Activité physique et prévention des chutes chez les personnes âgées

2015


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Communications

Vieillissement de la population, espérance de vie et espérance de santé : un cadrage démographique

La France affiche une des meilleures espérances de vie au monde

La France fait partie des pays à plus faible mortalité et connaît même les taux les plus bas pour les femmes. Pour l’espérance de vie à la naissance des femmes, seul le Japon fait mieux que la France. L’espérance de vie à la naissance des hommes se situe dans le peloton de tête, très resserré, des pays développés (Berr et coll., 2012renvoi vers). En fait les points faibles français concernent la mortalité infantile, aujourd’hui très faible mais plus élevée que chez nos voisins, et pour les hommes, la mortalité dite prématurée, c’est-à-dire avant 65 ans ou 70 ans. Ainsi, en se concentrant seulement sur les âges élevés, par exemple à partir de 65 ans, la France affiche les taux de mortalité les plus faibles du continent européen, pour les hommes comme pour les femmes.
Figure 1 Évolution de l’espérance de vie à 65 ans en France et dans 5 autres pays depuis 1945 (par sexe)
La figure 1Renvoi vers représente l’évolution de l’espérance de vie depuis 1945 pour la France, le Danemark, les États-Unis, l’Espagne, le Japon et la Suède. La France a connu une augmentation régulière et considérable de l’espérance de vie à 65 ans, en particulier pour les femmes, quand d’autres pays connaissaient des périodes de ralentissement ou même des périodes d’arrêt de cette croissance. Sur la période et en termes de croissance de l’espérance de vie, la France se situe juste derrière le Japon. La conséquence de ces évolutions de l’espérance de vie est un vieillissement considérable de la population.
La figure 2Renvoi vers représente l’évolution de la distribution des durées de vie féminines. Dans les conditions de mortalité du début du 19e siècle, ici 1827, la durée de vie la plus fréquente était de l’ordre de 70 ans. Les progrès médicaux, sociaux, économiques et sanitaires ont permis de réduire la forte mortalité, en particulier infantile et juvénile. Plus d’enfants deviennent adultes et atteignent cette durée de vie de 70 ans qui reste la plus fréquente, peu de gains étant faits aux grands âges. Notons que 70 ans étaient inscrits comme la durée de vie des Hommes dans la Bible et la croyance générale était, et reste pour beaucoup, que la durée de vie des adultes ne peut pas changer et surtout ne peut pas augmenter.
Figure 2 Distribution des durées de vie dans les conditions de mortalité qu’a connues la France, de 20 ans en 20 ans, depuis 1827 (sexe féminin)
Pourtant à partir des années 1920-1930, des changements s’opèrent aux âges élevés, d’abord doucement puis en s’accélérant depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Ces changements sont alors passés inaperçus, les regards étant toujours tournés vers la mortalité infantile et juvénile qui continuait de diminuer. Mais dans les conditions de mortalité françaises de 1947, la durée de vie la plus fréquente est de l’ordre de 80 ans. Elle est du même ordre de grandeur dans tous les autres pays développés, la fin de la guerre et les débuts de la reconstruction ayant largement homogénéisé les conditions de vie et de mortalité. Dans les conditions de mortalité actuelles, la durée de vie la plus fréquente dépasse nettement 90 ans. C’était moins de 2 % des femmes qui pouvaient espérer fêter leur 90e anniversaire dans les conditions de mortalité de 1907 ; cent ans après, près de 40 % des femmes peuvent espérer atteindre et dépasser cet âge.
Ces modèles démographiques décrivent en fait les conditions de vie qui prévalent une année donnée ; ils ne représentent pas les conditions de vie qu’ont réellement traversé les différentes générations qui composent la population cette année-là. La génération des femmes qui ont atteint 90 ans en 2007 a connu en réalité des conditions de mortalité bien moins bonnes dans l’enfance, mais qui se sont améliorées tout au long de leur vie. Ces chiffres et ce modèle indiquent donc que, en supposant que nous conservions dorénavant les conditions de mortalité observées en 2007 et même si celles-ci ne s’amélioraient plus, au moins 40 % des nouveaux-nés des générations suivantes fêteront leurs 90 ans. De ce point de vue, le vieillissement de la population est bien devant nous, car il est très peu probable que les conditions de mortalité se dégradent sur le long terme. Des dégradations massives comme celles entraînées par les deux guerres mondiales ont été récupérées en quelques années. Notons que l’espérance de vie augmente d’environ 3 mois par an depuis la fin de la seconde guerre mondiale, sans l’observation pour le moment de véritable ralentissement. Notons aussi que l’évolution constatée chez les femmes semble avoir précédé celle observée chez les hommes d’une trentaine d’années pour ces évolutions démographiques.
La dynamique illustrée par la figure 2Renvoi vers permet de comprendre pourquoi les effectifs des personnes très âgées explosent littéralement dans un pays comme la France. Les petits nombres initiaux de personnes âgées de plus de 90 ou 100 ans se multiplient rapidement en quelques années : le nombre de centenaires double environ tous les 10 ans en France comme dans les autres pays européens (Blanpain, 2010renvoi vers).

La France est moins performante pour l’espérance de vie sans incapacité

L’augmentation continue de l’espérance de vie, notamment aux âges élevés, a conduit à s’interroger sur la qualité des années gagnées à ces âges très exposés aux problèmes de santé chroniques. Les maladies et les problèmes de santé ont tendance à se cumuler avec l’âge, à diminuer les capacités de récupération et à fragiliser l’organisme. Ces situations de santé engendrent différents niveaux d’incapacité : des altérations des fonctions motrices, sensorielles ou cognitives, qui à leur tour peuvent induire des difficultés à réaliser des activités du quotidien, voire conduire à des situations de dépendance c’est-à-dire des situations de santé dans lesquelles les personnes requièrent aides et assistance pour réaliser des activités élémentaires qu’elles ne peuvent plus faire seules. Les chutes s’inscrivent au cœur de ces questions tant parce qu’elles caractérisent ce processus de dégradation de l’état de santé que parce qu’elles participent grandement aux risques de limitations fonctionnelles et de perte d’autonomie. Dans ce contexte, le vieillissement de la population, son évolution et ses conséquences sont devenus un enjeu majeur de la santé publique, présent à la fois sur le versant de la prévention des maladies chroniques et des troubles fonctionnels associés, sur celui de la compensation des limitations qui résultent d’un état de santé dégradé et de la préservation de l’autonomie, et enfin sur celui de la planification de la prise en charge sanitaire et sociale des situations de dépendance.
De nouveaux indicateurs combinant longévité et état de santé ont alors été proposés pour mesurer l’évolution de la santé de la population à mesure que l’espérance de vie augmente. Parmi ceux-ci, les espérances de santé consistent à décomposer les années vécues de la table de mortalité des démographes en années de bonne et années de mauvaise santé. La méthode de Sullivan, la plus utilisée à ce jour, suggère d’utiliser pour ce faire la prévalence de différents problèmes de santé en population, relevée par des enquêtes ou des registres lorsqu’ils existent (Sullivan, 1971renvoi vers). Ces mesures permettent d’appréhender différentes dimensions de la santé ; dans la plupart des pays, le recueil se fait par des enquêtes dans lesquelles les personnes déclarent au travers de quelques questions, notamment la santé ressentie, avoir une ou plusieurs maladies chroniques, être limité à cause de problèmes de santé dans les activités usuelles. Il y a autant de façons de décomposer les années vécues d’une table de mortalité qu’il existe de mesures de la santé.
Les premières applications de ces calculs ont concerné différentes dimensions de l’incapacité, mais on étudie aussi les espérances de vie en bonne ou mauvaise santé perçue, avec ou sans maladie chronique, avec ou sans démence... En 2005, lors du recentrage de la stratégie européenne, dite stratégie de Lisbonne (2000-2010), sur les questions économiques et l’emploi, la Commission a introduit dans ses indicateurs structurels une espérance de santé (Healthy Life years) afin de s’assurer de la bonne santé et de la qualité de la vie des Européens. Il s’agit en fait d’une espérance de vie sans incapacité calculée à partir d’une question sur les « limitations dans les activités usuelles » issue de l’enquête européenne sur les conditions de vie EU-SILC (European Union Statistics on Income and Living Conditions). Depuis 2005, le calcul est fait annuellement par Eurostat pour tous les pays de la Communauté (Eurostat, 2012renvoi vers). Ces calculs s’accompagnent de recherches dans le cadre de programmes européens, mobilisant différents indicateurs pour analyser les évolutions et différences entre pays (Jagger et coll., 2008renvoi vers)1 . Les plus récents de ces travaux (EHLEIS, 2012renvoi vers), permettent de voir que l’avantage des français en termes d’espérance de vie ne se retrouve pas en termes d’espérance de vie sans limitation d’activité déclarée. La France n’affiche pas les meilleures valeurs, mais se situe plutôt dans la moyenne européenne pour les hommes et juste un petit peu au-dessus pour les femmes. Beaucoup de pays européens font mieux que la France en termes d’espérance de vie sans incapacité, notamment la Suède dont la situation est décrite plus loin.
Dans les conditions de 2010, l’espérance de vie à 65 ans des français est plus élevée de 1,3 année que la moyenne européenne pour les hommes et de 2,3 années pour les femmes (tableau Irenvoi vers). Mais en termes d’espérance de vie sans limitation d’activité déclarée, les différences sont beaucoup plus faibles : 0,4 année en faveur des hommes français (différence non statistiquement significative compte tenu de la taille de l’échantillon français de l’enquête européenne EU-SILC), et 0,9 année en faveur des femmes françaises (tableau Irenvoi vers).

Tableau I Espérance de vie (EV) et espérance de vie sans incapacité (EVSI) (en nombre moyen d’années) dans les activités usuelles, estimées en 2010 pour la France et pour l’Union européenne (UE 25) à 65 ans (par sexe)

 
Sexe masculin
Sexe féminin
EV
EVSI
EV
EVSI
France
18,9
9 [8,6-9,3]
23,4
9,8 [9,4-10,3]
UE 25
17,6
8,6 [8,6-8,7]
21,1
8,9 [8,8-9,0]
Différence
1,3
ns
2,3
0,9

Les intervalles de confiance à 95 % des estimations sont indiqués entre crochets.

Évolutions temporelles en France

Entre 1995 et 2010 l’espérance de vie à 65 ans en France passe de 20,9 à 23,5 ans (+2,6 ans) pour les femmes et de 16,2 à 18,9 ans (+2,7 ans) pour les hommes. L’espérance de vie sans limitation d’activité semble augmenter beaucoup moins vite que l’espérance de vie, au moins depuis 2004 et la mise en place de l’enquête EU-SILC dans quelques pays de l’Union (figure 3Renvoi vers).
Pour les hommes, entre 2004 et 2010, on observe une légère augmentation de 8,5 ans à 9 ans, suffisante pour garder constante la part de l’espérance de vie à 65 ans vécue sans limitation d’activité, à savoir 48 %. Pour les femmes, on observe que l’espérance de vie sans limitation d’activité varie de 10 ans en 2004 à 9,8 ans en 2010 ; la part de l’espérance de vie à 65 ans vécue sans limitations dans les activités usuelles diminue de 45 % en 2004 à 42 % en 2010. Toutefois, ces changements d’espérance de vie sans incapacité ne sont pas statistiquement significatifs compte tenu de la taille des échantillons français dans l’enquête EU-SILC et on ne peut pas conclure à une évolution, qu’elle soit positive ou négative, depuis 2004 (tableau IIrenvoi vers).
Figure 3 Espérance de vie (EV) et espérance de vie sans incapacité (EVSI) à 65 ans en France et dans l’Union européenne (UE 15 et UE 25) issues des enquêtes ECHP (1995-2001) et SILC (2004-2010) (par sexe)

Tableau II Espérance de vie (EV) et espérance de vie sans incapacité (EVSI) dans les activités usuelles estimées pour la France à 50 ans et à 65 ans en 2004 et en 2010 (par sexe)

 
Sexe masculin
 
2004
2010
Différence
EVSI 65
8,5 [8,1-8,8]
9,0 [8,6-9,3]
0,5 (ns)
EVSI 50
17,6 [17,2-18,0]
18,2 [17,8-18,6]
0,6 (ns)
 
Sexe féminin
 
2004
2010
Différence
EVSI 65
10,0 [9,5-10,4]
9,8 [9,4-10,3]
- 0,2 (ns)
EVSI 50
20,0 [19,5-20,4]
19,5 [19,0-20,0]
- 0,5 (ns)

Les intervalles de confiance à 95 % des estimations sont indiqués entre crochets.

Cas de la Suède

La Suède présente une situation qu’il est intéressant de comparer à celle de la France. En effet, si les Suédois ne disposent pas d’une espérance de vie aussi longue que les Français, ils affichent l’espérance de vie sans limitation d’activité la plus élevée de toute l’Union européenne. Le tableau IIIrenvoi vers montre ainsi que si les Françaises peuvent à 65 ans espérer vivre 2 ans de plus que les Suédoises, ces dernières peuvent espérer vivre près de 6 ans de plus sans limitations d’activité.

Tableau III Espérance de vie (EV) et espérance de vie sans incapacité (EVSI) dans les activités usuelles en France et en Suède, estimées à 65 ans en 2010 (par sexe)

 
Sexe féminin
Sexe masculin
EV
EVSI
%
EV
EVSI
%
Suède
21,2
15,5
73
18,3
14,1
77
France
23,5
9,8
42
18,9
9,0
48
Différence
- 2,3
5,7
31
- 0,6
5,1
29
Pour les Suédoises, 73 % du temps vécu après 65 ans le sera sans limitation d’activité contre 42 % du temps vécu par les Françaises. Les hommes français peuvent espérer vivre un peu plus longtemps que les Suédois alors que ces derniers peuvent espérer vivre 5 ans de plus qu’eux sans limitation d’activité. Si bien que 77 % du temps vécu après 65 ans par les suédois sera vécu sans limitation d’activité contre 48 % du temps vécu par les français.
La figure 4Renvoi vers illustre l’augmentation avec l’âge de la prévalence des limitations d’activité pour ces deux pays. Si dans les deux cas l’augmentation est forte et finalement peu différente entre les sexes, on note quelques contrastes entre la France et la Suède. D’abord à tous les âges, l’incapacité déclarée dans l’enquête est plus faible en Suède. Ceci est particulièrement net chez les hommes. Ensuite, même si l’allure générale de l’évolution avec l’âge est la même, l’augmentation est beaucoup moins forte en Suède qu’en France. Ainsi, au-delà de 85 ans, plus des trois quarts des Français déclarent des limitations dans leurs activités alors que les Suédois ne sont qu’un tiers dans ce cas.
Des études danoises ont bien mis en évidence le rôle de l’effet de sélection dans les niveaux de prévalence observés ; si la survie des sujets les plus robustes est bien plus élevée que celle des sujets fragilisés, aux grands âges, la prévalence des mauvais états de santé peut plafonner, même si l’incidence continue d’augmenter avec l’âge (Christensen et coll., 2008renvoi vers).
Figure 4 Prévalence des limitations dans les activités usuelles en France et en Suède en 2010 (par sexe et âge)
La progression de l’incapacité avec l’âge a son importance aussi d’un point de vue méthodologique. En effet, la prévalence en population des différents états de santé n’est souvent pas mesurée aux âges extrêmes, les très âgés ou les enfants, âges auxquels il est difficile de conduire des enquêtes par interview et de mesurer la santé de façon pertinente : l’information provient alors de modélisations basées sur ce qu’on observe aux autres âges. Or, entre 20 et 85 ans, les problèmes de santé ont tendance à augmenter de façon exponentielle. Très faibles à 20 ans, les prévalences doublent tous les 5, 10 ou 15 ans et affichent des niveaux très élevés à 85 ans, comme le montre l’exemple de la France à la figure 4Renvoi vers. Dès lors, les modèles d’extrapolation rencontrent vite des prévalences de 100 % en France aux grands âges, signifiant que tous les nonagénaires ou tous les centenaires sont en mauvaise santé, quel que soit le critère de santé utilisé : fragilité, difficultés à se déplacer, déclin cognitif ou même démence. La trajectoire observée en Suède implique une toute autre tendance, avec une large proportion de personnes très âgées conservant de bonnes capacités fonctionnelles. Les différences entre pays observées dans les enquêtes ont alors tendance à se répercuter dans les estimations concernant les très âgés.
Les résultats présentés ici doivent être examinés avec prudence car la population vivant en institution (maison de retraite, institutions pour personnes âgées dépendantes), n’est pas couverte par l’enquête EU-SILC. On ne sait pas grand-chose de l’état de santé dans ces différents types de logements dont la nature et la proportion varient d’un pays à l’autre. Par ailleurs, il faut tenir compte des variations des protocoles de l’enquête EU-SILC, pas seulement au regard de la formulation des questions sur les limitations d’activité mais aussi le mode de collecte des données et la couverture des échantillons. Enfin, il faut aussi tenir compte de différences culturelles qui jouent sur la manière dont on évalue sa propre santé et dont on en fait part dans de telles enquêtes. Même si les dimensions de l’incapacité se révèlent moins sensibles à des effets de déclaration que ne le sont les mesures de maladies ou de santé ressentie, il existe certaines variations dans la propension à déclarer des limitations d’activité qui contribuent aux différences observées entre pays ou groupes de population.
Toutefois, il semble bien que certains pays européens et systèmes de protection sociale et de la santé accordent plus ou moins de poids et d’efforts au maintien de l’autonomie et à la prévention des incapacités même si tous les promeuvent. Ces études sur les espérances de vie sans incapacité montrent en tout cas que la réduction des inégalités d’espérance de vie sans limitations d’activité entre les pays de l’Union pourrait augmenter de beaucoup les valeurs européennes moyennes (Jagger et coll., 2013renvoi vers).
Les études françaises, utilisant différentes enquêtes nationales, confirment largement les résultats pour la France issus de l’enquête européenne. Ils apportent plus de détail en abordant aussi les limitations fonctionnelles, les difficultés avec les activités instrumentales (domestiques) et élémentaires (soins personnels) de la vie quotidienne. Ils confirment la tendance à la stagnation des espérances de vie sans incapacité à 65 ans pour les niveaux les moins sévères (limitations fonctionnelles et limitations d’activités usuelles) mais pas pour les niveaux sévères (restrictions d’activité), résultats qui prolongent la tendance des décennies précédentes.
Mais ces études suggèrent aussi, au travers de calculs d’espérances de vie et de santé partielles entre 50 et 65 ans, que la situation pourrait se dégrader avant l’âge de 65 ans (Cambois et coll., 2013renvoi vers). Les futures générations de personnes âgées pourraient bien déclarer plus de limitations dans les activités usuelles que les cohortes actuelles, en particulier parmi les femmes. Les générations concernées ont probablement des attentes plus importantes en matière de santé que les générations précédentes, ce qui les rendraient plus sensibles à leurs problèmes de santé. Mais ces générations ont aussi connu des évolutions démographiques, économiques et sociales importantes, susceptibles de jouer sur leur santé : des pratiques de santé exposant à différentes maladies, des parcours professionnels et fins de carrières moins sécurisés pour certains, ou encore une intensification de l’activité professionnelle féminine qui s’ajoute, pour elles, aux activités domestiques et de « caring » des parents âgés qui restent généralement à leur charge. Les travaux français ont aussi mis au jour de larges inégalités sociales, les ouvriers ayant non seulement l’espérance de vie la plus courte mais aussi plus d’années d’incapacité que les autres catégories socioprofessionnelles (Cambois et coll., 2008renvoi vers et 2011renvoi vers). Aussi, comme pour les différences entre pays, l’augmentation de l’espérance de vie sans incapacité et sans perte d’autonomie peut passer par une réduction de ces inégalités.
Au cœur de ces évolutions, la recherche sur la prévention des chutes, objet de cette expertise collective Inserm sur l’activité physique et la prévention des chutes chez les personnes âgées, fait bien partie des actions et interventions qui participeront à accroître les années de vie en bonne santé et à limiter les situations de dépendance. Comme pour l’ensemble des déterminants de la perte d’autonomie, elle repose sur l’analyse et la compréhension des situations non seulement médicales mais aussi sociales qui expliquent la survenue de chutes et qui, de surcroît, réduisent les chances de s’en remettre.

Bibliographie

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Jean-Marie Robine

Inserm (U710 et U988)/EPHE,
Biodémographie de la longévité et de la vitalité, Paris et Montpellier

Emmanuelle Cambois

Ined, Unité de recherche Mortalité, santé, épidémiologie, Paris

Personne âgée : quelles représentations sociales ? Hier et aujourd’hui

La vieillesse est une construction. Elle se construit sur une réalité qui comprend des éléments d’ordre biologique, démographique, politique, économique... mais elle se construit aussi sur un imaginaire culturel de représentations (Moscovici, 1984renvoi vers).
L’histoire montre qu’en fonction du contexte, de ses valeurs et du modèle d’homme idéal qu’elle se fixe, chaque société sécrète une représentation plus ou moins positive de cet âge de la vie, pas forcément d’ailleurs en accord avec la place faite aux plus vieux. En Occident, la vieillesse a pu être louée comme la période de la sagesse et du nécessaire respect. Mais plus souvent sans doute, elle a été conspuée comme abjecte et méprisable.

Hier : le contexte historique

Aux origines de la vieillesse, la malédiction

Que ce soit dans les mythes gréco-romains ou dans l’Ancien Testament, la vieillesse apparaît, dès l’origine, comme une malédiction, un châtiment divin.
Lorsque Zeus envoie Pandore sur terre afin de punir les hommes de leur orgueil à vouloir égaler les dieux, celle-ci vient semer « les maladies cruelles que la vieillesse apporte aux hommes ». La jeunesse éternelle serait bien le bonheur suprême. C’est le cadeau merveilleux que fait Zeus à un de ses aimés, Ganymède, fils d’un roi de Troie.
Et dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, un des hymnes chantés par les fidèles le proclamait au ive siècle : « Adam au paradis était éternellement jeune et beau, son mépris de l’ordre en fit un vieillard »1 .
Cette image du paradis terrestre inscrite dans le mythe primordial où l’homme égalait Dieu hors de toute temporalité, où maladie, vieillesse et mort n’étaient pas même concevables, n’est sans doute pas étrangère à la création de tous les mythes de rajeunissement ou d’abolition du temps.
L’imaginaire du Moyen Âge est riche de fontaines de jouvence, et les élixirs de longue vie font l’objet de multiples recherches alchimiques. Les recettes s’appuient sur de puissants symboles de vie : le sang, à boire (celui d’un enfant de préférence), le lait (à téter au sein d’une femme ou à utiliser en bain). Quelques siècles plus tard, avec la pratique des saignées pour évacuer le mauvais sang ou, au contraire, avec la transfusion du sang d’hommes jeunes et vigoureux, tout est envisagé pour lutter contre les méfaits du vieillissement.
La découverte du Nouveau Monde amène à expérimenter certaines plantes exotiques, épices diverses, safran, gingembre en de curieux mélanges destinés à perdurer la vie et à redonner le tonus de la jeunesse.
Envisager le vieillissement comme une dégradation à travers les multiples pertes que subit le corps conduit à engager une lutte acharnée contre ce processus jugé inacceptable. « Il faut lutter contre la vieillesse tout comme on doit lutter contre la maladie » décrète Cicéron. Depuis Hippocrate, on cherche la manière de prolonger la vie. Envisageant le processus du vieillissement comme une perte de chaleur et d’humidité, on prescrit régimes alimentaires, exercices physiques, bains chauds, boissons alcoolisées. Mais chaque période apporte ses réponses qui viennent contredire les précédentes (consommer certains aliments ou s’en abstenir, pratiquer un sport ou mettre le corps en repos, prescrire ou bannir les boissons alcoolisées…).
Le xixe siècle, confronté au malthusianisme, contribue à faire du vieux un objet d’étude médicale passionnant. Dans l’effervescence des recherches sur les pathologies de la vieillesse, le rêve du mythe de jouvence renaît. L’imagination est sans limite pour cette quête de vitalité : injecter des « liquides organiques » obtenus à partir de glandes génitales animales, de coq, de chien ou de singe pour redonner sa vigueur perdue au vieillard, greffer un testicule animal chez un individu âgé, pratiquer des vasectomies... D’illustres patients se prêtent à ces opérations de régénération.
Aux États-Unis, les premières tentatives de transplantation de testicules humains, prélevés sur des suicidés ou des condamnés à mort, sont réalisées avec l’avènement des androgènes artificiels, ces opérations chirurgicales vont dès 1935 perdre de leur attrait.

Être vieux, est-ce être sage ?

La question « Être vieux, est-ce être sage ? » est déjà présente dans l’Ancien Testament. Les Patriarches, à la longévité stupéfiante, tel Mathusalem qui vécut 969 ans, sont les élus de Dieu, les guides marqués du sceau de la sagesse. À l’inverse, l’absence de vieillards, témoins essentiels du passé, liens vivants entre les générations, garants de la fidélité de Dieu, signe la malédiction pour la communauté entière. « Il n’y aura plus de vieillards dans ta maison ! » proclame le prophète Elie à celui qui se conduit mal.
Mais au fil du récit biblique, entre mythe et histoire, la diminution de la durée de vie, telle qu’elle se manifeste peu à peu dans les écrits, et la perte du pouvoir politique et judiciaire des Anciens dans une société devenant plus complexe, marquent une désacralisation du vieillard. Dans le livre de Job, on peut lire : « être ancien ne rend pas sage, et les vieillards ne discernent pas le droit » (Job, 32, 1-9).
Des philosophes, de leur côté, ont pu idéaliser ou déprécier cet âge. Platon, dans La République, fait l’éloge du pouvoir gérontocratique : les vieux, délivrés des passions par l’affaiblissement des sens, donc capables de s’adonner à la vertu et aux plaisirs de l’esprit, doivent commander, rendre la justice, donner l’exemple aux jeunes. À l’opposé pour Aristote, qui, dans Éthique à Nicomaque et dans la Rhétorique fait un portait repoussoir du vieillard, l’expérience n’est qu’une accumulation d’erreurs dans un esprit endurci par l’âge. Elle mène à la défiance, à la mesquinerie, à l’avarice, aux lamentations… Et, bien plus tard, Erasme, pour qui rien n’est plus détestable que la vieillesse, voit dans la folie un remède efficace pour ne pas souffrir des malheurs qu’occasionne le grand âge. À l’inverse de l’image du vieux sage, transparaît ici celle du vieux fou.
La représentation d’une vieillesse-sagesse réapparaîtra pourtant épisodiquement tout au long de l’Histoire, où alternent les périodes dominées par les plus âgés avec celles où le pouvoir est aux mains des plus jeunes.
Lorsque le Droit repose sur l’oral ou la coutume et valorise la connaissance et l’expérience, on a tendance à idéaliser davantage les vieillards, à en faire des modèles de vertu.
Certaines périodes seront ainsi plus favorables à la vieillesse. Des conseils d’Anciens seront mis en place au Moyen Âge, les philosophes des Lumières reconnaîtront de la noblesse, de la vertu chez le vieillard ; certains écrivains, comme La Fontaine, s’inclineront devant son expérience, Victor Hugo exaltera cet âge... Mais cette image idéalisée de la vieillesse comme la période de la sagesse et du nécessaire respect ne sera jamais totalement dominante, toujours susceptible d’être remise en question.
À chaque époque, la position sociale des vieux sera déterminante dans l’attitude exercée à leur endroit. Au Moyen Âge, les monarchies et l’Église font confiance à l’âge et l’expérience. Mais dans le peuple, la situation est beaucoup moins enviable. La littérature médiévale montre comment le père est à la merci du fils, comment il peut être chassé du domicile par ses enfants, réduit à quémander l’aumône.
Le contexte économique est particulièrement prépondérant quant à la place accordée au plus vieux. Les sociétés où domine la propriété mobilière leur seront plus favorables que celles où domine la propriété foncière. Être détenteur du patrimoine jusqu’à sa mort permet de conserver l’autorité.
Tout au long de l’Histoire, on s’est interrogé sur la place que devaient occuper les vieillards au sein de la société. Philosophes, écrivains, politiques, hommes d’Église ont tenté d’apporter des réponses : philosopher, méditer, étudier, prier, se suicider, se retirer, ne pas imiter ni gêner les jeunes gens…, autant de recommandations, certes bien différentes, qui toutes semblent avoir pour objectif de mettre le vieux en marge, à l’écart des autres générations. À l’inverse, on a pu lui accorder une place centrale dans les domaines politique, éducatif ou moral. Au regard des rôles qui lui sont octroyés, l’ambivalence joue à plein.

Quand est-on vieux ?

Dans l’imaginaire médiéval, la vieillesse a pu occuper trois des sept temps de la vie humaine2 . Vers 45 ou 50 ans, débute « senecte », juste après jeunesse. « La personne est pesante en mœurs et manières ». Puis vient « vieillesse » jusque vers septante ans : « Les gens y rapetissent, n’ont pas si bon sens comme ils ont eu, et ils radotent ». La dernière période est appelée « senies » : « Le vieillard est plein de toux, de crachat et d’ordure, jusqu’à temps qu’il retourne en cendres et en poudre… ».
Le Dictionnaire Richelet de 1680 donne une définition distincte du vieux et de la vieille : « On appelle vieillard un homme depuis quarante jusqu’à soixante-dix ans. Les vieillards sont d’ordinaire soupçonneux, jaloux, avares, chagrins, causeurs, se plaignent toujours, les vieillards ne sont pas capables d’amitié. ». « On appelle une femme vieille depuis quarante jusqu’à soixante-dix ans. Les vieilles sont fort dégoûtantes. Vieille décrépite, vieille ratatinée, vieille roupieuse ».
La laideur des vieilles a toujours été plus violemment décriée que celle des vieux. Quand le corps féminin est érotisé, esthétisé, objet de séduction et de désir, il devient répugnant, objet de dégoût dans la vieillesse.
Le corps vieux est particulièrement déprécié dans des sociétés tournées vers la conquête, ayant le culte de la beauté physique. La littérature, riche de métaphores et de qualificatifs choisis parmi les plus négatifs reflète les sentiments de crainte et de rejet que la vieillesse inspire : « L’âge triste et qui tue la vieillesse, a ma haine » écrit Euripide, et Sophocle parle de la « vieillesse odieuse... qui rassemble en elle tous les maux ».
Quand la beauté est l’apanage de la jeunesse, la vieillesse est laideur, souffrance, perte, décrépitude, affaissement, sécheresse, saleté, déchéance...
La Renaissance, renouant avec l’Antiquité, éprouve ce même dégoût pour le corps vieux. Des poètes comme Ronsard ou Du Bellay maudissent la vieillesse, répugnante et honteuse. La bouche édentée, les yeux chassieux, le nez morveux, le teint jaune, le dos courbé, le corps sec et étique, font du vieux toussoteux, crachoteux et radoteux, une carcasse déterrée, une charogne sans couleur... La représentation n’est pas seulement celle d’un corps amoindri et répugnant ; elle s’étend au domaine moral et la critique peut se faire violente : « les défauts de l’âge augmentent en vieillissant comme ceux du visage » écrit La Rochefoucauld.
Dans des périodes de plus grande spiritualité, où la beauté est recherchée par-delà le sensible, le corps vieilli n’apparaît pas, en soi, comme un objet de dégoût. Au Moyen Age, l’idéal esthétique plus abstrait conduit à faire du vieillard un double symbole : celui de la sagesse manifestée par la blancheur des cheveux et de la barbe, à l’image de Dieu en majesté au cœur des cathédrales et celui du péché marqué par l’altération physique et la peau flétrie... Le vieillard pourra symboliser le bien ou le mal, la vertu ou le vice, le sage ou le fou, Dieu ou Diable, que l’on retrouvera manifesté par la vieille sorcière.
Depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, certaines représentations perdurent et traversent les siècles : celle de la retombée en enfance est reprise par certains psychiatres sous les termes de « régression affective infantile » (Balvet, 1963renvoi vers) et plus récemment de « rétrogénèse » (Reisberg3 ) ou encore celle tenace qui affirme que la vieillesse délivre des passions et des désirs de la chair, mais qui se trouve battue en brèche par celle du vieillard lubrique et de la vieille libidineuse.
L’Histoire, comme l’Anthropologie, nous apprennent ainsi qu’il existe quatre schèmes de valorisation ou dévalorisation du vieillir :
• le positif de l’accumulation. L’avancée en âge est un enrichissement de l’être (par exemple : Patriarches de la Bible) ;
• le négatif de l’accumulation. L’avancée en âge est une suite de chocs, d’épreuves qui engendrent le repli sur soi (Aristote) ;
• le positif de la diminution. L’avancée en âge affaiblit les passions, et mène vers une libération de l’être (Platon) ;
• le négatif de la diminution. L’avancée en âge est marquée par les pertes : pertes des capacités, des désirs…, et fait naître un sentiment dépressif (modèle dominant actuellement).

Aujourd’hui : quelles représentations sociales ?

Le contexte

L’allongement de la durée de la vie représente une victoire sans précédent pour l’humanité, pour laquelle se sont battues les générations qui nous ont précédés. À 60 ans, l’espérance de vie est de 27 ans pour les femmes et 22,2 ans pour les hommes. Or, ce phénomène heureux, pour lequel il y aurait lieu de se réjouir, fait figure de catastrophe. Car la réalité démographique s’accorde mal avec le contexte économique et social en place.
Il est désormais communément admis de parler du « poids économique » que représentent les personnes âgées, et ce, à travers deux aspects : le système de retraites et le système de soins. Le rapport entre personnes en âge d’être à la retraite et celles en âge de travailler ne cesse de « se dégrader », nous dit-on. La crise du système est « inéluctable ». Le prélèvement sur l’activité économique sera « considérable ». Qui paiera ?
Les retraités profiteraient-ils d’un système qui ne peut perdurer ? Les plus jeunes, « génération sacrifiée » (Saint Etienne, 1993renvoi vers), se sentent « lésés » et les actifs « ponctionnés ». Les fondements de la cohésion sociale et de la solidarité entre générations en sont profondément ébranlés.
En ce qui concerne le système de soins, les discours sont eux aussi alarmistes et consensuels. Un discours pessimiste conduit à faire de la vieillesse un synonyme de handicap, de maladie et mène logiquement à poser la question du coût de cette dépendance et de cette démence, renforçant l’image écrasante du poids économique des vieux, avec le risque, prédisent certains sociologues (Chauvel, 1998renvoi vers), d’une « guerre des générations ».
Ce contexte toutefois revêt de très grandes disparités. Concernant le genre tout d’abord : entre 85 et 89 ans, il y a 250 femmes pour cent hommes et l’écart s’accroît très vite au-delà de 90 ans. Pour l’expliquer, on avance des causes sociologiques, la médicalisation plus grande des femmes, les modes de vie différents (tabac, alcool…), mais soulignons qu’économiquement leurs ressources sont plus faibles.
Concernant les revenus : si les retraités, dans leur ensemble ont un pouvoir de consommation plus important que leur poids démographique, il convient de rappeler que 700 000 personnes touchent l’Allocation de Solidarité aux Personnes Âgées.
Et nul n’ignore l’impact de l’appartenance socioculturelle sur l’espérance de vie et les inégalités de santé. Les catégories placées au bas de la hiérarchie sociale ont une vieillesse plus difficile car marquée par davantage d’incapacités. « Les avantages et handicaps acquis durant la vie active continuent de s’exprimer au cours du vieillissement jusqu’à la date de la mort. Le risque de démence est 1,9 fois plus élevé chez le sujet ayant un bas niveau d’étude » (Fassin et coll., 2000renvoi vers).
Au niveau sociétal, il est communément admis de dire qu’à la ségrégation des sexes a succédé la ségrégation des âges. Hors de la sphère familiale, jeunes et vieux ne se côtoient plus. Chacun vit sur des espaces différents dans des temps séparés. Le psychiatre Jean Maisondieu n’hésite pas à écrire que notre société pratique « l’apartheid de l’âge, avec une férocité d’autant plus redoutable qu’elle est inconsciente, y compris chez ceux qui en sont les victimes » (Maisondieu, 1991renvoi vers).
Pourquoi effectivement les personnes âgées prendraient-elles les transports aux heures de pointe quand ils sont envahis par les écoliers et les travailleurs ? Pourquoi partiraient-elles en vacances quand les sites sont accaparés par les familles ? Elles sont fortement encouragées à ne pas le faire, notamment par des incitations à consommer des loisirs qui leur sont spécifiquement destinés.
Les migrations inter-régionales pour raisons professionnelles, l’étroitesse des logements urbains contribuent à la mise à distance. L’isolement s’accroît avec l’âge : plus de 25 % des personnes de 60 ans et plus vivent seules.
La méconnaissance de cet âge de la vie entraîne la crainte et le rejet de la part des plus jeunes, et vient renforcer les stéréotypes qui ont jalonné l’Histoire. Et ce, d’une manière d’autant plus forte que, dans une société dominée par le jeunisme, la vieillesse se situe en contre-valeurs. Le vieux est celui qui rassemble en lui tous les moins : moins de beauté, de santé, de dynamisme, de performance, de rentabilité, d’adaptabilité… Caractérisé par la lenteur, elle-même associée à la faiblesse quand le rapport au temps est à vivre d’une manière trépidante et regard rivé sur la montre, le vieux a aussi « hérité de la mort ». Si au xixe siècle, celle-ci était portée par tous les âges de la vie, aujourd’hui 82 % des décès concernent des personnes de plus de 65 ans. La mise à distance ne serait-elle pas aussi dictée par le besoin de se protéger de l’angoisse qu’elles font naître dans une société thanatophobe, qui ne sait plus « apprivoiser la mort » (Ariès, 1975renvoi vers) ?

Un vocabulaire porteur de représentations

Quand est-on vieux ? Cette question, si souvent posée, montre la difficulté à appréhender la vieillesse. De 60 ou 65 ans (âge de la retraite) à 122 ans (limite actuellement posée à la vie), la tranche d’âge est large, et il est difficile de la qualifier d’un mot. Trois repères sont possibles : l’âge chronologique (le nombre des anniversaires), l’âge social (avec la transformation des statuts et des rôles : grand-parentalité, retraite…), l’âge biologique ou physiologique (survenue de la ménopause, des handicaps, de la maladie, de la dépendance…). On peut y ajouter l’âge subjectif, l’âge psychologique...
Le Dictionnaire des personnes âgées, de la retraite et du vieillissement paru en 1984 à la demande du Secrétaire d’État chargé des personnes âgées, distinguait « les jeunes vieux », entre 60 et 75 ans, voire 80 ans, biologiquement jeunes mais socialement âgés, et les « vieux-vieux » plus âgés et pour qui « les risques pathologiques et la probabilité de vivre seuls diffèrent de façon notable », donc physiologiquement et socialement âgés. Quand on étudie ce dictionnaire, on constate qu’il a pour effet d’accroître le flou des définitions, et, sinon d’induire la stigmatisation, du moins de la renforcer.
« Vieux » signifie « qui est là depuis longtemps », il est neutre en soi. Mais le plus souvent, dans notre société de consommation, il a la valeur négative de la chose usée, bonne à jeter. Employé pour une personne, le terme est devenu tellement synonyme de « grabataire », « impotent », que l’on préfère ne plus l’employer. « Vieux » et « vieille » pourront servir à renforcer une insulte comme « sale » ou « pauvre ». Dans le langage courant, on emploiera les expressions petits-vieux, petites-vieilles, avec une pointe d’affectueuse commisération. Et les expressions « être vieux dans sa tête » ou « être vieux dans son cœur », si souvent entendues, ne renvoient-elles pas à l’immobilisme, au repli sur soi, à l’égoïsme, au refus de toute altérité ? Le terme « vieux » est ainsi conceptuellement dévalorisé. Quant à « vieillard », il apparaît plus dévalorisant encore, servant à désigner des « personnes très âgées, invalides, séniles ». « Vieux » et « vieillards » étant bannis du vocabulaire, on a recours à l’expression « personne âgée » que le dictionnaire de 1984 définissait ainsi : « personne plus âgée que la moyenne des autres personnes de la population dans laquelle elle vit ». Cette définition, peu claire, s’accompagnait de quatre notes destinées à apporter des précisions, notamment celle-ci : « Plus récemment, on associe les personnes âgées et les retraités car, en France, en ce dernier quart de xxe siècle, on peut être retraité bien avant d’être vieux, au sens de diminué ». Le démographe Paul Paillat, qui avait participé à ce dictionnaire, commentait cette distinction : « les retraités eux-mêmes ne tiennent pas à être assimilés à des personnes âgées, ce qui implique de leur part un jugement négatif de la vieillesse et même de l’âge ». On voit que l’expression « personne âgée », employée pour éviter la stigmatisation dont sont porteurs les termes « vieux » et « vieillard », n’atteint pas son objectif. Retraité par contre souligne la reconnaissance sociale. Le retraité a des droits, il a travaillé de longues années et bien mérité de la société. Mais lorsque l’on distingue les retraités et les personnes âgées (CNRPA, Comité National des Retraités et des Personnes Âgées créé par décret en 1982), on pourrait laisser entendre que les personnes âgées ne sont plus des retraités. De même, lorsque l’on différencie « les adultes » et « les personnes âgées », ne laisse-t-on pas entendre que celles-ci ne sont plus des adultes. Rappelons que l’une des premières chartes relatives aux droits et libertés des personnes âgées énonçait en préambule : « la personne âgée est une personne ». Fallait-il qu’on l’ait oublié pour être obligé ainsi de le rappeler ?
Les années 1960 ont vu apparaître l’expression « troisième âge » au moment où les conditions de vie des retraités commencent à s’améliorer, avec un accroissement des ressources, un meilleur état de santé et une activité maintenue. Cette image, porteuse d’une idéologie activiste, est rassurante. Elle est censée générer des comportements en conformité avec ceux des autres catégories d’âge, tels que le sport, les études, les loisirs, les voyages… C’est une manière, pour ceux qui y adhèrent, de se sentir bien intégrés dans la société. Mais le troisième âge ayant échoué à recouvrir l’ensemble de la population âgée, il a fallu inventer l’expression « quatrième âge » qui désigne « l’ensemble des personnes très âgées ou invalides âgées ». Aujourd’hui, ces expressions ne sont plus guère usitées, peut-être parce qu’elles catégorisent plus qu’elles ne désignent, peut-être aussi parce que l’expression « troisième âge » évoquait une image de retraités par trop individualistes, consommateurs de loisirs indifférents au malaise économique ambiant.
Le terme « senior », qui reprend l’idéologie activiste, a aujourd’hui le vent en poupe. Il s’inscrit dans une approche sportive, entre le junior et le vétéran. Ses promoteurs sont issus du marketing. Le terme a pour vocation de désigner « l’ensemble des gens âgés, nouveaux consommateurs, nombreux et fortunés » (Treguer, 2002renvoi vers). Les seniors s’affirment comme actifs, consommateurs, mais ils manifestent également un souci de reconnaissance et d’utilité sociale à travers des activités de bénévolat ou des aides diverses dans le cadre de la sphère familiale. Succédant chronologiquement aux seniors, apparaît la figure de l’aîné. L’aîné se situe en référence au cadet. Dans de nombreuses cultures, il a suprématie sur ce dernier. Les images du senior et de l’aîné reposent sur des critères économiques et sociaux, qui manifestent une volonté d’intégration. Mais quand vient le moment du bilan des potentialités physiques de l’individu, lorsque le critère retenu est du registre biologique, surgit la figure du dépendant. L’usage du mot s’est imposé lorsque des commissions ont été chargées d’étudier le coût des handicaps au grand âge. Dès lors, on a commencé à mesurer les déficits et les incapacités à travers des grilles : aujourd’hui, c’est la grille AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources) qui est employée pour définir les aides dont ont besoin les personnes âgées dépendantes. La fin des années 1970 fut marquée par une dérive du vocabulaire gérontologique vers une objectivation des personnes. C’est à cette période qu’ont été créés les V60, V120, V240, à savoir les établissements d’accueil de 60, 120 ou 240 vieux, « V » signifiant « vieux ». L’objectivation se fait insidieusement : on dit « les Alzheimer », « les fauteuils », « les lits », « les GIR 1 » (en référence à la grille AGGIR)… En centrant la vieillesse sur le corps et ses incapacités, on en fait un non-sens caractérisé par « le ne plus » : ne plus être capable, productif, désirable, autonome… La célèbre formule énoncée par le Général de Gaulle, « La vieillesse est un naufrage », apparaît plus que jamais comme une représentation dominante de notre société.
Bien vieillir est donc devenu un enjeu de santé publique. Il s’agit d’éviter les maladies et handicaps, c’est-à-dire de maintenir la santé et l’autonomie, d’avoir un bon fonctionnement physique et mental, c’est-à-dire de rester cognitivement et physiquement apte, enfin de continuer à être socialement engagé, socialement actif. Finalement, il s’agit de préserver un état au cours d’un processus qu’est le vieillissement. Paradoxe, renforcé par la notion de vieillissement réussi qui génère son corollaire stigmatisant, le vieillissement raté.
Dans le dictionnaire de 1984 apparaissait un mot nouveau : l’âgisme. L’âgisme est défini comme « une attitude et un comportement visant à déprécier les individus du fait de leur âge ». Il est précisé que ce terme est formé par analogie avec « racisme ». Il s’emploie particulièrement pour exprimer la discrimination dont sont victimes les personnes âgées. Mais on pourrait dire que, contrairement au racisme qui dans une démocratie est le fait d’une minorité, l’âgisme est une attitude culturellement inscrite dans les structures de notre société.
Il n’y a pas de corrélation entre la représentation sociale qu’une société a de l’un des âges de la vie et le traitement qu’elle lui réserve. Jamais peut-être une société n’aura tant fait pour ses vieux qui sont économiquement et socialement protégés. Mais le regard porté sur eux est profondément négatif, et le risque existe d’un fossé grandissant entre les personnes âgées et le reste de la société.

Le vécu intime du vieillissement

Vieillir, c’est se métamorphoser. Une double épreuve s’impose, celle de la dissociation et de la reconnaissance : difficile de faire coïncider l’image que l’on se fait de soi avec celle que les autres s’en font et, ne pouvant pas non plus se fier avec certitude à l’image que le miroir renvoie, il reste à se situer avec difficulté entre ces trois images. Quand le décalage entre le ressenti et l’apparence devient trop aigu, le doute s’installe. L’âge chronologique ne correspond plus à l’âge subjectif. Dans cette perspective, la jeunesse serait le temps de la coïncidence entre l’être et le paraître, la vieillesse en serait la rupture. Le sentiment d’étrangeté résulte de cette dissociation.
La prise de conscience peut mener à la colère ou à l’humiliation. La honte naît parfois de ces prévenances qui font ressortir la fragilité. Quant à l’indifférence, elle est cruellement ressentie. L’invisibilité s’installe. La relation aux autres est devenue dissymétrique et reconnue comme telle. « Ils pensent qu’on a besoin de leur affection et qu’ils n’ont plus besoin de la nôtre ».
Certains luttent et refusent le processus physiologique comme ils refusent le retrait social. Puisque la société dénie toute valeur à la vieillesse, ils veulent rester jeunes à tout prix. D’autres acceptent d’être vieux, voire s’y résignent.
Mais, quelle que soit l’attitude adoptée, l’absence de congruence entre les différentes injonctions sociales, souvent paradoxales, peut conduire à culpabiliser : honte de ne plus être jeune, beau et dynamique ou de vouloir encore le paraître, honte de se sentir inutile ou de vouloir « s’accrocher », honte de profiter et peur de gêner… peur qui mène parfois la personne à vivre en marge afin de ne pas subir l’opprobre des autres.
La métamorphose, vécue comme une violence, fait du corps un compagnon obligé qui ne se plie plus aux désirs ni aux attentes. Il devient un alter ego exigeant et tyrannique. Sa présence de plus en plus envahissante compense le décès des pairs d’âge et remplit le vide social qui s’installe. La prise de conscience du « jamais plus » renforce l’angoisse du déclin.
En 2006, en France, près de 3 000 personnes de plus de 65 ans se sont suicidés, au domicile comme en Ehpad (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). La perte des rôles sociaux, la perte des proches, la maladie physique et psychique, l’altération de l’identité, et peut-être surtout le regard que la société porte sur cet âge de la vie, apparaissent comme autant de facteurs qui viennent se conjuguer pour expliquer un tel phénomène.
L’âgisme conduit presque inévitablement à poser la question : « Avez-vous peur de vieillir ? », comme on pouvait l’entendre récemment sur une chaîne de télévision. Poserait-on la question : « Avez-vous peur de vivre ? » ? Car finalement, c’est la même. Il semble urgent de repenser les termes de l’échange entre les générations et de redonner un rôle social aux plus âgés. On a sans doute là une voie pour modifier le regard porté sur le vieillissement, et pour changer les représentations sociales très négatives attachées aux personnes âgées.

Bibilographie

[1] ariès p. Essais sur l’histoire de la mort en Occident du Moyen à nos jours. Seuil; 1975; Retour vers
[2] balvet p. Psychiatrie des vieillards. Esprit. 1963; Retour vers
[3] chauvel l. Le destin des générations. Structure sociale et cohortes en France au XXe siècle. PUF; 1998; Paris:Retour vers
[4] fassin d, granjean h, kaminski m, lang t, leclerc a. Les inégalités sociales de santé. Inserm, La Découverte; 2000; Retour vers
[5] maisondieu j. Être vieux. De la négation à l’échange. Autrement. 1991, n° 124; Retour vers
[6] moscovici s. Psychologie sociale. PUF; 1984; Paris:Retour vers
[7] saint etienne c. Génération sacrifiée, le 20-45 ans. Plon; 1993; Paris:Retour vers
[8] treguer jp. Le senior marketing. Dunod; 2002; Paris:Retour vers

Jacqueline Trincaz

LIRTES EA 7313, Université Paris Est Créteil Val-de-Marne, Créteil

Évaluation de l’apport d’un programme d’activité physique et de séances éducatives dans la prévention des chutes

Contexte

Le Programme intégré d’équilibre dynamique (PIED) est un programme multifactoriel de prévention des chutes destiné aux personnes âgées. Ce programme a été créé au Québec (Canada) en 1995 par une équipe multidisciplinaire comportant des ergothérapeutes, des kinésiologues et des épidémiologistes. L’implantation de PIED en France a été rendue possible à partir de l’automne 2005 grâce une convention entre l’Institut national de santé publique du Québec et la Fédération Française Sports pour Tous qui a été autorisée à utiliser le guide de formation québécois pour former des éducateurs sportifs français à la prévention des chutes. La Fédération Française Sports pour Tous a alors travaillé en étroite collaboration avec l’Inpes et divers professionnels de la santé (médecins, gériatres, kinésithérapeutes, pharmaciens, ergothérapeutes...) pour actualiser le guide de formation du programme PIED avec des données sanitaires et épidémiologiques françaises et pour construire des outils d’éducation à la santé propres au contexte socioculturel français (Fauchard et Le Cren, 2007renvoi vers). Le programme PIED s’appuie d’ailleurs sur les recommandations du Référentiel de bonnes pratiques sur la prévention des chutes chez les personnes âgées à domicile de l’Inpes (Bourdessol et Pin, 2005renvoi vers).
Les objectifs du programme PIED sont d’améliorer l’équilibre et la force des jambes, de contribuer à maintenir la densité de la masse osseuse aux sites les plus vulnérables aux fractures (poignets, hanches, colonne vertébrale), de susciter l’adoption et le maintien d’une activité physique régulière, d’améliorer le sentiment d’efficacité à l’égard de la prévention des chutes ainsi que de promouvoir la sécurité à domicile et les comportements sécuritaires. La composante principale de cette intervention consiste en sessions bi-hebdomadaires d’exercices en groupe s’étalant sur une période de 12 semaines, jumelées à des exercices à domicile et à des capsules éducatives de 30 minutes une fois par semaine.
Le programme d’exercices est conçu de façon à stimuler divers systèmes impliqués dans l’équilibre comme la proprioception, la force des jambes et la mobilité des chevilles (Duncan et coll., 1993renvoi vers). L’ensemble des exercices proposés permet de renforcer les groupes musculaires essentiellement impliqués dans le contrôle postural mais également de travailler les réactions d’équilibration. En effet, selon Winter et coll. (1996renvoi vers), le contrôle de l’équilibre s’effectue principalement grâce à deux stratégies musculaires : une stratégie de hanche et une stratégie de cheville. Brièvement, les muscles abducteurs et adducteurs de hanche permettent de contrôler l’équilibre médio-latéral (oscillations de gauche à droite) alors que les muscles fléchisseurs plantaires et fléchisseurs dorsaux de cheville permettent de contrôler l’équilibre antéro-postérieur (oscillations d’avant en arrière). Dans le cadre de perturbations externes ou internes compromettant l’équilibre dynamique, les extenseurs des membres inférieurs et les muscles responsables de la stabilisation du tronc sont également impliqués. Le programme PIED propose de nombreux exercices centrés sur le renforcement de ces groupes musculaires. Par exemple, de manière à renforcer les muscles abducteurs de hanche, des exercices de maintien de l’équilibre sur une jambe sollicitent en priorité ces muscles tout en plaçant l’individu dans une situation largement rencontrée dans la vie de tous les jours lors de la marche.
De même, les exercices composant le programme PIED stimulent la plupart des modalités sensorielles affectées par les effets du vieillissement (Manchester et coll., 1989renvoi vers ; Perry, 2006renvoi vers). Parmi celles-ci, la proprioception et notamment les informations provenant des afférences cutanées plantaires sont essentielles au contrôle postural (Kavounoudias et coll., 1999renvoi vers et 2001renvoi vers). En effet, la sole plantaire permet une interface directe avec l’environnement extérieur et fournit donc des informations précises sur l’orientation du corps humain dans son environnement. Des exercices du programme PIED se focalisent sur leur stimulation en proposant des tâches effectuées pieds nus.
Par ailleurs, le programme PIED propose des exercices visant l’amélioration de la mobilité articulaire et segmentaire ainsi qu’un travail important de prévention des risques de fractures. Concernant ce dernier point, des activités impliquant des chargements sur les membres inférieurs et les poignets favorisent le remodelage osseux et réduisent ainsi le développement de l’ostéoporose, maladie qui affecte considérablement cette population.
Enfin, le programme inclut des exercices visant l’apprentissage des techniques pour se relever du sol suite à une chute. Ce qui est important pour la confiance en soi et la confiance en son équilibre.
Des études visant à évaluer l’efficacité du programme PIED ont déjà été réalisées au Québec avec des résultats significatifs au niveau de l’équilibre unipodal, le tandem et la marche en tandem mais pas pour le Functional Reach et la force musculaire (Robitaille et coll., 2005renvoi vers ; Filiatrault et coll., 2008renvoi vers). Toutefois, si le contenu du programme PIED est globalement le même en France qu’au Québec, l’environnement social et associatif est bien différent de celui de nos cousins d’outre-Atlantique sur plusieurs aspects. Le promoteur du programme en France est une fédération sportive avec ses animateurs sportifs diplômés, alors qu’au Québec il s’agit directement du Ministère de la santé via des Directions régionales de santé publique et l’animation se fait par des professionnels de l’activité physique ayant reçu une formation des Directions de santé publique. Par ailleurs, les partenaires et les collaborateurs de ce programme sont un peu différents dans les deux pays : dans la province de Québec, les centres locaux de santé communautaire se chargent généralement de l’organisation, du financement et du recrutement des seniors en collaboration avec les organismes communautaires où sera offert le programme, tandis qu’en France, il s’agit d’établir des accords loco-régionaux avec de nombreux partenaires et structures diverses (mairies, CPAM, Carsat, CCAS, Clic, maisons de retraites, centres sociaux ruraux...). Enfin, le nombre de seniors ciblés par PIED est beaucoup plus important en France et la culture des seniors face à des programmes de prévention semble bien différente qu’au Québec. Ces quelques différences montrent déjà combien il devient primordial et nécessaire d’effectuer une évaluation spécifique de ce programme sur le territoire français afin de valider et d’approfondir les résultats trouvés au Québec.
Par ailleurs, les évaluations de programmes de prévention des chutes portent généralement exclusivement sur des paramètres physiques tels que l’équilibre et la force musculaire. Cependant, les facteurs psychologiques (peur de chuter, confiance dans son équilibre, équilibre perçu…) ont également un rôle important dans la prévention des chutes (Cumming et coll., 2000renvoi vers ; Filiatrault et coll., 2007renvoi vers). De fait, le besoin de considérer les facteurs psychologiques dans la prévention des chutes est de plus en plus reconnu, car d’une part ces facteurs influencent la qualité de vie et le fonctionnement des aînés, d’autre part ces facteurs sont aussi des prédicteurs des chutes (Tinetti et coll., 1994renvoi vers ; Salkeld et coll., 2000renvoi vers). Ils devraient donc être considérés comme un facteur de risque de chute à part entière (Cumming et coll., 2000renvoi vers ; Delbaere et coll., 2004renvoi vers). Selon Friedman et coll. (2002renvoi vers), la peur de chuter peut être un problème de santé publique d’importance égale aux chutes. Malheureusement, on connaît peu de choses sur les effets de ces programmes sur des dimensions psychologiques (Gagnon et coll., 2005renvoi vers). Le programme PIED comportait des capsules d’éducation à la santé où l’on parlait des risques de chute dans les divers environnements, et les auteurs craignaient que les participants au programme deviennent trop craintifs et c’est ce qu’ils ont voulu mesurer lors de l’évaluation initiale du programme. Cela pour se rendre compte que le programme n’avait pas affecté la peur de chuter et la confiance en leur équilibre des participants (Filiatrault et coll., 2008renvoi vers). Le programme PIED n’ayant pas encore de capsule d’éducation à la santé spécifique pour améliorer la confiance en son équilibre, nous tenions à nous assurer à travers cette étude que les facteurs psychologiques resteront au moins à des niveaux similaires. La perspective de travail serait bien évidemment de proposer une amélioration du programme PIED en insérant des capsules d’éducation à la santé sur la confiance en son équilibre.
En outre, de plus en plus d’études suggèrent que les aînés, qu’ils aient chuté ou non, ressentent d’autres difficultés psychologiques vis-à-vis des chutes (Maki et coll., 1991renvoi vers). Ces difficultés se conceptualisent à travers la peur de chuter (Tinetti et coll., 1990renvoi vers ; Cameron et coll., 2000renvoi vers ; Yardley et coll., 2006renvoi vers), un faible sentiment d’efficacité personnelle dans des situations mettant en jeu l’équilibre (Tinetti et coll., 1990renvoi vers et 1994renvoi vers ; Cumming et coll., 2000renvoi vers) et l’évitement de certaines activités (Tinetti et coll., 1990renvoi vers ; Yardley et coll., 2006renvoi vers). La peur de chuter a été identifiée comme étant courante chez les aînés (Howland et coll., 1998renvoi vers ; Kempen et coll., 2009renvoi vers), chuteurs ou non-chuteurs (Tinetti et coll., 1988renvoi vers ; Arfken et coll., 1994renvoi vers). La prévalence de la peur de chuter chez les aînés est de 20 à 60 % (Tinetti et coll., 1988renvoi vers ; Scheffer et coll., 2008renvoi vers), plus précisément entre 12 et 65 % des aînés qui n’ont jamais chuté ont peur de chuter (Tinetti et coll., 1994renvoi vers ; Lachman et coll., 1998renvoi vers), et 29 à 92 % des aînés qui ont déjà chuté ont peur que cela se reproduise (Jørstad et coll., 2005renvoi vers). Les femmes sont majoritairement affectées par cette peur (Jørstad et coll., 2005renvoi vers). Certains travaux récents ont pointé une tendance à surestimer ou sous-estimer sa peur de chuter qui n’est pas directement corrélée avec le risque objectif de chuter (Delbaere et coll., 2010renvoi vers) : une meilleure compréhension des caractéristiques sociodémographiques et socio-cognitives des personnes âgées ayant peur de chuter et de l’impact différentiel des programmes de prévention des chutes sur ces groupes permettrait de mieux orienter les personnes âgées vers les stratégies de prévention les plus adaptées. Une des stratégies fréquemment adoptée par les aînés pour ne plus avoir peur est de restreindre leurs activités quotidiennes ou de les éviter (McCormack et coll., 2004renvoi vers). Cette stratégie concerne 15 à 55 % des aînés (Tinetti et coll., 1988renvoi vers ; Fletcher et coll., 2004renvoi vers). La peur de chuter et l’évitement de certaines activités peuvent avoir des conséquences négatives, et parfois plus invalidantes que la chute elle-même (Cumming et coll., 2000renvoi vers). Parmi ces conséquences, nous pouvons noter le déclin fonctionnel (Cumming et coll., 2000renvoi vers ; Deshpande et coll., 2008renvoi vers ; Scheffer et coll., 2008renvoi vers), la restriction des activités sociales (Howland et coll., 1998renvoi vers), la diminution de la qualité de vie (Arfken et coll., 1994renvoi vers ; Cumming et coll., 2000renvoi vers ; Scheffer et coll., 2008renvoi vers), l’augmentation du risque de chuter (Friedman et coll., 2002renvoi vers ; Scheffer et coll., 2008renvoi vers) et l’entrée dans des institutions pour personnes âgées (Cumming et coll., 2000renvoi vers). Les aînés qui disent avoir peur de chuter, montrent un manque de confiance dans leur capacité à réaliser certaines activités sans tomber, et ont tendance à diminuer la quantité et les types d’activités physiques, ce qui peut les amener à chuter par la suite (Jørstad et coll., 2005renvoi vers). Bien que la peur de chuter comme le manque de confiance en son équilibre puissent être considérés comme étant aussi des facteurs protecteurs, ces facteurs peuvent mener à l’évitement exagéré de la réalisation de certaines activités (Filiatrault et coll., 2008renvoi vers), à un isolement social et à de l’anxiété (Howland et coll., 1998renvoi vers), voire à une dépression (Arfken et coll., 1994renvoi vers ; Howland et coll., 1998renvoi vers ; Gagnon et coll., 2005renvoi vers). Tout ceci peut conduire à un déconditionnement physique et donc interférer sur l’indépendance des aînés. Au final, cela peut aussi avoir pour conséquence d’augmenter le risque de chute et diminuer la qualité de vie (QDV). On devine ainsi la mise en place d’un cercle vicieux de déconditionnement et la nécessité de contrôler ces variables dans un tel programme.

Objectifs

L’objectif de cette étude est d’évaluer l’efficacité du programme PIED tel qu’il est proposé en France sur l’équilibre objectif. Nous souhaitons connaître également les effets du programme PIED sur des variables psychologiques en lien avec les chutes (peur, qualité de vie).

Méthodes et mesures

Un devis expérimental a été réalisé auprès de 292 aînés autonomes qui ont été répartis aléatoirement en deux groupes (expérimental « exp » et contrôle « cont »).

Population à l’étude

Nous avons questionné et testé des aînés qui répondaient aux critères d’inclusion suivants : plus de 60 ans, ayant chuté durant l’année en cours ou ayant peur de chuter, ne présentant pas de contre-indication médicale à la pratique d’activités physiques adaptées et ayant signé le consentement éclairé. Les critères d’exclusion étaient les suivants : personnes dans l’incapacité de donner leur consentement éclairé, personnes ne disposant pas de certificat médical autorisant la pratique d’activités physiques adaptées ou ayant déjà participé à un programme de prévention des chutes. Les personnes ont été recrutées dans diverses régions de France comme cela se fait habituellement, c’est-à-dire par les responsables régionaux de la Fédération Française Sports pour Tous qui travaillent dans ce domaine avec des partenaires et structures diverses (mairies, CPAM, Carsat, Clic, CCAS, maisons de retraites, centres sociaux ruraux...). En ce qui concerne la taille de l’échantillon, le nombre de sujets retenus est de 324 (soit 162 sujets pour chacun des deux groupes). Ce nombre a été déterminé sur la base d’un de nos critères principaux (taux de chute) ainsi que sur deux variables indépendantes issues de deux études ayant précédemment évalué les effets du programme PIED (Powell et Myers, 1995renvoi vers ; Filiatrault et coll., 2008renvoi vers) et utilisant des variables similaires à notre étude.

Procédures de collecte

L’étude a été réalisée dans cinq régions de France (Languedoc, Picardie, Paca, Aquitaine, Bretagne). Dans chaque centre, une première journée de passation de tests et questionnaires permettant de vérifier les critères d’inclusion était réalisée sous la direction des chercheurs de l’équipe aidée d’une coordinatrice nationale du projet et de deux collaborateurs formés spécifiquement à cet effet afin de garantir une homogénéité dans le recueil de données. Nous avons ainsi questionné et fait passer des tests à 344 personnes.
Selon la figure 1Renvoi vers, nous constatons qu’entre le temps un et le temps deux, il y a eu de nombreuses absences, dues à des maladies, raisons personnelles, abandons… Ainsi, notre échantillon final est composé 83 personnes qui ont répondu à tous les questionnaires et passé l’ensemble des tests.
Figure 1 Nombre de personnes inclues dans l’étude aux différents temps de l’évaluation de l’efficacité du programme PIED
En France, le programme PIED est organisé par les comités régionaux et départementaux de la Fédération Française Sports pour Tous, en collaboration avec les partenaires (mairies, CPAM, Cram, CCAS, Clic, maisons de retraites, centres sociaux ruraux…). Des réunions d’information sont organisées à destination du public senior pour faire la promotion de ce programme et les inviter à s’y inscrire. Une fois le programme lancé, les participants viennent aux séances en groupe une fois par semaine durant 12 semaines. La diminution du nombre de séances par semaine (fréquence) est intervenue depuis deux à trois ans dans les régions car les principaux financeurs de programme de prévention des chutes ont diminué de manière importante les enveloppes financières obligeant les principaux opérateurs comme la Fédération Française Sports pour Tous à diminuer la fréquence des séances pour pouvoir continuer à mettre en place des programmes de prévention des chutes.
À chaque rencontre, un animateur diplômé encadre le groupe (de huit à douze personnes) sur une heure d’activité physique et sur 30 minutes de capsules éducatives. Durant ces douze semaines, on demande également aux seniors de pratiquer au minimum une séance d’activité physique à domicile une fois par semaine d’une durée de 30 minutes. La séance d’activité physique en groupe est composée d’une partie « échauffement » (plutôt articulaire) de dix minutes, d’une partie « corps de séance » (travail cardiovasculaire-renforcement musculaire-équilibre) de 40 minutes, et d’une partie « étirement » de dix minutes. Les capsules éducatives sont animées par le même animateur sportif à la suite de la séance d’activité physique en groupe, et ont pour objectif d’informer les participants sur différents thèmes (les bienfaits de l’activité physique chez les seniors, les os, l’aménagement sécuritaire du domicile, le choix des chaussures, la gestion des médicaments…). La méthode de la pédagogie active est utilisée. La séance à domicile est remise aux participants sous la forme d’une affiche et est travaillée lors de la première séance en groupe. Des réajustements sont effectués à chaque séance en groupe par l’animateur si cela est nécessaire. Le programme PIED est utilisé comme atelier passerelle et a pour objectif d’inciter les participants à continuer l’activité physique après le programme de façon régulière. Des liens avec les clubs EPMM de proximité sont mis en place lors des douze semaines de programme.

Mesures

Pour évaluer les capacités de maintien postural, différents tests cliniques ont été effectués. Ainsi, le Functional Reach Test (FRT) a été utilisé pour évaluer les limites de la stabilité dans la direction antéro-postérieure (Duncan et coll., 1990renvoi vers ; Berg et coll., 1992renvoi vers ; Duncan et coll., 1992renvoi vers). De même, la stabilité médio-latérale a été évaluée au moyen du test One-leg Stance test (OLS) qui évalue le maintien de l’équilibre sur une jambe (Berg et coll., 1992renvoi vers ; Vellas et coll., 1997renvoi vers ; Jonsson et coll., 2004renvoi vers). Ce test est particulièrement intéressant car il implique un contrôle fin des abducteurs/adducteurs de hanches et inverseurs/éverseurs de cheville. Ces muscles étant fortement impliqués dans le contrôle de l’équilibre, ce test permet de faire ressortir de possibles faiblesses musculaires. En outre, pour évaluer l’autonomie fonctionnelle lors de tâche impliquant un déplacement de la base de support, le Timed Up and Go test (TUG) a été effectué (Podsiadlo et Richardson, 1991renvoi vers). Ce test est particulièrement intéressant car il implique un mouvement du corps entier et donc la prise en compte de déplacements segmentaires importants dans le contrôle de l’équilibre. Par ailleurs, les chutes intervenant souvent au domicile, lors d’activités quotidiennes, ce test permet donc de préciser l’analyse des risques de chute et de l’étendre à des tâches largement effectuées au quotidien (lever de chaise, marcher, faire demi-tour). Enfin, les chutes peuvent être également causées par une faiblesse musculaire, notamment des muscles des membres inférieurs. Ainsi, nous avons décidé dans le cadre de ce projet d’utiliser le 30 s-Sit-to-Stand Test (STS) pour évaluer de façon indirecte la force des membres inférieurs et l’endurance des personnes (Jones et coll., 1999renvoi vers).
En ce qui concerne les variables psychologiques, les participants ont rempli le questionnaire de qualité de vie (SF-36) (Ware, 2000renvoi vers). Ce dernier est constitué de 36 items et explore huit dimensions : fonctionnement physique et limitations dues à l’état physique, douleurs physiques, santé perçue, vitalité, vie et relation avec les autres, limitations dues à l’état, santé psychique. Il existe une neuvième dimension qui correspond en fait à un seul item : évolution de la santé générale. Ces huit dimensions saturent sur deux facteurs de second ordre, le score résumé physique et le score résumé psychique. La version française a été élaborée et validée par Leplège, Ecosse, Verdier et Pernege en 1998 (Leplège et coll., 2001renvoi vers). Ce questionnaire largement utilisé chez une population âgée présente des qualités psychométriques satisfaisantes.
La peur de chuter a été évaluée à travers une question : « Avez-vous peur de chuter ? » (Tinetti et coll., 1990renvoi vers ; Howland et coll., 1993renvoi vers ; Tinetti et coll., 1994renvoi vers ; Powell et Myers, 1995renvoi vers ; Cameron et coll., 2000renvoi vers ; Jørstad et coll., 2005renvoi vers). Les modalités de réponse étaient de jamais à souvent, et comprenaient 4 catégories. La confiance en son équilibre a été évaluée avec l’échelle ABC Scale (Powell et coll., 1995renvoi vers) qui permet de connaître le pourcentage de confiance en son équilibre des personnes âgées. En ce qui concerne les restrictions d’activités, une question a été posée : vous arrive-t-il de limiter vos activités dans votre domicile ou à l’extérieur ? (0=jamais à 4=très souvent). Enfin, l’équilibre subjectif a été évalué à travers une question : « Sur l’échelle suivante, comment considérez-vous votre niveau d’équilibre, de 1=très pauvre à 10=excellent ? ».
Diverses variables ont été retenues (tableau Irenvoi vers).

Tableau I Récapitulatif des variables analysées

Variables
 
Tests utilisés
Variables dépendantes
Taux de chutes
1 questiona
Variables indépendantes
  
Variables motrices
Stabilité antéro-postérieure
Functional Reach Test
 
Stabilité médio-latérale
One-Leg Stance test
 
Mobilité fonctionnelle
Timed «up and go » test
 
Force musculaire des membres inférieurs
Sit-to-Stand Test
 
Qualité de vie
SF-36
Variables psychologiques
Peur de chuter
1 questionb
 
Restrictions des activités
1 question
 
Confiance en son équilibre
ABC Scale (15 questions)
 
Équilibre perçu
1 questionc
Variables de contrôles
Condition de vie
 
 
Âge
 
 
Genre
 

a Godin et Shephard, 1985renvoi vers ; b Filiatrault et coll., 2007renvoi vers ; c Filiatrault et coll., 2004renvoi vers

Analyses

Les données (questionnaires et tests physiques) ont toutes subi une double saisie. La première saisie a été effectuée par l’une des deux coordonnatrices du projet présente sur les lieux d’évaluation et la seconde saisie a été faite par le chercheur de l’équipe. Ce chercheur s’est chargé du nettoyage et de la vérification des données.
Pour vérifier d’éventuelles différences entre le groupe contrôle et le groupe expérimental sur les caractéristiques physiques (âge, taille, masse…), des tests t pour échantillons indépendants étaient effectués. Pour les variables sociodémographiques, des tests du Chi2 étaient réalisés. Par ailleurs, pour vérifier les différences entre les groupes aux différentes périodes d’évaluation (T1 et T2), des analyses de la variance à mesures répétées à deux facteurs (facteur groupe et facteur période d’évaluation) étaient effectuées. Des analyses post hoc étaient conduites lorsque nécessaire au moyen du test de Newman-Keuls. Enfin, pour connaître les relations entre le nombre de chutes et l’ensemble des autres variables, des corrélations linéaires simples (r de Pearson) étaient réalisées.
Nous avons effectué des analyses en régression linéaire pour le TUG en utilisant la méthode d’inclusion progressive (forward inclusion). Les variables comprises dans l’analyse sont pour le premier bloc les données sociodémographiques (âge, genre, IMC), le deuxième bloc est constitué de variables médicales et de prévention (nombre de chutes, nombre de médicaments, participation à une réunion d’information sur les chutes), puis des variables sur des données psychologiques (peur, confiance, restriction des activités) et enfin l’équilibre subjectif perçu et la qualité de vie.

Résultats

Recrutement

L’échantillon total était majoritairement composé de femmes (86,92 %), l’âge moyen était de 78,51 ans (ET=8,75). Parmi l’ensemble de ces individus, 292 personnes répondaient aux critères d’inclusion. Les individus exclus (non admis : 15,1 %) l’ont été pour différentes raisons liées au non-respect des critères d’inclusion (âge, aucune chute et un temps inférieur à 13,5 s au Timed Up and Go test, ayant déjà participé à un programme de prévention des chutes…).
La moyenne d’âge de cet effectif global est de 78,95 ans (ET=8,35 ; [61,30-96,59]). Parmi les personnes, 89,7 % sont des femmes (N=262).
Nous n’avons retenu pour l’analyse statistique des effets du programme PIED que les sujets répondant aux critères d’inclusion, ayant complété l’ensemble du questionnaire et ayant réalisé l’ensemble des tests physiques et psychologiques.

Caractéristiques des pratiquants

Quatre-vingt-trois personnes ont répondu aux critères d’éligibilité et ont passé l’ensemble des tests et questionnaires au temps T1 (début de programme) et T2 (fin de programme). La répartition aléatoire faite lors de l’inclusion nous permet de dénombrer 44 aînés dans le groupe contrôle (53 %) et 39 dans le groupe expérimental (47 %). Au total, neuf hommes (10,8 %) et 74 femmes (89,1 %) sont présents. Dans le groupe contrôle, nous notons la présence de sept hommes et de 37 femmes, et dans le groupe expérimental deux hommes et 37 femmes. L’âge moyen de l’échantillon est de 79,72 ans (min=62,14 ans ; max=92,83 ; ET=8,11).

Comparaison des groupes expérimental et contrôle au temps T1

Les analyses de Chi2 ont permis de garantir que les deux groupes sont équivalents sur l’ensemble des variables testées (tableau IIrenvoi vers).

Tableau II Comparaison des groupes expérimental (« exp ») et contrôle (« cont ») sur les variables sociodémographiques et histoire des chutes

Groupe « exp » versus « cont »
Chi2
ddl
p
Genre
2,48
1
NS
Statut sociodémographique
2,51
2
NS
Réunion pied
0,29
1
NS
Atelier prévention-chutes
0,16
1
NS
Peur de chuter (oui/non)
0,003
1
NS
Chute (oui/non)
0,001
1
NS
Consultation médecin
0,35
2
NS
Consultation urgence
0,46
2
NS

ddl : Degré de liberté

En ce qui concerne les variables quantitatives, nous nous apercevons suite aux analyses avec le t de Student groupes indépendants (tableaux IIIrenvoi vers, IVrenvoi vers et Vrenvoi vers) que les deux groupes sont statistiquement identiques quant aux différentes variables testées. Par contre, en ce qui concerne l’équilibre subjectif, le groupe expérimental déclare posséder un meilleur équilibre que le groupe contrôle (tableau IVrenvoi vers).

Tableau III Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour les paramètres anthropométriques au temps T1

 
cont (n=44)
exp (n=39)
P
Taille
159,5 (8,4)
159,6 (6,8)
NS
Poids
63,1 (9,78)
61,7 (11,5)
NS
IMC
24,73 (3,2)
24,1 (3,4)
NS
Âge
80,03 (8,7)
79,3 (7,5)
NS

Tableau IV Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour les résultats aux tests physiques au temps T1

 
cont (n=44)
exp (n=39)
P
Functional Reach test (cm)
25,2 (7,2)
23,2 (7,3)
NS
One-Leg Stance test (s)
11,1 (10,4)
10,3 (9,3)
NS
Timed Up and Go test (s)
12,1 (4,0)
12,5 (5,0)
NS
Five Times Sit-To-Stand (s)
16,3 (4,7)
16,42 (6,8)
NS
Équilibre subjectif (1=très pauvre ; 10=excellent)
5,4 (1,8)
6,5 (1,7)
0,001
En ce qui concerne les variables psychologiques nous remarquons que les deux groupes ont des caractéristiques équivalentes sur ces dimensions (tableau Vrenvoi vers).

Tableau V Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour les variables psychologiques liées à la peur de chuter

 
cont (n=44)
exp (n=39)
P
Peur (1=jamais ; 4=très sovent)
2,5(0,7)
2,4 (0,9)
NS
Confiance (0=pas du tout confiant ; 100=très confiant)
67,20 (19)
69,9 (19,7)
NS
Restrictions des activités (1=jamais ; 4=très souvent)
2,0 (0,9)
1,8 (0,9)
NS
Comme le montre le tableau VIrenvoi vers, les deux groupes sont équivalents en ce qui concerne la qualité de vie (physique et psychologique).

Tableau VI Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour la qualité de vie

 
cont (n=44)
exp (n=39)
P
Qualité de vie physique
39,6(7,3)
39,3 (9,0)
NS
Qualité de vie psychique
41,7 (6,6)
41,6 (7,5)
NS

Effets du programme

Des anovas à mesures répétées ont été réalisées afin de mettre en évidence l’effet du programme sur les différentes variables physiques et psychologiques. En ce qui concerne les variables physiques, et comme le montre le tableau VIIrenvoi vers, il n’y a pas d’effet significatif du programme pour le groupe expérimental.
Les améliorations des performances du groupe expérimental et du groupe contrôle sont quasiment identiques pour le TUG et le FSTS. L’ampleur de l’effet est modéré pour le FRT chez les participants du groupe expérimental tandis qu’il est proche de 0 pour le groupe contrôle. En prenant en considération la variation présente à l’intérieur de chaque groupe, l’ampleur de l’effet du programme sur chaque test est faible à modérée et toujours en faveur des participants du groupe expérimental et ce dans tous les tests. Le seul bémol est pour la variable équilibre subjectif, où nous notons que les personnes du groupe expérimental perçoivent leur équilibre subjectif comme moins bon au temps 2. L’analyse post hoc Newman-Keuls met en évidence une différence significative entre les deux groupes au temps 1, en faveur du groupe expérimental. Cette différence s’atténue après le programme, le groupe contrôle ayant augmenté la perception de son équilibre subjectif et le groupe expérimental l’ayant diminué. En prenant en considération la variation présente à l’intérieur de chaque groupe, l’ampleur de l’effet était faible et les résultats partagés entre les deux groupes. Ces résultats seront discutés dans la partie suivante.

Tableau VII Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour les variables physiques aux temps T1 et T2

 
Cont (n=44)
Exp (n=39)
Cont (n=44)
Exp (n=39)
T1
T2
T1
T2
Ampleur de l’effet
Ampleur de l’effet
FRT (cm)
25,3 (7,2)
25,5 (7,7)
23,1 (7,3)
27,5 (8)
0,03
0,60
OLS (s)
11,1 (10,4)
12,9 (10,3)
10,3 (9,3)
13,5 (11,5)
0,17
0,34
TUG (s)
13,5 (6,0)
12,5 (7)
13,4 (5,5)
13,03 (8,27)
-0,17
-0,07
FTSTS (s)
15,1 (6,7)
11,8 (5,7)
17,6 (9,2)
12,3 (6,6)
-0,49
-0,58
Équilibre subjectif (1=très
pauvre ; 10=excellent)
5,4 (1,8)*
5,7 (1,6)
6,5 (1,7)*
6,2 (1,5)
0,16
-0,17

* p < 0,05 entre les groupes exp et cont
Abréviations : FRT : Functional Reach test ; FTSTS : Five Times Sit-To-Stand ; OLS : One-Leg Stance test ; TUG : Time Up and Go test

Les résultats en ce qui concerne la partie psychologique (tableau VIIIrenvoi vers) mettent en évidence, comme nous l’espérions, qu’il n’y a aucun effet négatif du programme sur les variables psychologiques. Nous notons que les personnes du groupe expérimental ont moins peur de chuter après le programme, tandis que cette appréhension est identique entre les temps T1 et T2 chez les personnes du groupe contrôle. Cette différence n’est pas significative, mais il existe un faible effet tout de même. La même remarque est à formuler quant à la confiance en son équilibre, même si l’ampleur de l’effet est faible, nous notons une amélioration de la confiance en son équilibre pour le groupe expérimental, alors que les personnes du groupe contrôle déclarent avoir un peu moins confiance en leur équilibre.
Dans la partie suivante, nous présentons les analyses multivariées. Afin de réaliser ces calculs, nous avons pris en considération l’ensemble des personnes qui ont réalisé tous les tests physiques et accepté les données manquantes dans les autres questionnaires, ceci nous permet d’obtenir un échantillon composé de 190 personnes (cont=102 - 53,7 % ; exp=88 - 46,3 %). Dans le tableau IXrenvoi vers, les coefficients de régression non standardisés indiquent le nombre de secondes ou de centimètres de différence associé au fait de faire partie du groupe expérimental. L’évaluation de l’effet de l’appartenance au groupe, en ajustant seulement pour l’équilibre ou la mobilité ou la stabilité à l’entrée de l’étude (modèle réduit) n’a montré aucune amélioration sur ces indicateurs (imputables au groupe d’appartenance). Après un ajustement effectué en fonction des caractéristiques démographiques, de l’état de santé perçue, du nombre de chutes dans l’année, du nombre de médicaments consommés chaque jour, de l’activité physique, de la confiance en son équilibre et de la peur de chuter, l’impact de l’intervention sur les variables de résultat est aussi statistiquement non significatif. Nous notons une amélioration au score du TUG pour le groupe contrôle ; il n’y a donc pas d’effet du programme. Nous pouvons nous demander si le fait d’avoir suivi une séance d’information sur le programme PIED et d’être inscrit dans ce programme lors de la prochaine session, n’a pas été un stimulant pour les personnes âgées.

Tableau VIII Comparaison des groupes contrôle (« cont ») et expérimental (« exp ») pour les variables psychologiques aux temps T1 et T2

 
Cont (n=44)
Exp (n=39)
Cont (n=44)
Exp (n=39)
T1
T2
T1
T2
Ampleur
de l’effet
Ampleur
de l’effet
Peur (1=jamais ; 5=très souvent)
2,4 (0,9)
2,4 (0,8)
2,5 (0,7)
2,3 (0,8)
0,00
- 0,28
Confiance (0=pas du tout confiant ; 100=très confiant)
67,2 (19,9)*
65 (19)
69,9 (19,7)*
72,4 (20)
- 0,11
0,13
Restrictions des activités
2,0 (0,9)
1,9 (0,6)
1,8 (0,9)
1,9 (0,9)
- 0,11
0,11
Qualité de vie physique
39,6 (7,3)
41 (6,9)
39,4 (9,0)
40,5 (7,2)
0,19
0,12
Qualité de vie psychique
41,7 (6,6)
41,1 (5,8)
41,6 (7,5)
42 (6,0)
- 0,09
0,05

* p < 0,05 entre les groupes exp et cont

Tableau IX Régressions linéaires VD=TUG

Variables de résultats
Modèle réduita
Modèle completb
Coefficient non standardisé β
p
R2
Coefficient non standardisé β
Coefficient standardisé β
p
R2
Mobilité (seconde)
 
 
 
 
 
 
 
Timed Up and Go test
0,85
0,15
0,74
0 ,86
0,10
0,17
0,83
Sit-to-Stand
- 0,71
0,49
0,34
- 0,16
- 0,18
0,87
0,64
Limite en stabilité (cm)
       
Functionnal Reach
- 2,17
0,24
0,16
- 2,51
- 0,18
0,22
0,36
Équilibre statique (seconde)
       
One Leg Stance
1,6
0,54
0,37
2,31
0,01
0,93
0,67

a Le modèle réduit inclut la mesure initiale et le groupe d’appartenance.
b Le modèle complet comprend les variables : les mesures initiales d’équilibre/de force, l’âge, le genre, l’IMC, le nombre de chutes, le nombre de médicaments, la santé générale perçue, le niveau de confiance en son équilibre, la peur de chuter, le niveau d’activités physiques (dépense en MET), le lieu de vie (institution versus maison)
β = coefficient de régression « appartenant au groupe » (évolution attribuable au fait d’appartenir au groupe expérimental)

Discussion

À travers cette étude, nous souhaitions évaluer l’efficacité du programme PIED sur les risques de chute chez des aînés en France. Ce programme est largement utilisé en France et au Québec où nous savons que son efficacité est démontrée. Cependant, les conditions de réalisation de ce programme étant différentes entre le Québec et la France, il nous semblait pertinent de procéder à cette évaluation, dans un contexte culturel et sanitaire différent, et de proposer des pistes de remédiation spécifiques à notre environnement français.
Notre évaluation du programme PIED tel qu’il est réalisé actuellement en France ne nous a pas permis de démontrer des résultats significatifs sur les déterminants physiques des risques de chute même si les données allaient dans le sens attendu pour certaines variables (OLS, FTSTS). Ce résultat s’explique par différents facteurs.
Le premier concerne le recrutement dans cette étude. En effet, nous avons recruté des personnes volontaires et donc sensibilisées aux risques de chute. Ces personnes vivaient en institution ou dans leur maison. Leur degré d’autonomie était donc relativement différent. Au Québec, le programme a été évalué sur des aînés autonomes. La régression linéaire montre que le lieu de vie a un impact significatif sur le Time Up and Go (β standardisé=0,23 ; p=0,017) et sur le Sit-to-Stand (β standardisé=0,30 ; p=0,02), les personnes vivant en institution ayant plus progressé que les personnes autonomes. Des analyses complémentaires montrent que les personnes vivant en institution ont des scores au TUG significativement plus bas (Moyenne TUG institution=14,25 ; ET=5,27 ; Moyenne TUG maison=10,38 ; ET=3,50, t=-4,82 ; ddl=123 ; p < 0,001). Or, pour un effet optimal du programme, la population cible ne doit être ni trop en forme, ni trop fragile (Gardner et coll., 2000renvoi vers).
Le deuxième facteur est le nombre de personnes testées en pré- et post-test qui est relativement faible, et ce, malgré un recrutement de 344 personnes en pré-test. Le nombre de perdus de vue a été considérable au cours des trois mois où se déroulait le programme. Cela souligne les difficultés inhérentes aux études randomisées multi-sites dans le contexte écologique tel qu’il se fait réellement au quotidien par les promoteurs de terrain. Ces études sont néanmoins essentielles pour évaluer ce qui se passe réellement sur le terrain, mais montrent également l’importance de faire un très large recrutement au départ. Le problème qui se pose alors est souvent le financement pour ce type d’étude.
Enfin, le troisième facteur qui nous semble très important concerne le nombre de séances proposées aux personnes âgées : une fois/semaine en France contre deux fois/semaine au Québec avec un suivi à domicile. Nos résultats soulignent le fait qu’une seule séance par semaine est insuffisante pour espérer obtenir un impact chez cette population. Robitaille et coll. (2005renvoi vers) insistent sur le fait qu’un programme d’exercices peut réellement améliorer l’équilibre si : (i) il sollicite les divers systèmes impliqués dans l’équilibre, ce que le programme PIED adapté en France fait sans aucun doute ; (ii) s’il respecte les principes d’efficacité reconnus du modèle biomécanique comme l’intensité de l’entraînement, la surcharge et la progression. Avec une séance par semaine, le programme français semble donc moins efficace que le programme PIED ; (iii) si le programme obtient des taux d’assiduité élevés ; (iv) s’il s’adapte à la réalité des organismes de communauté, c’est ce que la Fédération Française Sports pour Tous fait en proposant une séance par semaine et qui permet de rendre l’offre réalisable étant donné les ressources financières allouées par programme par les principaux financeurs (Cnam, MSA, RSI, Carsat…). Pour proposer un programme de prévention des chutes à une fréquence de 2 fois/semaine pendant 3 mois, il convient de mobiliser davantage de ressources financières par programme.
En ce qui concerne les variables psychologiques, nous ne notons aucun effet négatif du programme sur ces variables, à l’exception de l’équilibre subjectif qui est moins bon chez les personnes du groupe expérimental, à l’issue du programme. Nous expliquons ce résultat par une prise de conscience des capacités réelles du sujet. Cette hypothèse semble être étayée par une légère amélioration de la confiance en son équilibre pour le groupe expérimental. Le programme pourrait ainsi avoir permis aux personnes âgées de mieux se connaître. Ainsi, le programme PIED a sûrement permis aux personnes âgées de prendre conscience de leur vrai niveau d’équilibre.

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Laurence Kern1, Nicolas Termoz1, Fredéric Le Cren2, Annabelle Couillandre1, Anais Terlicoq3, Sophie Laforest4

1 UFR Staps, Université Paris Ouest Nanterre La Défense
2 Fédération Française Sports pour Tous
3 Comité Régional Sports pour Tous, Picardie
4 Département de kinésiologie, Université de Montréal, Québec, Canada ; Centre for Research and Expertise in Social Gerontology (CREGÉS), CSSS Cavendish-Centre affilié universitaire, Montréal, Québec, Canada


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