II. Effets des messages nutritionnels
2017
| ANALYSE |
6-
Évaluation économique des campagnes de prévention nutritionnelle avec des messages sanitaires
). La réduction de ces coûts ainsi que l’amélioration du bien-être de la population sont l’objectif des diverses politiques de prévention visant la nutrition. La difficulté majeure est d’évaluer l’efficacité de ces politiques de prévention. La nature même du fait de se nourrir est à l’origine de cette difficulté. Physiologiquement, le fait de s’alimenter a des effets à court et à long termes. À court terme, se nourrir permet de renouveler très rapidement la capacité énergétique de l’individu. Ne pas s’alimenter du tout a par ailleurs des effets relativement immédiats sur l’espérance de vie d’un individu. À long terme, la façon de s’alimenter, la composition des aliments, etc. ont des conséquences très variées qui dépendent notamment du capital génétique de l’individu, de son environnement, des interactions sociales. Les politiques publiques vécues comme ponctuelles par les individus sont ici à mettre en relation avec des conséquences à long terme d’un comportement. Les échelles temporelles ne sont pas les mêmes, rendant ainsi plus complexes les évaluations économiques. Dans ce cadre, la prévention relève d’actions successives ou cumulées qu’il est généralement difficile de dissocier, de distinguer pour l’observateur, et a fortiori pour l’évaluateur. Néanmoins, les modèles d’évaluation, les cadres théoriques, les calculs économiques, les statistiques sur de longues durées permettent, sous un certain nombre d’hypothèses, de prendre la mesure, d’une part, des coûts résultant de certains comportements et, d’autre part, des économies que permettent de réaliser certaines interventions publiques.L’efficacité économique en politique nutritionnelle2
) et Gyles et coll. (2012
), ce champ regroupe la recherche relative aux interventions et recommandations nutritionnelles étudiées à travers les outils de l’économie de la santé. Il s’agit ainsi d’aider les décideurs publics dans le choix de leurs stratégies de prévention et de promotion de styles de vie plus sains et plus durables. Ces études portent notamment sur des réflexions relatives au développement des labels nutritionnels et des allégations alimentaires, ainsi que sur leur efficacité et leur régulation.
) font état de trois types d’analyse pour l’évaluation des politiques de santé3
. La première analyse se fait dans un cadre Coût-Bénéfices (CB). Elle consiste à comparer le consentement à payer de la société pour une amélioration de santé, au coût de l’intervention. L’unité de mesure de cette comparaison est la monnaie. Cette approche repose sur le principe d’allocation de ressources en termes d’alternatives (est-ce qu’une intervention produit un meilleur bénéfice net pour la société que d’autres usages du montant engagé ?). Dans ce contexte, une intervention est jugée efficace si la société (la communauté des individus) associe un bénéfice plus important à l’amélioration de santé que le coût de l’intervention, c’est-à-dire qu’elle est prête à la prendre en charge, financièrement. La deuxième analyse se fait en termes de Coût-Efficacité (CE). Cette approche consiste à évaluer l’effet de l’intervention en termes d’amélioration de santé, par exemple en années de vie sauvées. Le coût par année de vie sauvée est évalué pour différentes interventions, et le moins élevé est jugé le plus efficace. La troisième analyse, en termes de Coût-Utilité (CU), est une extension de la deuxième. En effet, il s’agit d’une approche de type Coût-Efficacité mesurant les effets de santé (années de vie sauvées) en tenant compte des préférences individuelles entre les différents états de santé (satisfaction). Elle prend ainsi en compte la qualité de la vie dans les différents états. En effet, une personne peut, par exemple, être plus satisfaite d’une vie plus courte que de connaître de longues et lourdes prises en charge médicales. Par ailleurs, il s’agit d’une approche en termes d’optimisation consistant à chercher la meilleure amélioration possible étant donné un budget limité. Cette dernière approche nécessite un plus grand nombre d’hypothèses sur les comportements des individus.
), le coût épargné correspond à une amélioration de la santé qui réduit les dépenses de santé, et le coût-efficacité est une amélioration de la santé avec un niveau acceptable de dépenses supplémentaires. Dans ce cadre, une évaluation des gains et des pertes permet d’obtenir des informations sur les effets positifs (amélioration de la santé et/ou réduction des coûts) et négatifs (conséquences adverses sur le bien-être et/ou des coûts additionnels) des interventions nutritionnelles. Enfin, l’attention des évaluations n’est pas portée sur le montant global des interventions mais sur leur efficacité relative. L’intervention la plus efficace n’est pas forcément celle qui est la moins coûteuse en valeur absolue.Les interventions publiques
) présentent trois types d’interventions hors marché en termes de nutrition. Le premier type d’intervention consiste à modifier la composition des aliments par l’introduction de micronutriments indispensables à une santé élémentaire. Il s’agit dans ce cadre de lutter contre la malnutrition et les carences nutritionnelles à travers la diffusion de ces produits, généralement à destination de populations spécifiques, sous forme de dons et de distribution alimentaire. La deuxième famille d’interventions est celle qui nous intéresse plus spécifiquement dans ce rapport. Il s’agit des interventions sur les régimes alimentaires. Elles font la promotion d’une alimentation normale, équilibrée (campagnes d’information, d’éducation, encouragements, coaching, etc.) en vue d’améliorer la santé humaine. Enfin, la troisième intervention vise la promotion des aliments fonctionnels à travers des actions ayant comme objectifs d’améliorer la santé humaine au-delà de ce que peut fournir une alimentation normale.
). De façon large, ces interventions regroupent les campagnes d’encouragement à manger moins gras, moins salé, moins sucré, plus de fruits et légumes ; à pratiquer plus d’activité physique ; les campagnes d’encouragement à destination des entreprises à améliorer la qualité nutritionnelle de leur offre ; la réduction de l’exposition publicitaire ; les interventions sur l’étiquetage.Analyse des campagnes d’informations nutritionnelles
Campagnes de promotion des fruits et légumes
) ont analysé 10 interventions. La plupart consiste en des formations à la nutrition dans différents contextes et suivant plusieurs canaux. Deux études nous intéressent plus particulièrement : l’évaluation de la campagne multimédias « 2 fruits 5 veg » (Dixon et coll., 1998
; Australie) et celle de la campagne médias « FFFF (Fighting Fat, Fighting Fit) » (Wardle et coll., 2001
; Royaume-Uni). Les auteurs ont adopté deux approches dans leur évaluation, l’une en termes de coût-efficacité et l’autre en termes de coût-utilité à travers une modélisation économique. Dans ce cadre, la performance économique est exprimée à travers le coût par année de vie gagnée justée par la qualité (QALY : Quality Adjusted Life Year). Leurs résultats sont présentés dans le tableau 6.I
.
Tableau 6.I Analyses de campagnes d’informations nutritionnelles issues de Dalziel et Sega (2007
)
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Multi Media 2 fruits 5 veg Campaign (Australie)
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FFFF Media Campaign (Royaume-Uni)
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|---|---|---|
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Durée de l’observation
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4 ans
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6 mois
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Base de l’étude
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2 044 observations
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3 661 observations
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Coût par personne ciblée
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0,24 AU $
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308 AU $
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Résultats
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Hausse de 1,9 % de la consommation de plus de 2 fruits et 5 légumes par jour
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(1) Hausse de 33,9 % de la consommation de plus de 5 fruits et légumes par jour (2) Baisse de 6 % de personnes obèses (IMC ≥ 30)
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Ratio coût-efficacité incrémental
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12 AU $ par point de pourcentage supplémentaire
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(1) 7 500 AU $ par point de pourcentage supplémentaire (2) 16 300 AU $ par passage de obèse à non obèse
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Gain QALY par personne
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0,0048
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0,0546
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Coût-utilité par QALY
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46 AU $
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5 600 AU $
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AU$ : Dollars australiens ; QALY : Quality Adjusted Life Year
), ces deux campagnes connaissent de bonnes performances en termes de coût-utilité, c’est-à-dire que les années de vie gagnées sont relativement moins coûteuses comparées à des interventions plus ciblées analysées dans leur étude (intervention sur le lieu du travail, réunion avec diététiciens, etc.). Cependant, les auteurs soulignent que les données ne sont pas d’une grande qualité et qu’une grande incertitude voile la pertinence de ces résultats. Le problème majeur est que, bien qu’ayant des résultats plus précis, les interventions plus ciblées sont potentiellement plus coûteuses et ne sont probablement pas extensibles à la population générale. Peut-on, par exemple, raisonnablement envisager d’assurer un suivi de chaque individu par du personnel médical ?
) identifient 129 actions, très majoritairement menées dans les pays européens, et recensent 39 campagnes d’information publiques, les plus répandues étant celles faisant la promotion de la consommation de fruits et légumes. L’évaluation de ces politiques a été essentiellement conduite en termes d’impact sur la sensibilisation et la connaissance des individus ainsi que sur leur déclaration de changement de comportement. Ces évaluations sont peu robustes dans la mesure où elles ne s’appuient pas sur une mesure effective de changements de prise alimentaire ou marqueurs de santé (indice de masse corporelle, cholestérol, etc.)5
. Il y a néanmoins quelques exceptions. Capacci et Mazzocchi (2011
) proposent un modèle de demande permettant d’évaluer l’impact de la promotion de fruits et légumes au Royaume-Uni. Ils observent une augmentation de 0,3 portion de fruits et légumes par personne et par jour. Par ailleurs, cette campagne a des effets assez contrastés en fonction du revenu : + 0,4 portion dans les deux premiers quartiles et + 0,7 portion pour le troisième quartile de revenu. Elle n’a pas d’effet pour les revenus les plus élevés (le fait d’être déjà sensible aux questions nutritionnelles est généralement corrélé au niveau de revenu et d’éducation, ces individus connaissent déjà l’information diffusée et la mettent déjà en pratique). D’autres études plus anciennes montrent une hausse des prises ou des portions entre 0,2 et 0,6 par personne et par jour (Capacci et coll., 2012
). Cependant, elles ne relèvent pas d’une approche en termes de coût-efficacité.
) testent le coût-efficacité de trois politiques publiques visant à promouvoir la consommation de fruits et légumes :
.
Tableau 6.II Efficacité estimée des politiques de promotion de la consommation de fruits et légumes en France (d’après Dallongeville et coll., 2011
)
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Coût moyen par morts évitées (k euros) [IC 95 %]
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Coût moyen par années de vie sauvées (k euros) [IC 95 %]
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Variation moyenne de la consommation (g/jour) [IC 95 %]
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|---|---|---|---|
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(1) Réduction de la TVA
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1 379 [799-2 322]
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100 [57-171]
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4,8 [3,1-7,1]
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(2) Bons d’achats
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6 316 [4 015-9 663]
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474 [299-733]
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0,4 [0,2-0,6]
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(3.1) Campagne d’information (scénario pessimiste)
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369 [197-670]
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27 [14-49]
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0,4 [0,2-0,6]
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(3.2) Campagne d’information (scénario optimiste)
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37 [20-67]
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3 [1-5]
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4,0 [2,2-6,4]
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). Il est cependant modeste en termes de consommation et de gain pour la santé. En effet, dans les meilleurs des cas, la hausse de consommation est entre 4 et 5 grammes par personne et par jour (à peine une tomate cerise). Notons néanmoins que la version optimiste de la campagne d’information produit les mêmes effets à ce sujet qu’une réduction de la TVA. Parmi les politiques d’intervention sur le marché, celle ne ciblant pas une population spécifique (réduction de la TVA) connaît une efficacité plus grande, des coûts plus faibles par gain de santé (sachant que le budget alloué aux deux politiques est le même, soit 465 millions d’euros). Ainsi, les bons d’achat destinés aux ménages les plus pauvres sauveraient moins de personnes. En termes de coût-efficacité, les campagnes d’informations sont intéressantes, mais cela cache que derrière une dépense moindre (10 millions d’euros) elles évitent beaucoup moins de morts ou ne sauvent pas beaucoup d’années de vie, par rapport aux autres campagnes. De plus, rien ne laisse penser qu’une hausse de cette dépense aurait un effet linéaire. En effet, Dallongeville et coll. (2011
) soulignent que la réaction des consommateurs n’est pas linéaire à la dépense de communication en raison de seuils de saturation à l’information.
) ont conduit une autre simulation des politiques de communication en faveur de la consommation des fruits et légumes, paramétrée à partir d’une expérience de laboratoire et non sur des données de consommation. Dans le protocole expérimental, 271 sujets (adultes non étudiants) sont exposés à 3 séquences de 90 secondes de la série animée « Les Simpsons » entrecoupées de publicités selon 6 traitements différents :Campagnes de réduction de la consommation de gras, de sel et de sucre
) identifient 36 études en langue anglaise ayant conduit des évaluations économiques d’interventions visant à améliorer des habitudes nutritionnelles, notamment à travers la promotion de régimes faibles en graisses. Parmi celles-ci, trois font état d’interventions sous forme de campagnes d’information en direction de la population générale (Wootan et coll., 2005
; Magnus et coll., 2009
; Ha et Chisholm, 2011
) et quatre évaluent, à travers des modélisations, l’impact de politiques d’interventions économiques en les comparant à des campagnes d’information (Gray et coll., 2006
; Smith-Spangler et coll., 2010
; Dallongeville et coll., 2011
6
; Sacks et coll., 2011
) (tableau 6.III
). Les autres études font état d’interventions s’appuyant sur des conseils nutritionnels donnés directement par des diététiciens ou via divers outils de communication ciblés (n = 24), et d’analyses sous formes de modèles des effets potentiels d’une amélioration de l’alimentation mais sans spécification de la politique mise en place pour atteindre cette amélioration (n = 5).
Tableau 6.III Analyses de campagnes d’informations nutritionnelles issues de Fattore et coll. (2014
)
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Référence
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Contexte
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Intervention
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Type d’évaluation
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Résultat économique
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|---|---|---|---|---|
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Population générale Vietnam
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Campagnes mass media pour réduire la consommation de sel
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Coût-utilité
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USD 118 par DALY évitées
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Enfants, 5-14 ans Australie
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Retrait des publicités pour les aliments et boissons à la télévision durant les pics de visionnage par les enfants
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Coût-utilité
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Ratio coût-efficacité incrémental : AUD 3,70 par DALY
DALYs sauvées : 37 000
Coût évité : AUD
300 millions
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Population générale Virginie Occidentale, États-Unis
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Campagne de mass media « 1 % or less » (promotion du lait réduit en matières grasses) : (1) publicité, (2) relations presse, (3) programmes d’éducation basés sur les communautés
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Coût-efficacité
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Campagne la plus efficace (1+2) : USD 0,57 par personne changeant de comportement La moins efficace (2+3) : USD 11,85 par personne
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Population générale Canada
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(1) Affichage obligatoire des acides gras trans sur l’alimentation vs. (2) affichage volontaire ou (3) interdiction au-dessus de 2 %
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Coût-bénéfice
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Ratio coût-bénéfice : (1) vs. (2) : 17,6 ; (3) vs. (1) : 24,7
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Population adulte Australie
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Affichage de « feux » nutritionnels vs. taxe sur la « junk food »
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Coût-efficacité et coût-utilité
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45 100 vs.
559 000 DALYs évitées Coût brut par DALY évitées : 1 800 vs. 30 81 vs. 18 millions AUD dépensés
455 vs. 5 550 millions AUD économisés Les 2 politiques sont dominantes.
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Adultes de 40 à 85 ans États-Unis
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Deux stratégies de réduction du sel : (1) collaboration État-Industrie, (2) taxe sodium
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Coût-utilité et coût-bénéfice
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2,1 vs. 1,3 million QALYs sauvées, USD 32,1 vs. 22,4 milliards de coûts médicaux évités
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AUD : Dollars Australiens ; DALY : Disability-Adjusted Life Years (années de vie en invalidité ajustée) ; QALY : Quality-Adjusted Life Years (années de vie en bonne santé ajustée) ; USD : Dollars Américains (États-Unis).
; Sacks et coll., 2011
), mais la collaboration entre l’État et l’industrie serait plus pertinente qu’une taxe (sel ; Smith-Spangler et coll., 2010
). Parmi les interventions générales de prévention, certaines apparaissent plus efficaces que d’autres (coûts par changement de comportement ou par années de vie en mauvaise santé évitées moindres), mais il reste délicat de les comparer tant elles portent sur des éléments hétérogènes. Néanmoins, il semble que l’association de publicités à une campagne de relations presse (communication spécialisée) pour favoriser la consommation de lait allégé en matières grasses aux États-Unis (Wootan et coll., 2005
), ainsi que le retrait des publicités lors des émissions télévisées pour enfants en Australie (Magnus et coll., 2009
) soient relativement peu coûteux (plus efficaces économiquement). Cependant, il apparaît que l’association de relations presse à un programme d’éducation pour favoriser la consommation de lait réduit en matières grasses aux États-Unis (Wootan et coll., 2005
), ainsi que la campagne de réduction de la consommation de sel au Vietnam (Ha et Chisholm, 2011
) soient relativement peu efficaces économiquement.
) soulignent que si les efforts consentis par les entreprises engagées volontairement dans cette démarche sont significatifs, leur impact global est limité par le taux de couverture du marché de ces entreprises. Entre 2008 et 2015, 37 entreprises ou groupes d’entreprises se sont engagées dans cette démarche. Si certaines sont leaders sur leur marché, elles n’en couvrent pas la totalité. Les auteurs notent cependant une baisse de 1 % des apports journaliers de sel et de 0,5 % des apports journaliers d’énergie (Oqali, 2012
). Par ailleurs, cette intervention ne semble pas reproduire les inégalités connues dans d’autres politiques (taxes, bons de réductions, entre autres) : les ménages les plus pauvres bénéficient également de cette amélioration de la qualité de l’offre alimentaire.
; Matthes et Naderer, 2015
). Magnus et coll. (2009
) évaluent à travers un exercice de modélisation l’impact sur l’obésité des enfants d’une réduction des publicités pour les produits denses en énergie à la télévision, durant les horaires où sont diffusées des émissions pour enfants (matin et après-midi). Dans ce cadre, l’évaluation montre un coût de 3,70 dollars australiens par DALY (années de vie en invalidité ajustée) évitées pour 37 000 de ces années. Cette politique est alors considérée comme dominante en termes d’efficacité, en raison du gain de santé et des coûts évités. Ceci étant dit, si nous incluons la perte de revenus publicitaires et la réduction de la vente des produits ciblés (sans substitution), le coût par DALY est de 50 000 dollars australiens. Les auteurs analysent par ailleurs les conséquences sociétales de telles décisions et soulignent les résistances potentielles tant au niveau politique qu’économique.
) recensent 3 études mettant en évidence l’impact des interventions de régulation des publicités. Elles ne proposent pas d’évaluation de l’efficacité économique de ces cadres réglementaires, mais une mesure de leur impact sur les comportements. Dans leur étude, Dhar et Baylis (2011
) comparent l’effet de l’interdiction des publicités à destination des enfants au Québec à partir de 1980 à son absence dans l’État de l’Ontario au Canada. En se basant sur des données d’enquêtes recueillies entre 1984 et 1992, ils montrent que la probabilité d’acheter des aliments de restauration rapide a diminué entre 7,1 % et 9,3 %. Soit une réduction annuelle de 11 à 22 millions de repas imputables à cette réglementation. Dans le contexte du Royaume-Uni, l’Ofcom
7
(2010
) montre que suite à l’interdiction de la publicité pour les enfants mise en place en 2008, l’exposition à des publicités pour des aliments mauvais pour la santé a été réduite de 52 % pour les enfants de 4 à 9 ans, et de 22 % pour les enfants de 10 à 15 ans. Cependant, la mesure faite par Adams et coll. (2012
) n’identifie pas de différence dans le volume global des publicités pour des aliments mauvais pour la santé entre une semaine type 6 mois avant l’interdiction et une semaine type 6 mois après l’interdiction. Selon ces auteurs, l’interdiction est trop restrictive en termes de programmes concernés. En France, le ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports (2008
) rapporte les résultats d’une enquête sur les comportements alimentaires suite à la réglementation sur les publicités mise en place en 2004. Parmi les enfants de moins de 15 ans, 21 % déclarent avoir changé leurs habitudes de consommations alimentaires et 17 % avoir modifié leurs habitudes d’achats alimentaires.Conclusion
) identifient trois limites aux travaux d’évaluation économique des interventions nutritionnelles. La première est le manque d’homogénéité dans les méthodes mises en œuvre, réduisant la possibilité de comparaison entre les études. La deuxième souligne l’absence d’homogénéité dans les items (maladies, vies sauvées, etc.) observés. Enfin, d’un point de vue plus épistémologique, ces auteurs identifient un manque de vision commune sur la façon de conduire des études économiques dans ce domaine.
) concluent leur travail en soulignant le manque d’études sur les interventions nutritionnelles alors que les gains en termes de santé sont potentiellement très importants. Selon eux, il est difficile de concevoir des politiques d’interventions basées sur des faits avec aussi peu d’évidences empiriques. En plus des éléments scientifiques, les décideurs publics doivent connaître les bénéfices sur la santé à court et long terme des interventions, les effets pervers possibles, et les coûts pour les individus et institutions publiques. En effet, « sans cela, la politique mise en place ne sera que provisoire et sera rapidement dépassée par les intérêts privés et les perceptions biaisées »8
. Selon ces auteurs, quatre raisons expliquent que les outils de l’évaluation économique adaptés pour les soins et prises en charge médicaux ne le sont pas nécessairement pour les interventions nutritionnelles :Références
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