Polyhandicap

2024


ANALYSE

IV-

La personne polyhandicapée, ses aidants, la société


20-

Qualité de vie

La façon dont un individu perçoit son bien-être global est une approche courante pour évaluer sa qualité de vie. La qualité de vie de la population générale est habituellement évaluée à partir de questionnaires validés, utilisés pour connaître la qualité de vie ressentie d’un échantillon représentatif de la population (Baumann et coll., 2010renvoi vers). Sont généralement évalués les conditions matérielles, l’état physique, les compétences fonctionnelles, les interactions sociales, le bien-être émotionnel. Aussi, l’évaluation de la qualité de vie ne peut être fiable qu’à partir d’une auto-évaluation. Ces évaluations sont réalisées en demandant aux personnes participantes d’évaluer leur qualité de vie à partir d’échelles qu’elles remplissent elles-mêmes.
La qualité de vie est plus complexe à évaluer chez la personne polyhandicapée qui ne peut s’évaluer elle-même. Bien que les manifestations de ce qu’elle ressent et ce qu’elle pense sont souvent frustes et discrètes, elles peuvent cependant être interprétées comme traduisant le ressenti agréable ou désagréable d’une situation. Ces manifestations ne sont guère perceptibles que par les proches, familiaux ou professionnels, s’ils sont attentifs aux modifications d’attitude ou de comportement au moment où elles se manifestent (Verdugo et coll., 2014renvoi vers). Pour pouvoir évaluer la qualité de vie des personnes polyhandicapées, une méthodologie spécifique, reposant sur l’observation du comportement, des mimiques, de la posture mais aussi narrative, par les proches et les personnels référents proches de la personne est nécessaire.
Ainsi, la particularité de l’évaluation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée est de ne pouvoir être appréciée que par d’autres personnes que la personne elle-même, du fait de la très grande difficulté à comprendre et interpréter les manifestations vocales, motrices, comportementales de ces personnes. De ce fait, la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap ne peut être mesurée et évaluée que par des tiers, et ne peut être comparée aux évaluations de la qualité de vie de la population générale. Toutefois, l’auto-évaluation habituelle de la qualité de vie par la personne elle-même comporte aussi des biais. Il s’agit de deux méthodologies différentes, que l’on ne peut réellement comparer et estimer meilleure ou moins bonne l’une que l’autre. Si l’évaluation de la qualité de vie de la personne par auto-évaluation est adaptée à la population générale, l’évaluation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée est alternative, par hétéro-évaluation.
L’évaluation par autrui de la qualité de vie de la personne polyhandicapée pose une question éthique propre à cette situation particulière : celui qui évalue (parent ou proche) est un bon évaluateur quand il connaît le mieux la personne en situation de polyhandicap. Cependant, cela comporte aussi le risque que son évaluation soit biaisée par le fait même que le polyhandicap de l’enfant retentit aussi sur la qualité de vie de l’évaluateur d’autant plus qu’il est justement proche (Seliner et coll., 2016renvoi vers). Se pose alors la question de savoir de quel droit on évalue pour elle la qualité de vie de la personne polyhandicapée, et qui est-elle pour qu’on l’évalue à sa place (Billette de Villemeur, 2018renvoi vers). Cette particularité pose des questions philosophiques, éthiques et méthodologiques qui seront évoquées avant de décrire les outils utilisés et les évaluations de la qualité de vie de la personne polyhandicapée, mais aussi de son entourage familial et professionnel. Les questions de l’évaluation prospective de la qualité de vie de l’enfant à naître ou du nouveau-né en réanimation quand un risque de polyhandicap est dépisté, seront abordées ensuite.

Intrications de la situation de polyhandicap
et de la qualité de vie

Le polyhandicap, de par sa précocité, sa sévérité et sa chronicité interfère avec la qualité de vie de la personne qui en est atteinte. Comme cela a été souligné dans le préambule de cette expertise, les déficiences liées au polyhandicap retentissent sur la vie quotidienne de la personne et sur les possibilités d’exprimer ce que la personne ressent, et font douter certains de son humanité.

Philosophie, éthique et droits humains face à la situation de polyhandicap

La distance avec laquelle la philosophie peut considérer les personnes que l’on appelle aujourd’hui polyhandicapées n’est pas récente et reste difficile à dépasser. En 1689, John Locke (Locke, 1689renvoi vers) se demande ce que « seront ces imbéciles, toujours couverts de bave, sans intelligence, et tout à fait intraitables ? ». Kant (Kant, 1990renvoi vers) renchérit en évoquant des « manifestations de cette faiblesse qui […] sont trop connues pour qu’il soit nécessaire [qu’on s’] y attarde longtemps » (p. 59). Un tel regard distant porté sur ces personnes peut aujourd’hui amener à les catégoriser comme n’ayant pas les attributs nécessaires à leur reconnaissance comme êtres humains : dans The ethics of killing, Jeff McMahan (McMahan, 2002renvoi vers) affirme qu’appartenir à l’humanité c’est être une personne, et que l’absence d’autonomie (p. 260), ou de conscience de soi (p. 90) sont incompatibles avec le fait d’être un être humain. À l’inverse de ces regards lointains et abstraits, Eva F. Kittay (2019renvoi vers) revendique combien la proximité avec ces personnes permet de bien les connaître, amène à détecter leurs capacités à être sensible à leur environnement et à l’attention qui leur est portée et aux soins qu’on leur prodigue (Kittay, 2019renvoi vers) (voir préambule de l’expertise). Avishaï Margalit (1999renvoi vers) dans La société décente (Margalit, 1999renvoi vers) insiste sur l’absence de respect qui consiste à « être aveugle à l’expression humaine » et à qualifier de « légume » une personne polyhandicapée.
Une réflexion éthique centrée sur le respect de la dignité de la personne polyhandicapée participe à sa qualité de vie, comme pour toute autre personne. Olsman et coll. (2022renvoi vers) rappellent que la dignité comporte plusieurs degrés : la dignité intrinsèque liée au seul fait d’être humain qui est absolue et n’a pas de lien avec la qualité de vie ; la dignité individuelle qui est liée à la capacité de la personne à partager, à manifester de façon à ce que les proches puissent en attester ; la dignité relationnelle suppose, elle, que la vie de la personne mérite d’être partagée, notamment avec les proches ; enfin, la dignité sociétale est reconnue par des sujets non liés à la personne, et donc peut être évaluée différemment par chacun. La reconnaissance de la dignité sociétale impose qu’il soit pris soin de la personne qui en est dotée. L’approche de la qualité de vie par la dignité est donc fonction du lien que celui qui évalue a avec la personne en situation de polyhandicap et est aussi fonction de la personne elle-même (Olsman et coll., 2022renvoi vers).
Avec une approche similaire et pertinente, Sheridan Forster (Forster, 2010renvoi vers) met en garde contre les idéologies de normalisation abusive de certaines recommandations appliquées sans vergogne aux personnes avec PIMD (Profound Intellectual and Multiple Disabilities), conduisant à nier la spécificité des personnes en situation de polyhandicap et à ignorer les effets délétères que peut avoir une volonté de normaliser à tout prix l’apparence et les interactions avec ces personnes. Sheridan Forster critique une injonction de normalisation des activités et de la présentation des personnes handicapées au motif qu’il s’agirait d’une infantilisation nuisant à leurs possibilités de développement. Il constate que cette attitude est nuisible aux personnes avec PIMD. Il est en effet nécessaire de s’adapter aux capacités de la personne et de la faire progresser en fonction de ses capacités d’apprentissage et non pas de lui imposer des contextes et des interactions correspondant à son âge légal pour lui permettre de s’épanouir. La normalisation en vue d’une valorisation sociale de la personne peut être nuisible à son bien-être et à ses acquisitions. Le respect de la dignité de la personne consiste à l’accompagner en tenant compte de ses déficiences et selon ses compétences et non en les masquant derrière un rideau normatif nuisible à la personne avec PIMD. L’auteur fait référence à une pratique qu’il dit être devenue invasive en Australie, au Royaume-Uni et aux États-Unis dans les années 2000.
L’impact du discours médical sur la liberté individuelle de la personne avec PIMD est souligné par Susan Eriksson et Eero Saukkonen (Eriksson et Saukkonen, 2021renvoi vers) qui analysent les explications données par des kinésithérapeutes au sujet de la possibilité qu’ont les personnes qu’elles accompagnent depuis plusieurs années de pratiquer certaines activités. Ces explications illustrent concrètement comment l’objet de la rééducation peut être décrit médicalement par le rationnel de cette activité comme permettant d’entretenir la souplesse des articulations, ou bien être justifié par le droit de la personne en situation de (poly)handicap à pratiquer certaines activités collectives de loisirs qui favorisent le plaisir lié à l’activité physique qu’elles supposent. Se référant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies (Nations unies, 2006renvoi vers) et à Michel Foucault (Foucault, 1963renvoi vers), les autrices soulignent que la connaissance médicale constitue encore aujourd’hui un pouvoir sur la personne tant en discours qu’en acte, et que cela concerne particulièrement les personnes en situation de polyhandicap.
De son côté, Verdugo et coll. (2012renvoi vers) rappellent que l’évaluation de la qualité de vie dans le champ du handicap intellectuel et en particulier du polyhandicap est très importante non seulement pour connaître la qualité de vie de ces personnes mais aussi pour garantir et renforcer leurs droits fondamentaux. Ils montrent que les facteurs permettant d’améliorer la qualité de vie de ces personnes sont corrélés au respect de leurs droits fondamentaux et notamment à la possibilité d’accéder à l’égalité, à l’autonomie, à la non-discrimination, à la participation et à l’inclusion dans la société à laquelle elles appartiennent.
Avec l’équipe de l’hôpital San Salvadour, en France, Patrick Collignon (Collignon, 2008renvoi vers) revendique un droit à la qualité de vie des enfants sévèrement polyhandicapés hospitalisés pour des longs séjours dans des hôpitaux dédiés.

Méthodologies de l’évaluation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée76

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Quelle que soit la rigueur de la méthode d’évaluation utilisée, la qualité de vie de la personne qui n’est pas en capacité de s’évaluer elle-même reste très difficile à estimer de façon juste. En effet, lorsque la personne ne peut communiquer avec son entourage, l’évaluation de sa qualité de vie est estimée de l’extérieur par un autrui qui évalue tant en fonction de lui-même que de celui qu’il évalue. Comme l’ont montré certaines études concernant les personnes ayant un locked-in syndrome qui ont accès aux techniques de communication via l’Eye-tracking, celles-ci évaluent leur qualité de vie de façon identique à la moyenne de la population générale, ce qui n’était pas attendu par les investigateurs (Rousseau et coll., 2013renvoi vers et 2015renvoi vers). Aussi, pour les personnes polyhandicapées, les techniques d’investigations des compétences doivent tendre à rechercher les compétences « invisibles » que la situation de polyhandicap ne permet pas de détecter facilement (voir chapitre « Maltraitance »).
Dans la situation de polyhandicap, les parents de ces personnes sont généralement spontanément très attentifs à la qualité de vie de leur enfant.
Un travail portant sur l’avis des parents quant à l’évaluation de la qualité de vie de leurs enfants avec PIMD (n = 19 enfants) a mis en avant que la première condition pour être en mesure d’évaluer de façon correcte la qualité de vie des personnes était de bien les connaître et d’avoir une grande proximité avec eux. En conséquence de quoi ce sont leurs parents qui sont les plus à même d’évaluer leur qualité de vie, ou à défaut leurs frères ou sœurs, puis les soignants. De l’avis des parents, les médecins ne sont pas en position d’évaluer la qualité de vie des personnes avec PIMD du fait d’une absence de proximité avec la vie qu’elles mènent au quotidien (Nieuwenhuijse et coll., 2023renvoi vers).
Cependant, plusieurs études ont proposé une évaluation de la qualité de vie de la personne avec PIMD et il a pu être suggéré que l’évaluation triangulaire par les soignants, les parents et des observateurs plus éloignés utilisant des méthodes différentes d’évaluation était utile à une approche plus fiable de la qualité de vie de ces personnes (Nieuwenhuijse et coll., 2019renvoi vers).
La même équipe a étudié comment les soignants conçoivent la qualité de vie des personnes avec PIMD dont ils s’occupent et la façon dont ils l’évaluent. Les soignants perçoivent la qualité de vie des personnes, l’évaluent (essai/erreur) et en discutent entre collègues. Ils soulignent la proximité qu’ils ont avec ces personnes et le fait que ces évaluations retentissent aussi sur leur qualité de vie personnelle (Nieuwenhuijse et coll., 2020brenvoi vers).
Les besoins d’aides pour les personnes avec PMD (Profound Multiple Disabilities) ont été analysés à partir d’une revue de la littérature par Katja Petry et Bea Maes (Petry et Maes, 2007renvoi vers). L’évaluation des aides nécessaires est un repère pour évaluer la qualité de vie de ces personnes. Les autrices décrivent des domaines nécessitant une aide appropriée pour les personnes avec PIMD : compétences intellectuelles pour apprendre par observation et imitation ; adaptation comportementale avec l’aide des aidants favorisant les interactions avec l’environnement ; interactions sociales notamment avec des personnes sans déficiences ; prise en compte de leur état de santé pour favoriser leur confort physique, leurs compétences sensorielles, limiter leurs troubles comportementaux. Enfin, l’environnement est aussi un facteur fondamental tant par les relations avec les équipes, les aides offertes et les interactions entre les familles et les aidants professionnels. Ces besoins ne sont pas fondamentalement différents de ceux de toute autre personne mais leur prise en compte doit être adaptée à leur situation de polyhandicap, notamment pour optimiser leur qualité de vie.
L’importance des compétences de l’équipe médico-éducative des établissements hébergeant des personnes avec PIMD a été analysée au prisme de la qualité des soins prodigués. Marie Matérne et Marie Holmefur (2022renvoi vers) ont interrogé les équipes soignantes de sept établissements (six ruraux, un urbain) accueillant des adultes avec PIMD (Matérne et Holmefur, 2022renvoi vers). Les entretiens étaient menés par un kinésithérapeute et une infirmière expérimentés. Les entretiens montrent que la qualité des soins est améliorée par l’équipe soignante des structures grâce notamment à un soutien approprié, permettant d’être adapté et de s’ajuster à chaque personne, de créer une relation interactive avec elle en sollicitant son avis. Les ajustements impliquent des réunions régulières des soignants et des aides lors des situations aiguës. Chaque expérience nouvelle ayant une solution technique améliore les compétences de l’ensemble de l’équipe. La collaboration entre les différentes disciplines éducatives et médicales est parfois difficile et nécessiterait des interactions avec une plus grande diversité de professions spécifiques car les besoins des résidents sont très divers et spécifiques.

Évaluation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée : méthodes et outils

Les méthodes proposées pour évaluer la qualité de vie des personnes polyhandicapées sont soit objectives (recueillant des données quantifiables), soit subjectives (à partir d’informations recueillies et analysées de façon rigoureuse mais non quantifiables). Ces différentes méthodes peuvent être appliquées de façon complémentaire pour répondre à une même question. C’est en particulier le cas pour l’évaluation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée qui est complexe et justifie des approches multiples qui se complètent les unes les autres au grand bénéfice de la qualité et de la fiabilité des évaluations dans ce contexte. Pour évaluer la qualité de vie d’une personne polyhandicapée, le témoignage des proches (famille, soignants) est aussi d’une grande importance et d’un grand intérêt dans l’évaluation de la qualité de vie, permettant en particulier de fiabiliser et de pondérer les conclusions des évaluations scientifiques objectives ou subjectives (Olsman et coll., 2021renvoi vers).
Les méthodes objectives s’appuient sur des outils dédiés au polyhandicap ou adaptés à lui et qui doivent avoir été validés (Sousa et Rojjanasrirat, 2011renvoi vers). De plus, lorsque ces outils sont traduits pour être utilisables dans une autre langue que celle dans laquelle ils ont été construits et validés, ils doivent être de nouveau validés dans chaque nouvelle langue (Sousa et Rojjanasrirat, 2011).
L’équipe de Petry et coll. a construit une méthode d’évaluation de la qualité de vie des personnes avec PMD (mais en fait, PIMD d’après leur description) (Petry et coll., 2007arenvoi vers). Les auteurs ont développé et entamé une validation par la méthode Delphi pour améliorer sa validité et son utilité. Un groupe de 45 experts a été constitué dont 16 théoriciens, 15 praticiens, 14 expérimentateurs, dont 12 belges, 12 allemands, 11 hollandais et 10 britanniques ou irlandais. Pour évaluer la qualité de vie des personnes avec PMD, cinq domaines ont été testés : le bien-être physique, matériel, social, le développement et les activités, le bien-être émotionnel. Les critères ont été déterminés suite aux avis de 40 parents et 36 membres des équipes proches de 42 enfants et 34 adultes. Les personnes interrogées étaient belges (n = 50), allemandes (n = 6) ou hollandaises (n = 20). Trente-six des personnes avec PMD recevaient des soins de jour et 40 étaient résidents en structures. Le premier tour comportait 223 items. L’analyse, quantitative et qualitative, conclut à la pertinence de la majorité des items pour la population avec PMD, avec au deuxième tour 78,7 % des items obtenant au moins 85 % de consensus. Quelques items ont été supprimés. Il n’y avait pas de différence significative selon les catégories d’experts ni selon les pays. Les items retenus au final sont au nombre de 176 et répartis en deux sous-catégories : résultats et rôle de soutien. Cet outil est donc valide pour les patients avec PIMD. La langue dans laquelle cette étude est menée n’est pas mentionnée, sachant que les experts étaient de cinq pays différents avec au moins trois langues différentes. Plus précisément, les proches interrogés étaient belges, allemands et hollandais (impliquant au moins deux langues différentes).
Une évaluation de la valeur psychométrique de l’outil a été réalisée à partir d’une réduction d’items (n = 105). Une réduction ultérieure de 50 items et la nouvelle validation par 174 informateurs confirment le maintien de la cohérence et la fiabilité de l’outil avec 55 items. Cependant, la cohérence entre les évaluateurs était faible. La trop longue durée du test (une heure trente-quatre minutes en moyenne) a entraîné l’abandon ou le refus de participer d’un nombre important d’évaluateurs, impliquant de réduire de nouveau le questionnaire pour pouvoir valider l’outil Quality of Life-PMD (QoL-PMD) avec des test-retests (Petry et coll., 2009renvoi vers).
Verdugo et coll. (2010renvoi vers) ont développé un premier questionnaire en vue d’une évaluation objective de la qualité de vie des personnes en situation de handicap fréquentant des services sociaux en Espagne (Verdugo et coll., 2010renvoi vers). Ils ont réalisé une première validation de ce questionnaire avec un échantillon de 608 professionnels et de 3 029 usagers de 239 structures de Catalogne. La fiabilité interne de cet outil est confirmée et le questionnaire apparaît utile et innovant, permettant d’envisager l’amélioration des structures et programmes de prise en charge. En 2014, la même équipe a publié une validation de l’échelle San Martín, adaptée à la population des personnes avec IMD (Intellectual and Multiple Disabilities). Ce questionnaire comportant 276 items, regroupés dans 8 domaines, a été réduit à 95 items retenus pour leur utilisabilité, leur importance, leur sensibilité et leur acceptabilité. Sa validation a été réalisée avec 1 770 professionnels, familles ou proches qui connaissaient la personne depuis au moins 3 mois. Ces personnes devaient avoir eu l’occasion d’observer la personne avec PIMD de façon régulière et prolongée depuis au moins 1 mois. Ce questionnaire est validé en espagnol et en anglais (Verdugo et coll., 2014renvoi vers).
Dayan et coll. (2016renvoi vers) ont créé une échelle de qualité de vie et une grille d’observation des caractéristiques des enfants polyhandicapés et de leur environnement (Dayan et coll., 2016renvoi vers). Bien que cette échelle n’ait pas pu être validée, elle a apporté de nombreuses informations pertinentes et utiles sur ces enfants, leurs caractéristiques personnelles et leur environnement. Les données concernant la qualité de vie sont complexes à recueillir et à évaluer, en partie du fait de la difficulté à évaluer la qualité de vie de la personne en situation de polyhandicap. D’autres études sont donc nécessaires.
L’échelle PolyQoL récemment créée a été construite spécifiquement pour évaluer la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap (Hamouda et coll., 2022renvoi vers). Dix familles d’enfants et d’adultes, ainsi qu’un groupe de professionnels ont participé à l’élaboration de l’échelle pour valider le sens des termes utilisés, le vocabulaire employé et leur compréhensibilité. Chaque groupe a testé indépendamment et collectivement les items proposés et leur acceptabilité. Les validités interne et externe ont été confirmées. Trois-cent-cinquante-trois familles et 185 professionnels ont testé la qualité de vie respectivement de 258 et 465 personnes polyhandicapées. Les tests portent sur 2 groupes de chacun 10 items, l’un sur la santé et l’autre sur la dimension sociale. Chaque item est coté de 1 à 5 (5 indiquant la meilleure qualité de vie). La validation de l’échelle PolyQoL a montré une évaluation de la qualité de vie des personnes polyhandicapées moins bonne quand elles ont une pathologie progressive, et une qualité de vie meilleure lorsqu’elles ont un état de santé moins dégradé. Le niveau socioéconomique des évaluateurs n’a pas révélé d’impact sur l’évaluation de la qualité de vie. Ne comprenant que 20 items, la durée de l’évaluation est courte comparativement aux échelles similaires. N’ont pas encore été testées la reproductibilité et la réactivité au changement. L’acceptabilité de cet outil est bonne ; il est disponible en langue française (tableau 20.Irenvoi vers).

Tableau 20.I Évaluation en français de la qualité de vie de la personne par l’échelle PolyQoL (d’après Hamouda et coll., 2022renvoi vers)

Au cours des quatre dernières semaines, comment évalueriez-vous chacun des domaines suivants pour la personne polyhandicapée ?
Évaluation en parallèle par les soignants et la famille
Chaque question est cotée de 1 à 5
Q1 Son état de santé
Q2 La maîtrise des douleurs et de l’inconfort
Q3 Son suivi médical
Q4 Son repos, son sommeil
Q5 Son alimentation
Q6 Son hygiène
Q7 Son bien-être émotionnel
Q8 Ses activités, ses sorties
Q9 Son apparence et le respect de sa dignité
Q10 Le respect de ses repères, de ses rythmes, de ses habitudes
Q11 Sa mobilité, ses possibilités de se déplacer
Q12 Ses possibilités de faire certaines choses seul(e)
Q13 Ses possibilités de se faire comprendre
Q14 Le respect de ses goûts, de ses choix et de ses préférences
Q15 La présence et les sollicitations des personnes qui l’entourent
Q16 Son intégration et sa participation à la vie familiale et sociale
Q17 Les marques d’affection et de tendresse qui lui sont apportées
Q18 Ses possibilités d’échanger avec les personnes qu’il apprécie
Q19 Sa sécurité au sein de ses lieux de vie
Q20 Ses possibilités de disposer d’un espace privé ou professionnel

Cotation de la qualité de vie de la personne polyhandicapée :

… / 100
Des mesures physiologiques ont été étudiées pour repérer les situations d’inconfort et de confort chez la personne avec PIMD. Les manifestations de bien-être s’expriment par des comportements qui peuvent être difficiles à repérer et à interpréter chez les personnes avec PIMD. Les variations physiologiques de l’arythmie sinusale respiratoire, du rythme cardiaque et de la conductance cutanée peuvent être des indicateurs utiles pour repérer l’inconfort ou la douleur mais aussi pour distinguer entre un ressenti agréable et désagréable (Vos et coll., 2010renvoi vers).
Le point de vue de 11 soignants sur la qualité de vie des personnes avec PIMD avec qui ils travaillent a été interrogé. Des entretiens ont ainsi été menés où ils décrivent des situations de bonne ou mauvaise qualité de vie des personnes dont ils s’occupent. La bonne qualité de vie a été décrite essentiellement par des termes émotionnels comme la joie, le plaisir et le bonheur. La mauvaise qualité de vie a été décrite par des symptômes physiques comme la douleur, le malaise, la respiration rapide. Les soignants estiment que la possibilité pour les personnes avec PIMD d’influer sur leur environnement est un élément de bonne qualité de vie. Ils utilisent leur connaissance tacite des personnes avec PIMD et les discussions qu’ils ont à ce propos avec leurs collègues pour comprendre la qualité de vie des personnes et la façon de l’améliorer (Nieuwenhuijse et coll., 2020brenvoi vers).
Il est intéressant de noter que la même équipe propose dans le même temps une méthode subjective. Les auteurs ont parallèlement étudié la perception de la qualité de vie des personnes avec PIMD par leurs médecins. Ils ont interrogé 7 médecins expérimentés habitués à soigner des personnes avec PIMD. Ces derniers évoquent les aspects émotionnels, les symptômes physiques et les contextes relationnels comme influençant la qualité de vie de ces personnes. Ils évoquent la bonne qualité de vie avec des critères émotionnels, la mauvaise qualité de vie avec des symptômes physiques. Les médecins insistent aussi sur l’importance des contextes relationnels des personnes avec PIMD comme ayant un grand impact positif ou négatif sur leur qualité de vie. De plus, ils ajoutent que le déclin des conditions physiques, le mauvais pronostic de leur état de santé et la détérioration de leur contexte relationnel péjorent leur qualité de vie (Nieuwenhuijse et coll., 2020arenvoi vers).
Pour Olsman et coll. (2021renvoi vers), le témoignage sur la qualité de vie des personnes avec PIMD est une approche de philosophie appliquée (Olsman et coll., 2021renvoi vers). Il est nécessaire que la qualité de vie soit décrite le plus objectivement possible par d’autres que par la personne elle-même lorsqu’il s’agit d’une personne avec PIMD. Cette évaluation par le témoignage d’autrui est une certaine réduction de leurs expériences. Les soignants sont de ce fait des témoins et non des évaluateurs de la qualité de vie ; aussi donnent-ils un témoignage et non une évaluation. La crédibilité de ces témoignages nécessite à la fois confiance et méfiance. Confiance en ce qu’ils décrivent par une observation affûtée, méfiance parce que leurs témoignages relèvent de l’interprétation de ce qui est observé. Cette double composante est nécessaire pour éviter la projection de la propre qualité de vie des observateurs qui biaiserait l’interprétation. Ceci est très important quand l’évaluation de la qualité de vie de la personne avec PIMD est questionnée, notamment lorsqu’il est question de vie ou de mort, de poursuivre ou interrompre des traitements.
Les outils permettant d’évaluer la qualité de vie de la personne en situation de polyhandicap sont peu nombreux. Ceux qui existent ne sont pas tous validés, et ceux validés le sont rarement dans plusieurs langues, ce qui restreint leur disponibilité. Les méthodes sont diverses (objectives, subjectives, témoignages), et les thèmes qu’elles mobilisent diffèrent selon les usages. Cette diversité est d’un grand intérêt et souligne les nombreuses facettes qui influent sur la qualité de vie des personnes. Il est nécessaire de prendre en compte cette diversité pour avoir une évaluation pertinente et juste. L’attention doit aussi être portée sur la durée nécessaire pour chaque évaluation qui diffère pour chaque outil et qui peut être un obstacle à leur utilisation en clinique. La combinaison de méthodes objectives et subjectives associée à des témoignages par les proches familiaux et professionnels permet plus de justesse. L’équipe de San Salvadour promeut l’usage de l’échelle d’évaluation de la douleur chez la personne polyhandicapée : « échelle de San Salvadour » (Collignon et Giusiano, 2001renvoi vers), et des méthodes d’éducation sensori-motrice par la stimulation basale de Andreas Frölich (Fröhlich, 2000renvoi vers) pour une meilleure prise en compte éthique du soin et de la qualité de vie de ces personnes.

Quels sont les facteurs susceptibles d’avoir un impact
sur la qualité de vie de la personne en situation de polyhandicap ?

Du fait de la faible capacité d’expression de la personne en situation de polyhandicap, l’évaluation de sa qualité de vie est le plus souvent réalisée par les aidants familiaux ou professionnels qui lui sont proches.

Impact des structures d’accueil

Plusieurs études portent sur les facteurs qui influent ou qui traduisent la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap. Les principaux sont les caractéristiques de la structure d’accueil et de son fonctionnement, les activités adaptées à chaque personne individuellement, les manifestations de satisfaction des personnes notamment les indices de bonheur et la réduction des aspects désagréables des activités de routine.
Petry et coll. ont interrogé le point de vue des parents et des soignants sur les caractéristiques des équipes et les ont corrélées à la qualité de vie des personnes avec PIMD (Petry et coll., 2005renvoi vers et 2007brenvoi vers). Les 76 parents ou membres des équipes interrogés mentionnent les caractéristiques de la structure d’accueil : environnement, nombre de personnels, turn-over de l’équipe, taille du groupe de personnes avec PIMD et composition du groupe ; les caractéristiques d’organisation des professionnels : partenariat, travail collectif, interdisciplinarité ; les caractéristiques des professionnels : expérience, sensibilité adaptée, motivation et engagement, force physique, connaissance et compétences, réflexion personnelle. Un des enjeux de l’évaluation de la qualité de vie de la personne en situation de polyhandicap est de permettre la mise en place des stratégies d’amélioration de celle-ci et d’analyser l’efficacité de ces stratégies.
La matrice de satisfaction en direct proposée par Gordon Lyons (Lyons, 2005renvoi vers), vise à évaluer la qualité de vie subjective des enfants avec PMD. Elle se fonde sur le degré de satisfaction de ces enfants mais sans définir le terme satisfaction. La satisfaction des activités quotidiennes est évaluée par le temps passé à chaque activité (plus de temps témoignant de plus de satisfaction de l’enfant), par l’expression de comportements répertoriés et reconnaissables tant par les proches que par les non familiers. Vingt-deux enfants (12 avec PMD et 10 ayant des besoins de support élevés) sont évalués par leurs proches et par les professionnels qui s’en occupent. Les observations ont duré au total 470 heures et sont complétées par 130 entretiens avec les proches et soignants. Lyons conclut à la possibilité de discerner le niveau de satisfaction des enfants avec PMD et la possibilité de le mesurer.
Lancioni et coll. (2005renvoi vers) analysent l’augmentation des indices de bonheur des personnes avec PIMD à partir de 24 études recensées entre 1990 et 2004 (Lancioni et coll., 2005renvoi vers). Les indices d’augmentation du bonheur sont influencés par la structuration des sessions de stimulation, les changements rapides de stimulations, les activités de loisirs et des tâches favorites, un environnement adapté, le positionnement d’activités favorites au début de session et les séances de Snoezelen2 . Les résultats de ces études indiquent une augmentation des manifestations de bonheur des participants, une augmentation de la durée de l’activité, du nombre de participants et plus de participation active aux séances. Il faut prendre en compte le coût financier, le temps dépensé pour ces améliorations et les différentes méthodes doivent être évaluées les unes par rapport aux autres.

Impact des soins prodigués

Une revue de 16 études empiriques portant sur l’amélioration de la qualité des interventions auprès des personnes avec PIMD, analyse les facteurs d’amélioration constatée de la qualité et de l’efficacité des soins qui leur sont prodigués. Ces études ciblent le bien-être physique, matériel et émotionnel, les interactions sociales, la possibilité de choix, le développement personnel. Cependant, Maes et coll. notent que ces études n’abordent pas la participation sociale ni le respect des droits (Maes et coll., 2007renvoi vers). La plupart des études montrent l’existence d’un bénéfice des activités pratiquées sur le comportement des équipes et des personnes avec PIMD. Les résultats sont à retenir avec prudence du fait des aspects méthodologiques de ces études. Les auteurs soulignent la nécessité de travaux portant sur des nombres plus importants de personnes, ayant des structurations plus robustes, et une caractérisation plus rigoureuse des personnes étudiées.
Réduire le caractère désagréable des traitements de routine est aussi un facteur à prendre en compte. Green et Reid (1999renvoi vers) ont créé et évalué un indice du caractère désagréable des traitements de routine et élaboré un programme de diminution du désagrément manifesté lors des activités quotidiennes (Green et Reid, 1999renvoi vers). Cet indice a été testé sur 3 adultes avec PMD (associant déficience intellectuelle profonde, absence de marche, déficience motrice : diplégie ou quadriplégie, épilepsie, absence de parole, absence d’autonomie pour les actes quotidiens tels l’habillage et l’alimentation). Ces 3 personnes manifestaient régulièrement un désagrément lors des séances quotidiennes de rééducation. La situation était jugée désagréable si la personne manifestait des grognements sans sourire, des grimaces, des pleurs, des cris. La situation était jugée agréable en cas de sourire, de rire, de grognement avec sourire. Les personnes sont filmées pendant leurs séances quotidiennes et les images sont analysées simultanément par 2 personnes indépendamment. La fiabilité de l’analyse était très bonne avec des réponses homogènes entre investigateurs pour les manifestations de désagrément et d’agréable. Le programme proposé de diminution du désagrément et d’augmentation de l’agréable repose sur le repérage des indicateurs lors des situations de routine. Son application consiste à proposer avant le début des séances de rééducation l’activité repérée comme étant la plus agréable ; les activités désagréables sont entrecoupées par de courtes séquences agréables sans modifier la durée totale des activités initiales. La fin de la séance est suivie par 10 minutes de l’activité agréable. Après 7 semaines de ce protocole, les personnes manifestaient beaucoup moins, ou plus du tout, de désagrément.

Impact de l’état de santé et des traitements

La qualité de vie des personnes polyhandicapées est très impactée par certains sur-handicaps. La prévention et le traitement de la douleur sont des plus importants. L’évaluation de la douleur est particulièrement nécessaire en raison de la difficulté à la dépister et à en évaluer l’intensité et la durée chez les personnes polyhandicapées. Elle doit être systématique et régulièrement recherchée et réévaluée. Plusieurs échelles sont utilisées : l’échelle « douleur enfant San Salvadour »3 , l’échelle EDAAP (Expression de la douleur chez l’adolescent et l’adulte polyhandicapés)4 , l’échelle FLACC modifiée (Face, Legs, Activity, Cry, Consolability)5 et la grille Evendol utilisée aux urgences.
Le lien entre la mobilité et la qualité de vie de 29 enfants âgés de 1 à 18 ans avec Severe and/or Multiple Disabilities (SMD) (quotient intellectuel [QI]<25 ; classification de la fonction motrice globale – Gross Motor Function Classification System : GMFCS IV-V) a été étudié par 27 kinésithérapeutes (Mensch et coll., 2019renvoi vers). La mobilité a été évaluée avec le questionnaire Movakic (Mensch et coll., 2015renvoi vers) ; la qualité de vie a été explorée avec le questionnaire Quality of Life-PMD (QoL-PMD) (Petry et coll., 2009renvoi vers). Cette étude montre une corrélation positive significative entre les compétences motrices et la qualité de vie de ces enfants.
L’impact des interventions chirurgicales et des orthèses, sur la qualité de vie de 27 enfants avec PIMD a été étudié. Ont été examinés le coût de l’intervention orthopédique, les compétences fonctionnelles et comportementales (à partir d’enregistrements vidéo), la qualité de vie des patients (les soignants répondaient au nom des patients) et des soignants, et le degré de satisfaction des soignants envers l’intervention. Toutefois, les auteurs ne donnent pas d’information au sujet de la nature des interventions orthopédiques pratiquées et de l’état de santé avant et après l’intervention orthopédique reçue par les enfants. Bien que les résultats ne soient pas significatifs et ne peuvent valider l’intérêt réel de ces interventions sur la qualité de vie des personnes polyhandicapées concernées, ils montrent que l’évaluation est complexe et doit inclure le point de vue du chirurgien, des soignants et des parents y compris pour apprécier les conséquences sur la qualité de vie (Neilson et coll., 2000renvoi vers).
Une nouvelle approche phénoménologique par la méthode de l’« histoire de vie » auprès des mères de 3 jeunes adultes avec PIMD a permis de montrer l’intérêt de cette méthodologie pour recueillir des données cliniques correctement historisées sur les conséquences de leurs troubles dysphagiques évoluant de longue date. Cette méthode paraît utile pour reconstruire avec une bonne fiabilité l’historique des problèmes de santé des personnes polyhandicapées et de leurs conséquences au long cours. Ce regard rétrospectif sur l’historique des troubles, des actions menées et l’évolution des symptômes après une longue période est pourvoyeur de sens pour les équipes et les proches, permettant de consolider l’intérêt des efforts fournis par ces mères (Crawford et Wilkinson, 2018renvoi vers). Ce type d’approche phénoménologique trouve aussi son importance dans les situations critiques où la question de l’obstination déraisonnable peut se discuter (cf. infra).
Le questionnaire Qualin (Manificat et coll., 2000renvoi vers) est un outil dédié à l’analyse de la qualité de vie des nourrissons et jeunes enfants de moins de 3 ans. Par analogie, il a été utilisé dans les deux études suivantes portant sur le retentissement de l’état de santé et de l’alimentation de jeunes en situation de polyhandicap plus âgés. Bien que le questionnaire Qualin ne soit pas validé pour cette population plus âgée, nous mentionnons ces études en raison de la rareté des travaux portant sur l’impact de l’état de santé sur la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap. La prévalence de la malnutrition et son impact sur la qualité de vie ont été évalués chez 72 enfants avec PIMD. La malnutrition est retrouvée chez près de 35 % des enfants. La qualité de vie était significativement bien plus mauvaise chez les enfants dénutris et chez ceux étant dans des situations inconfortables pendant la durée des repas (Holenweg-Gross et coll., 2014renvoi vers). Dans une autre étude, la qualité de vie de 28 enfants polyhandicapés âgés de 1 à 18 ans a été évaluée par le même questionnaire Qualin. Dix-huit d’entre eux (64,3 %) étaient alimentés via une gastrostomie. Les auteurs concluent à la bonne tolérance de ce mode d’alimentation par les familles et à une qualité de vie des jeunes patients porteurs de gastrostomie similaire à ceux qui n’en avaient pas (André et coll., 2007renvoi vers).
On peut constater qu’il n’y a que de très rares études qui évaluent l’impact sur la qualité de vie de l’état de santé et des différents traitements et interventions appliqués aux personnes polyhandicapées. L’évaluation de toutes les interventions médicales et chirurgicales est manquante pour valider les bénéfices réels, tant médicaux que sur la qualité de vie à court et long termes, des différentes approches thérapeutiques pour les personnes polyhandicapées.

Impact de l’environnement

L’environnement sonore peut avoir un rôle sur le sentiment de sécurité et de confort du lieu dans lequel se trouve la personne avec PIMD. Les comportements de ces personnes ont été analysés montrant l’effet bénéfique d’un environnement sonore sécurisant sur leur comportement et probablement aussi sur leur qualité de vie. Les professionnels des institutions qui ne sont pas directement au contact des personnes avec PIMD n’ont pas clairement conscience de l’impact de la qualité sonore de l’environnement sur le confort et le comportement de ces personnes (van den Bosch et coll., 2016renvoi vers). L’environnement sonore a aussi un impact sur les capacités d’attention qui retentit sur la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap. Une étude a été menée pour comparer l’effet de sons naturels et de sons artificiels sur le comportement de 13 adultes ayant des comportements-problèmes (ex. : agressivité, automutilation, etc.). Une pièce dédiée a été aménagée avec un bon isolement acoustique et des diffusions sonores diverses : forêt, plage, ville, musique et silence. L’ensemble des personnes a manifesté un comportement plus détendu que dans leur contexte habituel. Les personnes étaient globalement plus confortables avec les environnements de bruits naturels (plage, forêt) qu’avec la musique ou le bruit de la ville. Le silence était aussi pourvoyeur d’un meilleur confort mais avec des manifestations d’ennui parfois (van den Bosch et coll., 2017renvoi vers). Les auteurs soulignent aussi que le fait d’être dans un contexte dédié avec un intervenant qui se consacre entièrement à la personne peut aussi être à lui seul bénéfique.
Le moment de la nécessité du change des protections pour l’incontinence peut être difficile à reconnaître. Un outil de signal de la nécessité de change est en cours d’évaluation sur la différence de qualité de vie et sur le nombre de changes. Cette étude comporte également une évaluation de l’utilisation et du coût financier de cette nouvelle méthode ; cette dernière pourrait avoir un effet dans l’amélioration de la qualité de vie des personnes avec PIMD (van Cooten et coll., 2022renvoi vers).
Le manque d’accessibilité des transports en commun aux personnes en situation de handicap constitue une entrave majeure à leur possibilité de déplacement et par voie de conséquence à leur qualité de vie. Les services de mobilité partagée comme le covoiturage ou la micromobilité sont analysés dans 21 pays d’Europe pour leurs disponibilité et accessibilité pour différents types de handicap. Il s’avère que les services ne sont pas adaptés à de nombreuses situations de handicap et notamment aux situations nécessitant des services polyvalents permettant des transports pour les petites distances, et avec des espaces suffisants pour les fauteuils roulants. De très grands progrès sont à faire tant sur la disponibilité de tels services que sur les véhicules adaptés à toute sorte de handicap (Goralzik et coll., 2022renvoi vers).
Concernant l’environnement familial, David Fernandez Fidalgo (Fernandez Fidalgo, 2022renvoi vers) souligne l’importance du processus d’attachement entre l’enfant ou l’adolescent en situation de polyhandicap et sa famille. Il analyse la complexité des situations familiales et de la diversité de leurs « profils » qui peuvent être flexibles, fusionnels, mais aussi parfois au contraire désengagés, chaotiques. Il souligne aussi que l’attachement n’est pas toujours facile à maintenir et qu’il est parfois nécessaire de soutenir les parents qui peuvent ressentir un relâchement de l’attachement à leur enfant.
Un projet de formation continue inter-professionnelle européenne destinée à sensibiliser à la nécessité et la faisabilité de l’inclusion des enfants en situation de grande dépendance et de leurs familles est en cours. Ce projet est développé dans le cadre du projet européen Enablin+. La complexité des besoins de ces enfants et des différentes approches nécessaires est soulignée. L’objectif est la formation interactive, une coopération entre professionnels et parents, et un partage des connaissances, mais aussi des valeurs et des croyances, des angoisses et des frayeurs, et des possibilités d’améliorer la qualité de vie des enfants qui vivent ces situations complexes (Lebeer et coll., 2022renvoi vers).

Comment la personne en situation de polyhandicap participe-t-elle à l’évaluation de sa propre qualité de vie ?

Les manifestations de joie ou de plaisir peuvent être des marqueurs de la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap. Chez six personnes avec PIMD, Katja Petry et Bea Maes (Petry et Maes, 2006renvoi vers) ont étudié les manifestations de plaisir ou de déplaisir à partir des observations des parents et des soignants indépendamment. Les expressions de leur humeur se manifestent par des sons et des expressions faciales de plaisir ou de déplaisir identifiables.
Chez trois adultes avec PMD ou handicaps complexes, les investigateurs ont proposé une des activités préférées de la personne, combinée ou non avec une interaction sociale. Les manifestations de gaîté ou de joie étaient plus présentes quand, à l’activité de « routine », était ajoutée l’activité préférée. Les manifestations s’exprimaient davantage lorsque l’activité préférée s’accompagnait d’une interaction sociale (Davis et coll., 2004renvoi vers).
Dans une structure accueillant des personnes avec PIMD, Bossink et coll. (2017renvoi vers) ont évalué le bénéfice d’un programme d’exercices physiques aidé pendant une demi-heure 3 fois par semaine pendant 20 semaines consécutives chez 37 personnes, enfants et adultes, comparées à des témoins qui ne modifiaient pas leurs activités habituelles, essentiellement des activités sédentaires avec très peu de stimulations. Il n’a pas été observé de différence significative sur le plan fonctionnel ni communicationnel, ni sur celui de la qualité de vie dans les deux groupes. Les activités physiques étaient bien tolérées et ont amélioré la saturation en oxygène des personnes du groupe actif (Bossink et coll., 2017renvoi vers).
Lancioni et coll. (2021renvoi vers) ont proposé des séances de stimulation de l’activité physique alternativement auto-régulées ou régulées par l’équipe, chez 12 personnes avec SMD. Toutes les personnes ont manifesté une satisfaction avec les stimulations auto-régulées. Neuf personnes sur 12 ont aussi manifesté une satisfaction des séances régulées par l’équipe. Le niveau de satisfaction manifesté était plus élevé pour les stimulations auto-régulées (Lancioni et coll., 2021renvoi vers).
Chez les personnes avec SMID (Severe Motor and Intellectual Disabilities) ayant besoin de soins médicaux pour les maintenir en vie, il y a souvent des détresses émotionnelles et somatiques nécessitant des actions pour soulager leur détresse. Des prélèvements salivaires ont été effectués lors des séances de Snoezelen chez 10 patients. L’activité de l’amylase salivaire s’est avérée abaissée lors de ces séances, indépendamment de la sévérité de leur handicap. Ainsi l’activité de l’amylase salivaire est un moyen non invasif et simple pour évaluer l’amélioration du stress chez les personnes avec SMID (Takeda et coll., 2008renvoi vers).
Une enquête transversale canadienne a évalué la qualité de vie de 59 personnes présentant une déficience intellectuelle sévère ou profonde associée à des déficiences développementales vivant dans des services de santé et de transition spécialisés avant leur transition vers un milieu de vie en communauté entre 2014 et 2018 (Cameranesi et coll., 2021renvoi vers). L’évaluation de leur qualité de vie a été réalisée avec l’échelle San Martin (Verdugo et coll., 2014renvoi vers), traduite et validée en anglais (Stone et coll., 2020renvoi vers). Cette étude montre l’intérêt de répéter l’évaluation de la qualité de vie ainsi que les éléments de la qualité de vie dans le temps, et en particulier avant et après les changements de structure. Dans cette étude, l’évaluation de la qualité de vie après passage d’une unité d’enfant vers une unité d’adulte révèle des résultats identiques ou supérieurs à ceux de l’échantillon de référence pour les composantes d’autodétermination, de bien-être émotionnel, de bien-être physique et d’inclusion sociale. Toutefois, les éléments portant sur les droits, le développement personnel, les relations interpersonnelles et le bien-être matériel étaient dans l’ensemble inférieurs après le changement de structure. Les auteurs ajoutent que la présente étude fait partie d’un programme de suivi longitudinal de ce groupe de personnes et qu’il est prévu de nouvelles évaluations de leur santé et de leur qualité de vie qui seront réalisées ultérieurement – après leur transition dans leur milieu de vie en communauté (Cameranesi et coll., 2021renvoi vers).
Les études de la qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap mettent en évidence la grande diversité des manifestations de bonne ou de mauvaise qualité de vie observée à un temps donné, mais aussi selon le contexte ou l’environnement. Plusieurs approches différentes permettent de repérer les facteurs particuliers qui influent sur la qualité de vie de ces personnes et la façon dont elles le manifestent.
Ainsi, la qualité de vie de la personne en situation de polyhandicap comporte de nombreux aspects. Elle concerne non seulement la qualité de vie de la personne polyhandicapée elle-même mais aussi celle de ses proches (les frères et sœurs, les parents) et des soignants qui s’occupent d’elle.

Qualité de vie des aidants et des proches

Qualité de vie des parents

Le polyhandicap retentit aussi sur la qualité de vie des familles, tant par ce qu’il impose et modifie de la vie quotidienne que par la souffrance de voir son enfant (même s’il est devenu adulte) ne pas bénéficier de ce dont il aurait besoin au quotidien.
En 2004, une enquête menée auprès 148 familles concernait 20 items autour de la vie de l’enfant polyhandicapé, de sa famille et de leur environnement social. Cette enquête a mis en évidence trois groupes de demandes principales mentionnés par les familles : avoir la possibilité de faire garder leur enfant polyhandicapé par quelqu’un de confiance et de disposer d’un peu de temps pour soi ; la demande de structure de loisirs adaptée à leur enfant en situation de polyhandicap et dans laquelle il pourrait être intégré ; la prise en compte du besoin des parents d’avoir un soutien moral, de disposer pour les soins à domicile de matériels et d’aides humaines adaptés à la situation de l’enfant (bain, toilette) au domicile et pour les accompagnements extérieurs de l’enfant (Collignon, 2004renvoi vers).
Une étude transversale a été réalisée auprès des parents des enfants et adultes polyhandicapés suivis dans le cadre de la cohorte nationale Eval-PLH (Rousseau et coll., 2019renvoi vers) au sujet de leur qualité de vie personnelle. Trois-cent-quatre-vingt-quatorze parents (de 19 à 85 ans) de 295 personnes polyhandicapées ont répondu. Le questionnaire portait sur leur situation socio-démographique, leur état de santé, et leur situation psycho-comportementale (dont leur qualité de vie). S’ajoutait la description de l’état de santé de leur enfant polyhandicapé. Les deux tiers des parents ayant répondu vivaient avec l’autre parent de la personne polyhandicapée, 13 % s’occupaient aussi d’une autre personne handicapée, un tiers avaient eux-mêmes une maladie chronique. Pour les trois dimensions pour lesquelles des normes françaises sont disponibles (physique, psychologique et sociale), les participants décrivent un niveau de qualité de vie notablement plus bas que la moyenne de la population française de même âge et sexe. La dimension physique de la qualité de vie était impactée par les difficultés financières, l’absence de travail, la maladie chronique, une hospitalisation récente, l’anxiété et l’absence de stratégies d’ajustement positives (absence de stratégie de résolution de problèmes). La dimension psychologique était minorée par le fait d’être la mère, d’avoir des difficultés financières, l’angoisse, l’absence d’aide et l’absence de stratégies d’ajustement positives (non utilisation du soutien social disponible, absence de stratégie de résolution de problèmes et non utilisation de stratégie de pensée positive). La dimension sociale était diminuée par la nécessité de s’occuper de leur enfant polyhandicapé plus de 7 nuits par mois, par le fait être atteint d’une maladie chronique, par le fait d’être anxieux et par l’absence de stratégies d’ajustement positives (non utilisation du soutien social disponible, absence de stratégie de résolution de problèmes). Le sexe de leur enfant polyhandicapé était aussi un facteur de moindre qualité de vie sociale si c’était un homme (plutôt qu’une femme). La dimension environnementale a aussi été questionnée bien qu’il n’y ait pas de norme française. Cette dimension était impactée par le fait d’avoir un faible niveau d’étude, des difficultés financières, de s’occuper de la personne polyhandicapée plus de 7 nuits par mois, une maladie chronique et des troubles anxieux ou de l’humeur et par l’absence de stratégies d’ajustement positives (absence de stratégie de résolution de problèmes). Certains facteurs n’avaient pas d’impact sur la qualité de vie des parents, notamment : l’âge du parent, le fait d’être en couple ou non, les relations avec l’autre parent, avoir d’autres enfants, l’âge de l’enfant polyhandicapé, son rang dans la fratrie, la sévérité ou la stabilité de son état de santé, ou son besoin du matériel médical. Le maintien du lien entre le parent et son enfant polyhandicapé est un facteur de meilleure qualité de vie. De plus, lorsque les parents indiquent qu’ils sont plutôt satisfaits de l’information médicale (56 %), de la prise en charge globale (64 %), de la qualité des soins (68 %), et des aides aux familles (55 %), leur évaluation met en évidence une qualité de vie améliorée.
Lahaije et coll. ont étudié le bien-être des familles qu’ils estiment important non seulement pour les familles mais aussi pour le bien-être de l’enfant polyhandicapé (Lahaije et coll., 2023renvoi vers). Quatre-vingt-deux membres de 44 familles ont participé et renseigné l’échelle « Beach Center Family Quality of Life ». Il s’agit d’un questionnaire comportant 5 domaines : interactions familiales, parentalité, bien-être émotionnel, bien-être matériel, aides liées au handicap. Cette échelle n’avait été utilisée jusqu’à présent que pour des déficiences intellectuelles diverses mais jamais spécifiquement pour le PIMD. Au terme de cette étude préliminaire, les auteurs indiquent que les familles semblent avoir une évaluation de leur qualité de vie familiale comparable à celle des familles interrogées précédemment dans d’autres études, mais avec un moindre niveau pour le bien-être émotionnel. Les enfants ont un meilleur degré de bien-être que les parents, et l’évaluation du bien-être décroît avec l’âge. Une attention particulière doit donc être portée au bien-être émotionnel qui nécessite d’être mieux pris en compte.
À l’occasion d’une étude portant sur 796 familles d’adultes avec handicap à Taïwan, la qualité de vie des parents de 76 personnes avec PIMD a été analysée. Il en ressort que l’état de santé, les aides sociales et la qualité de vie (dans le domaine physique) de ces derniers sont plus mauvais que pour les parents d’adultes avec un handicap moins sévère. Les facteurs associés de façon significative sont le niveau d’éducation, le statut professionnel, les données familiales et l’environnement social. Les auteurs concluent à la nécessité d’améliorer les aides sociales pour les familles défavorisées (Chou et coll., 2011renvoi vers).
Trois études présentées ci-dessous se penchent sur la qualité de vie des mères dont les enfants sont polyhandicapés ou en situation d’une sévérité proche du polyhandicap.
Afin d’étudier la qualité de vie et le poids des soins chez les proches d’enfants avec handicap, une étude portant sur 100 enfants handicapés et leurs proches aidants a été menée en milieu rural dans l’État de Karnataka au sud-ouest de l’Inde. L’échelle d’entretien comportait des données socio-démographiques, de qualité de vie (instrument WHOQoL-BREF : World Health Organization Quality of Life-BREF), de lourdeur pour les aidants (échelle Zarit Burden Scale) et de sévérité du handicap de l’enfant (instrument WHODAS : (World Health Organisation Disability Assessment Schedule) dont 38 % avaient des handicaps multiples et dont les deux tiers étaient des garçons. Les proches aidants étaient pour 87 % des femmes, dont la mère dans 82 % des cas. Dans l’ensemble, la qualité de vie était basse et liée au type de handicap (Arasu et Shanbhag, 2021renvoi vers).
Une étude canadienne a évalué le parcours parental des mères de jeunes adultes avec handicaps multiples vivant en milieu urbain (Magill-Evans et coll., 2011renvoi vers). Il s’agissait de 21 mères de 22 jeunes adultes (dont une paire de jumeaux). Douze mères exerçaient un emploi dont 9 d’entre-elles à plein temps. Les deux tiers des personnes en situation de handicap avaient un niveau GMFCS V et quatre autres un niveau GMFCS IV ; dix avaient un déficit intellectuel sévère. Le passage à l’âge adulte de leur enfant prive la majorité de ces mères d’un revenu suffisant, notamment en prévision de leur future retraite, du fait de la limitation de leur activité professionnelle durant les nombreuses années où elles s’occupent de leur enfant devenu adulte.
Sedláčková et coll. (2023renvoi vers) ont mené des entretiens portant sur l’expérience de vie de 8 mères d’enfant avec PIMD (Sedláčková et coll., 2023renvoi vers). Les principaux thèmes qui émergent de ces échanges portent sur le retentissement sur leur vie privée avec une perte de liberté, leur mode de vie, leur carrière et leurs loisirs. La séparation d’avec le conjoint et l’éloignement des amis sont souvent attribués aux contraintes d’avoir à s’occuper de leur enfant avec PIMD. La surcharge de travail liée aux soins nécessaires pour leur enfant alliée à la disparition de toute disponibilité pour leur entourage, ont pour conséquence un isolement ; le poids des contraintes et de leurs conséquences sur la vie privée est cependant ressenti de façon différente d’une situation à l’autre. Les angoisses et les inquiétudes pour l’avenir de leur enfant et d’elles-mêmes sont soulignées ainsi que les enjeux professionnels qui sont présents quel que soit le métier exercé. L’évolution des valeurs du mode de vie et une adaptation à leur condition de vie imposée ont aussi quelques aspects positifs tels qu’une solidarité et une entraide entre femmes se trouvant dans des situations similaires. Voir leur enfant atteint de PIMD surmonter des épreuves de santé ou acquérir de nouvelles compétences, même très modestes, est un véritable plaisir. Enfin, elles sont aussi fières d’avoir acquis le savoir-faire qui leur permet de s’occuper de leur enfant mieux que personne.

Qualité de vie des fratries

Une évaluation de la qualité de vie des frères et sœurs d’enfant avec PIMD a été réalisée aux Pays-Bas en 2016 chez 18 enfants âgés de 6 à 13 ans (Luijkx et coll., 2016renvoi vers). Cette étude a été menée selon la méthode « Photo Elicitaiton Interview » (PEI) décrite par Douglas Harper (Harper, 2002renvoi vers) puis par Barbara Mandleco (Mandleco, 2013renvoi vers) : cette méthode repose sur des photographies prises par l’enfant lui-même, ce qui permet que ce soit l’enfant qui décide de ce dont il va parler, diminuant ainsi l’influence de l’investigateur (Pyle, 2013renvoi vers). Les sujets abordés concernaient les activités conjointes avec l’enfant atteint de PIMD, la compréhension mutuelle, le temps personnel, l’acceptation, la tolérance, la confiance, le bien-être, le partage de ses expériences, le soutien social, les enjeux du monde extérieur. Ces enfants décrivent des expériences positives mais aussi négatives, indiquant que vivre avec un frère ou une sœur atteint de PIMD impacte leur vie de façons multiples et diverses. Les activités conjointes sont le plus souvent mentionnées. Les occasions de partager des activités communes avec le frère ou la sœur avec PIMD et les moments de temps personnel sont essentiels pour la qualité de vie des frères et sœurs.
Au Japon, la qualité de vie de 789 frères et sœurs (âgés de 6 à 18 ans ; moyenne 12 ans±3 ans) d’un enfant en situation de SMID, a été évaluée par leurs réponses à un questionnaire portant sur leur situation personnelle et un autre sur leurs relations avec leur frère ou sœur atteint de SMID (Wakimizu et coll., 2020renvoi vers). L’évaluation de leur qualité de vie avec le questionnaire relatif à leur situation personnelle (questionnaire « Kinder Lebensqualität Fragebonen ») révélait un score de près de 70, supérieur à la moyenne des enfants du même âge dans la population générale. Les auteurs précisent que cette particularité avait déjà été retrouvée dans une étude portant sur la qualité de vie des fratries d’enfants ayant une autre pathologie chronique diagnostiquée dans la période néonatale : la mucoviscidose. Les éléments augmentant la qualité de vie étaient la proximité avec le frère ou la sœur atteint de SMID, le jeune âge, la lourdeur moindre de s’occuper de l’enfant avec SMID pour le parent s’occupant principalement de lui, le fait d’être puîné, une meilleure aisance familiale, et le fait d’être une sœur.

Qualité de vie des professionnels

L’impact de divers déterminants potentiels sur la qualité de vie des soignants (professionnels) de personnes polyhandicapées a été questionné en 2017 par Rousseau et coll. (2017renvoi vers). Les 238 soignants de personnes polyhandicapées, âgés de 21 à 62 ans, étaient majoritairement des femmes (79 %). Huit pour cent des soignants vivent avec une personne en situation de handicap et 21 % ont une maladie chronique. Les scores portant sur les dimensions physique et sociale étaient nettement plus bas pour les soignants que pour la population de référence, mais les scores relatifs au domaine psychologique étaient significativement plus élevés pour les soignants que pour la population de référence. L’âge est un facteur négatif pour les domaines physique et psychologique de la qualité de vie ; vivre en couple améliore les domaines social et environnemental. Le travail à temps partiel diminue la qualité de vie globale. Ni le sexe, ni le fait d’avoir des enfants, ni le niveau d’éducation ni la profession n’influent sur la qualité de vie des soignants. Il en est de même pour l’expérience du polyhandicap, les modalités de travail ou la lourdeur du polyhandicap. À l’inverse, les stratégies d’ajustement comme la pensée positive ont un effet positif sur la qualité de vie. Le fait d’expérimenter un burn-out sévère diminue tous les domaines de qualité de vie.

Intrication des qualités de vie des parents, de leur enfant polyhandicapé et de la famille

Le retentissement des hospitalisations de l’enfant avec PMD sur la qualité de vie des parents a été analysé chez 117 parents (98 mères et 19 pères) (Seliner et coll., 2016renvoi vers). Les parents manifestent un stress émotionnel avec nervosité, fatigue, voire des symptômes de dépression. S’ajoute un malaise quant à leur rôle vis-à-vis de l’équipe soignante. Ils évaluent comme satisfaisant le bien-être de leur enfant, ce qu’ils indiquent comme étant leur principal objectif ; mais cela s’accompagne d’une lourdeur d’attention et d’une diminution de leur bien-être. L’occasion d’avoir un moment de liberté est ainsi exceptionnelle. Les auteurs notent que le bien-être des parents est corrélé à l’importance de la lourdeur des soins et au bien-être de leur enfant. Les auteurs insistent sur la nécessité d’avoir une stratégie permettant de partager avec les parents la façon dont sont pris en compte l’état de santé de leur enfant et les soins prodigués. Lors des hospitalisations, les parents doivent être soutenus, et leur connaissance unique de leur enfant doit être considérée
Du fait de l’allongement de l’espérance de vie des personnes en situation de polyhandicap, leurs parents s’inquiètent de ce qui pourrait advenir si leur enfant leur survivait. Kruithof et coll. (2022arenvoi vers) ont mené aux Pays-Bas des entretiens avec 27 parents de 25 enfants avec PIMD âgés de 15 à 50 ans (âge moyen : 26 ans). Quatorze d’entre eux vivaient au domicile des parents, onze dans une structure de soins résidentielle. Huit parents se sont déclarés chrétiens, les autres comme non croyants. Les entretiens débutaient par la question de ce qu’ils pensaient à propos de l’avancée en âge de leur enfant. La plupart déclarent en être soucieux voire effrayés de ce qui pourrait advenir de leur enfant. Ils souhaiteraient que leur enfant décède avant eux ; mais aussi, ils affirment qu’ils ne veulent pas perdre leur enfant. Cependant, quelques parents se disent confiants envers les structures résidentielles pour continuer à s’occuper correctement de leur enfant après leur décès. Trois aspects sont mis en avant : l’expertise nécessaire, la protection et la défense de leur enfant, l’attention qui lui sera portée (Kruithof et coll., 2022arenvoi vers).
Les parents vieillissants redoutent que leur enfant avec PIMD leur survive car l’expérience et la proximité sont la base de l’expertise nécessaire à leur enfant avec PIMD (Kruithof et coll., 2022arenvoi vers). L’inquiétude est aussi liée à une diminution de l’expertise spécifique envers chaque enfant consécutive aux organisations actuelles du travail. Certains parents mentionnent l’espoir que leurs enfants non handicapés acquièrent l’expertise nécessaire. La protection et la défense de leur frère ou sœur avec PIMD devraient permettre à ces derniers d’avoir accès aux meilleurs soins et aux meilleurs traitements. Enfin, les parents craignent que leur enfant avec PIMD reçoive moins d’attention et que cela entraîne une diminution de leur qualité de vie. Ils espèrent que leurs autres enfants rendront plus souvent visite à leur enfant avec PIMD, mais certains doutent que ce scenario soit le plus plausible. Certains parents se perçoivent comme inséparables et irremplaçables du fait de l’importance du rôle qu’ils ont rempli envers leur enfant avec PIMD. Ils expriment alors un sentiment de désespoir et certains disent que si leur enfant leur survivait, son état se dégraderait de façon majeure et que de ce fait ils voudraient qu’il disparaisse avec eux. Une mère ajoute que donner une substance mortelle à son fils pour qu’il ne lui survive pas serait un ultime acte d’amour ce qui révèle la détresse majeure des parents face à la condition de leur enfant polyhandicapé après leur mort.
La qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap, celle de leurs proches et celle des soignants, interagissent de façon réciproque et sont de ce fait toutes à prendre en compte.

Qualité de vie et situations médicales critiques
de fin de vie81

6
La majorité des travaux portant sur les accompagnements de fin de vie pour les personnes en situation de polyhandicap est menée par des équipes néerlandaises, en lien avec les avancées récentes sur la législation sur la fin de vie aux Pays-Bas.
Kruithof et coll. (2022brenvoi vers) ont interrogé 27 parents de personnes avec PIMD âgées de 15 ans et plus afin de recueillir leur opinion sur les décisions de vie ou de mort lors de l’avancée en âge de leur enfant (Kruithof et coll., 2022brenvoi vers). Leur avis sur la qualité de vie actuelle et passée de leur enfant est revendiqué comme devant être pris en compte pour toutes les décisions médicales le concernant ; notamment lors des décisions de débuter, poursuivre ou diminuer, ou d’interrompre les traitements qui potentiellement prolongent la vie de leur enfant, vivant à domicile (n = 14) ou en structure résidentielle (n = 11). Il s’agit de parents vivant aux Pays-Bas, d’origine néerlandaise. Ces parents estiment que les décisions médicales de vie et de mort doivent être prises en fonction de leur estimation parentale de la qualité de vie de leur enfant, car ils sont les plus à même de l’évaluer avec justesse. Ils s’estiment aussi les plus à même d’évaluer leur qualité de vie actuelle et future après une réanimation ; concernant le document de non-réanimation de leur enfant, nombre d’entre eux l’ont signé, mais certains précisent que leur enfant devrait pouvoir être réanimé en cas de situation aiguë et que le médecin de la famille devrait toujours être le premier contacté. Quelques parents disent ne pas avoir voulu signer le document de non-réanimation car ils veulent pouvoir décider au moment où la question se pose en fonction de la situation critique. Parallèlement, plusieurs parents disent ne pas comprendre l’interdiction faite par la loi sur la mort assistée par un médecin d’être appliquée pour les personnes en situation de handicap intellectuel et donc à leurs enfants, alors qu’il est possible d’interrompre la nutrition et l’hydratation non naturelles. De nombreux parents demandent à ce que la situation particulière et spécifique de leur enfant avec PIMD, même si elle n’est pas connue ni comprise par le grand public, le soit par le corps médical. Les auteurs insistent sur le fait que les considérations portées par les parents des personnes avec PIMD méritent d’être entendues et discutées.
Zaal-Schuller et coll. (2016arenvoi vers) ont recensé 9 travaux portant sur le mode d’implication que des parents ont pu avoir pour les décisions de fin de vie pour leur enfant de moins de 18 ans ayant un trouble sévère de développement (Zaal-Schuller et coll., 2016arenvoi vers). Les réponses s’étendaient de la prise de décision du ou des parents seuls à l’absence totale de part prise à la décision. La plupart des parents disent souhaiter pouvoir participer à la prise de décision, qu’elle soit partagée avec les professionnels (médecins traitants, médecins spécialistes, équipes soignantes), quel que soit le type de handicap et de ses comorbidités. Ils mettent en avant leur rôle propre de recherche du meilleur intérêt pour leur enfant afin d’aboutir à la meilleure décision possible. Une prise de décision commune partagée entre les parents et les équipes médicales est souhaitée. Pour ces parents, les principaux critères à évaluer sont l’importance de la souffrance de leur enfant, sa qualité de vie, la volonté de décider ce qui est le meilleur pour leur enfant et de toujours pouvoir défendre le meilleur intérêt de leur enfant.
Parallèlement, les mêmes auteurs (Zaal-Schuller et coll., 2016brenvoi vers) ont mené une étude sur le ressenti des parents et des médecins à propos du processus de décision de fin de vie pour des enfants avec PIMD. Dix-sept parents de 14 enfants ont été interrogés sur le déroulement de la prise de décision de fin de vie de leur enfant ; onze des médecins impliqués dans ces décisions ont pu être interrogés. Il ressort que tant les familles que les médecins ont rencontré des désaccords dans l’indication d’une décision de fin de vie ; ces désaccords ont été bénéfiques, aussi bien d’après les parents que d’après les médecins, car ils ont permis de discuter de leur vision respective de l’intérêt de l’enfant et d’aboutir à un compromis différent des perspectives initiales et notamment de trouver des solutions alternatives à celles envisagées initialement et plus adaptées à la situation particulière. Dans cette étude, 2 enfants sur les 14 sont décédés à la suite de la décision de fin de vie. Il n’est fourni aucune information concernant les raisons du maintien en vie des 12 enfants non décédés : rejet de la décision de fin de vie, amélioration de l’état clinique, situation aiguë ayant permis de passer un cap, etc. ?
À partir de la même cohorte de patients, parents et médecins, la même équipe (Zaal-Schuller et coll., 2018arenvoi vers) analyse les critères de qualité de vie des enfants avec PIMD qui influent sur la décision de fin de vie aux Pays-Bas. Les principaux éléments de qualité de vie sont, tant pour les parents que pour leur médecin, la possibilité d’avoir du plaisir, l’absence de problème physique (essentiellement la douleur et l’épilepsie) et le confort. Les maladies infectieuses sont davantage mentionnées par les parents, la dépendance aux machines par les médecins. D’autres problèmes sont aussi mentionnés : la nutrition artificielle, l’automutilation, la constipation, la dyspnée, les vomissements, le reflux gastro-oesophagien, les troubles du sommeil, le retentissement sur la croissance de la malnutrition, et les mouvements anormaux permanents. D’autres critères n’ont pas la même valeur pour les parents et les soignants : pour les parents, l’état de conscience de base et la conscience des handicaps et des limitations sont importants alors que les médecins attachent plus d’importance aux possibilités de développement cognitif et à la capacité d’avoir des interactions avec autrui. Dans ces situations de désaccord sur l’évaluation de la qualité de vie par les soignants et eux-mêmes, les parents disent que si cela survenait pour leur enfant ils reconsidéreraient que la mort serait préférable que cette vie. Toutefois, les parents pointent le fait que lors des situations d’urgence de décompensation aiguë de leur condition physique, la personne avec PIMD est dans une situation où sa qualité de vie est particulièrement mauvaise. Ils redoutent que dans ces situations d’urgence les médecins limitent les traitements de soutien vital en se basant sur leur évaluation de la qualité de vie actuelle sans connaître la qualité de vie habituelle de la personne avec PIMD. Certains disent apporter des photos et des vidéos de leur enfant avec PIMD, prises lorsqu’il est dans un état stable, pour montrer aux équipes d’urgence qu’il a des capacités de communication et des manifestations de plaisir lorsqu’il est dans son état habituel.
L’implication des infirmières dans les discussions portant sur la fin de vie des enfants avec PIMD a aussi été étudiée par ces chercheurs (Zaal-Schuller et coll., 2018brenvoi vers). Treize infirmières ont participé à la décision de fin de vie de 12 enfants. Elles indiquent qu’elles ont pris l’initiative d’aborder la question de la détérioration des conditions physiques de l’enfant avec les parents antérieurement à la discussion portant sur la fin de vie. Elles précisent qu’elles accompagnent le médecin en donnant des informations factuelles sur l’enfant, par exemple son transit et son inconfort. Elles apportent aussi un confort émotionnel aux parents lors de ces échanges. Près de la moitié d’entre-elles conçoivent leur rôle comme neutre dans la décision car elles pensent que leur point de vue sur la décision de fin de vie n’est pas pertinent ; elles estiment avoir un rôle de médiation entre les parents et les médecins. Certaines, à l’inverse, estiment qu’elles ont simplement soutenu les points de vue des parents ; une infirmière d’un foyer revendique l’importance de donner son opinion personnelle et de pouvoir donner des conseils aux parents.
Les publications provenant des Pays-Bas sont, bien entendu, en rapport avec la législation récente dans ce pays portant sur la décision de fin de vie des personnes ne pouvant pas s’exprimer par elles-mêmes et dont la qualité de vie est estimée très mauvaise. En France, la législation sur la fin de vie est centrée sur la notion d’obstination déraisonnable dans ce contexte ; l’application de cette législation (lois dites « loi Leonetti », 20057  ; et « loi Claeys-Leonetti », 20168 ) n’est pas encore totalement généralisée à tous les services pour certains aspects tels que la participation d’un observateur extérieur (Saint Blanquat et Viallard, 2018renvoi vers). L’évaluation de la qualité de vie lorsque la question posée est le maintien en vie ou l’arrêt des traitements d’un enfant polyhandicapé en phase aiguë de détresse vitale, que ce soit en réanimation ou dans un service référent pour ces enfants polyhandicapés, reste extrêmement complexe. La décision qui en découle est une décision pour autrui qui nécessite la participation conjointe des équipes spécialisées (réanimation, urgences), des soignants proches et des parents qui connaissent le mieux le parcours de la personne polyhandicapée (Billette de Villemeur, 2017renvoi vers).

Évaluation prédictive de la probabilité de polyhandicap et de la qualité de vie future84

9
Deux principales situations amènent à évaluer non pas la qualité de vie de la personne mais à faire une évaluation prédictive de sa qualité de vie future : ce sont les situations de réanimation et de diagnostic prénatal.

Situation de réanimation

Lorsqu’un nouveau-né naît sans pouvoir acquérir une autonomie respiratoire, le pronostic vital est en jeu dans les toutes premières minutes de vie justifiant une réanimation immédiate. Si celle-ci doit se prolonger du fait de l’incapacité du nouveau-né à s’adapter à la vie extra-utérine et à respirer par lui-même, le risque de polyhandicap secondaire amène à explorer les raisons de son état actuel et les marqueurs (biologique, électro-encéphalographique et imagerie) prévisionnels d’un possible ou probable polyhandicap ultérieur. Dans ce cas, selon l’incertitude du pronostic neurologique ultérieur, la question de la légitimité de poursuivre la réanimation impose la tenue d’une collégialité afin de déterminer si la situation médicale actuelle de l’enfant relève ou non d’une obstination déraisonnable (Moriette, 2019renvoi vers). Les décisions de poursuivre la réanimation ou de limiter les traitements se prennent après avoir recueilli l’avis des parents. Les conclusions de la collégialité leur seront ensuite transmises. Cette procédure imposée par la « Loi Claeys-Leonetti » (2016) suppose, de fait, la « suspension » de l’autorité parentale puisque ce ne sont pas les parents qui prennent cette décision majeure pour leur enfant (Billette de Villemeur, 2017renvoi vers ; Moriette, 2019renvoi vers).

Situation de diagnostic prénatal

La question du pronostic de polyhandicap se pose aussi pendant la grossesse quand, par exemple, une anomalie cérébrale est dépistée à l’occasion d’une échographie de suivi de la grossesse, souvent au deuxième trimestre, mais aussi parfois au troisième trimestre de la grossesse. Dans ces situations de découverte fortuite d’une anomalie, la grossesse heureuse bascule en un instant dans un cauchemar d’angoisse et de détresse pour les parents. Ici, c’est la mère qui décide de poursuivre ou d’interrompre sa grossesse, si le risque de polyhandicap est validé par le Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic PréNatal (CPDPN), et ce quel que soit le terme de la grossesse (loi dite « loi Veil », 197510 ). Cette décision portée par la mère est terriblement difficile et les parents demandent souvent l’avis du neuropédiatre sur ce que pourrait être la bonne décision. La réponse n’existe pas, ou plus précisément appartient au couple, et en dernier ressort à la seule future mère. Cependant, le médecin peut accompagner les parents dans les méandres d’une réflexion. La décision qui s’impose à eux peut être appréhendée comme « un acte de parentalité » ; le bon choix pouvant être « celui qu’on ne regrettera pas dans dix, quinze, vingt ans » (Blondel et Delzescaux, 2018renvoi vers), parce que toutes les informations disponibles auront été prises en compte et toutes les hypothèses auront été évaluées. Certaines mères, par exemple, souhaitent donner le plus de temps de vie-bonne à leur enfant et demandent que l’interruption médicale soit réalisée à la toute fin de leur grossesse (Billette de Villemeur et Moutard, 2012renvoi vers).
L’autre situation concerne les parents qui ont un enfant polyhandicapé dont le diagnostic étiologique est connu et qui ne souhaitent pas poursuivre une nouvelle grossesse si le fœtus est porteur de la même maladie (Billette de Villemeur, 2017renvoi vers). Dans ce contexte, le diagnostic prénatal de la maladie causale peut souvent être réalisé (maladie génétique transmise par les parents porteurs) afin de pouvoir poursuivre la grossesse si le fœtus n’est pas atteint, ou à l’inverse de l’interrompre s’il est porteur des mêmes anomalies génétiques.
L’évaluation prédictive de la qualité de vie future est indispensable et incontournable lorsqu’un polyhandicap est possible dans l’avenir d’une personne à naître ou relevant d’une réanimation. Prédire la probabilité et la sévérité d’un polyhandicap est un exercice compliqué tant sur le plan « technique » que sur le plan éthique. En effet, l’information pronostique donnée aux parents, proches et professionnels a un impact majeur sur la façon dont est perçue la situation de la personne pour laquelle des décisions de vie ou de mort sont en jeu. Ces situations sont d’autant plus complexes que les prévisions pronostiques, le plus souvent, ne sont pas formelles (en ce sens qu’elles ne sont pas absolues et qu’il persiste toujours une incertitude), ni certaines.

Conclusion

La qualité de vie des personnes en situation de polyhandicap est difficile à connaître de façon précise et fiable du fait que ces personnes ne peuvent donner par elles-mêmes les informations permettant de comparer leur qualité de vie à celle de la population générale. Dès lors, leur qualité de vie ne peut être évaluée que par des personnes extérieures. Les auteurs s’accordent pour dire que ces évaluations par autrui doivent être réalisées par des personnes proches, vivant auprès de la personne en situation de polyhandicap. Mais ces évaluations doivent aussi pouvoir être fiables et nécessitent des outils et méthodes validés. Il est alors nécessaire que ces évaluations soient réalisées par différentes catégories de personnes : des proches familiaux, des proches professionnels et par certains des professionnels plus éloignés de la personne ayant un avis moins impliqué et peut-être plus neutre (Nieuwenhuijse et coll., 2019renvoi vers).
Beaucoup de parents s’accordent pour dire qu’ils sont ceux qui connaissent le mieux leur enfant et qu’ils sont les meilleurs garants de la qualité et de la fiabilité de l’évaluation de leur qualité de vie, tout en reconnaissant que leur approche doit être complétée (et validée) par des professionnels connaissant bien leur enfant. Il faut aussi prendre en compte le fait que la qualité de vie et la lourdeur du polyhandicap de leur enfant interfèrent avec la qualité de vie des parents et des proches.
Évaluer la qualité de vie d’une personne en situation de polyhandicap a plusieurs fonctions et conséquences. Cela permet d’appréhender la qualité de vie de la personne afin d’améliorer en retour ce qui influe positivement ou négativement sur sa qualité de vie (lieu de vie, interaction avec autrui, confort, activités plaisantes, mais aussi méthodes de rééducation, de soin, de traitement). La prise de conscience que la qualité de vie d’une personne en situation de polyhandicap est dépendante non seulement de son état de santé mais aussi de ses compétences et déficiences permet aux familles d’envisager et de choisir le mode de vie qui leur semble le plus approprié à leur enfant, et de préparer le moment où ils ne seront plus à même de veiller sur elle ou lui, et de la ou le protéger contre les dégradations possibles de leur qualité de vie.
La qualité de vie est aussi un guide important dans la conduite des traitements invasifs ou s’avérant agressifs qui sont administrés aux personnes en situation de polyhandicap. C’est bien leur qualité de vie qui doit être priorisée plutôt que la correction de leurs handicaps.
Enfin, dans certaines situations critiques (pendant la grossesse, lors d’une réanimation néonatale, lors d’une défaillance viscérale aiguë chez l’enfant plus grand ou l’adulte), la qualité de vie prévisible est un critère de choix thérapeutique ou à l’inverse de limitation des traitements lorsque l’arrêt de vie peut paraître préférable à la poursuite des traitements agressifs qui ne permettront pas une amélioration suffisante pour obtenir ou maintenir une qualité de vie acceptable.

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