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Med Sci (Paris). 32(4): 362–369.
doi: 10.1051/medsci/20163204014.

Radio-immunothérapie alpha
Principes et intérêts en immunité antitumorale

Jérémie Ménager,1,2,3* Jean-Baptiste Gorin,1,2,3* Nolwenn Fichou,1,2,3 Sébastien Gouard,1,2,3 Alfred Morgenstern,6 Frank Bruchertseifer,6 François Davodeau,1,2,3 Françoise Kraeber-Bodéré,1,2,3,4,5 Michel Chérel,1,2,3,4 Joëlle Gaschet,1,2,3** and Yannick Guilloux1,2,3**#

1Centre de Recherche en Cancérologie Nantes/Angers (CRCNA) - UMR 892 Inserm, 8, quai Moncousu, BP 70721, 44007Nantes Cedex 1, France
26299 CNRS, Nantes, France
3Université de Nantes, Nantes, France
4Institut de Cancérologie de l’Ouest, Saint-Herblain, France
5CHU Nantes, département de médecine nucléaire, Nantes, France
6European Commission, Joint research centre, Institute for transuranium elements, Karlsruhe, Allemagne
Corresponding author.
*Ces auteurs ont contribué de façon égale à ce travail.
**Ces auteurs ont dirigé ce travail.
 

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La radioimmunothérapie

La radioimmunothérapie (RIT) est une radiothérapie vectorisée visant à placer une source radioactive directement au contact des cellules tumorales. Cette forme de thérapie offre la possibilité de traiter des maladies disséminées, des tumeurs localisées et/ou diffuses tout en minimisant l’exposition des tissus sains aux rayonnements ionisants avec une toxicité limitée. Le concept de radiomarquage d’un vecteur dirigé contre les cellules tumorales n’est pas nouveau. Il a en effet été décrit dès le début des années 1950 [1]. La RIT utilise ainsi un vecteur immunologique, comme un anticorps monoclonal (AcM), spécifique d’un antigène présent sur la tumeur ciblée, qui est couplé à un radionucléide (ou radioisotope) (Figure 1 , partie supérieure), permettant d’obtenir un radioimmunoconjugué stable. Injecté au patient, ce composé radiopharmaceutique se fixe spécifiquement aux cellules tumorales pour les irradier. Cela permet ainsi de cibler potentiellement l’ensemble des sites tumoraux présents dans l’organisme (Figure 1 , partie inférieure).

Les effets de la RIT dépendent des propriétés physiques, des caractéristiques chimiques et du comportement biologique, non seulement du vecteur mais aussi, du radionucléide. Le choix du radionucléide repose sur des considérations pratiques (le coût, la disponibilité, le type de techniques de radiomarquage et la facilité d’utilisation), le type d’émission du radioélément, le transfert d’énergie linéique (TEL: quantité d’énergie transférée au milieu par la particule incidente, par unité de longueur de la trajectoire en keV1/μm) et la demi-vie physique du radioisotope (durée nécessaire pour que la moitié des noyaux radioactifs d’une source se soient désintégrés) [2]. Cette dernière doit être, autant que possible, en adéquation avec la pharmacocinétique du vecteur utilisé, afin de délivrer la plus grande dose possible de radioactivité à la tumeur après l’injection. Une demi-vie trop courte entraînera un nombre élevé de désintégrations avant d’atteindre la cible. À l’inverse, une demi-vie trop longue engendrera un grand nombre de désintégrations du radionucléide pendant la phase d’élimination du vecteur, rendant le radioimmunoconjugué plus toxique. La demi-vie doit également être compatible avec les applications cliniques et la prise en charge du patient. Ainsi, le temps nécessaire au transfert du radionucléide du site de production jusqu’à l’hôpital, le radiomarquage du vecteur, mais aussi les questions relatives à la radioprotection et la gestion des déchets, sont des paramètres devant être pris en compte.

En radioimmunothérapie, trois types de sources radioactives sont utilisés.

  • Les émetteurs de particules bêta (β-)
    Les particules β- sont des électrons chargés négativement dotés d’une énergie de 30 keV à 2,3 MeV. Ils ont la capacité de réaliser un long parcours dans les tissus (50 μm à 12 mm). La RIT utilisant des émetteurs β- a montré son efficacité en cancérologie, au niveau préclinique et en clinique. Elle a surtout montré son efficacité en hématologie, dans le traitement des lymphomes non hodgkiniens où elle est devenue un traitement de référence en complément de la chimiothérapie [38]. À ce jour, les deux seules applications de la radioimmunothérapie homologuées par la FDA (food and drug administration, « agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux ») utilisent des émetteurs β-. Il s’agit d’anticorps monoclonaux anti-CD20, un antigène exprimé à la surface des lymphocytes B, couplés soit à l’yttrium-90 (90Y-Ibritumomab tiuxetan, Zevalin®) soit à l’iode-131 (131I-tositumomab, Bexxar®). Ils sont utilisés dans le traitement des lymphomes non hodgkiniens. De nombreux autres essais cliniques ont déjà eu lieu et sont encore en cours pour tester l’efficacité de la RITβ dans le traitement de cancers hématologiques [911] et de cancers métastatiques [1214].
  • Les émetteurs de particules alpha (α)
    Les particules α sont chargées positivement. Elles possèdent une masse et une charge égale à un noyau d’hélium (c’est-à-dire 2 protons + 2 neutrons). L’énergie des particules α émises par désintégration radioactive est comprise entre 5 et 9 MeV pour un trajet en ligne droite dans les tissus de l’ordre de 50 à 100 μm, ce qui correspond au diamètre de plusieurs cellules [15]. À ce jour, seul un émetteur de particule alpha, le chlorure de radium-223 (Xofigo®, anciennement appelé Alpharadin®) a reçu une autorisation de mise sur le marché dans le traitement du cancer de la prostate résistant à la castration, avec métastases osseuses symptomatiques et sans métastases viscérales connues [16]. Comme nous le verrons par la suite, la RITα a cependant montré son efficacité au niveau préclinique dans des modèles immunocompétents mais son utilisation a également été testée au niveau clinique.
  • Les émetteurs d’électron Auger
    Ces particules ont une énergie faible (de quelques eV à 1 keV) et une portée limitée dans les tissus (de quelques fractions de nm jusqu’à 0,5 μm). L’énergie déposée par les électrons Auger est très localisée. Elle est délivrée dans une sphère de quelques nanomètres de diamètre autour du site de décroissance. Le ciblage final de l’émetteur doit, par conséquent, se réaliser dans un compartiment sensible de la cellule (comme le noyau dont la taille varie de 10 à 20 μm) car les électrons Auger sont hautement cytotoxiques lorsqu’ils se situent à proximité des molécules d’ADN. La RIT Auger reste à un stade de développement préclinique, essentiellement dans des modèles de xénogreffes chez des souris nude (dépourvues de système immunitaire) [17].
    Cette revue sera consacrée uniquement à la RITα ainsi qu’aux différentes caractéristiques de cette modalité thérapeutique.

La radioimmunothérapie alpha (RITα)
Radiobiologie des particules α
Le court trajet dans la matière des particules α nécessite que les radionucléides qui les émettent soient délivrés dans une zone située à proximité des cellules cancéreuses afin que l’irradiation puisse être efficace. De par leur forte densité d’ionisation, les particules α sont susceptibles de provoquer de multiples lésions très proches les unes des autres sur l’ADN les rendant difficilement réparables (Figure 2). La réparation cellulaire suite aux dommages causés par les particules α est en effet beaucoup moins efficace que pour d’autres formes de rayonnement, en raison de leur forte propension à induire des cassures double brin de l’ADN au sein d’agrégats complexes de différentes lésions au niveau de l’ADN, qui sont difficilement réparables par la cellule.

Une à trois particules α, traversant le noyau de la cellule cancéreuse, suffisent à la tuer. En comparaison, 1 000 à 5 000 particules β- sont nécessaires pour parvenir à un effet semblable [19]. L’effet cytotoxique des particules α est peu sensible à l’hypoxie, au débit de dose de l’irradiation (c’est-à-dire à l’énergie absorbée par la matière par unité de masse et de temps) et à la prolifération des cellules cibles [15].

Les rayonnements α étant des particules chargées, le dépôt d’énergie, le long de leur parcours linéaire, présente un pic de Bragg2: la majeure partie de leur énergie est en effet délivrée à la fin de leur parcours au sein du tissu.

Étant donné que le trajet des particules α représente le plus souvent de trois à cinq fois le diamètre d’une cellule cancéreuse, leur effet est particulièrement adapté pour le traitement de petits agrégats de cellules néoplasiques. Les effets directs de l’irradiation α restent donc entièrement limités à la tumeur, préservant ainsi le tissu sain environnant [20].

L’ensemble de ces caractéristiques fait de la RITα une modalité thérapeutique prometteuse pour le traitement des cancers disséminés et les maladies résiduelles par rapport aux grosses tumeurs (bulk) qui sont de taille plus importante.

Les radionucléides utilisés en RITα
Plus de 100 radioisotopes émetteurs de particules α ont été identifiés. Ce sont tous des éléments « lourds » ayant un numéro atomique supérieur à 82. Cependant, seule une petite partie d’entre eux est considérée comme étant utilisable comme agents thérapeutiques (Tableau I). Cela est, en grande partie, dû à la faible disponibilité commerciale de ces sources d’émetteurs de particules α [21], à leur demi-vie (qui ne doit être ni trop longue, ni trop courte) ou encore à la nécessité de la mise en place d’un processus chimique permettant leur couplage au vecteur immunologique. Les radionucléides émetteurs de particules α sont soit produits par un générateur, comme le bismuth-213, l’actinium-225, le radium-223, le plomb-212 et le thorium-227, soit produits en cyclotron, comme l’astate-211. La production de ces radionucléides à partir d’un générateur est un processus complexe. Elle nécessite en effet un réacteur nucléaire car ces radioisotopes sont directement ou indirectement des produits de fission de l’uranium. La production par un générateur requiert, en premier lieu, la purification en plusieurs étapes du radioisotope père issu de la fission de l’uranium afin de pouvoir obtenir, après décroissance radioactive, le radionucléide fils d’intérêt. Ainsi, l’obtention de l’actinium-225 est réalisée grâce au générateur thorium-229/actinium-225 obtenu à la suite de l’extraction du thorium-229 [22].

Essais cliniques de la radioimmunothérapie α
La première étude clinique de la RITα a été réalisée par l’équipe de Jurcic en 2002, au centre anticancéreux du Mémorial de Sloan-Kettering (New-York, États-Unis) [25]. Cette étude incluait 18 patients atteints soit de leucémie myéloïde aiguë, soit de leucémie myélomonocytaire chronique réfractaire ou ayant récidivé. Le traitement proposé consistait en l’injection par voie intraveineuse (iv) d’un anticorps anti-CD33 (sialic acid binding Ig-like lectin 3, SIGLEC3), spécifique des lignées myéloïdes, couplé au bismuth-213. Ce radioimmunoconjugué a permis un ciblage rapide, en 5 à 10 minutes, des zones leucémiques (moelle osseuse, foie et rate) et aucun autre organe n’a été irradié. Le rapport entre la dose absorbée par les sites tumoraux et le reste du corps était plus de 1 000 fois supérieur à ceux observés avec des émetteurs β- utilisés dans les mêmes conditions. Sur les 18 patients traités, 14 ont montré une réponse partielle, et aucune toxicité extramédullaire ne fut observée. Cet essai a fourni la preuve de concept pour l’utilisation de la RITα dans le traitement de cancers disséminés. Les résultats cliniques des autres études utilisant des AcM ou peptides couplés au bismuth-213 sont résumés dans le Tableau II . D’autres essais cliniques ont été réalisés en utilisant différents émetteurs α (astate-211, actinium-225, plomb-212, Tableau II ) et différents AcM ou peptides sélectionnés selon le type de cancers ciblés. Tous ces essais ont montré la faisabilité de la RITα comme thérapie anticancéreuse associée à une faible toxicité.

Radioimmunothérapie α et immunité antitumorale
Effets des rayonnements ionisants sur le système immunitaire
Jusqu’à très récemment, les effets thérapeutiques des rayonnements ionisants étaient entièrement attribués à leur activité cytotoxique directe sur les tumeurs [34]. Cependant, les données expérimentales cliniques et précliniques obtenues dans de nombreux types de cancer démontrent que la radiothérapie (RT) est également capable d’induire un effet antitumoral en dehors du champ d’irradiation de la cible. Cet effet, appelé effet abscopal, a été originellement décrit par R.J. Mole, en 1953. L’effet abscopal est un phénomène très rare en clinique. Toutefois, il a été documenté chez des patients porteurs d’une grande variété de tumeurs [35] et quelques travaux ont montré que cet effet reposait sur le développement d’une immunité antitumorale spécifique [36, 37].

D’autres effets antitumoraux indépendants de l’irradiation de la cible ont pu être caractérisés et plusieurs études ont mis en évidence les différents mécanismes par lesquels la radiothérapie stimulait le système immunitaire. Ils impliquent en particulier, le relargage d’antigènes associés aux tumeurs, la production de cytokines pro-inflammatoires, l’induction d’une mort cellulaire stimulant l’immunité ou encore un remodelage radioinduit des vaisseaux facilitant une infiltration efficace par les lymphocytes T (LT) au sein de la tumeur (Figure 3). Bien que la radiothérapie soit traditionnellement utilisée pour détruire les cellules tumorales, une partie des cellules, localisées au sein de la masse tumorale, reçoivent des doses de rayonnement trop faibles pour induire leur destruction (un phénomène qui est accentué par la présence de zones hypoxiques). Un certain nombre d’études précliniques a montré que ces faibles doses de rayonnements sont cependant capables d’induire des changements phénotypiques dans les cellules tumorales, ce qui facilite leur reconnaissance et leur destruction par le système immunitaire et les LT [38]. À la surface des cellules tumorales, les molécules qui peuvent être modifiées par de telles doses de rayonnements ionisants correspondent aux antigènes associés aux tumeurs, aux molécules de CMH-I (complexe majeur d’histocompatibilité de type I), au récepteur proapoptotique Fas (ou CD95), aux ligands de NKG2D (natural killer group 2D), un récepteur des cellules NK (natural killer) impliquées dans l’immunosurveillance des cancers en particulier, à la molécule de costimulation B7-1 (CD80), et aux molécules d’adhésion LFA-3 (CD58 ou lymphocyte function-associated antigen 3) et ICAM-1 (intercellular adhesion molecule 1) (Figure 3).

Le cas des particules alpha
Peu d’études ont investigué les conséquences biologiques directes des particules α sur les cellules tumorales. Plus rares encore sont celles qui ont analysé l’effet des rayonnements α sur l’activation du système immunitaire. Toutefois, une approche de curiethérapie3, utilisant des particules α a permis de mettre en évidence une réponse immunitaire antitumorale après l’irradiation. Le propre de cette méthode, développée pour le traitement des tumeurs solides, est d’insérer la source radioactive (le radium-224) directement au niveau de la tumeur, ce qui libère continuellement les atomes émetteurs de particules α in situ. Les analyses effectuées à la suite de ce traitement à base de rayonnements α, pour évaluer la réponse immunitaire antitumorale, ont montré: (1) une plus grande résistance à la ré-inoculation d’une même souche tumorale (c’est-à-dire: l’inhibition de la croissance tumorale), (2) une diminution des métastases pulmonaires, et (3) un effet renforcé lorsque ces radiations sont combinées avec un immunostimulant, le CpG4 [39, 40, 54] ().

(→) Voir la Synthèse de A.F. Carpentier, m/s n° 1, janvier 2005, page 73

Notre équipe a étudié les effets du bismuth-213 sur l’immunogénicité d’un modèle d’adénocarcinome colique murin (MC-38), dans la souris immunocompétente C57BL/6 [41]. L’irradiation α de cellules tumorales par le bismuth-213 permet, dans notre modèle, l’induction d’une immunité antitumorale durable et spécifique. Cette immunité anti-tumorale dépend des LT, ce qui montre la mise en place d’une réponse immunitaire adaptative efficace. Les particules α induisent une mort cellulaire immunogène (stimulant le système immunitaire) des cellules tumorales. En effet, les cellules MC-38, irradiées, sécrètent des DAMP (danger associated molecular pattern) comme la protéine de choc thermique Hsp70 et HMGB1 (high–mobility group box 1), une protéine constitutive de la chromatine qui joue un rôle dans l’inflammation, comme cela se produit dans les mécanismes de mort immunogène [42, 43]. Ces DAMP permettent, entre autre, l’activation des cellules dendritiques pour le développement de l’immunité antitumorale dépendante des cellules T, ainsi que la mise en place d’une mémoire immunitaire [41]. Cette étude démontre de nouvelles propriétés sur le mécanisme d’action des particules α ainsi que de la RITα. Elle confirme l’intérêt de l’utilisation et du développement de ces rayonnements en thérapie anticancéreuse.

Des associations thérapeutiques possibles
L’irradiation par radiothérapie externe [4446] ou par les émetteurs β- [47, 48] permet la mise en place d’une réponse immunitaire antitumorale efficace lorsque celle-ci est combinée à des stratégies vaccinales ou à un transfert adoptif de LT (ACT) spécifiques de la tumeur. Collectivement, les études que nous avons citées montrent que les rayonnements ionisants, en particulier les particules α, peuvent être utilisés pour rendre les cellules tumorales plus sensibles à la reconnaissance et à la destruction par les cellules du système immunitaire. Cette constatation est donc à la base de stratégies thérapeutiques qui associent irradiation de la tumeur et immunothérapie active ou passive. Il y a près de 40 ans, Milas et al. ont examiné la possibilité de stimuler le système immunitaire par l’administration de bactéries afin d’améliorer les effets antitumoraux de la radiothérapie [49]. En 2005, le groupe de Demaria a proposé le concept: « exploiter la RT pour aider l’immunothérapie » [50]. Malgré l’incrédulité initiale du monde médical, un nombre important d’études précliniques résumées dans la revue de Formenti et al. [51], qui combinent l’irradiation locale et l’immunothérapie, a démontré l’efficacité de ce concept de traitement combiné.

Que peut-on penser de l’utilisation des particules α en association avec d’autres stratégies thérapeutiques ? À la lumière du rôle anti-tumoral que peut générer l’irradiation par des particules α, il semble que tester des combinaisons thérapeutiques alliant RITα et diverses immunothérapies représente une voie d’investigation très intéressante. La RITα offre la possibilité de traiter des maladies disséminées ou résiduelles, tout en gardant une exposition acceptable des tissus sains aux rayonnements ionisants avec une toxicité limitée. Ainsi, par sa localisation, le myélome multiple (MM) représente un bon modèle pour étudier l’efficacité de ce type de traitement. Dans notre équipe, dans un modèle murin de MM syngénique et immunocompétent, la RITα a été réalisée. Elle a donné des résultats encourageants [52]. En effet, l’approche combinant RITα et transfert adoptif de LT spécifiques du MM, afin de potentialiser l’efficacité de ce traitement, montre que cette association permet une augmentation de la survie des souris par rapport à la RITα seule, ainsi qu’un accroissement de la survie sans rechute 200 jours après la greffe tumorale. Dans ce modèle, nous démontrons que les LT CD8+ injectés présentent une meilleure persistance, une meilleure migration mais aussi une meilleure capacité de reconnaissance des cellules tumorales à la suite d’une RITα, soulignant la synergie de ces deux stratégies sur la potentialisation de la destruction tumorale. Cette synergie est confortée par la capacité de cette thérapie combinée à induire la sécrétion des cytokines pro-inflammatoires (IL-1α et IL-2) ainsi qu’à produire une augmentation de l’infiltrat par les cellules du système immunitaire, en particulier les LT, dans les ganglions lymphatiques ([53], J. Ménager et al., travaux en cours de soumission).

De façon plus générale, les conséquences bénéfiques sur le système immunitaire de l’irradiation par des émetteurs de particules α et de la RITα, en l’occurrence au bismuth-213, permettent de nouvelles perspectives dans le traitement des cancers pour le développement de thérapies combinées utilisant la RITα couplée à l’immunothérapie active ou passive comme cela est réalisé pour la RT conventionnelle.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

 
Acknowledgments

Ce travail a été réalisé grâce à l’appui financier des projet Labex IGO (n° ANR-11- LABX-0016-01) et Labex IRON (n° ANR-11-LABX-0018-01) financés par le programme « Investissements d’Avenir » du gouvernement français, géré par l’Agence nationale de recherche française (ANR). Ce travail a également été soutenu par des subventions de La Ligue contre le cancer, et du Conseil général des Pays de la Loire « Nucléaire Pour la Santé « (NucSan). JM et J-B G sont financés par le ministère français de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. AM et FB sont financés par la Commission européenne.

 
Footnotes
1 1 keV (kiloélectronvolts) = 103 eV ; 1 MeV (megaélectonvolts) = 106 eV.
2 La Courbe de Bragg représente l’évolution de la perte d’énergie des radiations ionisantes au cours de leur trajet dans la matière. Le pic de Bragg se produit juste avant que les particules ne s’arrêtent.
3 Technique où la source radioactive scellée est placée à l’intérieur ou à proximité immédiate de la zone à traiter.
4 Les motifs CpG sont reconnus par le TLR9 (toll-like receptor 9).
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