I. Inégalités sociales de santé

2014


ANALYSE

2-

Rôle des comportements de santé

La première enquête complète qui s’est intéressée aux raisons des inégalités sociales liées à la santé, le « Black Report » commandé par le Ministère de la santé du Royaume-Uni en 1977, a identifié quatre explications possibles : artéfact, sélection naturelle ou sociale, explications matérialistes/structurelles, et culturelles/comportementales (Townsend et Davidson, 1982renvoi vers). Elles peuvent être décrites brièvement comme suit :
• explication de l’artéfact : cette explication suggère que l’association entre les facteurs socioéconomiques et la santé pourrait être « artificielle », et résulter de problèmes de mesure. Ceci implique l’absence de relation de cause à effet. Bien que des preuves ultérieures aient clairement établi l’existence du gradient social de santé, cette explication souligne le fait que la mesure précise des conditions socioéconomiques et sanitaires utilisées dans l’analyse peut influencer l’estimation des inégalités ;
• sélection naturelle/sociale : certaines écoles de pensées considèrent les processus de sélection naturelle ou sociale comme des explications importantes des inégalités sociales liées à la santé. Ainsi, c’est la santé qui déterminerait les conditions socioéconomiques d’un individu, et non l’inverse. Les individus en meilleure santé que leurs pairs sont plus susceptibles de progresser sur l’échelle sociale, et ceux qui sont en moins bonne santé sont plus susceptibles de régresser socialement ;
• explication matérialiste/structurelle : les circonstances socioéconomiques sont clairement considérées comme « la cause » de la santé. Les facteurs matériels (pauvreté et dénuement économique), physiques (logement insalubre, risques professionnels et environnementaux) et socio-structurels (facteurs politiques et économiques, effets de la pauvreté au travers des générations) ainsi que les facteurs socioéconomiques sont les facteurs permettant d’expliquer les inégalités liées à la santé ;
• explications culturelles/comportementales : les explications de ce type considèrent que les facteurs socioéconomiques ont une relation de cause à effet avec la santé, mais elles insistent sur le rôle des comportements néfastes pour expliquer les inégalités sociales liées à la santé. En effet, un grand nombre de comportements ayant un impact sur la santé des individus (consommation de tabac, d’alcool, régime alimentaire, activité physique, mesures de prévention, rapports sexuels protégés, surveillance prénatale, vaccination…) sont surreprésentés dans les groupes socialement défavorisés.
Une grande partie de la recherche ayant fait suite à la publication du « Black Report » documentait l’existence des inégalités sociales liées à la santé dans divers contextes et établissait que les inégalités sociales liées à la santé n’étaient pas artéfactuelles. Cependant, la compréhension des mécanismes sous-jacents aux inégalités sociales liées à la santé reste partielle (Macintyre, 1997renvoi vers ; Adler et Ostrove, 1999renvoi vers ; Kawachi et coll., 2002renvoi vers). Bien que la mobilité sociale liée à la santé existe, il y a un consensus pour dire qu’il est peu probable qu’elle explique complètement le gradient social de santé.
Cependant, il n’y a pas de réel consensus sur l’importance relative des explications matérialistes/structurelles et culturelles/comportementales. La recherche portant sur l’importance des comportements en matière de santé est divisée sur le sujet du rôle attribué à la volonté humaine dans le degré de contrôle individuel sur les comportements néfastes pour la santé. Selon certains, les comportements des adultes en matière de santé impliquent le libre arbitre et, pour les autres, ils impliquent des choix soumis aux contextes économiques, historiques, familiaux, culturels et politiques. Pour certains, la décontextualisation du comportement en matière de santé incite à « culpabiliser les victimes » de l’inégalité quant à leurs modes de vie malsains (Krieger, 2001renvoi vers). Dans le présent chapitre, tout en reconnaissant que les comportements sont façonnés par les forces sociales, économiques et politiques au cours d’une vie, nous nous concentrerons sur l’étude des preuves dans ce domaine et mettrons en avant les difficultés méthodologiques dans ce secteur de la recherche.

Évaluer le rôle des comportements de santé : analyse de médiation

L’examen des voies expliquant les différentiels socioéconomiques dans la santé n’est pas simple. Comme indiqué auparavant, il est possible que l’association entre les facteurs socioéconomiques et la santé au cours de la vie soit bidirectionnelle. La recherche menée sur le rôle joué par les comportements de santé dans l’explication des inégalités sociales liées à la santé utilise un paradigme beaucoup plus simple. Le modèle présenté en figure 2.1Renvoi vers l’illustre à l’aide de trois variables : une variable d’exposition (éducation comme marqueur de la position socioéconomique) ; les médiateurs (comportements de santé et l’état de santé) ; une mesure de l’état de santé (mortalité). L’analyse de médiation est généralement réalisée pour évaluer l’importance des comportements de santé dans l’association entre éducation et mortalité. Les étapes nécessaires pour tester la médiation dans le modèle statistique sont les suivantes (Baron et Kenny, 1986renvoi vers) :
• montrer que l’éducation est associée à la mortalité sans les médiateurs (étape 1) ;
• montrer que l’éducation est associée aux comportements de santé (étape 2) ;
• montrer que les comportements de santé sont associés à la mortalité (étape 3) ;
• répéter l’étape 1 ci-dessus, mais avec les médiateurs (comportements de santé) (étape 4).
Le rôle de médiation des comportements de santé est déterminée par le pourcentage de réduction du coefficient pour la position socioéconomique (étape 1) après l’inclusion du ou des comportements de santé (étape 4) à l’aide de la formule suivante : « 100 × (βModèle étape 1 - βModèle étape 4)/(βModèle étape 1) » où β est le coefficient de régression. Dans l’examen des preuves, nous analyserons chacune de ces étapes afin d’évaluer le rôle des comportements de santé dans l’explication des inégalités sociales liées à la santé.
Figure 2.1 Analyse de médiation

Association entre les facteurs socioéconomiques et la santé

Les différences de morbidité et de mortalité entre les groupes socioéconomiques constituent l’un des résultats les plus constants de la recherche épidémiologique (Fox, 1989renvoi vers ; Krieger et coll., 1997renvoi vers ; Marmot et Wilkinson, 1999renvoi vers). Les données récentes suggèrent que les taux de mortalité restent sensiblement supérieurs parmi les groupes socioéconomiques inférieurs, selon une évaluation basée sur les mesures d’éducation et de situation professionnelle dans les pays européens (Mackenbach et coll., 2008renvoi vers). Les facteurs socioéconomiques tels que les revenus, l’éducation et la situation professionnelle sont associés à la santé tous âges confondus, dans l’enfance (Case et Paxson, 2006renvoi vers), à l’adolescence (Richter et coll., 2009renvoi vers), à l’âge adulte (Marmot et coll., 1991renvoi vers ; Saurel-Cubizolles et coll., 2009renvoi vers) et chez les personnes âgées (Benzeval et coll., 2011renvoi vers).

Association entre les facteurs socioéconomiques et les comportements de santé

Une plus grande prévalence des comportements néfastes dans les groupes socioéconomiques inférieurs est largement documentée (Lakka et coll., 1996renvoi vers ; Lynch et coll., 1997renvoi vers). Les marqueurs socioéconomiques, particulièrement dans le monde développé, comme en France (Singh-Manoux et coll., 2009renvoi vers), ont été associés au surpoids et à l’obésité (Sobal et Stunkard, 1989renvoi vers ; McLaren, 2007renvoi vers), qui sont eux-mêmes des facteurs liés aux comportements de santé. Il existe un gradient social dans les comportements de santé dans l’enfance (Kleiser et coll., 2009renvoi vers) qui persiste jusqu’à la fin de vie (Wister, 1996renvoi vers ; Shankar et coll., 2010renvoi vers). Des éléments suggèrent que la composante environnementale des facteurs socioéconomiques est également associée à des comportements néfastes pour la santé (Lakshman et coll., 2011renvoi vers). Malgré les messages de santé publique encourageant l’adoption de comportements sains, il apparaît à présent que la prévalence supérieure de comportements néfastes persiste dans les groupes socioéconomiques inférieurs, même dans les pays relativement riches tels que la Suisse (Galobardes et coll., 2003renvoi vers). Il est probable que ce résultat soit lié au fait que les individus appartenant aux groupes socioéconomiques inférieurs sont plus réticents à l’idée de modifier leurs comportements néfastes que leurs pairs plus favorisés (Winkleby et coll., 1994renvoi vers ; Wardle et Steptoe, 2003renvoi vers ; Sorensen et coll., 2007renvoi vers). Par exemple, Sorensen et coll. ont analysé l’évolution de la consommation de fruits et de légumes dans deux essais de prévention comparatifs randomisés : l’un dans les petites entreprises (n=974) et l’autre dans les centres sanitaires (n=1 954) dans le cadre du projet Harvard Cancer Prevention Program. Ils ont découvert que la suffisance alimentaire et le fait d’habiter un logement non surpeuplé (mesures indirectes des circonstances matérielles) sont associés à une plus forte modification de la consommation de fruits et de légumes.
Cependant, il est important de noter qu’il n’y a pas de schémas universels dans l’association entre la position socioéconomique et les comportements. Même dans les pays développés, cette association varie, selon des facteurs socioculturels et historiques. D’une manière générale, les régions du nord de l’Europe présentent un gradient socioéconomique fort en termes de comportements de santé (Winkleby et coll., 1990renvoi vers ; Wagenknecht et coll., 1990renvoi vers ; Osler, 1993renvoi vers). Dans les régions du sud de l’Europe, la consommation de tabac, d’alcool et l’alimentation semblent plus liés aux normes culturelles qu’aux facteurs socioéconomiques (Trichopoulou et coll., 2002renvoi vers) ; des gradients socioéconomiques faibles ou inexistants sont fréquemment signalés (Graham, 1996renvoi vers ; Wagner et coll., 2003renvoi vers ; De et coll., 2005renvoi vers). Les normes culturelles et les traditions liées au respect du régime méditerranéen et à la consommation modérée d’alcool peuvent expliquer, en partie, ces différences entre le nord et le sud (Cavelaars et coll., 1997renvoi vers ; Mackenbach et coll., 1997renvoi vers ; Trichopoulou et coll., 2002renvoi vers ; Knoops et coll., 2004renvoi vers). Un article récent comparant les inégalités sociales dans les comportements néfastes pour la santé dans l’étude française Gazel et l’étude britannique Whitehall II (figure 2.2Renvoi vers) montrait, dans la cohorte britannique, des gradients plus importants au niveau de la consommation de tabac, de l’alimentation déséquilibrée et de l’absence d’activité physique et, dans la cohorte française, un gradient plus important pour la consommation abusive d’alcool (soit 21 unités d’alcool par semaine pour les hommes et 14 unités pour les femmes) (Stringhini et coll., 2011renvoi vers). En effet, il y a également des différences nord-sud à l’intérieur des pays ; dans la cohorte française Gazel, la prévalence de l’obésité, de l’hypercholestérolémie et de l’hypertension est inférieure chez les participants vivant dans le sud de la France (Tran et coll., 1998renvoi vers).
Figure 2.2 Inégalités sociales dans les comportements de santé (d’après Stringhini et coll., 2011renvoi vers)

Comportements de santé associés à l’état de santé

Le mode de vie et les comportements liés à la santé sont reconnus comme des déterminants majeurs de la morbidité et de la mortalité dans le monde (Berkman et Breslow, 1983renvoi vers ; Stampfer et coll., 2000renvoi vers ; Mokdad et coll., 2004renvoi vers ; Knoops et coll., 2004renvoi vers ; Chiuve et coll., 2006renvoi vers ; Khaw et coll., 2008renvoi vers ; Byberg et coll., 2009renvoi vers). En 2010, la consommation de tabac représentait 6,3 % du fardeau mondial de la maladie et l’alcool 3,9 %, tandis que le manque d’activité physique et l’alimentation déséquilibrée étaient responsables de 10,0 % de cette charge (Lim et coll., 2012renvoi vers). Plusieurs études ont dénombré la contribution des comportements de santé à la mortalité (McGinnis et Foege, 1993renvoi vers ; Mokdad et coll., 2004renvoi vers ; Knoops et coll., 2004renvoi vers ; van Dam et coll., 2008renvoi vers ; Khaw et coll., 2008renvoi vers). Les études évaluent de plus en plus souvent le rôle combiné des facteurs comportementaux sur la santé. Selon une étude récente, basée sur les données de 11 pays européens, 60 % des décès1 , toutes causes confondues, peuvent être attribués aux comportements de santé (Knoops et coll., 2004renvoi vers). De même, les données de l’étude sur la santé du personnel infirmier (Nurses’ Health Study) montrent que 55 % des décès peuvent être attribués au tabac, au surpoids, au manque d’activité physique et à une alimentation déséquilibrée. Il convient de noter que la consommation d’alcool modifie peu cette estimation (van Dam et coll., 2008renvoi vers). Une étude récente menée au Royaume-Uni a utilisé un score composé de tabac, manque d’activité physique, consommation d’alcool et alimentation, et a montré que chez les individus appartenant à la catégorie saine pour ces quatre comportements le risque de mortalité était égal au quart du risque de mortalité chez les individus appartenant à la catégorie malsaine pour les quatre comportements (figure 2.3Renvoi vers), ce qui correspond à une différence de 14 ans en âge chronologique (Khaw et coll., 2008renvoi vers).
Figure 2.3 Fonction de survie par rapport au nombre de comportements sains (d’après Khaw et coll., 2008renvoi vers)
L’importance des comportements en matière de santé pour les maladies chroniques, telles que le diabète de type 2 (Hu et coll., 2001renvoi vers ; Schulze et Hu, 2005renvoi vers), les coronaropathies (Stampfer et coll., 2000renvoi vers ; Chiuve et coll., 2006renvoi vers) et le cancer (Key et coll., 2004renvoi vers) est de plus en plus reconnue. Les données issues de l’étude Nurses’ Health Study fournissent des preuves importantes selon lesquelles les femmes non obèses d’âge moyen qui ne fumaient pas, avaient une alimentation saine, faisaient de l’exercice et consommaient de l’alcool de manière modérée, avaient une incidence de coronaropathie inférieure de 80 % à celle des femmes obèses présentant tous ces comportements néfastes (Stampfer et coll., 2000renvoi vers). Des résultats similaires ont été obtenus chez les hommes : ceux qui ne fumaient pas n’étaient pas en surpoids, avaient une bonne alimentation et une consommation d’alcool modérée avaient une incidence de coronaropathie inférieure de 62 % (Chiuve et coll., 2006renvoi vers). Des travaux ont également montré l’importance des comportements en matière de santé sur les AVC (Kurth et coll., 2006renvoi vers ; Chiuve et coll., 2008renvoi vers). Ainsi, un mode de vie sain semble avoir une importance cruciale pour les maladies chroniques. Un article récent publié au Royaume-Uni estimait le coût économique annuel d’une alimentation défavorable à la santé, du manque d’activité physique, de la consommation de tabac, d’alcool et du surpoids/de l’obésité pour le National Health Service (Scarborough et coll., 2011renvoi vers). L’analyse des maladies associées à ces comportements a permis de découvrir que les problèmes de santé liés à une alimentation déséquilibrée coûtaient 5,8 milliards de livres sterling (6,9 milliards d’euros), que les coûts liés au manque d’activité physique étaient de 0,8 milliard de livres sterling (0,95 milliard d’euros), que le tabac coûtait 3,3 milliards de livres sterling (3,9 milliards d’euros), tout comme l’alcool, et que le surpoids et l’obésité coûtaient 5,1 milliards de livres sterling (6,06 milliards d’euros). Ces données suggèrent donc qu’une alimentation déséquilibrée est l’un des facteurs de risque comportemental qui a l’impact budgétaire le plus élevé.
Les évaluations de l’impact des comportements en matière de santé sur la mortalité concluent que même de modestes changements de mode de vie pourraient entraîner d’importantes diminutions de la mortalité (van Dam et coll., 2008renvoi vers). Une étude a évalué spécifiquement l’impact du changement en modélisant la différence en termes de risque de maladie avec des individus passant d’un mode de vie malsain à un mode de vie sain, et a montré que les hommes qui adoptaient deux nouveaux comportements sains avaient un risque de coronaropathie inférieur à celui de ceux qui ne les adoptaient pas, ajusté par rapport au comportement de référence (Chiuve et coll., 2006renvoi vers). Une autre étude, avec un suivi sur 4 ans, a démontré que l’adoption de comportements sains en milieu de vie était associée à une diminution de la mortalité et des maladies cardiovasculaires (King et coll., 2007renvoi vers). Les études d’intervention fournissent des preuves supplémentaires des bénéfices pour la santé des modifications des comportements en matière de santé. Une étude suggère des effets bénéfiques de l’intervention comportementale pour prévenir l’hypertension, avec des bénéfices pour les individus hypertendus et non hypertendus (Appel et coll., 2003renvoi vers). Dans un autre essai, des individus d’âge moyen en surpoids ayant une intolérance au glucose présentaient un risque de diabète inférieur de 58 % après une intervention comportementale (Tuomilehto et coll., 2001renvoi vers). Des preuves sont fournies également quant à la persistance à long terme des effets de l’intervention ; Ornish et coll. ont rapporté une diminution accrue de l’athérosclérose coronaire après 5 ans, par rapport à un an d’intervention intensive sur le mode de vie (Ornish et coll., 1998renvoi vers). Une autre étude récente a rapporté la possibilité de prévenir ou de retarder l’apparition du diabète sur une durée pouvant atteindre 14 ans, suite à une intervention maintenue pendant une période de 6 ans (Li et coll., 2008renvoi vers).

Rôle des comportements en matière de santé pour expliquer les inégalités sociales liées à la santé

La mise en évidence de l’existence des étapes 2 et 3 (cf. figure 2.1Renvoi vers) suggère que les comportements en matière de santé sont des constructions sociales et qu’ils sont des déterminants importants de la santé. Le tableau 2.Irenvoi vers rassemble les études longitudinales démontrant l’existence de l’étape 4, et indique dans quelle mesure les comportements expliquent les inégalités sociales en termes de santé. Les combinaisons de facteurs comportementaux potentiellement modifiables tels que la consommation de tabac, d’alcool, les habitudes alimentaires, l’activité physique et l’indice de masse corporelle (IMC) expliquent jusqu’à 54 % des différences socioéconomiques en matière de mortalité (Lynch et coll., 1996renvoi vers ; Lantz et coll., 1998renvoi vers ; Schrijvers et coll., 1999renvoi vers ; Woodward et coll., 2003renvoi vers ; Strand et Tverdal, 2004renvoi vers ; van Oort et coll., 2005renvoi vers ; Laaksonen et coll., 2008renvoi vers ; Skalicka et coll., 2009renvoi vers ; Stringhini et coll., 2010renvoi vers et 2011renvoi vers). Plusieurs études transversales ont également évalué le rôle des comportements en matière de santé dans l’explication des inégalités sociales liées à la santé. Nous avons choisi de ne pas inclure ces études dans le tableau car dans ce type d’étude, les facteurs socioéconomiques, les comportements en matière de santé et l’état de santé sont évalués simultanément, rendant difficile la distinction entre la cause et l’effet.
Toutes les études incluses dans le tableau utilisent des mesures individuelles de la position socioéconomique, de l’éducation, de l’activité professionnelle ou des revenus. Il est possible que les facteurs contextuels tels que les caractéristiques du logement et l’environnement géographique soient également importants pour façonner les comportements (Cohen et coll., 2000renvoi vers ; Mujahid et coll., 2008renvoi vers), mais nous n’avons pas identifié d’études longitudinales ayant évalué ces associations en utilisant les caractéristiques socioéconomiques de l’environnement géographique. Cependant, les études incluses dans le tableau ne sont pas toutes similaires. Le type d’étude n’était pas identique, la période de suivi différait, la mesure de la position socioéconomique également, et les médiateurs spécifiques inclus dans les modèles statistiques étaient différents. Une étude incluait sept comportements en matière de santé (consommation de tabac, de légumes, activité physique, type de matière grasse utilisée sur le pain, consommation de café, poids et consommation d’alcool) (Laaksonen et coll., 2008renvoi vers), une autre en analysait quatre (consommation de tabac, d’alcool, vie sédentaire, et poids relatif) (Lantz et coll., 1998renvoi vers). Certaines études combinaient les comportements en matière de santé et les facteurs de risque cardiovasculaire : Strand et coll. ont évalué le rôle de la consommation de tabac, de l’activité physique, du statut matrimonial, de l’IMC, de la tension artérielle, et du cholestérol (Strand et Tverdal, 2004renvoi vers) ; Woodward et coll. ont inclus l’usage de tabac, de nicotine, d’alcool, le score au test de personnalité de type A, les loisirs, le diabète, la tension artérielle systolique et diastolique, l’IMC, le cholestérol total et HDL, les triglycérides, le fibrinogène et la consommation de vitamine C (Woodward et coll., 2003renvoi vers). Parmi les comportements en matière de santé, la plupart des études montrent que le tabagisme est l’un des facteurs les plus forts et l’alcool l’un des facteurs les plus faibles de l’association entre facteurs socioéconomiques et santé (Woodward et coll., 2003renvoi vers ; Laaksonen et coll., 2008renvoi vers ; Stringhini et coll., 2010renvoi vers et 2011renvoi vers).
Selon certaines études, les comportements en matière de santé ne pouvaient pas être examinés indépendamment des facteurs matériels et structurels. Schrijvers et coll. ont inclus les facteurs de risque comportementaux (consommation d’alcool, de tabac, IMC, activité physique, habitudes alimentaires) et matériels (problèmes financiers, lieu de résidence, logement, surpopulation, la situation professionnelle-indicateur de revenu) pour expliquer les différences d’éducation dans la mortalité toutes causes confondues (Schrijvers et coll., 1999renvoi vers). Van Oort et coll. ont également inclus des facteurs matériels (type d’assurance maladie, problèmes financiers et mode d’occupation du logement), des facteurs psychosociaux (événements de la vie et locus de contrôle externe) et des facteurs comportementaux (tabagisme et activité physique) (van Oort et coll., 2005renvoi vers). Bien que la réduction de la prévalence des comportements néfastes pour la santé dans les populations à faibles revenus soit un objectif de santé publique important, selon certaines études, les différences socioéconomiques dans la mortalité sont dues à un large ensemble de facteurs et persisteraient donc même avec une amélioration des comportements de santé dans les groupes socioéconomiques défavorisés (Lantz et coll., 1998renvoi vers). Selon un argument similaire, les comportements sont associés aux facteurs matériels, de telle sorte que les facteurs comportementaux ne contribuent que de manière marginale à l’explication, indépendamment des facteurs matériels (van Oort et coll., 2005renvoi vers). Cependant, il est important de noter que les conclusions qui démontrent que l’association entre le niveau d’éducation et la mortalité est largement expliquée par des facteurs matériels (problèmes financiers, environnement du quartier, conditions d’hébergement, surpopulation, situation professionnelle) (Schrijvers et coll., 1999renvoi vers), ignorent le fait que de nombreux facteurs matériels inclus dans l’analyse sont également des mesures des conditions socioéconomiques et, en tant que telles, sont susceptibles d’être fortement corrélées avec l’éducation. Dans ce cas, dans quelle mesure les médiateurs ne sont-ils pas simplement des indicateurs de la variable d’exposition ? La réponse n’est pas claire, ce qui rend l’analyse de médiation difficile à interpréter.

Tableau 2.I Études longitudinales sur le rôle des comportements de santé expliquant les inégalités sociales en termes de santé

Référence
N
Pays
Mesures
Type de mortalité
Part de la mortalité liée à la position
socioéconomique  expliquée par les
comportements de santé
Lynch et coll., 1996renvoi vers
N=2 272 hommes
Durée de suivi : 7 ans
Finlande
PSE(1)1PSE : Position socioéconomique : Revenu
Comportements de santé : tabac, alcool, activité physique
Mortalité (toutes causes confondues)
Mortalité cardiovasculaire
Tous comportements : 35 %
Tous comportements : 50 %
Lantz et coll., 1998renvoi vers
N=3 617, 38 % d’hommes
Durée de suivi : 7,5 ans
États-Unis
PSE : Revenu
Comportements de santé : tabac, alcool, style de vie sédentaire, variations de poids corporel
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : 20 %(2)2Calcul à partir d’estimations
Schrijvers et coll., 1999renvoi vers
N=15 451
Durée de suivi : 4 ans
Pays-Bas
PSE : Éducation
Comportements de santé : alcool, tabac, IMC, activité physique, habitudes alimentaires
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : environ 50 %
Woodward et coll., 2003renvoi vers
N=11 629 hommes
Durée de suivi : 8 ans
Écosse
PSE : Mode d’occupation du logement (locataires vs. propriétaires) Comportements de santé : tabac, alcool, activité physique, IMC, facteurs de risque cardiovasculaire
Incidence et mortalité coronariennes
Tabac : 40 %
Strand et Tverdal, 2004renvoi vers
N=44 684, 51 % d’hommes
Durée de suivi : 24 ans
Norvège
PSE : Éducation
Comportements de santé : tabac, activité physique, IMC
Mortalité cardiovasculaire
Tabac : 32 % chez les hommes et 22 % chez les femmes
Activité physique : 2 % chez les hommes et 4 % chez les femmes
IMC : 1 % chez les hommes et 13 % chez les femmes
van Oort et coll., 2005renvoi vers
N=4 087
Durée de suivi : 7 ans
Pays-Bas
PSE : Éducation
Comportements de santé : tabac, activité physique
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : environ 30 %
Laaksonen et coll., 2008renvoi vers
N=60 608, 48 % d’hommes
Durée de suivi : 11,9 ans
Finlande
PSE : Éducation
Comportements de santé : tabac, alcool, activité physique, comportement alimentaire, IMC
Mortalité cardiovasculaire
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : 54 % des différences éducationnelles chez les hommes et 22 % chez les femmes
Tous comportements : 45 % et 38 %
Skalicka et coll., 2009renvoi vers
N=36 525, 50 % d’hommes
Durée de suivi : 7 ans
Norvège
PSE : Éducation
Comportements de santé : tabac, alcool, activité physique, comportement alimentaire
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : environ 30 %
Stringhini et coll., 2010renvoi vers
N=9 590, 67 % d’hommes
Durée de suivi : 19 ans
Royaume-Uni
PSE : Profession
Comportements de santé : tabac, alcool, alimentation, activité physique
Mortalité (toutes causes confondues) par rapport au niveau de base
Tous comportements : 42 %
Tabac : 32 % ; alcool : 3 % ; alimentation : 7 % ; activité physique : 5 %
Stringhini et coll., 2011renvoi vers
N=17 760, 75 % d’hommes
Durée de suivi : 16 ans
France
N=9 771, 75 % d’hommes
Durée de suivi : 19 ans
Royaume-Uni
PSE : Profession
Comportements de santé : tabac, alcool, alimentation et activité physique Comme covariables dépendantes du temps
Mortalité (toutes causes confondues)
Tous comportements : 19 % dans l’étude française et 75 % dans l’étude anglaise

Problèmes méthodologiques concernant le rôle des comportements en matière de santé

Les quatre étapes décrites dans l’analyse de médiation semblent simples ; toutefois, il y a plusieurs problèmes méthodologiques dans la stratégie d’analyse et l’interprétation de ces résultats. Cette section met en avant certains de ces problèmes.

Effets cumulatifs des comportements en matière de santé

Dans la plupart des études longitudinales, les comportements en matière de santé sont évalués une fois, généralement au début de l’étude. Cette stratégie ne tient pas compte du fait que les effets des comportements sont susceptibles de s’accumuler : fumer pendant 5 ans n’est pas la même chose que fumer pendant 15 ans. Par exemple, une mesure cumulative des habitudes alimentaires, construite à partir d’évaluations répétées du régime alimentaire, fournit un indicateur plus fort des coronaropathies incidentes que les mesures uniques du régime alimentaire, au début de l’étude (Hu et coll., 1999renvoi vers). Des éléments viennent également étayer l’effet de la durée de l’obésité : tous les 2 ans, un individu obèse voit son risque de mortalité augmenter de 6 % (Abdullah et coll., 2011renvoi vers). Par ailleurs, les changements de comportement ne sont pas pris en compte dans l’analyse. Il est possible que les principaux changements surviennent pendant le suivi. Un article récent a montré que l’association entre la position professionnelle et la mortalité était atténuée de 42 % (IC 95 % [21 %-94 %]) lorsque les comportements en matière de santé évalués au début de l’étude étaient entrés dans le modèle, et de 72 % (IC 95 % [42 %-154 %]) lorsque les comportements étaient considérés comme des covariables dépendantes du temps (Stringhini et coll., 2010renvoi vers). Certains changements de comportement peuvent refléter des tendances dans la population, c’est-à-dire la diminution de la prévalence de la consommation de tabac ou une augmentation des niveaux d’obésité, mais il est également possible que les comportements en matière de santé changent au cours du suivi en raison de facteurs individuels. Ce changement peut être calqué sur une tendance sociale, le groupe socioéconomique favorisé faisant des changements positifs pendant le suivi, contrairement au groupe socioéconomique défavorisé (Chan et coll., 2008renvoi vers ; Purslow et coll., 2008renvoi vers). Ainsi, les études utilisant une seule évaluation des comportements, souvent en début d’étude, peuvent fournir une estimation inexacte de la contribution des comportements en matière de santé à l’association entre les facteurs socioéconomiques et la santé.

Manque de précision et erreurs de mesure

Plusieurs méthodes existent pour évaluer les comportements en matière de santé ; le choix est souvent dicté par des questions de coût et de commodité, particulièrement dans les grandes études. La plupart des études s’appuient sur des auto-évaluations des comportements qui sont biaisées, puisque les individus n’évaluent pas toujours leurs comportements avec exactitude. Au-delà des biais dans l’évaluation, le régime alimentaire et l’activité physique, en particulier, sont difficiles à mesurer (Stampfer et coll., 2000renvoi vers ; van Dam et coll., 2008renvoi vers ; Khaw et coll., 2008renvoi vers). Concernant l’alimentation, certaines études utilisent le questionnaire semi-quantitatif de fréquence de consommation des aliments (Willett et coll., 1985renvoi vers) ou les rappels alimentaires de 24 heures (bien plus fiables), mais la plupart des études utilisent de brèves mesures de fréquence de consommation des aliments courants. Ces mesures simples fournissent une mesure inexacte du comportement alimentaire des individus. De même, l’activité physique est mal mesurée dans les études, et l’intensité de l’activité est rarement évaluée. Des développements récents dans l’accélérométrie pourraient fournir une solution, qui restera néanmoins chère et compliquée à utiliser. Dans de nombreuses études, l’imprécision des mesures est également liée à l’utilisation d’une seule mesure de référence des facteurs associés au mode de vie. Une solution consiste à utiliser les valeurs moyennes de mesures répétées pendant la période de suivi, afin de réduire les erreurs de mesure dans ces variables (Stampfer et coll., 2000renvoi vers ; Chiuve et coll., 2008renvoi vers).

Groupement et impact combiné des comportements

De nombreux éléments suggèrent que plusieurs comportements de santé sont souvent retrouvés simultanément : les fumeurs, en particulier, ont souvent au moins un autre comportement néfaste pour la santé (Shankar et coll., 2010renvoi vers). Cet effet est particulièrement fort dans les groupes socioéconomiques inférieurs (Borodulin et coll., 2012renvoi vers). Par exemple, Shankar et coll. ont montré que seuls 7,4 % des individus appartenant au quartile le plus riche avaient deux comportements néfastes pour la santé ou plus, contre 16,3 % dans le quartile le plus pauvre. L’association de plusieurs comportements suggère qu’il n’est pas forcément judicieux d’examiner le rôle de chacun d’entre eux individuellement. De nombreuses études ont créé des scores de comportement, où le nombre de comportements néfastes est additionné, pour examiner l’association avec la santé (Knoops et coll., 2004renvoi vers ; van Dam et coll., 2008renvoi vers ; Khaw et coll., 2008renvoi vers). L’association entre les scores de risque comportemental et la santé est susceptible d’être influencée par la pondération accordée à chacun des comportements. Généralement le score de risque donne une pondération égale à tous les comportements. Par exemple, dans l’étude EPIC2 (Royaume-Uni), les participants obtenaient un point pour chaque comportement en matière de santé : pas de consommation actuelle de tabac, pas d’inactivité physique, consommation d’alcool modérée et vitamine C plasmatique >50 mmol/l (indiquant une consommation d’au moins 5 fruits et légumes par jour), le score total allant de zéro à quatre (Khaw et coll., 2008renvoi vers). Puis, le risque de mortalité sur une période de suivi de 11 ans a été comparé entre ceux qui avaient zéro, un, deux, trois ou les quatre comportements. Le risque de mortalité pour les individus présentant les quatre comportements en matière de santé contre zéro comportement en matière de santé était équivalent au fait d’avoir 14 ans de moins. Il s’agit d’une approximation imparfaite des associations entre comportements de santé, car toute association de deux comportements néfastes (tabagisme et inactivité physique ou régime alimentaire et consommation d’alcool) était supposée avoir le même impact sur la santé.

Autres médiateurs

De multiples voies interconnectées ont été proposées pour expliquer les inégalités sociales de santé (Townsend et Davidson, 1982renvoi vers ; Kaplan et coll., 1996renvoi vers ; Marmot et Wilkinson, 1999renvoi vers ; Kivimaki et coll., 2008renvoi vers), les médiateurs principaux étant les comportements en matière de santé, les facteurs psychosociaux et les facteurs matériels. De nombreux auteurs pensent que les processus sociaux et biologiques sont étroitement liés. Il est donc difficile d’isoler les effets les uns des autres (Krieger, 2001renvoi vers ; Diez Roux, 2007renvoi vers). Il est important de reconnaître que les conclusions concernant l’importance des comportements en matière de santé ne peuvent pas être déduites si d’autres médiateurs de l’association position socioéconomique-santé ne sont pas modélisés. Dans ces modèles, la variance expliquée par des variables inconnues ou non incluses dans l’analyse peut contribuer à la surestimation du rôle des comportements en matière de santé dans l’association position socioéconomique-mortalité (Blakely, 2002renvoi vers). Cependant, la modélisation simultanée des mesures des facteurs psychologiques, des facteurs comportementaux et d’autres éléments possibles le long de la chaîne de causalité est difficilement envisageable. En outre, il est possible que l’effet des facteurs matériels et psychologiques sur la santé soit également médié par les comportements en matière de santé (Schrijvers et coll., 1999renvoi vers ; van Oort et coll., 2005renvoi vers). Les différences d’exposition aux risques environnementaux entre les classes sociales et l’accès aux soins médicaux sont d’autres contributeurs importants dans de nombreux contextes (Hart, 1971renvoi vers). L’approche systémique, promue par certains auteurs (Krieger, 2001renvoi vers ; Diez Roux, 2007renvoi vers), est une solution possible mais elle reste difficile à mettre en œuvre.
En conclusion, malgré les difficultés d’évaluation de l’importance des comportements en matière de santé, nous savons qu’ils constituent des déterminants importants de la santé. Une forte prévalence de comportements néfastes pour la santé est reconnue dans les groupes socialement défavorisés, même dans les pays relativement riches. Par ailleurs, il existe un gradient social dans les comportements de santé qui persiste de l’enfance jusqu’à la fin de vie. Cependant, même dans les pays développés, l’association entre la position socioéconomique et les comportements varie selon des facteurs socioculturels et historiques (ainsi dans les régions du Sud de l’Europe, l’alimentation semble plus liée aux normes culturelles et aux traditions qu’aux facteurs socioéconomiques).
Le mode de vie et les comportements liés à la santé sont reconnus comme des déterminants majeurs de la morbidité et de la mortalité. D’après les données de 11 pays européens, 60 % des décès, toutes causes confondues, peuvent être attribués aux comportements de santé. Les combinaisons de facteurs comportementaux potentiellement modifiables tels que la consommation de tabac, d’alcool, les habitudes alimentaires, l’activité physique et l’IMC expliquent jusqu’à 54 % des différences socioéconomiques en matière de mortalité. Cependant, les différences socioéconomiques en termes de mortalité sont dues à un large éventail de facteurs et il faut souligner la difficulté de l’analyse du rôle des comportements en matière de santé. Elle est liée à l’imprécision des mesures (difficulté de l’évaluation du régime alimentaire et de l’activité physique, absence de mesure de référence répétée dans le temps) dans les études de suivi, à la difficulté de prendre en considération les effets cumulatifs de plusieurs facteurs interconnectés (comportements en matière de santé, facteurs psychosociaux, facteurs matériels…).
Les politiques de santé et les interventions centrées sur les comportements individuels en matière de santé peuvent non seulement améliorer la santé de la population, mais aussi réduire de manière substantielle les inégalités en termes de santé. Néanmoins, si les comportements en matière de santé sont déterminés socialement, les politiques visant à améliorer la santé des populations peuvent contribuer à augmenter les inégalités sociales de santé.
Archana Singh-Manoux
Inserm U 1018, Centre de recherche en épidémiologie
et santé des populations, Villejuif

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