Inégalités sociales de santé

2014


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Communications

Apport du marketing social pour l’efficacité des campagnes de prévention de l’obésité

Les campagnes de prévention de l’obésité ont en général pour objectif final le changement des comportements alimentaires et/ou d’activité physique des individus. Cependant, entre l’exposition à une campagne et le changement de comportement, plusieurs étapes sont nécessaires : modification des croyances, des attitudes et des intentions. Très souvent, l’évaluation de l’efficacité des campagnes préventives se limite à des mesures de rappel du message et d’appréciation publicitaire. Mais est-il suffisant de connaître les recommandations clés de prévention de l’obésité pour changer les comportements alimentaires ? Des recherches en marketing social insistent sur la nécessité de se concentrer sur le changement de comportement afin d’identifier les leviers efficaces d’action préventive (Andreasen, 1995renvoi vers ; Hastings, 2007renvoi vers). Cela est d’autant plus important lorsque l’on parle de comportement alimentaire car les individus prennent en moyenne plus de 200 décisions alimentaires par jour (Wansink et Sobel, 2007renvoi vers), sans avoir nécessairement une réflexion approfondie sur chaque décision prise. Les décisions alimentaires sont souvent prises de façon automatique et expliquées surtout par les attitudes implicites des individus (Hofmann et coll., 2007renvoi vers) et non par des processus de traitement d’information rationnels. Dans ce contexte, il est fondamental de s’intéresser aux effets des stratégies de prévention sur les comportements alimentaires des individus. Cette communication a pour objectif de définir le marketing social et de montrer son utilité pour la mise en place de stratégies de prévention efficaces. Elle présente le cadre théorique du marketing social et deux exemples de recherches sur l’efficacité des stratégies de prévention de l’obésité.

Apport du marketing social pour la définition des stratégies préventives

Le marketing social a été défini originellement comme « la conception, la réalisation et le contrôle de programmes visant l’acceptation d’idées d’ordre social et intégrant des études de produit, de prix, de communication, de distribution et la recherche en marketing » (Kotler et Zaltman, 1971renvoi vers). En fait, le marketing social est « l’utilisation des méthodes de marketing traditionnel (identiques à celles des produits et services) telles que les études de marché et les quatre P1 de McCarthy (1968renvoi vers) pour la planification et la promotion des changements sociaux » (Kotler et Zaltman, 1971renvoi vers).
Les quatre P du marketing social sont des adaptations de ceux du marketing traditionnel. Le « produit » est l’idée sociale ou l’objectif social à promouvoir tels que : arrêter de fumer, se faire dépister contre le cancer du sein, adopter un programme d’activité physique… L’enjeu du marketing social est de présenter ce produit social de façon à ce que les consommateurs aient envie de « l’acheter », c’est-à-dire de mettre fin à des comportements qui ont des conséquences négatives (par exemple, fumer), ou d’adopter des comportements qui ont des conséquences positives (par exemple, utiliser la ceinture de sécurité lors des déplacements en voiture). La communication pour le marketing social correspond aux stratégies et tactiques utilisées pour rendre le produit social familier, acceptable et désiré par les consommateurs potentiels. La « distribution » consiste à donner aux campagnes sociales des canaux de distribution appropriés et compatibles. Les consommateurs doivent savoir où ils peuvent obtenir le produit social en question. Dans le cas du marketing social, cela consiste à faire savoir aux consommateurs où ils peuvent trouver l’information sur le problème de santé et surtout, des instructions, conseils et incitations pour avoir le comportement souhaité. Le « prix » correspond aux coûts que l’acheteur doit accepter afin d’obtenir le produit (Kotler et Zaltman, 1971renvoi vers). Il s’agit souvent des coûts psychologiques, coûts d’opportunité (tout ce que le consommateur aurait pu faire au lieu d’adopter le comportement indiqué) et investissement personnel associé au comportement. La stratégie de prix pour un produit social consiste à montrer une relation coût-bénéfice positive pour le consommateur.
Tout un processus de planification se déroule en amont de la mise en œuvre d’une campagne de marketing social. Ce processus consiste à analyser le marché en utilisant des études destinées à mieux comprendre les attitudes, les désirs et les comportements des consommateurs potentiels. La question-clé pour le marketing social est de savoir comment influencer le comportement des individus (Kotler et Zaltman, 1971renvoi vers), puisque le principal défi est d’essayer de changer des comportements qui sont souvent enracinés dans les habitudes de consommation (Bloom et Novelli, 1981renvoi vers ; Lefebvre et Flora, 1988renvoi vers ; MacFadyen et coll., 1999renvoi vers). Le consommateur a une tendance naturelle à ne pas changer de comportement, pour différentes raisons : soit parce qu’il est en état de dépendance physique (notamment dans les cas du tabac et de l’alcool), soit par simple inertie, soit par l’adoption d’autres comportements tels que : regarder la télévision au lieu de faire une activité physique (dans le cas d’une campagne de promotion de l’activité physique) ou aller au cinéma au lieu de consacrer le même temps à donner son sang (Andreasen, 1995renvoi vers). De plus, le marketing traditionnel de produits ayant des conséquences négatives pour la santé des consommateurs (comme c’est le cas pour l’alcool, le tabac ou les aliments trop gras) peut avoir des conséquences négatives sur leur comportement. Par exemple, la publicité pour les sucreries peut augmenter la consommation de ce type d’aliment chez les enfants ou la publicité pour l’alcool peut amener les consommateurs à en boire plus.
L’idée sous-jacente au marketing social est que, pour amener les individus à modifier leurs comportements et à adopter des comportements préventifs, il faudrait utiliser les mêmes outils que les industriels utilisent pour vendre des cigarettes ou des boissons sucrées (Hastings, 2007renvoi vers). L’objectif n’est donc pas d’éduquer le consommateur mais surtout de changer son comportement, ce qui différencie le marketing social d’autres stratégies de prévention plus traditionnelles. En effet, ces stratégies sont centrées sur l’éducation des individus afin de leur donner les informations nécessaires pour prendre la bonne décision, la personne étant vue comme un être essentiellement rationnel, qui agit toujours de la façon la plus bénéfique pour atteindre ses objectifs à long terme (Rothschild, 2011renvoi vers).
L’approche du marketing social est particulièrement importante lorsque l’on s’intéresse aux inégalités sociales en matière d’alimentation et d’activité physique. Les problèmes liés à la nutrition et à l’activité physique touchent le plus souvent des individus ayant un faible niveau socioéconomique en France (Drees, 2010renvoi vers) et il est ainsi important de comprendre la réalité de cette cible afin de pouvoir influencer son comportement. Les individus de faible niveau socioéconomique ont tendance à vivre plus sur le court-terme car la difficulté financière diminue leur capacité de planification pour l’avenir (Rothschild, 2011renvoi vers). Ainsi, le choix de favoriser des objectifs de santé à long terme paraît lointain et moins central comparé aux besoins immédiats de nourrir la famille tous les jours. Plusieurs campagnes de santé publique visent le renforcement des objectifs à long terme (comme avoir une bonne santé), mais la population cible a du mal à faire face à la vie de tous les jours. Ce manque de connexion entre les objectifs de long terme communiqués par les messages préventifs et la réalité des populations concernées ne peut pas être réduit par des simples stratégies de communication. Selon le marketing social, trois stratégies seraient efficaces pour placer les comportements préventifs dans les priorités à court terme des individus (Rothschild, 2011renvoi vers) : augmenter les incitations aux comportements désirés, diminuer les barrières qui empêchent l’adoption des comportements désirés, et comprendre pourquoi les mauvaises alternatives à court terme sont privilégiées par rapport aux bonnes options de santé à long terme.
Compte tenu des éléments précédents, quel est l’apport du marketing social pour la prévention de l’obésité ? Premièrement, le marketing social prévoit le test et l’évaluation des stratégies de prévention en amont de leur mise en application pratique (Andreasen, 2006renvoi vers ; Wilson, 2011renvoi vers). Cette évaluation préalable vise à vérifier de façon contrôlée les effets des stratégies de prévention sur les comportements des individus, afin de pouvoir les ajuster au public cible. Deuxièmement, le marketing social, par l’étude des facteurs de contexte influençant la consommation alimentaire des individus, pourrait permettre d’identifier des stratégies susceptibles de modifier ces comportements de façon durable.
La suite de cette communication présente brièvement deux études de recherche en marketing social qui évaluent l’efficacité de quelques approches de prévention de l’obésité utilisées aujourd’hui en mesurant leur effet sur les comportements alimentaires.

Prévention de l’obésité auprès des adolescents des milieux défavorisés

La première étude présentée s’intéresse à l’efficacité de différentes approches de prévention de l’obésité ciblant les adolescents (Werle et coll., 2012renvoi vers). Alors que les adolescents sont davantage sensibles aux risques sociaux, tels que le regard des pairs (Pechmann et coll., 2003renvoi vers et 2005renvoi vers), la prévention de l’obésité en France adopte une orientation de promotion axée uniquement sur les risques de santé. Par le biais d’une expérimentation de terrain menée sur 797 adolescents en zone d’éducation prioritaire, cette étude compare les effets des messages publicitaires de prévention de l’obésité utilisant deux types d’argument (santé ou social) et deux types de cadrage (mise en avant des conséquences négatives ou positives). Les adolescents étaient exposés de façon aléatoire à l’un des quatre messages publicitaires préventifs (présentés parmi plusieurs publicités de remplissage afin de reproduire un contexte réel d’exposition publicitaire) et ensuite on leur demandait de choisir un cadeau de remerciement pour leur participation à l’étude. Ils avaient le choix entre une barre de céréales (option la plus saine) et une barre chocolatée (option la moins saine). Le choix effectué était l’une des variables dépendantes clés de l’étude.
Les résultats montrent que les messages portant sur les risques sociaux conduisent à des choix alimentaires plus sains que ceux qui utilisent l’argument santé (figure 1Renvoi vers). Même si l’argument santé est jugé comme le plus agréable à regarder et est le plus apprécié par les participants, il n’amène cependant pas au changement de comportement alimentaire parmi la population cible étudiée.
Ces résultats montrent premièrement l’importance d’adapter les messages préventifs aux populations cibles. Ils suggèrent également qu’il serait intéressant de communiquer sur des sujets plus proches des préoccupations actuelles des adolescents afin d’influencer leur comportement alimentaire. L’adolescent étant plus centré sur le court-terme que les adultes (Steinberg et coll., 2009renvoi vers), les communications qui leur sont destinées pourraient être plus efficaces avec la mise en avant des conséquences immédiates de l’adoption des comportements préventifs.
Figure 1 Pourcentage de choix du goûter le plus sain (barre de céréales) selon le type d’argument du message préventif (d’après Werle et coll., 2012renvoi vers)
Deuxièmement, le décalage existant entre l’attitude face au message (plus positive pour les messages utilisant l’argument santé) et le comportement alimentaire (part de choix de la barre céréalière plus faible pour ceux exposés à l’argument santé) renforce l’importance de la mesure des comportements alimentaires comme indicateur d’efficacité des messages préventifs, tel que recommandé par le marketing social.

Efficacité des messages sanitaires placés sur les publicités alimentaires

La deuxième étude présentée s’intéresse aux effets des messages sanitaires de prévention de l’obésité insérés dans les publicités alimentaires (Werle et Cuny, 2012renvoi vers). Notre hypothèse est que la présence des messages sanitaires tels qu’ils sont conçus aujourd’hui (des recommandations sur la manière d’équilibrer son alimentation) pourrait servir de justification pour la consommation des produits hédoniques (Okada, 2005renvoi vers ; Khan et Dhar, 2006renvoi vers) via un mécanisme compensatoire. Lorsque l’individu visualise le message sanitaire, il voit en même temps un aliment hédonique (par exemple, un hamburger) et une solution potentielle contre la prise de poids (par exemple, adopter une activité physique régulière). Ces deux informations présentées ensemble peuvent amener à un effet de compensation, la consommation de hamburgers étant perçue comme moins néfaste en présence d’un message sanitaire.
Dans une expérimentation contrôlée, 130 étudiants universitaires ont été exposés de façon aléatoire à une même publicité pour un aliment hédonique (hamburger) contenant ou non un message sanitaire préventif (« Pour votre santé, mangez cinq fruits et légumes par jour »). Ensuite, le recueil de mesures comportementales et d’attitudes implicites et explicites a été fait. La mesure comportementale était le choix entre un bon d’achat pour un sachet de fruits frais (option la plus saine) ou pour une glace (option la moins saine). La mesure d’attitude implicite était le temps de réaction des participants pour exécuter une tâche de décision lexicale, suite à un « amorçage2  » visuo-sémantique par exposition préalable soit à la publicité seule, soit à la publicité avec le message sanitaire. Les mesures explicites étaient les mesures déclaratives d’attitude face au produit et d’intention de surveillance alimentaire. Nous avons également demandé aux participants d’estimer les calories contenues dans le produit annoncé.
Les résultats montrent que l’exposition au message sanitaire influence le comportement alimentaire des participants : ceux qui ont vu la publicité sans le message sanitaire ont fait des choix alimentaires plus sains que ceux qui l’ont vue avec le message sanitaire (figure 2Renvoi vers).
Les résultats montrent aussi que les attitudes implicites liées à un produit hédonique sont plus favorables quand le message sanitaire est présent que lorsqu’il est absent. En effet, les participants exposés à la publicité avec le message sanitaire associent de façon plus faible (temps de réaction plus élevé) le produit hédonique (hamburger) à des concepts négatifs comme : contrainte, laisser-aller ou obésité. L’attitude explicite face au produit (par exemple, l’appréciation du produit) n’est pas influencée par la présence ou l’absence du message sanitaire. Finalement, l’estimation du nombre de calories contenues dans le hamburger est influencée par la présence du message sanitaire : les participants exposés à la publicité avec le message sanitaire ont sous-estimé le nombre de calories contenues dans le produit (M=503,03) en comparaison à ceux exposés à la publicité sans le message sanitaire (M=646,32 ; F(1,123)=4,330 ; p=0,04).
Figure 2 Pourcentage de choix de l’option plus saine (sachet de fruits) en fonction de la présence ou de l’absence du message sanitaire (d’après Werle et Cuny, 2012renvoi vers)
Ces résultats suggèrent que les messages sanitaires peuvent avoir un effet inattendu en favorisant le choix d’un produit alimentaire hédonique, en diminuant les associations implicites négatives avec le produit annoncé et en amenant les individus à sous-estimer le nombre de calories contenues dans le produit. Il apparaît également que ces effets ont lieu de façon implicite ou automatique, puisque l’attitude explicite face au produit est la même quelles que soient les conditions expérimentales, en accord avec les résultats d’autres auteurs sur les effets de justification (Khan et Dhar, 2006renvoi vers). Face à ces résultats, il serait intéressant de vérifier si le fait de dissocier le message sanitaire préventif du message publicitaire pour un aliment hédonique pourrait éviter des effets de justification entre les deux messages.
En conclusion, les résultats de ces deux recherches en marketing social nous interrogent sur le type de stratégie préventive à adopter pour changer les comportements alimentaires. Ils montrent l’importance de la mesure des comportements alimentaires comme indicateur de performance des campagnes de prévention de l’obésité, compte tenu du décalage existant entre croyances et comportements. Les résultats de la première étude renforcent le besoin d’adapter les messages préventifs à la cible concernée (dans ce cas, les adolescents) afin de les rendre plus efficaces. Ceux de la deuxième étude soulignent la nécessité de mesurer l’effet conjoint des messages sanitaires et des publicités alimentaires sur lesquelles ces messages sont placés, car des effets compensatoires inattendus peuvent avoir lieu.
Mais si les campagnes préventives actuelles ne changent pas les comportements alimentaires des populations cibles, quelles sont les stratégies capables de le faire ? Les recherches en marketing social et en comportement du consommateur présentent plusieurs pistes pour identifier les axes capables de changer les comportements alimentaires. Les interventions portant sur les facteurs de contexte influençant la consommation alimentaire sont l’une des pistes considérées comme des plus prometteuses pour promouvoir le changement comportemental (Rothschild, 2011renvoi vers). Il faudrait ainsi augmenter les incitations pour l’adoption des comportements désirés, en diminuant le prix d’achat des aliments bons pour la santé, par exemple, ou en favorisant l’utilisation des escaliers ou l’accès à pied au lieu de travail. Il faudrait également réduire les barrières empêchant l’adoption du comportement cible, en facilitant, par exemple, l’accès aux aliments sains parmi les populations cibles en changeant l’offre des distributeurs automatiques pour inclure des aliments bons pour la santé à faible prix. Les campagnes publicitaires visant à augmenter les comportements désirés ou à lever les barrières qui empêchent leur adoption devraient faire l’objet d’études contrôlées afin de mesurer les impacts de ces campagnes sur les comportements avant une mise en application plus générale.
Carolina O. C. Werle
Grenoble École de Management, CERAG, Université de Grenoble

Bibliographie

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Des facteurs psychosociaux aux ressources cognitives, émotionnelles et motivationnelles : contribution au gradient social dans le domaine de l’alimentation et de l’activité physique

Les « facteurs psychosociaux » sont reconnus dans les modèles intéressés par le lien systématique entre des indicateurs d’inégalités posés en termes socioéconomiques et la santé1 (Leclerc et coll., 2008renvoi vers ; Potvin et coll., 2010renvoi vers ; Solar et Irwin, 2010renvoi vers). Les facteurs psychosociaux concernent à la fois des croyances, ressources, évaluations, anticipations, représentations, buts, motivations, perceptions de contrôle, réponses émotionnelles, stratégies cognitives, comportements et formes de soutien/contrainte qui sont mobilisés par les individus dans le cadre de leur vie courante bien au-delà de la préservation de la santé. Ces facteurs s’expriment dans les contextes sociaux dans lesquels s’exercent choix et préférences.
Comment est abordé le rôle des facteurs psychosociaux dans les inégalités de santé, et y a-t-il des spécificités de ce point de vue dans le domaine de l’alimentation et de l’activité physique ? Un premier cadrage posera les points communs entre alimentation et activité physique notamment en termes de comportements routiniers et de valorisation sociale. Nous présenterons ensuite un bilan des principales approches qui placent les facteurs psychosociaux dans le cadre de ressources cognitives, motivationnelles et émotionnelles limitées sous l’angle du stress ou des capacités d’autorégulation. Dans un troisième temps, nous proposerons que les inégalités sociales de santé impliquent de dépasser le constat d’une corrélation avérée entre des indicateurs classiques de statut social et la santé. Des facteurs tels que pouvoir, discrimination et asymétrie de statut suscitent des effets psychosociaux qui doivent être abordés en tant que tels. De ce point de vue, l’approche psychosociale pourrait contribuer utilement à mieux comprendre les inégalités sociales de santé, en particulier dans le domaine de l’alimentation et de l’activité physique.

Alimentation et activités physiques : habitudes, normes et bénéfices à long terme

Alimentation et activité physique contribuent ensemble à un style de vie favorable à la santé qui est aujourd’hui la cible de nombreux programmes de prévention ou de promotion de la santé (repas équilibrés, absence de grignotage, activité physique régulière, limitation des comportements sédentaires...). Ces programmes visent globalement des modes de vie mais aussi des comportements spécifiques (par exemple, persuader de prendre un escalier plutôt que l’escalator dans le métro ; Ryan et coll., 2011renvoi vers).
L’alimentation et l’activité physique concernent évidemment des besoins fondamentaux (manger, boire, se déplacer, agir...) associés à la régulation des ressources et dépenses énergétiques. Cependant, l’alimentation comme l’activité physique servent d’autres buts que la santé elle-même et impliquent des motivations multiples : expression de l’identité sociale, recherche du plaisir, recherche ou évitement de la nouveauté, développement ou épanouissement de soi, recherche du lien social, besoins d’autonomie, buts spécifiques... Tout au long de sa vie, l’individu adopte des styles de vie et exerce des choix plus ou moins favorables à sa santé dont les conséquences à plus long terme lui sont plus ou moins connues. Ces choix s’exercent de manière apparemment libre et autonome, et sont couramment ressentis comme tels, même si chacun (y compris les plus défavorisés) a plus ou moins conscience des contraintes qui limitent ses choix en termes de prix, d’accessibilité ou de disponibilité (par exemple, Kamphuis et coll., 2007renvoi vers). Ces choix sont de fait hiérarchisés selon une architecture qui structure les options disponibles (Thaler et Sunstein, 2008renvoi vers). Par exemple, la boisson sucrée est souvent l’option par défaut dans un distributeur automatique de boissons chaudes. Le fait de diminuer la quantité de sucre dans son café suppose une action intentionnelle préalable à la distribution de la boisson. Ces choix sont également exprimés dans un contexte qui demande à être systématiquement documenté : ressources économiques, qualité des espaces privés et publics, offre industrielle de produits alimentaires, disponibilité des transports publics, offre des activités sportives, accès aux soins, pression persuasive du marketing privé et public, prescriptions médicales...
Ces activités, s’alimenter et faire de l’exercice, présentent des caractéristiques communes intéressantes pour notre propos : elles impliquent des habitudes et routines peu susceptibles de changement rapide ; elles font l’objet de « prescriptions sociales » qui encadrent la valeur de tel ou tel comportement ; les effets bénéfiques de l’alimentation et de l’activité physique sur la santé impliquent de considérer une perspective à long terme décentrée par rapport aux bénéfices ou coûts immédiats.
Les habitudes libèrent les individus des choix et des dilemmes, dans le sens où le comportement est guidé par des indices disponibles dans l’environnement ou associés à une temporalité (Wood et coll., 2002renvoi vers). On mangera à telle heure, ou parce que l’on est devant la télévision, on utilisera sa voiture le matin... Par exemple, des consommateurs habituels de pop-corn ne feront pas de différence entre un pop-corn de bonne ou mauvaise qualité s’ils le consomment dans leur contexte habituel (cinéma), alors qu’en dehors de ce contexte leurs préférences seront guidées par la qualité du produit alimentaire (Neal et coll., 2011renvoi vers). À partir du moment où des comportements défavorables à la santé sont installés (manger trop salé ou trop riche, être sédentaire...), le changement ne va pas de soi, même si l’individu est conscient de la nécessité du changement. Renoncer aux pizzas surgelées pour préparer des légumes, réduire les portions consommées, ou choisir la marche plutôt que la voiture pour une course à 500 m de son domicile appelle une capacité d’agir sur ses propres comportements et sur les conséquences émotionnelles associées au changement (plaisir, déplaisir, regrets...). Changer implique une intentionnalité relative à un but particulier, qui dépend elle-même d’une forte conviction quant aux effets bénéfiques du changement pour l’individu. Changer nécessite également des capacités à se fixer un but, puis à convertir ce but en actions concrètes (c’est-à-dire, implémenter son intention : savoir quoi faire, quand et où le faire) et à résister ensuite aux sollicitations contraires. Il s’agit aussi de s’estimer soi-même capable d’atteindre ces buts par la mise en œuvre d’actions spécifiques (sentiment d’auto-efficacité ; Meyer et Verlhiac, 2004renvoi vers ; Cestac et Meyer, 2010renvoi vers) et de ne pas céder à un pessimisme excessif. Changer des habitudes alimentaires et/ou d’activité physique implique une multitude de processus (Rothman et coll., 2008renvoi vers). Il s’agit donc d’une entreprise plus difficile qu’il n’y paraît.
Par ailleurs, alimentation et activité physique contribuent à notre identité par l’appartenance subjective à des groupes et sont encadrées par des normes sociales fortes. Ce que l’on doit manger comme le volume de la ration alimentaire, ou encore le niveau d’activité physique, tout comme l’apparence corporelle, font l’objet non seulement d’éducation mais aussi d’évaluations normatives explicites ou implicites qui sont des repères connus par les individus et acquis précocement au cours de la socialisation. Les interactions quotidiennes comme les médias ou la publicité rappellent que la qualité et la quantité de ce que l’on mange, ou tel mode de vie sédentaire, sont plus ou moins valorisés. Dans ces domaines, les individus sont largement susceptibles de comparer leur comportement à celui d’autrui plus que de tenir compte de normes fixées par des experts sanitaires. On sait par exemple que le comportement alimentaire est particulièrement susceptible de changer selon le contexte social immédiat (statut social du partenaire, expressions émotionnelles... ; Exline et coll., 2012renvoi vers). De ce point de vue et dans un univers encombré de stéréotypes connus par tous, le cumul de positions sociales défavorisées et de comportements peu favorables à la santé ouvre la voie à des formes de stigmatisations, particulièrement évidentes dans le cas de l’obésité. La contribution importante des relations sociales dans la réduction du risque de mortalité invite à être attentif à cette dimension : dans une méta-analyse réalisée sur 148 études prospectives, Holt-Lunstad et coll. (2010renvoi vers) ont trouvé que les personnes bénéficiant de relations sociales solides avaient une probabilité accrue de survie de 50 % par rapport à celles dont les relations sociales étaient les plus fragiles.
Choix alimentaire comme activité physique impliquent le plus souvent des effets cumulés à long terme dont les bénéfices sont rarement immédiatement perceptibles par les individus alors que leurs effets immédiats (expérience hédonique, satiété, fatigue...) sont rapidement éprouvés du point de vue sensoriel. Les changements de comportement et d’habitudes de vie impliquent une capacité à planifier l’action pour des bénéfices à long terme et un renoncement aux comportements ayant un fort pouvoir attractif, compte tenu de leurs bénéfices immédiats et/ou de leur faible coût (par exemple, alimentation sucrée, activités peu fatigantes).

Des ressources cognitives et émotionnelles limitées

Un premier examen de la littérature en psychologie, psychologie de la santé et psychologie sociale, atteste que la focalisation sur les inégalités sociales de santé est à la fois modeste et relativement récente. Encore plus rares sont les recherches dans ces domaines qui portent spécifiquement sur les inégalités associées à l’alimentation et aux activités physiques. Pour résumer, deux types d’approches semblent aujourd’hui les plus saillants. D’une part, celles qui mettent l’accent sur le caractère limité des ressources adaptatives que les individus mettent en œuvre pour répondre aux demandes de la vie sociale principalement sous l’angle du stress et des émotions négatives, et sous l’angle du contrôle de soi. D’autre part, d’autres approches appellent un ensemble plus large de facteurs prédicteurs du comportement dans le cadre de modèles généralistes non spécifiques au domaine de la santé, de l’alimentation ou de l’activité physique. Nous exposerons rapidement ces deux approches.

Des ressources limitées : du stress à l’autorégulation du comportement

Pour répondre aux sollicitations de la vie courante et les anticiper, nous mobilisons des ressources adaptatives qui présentent un caractère limité dans le sens où elles s’épuisent et demandent à être reconstruites. L’idée de ressources limitées, aujourd’hui courante en psychologie, est à la base de la modélisation des décisions humaines qui conduit à identifier typiquement une voie rapide de décision et une voie plus longue et coûteuse. Cette approche se départit de la vision d’un individu en capacité d’examiner systématiquement toutes les options qui s’offrent à lui pour aboutir à une décision rationnelle (Kahneman, 2011renvoi vers).
Un premier cadre de pensée, le plus classique, concerne le stress, c’est-à-dire l’exposition à des situations peu ou pas prévisibles ou contrôlables et qui mobilisent des ressources personnelles, attentionnelles, cognitives et émotionnelles importantes pour leur résolution. Le fait de pouvoir exercer du contrôle sur les évènements ou les contextes dans les limites de nos capacités est un ingrédient important de la santé physique et mentale2 . L’exposition chronique à des situations peu ou pas contrôlables, observée en situation naturelle ou en laboratoire, met en évidence des déficits cognitifs et motivationnels (résignation acquise), et des expériences affectives négatives (anxiété) qui limitent les possibilités d’adaptation à des challenges nouveaux. Reliant pauvreté et exposition cumulative à des situations stressantes, Gary Evans observe que les enfants pauvres nord-américains en milieu urbain présentent un taux de cortisol (hormone associée aux situations stressantes) supérieur en comparaison avec leurs pairs plus favorisés (Evans et Kim, 2012renvoi vers). Les conséquences à l’âge adulte sont aussi observées à des niveaux multiples depuis les capacités cognitives (Evans et Schamberg, 2009renvoi vers) jusqu’au vieillissement cellulaire observé dès l’enfance (Needham et coll., 2012renvoi vers). Ce modèle des effets du stress est particulièrement bien représenté et étudié dans le cadre des activités de travail où le déséquilibre entre les demandes physiques (postures, charge de travail...) et sociales (pression managériale...) et les ressources disponibles est lié à des déficits bien identifiés dans les organisations du travail et qualifiés de « risques psychosociaux » (Eurogip, 2010renvoi vers).
Le stress réduit la possibilité que des voies délibérées et raisonnées prennent le pas pour changer les routines. Tous les domaines de la vie sont ainsi impliqués ; à commencer par le comportement alimentaire et l’activité physique qui reposent largement sur des habitudes. Par exemple, Oaten et Cheng (2005renvoi vers) ont démontré que le stress lors des examens avait un effet négatif sur les comportements de santé requérant un contrôle de soi des étudiants, comme l’activité physique et l’alimentation. D’un autre point de vue, le lien entre stress et choix alimentaire est par ailleurs documenté dans le sens qu’il favorise une augmentation de la prise alimentaire et oriente les préférences comme l’appétence pour le gras et le sucré qui sont peu favorables à la santé à long terme (Conner et Armitage, 2002renvoi vers ; Groesz et coll., 2011renvoi vers). Plus généralement, alimentation et exercice physique contribuent à l’ajustement plus ou moins favorable au stress et au développement du bien-être (Thayer, 2001renvoi vers).
Le stress est encore le point de départ des modèles qui visent directement à rendre compte des effets du statut social sur la santé. Matthews et Gallo (Gallo et Matthews, 2003renvoi vers ; Matthews et coll., 2010renvoi vers ; Matthews et Gallo, 2011renvoi vers) proposent qu’un statut social défavorisé (accès limité à des moyens matériels, position inférieure dans la hiérarchie sociale...) place les individus devant des challenges qui sont source de stress épisodique ou chronique. Ces niveaux élevés de stress sont associés à des émotions positives et négatives, elles-mêmes prédictives d’effets favorables ou défavorables sur la santé (immunodépression, troubles du métabolisme...). Pour répondre aux sollicitations du monde social et au stress, les individus mobilisent des ressources adaptatives désignées « capacité de réserve ». Cette capacité réunit des ressources intrapsychiques (optimisme, estime de soi, contrôle perçu, efficacité personnelle...) et des ressources interpersonnelles (évaluation subjective du support social, soutien social effectif, évaluation des expériences relationnelles...). La capacité de réserve joue un rôle modulateur entre le statut social, les expériences positives et négatives et les émotions. Un statut social défavorisé implique donc de puiser davantage dans sa capacité de réserve (Gallo et coll., 2005renvoi vers ; Matthews et coll., 2010renvoi vers). Les capacités de réserve positives (optimisme notamment) semblent bénéficier davantage aux personnes les plus favorisées par le revenu ou l’éducation (Schöllgen et coll., 2011renvoi vers auprès d’un échantillon national allemand). Le déficit de cette capacité de réserve ouvre la voie à des troubles de santé (troubles métaboliques, dépression de l’immunité...) et du bien-être psychologique. Même si ce modèle est loin d’être testé complètement, il présente l’avantage de proposer un cadre conceptuel permettant de relier les effets psychosociaux aux inégalités de santé (Gallo et coll., 2009renvoi vers ; Matthews et Gallo, 2011renvoi vers).
Le principe de ressources adaptatives limitées se retrouve aussi dans des domaines plus spécifiques comme notre capacité à réguler nos pensées, émotions et comportements. Pour répondre aux sollicitations de la vie courante, nous mettons en œuvre des processus de contrôle de soi qui impliquent par exemple d’ajuster nos choix et nos préférences, de contrôler nos émotions, d’ajuster nos comportements, de résister à des sollicitations diverses qui nous distraient de nos objectifs. Selon Baumeister (par exemple, Baumeister et coll., 1998renvoi vers ; Baumeister et Vohs, 2007renvoi vers), ces processus dits d’autorégulation sont eux-mêmes particulièrement consommateurs d’énergie. Or cette énergie n’est pas inépuisable. Dans le cadre d’un modèle à ressources limitées, l’effort actif pour contrôler son comportement dans un domaine, conduit à une baisse dans les capacités d’autorégulation des comportements ultérieurs. Si par exemple on demande à des personnes en train de regarder un film amusant ou triste, de ne laisser transparaître aucune émotion (une activité coûteuse en termes de contrôle de soi), ces dernières consommeront plus de crème glacée juste après cette activité d’autorégulation, par rapport à celles qui ont pu exprimer librement leurs émotions (Vohs et Heatherton, 2000renvoi vers). La première activité a épuisé les ressources autorégulatrices des participants, ressources qui ont fait défaut pour limiter leur consommation d’une alimentation tentante. Ce type d’idée a été récemment appliqué par des programmes de recherche en économie pour rendre compte des effets de la pauvreté (Sears, 2011renvoi vers). Ainsi, les individus les plus pauvres sont couramment confrontés à des arbitrages délicats entre plusieurs options : la précarité implique ainsi de surveiller les dépenses indispensables pour l’alimentation courante, lesquelles peuvent se trouver en concurrence avec d’autres coûts. Faute de ressources, un imprévu peut compromettre des soins coûteux de santé. Les individus plus favorisés sont moins exposés de manière chronique à de tels dilemmes. En conséquence, la pauvreté expose à un risque plus élevé d’être en moindre capacité non seulement d’exercer un choix favorable à la santé, mais encore d’autoréguler ses comportements et de résister à sa propre impulsivité. Avec le modèle des ressources limitées d’autorégulation, l’impulsivité fait l’objet elle-même d’un gradient social. Le contrôle de soi observé dans l’enfance s’avère un bon prédicteur de la santé adulte (Moffitt et coll., 2011renvoi vers).

Modéliser les déterminants de l’alimentation et de l’activité physique dans un cadre généraliste

Depuis longtemps, la psychologie sociale générale a proposé des modèles de prédiction du comportement et de l’intention de mettre en œuvre un comportement spécifique ou une classe de comportements quel que soit le domaine considéré (plutôt que centrés sur un domaine spécifique comme la santé)3 . Cette prédiction est basée sur l’hypothèse qu’un nombre limité de variables est suffisant. Parmi les modèles généralistes (c’est-à-dire non spécifiques au domaine de la santé) les plus populaires, le modèle du comportement planifié (Ajzen, 1988renvoi vers ; Cestac et Meyer, 2010renvoi vers) envisage spécialement les comportements qui impliquent au moins partiellement une intention préalable au comportement. De nombreux comportements relatifs à l’alimentation et à l’activité physique se rapportent à cette situation, et spécialement dans le cas de changement planifié de comportement. L’intention est dépendante de trois types de facteurs psychosociaux :
• les attitudes et les croyances relatives au comportement concerné ;
• les normes sociales intériorisées : attentes basées sur les croyances ou comportements attribués à autrui ;
• le sentiment de contrôle ou d’auto-efficacité à mettre en œuvre le comportement.
Les variables sociodémographiques, et spécialement celles relevant du statut social et du pouvoir (catégorie socio-professionnelle, niveau d’éducation...), ne sont pas intégrées dans le modèle sinon comme des antécédents « distaux » du modèle. De fait, s’agissant d’expliquer un comportement spécifique (faire 30 minutes d’exercices par jour, consommer des fruits et légumes...), les inégalités sociales de statut, d’éducation, de revenu... sont de niveau très général sans lien direct avec le comportement considéré, alors que les variables principales du modèle du comportement planifié (intention de consommer des fruits et légumes, sentiment d’auto-efficacité à pratiquer une activité physique régulière...) présentent un niveau de spécificité beaucoup plus favorable à la prédiction.
Par exemple, Hagger et coll. (2002renvoi vers) assurent globalement la validité prédictive du modèle dans le domaine de l’activité physique en constatant l’intérêt de prendre en compte l’auto-efficacité et le comportement passé. Duncan et coll. (2011renvoi vers) trouvent chez des adolescents anglais que les attitudes et le contrôle comportemental perçu prédisent l’intention de s’engager dans des activités physiques mais que le contrôle comportemental perçu est le principal prédicteur des comportements eux-mêmes. Murnaghan et coll. (2010renvoi vers) examinent ainsi de manière concomitante à la fois les déterminants de la consommation de fruits et de légumes, et de l’activité physique. Ils trouvent globalement des pondérations équivalentes dans les deux domaines auprès de jeunes étudiants. L’intention (de consommer des fruits et légumes, et de pratiquer une activité sportive) comme le comportement sont globalement prédits par le modèle du comportement planifié4 avec une contribution équilibrée des variables antécédentes (attitudes, norme sociale, contrôle perçu). Dans le même sens, Luszczynska et coll. (2004renvoi vers) trouvent dans plusieurs cultures que les comportements dans le domaine alimentaire et de l’activité physique sont sensibles chez les jeunes à l’auto-efficacité et aux comparaisons avec autrui. Les méta-analyses dans le domaine de la consommation de fruits et de légumes dégagent des effets importants pour les facteurs de connaissance, d’auto-efficacité/contrôle perçu et de support social/encouragement (Shaikh et coll., 2008renvoi vers). Les comportements les plus routiniers (par exemple, la consommation de poisson dans les pays d’Europe du Nord ; Honkanen et coll., 2005renvoi vers), sont expliqués par le comportement passé et les habitudes comportementales plus que par les attitudes relatives au comportement (le fait d’apprécier de consommer du poisson).
Largement appliqué dans le cadre de l’alimentation et de l’activité physique (Ajzen et coll. 2007renvoi vers ; Godin, 2012renvoi vers), et ouvert aux variables de statut social, le modèle du comportement planifié reste cependant plus prédictif qu’explicatif. D’autres modèles sont bien sûr à considérer qui impliquent des méta-conceptions différentes des besoins humains.

Des effets intrinsèques du statut et du pouvoir ?

Les grandes enquêtes épidémiologiques mettent en relation des indicateurs agrégés des inégalités sociales (catégorie socioprofessionnelle, revenu, niveau de formation, habitat...) et la santé. Évidemment indispensable pour attester de manière représentative de la prévalence des inégalités sociales de santé, et de leur variabilité à l’échelle internationale, ce type d’approche reste cependant limité pour rendre compte des mécanismes impliqués dans la génération des inégalités sociales de santé. Or identifier les processus est indispensable pour suggérer des pistes d’interventions utiles. Les inégalités sociales sont opérationnalisées par des indicateurs objectifs (pouvoir, statut, dominance, rang social) et subjectifs (pouvoir perçu, comparaison sociale, statut social subjectif...). Depuis longtemps on connaît notamment chez les mammifères non-humains les effets délétères de la dominance sociale sur la santé (Rivers et Josephs, 2010renvoi vers). Le pouvoir social entraîne des effets propres (augmentation des émotions positives, diminution des émotions négatives, plus de contrôle perçu, moins de dépendance aux normes, plus d’optimisme ; Brauer et Bourhis, 2006renvoi vers) lesquels sont tous connus pour être reliés favorablement à la santé. À l’inverse, une position d’infériorité dans la hiérarchie entraîne par exemple des efforts de masquage des émotions plus éprouvants pour les ressources d’autorégulation, lesquels sont associés au stress et à la dépression (Langner et coll., 2012renvoi vers). Pour prendre un exemple à propos des activités de planification de l’action, on sait que le seul fait de rendre accessible en mémoire (sans conscience d’être exposé), une position d’infériorité de pouvoir entraîne une moindre capacité à planifier les actions futures (Guinote, 2007renvoi vers ; Guinote et Vescio, 2010renvoi vers). Dans la mesure où la plupart des démarches de prévention mobilisent des capacités d’anticipation et de planification, l’exposition au pouvoir (y compris le pouvoir des professionnels du secteur sanitaire et social : préventeurs, médecins, psychologues ou travailleurs sociaux) pourrait avoir pour effet de limiter les capacités à mettre en place des stratégies actives pour prendre des options plus favorables à la santé. Dans ce sens, et comme avancé par la théorie de l’autodétermination (Ryan et coll., 2008renvoi vers), les stratégies d’intervention basées sur une supervision étroite et une motivation contrainte semblent moins à même d’installer un changement durable qu’une stratégie visant à soutenir les capacités des individus à développer leur propre motivation au changement notamment par l’appui des proches. L’autonomie, soit le fait de se percevoir à l’origine de ses actions, devrait être ici préservée, restaurée, développée (Sarrazin et coll., 2011renvoi vers ; Ng et coll., 2012renvoi vers).
Au-delà de l’exposition au pouvoir en tant que telle, les expériences subjectives associées à l’inégalité interviennent. Des travaux récents suggèrent que les effets du statut social sur la santé pourraient impliquer la perception de justice. Le sentiment d’être victime d’un traitement inéquitable au regard de son statut social défavorisé (discrimination perçue) expliquerait le lien entre statut social et état de santé avéré approché par un indicateur intégré de santé (Fuller-Rowell et coll., 2012renvoi vers, auprès d’un échantillon d’adolescents américains). Ces effets de discrimination sont d’autant plus plausibles dans les interactions quotidiennes qu’il suffit de quelques dizaines de secondes pour inférer, correctement, le statut social sur la base d’indices non-verbaux (Kraus et Keltner, 2009renvoi vers). Dans le même sens, les travaux sur la menace du stéréotype documentent comment les individus stigmatisés (y compris du point de vue de la classe sociale ; Croizet et Leyens, 2003renvoi vers) peuvent se trouver impliqués dans des contextes où ils handicapent eux-mêmes leur propre réussite en focalisant leur attention sur une dimension (leur identité) qui est non pertinente pour réaliser la tâche en cours.
Ce rapide tour d’horizon est bien sûr incomplet. En particulier, nous n’avons pas développé les facteurs qui préservent des effets délétères des inégalités sociales au cours du développement. On connaît par exemple, le rôle critique d’un climat affectif favorable au cours de l’enfance (Biglan et coll., 2012renvoi vers). Celui-ci contribue plus largement à la santé des adultes que le statut social atteint dans la vie adulte et préserve près de la moitié des individus des effets attendus d’une position sociale défavorisée (Miller et coll., 2012renvoi vers). Par ailleurs, des stratégies individuelles spécifiques sont en mesure de prémunir des effets de la précarité et d’échapper aux conséquences négatives d’environnements chaotiques et au stress (Chen, 2012renvoi vers). Des facteurs de personnalité et de tempérament pourraient encore être évoqués qui interviennent par exemple dans les préférences alimentaires (Meier et coll., 2012renvoi vers).

Facteurs psychosociaux : comprendre et modifier le gradient social en santé

Une représentation schématique (figure 1Renvoi vers) résume les facteurs identifiés susceptibles d’avoir un impact sur les comportements plus ou moins favorables à la santé et sur la santé.
À un premier niveau, on trouve les conditions initiales qui caractérisent les inégalités sociales tant du point de vue économique (revenu...), matérielles (exposition aux risques) que psychosocial (statut, discrimination...), ainsi que les propriétés des situations (contrôlabilité objective, architecture des choix). Un second niveau sépare d’un côté les conséquences en termes de stress et d’émotions négatives, et en termes de bien-être et d’émotions positives. De l’autre côté, les facteurs psychosociaux associent les attentes reliées à l’action et aux anticipations de résultats (auto-efficacité, optimisme...), l’évaluation de soi (identité et estime de soi) et l’évaluation fondée sur le contexte social (normes subjectives, discrimination perçue...). Finalement, ces facteurs contribuent aux modalités de prise de décision plus ou moins délibérées ou basées sur des routines. Le stress a par ailleurs des effets spécifiques sur les capacités d’autorégulation et de planification de l’action.
Figure 1 Principaux facteurs psychosociaux impliqués dans les effets des inégalités sociales de santé (les facteurs représentés sont susceptibles d’interaction)
Même dispersée, la littérature en psychologie et psychologie sociale d’approche expérimentale ou corrélationnelle suggère des pistes plausibles pour comprendre les processus impliqués dans la création et le maintien des inégalités sociales de santé. L’approche par des modèles intégratifs, focalisés ou non sur les inégalités, et l’approche basée sur les effets du pouvoir sur les registres de la prise de décision ouvrent sur des programmes de recherche originaux qui pourraient se développer dans le domaine de l’alimentation et des activités physiques. Il faut bien sûr garder à l’esprit que les facteurs psychosociaux interviennent comme médiateurs et/ou modulateurs entre statut social et santé, mais aussi comme antécédents, et comme conséquences. Il est donc particulièrement mal aisé d’assurer leur rôle causal dans les inégalités de santé quand bien même les tailles d’effet observées sont intéressantes pour la santé publique (cf. la revue de question de Matthews et Gallo, 2011renvoi vers). D’autant que ces facteurs psychosociaux sont en interaction avec d’autres niveaux d’analyse depuis la génétique (épigénétique notamment) jusqu’aux systèmes culturels.

Facteurs psychosociaux et recherche interventionnelle en prévention

Le point de vue très général que nous avons adopté ne conduit pas à des recommandations basées sur la preuve, lesquelles impliquent une focalisation sur un domaine d’action, une population et un contexte délimité. Ceci dit, l’examen du rôle des facteurs psychosociaux dans les inégalités sociales de santé soutient des modes d’intervention susceptibles d’atténuer les effets cumulatifs de l’exposition au stress, et d’augmenter les bénéfices du bien-être.
Si l’on suit les modèles basés sur les ressources limitées, tout changement implique de préserver les ressources cognitives, émotionnelles et d’autorégulation. Les préventeurs devraient veiller à ne pas solliciter outre mesure ces ressources auprès des plus défavorisés, lesquels sont justement plus exposés que d’autres à un épuisement de ces ressources. Certains types d’interventions sollicitent fortement le contrôle de soi et l’autorégulation. Appeler à consommer moins gras, moins sucré, ou encore à dépasser les difficultés qui limitent l’activité physique implique aussi de garantir les ressources nécessaires pour accomplir ces changements, que ces ressources ressortent de dimensions intra- ou interpersonnelles. Ceux qui sont le plus en capacité de s’autoréguler sont ceux qui sont le plus à même de bénéficier des techniques de prévention basées sur l’appel au contrôle de soi et sur l’utilisation de ressources cognitives. Il est donc important de veiller à ouvrir une gamme large d’outils d’interventions depuis le développement pragmatique de connaissances et de procédures, jusqu’à travailler sur l’architecture des choix en matière d’alimentation et d’activité physique qui préserve un besoin d’autonomie et de compétence. La variété des facteurs impliqués ouvre une gamme de protocoles d’interventions larges sous forme de programmes éducatifs, d’incitations ou d’offres de produits et de services, ou d’actions directes sur le contexte (voir Abraham et Michie, 2008renvoi vers pour une typologie des interventions basée sur les facteurs psychosociaux et Michie et coll., 2011renvoi vers dans le domaine de l’activité physique et de l’alimentation). Les interventions visant en particulier les capacités d’autorégulation (Raver, 2012renvoi vers) sont susceptibles d’avoir des effets bénéfiques dans des domaines qui comme en alimentation et en activités physiques supposent de résister à des avantages immédiats pour des bénéfices à plus long terme. La prévention basée sur l’exposition à des messages de prévention reste évidemment fondée (Wakefield et coll., 2010renvoi vers), même si elle présente des tailles d’effet modestes. Par exemple, Snyder trouve une taille d’effet moyenne de 5 % dans le domaine de l’alimentation (Snyder, 2007renvoi vers). Les observations suggèrent par ailleurs de porter une attention particulière à la formation des personnels susceptibles d’intervenir auprès des personnes les plus défavorisées. Des formes subtiles de discrimination sont susceptibles à elles seules d’invalider sérieusement une action de santé pourtant bénéfique en soi. Enfin, les interventions précoces (aide à la parentalité, soutien familial, soutien éducatif en matière de nutrition et d’activité physique...) auprès des publics les plus défavorisés semblent particulièrement bénéfiques à plus long terme. Ces interventions peuvent faire l’objet non seulement d’évaluation a posteriori, évidemment nécessaire, mais aussi de recherche et de développement dans les domaines spécifiques de l’alimentation et de l’activité physique.
Thierry Meyer, Jean-François Verlhiac
Université Paris Ouest Nanterre,
EA 4386 Laboratoire Parisien de Psychologie Sociale
Philippe Sarrazin
Université Grenoble Alpes, EA 3742 Laboratoire Sport et Environnement Social

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