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Med Sci (Paris). 2004 June; 20(6-7): 615.
Published online 2004 June 15. doi: 10.1051/medsci/2004206-7615.

Canicule

Michel Garbarz*

Revue médecine/sciences, Faculté de médecine Xavier Bichat, Inserm U. 426, 16, rue Henri Huchard, BP416, 75870 Paris Cedex 18, France
Corresponding author.

MeSH keywords: Phénomènes astronomiques, Astronomie, Climat, - traduction non trouvée, Température chaude

 

Si la canicule, du latin canicula, « petite chienne », est le nom donné à la période de très grande chaleur de l’été, elle désigne également l’étoile Sirius (du grec serios, « le brûlant »), également appelée Stella Canicula, Étoile du Chien, Alpha du Grand Chien, ou le Chien d’Orion. Sirius est l’étoile la plus lumineuse de notre ciel et l’une des plus « proches » de la terre, à tout de même 8,6 années-lumière. C’est une étoile double, sa compagne étant Sirius B, une naine blanche extrêmement dense qui tourne autour de Sirius A en 50,09 ans. L’existence d’un second compagnon, Sirius C, est suspectée.

Sirius a toujours fasciné les astronomes. Durant l’Antiquité, les Égyptiens avaient ainsi remarqué que, durant l’été, les fortes chaleurs commençaient généralement lorsque Sirius et le soleil se levaient et se couchaient en même temps (période du 24 juillet au 24 août), d’où le nom de canicule attribué à la vague de chaleur survenant chaque année à pareille époque.

Des observations faites dans l’antiquité semblent indiquer que Sirius était rouge, alors qu’elle est de nos jours une superbe étoile blanche. Une des hypothèses avancées pour expliquer ce changement de couleur est la circulation d’un mini-nuage interstellaire entre Sirius et le soleil qui aurait altéré la couleur naturelle de l’étoile.

Même si « Sirius » (pseudonyme d’Hubert Beuve-Méry) a fondé Le Monde, point n’est besoin d’attribuer à Canicule une quelconque influence sur les températures terrestres, ni sur la vague de chaleur qui a sévi en Europe durant l’été 2003. On ignore pourquoi la canicule de l’été 2003 a été si longue et intense, alors que l’Europe connaissait une configuration météorologique assez classique en cette fin du mois de juillet. L’anticyclone des Açores s’étant installé au dessus de l’Europe occidentale, la France connaissait un beau temps estival. Mais, à partir du 31 juillet, une masse d’air très chaud et très sec en provenance du sud a enveloppé notre pays, agissant comme une couverture et empêchant les basses couches de se refroidir. Habituellement, ce blocage ne dure que quelques jours ; pourquoi le phénomène a-t-il duré plus longtemps que d’habitude ? Un déplacement marqué de l’équateur météorologique a été évoqué.

La fréquence de tels événements ira-t-elle en s’accélérant ? Depuis les années 70, il y a eu en moyenne plus de quinze jours supplémentaires où la température a dépassé 25 °C, et il semble, plus généralement, que le climat européen au début du xxie siècle soit plus chaud qu’au cours des cinq siècles précédents. Les épisodes de fortes chaleurs sont donc effectivement en augmentation, et aucun scientifique ne conteste le réchauffement global de la planète : depuis le début des relevés météorologiques, en 1860, la température moyenne s’est élevée de 0, 6°C sur l’ensemble du globe, et même de 1 °C en France. Un réchauffement qui semble aujourd’hui s’accélérer, mais jusqu’où ? Selon les modèles retenus, et en fonction notamment des taux de gaz à effet de serre rejetés, les climatologues prévoient une augmentation des températures de 1,5 °C à 6 °C d’ici 2100, avec des conséquences non négligeables sur les équilibres climatiques mondiaux. La canicule d’août 2003 sera-t-elle la première d’une longue série ? Les modèles actuels ne permettent pas de le prévoir, et nous devons nous préparer à y faire face, chaque année, au nom du principe de précaution.