Handicap
Éducation inclusive : peut mieux faire !

Partout en Europe, le principe de l’éducation inclusive, qui prône le droit pour tout enfant à une scolarisation en milieu ordinaire, a été largement adopté. Toutefois, des inégalités subsistent en fonction des régions, de la nature et de la sévérité du handicap.

En 2011-2012, la France comptait 210 400 élèves handicapés scolarisés en établissement ordinaire, contre 155 400 en 2005, année de l’adoption de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette progression doit beaucoup aux bénéfices reconnus de l’éducation inclusive pour les jeunes présentant un handicap. Fondé sur le droit de tout enfant, quelle que soit sa situation et son handicap, d’être scolarisé en milieu ordinaire et d’avoir accès à une éducation de qualité, ce principe est défini par la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, publiée en 2006 et signée, à ce jour, par plus de 150 pays.
Mais comment l’inclusion est-elle appliquée aujourd’hui à travers l’Europe ? Quels en sont les facteurs déterminants ? Et quelles sont les limites de sa mise en œuvre ? Pour répondre, Mariane SentenacMariane Sentenac
UMR 1027 Inserm - Université de Toulouse III, équipe Épidémiologie périnatale, handicap de l’enfant, santé des adolescents
et ses collaborateurs ont analysé les données de l’enquête européenne SPARCLE (Study of Participation of Children with Cerebral Palsy Living in Europe), sur la scolarisation d’enfants handicapés, âgés de huit à douze ans, résidant dans neuf régions d’Europe1 , dans lesquelles une politique nationale en faveur de l’école inclusive est affirmée.
Premier constat : la sévérité du handicap (déficience motrice, quotient intellectuel, épilepsie, troubles de la communication) et l’âge de l’enfant restent des facteurs qui déterminent l’école dans laquelle il est scolarisé. En l’occurrence, les enfants souffrant de troubles intellectuels ou ayant des déficiences sensorielles (surdité, cécité) continuent à aller dans des écoles spécialisées, quel que soit le pays. Plusieurs obstacles empêchent encore la scolarisation en milieu ordinaire des jeunes handicapés moteurs, notamment le manque d’assistance et l’insuffisance des infrastructures au sein des établissements. En France, la loi du 11 février 2005 impose qu’à partir du 1er janvier 2015 tous les établissements recevant du public soient accessibles aux personnes handicapées et à mobilité réduite.
Toutefois, les barrières ne sont pas uniquement physiques. Les enfants avec un handicap intellectuel sont en général moins bien acceptés socialement et souffrent d’attitudes négatives et de brimades de la part de leurs camarades.
Par ailleurs, selon la région dans laquelle ils vivent, deux jeunes qui présentent un même handicap n’ont pas les mêmes chances d’être scolarisés en milieu ordinaire. Il existe, en effet, des différences significatives dans l’application des politiques d’inclusion. « L’adoption d’une loi au niveau national, c’est un premier pas et c’est très bien, mais sa mise en œuvre au niveau local est souvent plus complexe », nous confie Mariane Sentenac.
Enfin, lorsque la situation, ou l’état de santé, de l’élève est incompatible avec les exigences d’une classe ordinaire, la scolarisation peut se dérouler dans une classe dite « pour l’inclusion scolaire » (CLIS en primaire, ULIS en secondaire) au sein d’un établissement classique. Les enfants y sont encadrés par un enseignant spécialisé et reçoivent un enseignement adapté à leurs besoins, tout en ayant des interactions quotidiennes avec les autres élèves de l’école. Mais là aussi les inégalités persistent. La mise en place de ces structures varie entre les pays mais également au sein d’un même pays.
Malgré les progrès, le principe d’éducation inclusive se confronte à la réalité du terrain. Et il reste encore du travail à faire pour que les institutions scolaires offrent l’égalité des chances aux jeunes. « L’objectif est avant tout d’assurer une scolarisation de qualité à tous, en essayant de réduire les obstacles dans l’environnement pour permettre une pleine participation de l’ensemble des élèves dans notre société », souligne Mariane Sentenac. 

Natacha Bitton