2009
| ANALYSE |
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Prévention des troubles émotionnels chez l’enfant et l’adolescent
). Des programmes de prévention des troubles anxieux et dépressifs à destination des enfants et adolescents commencent à être développés, principalement dans les pays anglo-saxons, où ils sont devenus un objectif prioritaire pour la santé mentale de l’enfant (Greenberg, 2001
). Ces programmes sont aujourd’hui pour la plupart en cours d’évaluation pour juger de leur impact à court, moyen et long termes et pour mieux définir les jeunes les plus à même de tirer parti de ces interventions. Après un aperçu des facteurs de risque des troubles anxieux et dépressifs du sujet jeune, nous détaillerons les programmes évalués dans la littérature scientifique en mettant l’accent sur la prévention primaire (avant la survenue du premier épisode dépressif). Nous n’aborderons pas ici la prévention du suicide, question récemment traitée dans une conférence de consensus consacrée à la « crise suicidaire », qui a mis l’accent sur la formation des médecins généralistes et des personnels paramédicaux (Fédération française de psychiatrie, 2000
).Facteurs de risque des troubles anxieux
Attachement insécure
), qui privilégie l’évaluation de la sensibilité de la réponse maternelle dans l’interprétation des patterns d’attachement. Cette situation standardisée évalue les réactions d’un enfant de 12 à 18 mois confronté à une absence brève de sa mère, à laquelle il est demandé de quitter la pièce, et les réactions de l’enfant au retour de celle-ci. Les différentes réactions des enfants permettent de les classer en trois catégories :
). L’existence d’un lien prédictif direct entre qualité de l’attachement et développement ultérieur de l’enfant (y compris pour la survenue de troubles émotionnels) reste cependant l’objet de controverses. Pour certains auteurs, la qualité de l’attachement traduirait plutôt un style d’interactions entre l’enfant et sa figure d’attachement, et dépendrait donc essentiellement des circonstances de vie du moment. La qualité de l’attachement serait ainsi liée, pour une large part, à l’origine socio-économique des familles : les enfants présentant un attachement insécure seraient surreprésentés dans les couches sociales défavorisées, en raison probablement d’un environnement trop peu stimulant, manquant de stabilité et proposant des figures d’attachement peu disponibles (Van Ijzendoorn et Kroonenberg, 1988
). Dans ces conditions, il est difficile de savoir dans quelle mesure le devenir de l’enfant est influencé par la nature des expériences relationnelles précoces avec la figure d’attachement, ou s’il témoigne simplement de la qualité de l’environnement (Lamb et coll., 1984
; Bretherton et Waters, 1985
). D’autres auteurs ont souligné le rôle des caractéristiques individuelles de l’enfant (Kagan, 1982
; Buss et Plomin, 1984
) dans le style d’attachement décrit au cours de la situation étrange. Des évaluations longitudinales confrontant plusieurs méthodes d’observation sont indiquées pour préciser les liens entre style d’attachement et vulnérabilité anxieuse.Inhibition comportementale
) à partir d’études longitudinales sur le tempérament et sa stabilité au cours de la vie. Cette dimension se manifeste par une timidité, une réserve, des réactions de retrait face aux personnes, lieux ou situations non familiers. Elle s’accompagne d’une hyperréactivité du système nerveux sympathique et possède une forte composante génétique (Kagan, 1999
). Une forte inhibition comportementale est préférentiellement retrouvée chez les enfants issus de parents ayant un trouble panique et, à un moindre degré, chez les enfants issus de parents déprimés majeurs (Rosenbaum et coll., 1988
). Plusieurs études ont montré que l’inhibition comportementale était prédictive de la survenue de troubles anxieux durant l’enfance (anxiété de séparation, hyperanxiété et troubles phobiques principalement) (Biederman et coll., 1993
; Rosenbaum et coll., 1993
). Le mécanisme par lequel l’inhibition comportementale favorise la survenue de troubles anxieux implique sans doute la présence d’autres facteurs de risque : les parents des enfants inhibés et présentant des troubles anxieux ont eux-mêmes des taux significativement plus élevés de troubles anxieux, comparativement aux parents des enfants ne présentant qu’une inhibition comportementale et aux parents des enfants ne présentant ni inhibition comportementale ni troubles anxieux (Biederman et coll., 1990
; Rosenbaum et coll., 1992
). Les travaux de Hirshfeld et coll. (1997
) suggèrent que les attitudes de surprotection et d’hypercontrôle associées à certains troubles anxieux chez les parents pourraient favoriser la stabilité de l’inhibition comportementale chez les enfants.Antécédents familiaux de troubles anxieux
; Last et coll., 1987
; Turner et coll., 1987
; Last et coll., 1991
). D’autres études mettent aussi en évidence l’association entre troubles anxieux de l’enfant et troubles dépressifs chez les parents, en particulier pour le trouble anxiété de séparation (Livingston et coll., 1985
; Turner et coll., 1987
). Si les études familiales suggèrent fortement l’existence d’une relation entre troubles anxieux de l’enfant et troubles affectifs chez les parents, elles ne résolvent en rien la question du mode de transmission, environnementale et/ou génétique. La peur « normale » et l’anxiété, sous la forme de symptômes ou de syndromes, répondent à un certain degré de contrôle génétique (ceci apparaissant particulièrement net pour le trouble panique et les troubles phobiques) (Marks, 1986
). Le poids de l’héritabilité dans les symptômes anxieux de l’enfant ne serait cependant que d’environ 40-50 % (Thapar et Mc Guffin, 1995
). C’est dire que des variables environne-mentales (événements de vie, attitudes parentales...) interviennent aussi, en interaction avec les facteurs de vulnérabilité génétiques, dans le déterminisme et l’expression clinique des troubles anxieux chez l’enfant (Leboyer et Lépine, 1988
). Par exemple, l’intensité et la fréquence des comportements d’évitement associés à certains troubles anxieux chez les parents auraient plus de valeur prédictive sur les troubles psychopathologiques rencontrés chez les enfants que le diagnostic clinique lui-même (Silverman et Nelles, 1988
).Événements de vie
; Dollinger, 1986
). Si dans la plupart des cas ces symptômes s’améliorent relativement rapidement, certaines études témoignent d’une augmentation de la fréquence des troubles anxieux chez les enfants ayant subi de tels événements (Terr, 1981
; Dollinger et coll., 1984
; Yule et Williams, 1990
). Les événements de vie dits négatifs ou stressants sont plus fréquents que les événements traumatiques cités auparavant ; il peut s’agir de la séparation ou du divorce des parents, de la maladie ou du décès d’un membre de la famille, de conflits intrafamiliaux, d’une hospitalisation, d’un déménagement ou d’un changement d’école. Le nombre de ces événements observé chez les enfants anxieux est significativement plus important que celui retrouvé chez les enfants non anxieux, suggérant que dans deux tiers des cas environ ces événements de vie pourraient être considérés comme des facteurs étiologiques possibles (Goodyer et coll., 1985
). Cependant, comme le soulignent Sandler et Ramsay (1980
), les évènements de vie en eux-mêmes ne peuvent en aucun cas résumer toute l’étiologie des troubles mentaux de l’enfant : le mécanisme par lequel un événement de vie affecte un enfant fait intervenir plusieurs facteurs, tels que la fréquence des récidives des événements de vie, l’état psychologique de l’enfant, la structure sociale et les ressources de la famille, et les capacités des parents à soutenir l’enfant, chacun de ces facteurs concourant à créer chez l’enfant une vulnérabilité particulière au stress provoqué par ces événements de vie. Dans ce contexte, plusieurs études suggèrent que l’impact des événements de vie sur le développement ultérieur de troubles anxieux chez l’enfant pourrait être influencé par les attitudes parentales. Mc Farlane (1987
), par exemple, retrouve des taux de symptômes post-traumatiques plus élevés chez les enfants ayant des mères présentant elles-mêmes un haut degré d’anxiété et ayant tendance à surprotéger leur enfant. De même, les attitudes parentales semblent jouer un rôle important dans les troubles anxieux engendrés chez l’enfant par un stress médical (hospitalisation, intervention douloureuse) (Bailly et coll., 1993
).Attitudes parentales
) montrent que les parents des enfants anxieux se différencient des autres parents dans la manière d’apprendre à leurs enfants à interpréter et à répondre aux signaux ambigus de menace. Les enfants anxieux et leurs parents perçoivent de nombreuses situations comme menaçantes. Confrontés à des problèmes sociaux ambigus, ils adoptent, plus que les autres, des stratégies d’évitement. L’analyse des interactions familiales montre que les stratégies d’évitement adoptées par les enfants sont influencées par l’attitude des parents (interprétation, réponses envisagées) face aux diverses situations qui leur sont proposées (Dadds et coll., 1996
). Dans le même ordre d’idée, des attitudes parentales de surprotection, d’hypercontrôle et de critique exagérée pourraient, directement ou en interaction avec d’autres facteurs de risque, favoriser le développement de troubles anxieux chez l’enfant (Krohne, 1992
). Ainsi, les attitudes parentales de surprotection et d’hypercontrôle pourraient interférer avec les processus d’acquisition par l’enfant de compétences sociales et de stratégies de résolution de problèmes efficaces, entraînant chez l’enfant des difficultés à faire face aux événements de vie stressants. De plus, les attitudes parentales de surprotection et d’hypercontrôle pourraient aussi entraîner chez l’enfant des doutes sur sa valeur personnelle et un manque de confiance dans ses capacités de réussite.Facteurs de risque des troubles dépressifs
Risque dépressif familial
). Des études longitudinales confirment la fréquence plus importante des troubles de l’humeur chez les enfants de déprimés uni ou bipolaires mais également un risque accru pour d’autres troubles : troubles du comportement perturbateur, troubles anxieux, abus de substances (Weissman et coll., 1992
). Dans cette population, les difficultés interpersonnelles, l’échec scolaire et une faible estime de soi sont également plus fréquents que chez les contrôles (Downey et Coyne, 1990
). Par ailleurs, d’autres troubles mentaux parentaux sont également associés à la dépression de l’enfant et de l’adolescent : c’est le cas de certains troubles anxieux (trouble panique et phobique), de l’alcoolisme, des abus de substance et des troubles des conduites (Doyen et coll., 1997
). Les mécanismes du risque dépressif familial sont complexes et associent des effets directs et indirects. Les études d’agrégation familiale, de jumeaux et d’adoption suggèrent que les troubles dépressifs ont, au moins en partie, une base génétique. Un tiers de la variance de la symptomatologie dépressive des adolescents est expliqué par des facteurs génétiques (Rende, 1993
). Cependant, la sur-représentation familiale des troubles dépressifs pourrait également être le fait de facteurs indirects : événements de vie négatifs engendrés par la psychopathologie parentale, prédisposition aux événements de vie (Goodyer, 1995
). Deux facteurs psycho-sociaux sont souvent retrouvés dans les familles où l’un des parents a un trouble de l’humeur : la discorde conjugale et l’inadaptation des pratiques éducatives (Beardslee et coll., 1993
). L’environnement familial, la psychopathologie du conjoint et l’adaptation sociale ont été analysés conjointement aux effets de la dépression récurrente à début précoce chez l’un des parents dans l’étude de Warner et coll. (1995
). Ils confirment l’augmentation du risque d’épisode dépressif majeur (EDM) chez les enfants de parents ayant une dépression récurrente (alors que dans leur échantillon, cette augmentation n’est pas mise en évidence chez les enfants de parents ayant eu un seul épisode dépressif). Un abus d’alcool chez un parent augmente également le risque d’EDM chez l’enfant, surtout si une dépression récurrente existe déjà chez l’autre parent. D’autres auteurs soulignent également l’impact délétère sur l’enfant des troubles mentaux multiples chez les parents, qui pourraient être aggravés par un isolement social (Merikangas et coll., 1988
). Par rapport aux enfants de mères ayant une maladie somatique chronique, les enfants de mères déprimées ont plus de cognitions négatives et une estime de soi plus faible.Tempérament et vulnérabilité dépressive
) ont proposé un modèle de tempérament fondé sur trois dimensions : l’émotionnalité, l’activité et la sociabilité (modèle EAS). L’émotionnalité, dimension proche du névrosisme ou trait névrotique décrit chez l’adulte, se réfère à une réactivité émotionnelle intense. Les troubles dépressifs majeurs chez les enfants d’âge scolaire ont été associés à des niveaux élevés d’émotionnalité et à des niveaux intermédiaires d’activité et de sociabilité (Goodyer et coll., 1993
). Le rôle de l’émotionnalité dans la survenue de troubles anxieux et/ou dépressifs a aussi été avancé par Rende (1993
) au terme d’une étude longitudinale chez 164 enfants de 1 à 7 ans. Des scores élevés d’émotionnalité chez les garçons et les filles ainsi que des scores bas de sociabilité chez les filles sont prédictifs de scores élevés d’anxiété et de dépression à 7 ans. L’émotionnalité de la petite enfance explique 4 % de la variance des troubles émotionnels chez les garçons et 9 % chez les filles. Plusieurs arguments existent donc pour impliquer l’existence d’une forte émotionnalité (et à un moindre degré une faible sociabilité et une forte inhibition) dans la survenue de troubles dépressifs. Cette vulnérabilité pourrait être modulée par différentes variables telles que le sexe et certains facteurs comme le support social, l’estime de soi et le contexte environnemental. Les données actuelles ne permettent pas de conclure quant aux mécanismes de causalité.Traits cognitifs, relations interpersonnelles et vulnérabilité dépressive
Schémas cognitifs dysfonctionnels
), l’existence de schémas ou attitudes cognitifs dysfonctionnels est un facteur de risque dépressif acquis au cours du développement à la faveur d’expériences négatives précoces. Ces schémas cognitifs, souvent latents, sont réactivés par de nouveaux événements traumatisants ; cette réactivation s’accompagne de cognitions négatives du moi, du monde et du futur (triade cognitive) et de « pensées automatiques » entraînant une distorsion de la réalité sous la forme d’erreurs d’interprétation et de jugement. Bien que l’existence d’attitudes cognitives dysfonctionnelles soit généralement reconnue au cours de l’état dépressif et impliquée dans l’évolution sous traitement et la fréquence des rechutes dépressives, voire dans la chronicisation des troubles, les études prospectives visant à étayer le modèle de vulnérabilité ont donné des résultats variables. Les principales limites de ces études sont la faible durée du suivi, la difficulté de réactiver des schémas cognitifs dont certains semblent latents et le problème de la catégorisation des événements de vie qui peut parfois apparaître comme arbitraire.« Résignation apprise » et désespoir
). Elle résulte du sentiment qu’il n’existe pas de solution efficace pour éliminer la source de stress. La résignation apprise se définit donc comme la résultante d’expériences répétées d’insuccès entraînant l’abandon des efforts. Dans ce modèle, le facteur de vulnérabilité dépressive consiste en l’attribution de causalité entre un événement (facteur de stress) et sa conséquence (résignation). Les relations entre facteurs de stress et dépression ont fait l’objet de différentes études qui montrent que les facteurs de stress rendent compte de 5 % à 20 % de la variance des troubles dépressifs (Robinson, 1995
). Ces données indiquent l’existence de processus plus complexes qui ont donné lieu à des reformulations successives de la théorie de la résignation apprise. Plusieurs variables susceptibles de moduler les interactions stress-détresse ont été décrites : l’estime de soi, les distorsions cognitives, l’anticipation négative de l’avenir, le style d’attribution négatif (le fait d’attribuer les événements négatifs à des facteurs internes et stables et les événements positifs à des facteurs externes) et le lieu de contrôle (degré de maîtrise que le sujet perçoit par rapport à son environnement).Estime de soi
).Relations interpersonnelles
) est prédictive de la survenue d’un trouble dépressif alors que la symptomatologie dépressive elle-même interfère avec le fonctionnement social et peut provoquer ou accentuer des réactions négatives de la part des pairs. Le manque de support social et les difficultés de communication, notamment le rejet par les pairs, interagissent également avec des facteurs cognitifs tels que l’estime de soi et le sentiment d’incompétence.Événements de vie
) a permis d’estimer que la perte de la mère avant 11 ans doublait le risque de survenue d’un trouble dépressif. La spécificité des relations entre deuil et trouble dépressif n’est pas établie puisque la vulnérabilité semble concerner des aspects divers de la psychopathologie. De plus, tous les sujets ayant vécu des pertes ou des séparations prolongées ne développent pas de troubles dépressifs. L’association de plusieurs expériences de perte ou de séparation, tout comme une vulnérabilité perçue, associée à l’événement (Patten, 1991
), auraient une meilleure valeur prédictive vis-à-vis de la survenue de troubles dépressifs au cours du développement. Plus que la perte parentale elle-même, c’est l’altération des soins parentaux consécutifs à la perte qui pourrait être en cause. Les études rétrospectives réalisées chez des sujets déprimés mettent d’ailleurs en évidence la fréquence des antécédents de dysfonctionnements dans les relations parents-enfants (Parker et coll., 1995
). Ces anomalies concernent aussi bien des attitudes de rejet et une carence d’affection que des comportements de surprotection et de vigilance anxieuse. Elles sont souvent associées à l’existence d’un trouble dépressif chez les parents et semblent responsables d’une vulnérabilité générale à la psychopathologie plutôt qu’à un risque spécifiquement dépressif (Doyen et coll., 1997
; Parker et coll., 1995
). Parmi les événements traumatiques précoces, les expériences de maltraitance sont l’objet d’une attention croissante. La fréquence des troubles dépressifs chez les enfants victimes de maltraitance physique et/ou sexuelle a été soulignée par plusieurs études ; la prévalence de troubles dépressifs est de 20 % dans cette population (Famularo et coll., 1992
). Cependant, le risque concerne aussi d’autres pathologies, telles que l’état de stress post-traumatique et les troubles des conduites (Doyen et coll., 1997
).Prévention des troubles anxieux et dépressifs de l’enfant et de l’adolescent
Prévention généralisée des troubles émotionnels de l’enfant et de l’adolescent
) sous le titre « I can do ». Ce programme, destiné aux enfants des classes primaires, vise au développement des facteurs de protection permettant de faire face aux situations stressantes. À ce titre, il intéresse la prévention des troubles anxieux et des troubles dépressifs d’une façon non spécifique. Son déroulement comporte plusieurs étapes : apprentissage des principales stratégies d’ajustement et d’adaptation (résolution de problèmes, recherche de support social, stratégies visant à augmenter les affects positifs dans les situations incontrôlables), mise en pratique des données acquises à partir des situations stressantes les plus fréquemment rencontrées chez l’enfant (séparation ou divorce des parents, perte d’une personne proche, déménagement ou changement d’école, se retrouver seul à la maison, sentiment d’être différent). Des informations sont aussi données aux enfants sur leurs possibilités d’aider ceux qui font l’expérience de telles situations. Les résultats ne retrouvent aucun changement en ce qui concerne le support social des enfants, ni dans leurs connaissances ou leurs attitudes au regard des événements de vie négatifs. Cependant, les enfants ayant participé au programme font preuve d’un plus grand sentiment d’efficacité dans leur capacité à faire face aux événements stressants et dans leur capacité à résoudre les problèmes. Ces résultats semblent se maintenir à moyen terme. Malheureusement, l’évaluation n’incluait aucune mesure des niveaux de stress et d’anxiété.
), diminution de 29 % des symptômes dépressifs, amélioration de 43 % des scores d’estime de soi (Hains et Szyjakowski, 1990
), diminution de 39 % des symptômes anxieux, (Kieselica et coll., 1994
)1
. Par définition, les actions de prévention généralisée proposent des programmes uniformes pour tous les enfants, y compris ceux qui ne sont pas à risque. Leur évaluation en termes de coûts/bénéfices est difficile à réaliser et nécessite des moyens considérables. Compte tenu de l’hétérogénéité des populations concernées et des situations rencontrées, de nombreux facteurs doivent être pris en considération dans l’analyse de leurs résultats. Seules des études à long terme portant sur de très larges échantillons peuvent apporter des renseignements valides quant à leur efficacité. L’avantage des programmes de prévention tels que le programme « I can do » est cependant qu’ils peuvent avoir un impact sur de nombreux problèmes émotionnels et comportementaux rencontrés chez les enfants.Prévention sélective des troubles anxieux
; Melamed, 1998
). Une intervention de prévention comprenant la diffusion d’un film s’est révélée efficace dans une étude contrôlée pour diminuer les symptômes anxieux d’enfants avant une opération chirurgicale (Pinto et Hollandsworth, 1989
).
).
) est un des programmes développés en vue de faciliter la transition d’une école à l’autre et de réduire les conséquences liées à l’anxiété qu’elle engendre. Ce programme, destiné aux enfants passant de l’école primaire au collège, vise à faciliter les relations entre les élèves et le personnel encadrant (enseignants, administratifs) et à créer un environnement favorable et sécurisant (petites unités, environnement stable et familier, accompagnement personnalisé). Testé dans plusieurs écoles sur des enfants d’origine sociale diverse, le programme STEP s’est révélé efficace à plusieurs niveaux : amélioration de l’estime de soi et des performances scolaires, diminution de l’absentéisme. Le programme STEP est l’un des rares exemples d’action de prévention portant essentiellement sur l’environnement de l’enfant.
).
), a fait l’objet de plusieurs études d’évaluation. Ce programme, initié à l’école, vise à prévenir les problèmes émotionnels, comportementaux et scolaires rencontrés chez les enfants de parents divorcés. Ses objectifs sont multiples : créer un environnement groupal capable d’aider l’enfant ; faciliter l’identification et l’expression des émotions et des sentiments liés au divorce des parents ; fournir à l’enfant des informations susceptibles de l’aider à comprendre le divorce de ses parents et à rectifier les erreurs de jugement ; apprendre à l’enfant des stratégies d’ajustement et d’adaptation (stratégies de résolution de problèmes) ; développer chez l’enfant une perception positive de lui-même et de sa famille. Le programme CODIP comprend douze à seize sessions, incluant des groupes de discussion, des jeux de rôle, des entraînements aux stratégies d’ajustement et d’adaptation, et des prescriptions de tâches à réaliser à la maison. Les résultats suggèrent que le programme est efficace à plusieurs niveaux : réduction de l’anxiété, diminution des sentiments de culpabilité et de honte, augmentation de la capacité à résoudre les problèmes liés au divorce des parents, diminution des problèmes comportementaux, amélioration des performances scolaires. Ces effets se maintiennent à 2 ans pour la majorité des enfants. Un autre programme de prévention a été appliqué à des enfants de parents divorcés dans le cadre d’un essai contrôlé ; il s’agit du Stress management and alcohol awareness programme (Short 1998
). Le groupe bénéficiaire montrait une diminution significative des scores d’anxiété et une diminution de la consommation de substances (25 % et 20 % respectivement par rapport au groupe contrôle).
; Vila et coll., 1999
). Cependant, de nombreuses questions persistent : Quel est le moment le plus approprié pour utiliser le debriefing (certains auteurs préconisent d’intervenir précocement, d’autres dans les 7 à 14 jours suivant l’événement traumatique) ? Est-ce que tous les enfants ayant subi un événement traumatique doivent en bénéficier ? Faut-il intervenir en groupe ou individuellement, compte tenu des différences possibles entre les enfants dans le niveau de développement et le vécu de l’expérience traumatique ? De l’avis général, si le debriefing psychologique n’est pas source de troubles iatrogènes, il ne semble pas permettre de prévenir la survenue de toute pathologie psychotraumatique. Il réduirait cependant l’intensité et la durée des états de stress post-traumatique (Vila et coll., 1999
).Prévention sélective des troubles dépressifs de l’enfant et de l’adolescent
) ont étudié l’intérêt de programmes de prévention dans des familles dont au moins un des parents avait un trouble dépressif. Ils ont comparé un programme de prévention à base cognitive et une information de deux séances d’une heure sur les troubles de l’humeur et leur retentissement familial. Bien que les deux groupes se soient déclarés satisfaits de l’aide reçue, les bénéfices en termes de diminution des symptômes et tensions familiales étaient plus importants dans le groupe ayant participé au programme cognitif. Ce programme, centré sur la parentalité et les interactions parents-enfants, vise une meilleure compréhension de l’expérience dépressive par la famille et les enfants en particulier. Il s’accompagne d’une information concernant les facteurs de vulnérabilité mais aussi de résilience associés aux troubles dépressifs et identifiables chez les enfants. Des entretiens avec le ou les enfants seuls ou en présence des parents, cherchent à prévenir les problèmes émotionnels et de comportement qui peuvent se manifester en réaction à la dépression d’un parent. En effet, l’enfant peut attribuer des interprétations erronées à une symptomatologie dépressive présente chez l’un ou l’autre de ses parents. Par exemple, l’anhédonie ou l’asthénie sont souvent comprises par l’enfant comme un rejet ou un désintérêt. L’enfant s’attribue souvent aussi la responsabilité des troubles. Les tentatives d’autonomisation peuvent également être vécues avec culpabilité. Au cours des entretiens, les parents sont encouragés à développer la résilience de leurs enfants.
) ont récemment réalisé une étude randomisée pour évaluer un programme de groupe à base cognitivo-comportementale. Quarante-cinq adolescents de 13-18 ans, non cliniquement déprimés, ont bénéficié d’un suivi médical standard associé à 15 sessions d’un programme de prévention cognitivo-comportemental. Comparés à 49 adolescents recevant seulement le suivi standard, les premiers se caractérisent par une réduction des scores de dépression à l’échelle CES-D (Center for epidemiological studies depression scale) et par une amélioration du fonctionnement global. Les analyses de suivi sur une période de 15 mois montrent que l’incidence cumulée des troubles dépressifs dans le groupe ayant bénéficié de la prévention est significativement inférieure à celle des témoins (9,3 % versus 28,8 %).
) destiné à des enfants « à risque » en milieu rural, à leurs parents et à leurs enseignants. Par rapport au groupe témoin, la réduction des symptômes dépressifs était de 38 % chez les bénéficiaires du programme.Prévention indiquée des troubles anxieux de l’enfant et de l’adolescent
). Lafreniere et Capuano (1997
) ont élaboré un programme de prévention destiné aux enfants d’âge préscolaire présentant des comportements de repli anxieux. Le programme se déroule en quatre phases : évaluation, information des parents sur les besoins de l’enfant liés à son développement, détermination d’objectifs spécifiques pour chaque famille, intervention proprement dite sur la base de onze visites à domicile. L’intervention à domicile se focalise essentiellement sur les interactions parents-enfant, les problèmes comportementaux, les compétences parentales et les systèmes de support social. Comparées à un groupe contrôle, les familles ayant bénéficié du programme montrent des résultats encourageants : diminution des comportements intrusifs et d’hypercontrôle chez les mères, participation plus active des enfants aux tâches de résolution de problèmes, amélioration des compétences sociales des enfants rapportée par les enseignants. Une diminution significative des comportements de repli anxieux était cependant notée à la fois dans le groupe contrôle et chez les enfants ayant bénéficié de l’intervention. Une évaluation à long terme s’avère indispensable pour préciser l’efficacité de ce type d’action.
) peut être considéré à la fois comme un programme d’intervention précoce et de prévention indiquée, dans la mesure où il s’adresse à des enfants remplissant les critères diagnostiques d’un trouble anxieux à un niveau très modéré et à des enfants présentant des symptômes subcliniques d’anxiété. Ce programme, utilisant des techniques cognitivo-comportementales, comprend dix séances pour les enfants et trois séances pour les parents. L’évaluation à moyen et long termes retrouve des résultats plutôt favorables : à 6 mois, un diagnostic de trouble anxieux caractérisé était retrouvé chez 27 % des enfants du groupe intervention contre 57 % dans le groupe contrôle ; à 2 ans, la différence entre les deux groupes restait significative, avec respectivement 20 % et 39 % des enfants présentant un trouble anxieux. L’analyse des résultats montre cependant que ce sont surtout les enfants qui présentaient déjà un syndrome clinique anxieux qui ont bénéficié des effets du programme. En effet, si l’on considère uniquement les enfants qui présentaient au départ des symptômes d’anxiété, les différences à long terme apparaissent moins importantes (Dadds et coll., 1997
et 1999
).Prévention indiquée des troubles dépressifs de l’enfant et de l’adolescent
) ont évalué l’effet d’une intervention de prévention (Penn optimism program) organisée en milieu scolaire et destinée à des enfants obtenant des scores élevés de dépression. Ce programme combinant l’apprentissage de techniques cognitives de résolution de problèmes et de stratégies de communication sociale était associé à une réduction significative des scores de dépression (22 % versus 44 % chez les témoins) persistant deux ans après l’intervention.
) ont étudié un programme similaire dans la perspective de prévention d’un trouble dépressif catégoriel. Après exclusion des sujets ayant un trouble de l’humeur patent, les adolescents ayant des scores élevés à la ces-d ont été randomisés en deux groupes, l’un bénéficiant du programme de prévention, l’autre étant libre de poursuivre ou d’initier une démarche de soin quelconque. Le programme, adapté d’une intervention destinée aux adolescents déprimés (Coping with stress course), a comme objectifs le développement des capacités d’ajustement au stress (ou coping) et la diminution des cognitions dépressives et des croyances irrationnelles. Les modalités comprennent 3 séances hebdomadaires pendant 5 semaines, au cours desquelles sont utilisés des débats et des jeux de rôle avec des groupes comptant 6 à 11 participants. Sur un an de suivi, l’incidence des épisodes dépressifs était réduite de moitié dans le groupe traité par rapport au groupe contrôle ; elle reste cependant deux fois plus élevée que celle de la population générale. L’intérêt, à plus long terme, de sessions de « renforcement » à un intervalle de quelques mois reste à préciser au moyen d’études à long terme.Bibliographie
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