer les modes de consommation (De la Fuente et coll., 1997renvoi vers). La disponibilité, la qualité ainsi que les variations de coût des produits sur le marché semblent pousser certains usagers à passer à l’injection (Bravo et coll., 2003renvoi vers; Topp et coll., 2003renvoi vers; Kuo et coll., 2007renvoi vers). Parmi les études examinées, deux études de cohorte (Bravo et coll., 2003renvoi vers; Kuo et coll., 2007renvoi vers) montrent que la perception de changements sur le marché relativement au coût, à la disponibilité et à la qualité des produits était la principale raison avancée pour expliquer le passage à l’injection. Cependant, l’influence du marché de la drogue sur les modes d’initiation ou de transitions (initiation à l’injection ou au contraire sortie temporaire ou définitive de l’injection) semble revêtir une forte dimension locale et géographique (Day et coll., 2005renvoi vers).

Contextes et circonstances entourant la première injection

Plusieurs études ont mis en évidence le caractère non programmé de la première injection (Crofts et coll., 1996renvoi vers; Doherty et coll., 2000renvoi vers; Kermode et coll., 2007renvoi vers), résultat qui ne fait pas l’unanimité puisque dans l’étude de Frajzyngier et coll. (2007renvoi vers), 60 % de l’échantillon affirment avoir planifié la première injection. Celle-ci apparaît, le plus souvent, administrée par quelqu’un d’autre, qu’il s’agisse d’un ami proche, d’une connaissance, du partenaire sexuel ou, plus rarement, d’un inconnu (Crofts et coll., 1996renvoi vers; Stillwell et coll., 1999renvoi vers; Diaz et coll., 2002renvoi vers; Roy et coll., 2002renvoi vers; Draus et Carlson, 2006renvoi vers; Kermode et coll., 2007renvoi vers; Kerr et coll., 2007renvoi vers). Parmi les jeunes de la rue de Montréal (Roy et coll., 2002renvoi vers), la première injection s’est déroulée par ordre de fréquence : dans un lieu public, chez un ami, à leur domicile ou celui de leurs parents ou encore chez une connaissance.
La première injection est un évènement qui s’inscrit dans le social et les sociabilités, qui implique le plus souvent d’autres personnes et se pratique rarement dans l’isolement. L’importance du rôle joué par le réseau social et le milieu de la drogue sur l’entrée dans l’injection et au cours des processus d’initiation a fait l’objet de plusieurs analyses socio-anthropologiques. D’une part, il a été montré que le comportement des usagers de drogues actuellement injecteurs pouvait inciter de façon plus ou moins directe le jeune consommateur non injecteur (Gamella, 1994renvoi vers). D’autre part, dans l’étude de Roy et coll. (2007brenvoi vers), les participants mentionnent différentes formes d’influence du réseau relationnel (pairs, famille) : être en contact et témoin régulier de scènes d’injection, se faire vanter les plaisirs et avantages de l’injection, se faire montrer comment faire ou être approvisionné en produit. Une autre influence plus diffuse est liée au milieu de la rue et à l’omniprésence des produits et de l’injection de produits dans l’entourage, ainsi qu’à une offre importante de produits dans certains quartiers. Stilwell et coll. (1999renvoi vers) ont montré que dans un tel environnement et au contact répété d’usagers de drogues par injection, il pouvait se produire un processus de désensibilisation/normalisation de l’injection parmi des jeunes consommateurs initialement réticents à s’injecter, processus pouvant aboutir au fil du temps à un intérêt et une curiosité accrus pour cette pratique. L’injection semble par ailleurs mettre en jeu une problématique identitaire forte, socialement valorisée dans certaines micro-cultures de la drogue (Roy et coll., 2007brenvoi vers; Girard et coll., 2009renvoi vers).
Si les membres du réseau social apparaissent fortement impliqués dans les rituels d’initiation, les jeunes « initiés » se révèlent eux-mêmes souvent très actifs (Des Jarlais et coll., 1992renvoi vers). Le type de produit initialement injecté dépend très largement du réseau social fréquenté et de la disponibilité des produits sur le marché (Parker et Egginton, 2002renvoi vers).
Le plaisir, la quête d’un effet plus important et la curiosité de goûter au « flash » (Stenbacka, 1990renvoi vers; Crofts et coll., 1996renvoi vers; Roy et coll., 2002renvoi vers; Giddings et coll., 2003renvoi vers; Draus et Carlson, 2006renvoi vers; Witteveen et coll., 2006renvoi vers; Kermode et coll., 2007renvoi vers), comptent parmi les raisons les plus fréquemment rapportées par les usagers eux-mêmes pour s’initier à l’injection. L’avantage économique de l’injection est également avancé quand la dépendance à l’héroïne grandit et que ce mode d’administration est perçu plus coût-efficace (Giddings et coll., 2003renvoi vers; Sherman et coll., 2005renvoi vers; Draus et Carlson, 2006renvoi vers) et/ou en lien avec les fluctuations du marché (voir précédemment).
Parce que souvent non planifiée et pratiquée par quelqu’un d’autre, l’injection est à haut risque de contamination pour le jeune initié (partage de la seringue et du matériel de préparation) peu au fait de la pratique même d’injection et des risques encourus (infectieux notamment) (Doherty et coll., 2000renvoi vers; Varescon et coll., 2000renvoi vers; Frajzyngier et coll., 2007renvoi vers). L’initiation à l’injection constitue donc une période sensible pour l’injecteur en devenir car la façon dont une personne est initiée tend à influencer sa pratique et sa prise de risque ultérieures (Crofts et coll., 1996renvoi vers).
La variabilité des méthodologies d’enquête, des populations étudiées ainsi que l’hétérogénéité des définitions de variables et des modes de catégorisation des risques, limitent la comparaison des données tirées de cette analyse de la littérature.

Discussion sur le bilan de la littérature : un phénomène complexe aux dimensions multiples

Au terme de cette revue, l’injection apparaît comme un phénomène complexe aux dimensions multiples encore mal connues. Il existe très peu d’études prospectives, notamment sur les transitions vers l’injection (« devenir un injecteur régulier »), ce qui constitue un frein à la compréhension de ce phénomène. Les « transitions » d’un mode d’administration à un autre, notamment vers l’injection, ne se produisent pas au cours d’un évènement isolé (un premier shoot ne fait pas basculer vers un mode d’administration exclusif par injection). Une fois l’injection expérimentée, l’usager peut retourner à un mode d’administration par sniff. Dans l’étude de Des Jarlais et coll. (1992renvoi vers), on observe que parmi les usagers ayant déjà expérimenté l’injection, 12 % seulement poursuivaient dans une pratique régulière. Les processus de transition vers un mode d’administration exclusivement par voie intraveineuse sont longs à se mettre en place, ils peuvent prendre des mois voire des années. La plupart des expérimentateurs de l’injection ne deviendront jamais « confirmés », en revanche, l’expérience de l’injection augmente les probabilités d’injection ultérieure.
L’analyse des facteurs liés à l’initiation à l’injection a montré des résultats souvent contradictoires, à l’exception du rôle incontestable du réseau social et du milieu de la drogue. Ainsi, les éléments dégagés ne devraient pas être considérés de façon isolée. Il est non seulement difficile de distinguer l’importance de chacun, mais risqué de le faire sans compromettre la compréhension de ce phénomène d’initiation. Dans une optique d’intervention, il conviendrait plutôt de considérer ces facteurs multiples comme agissant dans une suite d’interactions et de conditions pour se réaliser sous la forme de trajectoires. Comme le souligne Stellamanns (2009renvoi vers), un des résultats les plus intéressants de cette analyse est sans doute celui qui montre que la plupart des facteurs associés à l’initiation (intensité de l’usage de drogue, histoire d’incarcération, vie dans la rue, réseau social composé d’injecteurs, et existence d’abus au cours de l’enfance) sont également des marqueurs de la précocité de l’initiation.
La très grande majorité des études recensées a porté sur des publics en situation de relative précarité sociale, limitant ainsi notre compréhension d’un phénomène à l’Ĺ“uvre dans l’ensemble de la société, comme l’attestent les données observationnelles, et mettant probablement en jeu des mécanismes plus nuancés. Il n’existe pas de données étayées en France relatives à cette problématique de l’initiation et à sa déclinaison auprès des différents sous-groupes sociaux de jeunes consommateurs, que l’on a pu voir émerger au cours des dernières années.

Programmes d’intervention liés aux transitions vers d’autres modes d’administration

La seconde partie s’attarde sur l’analyse de l’efficacité des programmes d’intervention liés aux transitions vers d’autres modes d’administration.

Stratégies et types d’interventions

Les programmes d’intervention examinés dans le cadre de cette revue peuvent être regroupés autour de deux stratégies (Hunt et coll., 1999renvoi vers).
La première vise à prévenir l’initiation à l’injection parmi les non injecteurs soit par des interventions auprès des non injecteurs pour limiter les risques de passage à l’injection, soit par des actions auprès des injecteurs actifs (initiateurs potentiels) pour tenter de réduire leur influence sur les non injecteurs.
La seconde vise à favoriser la diminution ou l’arrêt de l’injection parmi les injecteurs actifs. Mais dans les faits et dans un contexte épidémique, c’est plutôt la voie de la réduction des risques qui est privilégiée, selon deux modalités : la promotion des techniques et procédures d’injection à moindres risques ; la promotion de modes d’administration alternatifs à l’injection jugés à moindres risques.
Par souci de lisibilité, les interventions recensées dans ce chapitre ont été regroupées en deux grandes catégories d’intervention : information, éducation et communication (IEC) et interventions brèves (IB).

Information, éducation et communication (IEC)

En 1998, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) présentait cette catégorie d’intervention comme une composante essentielle de la stratégie de lutte contre le VIH parmi les usagers de drogues par injection. Les principes de l’IEC ont également été appliqués à un ensemble de problématiques de réduction des risques associés aux usages de drogues. L’IEC comprend un éventail d’approches et d’activités dont les plus connues, diffusées et utilisées sont probablement les supports papier (brochures, affiches, flyers...). Elles comprennent également le dépistage/counselling des infections et une palette étendue d’outils, d’approches et de techniques comme les vidéos, les groupes de paroles, les plates-formes web, et autres matériels didactiques. Ces approches, techniques et outils d’IEC sont souvent produits par les structures de première ligne elles-mêmes (Hunt et coll., 2003renvoi vers) et utilisés dans le cadre ou en complément d’autres programmes, comme les PES, les TSO ou les interventions de santé communautaire.
Dans cette catégorie d’intervention, l’utilisation des médias est fréquente allant des grandes campagnes médiatiques à caractère souvent très normatif et ciblant la population générale jusqu’à des interventions de proximité plus ciblées (comme par exemple la campagne de prévention du passage à l’injection ciblée décrite plus loin) incorporant ou non une stratégie de marketing social. Ces approches se déclinent également à un niveau plus individuel avec pour objectif le développement des compétences psychosociales.
Entre autres objectifs, l’IEC vise à informer et orienter les usagers vers les services de santé appropriés (par exemple : inciter au dépistage, favoriser la mise sous traitement...), informer et conseiller les usagers pour réduire la prise de risques liée à la consommation de drogues, soutenir la qualité des pratiques préventives, éducatives et de réduction des risques des professionnels de santé, agir sur les normes culturelles.

Interventions brèves (IB)

Face aux limites des outils existants (distribution de matériel stérile et IEC) pour lutter contre l’épidémie du VHC, les experts s’accordent sur l’importance de mettre en place des aides complémentaires incluant des interventions individuelles brèves de type comportemental (Hunt et coll., 2003renvoi vers). De plus en plus reconnues et pratiquées, les interventions brèves se sont d’abord développées autour des pathologies mentales pour s’étendre à différentes problématiques de santé dont les addictions (surtout celles liées à l’alcool) puis la réduction des risques. Il est donc important de rappeler dès à présent que ce type de démarche n’a pas pour objectif de prévenir l’expérimentation ou l’usage de substances psychoactives, mais qu’il peut s’avérer pertinent pour prévenir le développement d’une dépendance ou simplement limiter les risques liés aux usages, notamment les risques infectieux (VIH/VHC). Fondées sur une démarche scientifique expérimentale, ces interventions s’attachent à une évaluation rigoureuse de leurs méthodes et de leurs résultats. Elles sont réputées pour leur bon rapport coût-efficacité et peuvent, a priori, être conduites par des intervenants non spécialisés. Elles se démarquent également en ce qu’elles favorisent le maintien des changements de comportements dans le temps. Leurs indications sont très vastes, et offrent aux professionnels de la santé des outils efficaces et validés. En plus des techniques qu’elles emploient, elles ont en commun un support théorique tiré des théories de l’apprentissage social et de modèles plus éducatifs de traitement de l’information. Elles consistent à confronter progressivement les personnes à la problématique qui les amène, à renforcer la prise de conscience (des risques par exemple), puis à travailler les systèmes de pensées et les émotions qui freinent l’adoption d’un nouveau comportement ou la motivation à s’y engager pour in fine appréhender la situation sous un jour plus favorable. Les techniques employées sont multiples et variables en fonction de l’objectif poursuivi mais chaque intervention suit normalement un enchaînement ordonné d’actions menées en individuel, en vue d’acquérir, d’organiser et de mettre en application un savoir dans un contexte donné.

Analyse des résultats des interventions liées aux TMA

Information, éducation et communication (IEC)

Selon la recension systématique de la littérature internationale menée par l’Institut national de santé publique du Québec en 2007 (Noël et coll., 2007renvoi vers), il existe 34 publications portant sur les résultats d’interventions ciblant la prévention du VIH et du VHC chez les usagers de drogues par injection. Plus des deux tiers des études proviennent des États-Unis. L’IEC et le dépistage/counselling des infections (généralement réalisé par des infirmières) constituent les principales stratégies de réduction des risques infectieux qui ont cours aujourd’hui et représentent plus de la moitié des interventions évaluées. En dépit de leur étendue, il existe peu de travaux de recherche sur leur efficacité. Ceci est probablement lié au fait que ces stratégies sont souvent intégrées dans des programmes plus étendus dont l’évaluation ne permet pas de dégager leur effet propre (Coyle et coll., 1998renvoi vers). Il existe néanmoins un certain consensus dans la littérature pour dire que la seule délivrance d’informations n’est pas suffisante pour faire évoluer les comportements (Schaps et coll., 1981renvoi vers; Sherr, 1990renvoi vers; Des Jarlais et coll., 1992renvoi vers; Treloar et Abelson, 2005renvoi vers; Roy et coll., 2007brenvoi vers; Treloar et coll., 2008renvoi vers).
Treloar et coll. (2008renvoi vers) soulignent un effet de lassitude et de saturation des usagers de drogues par injection autour des messages infectieux, effet auquel viennent s’ajouter de nombreuses croyances, désinformations, confusions, mythes autour de l’injection. Précédemment, l’auteur rapportait déjà des phénomènes de « résistance » des usagers de drogues par injection aux messages de cette nature (Treloar et Abelson, 2005renvoi vers). Dans cette dernière étude qui examinait les sources et les modalités d’échanges d’information (sur les risques infectieux et les pratiques d’injection à moindres risques) des usagers de drogues par injection, les résultats indiquaient que si 90 % d’entre eux disaient avoir reçu de l’information via des sources formelles (brochures, programmes d’échanges de seringues et structures pour les jeunes) le niveau de connaissances (exploré qualitativement) des pratiques d’injection à moindre risque se révélait très faible. Les auteurs observent en outre parmi les usagers au fait des « bonnes pratiques », que celles-ci sont peu appliquées, celles-ci n’étant pas prioritaires dans le processus d’injection et pas appliquées en cas d’état de manque. Il convient de noter que les usagers n’ont souvent pas d’explication à donner sur le fait de ne pas appliquer les principes d’une injection à risques réduits (« C’est comme ça »). Sur la base d’un enregistrement vidéo des pratiques d’injection, les auteurs observent par ailleurs des routines tellement intégrées/ritualisées par les usagers que ces derniers sont convaincus de faire certains gestes alors que la vidéo montre qu’ils ne les font pas. Lors de l’initiation, peu d’usagers rapportent avoir cherché à obtenir (ou à avoir reçu) des informations sur les risques. Ceux qui ont tenté de s’informer disent s’être tournés vers leurs pairs et avoir reçu une information de « sens commun », couvrant principalement des aspects techniques (zones d’injection, effets...), le risque infectieux n’ayant quasiment jamais été abordé.
Dans un autre ordre d’idées, Strauss et coll. (2007renvoi vers) constatent que si la majorité des centres de soins pour usagers de drogues délivrent une information/conseil sur le VHC sous différentes formes (groupes de discussion, vidéos, brochures, sessions individuelles), cette éducation se révèle souvent inadéquate, hétérogène, touchant peu d’usagers et finalement de faible portée. Les auteurs concluent que si les centres de soins sont bien placés pour délivrer cette information, les intervenants ont souvent des connaissances limitées sur le virus et les pratiques des usagers et s’avèrent peu équipés pour communiquer efficacement avec les usagers de drogues sur ces questions.
En 2003renvoi vers, Van Beek faisait état de la poursuite de pratiques à risque même dans des environnements contrôlés comme les programmes supervisés d’injection qui rassemblent pourtant toutes les conditions d’hygiène et de mise à disposition d’informations sur les risques liés à l’injection. Plus récemment, une étude cas-témoin montre que si la distribution/mise à disposition de matériel (en l’occurrence du coton alcoolisé) n’est pas accompagnée de consignes et de conseils pratiques et répétés sur l’utilisation dudit matériel, alors elle ne suffit pas à elle seule à garantir des pratiques à moindre risque ; le matériel se révélant souvent utilisé de façon inappropriée (Grau et coll., 2009renvoi vers).
Face à toutes ces limites dans la transmission d’informations sur les risques liés à l’injection, nombre d’auteurs recommandent d’explorer des interventions alternatives à l’apport d’information pour renforcer la prise de conscience des risques et le changement de comportement. Pour contrer l’effet de lassitude des usagers, l’abord de la pratique d’injection à moindres risques sous l’angle des dommages causés aux veines et de l’hygiène plutôt que par le risque infectieux pourrait être une piste intéressante pour susciter l’intérêt des usagers (Treloar et coll., 2008renvoi vers).
Les programmes d’éducation par les pairs sont de plus en plus reconnus pour leur efficacité à faire évoluer les comportements, notamment ceux liés à l’usage de drogues (Aitken et coll., 2002renvoi vers; Purcell et coll., 2007renvoi vers; Treloar et coll., 2008renvoi vers). Considéré comme une source « naturelle » d’information, le groupe de pairs peut se révéler un relais essentiel auprès des jeunes initiés qui ne sont pas encore en contact avec les sources/structures formelles de réduction des risques ou auprès des usagers de drogues par injection qui se sentent peu concernés et dont on sait qu’ils sont portés à faire confiance à leurs pairs sur ces questions sensibles. Les quelques évaluations de ce type d’interventions citées plus haut montrent que le conseil par les pairs est efficace pour réduire les comportements à risques (connaissances des risques, réduction du partage de seringues, usage d’une seringue neuve, meilleure hygiène/lavage de mains significativement plus élevés) sous réserve d’une formation et d’une supervision rigoureuses des pairs relais.
Face aux limites des messages informatifs, une autre piste d’éducation aux risques liés à l’injection s’appuyant sur des enregistrements vidéo a fait l’objet d’une publication (Treloar et coll., 2008renvoi vers). Utilisée avec des usagers fréquentant un centre d’injection supervisé (CIS), l’intervention a consisté à filmer l’usager en train de s’injecter, puis à analyser et à discuter sa pratique sur la base de l’enregistrement. D’après les auteurs, cette technique constitue une voie particulièrement intéressante pour accéder aux « vraies » pratiques et travailler autour des « résistances » des usagers dans le cadre d’un accompagnement individualisé. Les discussions autour des vidéos témoignent d’un intérêt marqué des usagers pour ce feed-back.
Toujours dans cette catégorie IEC, on trouve également les interventions ciblées de proximité incorporant le plus souvent une stratégie de marketing social (affiches, flyers, guidelines...) et faisant la promotion de modes d’administration alternatifs jugés à moindres risques. Rarement publiées ou évaluées, ces interventions témoignent néanmoins d’une bonne acceptabilité/adhésion auprès des usagers. On citera pour exemple les campagnes anglaises, non évaluées à ce jour, « Up your Bum » (Healthy Option Team) faisant la promotion d’une administration de drogues par la voie anale ou « The Chasing campaign » (Exchange Supplies/LifeLine) qui s’est appuyée sur les principes de l’entretien motivationnel (voir plus bas) pour promouvoir la voie inhalée. En lien avec cette campagne de promotion de la voie inhalée, il convient de rapporter les résultats de l’expérience anglaise de distribution de feuilles de papier en aluminium dans le cadre de programmes d’échange de seringues (Pizzey et Hunt, 2008renvoi vers). Les résultats indiquent que sur les 320 usagers fréquentant le programme d’échange de seringues, 54 % ont pris le pack de feuilles quand il était disponible. Le programme a enregistré une augmentation de 32 % de sa fréquentation au cours des dix mois de campagne, dont 32 nouveaux clients non injecteurs (sans contact préalable avec des structures de réduction des risques), venus spécialement pour obtenir ces feuilles. Parmi les 48 nouveaux injecteurs recensés, ils étaient 46 % à déclarer avoir inhalé dans le mois précédent l’introduction des packs. Au suivi, ils sont plus de 85 % à déclarer une consommation par inhalation à des occasions où ils auraient autrement injecté. En outre, la très grande majorité des répondants s’est montrée favorable à la diversification des services du programme d’échange de seringues et ont exprimé une grande satisfaction concernant la qualité des feuilles d’aluminium proposées. D’après les auteurs, la mise en place de ce type de stratégie est facilitée dans des contextes où préexiste une culture de l’héroïne inhalée (l’inhalation est une technique difficile à acquérir et dont les effets sont moins intenses que par voie injectable) ; elle peut être utilisée dans certains pays (Espagne, Pays-Bas)  en vue de renforcer l’évolution « naturelle » (sous l’effet des fluctuations du marché) des modes d’administration de l’injection vers l’inhalation. La promotion de ce type de transition nécessite d’accompagner l’usager et différents outils de soutien (par exemple, les guidelines).
Autour des stratégies IEC, citons la campagne de prévention du passage à l’injection de drogues parmi les jeunes de la rue non injecteurs de Montréal (Roy et coll., 2007brenvoi vers). Cette campagne conduite pour la première fois à Montréal en 2005 visait à renforcer les résistances déjà présentes chez les jeunes de la rue vis-à-vis de l’injection. Elle reposait sur une stratégie d’affichage ciblé de posters conçus avec le concours des jeunes de la rue eux-mêmes. Les objectifs de l’évaluation, menée à partir d’une série d’entretiens semi-structurés, consistaient à mesurer la capacité de la campagne à atteindre les jeunes de la rue qui ne s’étaient jamais injectés, et à comprendre les effets de la campagne auprès de ce public. Les résultats indiquent un haut degré de visibilité et de compréhension de la campagne auprès du public cible. La majorité des jeunes ont été touchés par les messages et ont déclaré que la campagne les avait amenés à s’interroger sur leur pratique et leurs représentations de l’injection. Certains, surtout les usagers de drogues par injection, ont parfois trouvé les messages, envahissants, négatifs ou choquants. Aucun effet pervers n’a été noté (par exemple, susciter l’envie d’essayer). Les auteurs concluent que si ce type de campagne peut contribuer à influencer les attitudes et les perceptions, il doit nécessairement s’accompagner d’interventions plus spécifiques, comme les interventions brèves.

Interventions brèves (IB)

Si l’efficacité des interventions brèves est aujourd’hui largement reconnue pour faire évoluer les comportements liés à l’usage de différentes substances psychoactives (Tucker et coll., 2004renvoi vers), notamment l’alcool (Kaner et coll., 2007renvoi vers), elles restent peu développées dans leur application à la réduction des risques infectieux, notamment en lien avec la problématique de l’injection de drogues et du VHC. Ceci est probablement à mettre en relation avec une préoccupation relativement récente pour ce sujet. Il existe peu d’études sur l’efficacité de ce type d’intervention auprès des usagers de drogues par injection (Hunt et coll., 2003renvoi vers; Noël et coll., 2007renvoi vers; Stellamanns, 2009renvoi vers). En effet, dans la catégorie des interventions brèves, moins d’une vingtaine d’études évaluées reposant sur les principes théoriques des interventions comportementales menées individuellement ou en atelier, ont été identifiées. La très grande majorité de ces études ont été développées autour de la problématique du VIH et des risques sexuels ou associés à l’injection. Des résultats positifs se traduisant en modification de comportements ont été observés dans la très grande majorité de ces projets. Plus précisément, les études montrent des résultats encourageants en termes de réduction du nombre d’initiations, de réduction du nombre d’injections (Des Jarlais et coll., 1992renvoi vers; Hunt et coll., 1998renvoi vers) et de diminution des pratiques à risque lors de la préparation de l’injection (Latka et coll., 2008renvoi vers). D’autres projets évalués ayant intégré une approche par les pairs ont également rapporté des résultats positifs (Aitken et coll., 2002renvoi vers; Côté et coll., 2006renvoi vers).

Rompre le cycle de l’injection

Le programme Break the cycle (BTC) constitue sans doute le programme d’intervention sur les TMA le plus connu et le plus reconnu au niveau international, malgré le peu de données d’évaluation disponibles. Sa spécificité est de se focaliser sur les aspects sociaux de l’injection de produits, notamment au cours de la période d’initiation. Cet angle d’intervention est largement soutenu par la présente revue de littérature qui montre que le réseau social compte parmi les facteurs les plus influents de ce type de transition. D’abord développé dans un objectif de prévention du passage à l’injection, BTC est un programme qui s’adresse aux usagers de drogues par injection avec pour objectif de les encourager à travailler auprès de leurs pairs non injecteurs en vue de les dissuader de commencer à s’injecter. L’intervention est principalement fondée sur les aspects sociaux de l’injection, à savoir que :
• la plupart des personnes qui commencent à consommer des drogues ne pensent pas qu’elles s’injecteront un jour ;
• l’apprentissage de l’injection se produit en général au contact d’usagers qui injectent et qui en parlent ;
• les jeunes initiés demandent en général aux injecteurs de leur faire le premier shoot ;
• les injecteurs plus expérimentés se révèlent souvent réticents, mais démunis face à ce type de requêtes, ils sont peu préparés à y répondre.
À partir de ces constats, l’intervention BTC se fixe pour objectifs :
• d’encourager les injecteurs plus expérimentés à réfléchir à leur attitude par rapport à l’injection ;
• d’accroître chez eux la conscience des actions pouvant inciter les autres à commencer ;
• d’augmenter la capacité à résister aux demandes d’initiation ;
• et s’ils sont amenés à initier quelqu’un, de le faire de façon à limiter les risques (infectieux, notamment) liés à la pratique même, et à informer sur les dommages éventuels (physiques, infectieux, moraux, psychologiques, sociaux, légaux...) de l’injection.
Le programme BTC a d’abord été développé dans le cadre d’une intervention structurée en face à face (Hunt et coll., 1998renvoi vers). L’évaluation du programme à trois mois (base déclarative) montre que l’intervention a permis de modifier les attitudes et comportements susceptibles d’influencer le non injecteur (réduction des contacts avec les non injecteurs, diminution du nombre d’injections devant un non injecteur, adoption d’un discours plus dissuasif), et de réduire le nombre de demandes d’initiation, ainsi que le nombre d’initiations. Malgré les limites du protocole d’évaluation – taille réduite de l’échantillon (86 sujets), absence de groupe contrôle, comportements déclarés – pour juger de son efficacité, ce programme connaît un grand succès parce qu’il s’agit d’une intervention brève pouvant se dérouler en moins d’une heure, peu coûteuse (à l’exception de la formation du personnel), qui permet d’accéder facilement aux usagers, et qui est aisément modulable, notamment en vue d’une approche par les pairs (Hunt et coll., 2003renvoi vers). Autre point non négligeable, BTC bénéficie d’une forte adhésion et acceptabilité auprès des usagers de drogues par injection.
Le programme BTC est aujourd’hui adapté et implanté dans plusieurs régions d’Asie centrale (Ouzbékistan, Kirghizstan) en complément d’une campagne TV. Les premiers résultats montrent dans les deux régions une importante réduction du nombre d’initiations des usagers de drogues par injection (Hunt, 2010renvoi vers). Au Vietnam, le programme a été adapté auprès d’un public de travailleurs sexuels. Aux États-Unis, BTC a été adapté pour des sessions de groupe conduites par des intervenants en réduction des risques et est actuellement en cours de validation au Centre of Disease Control. Une adaptation de BTC est également en cours à Toronto (Canada). Plus récemment en Australie, BTC a été adapté au contexte local et mis en Ĺ“uvre dans le cadre d’un centre d’injection supervisé. Aucune donnée d’évaluation n’est disponible. En Australie, un article relatant l’intégration de ce type de programme à un PES souligne qu’un ensemble de précautions est à prendre, surtout autour de la stigmatisation des injecteurs, pour qu’une activité de prévention de l’injection trouve sa place au sein de ce type de structure (Brener et coll., 2010renvoi vers).

Entretien motivationnel

L’entretien motivationnel figure parmi les interventions brèves et constitue aujourd’hui une piste d’intervention des plus prometteuses mais encore à l’étude dans son application aux pratiques d’injection à risques. Dérivé des théories humanistes et centré sur l’individu, l’entretien motivationnel est une technique d’intervention qui vise à augmenter la motivation intrinsèque au changement (Miller et Rollnick, 2002renvoi vers). Les données de la littérature témoignent d’une efficacité significative de l’entretien motivationnel (tant au niveau statistique que clinique) au regard de problèmes de dépendance liés aux usages de cocaïne et d’héroïne (Bernstein, 2005renvoi vers), d’alcool (Kaner et coll., 2007renvoi vers), et d’autres problématiques de santé (Rubak et coll., 2005renvoi vers). L’approche motivationnelle, qui se joue au cours d’une seule rencontre d’une durée de 30 à 60 minutes, est particulièrement recommandée pour des publics difficiles à mobiliser. D’autre part, les résultats des études évaluatives sur l’entretien motivationnel montrent que ce type d’intervention peut être mené efficacement, du moins en théorie, non seulement par des psychologues, mais aussi par des intervenants en toxicomanie et autres professionnels de santé (par exemple des infirmières). L’entretien motivationnel semble donc une approche particulièrement intéressante dans le contexte d’intervention des Caarud pour une population fréquentant irrégulièrement les programmes et peu intéressée pour s’engager dans un suivi à long terme. Cependant, des observations récentes suggèrent que la conduite de l’entretien motivationnel respectant rigoureusement les principes motivationnels requière une solide formation et expérience des intervenants (Chanut, 2010renvoi vers).
Malgré l’intérêt et l’utilité démontrés de cette approche dans le domaine de la toxicomanie, seulement deux études randomisées et utilisant rigoureusement les principes de l’entretien motivationnel ont été publiées sur l’efficacité de cette approche en regard de la réduction des pratiques d’injection à risque de transmission du VIH ou du VHC chez les usagers de drogues par injection (Baker et coll., 1993renvoi vers et 1994renvoi vers). Seule la seconde étude a pu montrer une réduction significative des pratiques d’injection à risque, changement qui s’est maintenu à six mois. Les auteurs de la première étude interprètent l’absence de différences de résultats par le fait que la population étudiée était composée d’individus substitués et stabilisés dans leur traitement à la méthadone, engagés dans une démarche de soin et en conséquence, déjà motivés à cesser l’injection de drogues.
Un essai randomisé est en cours à Montréal. Il a pour but d’étudier les effets d’une intervention brève, strictement fondée sur les principes de l’entretien motivationnel, et ciblant les pratiques d’injection à risque des personnes qui s’injectent de la cocaïne. Cet essai comparera l’efficacité de l’entretien motivationnel versus une séance d’information « classique » sur les risques liés à l’injection.

Discussion sur les programmes d’intervention

Cette analyse montre que les stratégies d’IEC sont très largement utilisées pour réduire les risques associés aux usages de drogues par injection. Les évaluations d’implantation et de processus suggèrent une certaine efficacité, en tout cas en complémentarité d’interventions incluant des stratégies individuelles et environnementales, distales et proximales (Roy, 2010renvoi vers). Néanmoins et compte tenu de leur diffusion, il est important de comprendre les résultats produits et les mécanismes d’intervention impliqués dans ces résultats.
Concernant les interventions brèves, il existe peu d’études sur leur efficacité auprès des usagers de drogues par injection. L’analyse montre néanmoins des résultats encourageants, suggérant qu’il est possible de réduire les pratiques d’injection à risque et de réduire le nombre d’initiations par des interventions psychosociales/comportementales auprès des usagers de drogues par injection. D’un point de vue pratique et méthodologique, les interventions qui nécessitent de mobiliser les usagers sur 4 à 6 séances sont plus difficiles à mettre en place et à évaluer.
Nous avons vu que les études publiées présentent une grande diversité d’approches. Elles ont été réalisées auprès d’usagers de drogues par injection, issus de sous-populations et de milieux extrêmement variés (femmes enceintes, afro-américains, personnes détenues ou sous traitement de substitution...), ce qui rend les résultats difficiles à généraliser. Certaines de ces interventions ont été menées auprès d’usagers de drogues par injection, relativement stables, captifs et/ou motivés, par exemple ceux en traitement de substitution aux opiacés ou en prison, favorisant ainsi une certaine assiduité. Dans ce contexte et dans une optique de travail avec les usagers les plus vulnérables et peu en contact avec les structures, les interventions brèves basées sur une seule rencontre semblent à privilégier. En outre, les processus par lesquels les interventions (en particulier les interventions brèves telles que l’entretien motivationnel) permettent d’obtenir des résultats positifs restent peu connus (Vasilali et coll., 2006renvoi vers). C’est pourquoi il est recommandé de combiner des volets qualitatifs et quantitatifs aux méthodologies évaluatives des programmes en direction des usagers de drogues (Stahler et Cohen, 2000renvoi vers).
Dans une optique de mise en place d’interventions autour des transitions vers d’autres modes d’administration, différentes réflexions sont à mener sur : les modes d’accès et de mobilisation des publics visés (souvent cachés), les connaissances des processus et des contextes d’initiation à l’injection, les cultures et pratiques locales autour des modes de consommation, les enjeux de mixité des publics (injecteurs et non injecteurs) et l’exposition sociale aux risques, les opportunités d’intégration dans les services existants, les priorités politiques, la consultation et la participation des usagers de drogues par injection et des associations de réduction des risques.
En conclusion, malgré un intérêt marqué dans la littérature pour les stratégies d’action en faveur des transitions vers d’autres modes d’administration, celles-ci demeurent encore peu développées. Les deux tiers des expérimentations recensées ont été menés aux États-Unis, aucune n’a été relevée en France. La complexité méthodologique inhérente à la mise en place de ce type d’intervention en contexte de réduction des risques est réelle, suscitant parfois ambivalence et réticences. L’évaluation est rendue d’autant plus difficile (dans les faits) que les interventions recensées combinent souvent différents outils et approches.
Au regard de la prévention et de la réduction des risques liés au VHC, la littérature dégage différentes caractéristiques communes aux interventions efficaces auprès des usagers de drogues par injection : les approches interdisciplinaires ou misant sur la complémentarité, le recours à des modèles théoriques pour structurer la démarche des interventions individuelles en relation d’aide ou de thérapie. Pour être efficaces, et par opposition aux approches top-down de type IEC, les approches, messages et outils se doivent d’être dynamiques, adaptés aux circonstances et aux pratiques individuelles, et prendre en compte les contextes sociaux et les modes de vie des usagers de drogues par injection.
Dans le contexte épidémique actuel, les stratégies d’actions des transitions vers d’autres modes d’administration – les interventions brèves en particulier – sont des programmes prometteurs dans le cadre d’une approche gradualiste et pragmatique de réduction des risques prenant en compte les besoins et les difficultés des usagers aux différents stades de leurs trajectoires.

Bibliographie

[1] abelson j, treloar c, crawford j, kippax s, van beek i, et coll. Some characteristics of early-onset injection drug users prior to and at the time of their first injection. Addiction. 2006; 101:548-555Retour vers
[2] aitken c, kerger m, crofts n. Peer-delivered hepatitis C testing and counselling: A means of improving the health of injecting drug users. Drug Acohol Rev. 2002; 21:33-37Retour vers
[3] allwright s, bradley f, long j, barry j, thornton l, et coll. Prevalence of antibodies to hepatitis B, hepatitis C, and HIV and risk factors in Irish prisoners: results of a national cross sectional survey. BMJ. 2000; 321:78-82Retour vers
[4] baker a, heather n, wodak a, dixon j, holt p. Evaluation of a cognitive-behavioural intervention for HIV prevention among injecting drug users. AIDS. 1993; 7:247-256Retour vers
[5] baker a, kochan n, dixon j, heather n, wodak a. Controlled evaluation of a brief intervention for HIV prevention among injecting drug users not in treatment. AIDS Care. 1994; 6:559-570Retour vers
[6] bernstein j, bernstein e, tassiopoulos k, heeren t, levenson s, hingson r. Brief motivational intervention at a clinic visit reduces cocaine and heroin use. Drug and Alcohol Dependence. 2005; 77:49-59Retour vers
[7] bravo mj, barrio g, de la fuente l, royuela l, domingo l, et coll. Reasons for selecting an initial route of heroin administration and for subsequent transitions during a severe HIV epidemic. Addiction. 2003; 98:749-760Retour vers
[8] brener l, spooner c, treloar c. Preventing transitions to injecting amongst young people: what is the role of needle and syringe programmes?. Int J Drug Policy. 2010; 21:160-164. Epub 2009 May 7Retour vers
[9] cadet-tairou a, gandilhon m, toufik a, evrard i. Phénomènes émergents liés aux drogues en 2006. Huitième rapport national du dispositif TREND. OFDT; Saint Denis:2008; 189pp. Retour vers
[10] cadet-tairou a, gandilhon m, lahaie e, chalumeau m, coquelin a, toufik a. Drogues et usages de drogues en France. État des lieux et tendances récentes 2007-2009. Neuvième édition du rapport national du dispositif TREND. OFDT; Saint-Denis:2010; 270pp. Retour vers
[11] chanut f. L’entretien motivationnel dans la prévention des risques associés aux drogues injectables. 2010 (Présentation orale réalisée lors du séminaire Inpes du 15 mars 2010 intitulé « Injection : comment articuler prévention, éducation et réduction des risques », UICP Espace George Stephenson, Paris, 2010). Retour vers
[12] cheng y, sherman sg, srirat n, vongchak t, kawichai s, et coll. Risk factors associated with injection initiation among drug users in Northern Thailand. Harm Reduct J. 2006; 3:10Retour vers
[13] chitwood dd, comerford m, kitner kr, palacios w, sanchez j. A comparison of HIV risk behaviors between new and long-term injection drug users. Subst Use Misuse. 2001; 36:91-111Retour vers
[14] côté f, godin g, mercurea s-a, noële l, alary m. Preventing HIV transmission among marginalized injection drug users: New insights from a Quebec City based research. The International Journal of Drug Policy. 2006; 17:411-417Retour vers
[15] coyle sm, needle rh, normand j. Outreach-based HIV prevention for injecting drug users: a review of published outcome data. Public Health Rep. 1998; 113:19-30Retour vers
[16] crofts n, louie r, rosenthal d, jolley d. The first hit: circumstances surrounding initiation into injecting. Addiction. 1996; 91:1187-1196Retour vers
[17] darke s, kaye s, ross j. Transitions between the injection of heroin and amphetamines. Addiction. 1999; 94:1795-1803Retour vers
[18] day ca, ross j, dietze p, dolan k. Initiation to heroin injecting among heroin users in Sydney, Australia: cross sectional survey. Harm Reduct J. 2005; 2:2Retour vers
[19] de la fuente l, barrio l, royuela l, bravo mj. The transition from injecting to smoking heroin in three Spanish cities. Addiction. 1997; 92:1749-1763Retour vers
[20] des jarlais dc, casriel c, friedman sr, rosenblum a. AIDS and the transition to illicit drug injection--results of a randomized trial prevention program. Br J Addict. 1992; 87:493-498Retour vers
[21] des jarlais dc, diaz t, perlis t, vlahov d, maslow c, et coll. Variability in the incidence of human immunodeficiency virus, hepatitis b virus, and hepatitis c virus infection among young injecting drug users in New York City. Am J Epidemiol. 2003; 157:467-471Retour vers
[22] diaz t, vlahov d, edwards v, conover s, monterroso e. Sex-specific differences in circumstances of initiation into injecting-drug use among young adult Latinos in Harlem, New York City. AIDS and Behavior. 2002; 6:117-122Retour vers
[23] dinwiddie sh, reich t, cloninger r. Prediction of intravenous drug use. Compr Psychiatry. 1992; 33:173-179Retour vers
[24] doherty mc, garfein rs, monterroso e, latkin c, vlahov d. Gender differences in the initiation of injection drug use among young adults. Journal of Urban Health-Bulletin of the New York Academy of Medicine. 2000; 77:396-414Retour vers
[25] draus pj, carlson rg. Needles in the Haystacks: The social context of initiation to heroin injection in rural Ohio. Substance Use & Misuse. 2006; 41:1111-1124Retour vers
[26] fisher b, manzoni p, rehm j. Comparing injecting and non-injecting illicit opioid users in a multisite Canadian sample (OPICAN cohort). Eur Addict Res. 2006; 12:230-239Retour vers
[27] frajzyngier v, neaigus a, gyarmathy va, miller m, friedman sr. Gender differences in injection risk behaviors at the first injection episode. Drug Alcohol Depend. 2007; 89:145-152Retour vers
[28] fuller cm, vlahov d, arria am, ompad dc, garfein r, et coll. Factors associated with adolescent initiation of injection drug use. Public Health Rep. 2001; 116 (Suppl 1):136-145Retour vers
[29] gamella jf. The spread of intravenous drug use and AIDS in a neighborhood in Spain. Medical Anthropology Quarterly. 1994; 8:131-160Retour vers
[30] garfein rs, doherty mc, monterroso er, thomas dl, nelson ke, et coll. Prevalence and incidence of hepatitis C virus infection among young adult injection drug users. J Acquir Immune Defic Syndr Hum Retrovirol. 1998; 18 (Suppl 1):S11-S19Retour vers
[31] giddings d, christo g, davy j. Reasons for injecting and not injecting: a qualitative study to inform therapeutic intervention. Drugs: Education, Prevention and Policy. 2003; 10:95-104Retour vers
[32]girard g, boscher g, oedt, cirdd. Les pratiques d’injection en milieu festif. État des lieux en 2008. Données issues du dispositif TREND de l’OFDT. TREND Tendances récentes et nouvelles drogue, OFDT; Paris:2009; 28pp. Retour vers
[33] grau le, green tc, singer m, bluthenthal rn, marshall pa, et coll. Getting the message straight: effects of a brief hepatitis prevention intervention among injection drug users. Harm Reduct J. 2009; 6:36Retour vers
[34] griffiths p, gossop m, powis b, strang j. Extent and nature of transitions of route among heroin addicts in treatment--preliminary data from the Drug Transitions Study. Br J Addict. 1992; 87:485-491Retour vers
[35] griffiths p, gossop m, powis b, strang j. Transitions in patterns of heroin administration: a study of heroin chasers and heroin injectors. Addiction. 1994; 89:301-309Retour vers
[36] guichard a, calderon c, maguet o, lert f. Du point de vue des usagers, quels sont les effets, les bénéfices et les difficultés suscités par les traitements de substitution aux opiacés?. Alcoologie et Addictologie. 2004; 26:61S-74SRetour vers
[37] guichard a, lert f, brodeur jm, richard l. Rapports des usagers au Subutex : de la reconquête de l’autonomie à la spirale de l’échec. Sciences Sociales et Santé. 2006; 24:5-43Retour vers
[38] hunt n. Break The Cycle: transitions vers d’autres modes d’administration. 2010 (Présentation orale réalisée lors du séminaire Inpes du 15 mars 2010 intitulé « Injection : comment articuler prévention, éducation et réduction des risques », UICP Espace George Stephenson, Paris, 2010). Retour vers
[39] hunt n, stillwell g, taylor c, griffths p. Evaluation of brief intervention to prevent initiation into injecting. Drugs Educ Prev Policy. 1998; 5:185-194Retour vers
[40] hunt n, griffiths p, southwell m, stillwell g, strang j. Preventing and curtailing injectiong drug use: a review of opportunities for developing and delivering route transition interventions. Drug Acohol Rev. 1999; 18:441-451Retour vers
[41] hunt n, ashton m, lenton s, mitcheson l, nelles b, et coll. A review of the evidence-base for harm reduction approaches to drug use. 2003. Document accessible à l’adresse: http://neilhunt.org/pdf/2003-evidence-base-for-hr-hunt-et-al.pdf. Retour vers
[42] irwin kl, edlin br, faruque s, mccoy h. Crack cocaine smokers who turn to drug injection: Characteristics, factors associated with injection, and implications for HIV transmission. Drug Alcohol Depend. 1996; 42:85-92Retour vers
[43] kaner ef, beyer f, dickinson ho, pienaar e, campbell f, et coll. Effectiveness of brief alcohol intervention in primary care populations. Cochrane Database Syst Rev. 2007; 18:CD004148Retour vers
[44] kelley ms, chitwood dd. Effects of drug treatment for heroin sniffers: A protective factor against moving to injection?. Soc Sci Med. 2004; 58:2083-2092Retour vers
[45] kermode m, longleng v, singh b, hocking j, langkham b, et coll. My first time: initiation into injecting drug use in Manipur and Nagaland, north-east India. Harm Reduction Journal. 2007; 4:19Retour vers
[46] kerr t, tyndall mw, zhang r, lai c, montaner js, et coll. Circumstances of first injection among illicit drug users accessing a medically supervised safer injection facility. Am J Public Health. 2007; 97:1228-1230Retour vers
[47] kuo i, ul-hasan s, zafar t, galai n, sherman sg, et coll. Factors associated with recent-onset injection drug use among drug users in Pakistan. Substance Use & Misuse. 2007; 42:853-870Retour vers
[48] lankenau se, sanders b.Becoming a ketamine injector: a preliminary analysis of high-risk youth in New York City. 2004 (Paper presented at the annual meeting of the American Sociological Association, Hilton San Francisco & Renaissance Parc 55 Hotel, San Francisco, CA, Aug 14, 2004); Retour vers
[49] latka mh, hagan h, kapadia f, golub et, bonner s, et coll. A randomized intervention trial to reduce the lending of used injection equipment among injection drug users infected with hepatitis C. Am J Public Health. 2008; 98:853-861Retour vers
[50] lert f. Can we stop the hepatitis C virus transmission in drug users?. Rev Epidemiol Sante Publique. 2006; 54 (Spec No 1):1S61-1S67Retour vers
[51] martinez te, gleghorn a, marx r, clements k, boman m, et coll. Psychosocial histories, social environment, and HIV risk behaviors of injection and noninjection drug using homeless youths. J Psychoactive Drugs. 1998; 30:1-10Retour vers
[52] maycock p. “Scripting” risk: Young people and the construction of drug journeys. Drugs: Education, Prevention & Policy. 2005; 12:349-368Retour vers
[53] miller wr, rollnick sr. Motivational interviewing: Preparing people for change. Guilford Press; New York:2002; Retour vers
[54] neaigus a, atillasoy a, friedman sr, andrade x, miller m, et coll. Trends in the noninjected use of heroin and factors associated with the transition to injecting. Heroin in the age of crack-cocaine. Drugs, health and social policy. In: inciardi ja, harrison ld (eds), editors. SAGE Publications, California; 1998; 131159Retour vers
[55] neaigus a, gyarmathy va, miller m, frajzyngier vm, friedman sr, et coll. Transitions to injecting drug use among noninjecting heroin users: social network influence and individual susceptibility. J Acquir Immune Defic Syndr. 2006; 41:493-503Retour vers
[56] neisen jh. Parental substance abuse and divorce as predictors of injection drug use and high risk sexual behaviors known to transmit HIV. J Psychol Human Sex. 1993; 6:29-49Retour vers
[57] nicolosi a, correa leite ml, musicco m, molinari s, lazzarin a, et coll. Parenteral and sexual transmission of human immunodeficiency virus in intravenous drug users: A study of seroconversion. Am J Epidemiol. 1992; 135:225-233Retour vers
[58] noël l, laforest j, allard pr. Usage de drogues par injection et interventions visant à réduire la transmission du VIH et du VHC. Institut national de santé publique du Québec (INSPQ); Québec:2007; Retour vers
[59] novelli la, sherman sg, havens jr, strathdee sa, sapun m. Circumstances surrounding the first injection experience and their association with future syringe sharing behaviors in young urban injection drug users. Drug Alcohol Depend. 2005; 77:303-309Retour vers
[60] ompad dc, ikeda rm, shah n, fuller cm, bailey s, et coll. Childhood sexual abuse and age at initiation of injection drug use. Am J Public Health. 2005; 95:703-709Retour vers
[61] parker h, egginton r. Adolescent recreational alcohol and drug careers gone wrong: developping a strategy for reducing risks and harms. International Journal of Drug Policy. 2002; 13:419-432Retour vers
[62] pizzey r, hunt n. Distributing foil from needle and syringe programmes (NSPs) to promote transitions from heroin injecting to chasing: An evaluation. Harm Reduct J. 2008; 5:24Retour vers
[63] prithwish de, roy e, boivin jf, cox j, morissette c. Risk of hepatitis C virus transmission through drug preparation equipment: a systematic and methodological review. Journal of Viral Hepatitis. 2008; 15:279-292Retour vers
[64] purcell dw, garfein rs, latka mh, thiede h, hudson s, et coll. Development, description, and acceptability of a small-group, behavioral intervention to prevent HIV and hepatitis C virus infections among young adult injection drug users. Drug Alcohol Depend. 2007; 91 (Suppl 1):S73-S80Retour vers
[65] reynaud-maurupt c, verchere c. Les nouveaux usages de l’héroïne en France. OFDT; 2002; Retour vers
[66] roy e.Prévention du passage à l’injection de drogues : L’expérience avec les jeunes de la rue au Québec. 2010 (Présentation orale réalisée lors du séminaire Inpes du 15 mars 2010 intitulé « Injection : comment articuler prévention, éducation et réduction des risques, UICP Espace George Stephenson, Paris, 2010); Retour vers
[67] roy e, haley n, leclerc p, cedras l, boivin jf. Drug injection among street youth: the first time. Addiction. 2002; 97:1003-1009Retour vers
[68] roy e, haley n, leclerc p, cedras l, blais l, et coll. Drug injection among street youths in Montreal: predictors of initiation. J Urban Health. 2003; 80:92-105Retour vers
[69] roy e, haley n, leclerc p, boudreau jf, boivin jf. Risk factors for initiation into drug injection among adolescent street youth. Drugs: Education, Prevention & Policy. 2007a; 14:389-399Retour vers
[70] roy e, gutierrez n, haley n, morissette c, rousseau l, et coll. Projet de prévention du passage à l’injection de drogues chez les jeunes de la rue. Volume 1 : Rapport sur les groupes de discussion auprès des jeunes de la rue. Agence de la santé et des services sociaux de Montréal (Ed). Ministère de la santé et des services sociaux du Québec; 2007b; 69pp. Retour vers
[71] rubak s, sanboeck a, lauritzen t, christensen b. Motivational interviewing: a systematic review and meta-analysis. British Journal of General Practice. 2005; 55:305-312Retour vers
[72] sanchez j, chitwood dd, koo dj. Risk factors associated with the transition from heroin sniffing to heroin injection: a street addict role perspective. J Urban Health. 2006; 83:896-910Retour vers
[73] schaps e, dibartolo r, moskowitz j, palley c, churgin s. A review of 127 prevention program evaluations. Journal of Drug Issues. 1981; 11:17-44Retour vers
[74] sherman sg, fuller cm, shah n, ompad dv, vlahov d, et coll. Correlates of initiation of injection drug use among young drug users in Baltimore, Maryland: the need for early intervention. J Psychoactive Drugs. 2005; 37:437-443Retour vers
[75] sherr l. Fear arousal and AIDS: do shock tactics work?. Aids. 1990; 4:361-364Retour vers
[76] sotheran jl, goldsmith ds, blasco m, friedman sr. Heroin sniffing as self-regulation among injecting and non-injecting heroin users. J Drug Issues. 1999; 29:401-422Retour vers
[77] stahler gj, cohen e. Using ethnographic methodology in substance abuse treatment outcome research. Journal of Substance Abuse Treatment. 2000; 18:1-8Retour vers
[78] stellamanns j. A systematic litterature review of predictors for the transition to and from injecting drug use and interventions targeting at injecting drug use. Diplomathesis, Hamburg University of Applied Sciences, Health Science; 2009; Retour vers
[79] stenbacka m. Initiation into intravenous drug abuse. Acta Psychiatr Scand. 1990; 81:459-462Retour vers
[80] stenbacka m, allebeck p, romelsjo a. Initiation into drug abuse: the pathway from being offered drugs to trying cannabis and progression to intravenous drug abuse. Scand J Soc Med. 1993; 21:31-39Retour vers
[81] stillwell g, hunt n, taylor c, griffiths p. The modelling of injecting behaviour and initiation into injecting. Addict Res Theor. 1999; 7:447-459Retour vers
[82] strang j, griffiths p, powis b, gossop m. Heroin chasers and heroin injectors: differences observed in a community sample in London, UK. Am J Addict. 1999; 8:148-160Retour vers
[83] strauss sm, astone-twerell j, munoz-plaza ce, des jarlais dc, gwadz m, et coll. Drug treatment program patients’ hepatitis C virus (HCV) education needs and their use of available HCV education services. Bmc Health Serv Res. 2007; 7:39Retour vers
[84] swift w, maher l, sunjic s, doan v. Transitions between routes of administrations among caucasian and indochinese heroin users in South-West Sydney. National Drug and Alcohol Research Centre; 1997; Retour vers
[85] thorpe le, ouellet lj, hershow r, bailey sl, williams it, et coll. Risk of hepatitis C virus infection among young adult injection drug users who share injection equipment. Am J Epidemiol. 2002; 155:645-653Retour vers
[86] topp l, day c, degenhardt l. Changes in patterns of drug injection concurrent with a sustained reduction in the availability of heroin in Australia. Drug and Alcohol Dependence. 2003; 70:275-286Retour vers
[87] treloar c, abelson j. Information exchange among injecting drug users: A role for an expanded peer education workforce. Int J Drud Policy. 2005; 16:46-53Retour vers
[88] treloar c, laybutt b, jauncey m, van beek i, lodge m, et coll. Broadening discussions of ″safe″ in hepatitis C prevention: a close-up of swabbing in an analysis of video recordings of injecting practice. Int J Drug Policy. 2008; 19:59-65Retour vers
[89] tucker t, fry cl, lintzeris n, baldwin s, ritter a, et coll. Randomized controlled trial of a brief behavioural intervention for reducing hepatitis C virus risk practices among injecting drug users. Addiction. 2004; 99:1157-1166Retour vers
[90] van ameijden ej, coutinho ra. Large decline in injecting drug use in Amsterdam, 1986-1998: explanatory mechanisms and determinants of injecting transitions. J Epidemiol Community Health. 2001; 55:356-363Retour vers
[91] van ameijden ejc, van den hoek jar, van haastrecht hja, coutinho ra. The harm reduction approach and risk factors for human immunodeficiency virus (HIV) seroconversion in injecting drug users, Amsterdam. Am J Epidemiol. 1992; 136:236-243Retour vers
[92] van beek i. The Sydney medically supervised injecting centre: A clinical model. J Drug Issues. 2003; 33:625-638Retour vers
[93] varescon i, vidal-trecan g, gagniere b, christoforov b, boissonnas a. Prises de risques lors de la première injection intraveineuse de drogue. Ann Med Interne (Paris). 2000; 151 (Suppl B):B5-B8Retour vers
[94] vasilali ei, hosier sg, cox wm. The efficacy of motivational interviewing as a brief intervention for excessive drinking: a meta-analytic review. Alcohol Alcohol. 2006; 41:328-335Retour vers
[95] witteveen e, van ameijden ej, schippers gm. Motives for and against injecting drug use among young adults in Amsterdam: qualitative findings and considerations for disease prevention. Subst Use Misuse. 2006; 41:1001-1016Retour vers
[96] wood e. Gender and risk factors for initiation into injection drug use. Drug Alcohol Rev. 2007; 26:333-334Retour vers

→ Aller vers SYNTHESE
Copyright © 2010 Inserm