La prévalence de la trisomie 21 est identique dans les différentes ethnies et quel que soit le statut socio-économique des populations. Dans de nombreux pays, et depuis plusieurs décennies, un suivi de la grossesse est assuré par échographie et dosage des marqueurs sériques. En cas de prévision de risque augmenté, soit en raison de l’âge de la mère (> à 38 ans), d’anomalies échographiques, ou de modifications des marqueurs sériques, une amniocentèse, ou parfois, de façon plus précoce, un prélèvement de villosités choriales est proposé afin de réaliser le caryotype de l’enfant à naître. En cas de trisomie 21 avérée par l’établissement du caryotype dans le liquide amniotique ou les villosités, et après entretien avec la future mère ou le couple, la décision d’interrompre la grossesse peut être envisagée.
Le CCNE (Comité consultatif national d’éthique des sciences de la vie et de la santé) a récemment insisté sur le fait que l’interruption de grossesse ne constituait à ses yeux qu’une option et devait donner lieu au choix individuel de chaque femme.
En France, en raison du suivi échographique (en particulier par la mesure de l’épaisseur ou de la clarté nucale) et grâce aux dosages sériques, 80 % des fÅ“tus trisomiques 21 devraient être dépistés.
L’équipe de Babak Khoshnood (Inserm U149) avait étudié l’impact de ce suivi prénatal, pris en charge par la sécurité sociale, dans la population française de 1981 à 2000 [ 1]. Elle avait aussi déjà réalisé une analyse comparative sur les différences ethniques [ 2], ainsi que sur les barrières socio-économiques intervenant dans les décisions de diagnostic prénatal [ 3].
Dans le nouveau travail qui vient d’être publié, cette équipe a recueilli les données du registre parisien des malformations congénitales incluant 1 433 cas de trisomie 21 sur la période 1983-2002 [ 4]. Ce registre se conforme à la méthodologie d’EUROCAT (European Network of Registries for Congenital Malformations).
Les chercheurs ont tenté de recenser la situation socio-économique des femmes en se basant sur leur profession et leur origine géographique. Toutefois, l’interdiction en France, depuis 1978, contrôlée par la CNIL (commission informatique et liberté), de recueillir l’origine ethnique et les croyances religieuses des personnes, rend difficile l’identification de certains groupes ethniques parmi les populations immigrées ou sans papiers1. Les catégories établies par l’INSEE ont été utilisées (Tableau I) ainsi que les origines géographiques classées en : France, Afrique de Nord, Afrique, autres. Un groupe témoin de 4 500 femmes a été sélectionné parmi des femmes enceintes ayant des grossesses avec anomalies isolées (en excluant certaines malformations dont la prévalence est modifiée par la situation socio-économique, comme les anomalies du tube neural entre autres). Les renseignements concernant la profession et l’origine géographique n’ont pu être obtenus, respectivement, pour 7,4 % et 3,7 % des femmes : celles-ci ont été exclues de l’étude. Dans 5 cas de naissance d’enfant avec trisomie 21, les renseignements concernant le diagnostic prénatal étaient absents, et dans 24 cas (2,4 %) où le diagnostic prénatal de trisomie 21 avait été posé, aucun renseignement sur la suite donnée à la grossesse n’a pu être trouvé : ces cas ont aussi été exclus de l’étude. Enfin, en raison de l’âge plus tardif des grossesses chez les femmes ayant des professions élevées, des ajustements ont dû être faits dans les analyses statistiques (Tableau II).
Tableau I. |
Tableau II. |
Toutes ces femmes ont été suivies dans des maternités de la ville de Paris et résidant à Paris et dans la Petite Couronne (départements 75, 92, 93 et 94), donc des communes immédiatement limitrophes de Paris, comme Saint-Denis ou Neuilly-sur-Seine. Ce choix, correspondant à des populations très « contrastées » au niveau socioculturel, permet d’étudier un ensemble très divers.