Pesticides et effets sur la santé
II. Pathologies cancéreuses
2021
| ANALYSE |
11-
Hémopathies malignes
) en rappelant ces données de 2013 pour chacun
des grands types d’hémopathies malignes en reprenant en détails les
données par substances actives et en mettant en évidence les évolutions
depuis 2013. Un chapitre complet a été consacré aux mécanismes d’action
des pesticides dans les hémopathies dans la précédente expertise et
seuls quelques éléments de toxicologie seront abordés pour des
substances actives particulières.Hémopathies malignes : classification, incidence, mortalité et facteurs de risque
; Swerdlow et coll.,
2017
), a
été uniformément adoptée dans la pratique clinique et est incorporée
dans la Classification internationale des maladies pour l’oncologie
(CIM-O-3). La distinction des entités sur la base des
caractéristiques morphologiques, phénotypiques, génotypiques, et
cliniques reflète donc un changement de paradigme dans l’approche de
la classification des hémopathies malignes. Aujourd’hui, les
hémopathies malignes rassemblent plus de 160 maladies différentes du
point de vue de leurs caractéristiques épidémiologiques,
biologiques, cliniques ou pronostiques. Bien que le maintien des
regroupements d’origine soit utile pour les comparaisons
historiques, les statistiques descriptives contemporaines
produisent, au moins dans les pays occidentaux, des données
épidémiologiques détaillées par sous-types, pour refléter l’état
actuel des connaissances. C’est pourquoi l’incidence des hémopathies
malignes en France métropolitaine en 2018, résumée dans cette
introduction, prend en compte les nouvelles définitions et décrit
les principaux sous-types.Incidence et mortalité des hémopathies malignes
). En France métropolitaine, la même année, le nombre de
nouveaux cas d’hémopathies malignes est estimé à 45 000 (25 000
chez l’homme et 20 000 chez la femme), représentant près de 12 %
de l’ensemble des nouveaux cas de cancer (Defossez et coll.,
2019
).
). Les
hémopathies malignes sont plus fréquentes chez l’homme sauf pour
la thrombocytémie essentielle. Les cinq entités les plus
fréquentes sont le myélome multiple/plasmocytome (5 442 nouveaux
cas), le lymphome diffus à grandes cellules B (5 071), les
syndromes myélodysplasiques (4 735), la leucémie lymphoïde
chronique (LLC)/lymphome lymphocytique (4 674) et les leucémies
aiguës myéloïdes (3 428). Ces cinq maladies représentent 53 % de
la totalité des nouveaux cas d’hémopathies malignes en 2018.Tendances temporelles de l’incidence
). Pour ces cinq localisations
hématologiques, on estime que 30 à 60 % de la hausse observée
est due à l’accroissement et au vieillissement de la population
tandis que 40 à 70 % serait due à une augmentation du risque de
ces maladies dont les causes sont à étudier.
Tableau 11.I Nombre de cas incidents estimés, taux d’incidence
standardisé monde en 2018 en France métropolitaine et
tendances évolutives de l’incidence par type d’hémopathie
maligne (d’après Defossez et coll.,
2019
)
|
Nombre de cas incidents estimés
en France |
Taux d’incidence
standardisé1
en France en 2018 |
Variation annuelle
moyenne2
(% [IC 95 %]) |
||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
|
Total
|
Homme
|
Femme
|
Homme
|
Femme
|
Début de période d’étude
|
Homme
|
Femme
|
|||
|
Lymphome de Hodgkin
|
2 127
|
1 240
|
887
|
3,7
|
2,7
|
1990
|
1,2
|
[0,7-1,6]
|
1,7
|
[1,2-2,2]
|
|
Lymphomes non
hodgkiniens
| ||||||||||
|
LLC/Lymphome
lymphocytique
|
4 674
|
2 770
|
1 904
|
4,0
|
2,1
|
1990
|
0,0
|
[-0,3-0,3]
|
-0,1
|
[-0,4-0,3]
|
|
Lymphome folliculaire
|
3 066
|
1 658
|
1 408
|
2,9
|
2,0
|
1995
|
2,8
|
[2,2-3,4]
|
1,8
|
[1,1-2,5]
|
|
Lymphome diffus à grandes cellules
B
|
5 071
|
2 778
|
2 293
|
4,7
|
3,2
|
1995
|
1,1
|
[0,7-1,5]
|
1,5
|
[0,9-2,0]
|
|
Lymphome à cellules du
manteau
|
887
|
673
|
214
|
1,0
|
0,2
|
2003
|
2,2
|
[0,7-3,8]
|
0,0
|
[NC]
|
|
Lymphome de Burkitt
|
220
|
149
|
71
|
0,5
|
0,2
|
1995
|
0,0
|
[-1,6-1,2]
|
0,0
|
[NC]
|
|
Lymphome de la zone
marginale
|
2 790
|
1 457
|
1 333
|
2,3
|
1,7
|
2003
|
4,7
|
[3,4-5,9]
|
4,5
|
[0,3-5,9]
|
|
Myélome
multiple/plasmocytome
|
5 442
|
2 822
|
2 620
|
4,2
|
2,9
|
1995
|
1,1
|
[0,7-1,5]
|
0,6
|
[0,1-1,0]
|
|
LLP/ M. de Waldenström
|
1 317
|
892
|
425
|
1,2
|
0,5
|
1995
|
-2,0
|
[-2,4 ;-1,0]
|
-1,7
|
[-2,5 ;-0,8]
|
|
Leucémie à
tricholeucocytes
|
304
|
243
|
61
|
0,5
|
0,1
|
1990
|
1,2
|
[0,2-2,3]
|
0,0
|
[NC]
|
|
Lymphome T/NK à cellules matures
(LNH T)
|
1 777
|
997
|
780
|
1,8
|
1,3
|
2003
|
0,0
|
[NC]
|
2,0
|
[0,6-3,4]
|
|
Leucémie/lymphome lymphoblastique à
cellules
précurseurs (B, T ou SAI) |
900
|
517
|
383
|
2,0
|
1,5
|
1995
|
0,0
|
[NC]
|
0,0
|
[NC]
|
|
Leucémie aiguë
myéloïde
|
3 428
|
1 787
|
1 641
|
3,1
|
2,3
|
1990
|
1,2
|
[0,8-1,6]
|
0,9
|
[0,5-1,4]
|
|
Leucémie aiguë myéloïde
promyélocytaire
|
228
|
146
|
82
|
0,3
|
0,2
|
3,7
|
[0,2-7,3]
|
0,0
|
[NC]
|
|
|
Syndromes myéloprolifératifs
chroniques
| ||||||||||
|
Leucémie myéloïde chronique
(LMC)
|
872
|
480
|
392
|
1,0
|
0,7
|
1990
|
-1,0
|
[-1,3 ;-0,1]
|
0,0
|
[NC]
|
|
Myélofibrose
|
520
|
273
|
247
|
0,4
|
0,3
|
2003
|
0,0
|
[NC]
|
4,0
|
[0,8-7,3]
|
|
Polyglobulie de Vaquez
|
1 129
|
603
|
526
|
1
|
0,6
|
2003
|
0
|
[NC]
|
1,7
|
[0,0-3,4]
|
|
Thrombocytémie
essentielle
|
2 057
|
862
|
1 195
|
1,4
|
1,5
|
2003
|
0,7
|
[-0,7 ;2,1]
|
1,1
|
[-0,2-2,5]
|
|
Syndromes
myélodysplasiques
|
4 735
|
2 894
|
1 841
|
3,4
|
1,6
|
2003
|
0,7
|
[0,0-1,5]
|
0,5
|
[-0,3-1,4]
|
1 : taux d’incidence standardisés sur la population mondiale et exprimés pour 100 000 personnes-années ; 2 : variation annuelle moyenne du taux d’incidence entre l’année indiquée dans la colonne « début de période d’étude » et 2018 ; LLC : leucémie lymphoïde chronique ; LLP : lymphome lymphoplasmocytaire ; SMM : syndromes myéloplasiques myéloprolifératifs
Survie
; mise à jour en cours qui sera publiée en 2021). L’étude
portait sur 35 520 cas incidents d’hémopathies malignes
diagnostiqués entre 1989 et 2010 et suivis jusqu’au 30 juin 2013
(16 hémopathies malignes les plus fréquentes). La survie nette à
5 ans est très hétérogène entre types et sous-types
d’hémopathies malignes : 21 % pour les leucémies aiguës
myéloïdes, 85 à 90 % pour certains lymphomes (folliculaire, de
Hodgkin) ou pour la leucémie myéloïde chronique. Les hémopathies
malignes de bon pronostic (taux de survie nette à 5 ans de 75 %
ou plus) représentent près de 45 % des nouveaux cas
d’hémopathies malignes incidents tandis que 10 % des nouveaux
cas (principalement les leucémies aiguës myéloïdes) ont toujours
un pronostic défavorable (taux de survie nette à 5 ans inférieur
à 30 %). L’amélioration de la survie nette au cours du temps
était clairement observée pour la leucémie myéloïde chronique
(+34 points entre 1989 et 2010), le lymphome folliculaire (+18
points entre 1995 et 2010) et le lymphome diffus à grandes
cellules B (+18 points entre 1995 et 2010) (Monnereau et coll.,
2016
). Pour les autres, on observe une amélioration plus faible de
la survie à 5 ans (myélome multiple/plasmocytome : tendance à
l’amélioration uniquement chez les patients de moins de 65 ans ;
LLC/lymphome lymphocytique progression de 8 points). Pour les
autres localisations hématologiques étudiées, la survie
s’améliore globalement peu mais plus significativement chez les
sujets jeunes comme pour les leucémies aiguës myéloïdes ou la
leucémie/lymphome lymphoblastique. La survie du lymphome de
Hodgkin reste stable. Ces résultats encourageants concernant la
survie des hémopathies malignes sont également observés au
niveau européen (de Angelis et coll.,
2015
), avec des taux de survie en France meilleurs que dans la
plupart des autres pays pour la majorité des hémopathies
malignes. Néanmoins, les données de mortalité révèlent que les
hémopathies malignes (considérées dans leur ensemble) sont
toujours au troisième rang des cancers les plus graves dans
notre pays (Ferlay et coll.,
2018
). Les hémopathies malignes nécessitent des traitements lourds
pour le patient (chimiothérapie intensive et greffe de moëlle
osseuse) et pour la société (coût élevé des thérapies
ciblées).Facteurs de risque
) : des profils étiologiques ont pu être établis confirmant,
sur un fond commun, une grande hétérogénéité entre les
différents sous-types histologiques d’hémopathies (Morton et
coll., 2014a
). On peut ainsi distinguer deux
grands profils étiologiques différents : les LNH associés avec
des facteurs de risque reliés à l’immunité (LNH diffus à grandes
cellules B, LNH de la zone marginale, LNH
lymphoplasmocytaire...) et ceux pour lesquels peu de facteurs de
risque sont identifiés mais qui seraient plutôt associés à des
polymorphismes génétiques comme le montrent les études
d’association pangénomiques (LNH folliculaire, LLC/LL, LNH à
cellules du manteau).
) dont le glyphosate classé « cancérogène probable » (voir
chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »).
En juin de la même année, un tableau de reconnaissance en
maladie professionnelle a été créé (no 59 du régime
agricole). Il est intitulé « Hémopathies malignes provoquées par
les pesticides » et porte sur les lymphomes non hodgkiniens et
l’exposition professionnelle aux pesticides (Lasfargues,
2017
; INRS, 2019
).Lymphomes non hodgkiniens
). Le stade de différenciation, la morphologie et les
caractéristiques phénotypiques, génotypiques, et cliniques sont
également utilisés pour distinguer les différents sous-types de LNH.
Les LNH regroupent donc de nombreuses entités nosologiques
différentes de par leur physiopathologie, leur diagnostic
histologique, leur biologie et leur pronostic.
).
L’évolution du nombre de cas entre 1990 et 2018 est de 123 % chez
l’homme (7 000 à 15 500 cas incidents) et 109 % chez la femme (5 800
à 12 100 cas incidents) dont la moitié correspond aux changements
démographiques (augmentation et vieillissement de la population) et
l’autre moitié correspond à une augmentation de risque. Les
variations annuelles moyennes des TSM sont de 1 % entre 1990 et 2018
chez l’homme et la femme. Les tendances évolutives de l’incidence
varient selon le sous-type histologique de LNH mais la majorité
d’entre eux ont une évolution à la hausse.
).
Ces trois hémopathies lymphoïdes ont une incidence qui augmente
depuis les années 1990. À noter que le myélome multiple fait partie
des hémopathies lymphoïdes les plus fréquentes. Il est aujourd’hui
regroupé avec les LNH mais sera traité dans une partie spécifique,
de même que la leucémie lymphoïde chronique regroupée aujourd’hui
avec le lymphome lymphocytique (LLC/LL) en une seule entité qui sera
traitée dans la partie consacrée aux leucémies. Ces cinq maladies
représentent 80 % des nouveaux cas de LNH diagnostiqués chaque année
en France.Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013
) avait conclu à la présomption forte d’un lien entre
l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles
chimiques ou de substances actives, chez les agriculteurs, chez
les applicateurs de pesticides et chez les ouvriers de
l’industrie de production de pesticides, et le risque de
survenue de LNH.
). Le
niveau de présomption de lien a été formulé d’après les
résultats de plusieurs études de cohortes ou d’au moins une
étude de cohorte et deux cas-témoins ou de plus de deux études
cas-témoins (noté « ++ » c’est-à-dire une présomption forte de
lien), ou d’après les résultats d’une cohorte ou d’une étude
cas-témoins nichée ou de deux études cas-témoins (noté « + »).
Les substances actives comme le lindane, le DDT, le terbufos, le
diazinon, le malathion, le butilate, le phénoxyherbicide 2,4-D
ou le glyphosate étaient spécifiquement associées à un excès de
risque significatif dans des populations de professionnels
(agriculteurs, applicateurs, éleveurs, ouvriers en industrie de
production).
).Nouvelles données épidémiologiques
Analyse par type d’études
Méta-analyses
). Celle-ci rapporte des
estimations d’associations entre les LNH et les
expositions professionnelles à 21 familles de pesticides
et 80 substances actives extraites de 44 articles
originaux. Les phénoxyherbicides, les carbamates, les
insecticides organophosphorés et l’exposition au lindane
sont associés positivement à la survenue de LNH. Les
risques de LNH étaient associés positivement à des
substances actives spécifiques avec une hétérogénéité
faible ou modérée entre études pour : le dicamba
mRR = 1,4 [1,0-2,1], le dichlorodiphényltrichloro-éthane
(DDT) mRR = 1,3 [1,1-1,5], le carbaryl
mRR = 1,7 [1,3-2,3], le carbofuran mRR = 1,6 [1,2-2,3],
le diazinon mRR = 1,6 [1,2-2,2], le malathion
mRR = 1,8 [1,4-2,2], le glyphosate mRR = 1,5 [1,1-2,0]
et le lindane mRR = 1,6 [1,2-2,2]. Ces associations
étaient robustes aux analyses de sensibilité évaluant
l’effet du sexe, du type d’étude, de la période de
diagnostic, de la région géographique, de la source des
témoins pour les études cas-témoins. Cependant, aucun
effet-dose n’est rapporté dans cette étude.
Les associations entre les pesticides et les sous-types
de LNH sont étudiées dans un petit nombre d’articles
montrant néanmoins que les lymphomes à cellules B sont
associés positivement à l’exposition aux
phénoxy-herbicides mRR = 1,8 [1,2-2,8], au glyphosate
mRR = 2,0 [1,1-3,6] ou au DDT mRR = 1,4 [1,0-2,0] avec
une absence d’hétérogénéité entre les résultats des
études. De la même façon, le lymphome diffus à grandes
cellules B (LDGCB) est positivement associé à
l’exposition aux phénoxyherbicides mRR = 2,0 [1,1-3,6] à
partir des données de deux études. Enfin, le lymphome
folliculaire est associé au DDT, mRR = 1,5 [1,0-2,4]
avec une hétérogénéité modérée entre les résultats des
études.
), étudie le rôle de
l’exposition professionnelle (de façon binaire :
oui/non) entre 14 familles de pesticides et
33 substances actives et le risque de LNH et de ses
principaux sous-types. À partir des données de trois
cohortes de travailleurs agricoles (États-Unis – AHS,
France – AGRICAN et Norvège – CNAP [Cancer in the
Norwegian Agricultural Population]), totalisant
plus de 300 000 sujets, 2 430 cas et 3,5 millions de
personnes-années à risque, les auteurs observent que la
plupart des associations testées sont non significatives
exceptées pour les LNH et le terbufos
mRR = 1,2 [1,0-1,4], la leucémie lymphoïde
chronique/lymphome lymphocytique et la deltaméthrine
mRR = 1,5 [1,1-2,1] et le LDGCB et le glyphosate
mRR = 1,4 [1,0-1,9], après ajustement sur les autres
pesticides. Aucun élément d’hétérogénéité entre les
résultats des trois cohortes n’est objectivé. Des
associations inverses sont observées entre les LNH et la
famille large des insecticides organochlorés
mRR = 0,9 [0,7-1,0] ou les phénoxyherbicides
mRR = 0,8 [0,7-1,0] sans distinction d’une matière
active spécifique, après ajustement sur les autres
pesticides. À partir des trois cohortes évoquées
ci-dessus, une autre méta-analyse du consortium Agricoh
(El-Zaemey et coll.,
2019
) examine le risque
d’hémopathie maligne chez les éleveurs et ne montre
aucune association avec les principaux sous-types de LNH
à l’exception d’un risque significativement élevé de
lymphome folliculaire chez les éleveurs de bovins dans
une analyse de sensibilité prenant comme groupe de
référence les agriculteurs n’ayant jamais élevé aucun
bétail.
; Kachuri et coll.,
2020
), une sur les
organophosphorés (Hu et coll.,
2017
), une sur les insecticides
carbamates et organophosphorés (Koutros et coll.,
2019
), trois sur le glyphosate
(Chang et Delzell, 2016
; Pahwa et coll.,
2019
; Zhang et coll.,
2019
), deux sur le
phénoxyherbicide 2,4-D (Goodman et coll.,
2015
; Smith et coll.,
2017
) et une sur le
pentachlorophénol (Zheng et coll.,
2015
).
) évalue quantitativement,
grâce à des prélèvements biologiques, l’association
entre l’exposition aux pesticides organochlorés et le
risque de LNH à partir de treize études publiées entre
1997 et 2011 (6 études cas-témoins nichées, une étude de
cas-cohorte et 6 études cas-témoins). Le risque de LNH
tous organochlorés confondus pour les études incluses
est de mOR = 1,4 [1,3-1,6]. Aucune hétérogénéité
significative entre les résultats n’est observée
(I2 = 12,6 %). En outre, les analyses par
substance active montrent des associations positives
entre le risque de LNH et les expositions au
dichlorodiphényldichloroéthylène (DDE,
mOR = 1,4 [1,1-1,6]), à l’hexachlorocyclohexane (HCH,
mOR = 1,4 [1,1-1,9]), au chlordane (mOR = 1,9 [1,5-2,5])
et à l’hexachlorobenzène (HCB, mOR = 1,5 [1,2-2,0]). En
revanche aucune association n’est observée avec le DDT
(voir paragraphe DDT ci-dessous).
) inclut cinq cohortes et cinq
études cas-témoins dont une nichée dans une cohorte,
publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté des
informations sur l’exposition à au moins un des trois
pesticides organophosphorés suivants : malathion,
diazinon, terbufos. Une augmentation statistiquement
significative du risque de LNH est observée pour
l’exposition à un des trois organophosphorés :
mOR = 1,2 [1,0-1,4] avec une hétérogénéité modérée
(I2 = 41 %). Cette association est
significative uniquement pour les études cas-témoins
mOR = 1,4 [1,1-1,8] ou cas-témoins nichée
mOR = 1,6 [1,0-2,4] et uniquement pour le diazinon
mOR = 1,4 [1,1-1,7] avec une absence d’hétérogénéité
inter-étude (I2 = 0 %).
, 10 organochlorés dans
Kachuri et coll., 2020
) sur le risque de LNH et ses
principaux sous-types, au sein de trois études
cas-témoins réalisées en population générale dans les
années 1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins
canadienne publiée dans les années 1990. Dans la
première étude, une association positive statistiquement
significative est observée entre l’exposition au
malathion et le risque de LNH OR = 1,4 [1,1-1,8] après
ajustement mutuel sur les autres substances. Ce risque
augmente avec une utilisation du malathion pendant
6 années ou plus, rapportée par les agriculteurs, en
prenant pour référence les non-utilisateurs
(OR = 1,6 [1,2-2,1] ; p de tendance < 0,01). De plus,
l’évaluation du rôle du mélange de tous les insecticides
organophosphorés et carbamates montre une association
entre la durée d’exposition et le risque de LNH.
L’augmentation d’une unité du score normalisé pondéré de
l’ensemble des pesticides correspond à une augmentation
de 38 % du risque de LNH ([18-61 %], p < 0,0001). Les
cinq pesticides ayant le plus de poids dans cette somme
normalisée pondérée sont le malathion, le carbaryl, le
fonofos, le diazinon et le coumaphos. Après ajustement
pour les autres pesticides étudiés, les auteurs
observent également une association entre l’exposition
au malathion et le LDGCB (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le
lymphome folliculaire (OR = 1,6 [1,1-2,3]) avec une
augmentation des risques avec la durée de l’exposition.
Les risques pour la plupart des autres substances sont
élevés pour plusieurs sous-types de LNH mais sont
atténués après ajustements mutuels.
), des associations positives
sont observées entre plusieurs substances actives
organochlorées et différents sous-ensembles de LNH. On
retient principalement le lindane (OR = 1,6 [1,2-2,1])
et le lymphome folliculaire (LF), le LDGCB, le lymphome
lymphocytique ; le chlordane (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le
LF, le lymphome lymphocytique ; le DDT
(OR = 1,4 [1,1-1,7] et le LDGCB, le lymphome
lymphocytique. Les associations spécifiques aux
sous-types ont été évaluées en utilisant l’ASSET
(Association Analysis for SubSETs), analyse
d’association basée sur des sous-ensembles qui prend en
compte plusieurs comparaisons entre les expositions et
plusieurs recherches de sous-types de LNH pour chaque
insecticide. Les valeurs des p de tendance indiquent une
relation dose-réponse significative pour plusieurs
insecticides : le lindane (p = 1,7×10-4), le
chlordane (p = 1,0×10-3) et le DDT
(p = 4,2×10-3). Cependant, les
estimations des risques observées n’augmentaient pas de
façon monotone dans les catégories correspondant à une
durée d’exposition plus longue. L’utilisation de
pyrèthre était associée à un risque élevé de LF
(OR = 3,7 [1,5-9,2]) et la relation avec la durée
d’utilisation semblait monotone (utilisation > 10 ans :
OR = 5,4 [1,8-16,5] ; p de tendance = 3,6×10su-3rn).
Cette analyse suggère une hétérogénéité étiologique
possible des LNH vis-à-vis de l’exposition aux
substances actives étudiées.
) puis plus récemment de Zhang
en 2019 (Zhang et coll.,
2019
) reposent sur 5 études
cas-témoins publiées entre 2001 et 2009 et les données
de la cohorte AHS. L’étude de Zhang et coll. a inclus
l’analyse la plus récente de la cohorte AHS publiée en
2018 (Andreotti et coll.,
2018
), tandis que celle de Chang et
Delzell était basée sur une analyse de l’AHS publiée en
2005 (de Roos et coll.,
2005
). La première (Chang et
Delzell, 2016
) met en évidence un risque
élevé de LNH statistiquement significatif chez les
agriculteurs exposés au glyphosate mOR = 1,3 [1,0-1,6]
avec peu d’hétérogénéité dans les résultats des études
(I2 = 0 %) et absence de biais de
publication identifiable. Cette association était
robuste à plusieurs analyses secondaires selon plusieurs
méthodes statistiques, la permutation des résultats par
ceux d’une analyse plus récente (AHS), ou les deux à la
fois. La seconde méta-analyse (Zhang et coll.,
2019
) se concentre sur les sujets
les plus exposés au glyphosate (en durée et en
intensité) et observe un risque un peu plus élevé :
mOR = 1,4 [1,1-1,8]. Une analyse secondaire à partir des
données de l’AHS de 2005 et des groupes
les plus fortement exposés montre un risque de LNH
comparable : mOR = 1,45 [1,11-1,91]. Plusieurs analyses
de sensibilité utilisant différentes catégorisations de
l’exposition, selon les sous-types de LNH inclus, le
lieu géographique de l’étude, l’exposition à d’autres
pesticides, le type d’analyse statistique, ou
l’exclusion tour à tour d’une des 6 études ont retrouvé
des risques semblables. Au total, cette dernière étude
rapporte un risque légèrement plus élevé que les trois
autres méta-analyses (Schinasi et Leon,
2014
; Chang et Delzell,
2016
; IARC,
2017
) mais celle-ci est la seule à
aborder l’analyse des groupes les plus exposés. Une
autre différence notable est l’inclusion des cas de
myélome multiple dans le groupe des LNH dans la dernière
version de l’analyse de l’AHS (conformément à la
classification OMS et à une publication du consortium
InterLymph qui placent ces hémopathies
malignes dans le groupe des hémopathies lymphoïdes à
cellules B matures car dérivant d’une prolifération
monoclonale de plasmocytes). Cependant, une analyse de
sensibilité montre que les résultats ne sont pas
expliqués par cette prise en compte des myélomes. En
effet, une association entre le myélome multiple et le
glyphosate, si elle existait, aurait pu être à l’origine
de cette élévation du risque, mais cela n’est pas
démontré dans la dernière analyse de la cohorte AHS et
repose aujourd’hui sur un faible niveau de preuve.
Aucune analyse par sous-type de LNH n’est disponible
dans la méta-analyse de Zhang et coll.
(2019
). Les deux résultats allant
dans le même sens et spécifiques d’un sous-type de
lymphome (le lymphome diffus à grande cellules B et plus
largement les lymphomes B) sont ceux de Leon et coll.
(2019
) et Schinasi et coll.
(2014
), évoqués ci-dessus.
). Les auteurs montrent que
les sujets ayant utilisé du glyphosate ont un risque
élevé de LNH (OR = 1,4 [1,1-1,8]) mais après ajustement
sur l’exposition aux pesticides 2,4-D, dicamba et
malathion le risque est atténué et non statistiquement
significatif (OR = 1,1 [0,8-1,5]). Les auteurs font les
mêmes observations concernant l’analyse par sous-type de
LNH. Cependant, une association positive statistiquement
significative avec le risque de LNH est observée chez
les sujets ayant utilisé du glyphosate plus de deux
jours par an (OR = 1,7 [1,0-2,9] ; p de tendance = 0,2)
de même que chez les sujets atteints de LDGCB
(OR = 2,1 [1,1-4,3] ; p de tendance = 0,2) ce qui est
concordant avec les résultats des méta-analyses abordées
plus haut. Ces risques élevés ne sont toutefois pas
retrouvés avec la durée de l’exposition en années. La
tendance vie entière est significative uniquement pour
le lymphome lymphocytique lorsque l’on analyse la
variable d’exposition en continu avec des risques élevés
non significatifs.
; Smith et coll.,
2017
). La première qui est une
mise à jour de la méta-analyse de 2015 (Goodman et
coll., 2015
) compile les données de
10 études publiées entre 1991 et 2011 dont les données
de la cohorte AHS (publiées par de Roos et coll.,
2005
) et ne montre aucune
association entre le risque de LNH et l’exposition
(oui/non) au 2,4-D, mRR = 1,0 [0,8-1,2]. La seconde
méta-analyse rassemble les résultats de 11 études
cas-témoins (dont deux nichées) et une cohorte de
professionnels publiés entre 1992 et 2013. Cette
méta-analyse n’inclut pas les données de la cohorte AHS.
Les auteurs s’intéressent aux expositions les plus
élevées au 2,4-D de chaque étude et identifient une
association positive statistiquement significative avec
le risque de LNH : mRR = 1,7 [1,1-2,7] avec une
hétérogénéité inter-études modérée
(I2 = 56 %, test d’hétérogénéité p = 0,009)
ce qui requiert une certaine prudence dans
l’interprétation des résultats. En effet, cette
méta-analyse regroupe des études ayant des méthodes
d’analyse ou des conditions expérimentales différentes :
scénarios d’exposition, évaluation de l’exposition,
interprétation des résultats, analyses statistiques ou
populations d’étude.
).Cohortes
). Cette analyse présente
également les résultats pour cinq sous-types
d’hémopathies lymphoïdes fréquents dont les myélomes
multiples qui seront détaillés dans un chapitre à part.
Une association positive est retrouvée entre le risque
de LNH et l’exposition au terbufos (RR = 1,2 [1,0-1,5])
sans effet-dose. En revanche, des associations positives
sont observées avec le DDT (RR = 1,7 [1,1-2,6]) et le
lindane (RR = 2,5 [1,4-4,4]) dans la catégorie des
professionnels les plus exposés (nombre total de jours
d’exposition), avec des risques qui augmentent avec le
nombre total de jours d’exposition (tendances
statistiquement significatives), bien qu’aucune
association ne soit observée en binaire (exposé
oui/non). L’exposition au lindane est associée à un
risque élevé mais non significatif de lymphome
folliculaire (RR = 1,7 [1,0-3,2]) alors que les
associations augmentent avec l’exposition (en nombre
total de jours) avec une tendance significative des
risques (RR = 1,0 [réf], 4,9 [1,9-12,6], 3,6 [1,4-9,5] ;
p de tendance = 0,04). Même observation pour le lymphome
folliculaire et le diazinon, les risques augmentent avec
le nombre de jours d’exposition (RR = 1,0 [réf],
2,2 [0,9-5,4], 3,8 [1,2-11,4] ; p de tendance = 0,02).
L’exposition au terbufos et l’exposition au DDT sont
positivement associées au lymphome
lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome à
cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec la même tendance
significative des risques qui augmentent avec le nombre
total de jours d’exposition. Ces observations persistent
après ajustements mutuels. Trois autres substances
actives sont associées à des risques élevés sans
effet-dose identifié : le bromure de méthyle
(bromomethane) et lymphome diffus à grandes
cellules B (RR = 1,9 [1,1-3,3]), le métalaxyl et le
chlordane et le LL/LLC/LCM (RR = 1,6 [1,0-2,5] ;
RR = 1,4 [1,0-2,0]). Cette analyse par substance active
et sous-type de LNH a pour conséquence que la majorité
des associations identifiées reposent sur un petit
nombre d’exposés.
) s’adresse spécifiquement à
l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence de
risque élevé avec les LNH ou ses principaux
sous-types.
), la « Women’s Health
Initiative (WHI) » (76 493 femmes suivies
pendant 11,5 années en médiane, 822 LNH), a évalué le
risque de LNH en relation avec le fait d’avoir vécu ou
travaillé dans une ferme (sans distinction)
(RR = 1,1 [1,0-1,3]) ainsi que l’utilisation
d’insecticides à la maison ou dans le contexte de
l’emploi. Les femmes ayant déclaré qu’un service
commercial avait appliqué au moins une fois des
insecticides dans leur environnement immédiat,
présentaient un risque plus élevé de leucémie lymphoïde
chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL) :
RR = 1,7 [1,2-2,4]. Les femmes de moins de 65 ans ayant
appliqué au moins une fois des insecticides présentaient
un risque également plus important de LDGCB
(RR = 1,9 [1,1-3,1]) que les non-utilisatrices. Ces
résultats méritent d’être répliqués pour pouvoir
confirmer le lien entre l’exposition domestique aux
insecticides et le risque de survenue des différents
sous-types de LNH.Études cas-témoins
) étudie un mélange de
27 produits chimiques environnementaux corrélés (cinq
polychlorobiphényles, sept hydrocarbures aromatiques
polycycliques et quinze pesticides), mesurés dans la
poussière domestique (n = 1 180). Cette étude estime les
associations entre les LNH et un score pondéré basé sur
les quartiles des concentrations en produits chimiques.
Cet index est associé positivement avec le risque de LNH
(OR = 1,3 [1,1-1,6] ; p = 0,006, pour l’augmentation
d’un quartile). Les risques étaient élevés dans les
quatre régions et statistiquement significatifs dans
trois des quatre régions (Détroit, Iowa et Los Angeles),
pour le lymphome folliculaire et le lymphome de la zone
marginale (OR = 1,5 [1,1-2,0] ; p = 0,014 et
OR = 2,1 [1,3-3,5] ; p = 0,006 pour l’augmentation d’un
quartile, respectivement). Les résultats décrivant le
poids de chacun des produits chimiques montrent une
importance élevée des pesticides dans les associations
décrites. Analysés individuellement, certains pesticides
étaient associés au risque de LNH : les quartiles les
plus élevés d’α-chlordane (OR = 1,4 [1,0-2,0]) et de
γ-chlordane (OR = 1,4 [1,0-1,9]) sont associés
positivement. Pour le chlorpyrifos et le dicamba, les
risques étaient inversement associés au LNH.
) a inclus 2 348 cas et
2 462 témoins dans 6 pays. Les données de l’historique
professionnel et des questionnaires spécifiques sur les
travaux effectués à la ferme ainsi que des questions
spécifiques sur les cultures, la taille de la ferme, les
parasites traités, le type et le calendrier de
traitement par pesticide étaient recueillies. Le risque
de leucémie lymphoïde chronique est associé à
l’exposition aux pesticides non organiques
(OR = 1,6 [1,0-2,5]) et aux organophosphorés
(OR = 2,7 [1,2-6,0]) reposant néanmoins sur un
relativement faible nombre d’exposés. Une analyse
restreinte aux sujets les plus vraisemblablement exposés
(expositions revues par un hygiéniste), ne montrait
aucune association. Aucun effet-dose n’était
identifié.
) montre que l’exposition
professionnelle agricole aux pesticides est associée à
un échec du traitement, à la survie sans évènement et à
la survie globale des patients atteints de lymphome
diffus à grandes cellules B. Ce type d’étude est à
encourager car il aborde un pan inconnu pour l’instant
de l’impact de l’exposition aux pesticides qui, comme le
montre cette étude, peut entrer en concurrence avec
l’efficacité des traitements.Synthèse des données par familles et substances actives
Organochlorés
) décrivait un nombre
important d’études qui s’étaient intéressées au lien
entre exposition aux organochlorés (aldrine, dieldrine,
DDT, chlordane, endrine, heptachlore, lindane,
méthoxychlore, nonachlore, oxychlordane, toxaphène...)
et LNH (voir tableau 4.IV de l’édition 2013). Nous
détaillons ci-dessous les données pour les principales
matières actives.
). Celle-ci rapporte des
estimations d’associations entre les LNH et
21 familles de pesticides et 80 substances actives
extraites de 44 articles originaux dont le lindane,
dont l’exposition est associée positivement à la
survenue de LNH mRR = 1,6 [1,2-2,2]. Cependant,
aucun effet-dose n’est résumé dans cette étude.
), les auteurs n’observent
aucune association avec le lindane (avec des risques
inférieurs à 1, non significatifs) à l’exception de
la LLC/LL pour laquelle le risque pour l’exposition
au lindane est d’un mRR = 1,1 [0,9-1,4]. De plus une
étude du NAPP (étude poolée nord-américaine) montre
une association positive entre l’exposition au
lindane (OR = 1,6 [1,2-2,1]) et le lymphome
folliculaire (LF), le LDGCB, le lymphome
lymphocytique avec une tendance significative avec
la durée d’exposition non linéaire (Kachuri et
coll., 2020
).
). Une association positive
est observée avec le lindane (RR = 2,5 [1,4-4,4])
dans la catégorie des professionnels les plus
exposés (nombre total de jours d’exposition) avec
des risques qui augmentent avec le nombre total de
jours d’exposition (tendances statistiquement
significatives). L’exposition au lindane semble
également associée à un risque élevé de lymphome
folliculaire (RR = 1,7 [1,0-3,2]) et une tendance
significative à l’augmentation du risque avec
l’exposition (en nombre total de jours) est observée
(RR = 1,0 [réf], 4,9 [1,9-12,6], 3,6 [1,4-9,5] ; p
de tendance = 0,04).
) examine le risque
d’hémopathie maligne chez les éleveurs et ne montre
aucune association avec les principaux sous-types de
LNH à l’exception d’un risque significativement
élevé de lymphome folliculaire chez les éleveurs de
bovins dans une analyse de sensibilité prenant comme
groupe de référence les agriculteurs n’ayant jamais
élevé aucun bétail.
) rapporte une association
entre les LNH et l’exposition professionnelle au DDT
(mRR = 1,3 [1,1-1,5]) basée sur 7 études (6 études
cas-témoins et une étude de cohorte publiée par
Purdue et coll. en
2007
). Cette association était
robuste aux analyses de sensibilités évaluant
l’effet du sexe, du type d’étude, de la période de
diagnostic, la région géographique, la source des
témoins pour les études cas-témoins. Cependant, ce
résultat n’est pas retrouvé dans la cohorte AHS
(telle que publiée en 2007) et aucun effet-dose
n’est présenté dans cette méta-analyse. Les
associations entre DDT et les sous-types de LNH sont
étudiées dans un petit nombre d’articles montrant
néanmoins que les lymphomes à cellules B sont
associés positivement à l’exposition au DDT,
mRR = 1,4 [1,0-2,0] avec une absence d’hétérogénéité
entre les résultats des études. Le lymphome
folliculaire est associé au DDT, mRR = 1,5 [1,0-2,4]
avec une hétérogénéité modérée entre les résultats
des études.
), les auteurs n’observent
aucune association avec le DDT (cohorte AHS
comprise). Toutefois, pour un pesticide lipophile et
persistant tel que le DDT, l’exposition pourrait
rester pertinente même plusieurs décennies au-delà
de la période d’utilisation active, en particulier
pour son métabolite, le DDE, ce qui justifierait
leur inclusion dans ces analyses. La dernière étude
du NAPP (étude poolée nord-américaine) montre une
association positive entre l’exposition au DDT
(OR = 1,4 [1,1-1,7]) et le LDGCB, le lymphome
lymphocytique avec une tendance significative avec
la durée d’exposition non linéaire (Kachuri et
coll., 2020
).
) montrant une association
avec les organochlorés regroupés ensemble mais
aucune association avec le DDT, tout en signalant
des associations plus fortes avec le DDE,
mOR = 1,4 [1,1-1,6], et avec d’autres pesticides
organochlorés comme l’hexachlorocyclohexane (HCH),
le chlordane et l’hexachloro-benzène (HCB). Plus
récemment, une étude a été réalisée en Asie (Bassig
et coll., 2019
), où la forte exposition et
la contamination environnementale historique de
certains pesticides organochlorés (par exemple, DDT
et HCH) sont différentes des populations
occidentales. Cette étude cas-témoins nichée dans
trois cohortes (Shanghai et Singapour) a inclus
167 cas de LNH et 167 témoins. Elle évalue
l’exposition à partir des dosages pré-diagnostiques
de pesticides organochlorés/métabolites et
congénères de polychlorobiphényles (PCB). Les
niveaux médians de p, p’-DDE, le principal
métabolite du DDT et le β-HCH étaient respectivement
jusqu’à 12 et 65 fois plus élevés dans les
échantillons des cohortes asiatiques comparées à
plusieurs cohortes aux États-Unis ou en Norvège. Une
augmentation de risque de LNH a été observée chez
les sujets dont les taux de β-HCH étaient plus
élevés dans l’ensemble (OR 3eversus
1er tercile = 1,8 [1,0-3,2] ;
ptendance = 0,049) et après exclusion
des cas diagnostiqués dans les deux ans suivant le
prélèvement de sang (OR 3eversus 1er tercile = 2,0 [1,1-3,9]
ptendance = 0,03). Aucune association
significative n’a été observée pour les autres
organochlorés, y compris p, p’-DDE. Ces résultats
confirment une association entre le taux sanguin de
β-HCH et le risque de LNH. En revanche, bien que
certaines études suggèrent que le DDT est associé au
risque de LNH, ces résultats pour le p, p’-DDE ne
confirment pas cette association.
). Une association positive
est observée entre l’exposition au DDT
(RR = 1,7 [1,1-2,6]) et le risque de LNH dans la
catégorie des professionnels les plus exposés
(nombre total de jours d’exposition) avec des
risques qui augmentent avec le nombre total de jours
d’exposition (tendances statistiquement
significatives). L’exposition au DDT est
positivement associée au lymphome
lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome
à cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec la même
tendance significative des risques qui augmentent
avec le nombre total de jours d’exposition. Ces
observations persistent après ajustements
mutuels.
), les autres études étant
menées en population générale.
) et qui montre une
association avec le chlordane (OR = 1,9 [1,5-2,5]).
D’autre part, l’étude de la cohorte AHS publiée en
2014 par Alavanja montre que l’exposition au
chlordane est associée à des risques élevés de
LL/LLC/LCM (RR = 1,4 [1,0-2,0]) sans effet-dose
identifié. Cette association repose sur un petit
nombre d’exposés (49 sujets exposés versus
90 non exposés).
) étudie un mélange de
27 produits chimiques environnementaux corrélés,
mesurés dans la poussière domestique (n = 1 180).
Cette étude, évoquée plus haut, s’intéresse
principalement à un score pondéré prenant en compte
la concentration mesurée pour 27 produits chimiques
d’intérêt (dosages de cinq polychlorobiphényles,
sept hydrocarbures aromatiques polycycliques et
quinze pesticides). Analysés individuellement,
certains pesticides étaient associés au risque de
LNH et, en particulier, les quartiles les plus
élevés d’α-chlordane (OR = 1,4 [1,0-2,0]) et de
γ-chlordane (OR = 1,4 [1,0-1,9]) étaient associés
positivement au risque de LNH.
).
) et rapporte une
association positive spécifique entre l’exposition à
cette substance et le risque de LNH
(mRR = 1,4 [1,0-2,1]) reposant sur les données de
deux études cas-témoins réalisées au Canada et aux
États-Unis et publiées en 2001 et 2003.
) ne montre pas
d’association positive entre l’exposition spécifique
au dicamba et le risque de LNH en général mais
uniquement avec le myélome multiple de façon non
significative (mRR = 1,2 [0,9-1,6]). Ce résultat est
décrit dans la partie portant sur le myélome.Organophosphorés
).
) mettant en évidence une
association positive significative entre
l’exposition au terbufos et le risque de LNH,
mRR = 1,2 [1,0-1,4]. Cette association est basée sur
les données de deux cohortes AGRICAN et AHS car le
terbufos n’était pas homologué pour une utilisation
sur les cultures sélectionnées en Norvège
(3e cohorte participant à l’analyse).
Aucune hétérogénéité des effets entre les deux
cohortes n’était observée. Les risques spécifiques
de chaque cohorte sont mRR = 1,1 [0,8-1,5] pour
AGRICAN (96 cas exposés) et mRR = 1,2 [1,0-1,5] pour
l’AHS (203 cas exposés). Bien que non significatif,
le risque est plus élevé pour le lymphome
folliculaire mRR = 1,2 [0,8-2,2]. Par ailleurs,
comme attendu, l’association entre l’exposition
professionnelle au terbufos et le risque de LNH est
confirmée dans l’analyse la plus récente de la
cohorte AHS publiée préalablement en 2014 (Alavanja
et coll., 2014
). L’exposition au terbufos
est également positivement associée au lymphome
lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome
à cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec une tendance
significative à l’augmentation des risques avec le
nombre total de jours d’exposition. Ces observations
persistent après ajustements mutuels.
) inclut cinq études dont
l’AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté
des informations sur l’exposition à au moins un des
trois pesticides organophosphorés suivants :
malathion, diazinon, terbufos. Le risque de LNH
n’est pas associé à l’exposition au terbufos
mRR = 1,1 [0,9-1,4].
) qui à partir de trois
études cas-témoins (dont une étude cas-témoins
nichée dans une cohorte) montre une association
positive entre l’exposition au diazinon et le risque
de LNH (mRR = 1,6 [1,2-2,2]). D’autre part, la
méta-analyse de Hu et coll.
(2017
) inclut sept études dont la
cohorte AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant
collecté des informations sur l’exposition à au
moins un des trois pesticides organophosphorés
suivants : malathion, diazinon et terbufos.
L’exposition au diazinon est significativement
associée au risque de LNH, mRR = 1,4 [1,1-1,7] avec
une absence d’hétérogénéité inter-études
(I2 = 0 %). Les résultats de l’étude
AHS publiée par Alavanja et coll.
(2014
) montrent également des
risques de lymphome folliculaire qui augmentent avec
le nombre de jours d’exposition au diazinon
(RR = 1,0 [réf], 2,2 [0,9-5,4], 3,8 [1,2-11,4] ; p
de tendance = 0,02).
) retrouve à partir de trois
études cas-témoins (dont une étude cas-témoins
nichée dans une cohorte) une association positive
entre l’exposition au malathion et le risque de LNH
(mRR = 1,8 [1,4-2,2]).
) inclut sept études dont la
cohorte AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant
collecté des informations sur l’exposition à au
moins un des trois pesticides organophosphorés
suivants : malathion, diazinon, terbufos. Cette
étude montre un risque élevé, mais non significatif,
de LNH chez les agriculteurs exposés au malathion,
mRR = 1,2 [0,8-1,7] avec une forte hétérogénéité
inter-études (I2 = 73 %). Les résultats
les plus récents de l’étude AHS publiée par Alavanja
et coll. (2014
) ne montrent pas
d’association.
) examine le rôle de
l’exposition à des insecticides spécifiques
(11 organophosphorés et 2 carbamates) sur le risque
de LNH et ses principaux sous-types, au sein de
trois études cas-témoins réalisées en population
générale dans les années 1980 aux États-Unis et une
étude cas-témoins canadienne publiée dans les années
1990 (1 690 cas et 5 131 témoins). Une association
positive statistiquement significative est observée
entre l’exposition au malathion et le risque de LNH,
OR = 1,4 [1,1-1,8] après ajustement mutuel sur les
autres substances. Ce risque augmente avec la durée
d’utilisation (p de tendance < 0,01), rapportée
par les agriculteurs, avec un risque plus important
pour une utilisation du malathion pendant 6 années
ou plus par rapport aux non-utilisateurs
(OR = 1,6 [1,2-2,1]). Après ajustement sur les
autres pesticides étudiés, les auteurs observent
également une association entre l’exposition au
malathion et les deux principaux sous-types de LNH,
le LDGCB (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le lymphome
folliculaire (OR = 1,6 [1,1-2,3]) avec une
augmentation des risques avec la durée de
l’exposition.
).Triazines
) retrouve à partir de quatre
études cas-témoins une association positive entre
l’exposition agricole aux herbicides de la famille des
triazines et le risque de LNH (mRR = 1,5 [1,0-2,1]) avec
une hétérogénéité inter-études faible
(I2 = 38,5 %).
) montrait, en ajustant sur
les autres substances, des risques significatifs
semblant indiquer un effet plus qu’additionnel
(« superadditive ») de l’utilisation de
l’atrazine en combinaison avec le carbofuran, le
diazinon et l’alachlore. Une étude sur les individus
porteurs d’une translocation chromosomique t(14;18)
a également mis en évidence une augmentation
significative de risque de LNH associé à
l’exposition à l’atrazine chez ces individus par
rapport aux témoins (Schroeder et coll.,
2001
).Carbamates/thiocarbamates
). À partir des trois études
cas-témoins anciennes et déjà prises en compte dans
l’expertise de 2013 (1992-2001), les auteurs montrent
des associations positives sans hétérogénéité
inter-études (I2 = 0 %) entre l’exposition
aux herbicides et insecticides carbamates et le risque
LNH avec respectivement des risques mRR = 1,4 [1,1-2,0]
et mRR = 1,7 [1,3-2,3].
).
). La présomption de lien
reste donc moyenne.
). Celle-ci rapporte des
estimations d’associations entre les LNH et le
carbaryl (mRR = 1,7 [1,3-2,3]) à partir des données
de deux études cas-témoins déjà prises en compte
dans l’expertise 2013.
) ne montre pas
d’association entre l’exposition spécifique au
carbaryl et le risque de LNH.
) examine le rôle de
l’exposition à des insecticides spécifiques (dont
2 carbamates) sur le risque de LNH, au sein de trois
études cas-témoins réalisées en population générale
dans les années 1980 aux États-Unis et une étude
cas-témoins canadienne publiée dans les années 1990
(1 690 cas et 5 131 témoins). Une association
positive statistiquement significative est observée
entre l’exposition au carbaryl et le risque de LNH
(mOR = 1,6 [1,2-2,2]) qui s’estompe après ajustement
mutuel sur les autres substances
(mOR = 1,2 [0,8-1,6]).
) avec la nouvelle définition
de l’entité LNH (incluant LLC et myélome).
Cependant, une association est mise en évidence avec
l’ancienne définition du groupe LNH (donnée non
montrée). Les applicateurs les plus exposés au
carbaryl ont un risque élevé de lymphome
folliculaire, RR = 2,8 [1,0-7,4] avec une
augmentation des risques avec l’exposition dont la
tendance est toutefois non significative.
) rapporte une association
positive entre les LNH et le carbofuran
(mRR = 1,7 [1,3-2,3]) à partir des données de deux
études cas-témoins déjà prises en compte dans
l’expertise 2013.
) ne montre pas
d’association entre l’exposition spécifique au
carbofuran et le risque de LNH.
).
) combinant les données de
trois études cas-témoins réalisées dans les années
1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins
canadienne publiée dans les années 1990 (1 690 cas
et 5 131 témoins) montre un risque élevé de LNH non
statistiquement significatif
(mOR = 1,3 [1,0-1,7]).Phénoxyherbicides non contaminés
). En revanche, les études
cas-témoins individuelles les plus récentes (après
2005) rapportaient des associations non
significatives de risque de LNH après exposition au
2,4-D. L’exposition au 2,4-D combinée à celle du
malathion montrait un risque significativement
augmenté dans une étude canadienne (Hohenadel et
coll., 2011
). Les auteurs avaient
conclu à une présomption de lien moyenne.
) montre à partir de cinq
études cas-témoins (dont l’étude cas-témoins nichée
dans une cohorte) une association positive entre
l’exposition au 2,4-D et le risque de LNH
(mRR = 1,4 [1,0-1,9]) avec une hétérogénéité
inter-études relativement élevée
(I2 = 61,5 %). Deux autres méta-analyses
se sont focalisées uniquement sur le 2,4-D (Goodman
et coll., 2017
; Smith et coll.,
2017
). La première compile les
données de 10 études publiées entre 1991 et 2011
dont les données de la cohorte AHS (de Roos et
coll., 2005
) et ne montre aucune
association entre le risque de LNH et l’exposition
(oui/non) au 2,4-D, mRR = 1,0 [0,8-1,2]. La seconde
méta-analyse rassemble les résultats de 11 études
cas-témoins (dont deux nichées) et une cohorte de
professionnels, publiées entre 1992 et 2013 (Smith
et coll., 2017
). Cette méta-analyse
n’inclut pas les données de la cohorte AHS mais
celles d’une cohorte menée par Dow Chemicals
incluant du personnel employé à la production
d’herbicides (Burns et coll.,
2001
). Les auteurs s’intéressent
aux expositions les plus élevées au 2,4-D de chaque
étude et identifient une association positive
statistiquement significative avec le risque de
LNH : mRR = 1,7 [1,1-2,7] avec une hétérogénéité
inter-études modérée (I2 = 56 %, test
d’hétérogénéité p = 0,009), ce qui requiert une
certaine prudence dans l’interprétation des
résultats. En effet, cette méta-analyse regroupe des
études ayant des méthodes différentes (scénarios
d’exposition, évaluation de l’exposition, des
résultats, analyses statistiques ou même des
populations d’étude). Toutefois, cette étude apporte
des preuves d’une relation dose-réponse en comparant
les résultats pour des groupes d’exposition élevés à
des groupes peu ou pas exposés. Aucun biais majeur
dans la conception de l’étude, l’évaluation de
l’exposition, la classification des cas ou biais de
publication n’ont été détectés.
).
) montre à partir de cinq
études cas-témoins (déjà prises en compte dans
l’expertise précédente) une association positive non
significative entre l’exposition au MCPA et le
risque de LNH (mRR = 1,5 [0,9-2,5]) avec une
hétérogénéité inter-études modérée (54,4 %). Aucune
association n’est mise en évidence dans l’étude
poolée des trois cohortes d’agriculteurs publiées en
2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll.,
2019
). Aucun autre élément de
preuve n’a été collecté.
) a étudié cette matière
active et ne retrouve pas d’association avec le
risque de LNH.Glyphosate
Données toxicologiques sur des substances actives particulières
Organophosphorés : malathion et diazinon
).
). Le lien avec la production
d’espèces réactives de l’oxygène (ERO) a lui aussi été avéré
par des études sur le rat Wistar (in vitro et in
vivo) mais à doses relativement élevées : la
production d’ERO est augmentée dans des lymphocytes exposés
in vitro (Ojha et Srivastava,
2014
) ou dans des hépatocytes après
exposition des animaux adultes pendant 28 jours à une dose
de 200 mg/kg/j (Lasram et coll.,
2014
). Ces traitements ou expositions
sont parfois associés à une génotoxicité (Lasram et coll.,
2014
; Ojha et Srivastava,
2014
; Ojha et Gupta,
2015
) ou à un état pro-inflammatoire
(Lasram et coll., 2014
). Le Circ, dans un rapport
récent, a conclu que le malathion possède des propriétés
génotoxiques et pro-oxydantes (Guyton et coll.,
2015
; IARC,
2017
). Le malathion est aussi décrit
comme un agent pro-prolifératif et perturbant la
signalisation de récepteurs hormonaux comme celui des
androgènes (IARC, 2017
).
; IARC,
2017
) et les publications les plus
récentes (Zeinali et coll.,
2018
) suggèrent que cet insecticide
exerce sur le plan mécanistique des effets
i) génotoxiques importants in vivo et in
vitro (dans de multiples espèces) ;
ii) pro-oxydants marqués sur les mêmes modèles mais
aussi chez les poissons par altération des fonctions
d’enzymes anti-oxydantes, déplétion en glutathion et
per-oxydation lipidique ; iii) pro-inflammatoires
chez les rongeurs. À ce stade, il est plus difficile de
conclure pour le diazinon quant à une stimulation de la
prolifération cellulaire, ou à une immunosuppression (IARC,
2017
).
). Des résultats récents suggèrent
aussi des effets de perturbation endocrinienne pour le
malathion, et des altérations des profils de méthylation de
l’ADN pour le diazinon au niveau de sites CpG
potentiellement régulateurs de l’expression de gènes
suppresseurs de tumeurs comme TP53 ou PTEN
(codant une phosphatase inhibant la voie AKT) (Zhang et
coll., 2012b
; Zhang et coll.,
2012a
).Organochlorés : lindane et DDT
). Des effets immunomodulateurs
ont aussi été observés avec une inhibition de la fonction
des cellules NK qui ont pour propriété de lyser les cellules
tumorales. Ce type d’inhibition était aussi décrit pour le
lindane. Une publication récente confirme son effet
génotoxique (Ennaceur, 2017
) précédemment évoqué dans
l’expertise collective de 2013. Sur le plan mécanistique, le
lindane est susceptible d’induire un stress oxydant et
d’activer les processus pro-apoptotiques dans des
lymphocytes humains (Michalowicz et coll.,
2013
), ce qui est cohérent avec les
effets immunosuppresseurs décrits ci-dessus pour le DDT.
). Cette hypothèse intéressante
mériterait d’être explorée.Conclusion
), on peut retenir que plusieurs familles de pesticides sont
associées positivement avec le risque de LNH (phénoxyherbicides,
insecticides carbamates, insecticides organophosphorés).
Plusieurs substances actives sont également associées au risque
de survenue de LNH (lindane, dicamba, DDT, carbaryl, carbofuran,
diazinon, malathion, glyphosate). Cependant, aucun effet dose
n’est évalué dans cette étude (effet oui/non). Le risque de
lymphome B est associé à l’exposition aux phénoxyherbicides (de
même que le lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB)), au
glyphosate et au DDT (tout comme le lymphome folliculaire). De
la seconde méta-analyse provenant du consortium Agricoh, on
retient que la plupart des associations testées sont non
statistiquement significatives excepté pour les LNH et le
terbufos ou le LDGCB et le glyphosate, après ajustement sur les
autres pesticides. Aucun élément d’hétérogénéité entre les
résultats des trois cohortes n’est objectivé.
. Les
niveaux de présomption qui étaient forts en 2013 restent
inchangés (lindane, DDT, organophosphorés et malathion), en
revanche les niveaux de présomption pour le diazinon et le
chlordane sont plus élevés qu’en 2013 avec un passage au niveau
fort pour le diazinon. Pour le dicamba, un niveau de présomption
faible est rapporté pour la première fois. Le niveau de
présomption reste faible (±) pour les substances actives
suivantes : carbaryl, carbofuran, MCPA, mécoprop. La littérature
analysée n’a pas permis de réévaluer le niveau de risque
considéré comme faible en 2013 pour les substances actives
suivantes : atrazine, aldrine, coumaphos, chlorpyrifos,
fonofos.
).Myélome multiple
Tableau 11.II Familles et substances actives impliquées dans les
excès
de risque significatifs de LNH
|
Famille
Substances actives |
Populations concernées par un excès de
risque
|
Présomption
d’un lien |
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
Lindane (γHCH)
|
Applicateurs, agriculteurs
|
++
|
|
Éleveurs (mélange d’isomères
d’HCH)
|
+
|
|
|
DDT
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Professionnels
|
+
|
|
|
Chlordane1
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Dicamba1
|
Agriculteurs
|
±*
|
|
Aldrine2
|
Professionnels
|
±
|
|
DDT + Malathion
|
Professionnels
|
±
|
|
Organophosphorés
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Personnes exposées
(professionnellement
ou par usage domestique) |
+
|
|
|
Professionnels
|
±
|
|
|
Terbufos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Diazinon1
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Malathion
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Personnes exposées (professionnellement
ou par usage domestique)
|
±
|
|
|
Professionnels
|
±
|
|
|
Coumaphos2
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Chlorpyrifos2
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Fonofos2
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Carbamates/Dithiocarbamates
| ||
|
Sans distinction
(carbamates)
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Professionnels
|
±
|
|
|
Carbaryl
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Professionnels
|
±
|
|
|
Carbofuran
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Carbaryl + malathion
|
Professionnels
|
±
|
|
Butilate
|
Applicateurs
|
+
|
|
Agriculteurs
|
±
|
|
|
Triazines
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Ouvriers en industrie de
production
|
+
|
|
|
Atrazine2
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Phénoxyherbicides non contaminés par
les dioxines
| ||
|
2,4-D
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Professionnels
|
±
|
|
|
2,4-D + malathion
|
Professionnels
|
±
|
|
MCPA
|
Professionnels
|
±
|
|
Mécoprop
|
Professionnels
|
±
|
|
Mécoprop + malathion
|
Professionnels
|
±
|
|
Aminophosphonate
glycine
| ||
|
Glyphosate1
|
Agriculteurs ou
professionnels
|
+
|
|
Glyphosate +
malathion3
|
Professionnels
|
±
|
1Matière active pour laquelle le niveau de preuve a été élevé
dans l’actuelle édition comparativement à l’édition
2013
2conclusions de l’expertise
collective de 2013. Pas de nouvelles
informations
3voir chapitre « Glyphosate et
formulations à base de glyphosate »
++ au moins une
méta-analyse et au moins une étude de cohorte
+ au moins une
étude de bonne qualité (cohorte et/ou plusieurs études
cas-témoins)
± une étude cas-témoins ; ± * deux études
cas-témoins positives mais une méta-analyse négative de trois
cohortes : « deux études cas-témoins positives mais une
méta-analyse négative de trois cohortes » Données
nouvelles
).Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013
Nouvelles données épidémiologiques
Méta-analyses
) étudie le rôle de l’exposition
(de façon binaire : oui/non) entre 14 familles de pesticides
et 33 substances actives et le risque de MM. Cette étude
inclut également les LNH (voir partie LNH). À partir des
données de trois cohortes de travailleurs agricoles
(États-Unis – AHS, France – AGRICAN et Norvège – CNAP,
totalisant plus de 300 000 sujets, 561 cas de MM et
3,5 millions de personnes-années à risque), les auteurs
n’observent aucune association statistiquement significative
entre l’exposition aux familles ou substances étudiées et le
risque de MM. Des augmentations de risque sont suggérées
lors de l’utilisation de quelques principes actifs, dont le
dicamba (mHR = 1,21 [0,93-1,59], 179 cas exposés), sans
preuve d’hétérogénéité des effets parmi les cohortes
(I2 = 0 %). Les HR spécifiques à chaque
cohorte pour l’utilisation de dicamba et de MM étaient :
HR = 1,30 [0,70-2,43] dans AGRICAN, HR = 1,15 [0,79-1,67]
dans le CNAP et HR = 1,28 [0,77-2,13] dans l’AHS, avec
respectivement 40, 92 et 47 cas exposés.
) examine le risque d’hémopathie
maligne chez les éleveurs et ne montre aucune association
avec le MM à l’exception d’un risque significativement élevé
de MM ou plasmocytome dans l’AHS spécifique aux éleveurs de
volailles (mRR = 1,8 [1,1-3,0]) ainsi qu’aux éleveurs de
moutons (mRR = 3,5 [1,7-7,5]). Ces résultats n’ont pas été
systématiquement rapportés dans la littérature mais ont déjà
été observés chez les éleveurs de moutons y compris dans la
cohorte AHS.
) puis en 2015 (Sorahan,
2015
). Un risque augmenté de MM,
statistiquement significatif, était observé chez les
agriculteurs exposés au glyphosate (mRR = 1,5 [1,0-2,2]) en
utilisant l’analyse de 2005 de la cohorte AHS et un risque
de magnitude comparable (mRR = 1,4 [1,0-1,9]), en utilisant
l’analyse de Sorahan publiée en 2015. Cette méta-analyse
montrait une absence d’hétérogénéité des effets entre les
études (I2 = 0 %) et une absence de biais de
publication identifiable. Cette association était robuste à
plusieurs autres analyses secondaires.
). La profession d’agriculteur
n’était pas associée au risque de MM après ajustement sur le
type d’étude, le sexe, l’âge et l’origine ethnique.
Toutefois, une association avec une valeur de risque modérée
à la limite de la significativité statistique est mise en
évidence entre la profession de jardinier/ouvrier de
pépinière et le risque de survenue d’un MM
(mOR = 1,5 [1,0-2,3]).
) rassemble les données de trois
études cas-témoins réalisées en population générale en Iowa,
au Nebraska et au Canada (547 cas et 2 700 témoins) et porte
plus spécifiquement sur les expositions à certaines familles
ou substances actives de pesticides. Les utilisations de
carbaryl, de captane ou de DDT sont toutes trois associées à
un risque élevé de MM avec des risques statistiquement
significatifs respectivement : mOR = 2,0 [1,3-3,2],
2,0 [1,0-3,8] et 1,4 [1,1-2,0]. Dans une analyse restreinte
à l’étude canadienne, l’exposition cumulée aux substances
est prise en compte : pour le carbaryl, une augmentation de
risque est rapportée pour les expositions ≤ 10 jours et
> 10 jours durant la vie par rapport aux non exposés
(OR = 3,2 [1,4-7,2] et OR = 2,4 [1,1-5,6]). Pour le captane,
une exposition ≤ 17,5 jours correspond à un risque élevé
OR = 3,5 [1,3-9,3] alors que le risque reste élevé mais non
significatif pour une utilisation > 17,5 jours
OR = 2,3 [0,8-6,4]. Concernant l’exposition cumulée au DDT,
on observe une relation dose-effet significative p = 0,04
avec des risques modérément élevés mais non significatifs
pour une utilisation > 22 jours (OR = 1,9 [0,95-3,9]).Cohortes
) s’adresse spécifiquement à
l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence
d’association avec le MM.
) abordant plusieurs familles de
substances actives, met en évidence une association entre
l’exposition à la perméthrine et le risque de MM
(RR = 2,2 [1,4-3,5]) avec une tendance selon le nombre de
jours cumulé d’utilisation (terciles : RR = 1,0 (réf),
RR = 1,4 [0,8-2,7]), RR = 3,1 [1,5-6,2] p de
tendance = 0,002).
). Cette étude montre un risque
élevé de MM chez les agriculteurs ayant commencé à utiliser
des pesticides sur les cultures dans les années 1960, en
particulier chez ceux appliquant des pesticides sur du maïs
(≥ 20 ans : RR = 1,7 [1,1-2,8], p de tendance < 0,01) et
ceux qui utilisent les insecticides sur les animaux
(RR = 1,5 [1,1-2,0]), en particulier chez les éleveurs de
chevaux (≥ 10 ans : RR = 2,8 [1,2-6,3], p de
tendance = 0,01).
) qui a montré un taux d’incidence
plus élevé de MM chez les hommes et les femmes inclus dans
la cohorte avec des ratios standardisés d’incidence
significatifs dans les deux sexes (hommes,
SIR = 1,4 [1,2-1,6] ; femmes, SIR = 1,3 [1,0-1,5]).Cas-témoins
) a contribué à l’analyse poolée
décrite ci-dessus et publiée par Presutti (Presutti et
coll., 2016
). En plus des résultats évoqués
ci-dessus dans l’analyse poolée, cette étude basée sur
342 cas et 1 357 témoins, apporte de l’information sur
plusieurs expositions aux pesticides, analyse le nombre de
pesticides utilisés et le nombre de jours par an
d’utilisation des pesticides, ce qui caractérise mieux
l’exposition telle qu’elle se produit en milieu
professionnel. Des tendances positives du risque de MM sont
observées avec le nombre de pesticides utilisés, pour les
fongicides (p de tendance = 0,04) et les pesticides classés
comme « cancérogènes probables » par le Circ (p de
tendance = 0,03). Des risques accrus de MM sont observés
chez les hommes ayant déclaré utiliser au moins un carbamate
(OR = 1,9 [1,2-3,3]), un phénoxyherbicide
(OR = 1,6 [1,1-2,3]) et trois organochlorés ou plus
(OR = 2,2 [1,1-4,7]). De même, l’utilisation de l’herbicide
mécoprop (utilisation supérieure à 2 jours par an) était
également significativement associée au MM
(OR = 2,2 [1,0-4,5]).Conclusion
).Tableau 11.III Présomption d’un lien entre exposition aux pesticides et myélome multiple
|
Exposition
|
Populations concernées
par un excès de risque |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Pesticides (sans
distinction)
|
Agriculteurs, applicateurs
|
++
|
|
Éleveurs
|
+
|
++ d’après les résultats de 6 méta-analyses et
de deux cohortes prospectives (AHS et cohorte
nord-européenne) (2013)
+ d’après les résultats d’une
méta-analyse réalisée à partir de trois cohortes Données
nouvelles
). Cependant, on peut noter une
association positive avec glyphosate dans une méta-analyse
(études cas-témoins) qui n’est cependant pas retrouvée dans la
méta-analyse des trois cohortes d’agriculteurs (États-Unis,
France, Norvège), ni la dernière analyse de la cohorte AHS.
L’exposition à la perméthrine est également associée à un risque
accru de MM, avec des risques qui augmentent avec l’exposition
(AHS). Cette exposition entraîne des altérations des paramètres
hématologiques pouvant indiquer une hématopoïèse perturbée, ce
qui apporte des arguments à la plausibilité biologique de
l’association observée entre l’utilisation de perméthrine et le
risque de MM chez les applicateurs de pesticides (Shearer et
coll., 2019
). On peut citer les associations
rapportées avec le carbaryl, le captane et le DDT qui reposent
uniquement sur une étude cas-témoins bien faite. Pour ces
molécules la présomption de lien est considérée comme faible
(« ± »).Tableau 11.IV Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque de myélome multiple
|
Famille
Substances actives |
Populations concernées
par un excès de risque |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
DDT
|
Population générale
|
±
|
|
Carbamates
| ||
|
Carbaryl
|
Population générale
|
±
|
|
Pyréthrinoïdes
| ||
|
Perméthrine
|
Applicateurs
|
+
|
|
Aminophosphonate
glycine
| ||
|
Glyphosate
|
Agriculteurs
|
± a
|
|
Autres
| ||
|
Captane
|
Population générale
|
±
|
+ d’après les résultats d’une cohorte en 2013,
confirmé au suivi (AHS) Données nouvelles
±
d’après les résultats d’une analyse « poolée » de trois
études cas-témoins Données nouvelles
±
a d’après les résultats d’une méta-analyse de
trois études cas-témoins et deux analyses de la cohorte AHS
qui se recoupent Données
nouvelles
Lymphome de Hodgkin
).Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013
) avait conclu à la présomption faible (±) d’un lien entre
l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles
chimiques ou de substances actives, dans le secteur
professionnel agricole et le risque de survenue de LH.Nouvelles données épidémiologiques
Méta-analyses
) étudie conjointement 2 études
cas-témoins publiées entre 2009 et 2012 et ne met pas en
évidence d’association entre le risque de LH et l’exposition
au glyphosate chez les agriculteurs (mOR = 1,1 [0,7-1,6]).
Pour autant, les données disponibles reposent sur de faibles
effectifs (6 cas pour l’une et 38 cas pour l’autre).Cohortes
) s’adresse spécifiquement à
l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence
d’association avec le LH. Les données reposent sur un
effectif limité de cas exposés, ce qui ne permet pas de
conclure définitivement car l’étude manque de puissance.Cas-témoins
) ne retrouve pas d’association
entre le risque de LH et l’exposition aux principaux
pesticides étudiés excepté au chlorpyrifos
(OR = 4,4 [1,3-14,7]) mais ce résultat repose sur 6 exposés
chez les cas (1,9 %) et 6 exposés chez les témoins (0,4 %).
Aucun effet dose n’a été observé. Une seconde analyse de
cette étude a été publiée (Navaranjan et coll.,
2013
) pour prendre en compte la notion
d’exposition multiple aux pesticides et orienter l’analyse
sur les pesticides classés comme potentiellement ou
probablement cancérogènes par le Circ. Le risque de LH est
élevé chez les sujets ayant déclaré avoir utilisé au moins
cinq insecticides (OR = 1,9 [0,9-3,8]) et, de façon plus
marquée, chez les sujets de moins de 40 ans ayant déclaré
avoir utilisé deux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase
(OR = 3,2 [1,0-9,3]). D’autres risques élevés de LH sont
observés en lien avec l’exposition aux fongicides chez les
sujets de moins de 40 ans. Un risque élevé était associé à
l’utilisation d’au moins trois pesticides classés
probablement cancérogènes par le Circ chez l’être humain
(OR = 2,5 [1,1-5,8]), mais sans augmentation du risque
associé à l’utilisation de pesticides possiblement
cancérogènes (classement du Circ).Conclusion
).Tableau 11.V Présomption d’un lien entre exposition aux pesticides et lymphome de Hodgkin
|
Exposition
|
Populations concernées
par un excès de risque |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Pesticides (sans
distinction)
|
Professionnels du secteur
agricole
|
±
|
± d’après les résultats de 4 méta-analyses et d’une cohorte prospective (AHS) en 2013 ; et d’une méta-analyse (deux études cas-témoins), de la mise à jour de la cohorte AHS et d’une étude cas-témoins canadienne
Leucémies
).
).
Le classement des leucémies est basé sur l’appartenance des blastes
à une lignée lymphoïde ou myéloïde. Or la littérature
épidémiologique sur les facteurs de risque n’a pas toujours
distingué ces différentes entités. C’est pour cette raison que cette
partie distincte a été conservée dans la présente expertise. Pour
autant, les principales études depuis 2013 font bien la distinction
entre les différents types de leucémies et la plupart des analyses
présentées dans cette partie concernent soit les leucémies
lymphoïdes chroniques aujourd’hui regroupées avec les LNH et les
leucémies aiguës myéloïdes qui représentent la forme la plus
fréquente des leucémies myéloïdes. La leucémie à tricholeucocytes,
un sous-type de leucémie rare, regroupé avec les hémopathies
lymphoïdes et connu depuis plusieurs décennies, a fait l’objet de
quelques études. On assiste aujourd’hui à la publication d’études
portant soit sur des entités de leucémies spécifiques, soit sur des
substances actives spécifiques, soit un croisement des deux.Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013
) avait conclu à la présomption
moyenne (+) d’un lien entre l’exposition aux pesticides, sans
distinction de familles chimiques ou de substances actives, dans
le secteur professionnel agricole et le risque de survenue de
leucémie.
).Nouvelles données épidémiologiques
Méta-analyse
) étudie le rôle de l’exposition
(de façon binaire : oui/non) entre 14 familles de pesticides
et 33 substances actives et le risque des principaux
sous-types d’hémopathies lymphoïdes dont la leucémie
lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL). Les
auteurs observent une association positive entre
l’exposition à la delta-méthrine mRR = 1,5 [1,1-2,1] et la
LLC/LL. À partir des trois cohortes évoquées ci-dessus, une
autre méta-analyse du consortium Agricoh (El-Zaemey et
coll., 2019
) examine le risque d’hémopathies
malignes chez les éleveurs et ne montre aucune association
avec la LLC/LL. Une autre méta-analyse portant
spécifiquement sur le glyphosate, publiée en 2016 (Chang et
Delzell, 2016
), étudie conjointement les données
de 3 études cas-témoins publiées entre 1990 et 2009 et ne
met pas en évidence d’association entre le risque de LLC et
l’exposition au glyphosate chez les agriculteurs
(mOR = 1,0 [0,6-1,5]). En revanche, les deux études
rapportant des associations entre une utilisation de
glyphosate et le risque de leucémie à tricholeucocytes
montrent un risque élevé non statistiquement significatif
compte tenu des faibles effectifs (mOR = 2,5 [0,9-7,3]).
) a étudié l’exposition
professionnelle aux pesticides et le risque de survenue de
leucémie aiguë myéloïde (LAM) (3 955 cas et 9 948 témoins
provenant de 14 études cas-témoins). Cette analyse reprend
en grande majorité les études cas-témoins analysées dans la
méta-analyse de Van Maele-Fabry et coll.
(2007
) déjà prise en compte dans
l’expertise collective de 2013 et qui ne montrait pas
d’augmentation de risque pour les LAM, auxquelles s’ajoutent
5 études plus récentes publiées entre 2009 et 2017. Les deux
études les plus récentes ne montraient pas non plus
d’augmentation de risque (Parodi et coll.,
2017
; Poynter et coll.,
2017
). Cette méta-analyse montre que
l’exposition professionnelle aux pesticides est associée à
une augmentation du risque de LAM (OR = 1,5 ;
IC 95 % [1,1-2,1]) avec une forte hétérogénéité entre études
(I2 = 76 %, p < 0,001). Bien qu’il
n’existe pas d’argument statistique pour conclure à un biais
de publication, les auteurs évoquaient un potentiel biais de
publication par la représentation de forme asymétrique du
graphique en entonnoir. Une meilleure caractérisation de
l’exposition aux pesticides et des études de plus grandes
tailles sont nécessaires pour confirmer ce résultat.Cohortes
). Cette analyse présente également
les résultats pour cinq sous-types d’hémopathies lymphoïdes
fréquents dont une entité regroupant la leucémie lymphoïde
chronique, le lymphome lymphocytique et le lymphome à
cellules du manteau (LLC/LL/LCM). L’exposition au terbufos
(RR = 1,4 [1,0-2,0]) est positivement associée aux
LLC/LL/LCM avec augmentation des risques avec le nombre
total de jours d’utilisation (RR = 1,0 (réf),
RR = 1,3 [0,8-2,0], RR = 1,6 [1,0-2,5], p de
tendance = 0,05). Ces observations persistent après
ajustements mutuels. De même, l’exposition au DDT est
positivement associée au risque de LLC/LL/LCM avec une
tendance significative des risques qui augmentent avec le
nombre total de jours d’exposition (RR = 1,0 (réf),
RR = 1,0 [0,5-1,8], RR = 2,6 [1,3-4,8], p de
tendance = 0,04). Deux autres substances actives sont
associées à des risques élevés de LLC/LL/LCM sans effet-dose
identifié : le métalaxyl et le chlordane
(RR = 1,6 [1,0-2,5] ; RR = 1,4 [1,0-2,0]). Cette analyse par
substance active et sous-type d’hémopathies malignes a pour
conséquence que la majorité des associations identifiées
reposent sur un petit nombre d’exposés.
) s’adresse spécifiquement à
l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence de
risque élevé avec la LLC. En revanche, le risque de LAM
était accru parmi les applicateurs du quartile d’exposition
le plus élevé par rapport aux non-utilisateurs
(RR = 2,4 [0,9-6,3], p de tendance = 0,1). Les résultats
étaient comparables en utilisant une fenêtre d’exposition de
cinq ans (RR quartile 4 = 2,3 [1,0-5,5], p de
tendance = 0,07) et de 20 ans (RR tercile 3 = 2,0 [1,0-4,0],
p de tendance = 0,04).Cas-témoins
). Il présentait une analyse
spécifique de trois leucémies lymphoïdes : la leucémie
lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL)
(2 440 cas et 15 186 témoins provenant de 13 études
cas-témoins ; Slager et coll.,
2014
), de la leucémie à
tricholeucocytes (154 cas et 8 834 témoins provenant de
5 études cas-témoins ; Monnereau et coll.,
2014
) et de la leucémie aiguë
lymphoblastique (LAL) (152 cas et 23 096 témoins provenant
de 16 études cas-témoins ; Skibola et coll.,
2014
). Dans ces analyses, le métier
d’agriculteur n’était pas associé au risque de LLC/LL ni au
risque de LAL. En revanche, il était associé positivement au
risque de leucémie à tricholeucocytes (mOR = 2,3 [1,4-4,0],
avec une relation dose-réponse observée avec la durée dans
ce métier (OR = 1,8 [0,9-3,9] pour ≤ 10 ans comparé à la
référence : aucun emploi agricole) et OR = 3,0 [1,5-5,9]
pour > 10 ans versus référence ; p de
tendance = 0,025). Les associations observées restaient
comparables en prenant en compte les facteurs de confusion
potentiels.Conclusion
).Tableau 11.VI Présomption d’un lien entre exposition professionnelle aux pesticides et leucémies
|
Exposition
|
Populations concernées
par un excès de risque |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Pesticides (sans
distinction)
|
Agriculteurs, applicateurs, ouvriers en
industrie de production
|
+
|
+ d’après les résultats de 7 méta-analyses et d’une cohorte prospective (AHS) (2013) et de deux méta-analyses
).
Tableau 11.VII Familles et substances actives impliquées dans
les excès
de risques significatifs de
leucémies
|
Famille
Substances actives |
Populations concernées
par un excès de risque |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
Organochlorés (sans
distinction)
|
Applicateurs
|
+
|
|
Lindane
|
Applicateurs
|
+
|
|
DDT
|
Applicateurs
|
+
|
|
Heptachlore
|
Applicateurs
|
+
|
|
Chlordane + heptachlore
|
Applicateurs
|
+
|
|
Toxaphène
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Organophosphorés
| ||
|
Chlorpyrifos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Diazinon
|
Applicateurs
|
+
|
|
Fonofos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Malathion
|
Agricultrices
|
+
|
|
Terbufos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
| ||
|
S-éthyl-dipropylthiocarbamate
(EPTC)
|
Applicateurs
|
+
|
|
Mancozèbe
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Pyréthrinoïdes
| ||
|
Deltaméthrine
|
Agriculteurs
|
+ a
|
|
Chloroacétanilides
| ||
|
Alachlore
|
Ouvriers en industrie de
production
|
+
|
|
Aminophosphonate
glycine
| ||
|
Glyphosate
|
Agriculteurs
|
±
|
+ d’après les résultats d’une cohorte ou d’une
étude cas-témoins nichée ; + a d’après les
résultats de la méta-analyse de trois cohortes
d’agriculteurs (Agricoh) Données nouvelles
±
d’après les résultats suggérés pour les LAM dans une cohorte
Données nouvelles
NB : Les études de
cohortes et les études cas-témoins nichées ont été analysées
par famille et par substance active mais pas les études
cas-témoins.
Addenda
Tableau A11.I Familles et substances actives impliquées dans les
excès
de risque significatifs de LNH en
2013
|
Famille
Substances actives |
Populations concernées par un excès de
risque significatif
|
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Lindane (γHCH)
|
Applicateurs ; Agriculteurs
|
++
|
|
Éleveurs (HCH)
|
+
|
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
DDT
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Exposition professionnelle
|
+
|
|
|
Personnes exposées
|
±
|
|
|
Chlordane
|
Éleveurs
|
±
|
|
Aldrine
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
DDT + Malathion
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
Organophosphorés
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Personnes exposées
|
+
|
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
Terbufos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Diazinon
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Malathion
|
Agriculteurs
|
++
|
|
Personnes exposées
|
±
|
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
Coumaphos
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Chlorpyrifos
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Fonofos
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Carbamates/Dithiocarbamates
| ||
|
Sans distinction carbamates
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
Carbaryl
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
Carbofuran
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Carbaryl + malathion
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
Butilate
|
Applicateurs
|
+
|
|
Agriculteurs
|
±
|
|
|
Triazines
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Ouvriers en industrie de
production
|
+
|
|
|
Atrazine
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Phénoxyherbicides non
contaminés
| ||
|
2,4-D
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
|
2,4-D + malathion
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
MCPA
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
Mécoprop
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
Mécoprop + malathion
|
Exposition professionnelle
|
±
|
|
Aminophosphonate
glycine
| ||
|
Glyphosate
|
Agriculteurs
|
±
|
|
Exposition professionnelle
|
+
|
|
|
Glyphosate + malathion
|
Exposition professionnelle
|
±
|
++ d’après les résultats de plusieurs études de
cohortes ou d’au moins une étude de cohorte et deux cas-témoins
ou de plus de deux études cas-témoins
+ d’après les
résultats d’une cohorte ou d’une étude cas-témoins nichée ou de
deux études cas-témoins
± d’après les résultats d’une étude
cas-témoins
Tableau A11.II Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de LNH dans des groupes de population particulière en 2013
|
Famille
Substances actives |
Groupe de population particulière
concernée par un excès de risque
significatif
|
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs t(14 ;18), personnes avec
antécédents familiaux de cancers
hématopoïétiques
|
±
|
|
Lindane
|
Agriculteurs asthmatiques
|
±
|
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
+
|
|
|
DDT
|
Exposés asthmatiques, exposés
allergiques
|
±
|
|
Chlordane
|
Agriculteurs asthmatiques
|
±
|
|
Dieldrine
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Toxaphène
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Organophosphorés
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
| ||
|
Sans distinction carbamates
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Triazines
| ||
|
Sans distinction
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Atrazine
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
|
Cyanazine
|
Agriculteurs asthmatiques
|
±
|
|
Pyréthrinoïdes
| ||
|
Pyréthrinoïdes (sans
distinction)
|
Agriculteurs t(14 ;18)
|
±
|
+ d’après les résultats de deux études
cas-témoins
± d’après les résultats d’une étude
cas-témoins
Tableau A11.III Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de leucémies en 2013
|
Famille
Substances actives |
Populations concernées
par un excès de risque significatif |
Présomption d’un lien
|
|---|---|---|
|
Organochlorés
| ||
|
Organochlorés (sans
distinction)
|
Applicateurs
|
+
|
|
Lindane
|
Applicateurs
|
+
|
|
Heptachlore
|
Applicateurs
|
+
|
|
Chlordane + heptachlore
|
Applicateurs
|
+
|
|
Toxaphène
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Organophosphorés
| ||
|
Chlorpyrifos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Diazinon
|
Applicateurs
|
+
|
|
Fonofos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Malathion
|
Agricultrices
|
+
|
|
Terbufos
|
Applicateurs
|
+
|
|
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
| ||
|
EPTC
(S-éthyl-dipropylthiocarbamate)
|
Applicateurs
|
+
|
|
Mancozèbe
|
Agriculteurs
|
+
|
|
Chloroacétanilides
| ||
|
Alachlore
|
Ouvriers en industrie de
production
|
+
|
+ d’après les résultats d’une cohorte ou d’une
étude cas-témoins nichée
NB : Les études de cohortes et les
études cas-témoins nichées ont été analysées par famille et par
substance active mais pas les études
cas-témoins
Références
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