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Med Sci (Paris). 2011 November; 27(11): 959–965.
Published online 2011 November 30. doi: 10.1051/medsci/20112711011.

Remodelage bronchique dans l’asthme
Conséquences cliniques et fonctionnelles respiratoires

Delphine Gras,1* Arnaud Bourdin,2** Pascal Chanez,3*** and Isabelle Vachier4****

1Laboratoire d’immunologie, Inserm U600, hôpital de la Conception, pavillon Cornil, 147, boulevard Baille, 13005Marseille, France
2Inserm U1046, CHU Arnaud de Villeneuve, 371, avenue Doyen G. Giraud, 34295Montpellier Cedex 5, France
3Département des maladies respiratoires, AP-HM, laboratoire d’immunologie, Inserm CNRS U600, UMR6212, Aix-Marseille université, Marseille, France
4MED BIO MED, CHU Arnaud de Villeneuve, Montpellier, France
Corresponding author.
 

L’asthme est une affection chronique très répandue chez l’enfant et l’adulte dont l’incidence continue à augmenter. Au total, environ 5 % à 8 % de la population française souffrent d’asthme. Les mécanismes physiopathologiques sont aujourd’hui mieux connus et permettent d’envisager des thérapeutiques innovantes. Ces nouveaux traitements pourront peut-être modifier l’histoire naturelle et ainsi « guérir » l’asthme. Dans cette revue, nous nous proposons de montrer comment les remaniements structuraux des voies aériennes, plus particulièrement reliés à l’épithélium, sont une caractéristique solidement étayée de cette affection. Ces remaniements contribuent à expliquer la chronicité et la sévérité de l’asthme et en particulier le déclin accéléré ainsi que la relative modification de la réversibilité de la fonction respiratoire de certains patients.

L’asthme et sa mesure clinique : la fonction respiratoire, les différents types d’inflammation, les symptômes, les exacerbations

En 2011, l’asthme est défini comme un syndrome respiratoire hétérogène, qui associe des anomalies inflammatoires et structurales de l’ensemble des voies aériennes. Sa reconnaissance clinique repose sur l’existence de symptômes peu spécifiques qui ont comme caractéristiques d’être variables et réversibles.

Les symptômes dits de brève durée sont différents d’un patient à l’autre : ils associent toux, essoufflement, sifflements, pesanteur thoracique ou expectoration et cèdent spontanément ou sous l’effet d’un traitement bronchodilatateur. On définit comme un événement « d’exacerbation » la persistance de ces symptômes au-delà d’une journée et/ou le fait qu’ils motivent une visite impromptue auprès d’un soignant. Les facteurs favorisant et déclenchant ces ­manifestations cliniques sont nombreux : par exemple le contact allergénique, les infections virales, l’ingestion d’aspirine, l’exercice physique ou le stress. Ils participent au déclenchement des symptômes en particulier en l’absence de traitement anti-inflammatoire. Symptômes et exacerbations sont donc associés à des poussées d’inflammation des bronches. Cette inflammation bronchique est reconnue avec certitude depuis les années 1990, même si l’efficacité de la corticothérapie suggérait son existence dès les années 1960.

L’hétérogénéité clinique de l’asthme est aussi associée à une hétérogénéité de cette inflammation bronchique. L’inflammation avec accumulation de polynucléaires éosinophiles est la plus fréquente et la mieux décrite [ 1]. Certains patients ont une inflammation plutôt caractérisée par des polynucléaires neutrophiles alors que d’autres ont essentiellement une inflammation avec accumulation de macrophages et peu de cellules des lignées granuleuses. En l’absence d’éosinophiles, la réponse clinique et fonctionnelle respiratoire à une corticothérapie systémique ou locale est moins favorable.

Le critère principal pour juger de l’efficacité du traitement anti-inflammatoire est la qualité du contrôle de l’asthme qui s’évalue sur les symptômes de brève durée et les exacerbations.

L’asthme est une affection qui demeure potentiellement mortelle (1000 cas mortels en France chaque année) et le suivi de cohortes de patients a confirmé l’hétérogénéité clinique ainsi que la chronicité de l’affection qui s’accompagne d’un déclin accéléré de la fonction respiratoire, source de handicap. Ces éléments ont conduit à reconsidérer la prééminence du rôle de l’inflammation bronchique et à mettre l’accent sur les anomalies structurales des voies aériennes que l’on désigne sous le terme de remodelage. Ces anomalies structurales peuvent mieux expliquer la chronicité de l’affection caractérisée par la persistance de l’hyperréactivité bronchique, le caractère partiellement réversible de l’obstruction bronchique et le déclin accéléré de la fonction respiratoire [ 2].

Il semble acquis que l’asthme sévère (voir Encadré) représente la forme clinique pour laquelle inflammation et remodelage des bronches s’intriquent. C'est sur ces mécanismes qu'il faut envisager d’agir pour mieux contrôler la maladie de ces patients et en modifier le pronostic [ 3]. Pour étudier les phénomènes du remodelage bronchique en clinique, il existe plusieurs approches [3]. Mais c’est indiscutablement l’apport de la biopsie endobronchique obtenue relativement aisément au cours d’une fibroscopie souple qui a réellement fait progresser ce domaine. Le Tableau I résume les méthodes qui permettent d’étudier le remodelage.

Définition de l’asthme sévère

L’asthme sévère représente une entité clinique caractérisée par des symptômes qui ne sont pas contrôlés malgré un traitement qualifié d’optimal (selon les recommandations internationales du GINA, global initiative against asthma, par exemple) et un suivi en service spécialisé d’au moins six mois.

L’asthme sévère nécessite une approche diagnostique cohérente :

  • réaffirmer la réalité du diagnostic d’asthme,
  • apprécier avec les moyens actuels l’observance thérapeutique de ces patients,
  • apprécier les comorbidités associées à l’asthme et évaluer les proportions dans lesquelles elles interfèrent avec le contrôle de l’asthme et l’observance thérapeutique.

Phénotypes d’asthme sévère :

  • patients avec des exacerbations fréquentes (asthme presque mortel, séjours fréquents aux urgences, séjours en réanimation, asthme soudain et grave),
  • patients dont l’obstruction bronchique est peu réversible et dont le handicap respiratoire est important (VEMS/CVL < 70 %, absence de réversibilité de plus de 12 % après β2-agonistes ou une cure courte de corticoïdes par voie générale). Ces patients reçoivent, avec ou sans succès, des doses importantes de corticostéroïdes par voie inhalée ou même des corticoïdes par voie orale (corticodépendance, corticorésistance).

VEMS : volume expiratoire maximal seconde ; CVL : capacité vitale lente.

Les lésions qui caractérisent le remodelage : description des outils utilisés, et localisation des lésions

Les diverses approches techniques sont résumées dans le Tableau I .

  • Les études autopsiques ont mis en évidence ces modifications structurales qui témoignent de la chronicité de la maladie [ 4]. Toutes ces études ont été relativement concordantes pour affirmer qu’il existe chez l’asthmatique décédé d’asthme aigu grave une augmentation globale de l’épaisseur de la paroi bronchique essentiellement liée à un dépôt excessif de molécules fibrillaires de la matrice extracellulaire, en particulier du collagène et de la fibronectine. Une hypertrophie plus qu’une hyperplasie du muscle lisse bronchique et une augmentation de la surface occupée par les glandes à mucus sont aussi constatées. Dans les situations ayant conduit à une issue fatale, une obstruction de la lumière bronchique par des bouchons de mucus est observée.
  • Les études de biopsies endobronchiques se sont attachées à vérifier ces observations et à les mettre en relation avec des caractéristiques cliniques en particulier avec le degré de contrôle et de sévérité de l’asthme [ 5]. Elles ont permis de confirmer l’existence d’anomalies persistantes, de mesurer leur évolution et leur réponse aux thérapeutiques habituelles. On notera un épaississement quantifiable de la membrane basale [ 6] dont la relation avec la sévérité de la maladie semble acquise [ 7], même si la spécificité de cette observation reste mal définie ( Figure 1 ). En effet, cet épaississement a pu être observé très tôt chez des enfants atteints d’asthme, mais également dans la BPCO (bronchopneumopathie obstructive) ou dans d’autres situations pathologiques sans nécessairement être en relation avec l’existence d’un trouble ventilatoire obstructif peu réversible. Cet épaississement de la membrane basale est un reflet de l’augmentation globale de l’épaississement de la paroi bronchique si l’on en croit les corrélations faites au cours d’études autopsiques, ou, ce qui est encore plus convaincant, in vivo grâce aux mesures obtenues en imagerie des bronches (TDM, tomodensitométrie). La possibilité de modifier l’épaisseur de cet espace sous-épithélial avec les thérapeutiques actuellement disponibles reste un sujet difficile et controversé [ 8, 9].
  • L’imagerie, surtout la TDM [ 10, 11], est un moyen séduisant pour étudier in vivo le remodelage de manière itérative et peu agressive (sauf en ce qui concerne l’irradiation qu’il convient de prendre en compte surtout chez les sujets les plus jeunes). L’harmonisation des méthodes de mesure et de quantification des manifestations du remodelage n’est pas encore acquise. L’observation d’un épaississement des parois bronchiques n’a pas encore été clairement mise en relation avec le risque clinique futur ( Figure 2 ).
  • La mesure, dans l’expectoration induite ou dans le lavage bronchoalvéolaire (LBA), de protéines impliquées dans le renouvellement de la matrice extracellulaire ou impliquées dans la synthèse des molécules de la matrice a été possible, et une relation a été observée avec des témoins structuraux du remodelage comme l’épaississement de la membrane basale sur des biopsies bronchiques [ 12]. L’implication de telles observations sur le long terme reste possible mais non totalement prouvée.
  • Il en est de même pour la mesure du monoxyde d’azote dans l’air exhalé. Le métabolisme du NO pourrait participer à la modification du pool de collagène de la matrice extracellulaire. Les sources locales de NO semblent plus liées à l’infiltrat inflammatoire essentiellement éosinophilique, mais les cellules épithéliales bronchiques en milieu inflammatoire surexpriment les NO synthases. Une surproduction de NO pourrait refléter en partie la chronicité et les remaniements structuraux des voies aériennes.

La paroi bronchique : l’épithélium, l’espace sous-épithélial et l’interaction épithélio-mésenchymateuse

Un grand nombre d’observations suggèrent que, dans l’asthme, l’épithélium des voies aériennes inférieures est anormal dans sa morphologie et sa fonction. Il est le point de départ de réponses anormales à des stimulus de l’environnement, qui interfèrent ensuite dans les relations entre l’épithélium et les structures sous-jacentes mais aussi avec les cellules immunitaires et inflammatoires de la sous-muqueuse bronchique.

En effet, l’épithélium bronchique est en permanence confronté à des stimulus inflammatoires potentiellement préjudiciables. Après une agression, des mécanismes rapides de réparation impliquant la prolifération et la différenciation de cellules progénitrices résidentes et de cellules souches sont nécessaires pour maintenir une barrière protectrice intègre. Dans l’asthme, un défaut de cette capacité de réparation épithéliale a été démontré. Les conséquences directes sont encore mal connues, mais l’impact est significatif sur la fonction respiratoire.

Des altérations de l’épithélium ont été observées de façon quasi constante dans les biopsies endobronchiques de sujets asthmatiques légers  : desquamation de l’épithélium pseudostratifié, perte des cellules ciliées et conservation seulement de quelques cellules basales reposant sur une membrane basale épaissie [ 13, 14]. À l’inverse, chez les patients asthmatiques sévères, les biopsies endobronchiques et nasales montrent l’absence de desquamation de l’épithélium de surface et la persistance de l’épaississement de l’espace sous-épithélial au contact de la membrane basale [7]. Dans l’asthme, une augmentation du dépôt des collagènes de type I, III et V, de la fibronectine et d’autres protéines de la matrice extracellulaire contribue à l’épaississement définitif de la paroi bronchique [ 15].

Les cellules épithéliales bronchiques issues d’asthmatiques sévères coexpriment de façon accrue des marqueurs de prolifération et d’activation cellulaires, suggérant que le processus de réparation de l’épithélium est anormal malgré une absence de desquamation [ 16]. Dans l’asthme sévère, le taux de prolifération de l’épithélium serait plus élevé avec une diminution d’expression de la protéine du rétinoblastome, une apoptose accrue des cellules épithéliales (diminution de l’expression de Bcl-2) et une diminution des autres formes de mort cellulaire [ 17]. Parmi les facteurs de croissance, le TGF-β (transforming growth factor) est surexprimé dans les cellules épithéliales bronchiques d’asthmatiques, ce qui est corrélé avec le nombre de fibroblastes présents sous la membrane basale et l’épaississement de celle-ci. Une augmentation d’EGF (epidermal growth factor) et des altérations de l’expression de son récepteur ont été détectées dans les zones lésées de l’épithélium. Certains auteurs suggèrent que des anomalies d’expression et/ou de fonction de l’EGF et de son récepteur favoriseraient la persistance des lésions épithéliales, en empêchant le déroulement normal du processus de réparation [ 19].

Le nombre de cellules sécrétrices de mucus est augmenté, conduisant à l’augmentation des mucines stockées dans l’épithélium et des mucines sécrétées dans l’expectoration. Les conséquences fonctionnelles de ce changement incluent la production d’expectoration et le rétrécissement des voies aériennes, ce qui conduit à des exacerbations graves de la maladie [ 18]. Une augmentation de l’expression d’endothéline 1 a également été détectée dans l’épithélium bronchique de patients asthmatiques [ 20] suggérant un effet bronchoconstricteur accru. Cette observation met en exergue l’importance des relations entre épithélium et muscle lisse bronchique dans le contexte de l’unité épithéliomésenchymateuse. Le remodelage des cellules musculaires lisses est caractérisé par une augmentation du dépôt des protéines de la matrice extracellulaire dans et autour du muscle et par une hypertrophie (augmentation de la taille) et une hyperplasie de ce muscle lisse bronchique (augmentation du nombre des cellules musculaires) [ 21].

D’autre part, les cellules épithéliales peuvent perdre leurs caractéristiques et acquérir des propriétés migratoires. Ce processus est en partie la conséquence de la formation de fibroblastes pendant la réparation bronchique. Comme l’épithélium, les cellules mésenchymateuses d’asthmatiques sont fonctionnellement anormales : les myofibroblastes sont plus nombreux et les fibroblastes sont capables de proliférer in vitro en l’absence de facteurs de croissance exogènes [ 22]. L’origine de ces cellules est hypothétique : il pourrait s’agir de cellules souches mésenchymateuses, mais aussi d’une dédifférenciation des cellules épithéliales dans le cadre d’une transition épithélio-mésenchymateuse (TEM), processus qui s’accompagne d’une reprogrammation cellulaire et a été décrit dans l’embryogenèse et l’oncogenèse. Cette TEM semble présente dans les cellules épithéliales issues de brossage bronchique chez des enfants asthmatiques et cultivées in vitro. Le TGF-β et certaines métalloprotéinases comme la MMP3, ainsi que la fibronectine, participent de façon active à la promotion de la TEM et sont impliqués dans le remodelage de l’épithélium en particulier dans l’asthme [ 23, 24].

Ces phénomènes pourraient être responsables du remodelage tissulaire qui conduirait progressivement à une perte de la réversibilité des anomalies, une fonction pulmonaire anormale et une résistance aux traitements [ 25].

Les conséquences cliniques des anomalies associées au remodelage bronchique

Les symptômes de brève durée et les exacerbations constituent les stigmates du diagnostic clinique de l’asthme et reflètent l’obstruction excessive des voies aériennes à la fois proximales et distales. Cette obstruction des bronches peut avoir plusieurs origines : (1) l’accumulation intraluminale de secrétions incluant mucus, débris cellulaires et liquides exsudés de la paroi ; (2) une augmentation de l’épaisseur de la paroi bronchique du fait de l’œdème ; (3) l’hyperplasie des cellules structurales ; et (4) l’infiltration par des cellules inflammatoires. À ces anomalies s’ajoute une bronchoconstriction active par raccourcissement des muscles lisses entourant les voies aériennes proximales. L’expectoration chronique et l’hypersécrétion lors des exacerbations sont des caractéristiques de l’asthme.

Certaines études ont montré une relation entre l’hyperréactivité bronchique et la desquamation épithéliale, cette dernière facilitant l’accès des agents délétères aux terminaisons nerveuses de la sousmuqueuse qui contrôlent cette constriction. L’épaississement de l’espace sous-épithélial, le nombre de fibroblastes et l’épaisseur de la couche musculaire lisse ont été corrélés avec l’importance de l’hyperréactivité bronchique. Cependant, aucune relation linéaire n’a été démontrée entre le volume du muscle lisse bronchique de la sous-muqueuse et le niveau d’hyperréactivité bronchique dans un groupe d’asthmatiques légers [ 26].

L’imagerie a également montré, de façon indirecte, la relation plus ou moins étroite entre la taille de la paroi bronchique et la sévérité clinique et fonctionnelle de l’asthme. La spécificité du remodelage est variable selon les études, mais sa relation avec l’obstruction bronchique persistante est constante. Cette obstruction persistante peut résulter soit d’une atteinte précoce chez un enfant dont le poumon ne peut terminer sa croissance normalement, soit d’une mauvaise réparation durable de la paroi bronchique. L’hyperréactivité bronchique et le tabagisme sont parmi les facteurs de risque de déclin accéléré de la fonction respiratoire. La nature de l’inflammation bronchique (éosinophilique ou non) pourrait participer à la persistance des anomalies de la fonction respiratoire dans l’asthme sévère. Le suivi de cohortes d’asthmatiques plaide pour une apparition précoce et irréversible de ces anomalies structurales, confirmant un phénotype particulier d’asthme sévère. La recherche d’un génotype spécifique associé n’a pas été couronnée de succès à ce jour [ 27, 28].

La constatation de telles anomalies structurales sur des biopsies d’enfants, en particulier chez les enfants asthmatiques sévères, plaide pour cette hypothèse d’un début précoce, même si on ignore totalement ce que deviendront ces manifestations anatomopathologiques de remodelage au cours du vieillissement et leurs conséquences cliniques [ 29]. Chez l’adulte, des éléments de remodelage ont été détectés chez des patients atteints de rhinites non asthmatiques au moins deux ans avant qu’ils ne développent des manifestations cliniques d’asthme. De la même façon, les signes de remodelage bronchique augmentent chez les patients qui vieillissent. La relation avec l’inflammation semble cruciale pour déclencher l’expression clinique de l’asthme. Un contact environnemental délétère semble une piste sérieuse pour dater cette révélation asymptomatique [ 30].

Les thérapeutiques actuelles et futures

Les études chez l’animal ont permis de montrer qu’il était possible de prévenir les changements structuraux induits par un test de provocation de l’asthme par l’allergène grâce à un traitement corticoïde administré par inhalation avant l’allergène. S’il est utilisé a posteriori, ce traitement est inefficace [ 31]. Comme nous l’avons vu, l’épaississement de l’espace sous-épithélial est observé très tôt chez l’enfant. Si on estime que ces changements précèdent le diagnostic clinique, les interventions thérapeutiques de type anti-inflammatoire n’interviendront peut-être jamais assez tôt pour être efficaces [2].

Les résultats des traitements par des fortes doses de CSI sont contradictoires : pour certains, elles entraînent une diminution de l’hyperactivité bronchique attribuée pour les deux tiers à une diminution du remodelage, et un tiers à la diminution de l’inflammation [ 32]. En revanche, d’autres études n’ont pas permis de conclure à un effet des CSI sur le remodelage bronchique [ 33]. Des études longitudinales menée dans des cohortes d’enfants ou d’adultes nouvellement diagnostiqués ont montré que le déclin du VEMS et l’hyperactivité bronchique étaient d’autant plus importants que l’introduction des CSI était tardive [ 34].

Les effets des traitements anti-inflammatoires actuels sur le remodelage bronchique sont limités, ce qui justifie la poursuite des recherches visant à mieux comprendre le rôle de l’impact de ce remodelage pour proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques plus efficaces. Par exemple, la thermoplastie, technique qui, par échauffement direct par voie endobronchique du muscle lisse, permet une diminution de la taille de celui-ci, représente une innovation thérapeutique pour certains patients [ 35].

Au total l’épithélium bronchique représente la cible des agressions exogènes qui déclenchent les phénomènes inflammatoires, mais il participe aussi à la pérennisation de ces processus et au remodelage de la paroi bronchique dans l’asthme. On peut donc considérer l’asthme comme une maladie chronique de l’épithélium et les actions thérapeutiques doivent cibler les altérations de ce tissu.

Conclusion

L’inflammation chronique et le remodelage des voies aériennes contribuent tous deux, par leurs interdépendance, à l’expression clinique de l’asthme. Cependant, les anomalies structurales bronchiques ont des conséquences potentielles spécifiques à l’origine des exacerbations les plus graves (bouchons muqueux), du déclin accéléré de la fonction respiratoire et de la persistance d’une obstruction bronchique. L’hétérogénéité clinique et l’interaction complexe entre cellules de structures et cellules inflammatoires expliquent que les mécanismes soient incomplètement compris ( Figure 3 ). Une meilleure connaissance de ces interactions devrait permettre d’améliorer la prise en charge clinique et de mieux comprendre l’histoire naturelle de cette maladie.

Conflit d’intérêts
Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données publiées dans cet article.
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