2013


ANALYSE

5-

Scolarisation

L’individualisation et la contractualisation de politiques publiques ambitionnant le développement du capital humain ont fait de l’éducation un vecteur de protection sociale au même titre que la santé (Ebersold, 2009renvoi vers). Selon cette perspective, l’accès à l’éducation permet d’acquérir des connaissances et des savoirs essentiels au développement personnel, d’être armé professionnellement et de se prémunir contre les fragilités liées au fonctionnement du marché du travail, telles que le chômage, la précarisation du travail ou le morcellement des temps de travail (OCDE, 2003renvoi vers, 2006renvoi vers et 2007renvoi vers ; Metzger et coll., 2004renvoi vers ; Noonan et coll., 2004renvoi vers). En permettant un partage d’activité et d’expérience, l’accès à l’éducation permet de battre en brèche les préjugés entourant les personnes présentant une déficience, renforce ainsi leurs chances d’inclusion dans la société et contribue à ce qu’elles ne résument pas leur vision d’elles-mêmes à la seule déficience (Kennedy, 1997renvoi vers ; Farrell, 2000renvoi vers). L’éducation est d’ailleurs un droit reconnu par la Convention des Nations Unies pour les droits des personnes handicapées, à toute personne handicapée, indépendamment de sa déficience et de la sévérité de celle-ci, et les personnes présentant un handicap rare1 ne sauraient en être exclues. L’accès à ce droit se pose toutefois dans des termes particuliers pour ces enfants qui se singularisent par un taux de prévalence de la déficience de 1 cas pour 10 000, des combinaisons de déficiences rares dont l’impact d’un point de vue éducatif et social est complexe et qui requièrent des expertises rares en termes de diagnostic, d’évaluation fonctionnelle et d’élaboration de projets d’accompagnement. Il convient à cet égard de s’interroger sur les conditions sous-jacentes à l’accès à l’éducation de ces enfants telles qu’elles apparaissent à l’analyse d’un corpus d’articles relatifs à l’éducation d’enfants présentant un handicap rare sélectionnés par l’Inserm dans le cadre de cette expertise. Par manque de littérature sur la question en France en la matière, ces articles renvoient dans leur grande majorité à des systèmes éducatifs distincts du système français, ce qui n’est pas sans importance dans la manière de penser l’éducation et la scolarisation des intéressés, le rôle et la place des familles dans le processus éducatif, mais aussi la mission de l’école ainsi que la fonction des enseignants. Par ailleurs, les articles renvoient moins à l’éducation d’enfants ayant un handicap rare, cette notion n’existant pas à l’étranger, qu’à celle d’enfants présentant le plus souvent une surdicécité, ou qui combinent des déficiences rares pouvant inclure des troubles cognitifs parfois décrits comme profonds ou, plus rarement, qui présentent des troubles envahissants du développement. Ces articles par ailleurs ne spécifient pas toujours le lieu d’éducation des enfants et il n’est pas toujours aisé de savoir s’il prend la forme d’une scolarisation individuelle ou collective ou s’il s’agit d’une inscription dans des établissements spécialisés.
Aussi, ce chapitre porte-t-il sur la concrétisation du droit à l’éducation2 pour les enfants associant plusieurs déficiences et sur ses implications pour les systèmes éducatifs, pour les enseignants et, plus généralement, l’ensemble des acteurs concernés. Il décrit dans un premier temps certains principes qui régissent ce droit ainsi que ses déclinaisons que suggèrent certaines données statistiques existant dans les pays de l’Union Européenne. Il relie dans un second temps cette concrétisation aux facteurs favorisant ou entravant l’accessibilisation de l’environnement éducatif et, plus généralement, l’avènement de systèmes inclusifs d’éducation plaçant tout élève à égalité de chances en termes d’accès, de réussite et de devenir. Il le rapporte en troisième lieu aux postures professionnelles qu’adoptent les acteurs du système éducatif, aux pratiques pédagogiques qu’elles supposent, et aux barrières qui s’y opposent.

Un droit à l’éducation synonyme de scolarisation

Un droit à l’éducation fondé sur la scolarisabilité de tout enfant

L’article 24 de la convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées reconnait aux personnes handicapées le droit d’être incluses « dans le système éducatif et d’accéder à une éducation dans l’enseignement primaire gratuit et l’enseignement secondaire » (ONU, 2006renvoi vers). Aux États-Unis, l’éducation des élèves présentant une déficience doit se faire prioritairement en milieu ordinaire et les établissements scolaires sont tenus de leur délivrer une éducation appropriée à leurs besoins et de les inclure dans les diverses formes d’évaluation que leur impose notamment le No child left behind act (2001). En France, la scolarisation des élèves présentant une déficience est une obligation et ceci indépendamment de la déficience des élèves, il revient à ce titre au système éducatif de garantir la continuité des parcours scolaires. En Norvège, les établissements scolaires sont tenus de créer des environnements éducatifs, sociaux et physiques accessibles à tout élève, y compris celles et ceux présentant une déficience. Aux Pays-Bas, les établissements scolaires n’ont plus le droit de refuser la scolarisation d’un enfant en raison de la sévérité de sa déficience (Tadema et coll., 2008renvoi vers). L’Unesco précise à cet égard que la scolarisation en milieu ordinaire doit être privilégiée, y compris pour celles et ceux inscrits dans des établissements spécialisés qui devraient pouvoir, autant que faire se peut, être scolarisés à temps partiel (Unesco, 1994renvoi vers).
L’éducation des personnes présentant une déficience n’est pas une préoccupation récente (Stiker, 1982renvoi vers ; Ebersold, 1997renvoi vers ; Chauvière et Plaisance, 2000renvoi vers). La reconnaissance d’un droit à l’éducation corrélé à la scolarisation en milieu ordinaire innove toutefois car cela sous-entend que les personnes handicapées sont des sujets de droits que l’on ne peut pas résumer à leurs besoins et que tout enfant, indépendamment de sa déficience et/ou de son degré de gravité, doit pouvoir partager son quotidien avec ses pairs non handicapés. Une enquête réalisée aux États-Unis montre à cet égard que près de la moitié des parents ayant un enfant présentant une surdicécité souhaitaient que leur enfant soit scolarisé en milieu ordinaire (Romer et coll., 1998renvoi vers). Ce partage leur permet de nouer des liens avec leurs pairs non handicapés, de s’inscrire dans un réseau social essentiel au bien-être physique et psychique de tout individu et d’accéder aux formes de reconnaissance essentielles à l’autodétermination (Romer et coll., 1998renvoi vers ; Anastasiou et coll., 2011renvoi vers). Il optimise par exemple l’engagement de l’élève dans la dynamique et la vie de la classe en l’incitant à nouer des contacts plus étroits et mieux construits avec ses camarades non handicapés, à être plus présent dans les activités journalières proposées que les enfants scolarisés en milieu spécialisé (Foreman et coll., 2004renvoi vers ; Hunt et coll., 1996renvoi vers). Ce partage est également propice, lorsque les enfants y sont confrontés dès le plus jeune âge, à l’acquisition d’aptitudes langagières et relationnelles qui ont un effet positif sur eux et leur réussite scolaire (Ewing et coll., 2003renvoi vers ; Foreman et coll., 2004renvoi vers ; Downing, 2008renvoi vers). Ce partage prévient en outre les préjugés à l’égard des personnes présentant une déficience et promeut à cet égard une société portant un regard plus positif sur le « corps infirme » (Koster et coll., 2007renvoi vers).
Ce droit à l’éducation reflète également l’avènement d’une conception écologique du handicap qui met l’accent sur l’aptitude du système éducatif à placer tout élève, indépendamment de sa particularité, à égalité de chances en termes d’accès, de réussite et de perspectives. Cette perspective postule que tout élève peut apprendre quelle que soit la sévérité de la déficience pour peu que l’environnement se rende physiquement, socialement, pédagogiquement et psychologiquement accessible pour favoriser ses apprentissages et construire les possibilités de sa participation sociale. Elle incite à porter le regard sur les activités que peut réaliser l’enfant, fussent-elles minimes. Elle invite le système éducatif à considérer l’enfant présentant une déficience comme un apprenant (et ceci indépendamment de sa déficience ou de son degré de sévérité) dont les possibilités de développement et le bien-être dépendent de l’aptitude du système éducatif à s’interroger sur les réponses à apporter pour renforcer ses potentiels et soutenir ses possibilités d’apprentissage (Rönnberg et coll., 2001renvoi vers ; Rogow, 2005renvoi vers). Aux besoins de santé que peut engendrer la sévérité de la déficience, cette perspective oppose la complexité des besoins éducatifs auxquels peuvent répondre la différenciation des pratiques pédagogiques, la mise en œuvre des aménagements nécessaires ou encore la mobilisation des soutiens idoines (Unesco, 1994renvoi vers ; Ewing et coll., 2003renvoi vers). En invitant à se focaliser de la sorte sur les apprentissages et le développement de l’enfant, elle corrèle le processus d’évaluation des besoins aux exigences des programmes d’enseignement ou, dans certains cas de figure, à des programmes éducatifs fondés sur le développement cognitif de l’enfant. Elle facilite une interdisciplinarité que peine à favoriser une approche plaçant la déficience et ses dimensions nosographiques au cœur des pratiques (Metzger et coll., 2004renvoi vers ; Noonan et coll., 2004renvoi vers).
Ce glissement de perspective reflète l’avancée des connaissances permise par les sciences humaines et sociales et, plus particulièrement, la psychologie cognitive, la psycholinguistique, la neuropsychologie ou encore la biologie et la génétique (Frith et Snowling, 1983renvoi vers ; Billard et coll., 1994renvoi vers ; Paour, 1995renvoi vers ; Bosse et Valdois, 2003renvoi vers). Ces travaux ont contribué à dissocier déficience et inéducabilité et à imposer l’idée que tout élève (y compris ceux présentant une déficience ou un trouble d’apprentissage) disposait de capacités d’apprentissage susceptibles d’être développées par le système éducatif. Ils invitent par exemple à ne pas voir la déficience intellectuelle comme une entité une et indivisible, mais comme une pluralité de syndromes ayant leur particularité en termes de développement et déterminés par les situations et les histoires singulières des intéressés ainsi que par l’aptitude des systèmes éducatifs à proposer des projets éducatifs ambitieux stimulant les compétences scolaires et émotionnelles. Ils ont ainsi montré que la déficience n’était pas a priori synonyme d’inéducabilité pour peu que soient mobilisées les ressources pédagogiques et éducatives appropriées et, qu’à ce titre, le droit à la scolarisation était applicable à tout enfant indépendamment de sa particularité ou de la sévérité de la déficience. Les progrès scientifiques ont en cela montré que le projet mené avec les personnes présentant un handicap rare dépassait la seule dimension médicale pour s’élargir aux dimensions éducatives et à leurs possibilités de scolarisation. Elles invitent à ne pas appréhender prioritairement l’enfant comme une personne malade ou déficiente, mais à le considérer au premier chef comme un élève, se spécifiant au regard de ses besoins éducatifs.

Un droit à l’éducation variable selon les pays

Ces glissements de perspectives ont contribué à un accroissement de la scolarisation en milieu ordinaire des élèves à besoins éducatifs particuliers3 dans nombre de pays de l’Union Européenne. Ainsi que l’indique la figure 5.1Renvoi vers, la proportion d’élèves à besoins éducatifs particuliers scolarisés en milieu spécialisé a baissé dans tous les pays à l’exception notoire du Danemark, de l’Estonie, de l’Autriche, de la Slovénie et de la Suisse.
Figure 5.1 Évolution du pourcentage d’élèves scolarisés en milieu spécialisé dans les pays de l’Union Européenne (d’après : European Agency for Development in Special Needs Education, 2010renvoi vers)
Cette baisse relative ne saurait masquer le fait que le droit à l’éducation prend des formes différentes selon les pays comme l’indique la figure 5.2Renvoi vers. Dans certains pays, il prend principalement la forme d’une scolarisation individuelle où les élèves présentant une déficience sont pour plus de 80 % du temps dans les mêmes classes que les autres élèves et, le cas échéant, suivent les mêmes enseignements qu’eux à l’image par exemple de l’Islande, (95 %), Malte (90 %), la Norvège (85,1 %), ou l’Irlande (78 %). Dans d’autres pays, tels que par exemple en Suède (96 %), en Suisse (61 %), ou au Danemark (56 %), ils passent plus de 80 % de leur temps dans des classes spécialisées, les enseignements pouvant différer, selon les cas, de ceux suivis par la majorité des élèves. Un troisième groupe de pays scolarise essentiellement les élèves présentant une déficience en milieu spécialisé à l’image de la Belgique francophone (99 %), de l’Allemagne (83 %), des Pays-Bas (62 %), de la Lettonie (70 %) alors que dans un quatrième groupe de pays, dont la Finlande et la France, les modes de scolarisation sont relativement partagés entre ces trois options. Aux États-Unis, 51,9 % des élèves à besoins éducatifs particuliers âgés de 6 à 21 ans sont scolarisés en milieu ordinaire à hauteur de 80 % du temps alors qu’au Royaume Uni, cette proportion est de 87 %.
Figure 5.2 Pourcentages d’élèves à besoins éducatifs particuliers dans l’Union Européenne selon le type de scolarisation en 2008 (d’après : European Agency for Development in Special Needs Education, 2010renvoi vers)
Ces données rappellent que la concrétisation du droit à l’éducation ne se résume pas à la question de la scolarisation et de la réussite scolaire, pour importantes que soient ces dimensions. Si nombre de parents sont dans l’ensemble favorables à la scolarisation en milieu ordinaire et si le taux de prévalence de certains handicaps rares ne justifie pas en soi la création d’établissements spécifiques, cette forme de scolarisation n’est pas toujours optimale. Ainsi, si le passage du milieu spécialisé vers le milieu ordinaire d’élèves présentant une surdicécité en Suède peut être scolairement avantageux, il ne l’est pas toujours socialement lorsqu’il est source d’isolement, voire d’exclusion sociale (Tidman et Saravanan, 2003renvoi vers ; Möller et coll., 2007renvoi vers). Les élèves présentant un handicap rare peuvent à ce sujet préférer avoir des échanges et des relations avec des personnes avec lesquelles elles peuvent communiquer et partager le rapport au corps plutôt que d’être constamment la seule personne « autre » au sein du groupe classe (Romer et coll., 1998renvoi vers). Par ailleurs, les établissements scolaires ne disposent pas toujours des équipements que peut requérir la scolarisation d’élèves associant plusieurs déficiences au risque de faire de l’environnement normalisé une source de violence, notamment lorsqu’elle s’accompagne d’une sur-stimulation de l’enfant (Foreman et coll., 2004renvoi vers). Autant d’éléments qui rappellent que le droit à l’éducation ne saurait méconnaître les dimensions liées à l’épanouissement du potentiel de chacun, à la qualité de vie et au sentiment d’appartenance qu’offrent notamment des pratiques soucieuses de la dignité des intéressés. Ce droit présuppose, ainsi que le précise l’article 24 de la convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, le développement de systèmes inclusifs d’éducation soucieux des formes de reconnaissance qu’expérimentent les intéressés au contact d’autrui et s’attachant à ce titre à mobiliser conjointement les acteurs du milieu spécialisé et du milieu ordinaire autour du parcours personnalisé de l’enfant et de sa trajectoire de vie (ONU, 2006renvoi vers ; Ebersold, 2007renvoi versrenvoi vers).

Une scolarisation confrontée à la complexité des besoins éducatifs

Cette exigence est d’autant plus forte que l’éducation et la scolarisation d’enfants présentant un handicap rare présente des formes particulières. En effet, les troubles sont souvent synergétiques et non cumulatifs et les effets que peut avoir la déficience dépassent la simple addition de deux déficiences ou plus. Ainsi, par exemple, par-delà la perte d’audition et de vision, la surdicécité engendre des difficultés de communication, d’accès à l’information et de mobilité, la situation variant selon l’âge, le début d’occurrence et le type de surdicécité. Par ailleurs, lorsque les limitations physiques restreignent la capacité de l’enfant à agir directement sur son environnement, il est très difficile d’agir sur le niveau d’indépendance et ces enfants ont des difficultés de préhension et des problèmes de santé en plus de leur déficience qui réduisent le nombre de jours scolarisés. Leurs capacités d’apprentissage et de développement sont étroitement liées aux stimuli et aux soutiens des enseignants et/ou des professionnels qui travaillent auprès d’eux pour communiquer et interagir (Correa-Torres, 2008renvoi vers). Lorsqu’ils présentent une surdicécité, leur mode de communication est essentiellement tactile, bien qu’il puisse aussi prendre la forme d’expressions faciales ou comportementales ou de vocalisations. Ils éprouvent des difficultés à acquérir, intégrer et utiliser le langage verbal et non verbal de telle sorte qu’ils demandent aux enseignants et aux professionnels de savoir s’adapter aux modalités individuelles d’utilisation du langage (verbal ou non verbal), de s’ajuster à leur style sensori-moteur (Pettrof, 2001renvoi vers ; Knoors et coll., 2003renvoi vers). Lorsque des troubles autistiques ou intellectuels s’ajoutent à la déficience pluri-sensorielle, les enfants peuvent éprouver des difficultés à développer un soi écologique leur permettant de se penser en relation avec les objets et les évènements. Cela demande par exemple aux acteurs du système éducatif d’être particulièrement attentifs aux routines et à l’extrême sensibilité des enfants à certains sons et aux odeurs (Jamieson, 2004renvoi vers ; Jordan, 2005renvoi vers). Les élèves présentant une surdicécité peuvent éprouver des difficultés à rester assis et à se concentrer s’ils ne sont pas impliqués activement dans le processus éducatif et par exemple invités à interagir avec leurs pairs (Smith et coll., 2010renvoi vers).
Autant de caractéristiques qui, plus que pour tout autre élève présentant une déficience, bousculent les règles, les connaissances, les repères et les routines régissant les processus éducatifs et qui situent les possibilités d’éducation et de scolarisation dans le développement de stratégies éducatives complexes. Ainsi, les difficultés de communication et les particularités comportementales rendent l’identification à la figure traditionnelle de l’élève et de l’enseignant difficile, demandant à ce dernier d’adopter une posture d’apprenant et un ajustement permanent au contact de l’enfant. L’enseignant doit repenser fondamentalement sa pratique pédagogique en s’appuyant par exemple sur le moindre signe que peut faire l’enfant, en s’adaptant aux modalités individuelles d’utilisation du langage, en considérant le rythme sensorimoteur de l’enfant. Il doit veiller à son implication dans le processus éducatif afin d’optimiser ses capacités d’apprentissage, en organisant la gestion de la classe autour de la mobilisation de l’élève et de son intégration dans le groupe classe, en privilégiant les activités en groupe. Ces difficultés supposent également de revoir les modalités d’évaluation des connaissances, notamment lorsque les établissements scolaires sont légalement tenus de tout mettre en œuvre pour que les élèves présentant une déficience soient à égalité de traitement avec leurs camarades. Les établissements scolaires nord-américains ont à ce titre été obligés de bâtir des modalités d’évaluation des connaissances alternatives spécifiques aux élèves présentant une surdicécité ou des troubles cognitifs sévères afin de satisfaire à l’obligation d’égalité des chances à laquelle ils sont soumis et de pouvoir individualiser leurs pratiques (White et coll., 2003renvoi vers). En cela, avant de se singulariser par la rareté ou la sévérité de leur déficience, ces enfants se spécifient par la complexité de leurs besoins éducatifs. Cela exige des acteurs des systèmes éducatifs de passer de la pédagogie adaptée à la mise en œuvre de stratégies éducatives complexes, de l’évaluation standardisée de connaissance à une évaluation complexe des compétences et des aptitudes, de l’enseignement à l’intervention éducative complexe.
Ces exigences ne signifient pas pour autant que le droit à l’éducation se concrétise forcément en milieu spécialisé. Si en France, les élèves présentant des déficiences multiples sont deux fois plus souvent inscrits en milieu spécialisé qu’en milieu ordinaire (Espagnol, 2007renvoi vers), ce n’est pas le cas dans d’autres pays comme le montre la figure 5.3Renvoi vers. Alors qu’ils sont principalement scolarisés en milieu ordinaire dans la province du New Brunswick au Canada, au Mexique ou en Espagne, ces élèves sont majoritairement admis en classes spécialisées aux États-Unis et en milieu spécialisé aux Pays-Bas, en République Slovaque, en République Tchèque ou en Allemagne. Au Royaume Uni, les élèves présentant une surdicécité sont scolarisés en milieu ordinaire dans 83 % des cas, ceux présentant un trouble autistique dans 70 % des cas alors que ceux présentant des troubles profonds et multiples le sont dans 18 % des cas (Glenndenning, 2009renvoi vers).
Figure 5.3 Proportion d’élèves d’âge scolaire présentant des déficiences multiples bénéficiant de ressources additionnelles selon le type de scolarisation en 2003 (Source : OCDE, 2007renvoi vers)
Ces disparités rappellent que l’existence de déficiences associées n’est pas synonyme d’une totale inaptitude. En effet, si les enfants présentant par exemple un syndrome de Prader-Willi éprouvent des difficultés à exercer des tâches séquentielles, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’effectuer des tâches requérant des processus simultanés. De même, si les enfants présentant un syndrome de Williams sont hypersensibles aux sons ou hyperacousiques et éprouvent des difficultés à exercer des tâches requérant des aptitudes visio-spatiales, ils disposent dans certains cas d’aptitudes cognitives et linguistiques leur permettant d’effectuer certaines tâches, de participer à la vie de la classe et d’acquérir des compétences (Fidler et coll., 2002renvoi vers). Ces disparités rappellent également que la déficience pluri-sensorielle n’exclut pas en soi la réussite scolaire, cette possibilité variant selon l’âge de la personne, le moment d’occurrence de la déficience et la particularité de celle-ci. Ainsi, la surdicécité n’est pas en soi synonyme d’une perte totale d’acuité visuelle ou auditive, certains travaux estimant que 94 % des enfants identifiés en tant que sourdaveugles aux États-Unis disposent d’une certaine capacité visuelle et/ou auditive (Correa, 1996renvoi vers). Par ailleurs, elle n’est pas forcément synonyme de déficience intellectuelle puisque les aptitudes cognitives peuvent relever de la précocité intellectuelle (Fredericks et Baldwin, 1987renvoi vers ; Correa, 1996renvoi vers ; Heward, 1996renvoi vers) et qu’elle n’exclut pas, a priori la réussite scolaire. En Grande-Bretagne, par exemple, les élèves présentant une surdicécité scolarisés en milieu ordinaire ont réussi à 77,7 % leurs examens de niveau 2 en maths (contre 88,7 % pour la population générale), à 77,7 % le même niveau en anglais (contre 93,6 % pour la population générale) et dans une proportion voisine en sciences en 2008 (95,3 %) alors qu’ils sont 66,6 % à avoir réussi les examens de niveau 4 (First release, 2010). L’enquête National Longitudinal Transition Study-2 (NLTS2) réalisée aux États-Unis révèle que 54,6 % des enquêtés présentant une surdicécité avaient accédé à l’enseignement supérieur quatre ans après avoir quitté le lycée, notamment dans les cycles courts ou à vocation professionnelle (Newman et coll., 2009renvoi vers). En cela, ces disparités rappellent que les possibilités d’inclusion des personnes associant plusieurs déficiences résident autant dans la conception qui entoure les systèmes éducatifs ou encore le niveau de qualification des acteurs impliqués dans le processus que dans les attitudes et les représentations de ces derniers à l’égard des personnes présentant une déficience, mais aussi de leurs missions et de leurs fonctions (Sall et coll., 1999renvoi vers ; Ebersold, 2008renvoi vers).

Une scolarisation qui suppose un système inclusif d’éducation

Un système inclusif d’éducation ancré dans des législations interdisant la discrimination

La concrétisation du droit à l’éducation est indissociable de la réceptivité des systèmes éducatifs à la diversité des profils éducatifs (Danielson, 1999renvoi vers ; Dolan et coll., 2001renvoi vers ; OCDE, 2007renvoi vers). Cette réceptivité suppose une accessibilisation de l’environnement éducatif qu’autorise l’existence de législations interdisant toute forme de discrimination en matière de handicap et/ou enjoignant les systèmes éducatifs d’être universellement accessibles pour tout élève, y compris ceux présentant une déficience. De telles législations ont responsabilisé les établissements scolaires en leur interdisant, comme c’est le cas aux États-Unis ou aux Pays-Bas, de refuser l’admission d’enfants en raison d’une déficience, fut-elle sévère. Elles les ont également incités à inclure la question du handicap dans leur politique d’établissement et à se doter, dans des conditions plus ou moins clairement définies, des moyens humains, techniques et financiers les rendant accessibles à tout élève. C’est à ce titre qu’aux États-Unis, l’IDEA (Individuals with Disabilities Education Act) a obligé les établissements scolaires à inclure les élèves présentant une déficience dans l’ensemble de leurs activités et, par exemple, à développer des formes alternatives d’évaluation pour celles et ceux présentant une déficience sévère. C’est à ce titre que la législation non discriminatoire norvégienne adoptée en 2009 intime aux établissements scolaires de veiller à ce que les élèves présentant une déficience aient les mêmes chances de réussite que les autres élèves et considère l’inaccessibilité comme une forme de discrimination. L’absence d’une telle législation, ou son application peu contraignante, constitue à l’inverse un obstacle majeur à l’application du droit à l’éducation à l’image de la République Tchèque où les directeurs d’établissements peuvent légalement refuser l’admission d’un enfant présentant une déficience si la décision est motivée (Ebersold, 2011renvoi vers). D’ailleurs, les chances d’accès à l’enseignement supérieur des élèves à besoins éducatifs particuliers sont plus importantes dans les pays ayant une législation interdisant toute forme de discrimination en raison d’un problème de santé et imposant aux établissements scolaires de placer les élèves à égalité de chances en termes de réussite que dans ceux n’ayant pas une telle législation ou n’ayant pas une législation très contraignante. C’est ce que montrent certains travaux relatifs aux conditions d’études dans l’enseignement supérieur de jeunes adultes présentant une surdicécité. Alors qu’en République Tchèque, les étudiants handicapés inscrits en enseignement supérieur de type CITE B54 ne représentent par exemple que 0,08 % de la population estudiantine suivant ce type de cursus, ils constituent 5 % de la population estudiantine inscrite dans ce type d’enseignement supérieur aux États-Unis (Horn et Nevill, 2006renvoi vers).

Un système inclusif d’éducation ancré dans l’allocation de ressources humaines, techniques et pédagogiques

Cette accessibilisation de l’environnement éducatif suppose aussi la mobilisation de ressources techniques, humaines, financières permettant aux établissements scolaires de satisfaire aux exigences d’accessibilité et aux enfants présentant une déficience d’être à égalité de chances avec les autres élèves. Plus que pour les autres enfants, de telles ressources sont essentielles pour des enfants dont les possibilités de communication peuvent nécessiter l’utilisation de nouvelles technologies ou l’intervention d’interprètes en langue de signes. Leurs possibilités d’orientation et de mobilité peuvent requérir l’intervention d’une tierce personne telle qu’un kinésithérapeute ou encore un auxiliaire de vie scolaire (Jackson, 2005renvoi vers). Ces soutiens et ces aménagements sont essentiels au développement d’environnements éducatifs accessibles permettant de multiplier les modalités d’acquisition des connaissances et des savoirs, d’autoriser des formes alternatives d’expression des connaissances et des savoirs ainsi que les modalités d’implication des élèves. Ils diffèrent toutefois de ceux que peuvent requérir celles et ceux présentant exclusivement une déficience visuelle ou une déficience sensorielle. À cet égard, l’usage de nouvelles technologies permet par exemple de rendre les supports pédagogiques plus adaptés à la diversité des profils éducatifs et de la particularité des élèves que ne le peuvent les livres scolaires. De nombreuses aides techniques permettent aux enfants d’entrer plus aisément en relation avec leur environnement. Celles provoquant des types de vibration sur la peau variant selon la fréquence des sons sont propices au développement de systèmes de communication permettant la création d’une relation pédagogique et l’accès aux enseignements. L’allongement des cursus qui existe dans certains pays tels que la Norvège ou les États-Unis permet de mieux considérer les rythmes propres à l’enfant et les implications que peut avoir en la matière la déficience alors que l’aménagement des modalités d’examens permet, quant à lui, de cerner sa progression grâce à la mobilisation des lecteurs ou des secrétaires, en autorisant l’utilisation de technologies adaptées ou encore en utilisant des formes alternatives de langage (Braille).

Un système inclusif d’éducation ancré dans une approche écologique du handicap

Cette accessibilisation de l’environnement éducatif suppose également une approche écologique du handicap reliant les difficultés des élèves à l’aptitude des systèmes éducatifs à répondre à la diversité des besoins éducatifs et non à la déficience comme le propose la traditionnelle perspective diagnostique. Les pays ayant promu une telle approche semblent avoir des systèmes éducatifs plus réceptifs à la présence d’enfants présentant une déficience : en Irlande, la définition du handicap retenue par le Education for Persons with Special Education Needs Act met l’accent sur les moyens devant être mobilisés pour permettre à la personne présentant une déficience d’accéder au droit à l’éducation qui lui est légalement reconnu. La Norvège qui appréhende le handicap à l’aune des barrières entravant l’accès à l’éducation et à l’emploi des personnes handicapées et, ce faisant, leur pleine participation, met ainsi prioritairement l’accent sur l’accessibilité des lieux publics et non sur la déficience. De telles approches du handicap ont contribué à promouvoir des systèmes scolaires qui voient dans la diversité un enjeu essentiel à considérer pour optimiser la qualité de l’enseignement. Elles considèrent que l’accessibilisation de l’environnement éducatif est un moyen de favoriser la réussite de tout élève indépendamment de sa particularité et, ce faisant, améliore la qualité du système éducatif dans son ensemble. Une telle conception des systèmes éducatifs diffère assez de celle qui prévaut dans les pays ayant conservé une approche diagnostique du handicap. Ces systèmes éducatifs tendent à associer la diversité aux difficultés rencontrées par une minorité d’élèves et voient dans l’accessibilisation de l’environnement éducatif un moyen de compenser un problème social ou médical avant d’être un vecteur de réussite et situant principalement les possibilités de scolarisation des élèves présentant une déficience en établissement spécialisé (Ebersold, 2011renvoi vers).

Un système inclusif d’éducation ancré dans une école associant l’excellence scolaire à la réussite et au bien-être de chaque élève

Cependant, par-delà les différentes modalités d’accessibilisation de l’environnement éducatif, cette réceptivité à la diversité des profils éducatifs dépend également de l’aptitude des systèmes scolaires à associer l’excellence scolaire à la réussite et au bien-être de tout élève indépendamment de ses particularités. En effet, la réceptivité à la diversité semble plus marquée dans les pays où l’inculcation des apprentissages n’est pas la mission exclusive ou première des établissements scolaires, où l’acquisition des savoirs est moins disciplinaire qu’organisée autour de projets pédagogiques pouvant mobiliser les apports des différentes disciplines, où les enseignements valorisent la diversité et les relations afin que chaque élève développe ses potentialités et sa personnalité et où les relations entre enseignants et élèves sont fondées sur la confiance et l’échange (Ebersold, 2008renvoi vers). Tel est par exemple le cas de la plupart des pays anglo-saxons ou scandinaves où tend à prévaloir une conception communautaire de la vie de l’établissement qui privilégie des modes de transmission fondés sur l’ouverture à la vie quotidienne et à la vie professionnelle, sur l’expérience individuelle et les relations avec les pairs bien plus que sur la relation d’obéissance à un « maître » appréhendé comme le médiateur entre la connaissance et l’élève. Une telle conception invite notamment à admettre que tout enfant doit être scolarisé avec ses pairs et que les enseignants sont à même d’enseigner à n’importe quel élève pour peu qu’ils soient soutenus lorsque c’est nécessaire et à privilégier l’accompagnement de l’élève tout au long du parcours éducatif plutôt que sa seule instruction. Le redoublement y est par exemple peu présent, le passage du primaire au secondaire y est bien souvent automatique et la progression scolaire tend plus volontiers à s’organiser autour des compétences acquises qu’autour du seul diplôme (Jackson, 2005renvoi vers ; OCDE, 2011renvoi vers ). La Norvège situe quant à elle, la compétence des enseignants dans leur aptitude à être un modèle et un conseiller pour les enfants et un partenaire des autres acteurs impliqués dans le processus éducatif, à comprendre tant le contexte familial que scolaire et social de l’enfant et connaître tous les aspects de l’intégration qui influent sur l’apprentissage (OCDE, 1999renvoi vers).
Tel est également le cas de certains pays méditerranéens, à l’image notamment de l’Italie, où l’école partage avec la famille, les amis et le voisinage, le soin de distribuer les individus dans la hiérarchie sociale et de développer des liens communautaires. Dans cette rationalité, les enseignements ambitionnent le plus souvent de conjuguer le « scolaire » et le « sensible » et la pratique enseignante est notamment tournée vers une individualisation des activités pédagogiques, l’encouragement des plus faibles et l’entraide de ces derniers par les plus forts (Dubet et coll., 2010renvoi vers). Une telle conception est assez favorable à la scolarisation des élèves présentant un handicap rare, notamment lorsque des « enseignants de soutien » suivent l’enfant tout au long du parcours éducatif (Abbring et Meijer, 1994renvoi vers ; OCDE, 1999renvoi vers). Ces « enseignants de soutien » suivent en moyenne deux élèves et ont également pour fonction de conseiller les enseignants sur la manière d’améliorer la qualité des programmes individuels et sur la manière de participer au processus de différenciation des cursus et de développer des pédagogies innovantes. Ils conseillent les familles sur le rôle qu’elles peuvent jouer en matière de coordination de l’action menée avec l’école et peuvent aussi coordonner des services disponibles du sein de la communauté scolaire pour faciliter l’intégration des personnes handicapées.
En revanche, dans certains pays, comme la France, la Belgique ou l’Allemagne, l’école est avant tout un lieu où l’on inculque une culture générale et les établissements scolaires sont des lieux d’apprentissage séparant l’instruction de la vie scolaire. Les enseignements ciblent prioritairement l’acquisition de connaissances disciplinaires et les enseignants se définissent comme des spécialistes d’une discipline dont le rôle consiste à transmettre de manière isolée et indépendante des savoirs disciplinaires à des élèves dont on attend qu’ils travaillent seuls en suivant leurs instructions et en satisfaisant aux exigences du programme (Dubet et coll., 2010renvoi vers). Cette conception de l’école rend la présence d’élèves présentant un handicap rare plus difficile : elle est plus propice à une conception essentialiste du handicap associant déficience et inéducabilité qui est peu compatible avec l’objectif de faciliter le maintien en milieu ordinaire (mainstreaming) qui associe éducation et participation sociale. Cette conception cantonne l’enfant dans un rôle d’élève satisfaisant aux exigences d’un « maître ». Elle est moins favorable à son implication dans le processus éducatif et ce faisant, moins encline à demander aux enseignants de se préoccuper des conditions la permettant. Elle est aussi moins propice à l’organisation de la scolarisation autour d’une logique de projet soucieuse de la diversité des profils éducatifs et de l’accompagnement de chaque élève tout au long de parcours éducatifs fondés sur l’unicité de chacun. En France par exemple, les enfants présentant plusieurs troubles associés étaient scolarisés en 2010 à 90 % dans des établissements médico-sociaux qui les acceptaient (figure 5.4Renvoi vers). La proportion de celles et ceux scolarisés en milieu ordinaire a décru de 6,8 % des élèves handicapés en 2006 à 5 % des élèves handicapés en 2010 à la différence de celles et ceux présentant un seul trouble cognitif, de l’apprentissage ou locomoteur (Ministère de l’Éducation nationale, ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2007renvoi vers et 2011 renvoi vers). Comme le montre la figure 5.1, en Belgique francophone, les élèves à besoins éducatifs particuliers étaient scolarisés en milieu spécialisé dans 99 % des cas en 2008 alors que cette proportion était de 82 % en Belgique flamande et de 83 % en Allemagne (EADSNE, 2010renvoi vers).
Figure 5.4 Évolution de la scolarisation en milieu ordinaire selon le type de déficience (2006-2010) (d’après : ministère de l’Éducation Nationale 2007renvoi vers et 2011renvoi vers)
En cela, la concrétisation du droit à l’éducation est subordonnée à l’avènement de systèmes inclusifs d’éducation ambitionnant de placer tout enfant à égalité de chances et de droits en termes d’accès, de réussite, de devenir et d’autonomie (et ceci indépendamment du degré de sévérité de la déficience). Ainsi que le précise l’Unesco, de tels systèmes admettent que les différences entre les êtres humains sont normales et qu’il ne saurait y avoir d’élève moyen. Ils ambitionnent d’adapter les pratiques aux besoins des élèves plutôt que de demander à ces derniers de s’adapter aux pratiques. Ils voient dans cette perspective une possibilité d’optimiser la qualité générale de l’enseignement et, corrélativement, de réduire les taux d’échecs scolaires et de redoublements, mais aussi de faire de l’école un lieu d’apprentissage de l’acceptation de la différence. Avant d’être une charge, la scolarisation d’élèves présentant une déficience, y compris celles et ceux présentant un handicap rare, apparaît comme une ressource bénéfique à tous (Unesco, 1994renvoi vers et 2009 renvoi vers). La loi d’orientation du 23 avril 2005 pour l’avenir de l’école peut à cet égard impulser des évolutions significatives lorsqu’elle organise par exemple les enseignements autour de l’acquisition d’un socle commun de compétences. C’est le cas lorsqu’elle propose de mettre en place un programme de réussite éducative pour tout élève qui risque de ne pas maîtriser les connaissances et les compétences indispensables à la fin d’un cycle ou lorsqu’elle prévoit des aménagements particuliers, des actions de soutien pour les élèves présentant des troubles spécifiques du langage oral et/ou écrit et des enseignements adaptés pour celles et ceux présentant des difficultés graves et permanentes. Les réformes entreprises ces dernières années peuvent par ailleurs, à condition de ne pas être le prétexte à une managérialisation des problèmes sociaux, faciliter le développement d’un système inclusif d’éducation susceptible de placer les trajectoires individuelles au cœur de ses préoccupations et de mobiliser les acteurs du milieu ordinaire et du milieu spécialisé autour de parcours personnalisés de scolarisation fondés sur l’acquisition de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être. La création d’unités d’enseignement devrait à cet égard favoriser à terme la scolarisation d’élèves jusqu’alors essentiellement admis dans le secteur médico-social en organisant la nature et les niveaux des enseignements dispensés en référence aux cycles correspondants dans l’enseignement scolaire, en formalisant la collaboration entre les acteurs du système éducatif et ceux du secteur médico-social.

Développer des stratégies éducatives fondées sur des parcours personnalisés de scolarisation

Innover par une évaluation fine et contextualisée des besoins éducatifs

La « réceptivité » de ces systèmes inclusifs d’éducation à la diversité des profils éducatifs repose sur les formes de personnalisation qu’autorise la capacité d’innovation des acteurs en présence. Cette capacité d’innovation nécessite une évaluation des besoins éducatifs de l’enfant suffisamment précise pour offrir une image aussi exacte que possible de ses capacités, des moyens à mobiliser et des méthodologies à mettre en œuvre (Rönnberg et coll., 2001renvoi vers ; Rogow, 2005renvoi vers ; Trief et coll., 2007renvoi vers). Cette évaluation doit notamment permettre d’identifier la probabilité d’engagement fonctionnel et de réactivité qu’autorisent les facteurs socio-communicationnels de l’enfant, les stimuli auxquels il réagit, les capacités visuelles, auditives que suggèrent ces réactions et les moyens à mobiliser par l’environnement scolaire. Il appartient à ce dernier de cerner les modalités permettant leur accès à la communication (langue des signes, symboles graphiques et autres techniques alternatives), le développement d’interactions avec autrui, ou encore l’expression des choix et des centres d’intérêts. Il lui appartient également de cerner ses capacités cognitives et les formes d’apprentissage qui y sont liées au regard des activités liées à la vie quotidienne comme celles renvoyant aux aptitudes scolaires en s’intéressant aux modes de séquençage des étapes qui jalonnent les processus d’apprentissage (Arnold, 1998renvoi vers ; Rowland, 2000renvoi vers). Cette évaluation requiert de se distancier des modes et des techniques traditionnels d’évaluation peu à même de cerner la complexité des besoins et des processus éducatifs à mettre en œuvre, et de mobiliser une pluralité de techniques, d’échelles d’évaluation ou de tests qu’il convient d’utiliser tant au domicile de l’enfant que dans le contexte scolaire. Cela doit permettre d’avoir une connaissance holistique de l’enfant requise par la complexité des besoins éducatifs et favoriser le développement de stratégies éducatives complexes nécessaires au renforcement des apprentissages et à l’inscription des intéressés dans des échanges sociaux (Knoors et Vervloed, 2003renvoi vers ; Gense et coll., 2011renvoi vers ; Horrocks et coll., 2011renvoi vers). L’évaluation peut alors s’organiser autour de la mobilisation d’outils s’attachant à identifier tous les moyens de communication (présymbolique, symbolique, augmentatif ou alternatif). Elle peut mettre en place des protocoles permettant d’appréhender le degré de rapidité d’acquisition des apprentissages en s’attachant à décrire l’activité exercée par l’enfant, la manière dont cette activité est structurée, le degré d’implication de l’enfant et sa capacité d’orientation. Il s’agit aussi de techniques permettant d’identifier les apprentissages et l’autonomie qu’autorisent les activités routinières (repas, nager, jouer) ou le programme d’enseignement.

Bâtir une relation pédagogique fondée sur le potentiel cognitif de l’enfant

Cette capacité d’innovation repose également sur une reconfiguration de la relation pédagogique qu’entraine l’adoption de postures professionnelles qui doivent s’attacher à satisfaire les besoins sensoriels et biologiques des élèves, créer les environnements éducatifs favorables aux apprentissages, veiller à leur mobilisation, offrir un cadre structurant suffisamment souple pour adapter les interactions aux contextes, considérant tant les dimensions scolaires que sociales et comportementales (Gense et coll., 2011renvoi vers). Il importe de considérer l’importance que revêtent les dimensions émotionnelles pour des enfants privés de leurs sens, les émotions constituant un mode de communication et la création de liens émotionnels apparaissant cruciaux pour susciter l’ouverture à autrui, la curiosité envers son environnement et agir sur leur propension à être hypo- ou hyperactifs (Knoors et Vervloed, 2003renvoi vers). Il convient également de ne pas sous-estimer leur potentiel cognitif, de se laisser porter par le rythme et le style sensori-moteur de l’enfant et d’associer les comportements à des processus adaptatifs et à des modes de communication à prendre en compte pour construire une relation d’échange avec eux et assurer leur mobilisation dans une relation éducative. Il importe à cet égard que les stratégies éducatives prêtent attention aux formes adaptées de communication (c’est-à-dire la transmission d’informations) pour pouvoir saisir les expressions polysémiques, s’adapter aux modalités individuelles d’utilisation du langage, mais aussi tenir compte du rôle joué par les émotions en matière d’éducation et de scolarisation (Bourquin et Sauerburger, 2005renvoi vers). Cette posture exige également de considérer que l’enfant est réceptif aux échanges malgré les difficultés de communication qu’il peut avoir et que les stratégies éducatives développées ne sauraient ignorer l’effet capacitant des interactions.

Solliciter l’interaction et provoquer les échanges

Il convient alors d’adopter un style narratif/mimétique au cours des échanges, savoir lire les expressions d’où qu’elles proviennent et quelles que soient les transformations subies du fait des contraintes sensorimotrices, de traiter les éléments d’information de manière analytique, structurée et orientée, d’organiser la perception et la mémoire en assurant un double codage de l’information (visuel et verbal), d’activer les concepts dans la mémoire à long terme, de catégoriser et mettre en lien les informations (Büchel, 2000renvoi vers). Il convient également d’utiliser des techniques permettant de structurer de façon adéquate les échanges entre les enfants et l’enseignant ainsi qu’avec les autres élèves telles que par exemple les soutiens tactiles, auditifs, visuels, susceptibles de faciliter leur compréhension des consignes et leur participation. Les formes alternatives de communication que sont par exemple la langue des signes ou le Braille, les techniques de communication supplétives tels que les symboles, les photos, les objets ou des ordinateurs vocaux permettent aux enfants d’attirer l’attention, d’exprimer des demandes, des émotions ou des opinions. La création d’espaces spécifiques de communication permet de focaliser l’attention des élèves sur des tâches ou des personnes (Griffin et coll., 2004renvoi vers ; Rogow, 2005renvoi vers). Certains travaux montrent à cet égard que l’utilisation de techniques particulières, à l’image par exemple de la méthode Tadoma5 , confère aux personnes présentant un trouble auditif, une perception du langage proche ou similaire à celle des entendants. Ils peuvent effectuer les distinctions grammaticales aussi adéquatement qu’eux, et présenter une capacité à faire des phrases équivalente à 60-70 % de la normale ainsi qu’une certaine capacité langagière même si elle est deux fois moindre que la normale (Rönnberg, 2001renvoi vers).

Développer les capacités d’apprentissage

Il importe également de privilégier des enseignements structurés autour d’une logique de projet, par rapport à une logique programmatique, en visant notamment à optimiser les capacités d’apprentissage. Il s’agit de permettre la création de liens émotionnels, s’attachant à référer le curriculum à des activités quotidiennes, des contextes naturels et à la résolution de problèmes et d’organiser les techniques de gestion de classe autour de l’implication et de l’intégration de l’élève dans la classe en privilégiant des activités de groupes facilitant sa communication. Il est possible de proposer des activités collectives et individuelles ou encore un accompagnement par les pairs non handicapés ou le cas échéant par un assistant d’éducation (Mason et coll., 2007renvoi vers ; Correa Torres, 2008renvoi vers). Cette perspective est également propice à la mobilisation d’approches pédagogiques fondées sur l’apprentissage expérientiel, incitant l’enfant à interagir, à résoudre des problèmes et à communiquer tout en s’attachant à ce que ses efforts soient valorisés. Elle est également propice à une flexibilité des modes d’enseignement essentielle à la mise en œuvre de parcours éducatifs et scolaires fondés sur la réussite et l’autonomie de l’élève. Cette flexibilité permet de différentier les relations entre les enseignants/éducateurs et les élèves d’une part, entre action commune entre élève et enseignant lorsqu’il s’agit de réaliser quelque chose conjointement et d’autre part, action coopérative lorsque l’enseignant soutient l’élève dans ses réalisations pour lui permettre de réussir et progressivement d’agir indépendamment (Mc Innes et coll., 1982renvoi vers ; Van Dijk, 1986renvoi vers ; Sobsey et coll., 1996renvoi vers ; Janssen et coll., 2002renvoi vers ; Vervloed et coll., 2006renvoi vers). Elle permet également de proposer des routines rendant les activités prédictives dans le temps, l’espace et les acteurs en présence pour offrir un cadre structurant et sécurisant propice aux apprentissages (Jordan, 2005renvoi vers).

Faciliter la création d’un système équitable de coopération

La capacité d’innovation réside aussi dans l’adoption d’une approche holistique que requiert la complexité des situations rencontrées par les enfants présentant des déficiences multiples et qui suppose l’implication étroite de la famille. Reconnaître la famille comme un acteur à part entière du processus éducatif est à ce titre essentiel : l’implication de la famille confère aux enseignants un ensemble de savoirs qui leur est essentiel pour agir auprès de l’enfant mais dont ils ne disposent pas toujours parce qu’ils éprouvent des difficultés à rencontrer les autres acteurs mobilisés autour du projet de l’enfant (Ebersold, 2005renvoi vers ; Fonteine et coll., 2008renvoi vers ; Anesm, 2011renvoi vers). Elle complète également l’action des professionnels en optimisant par exemple la généralisation des acquis récents ou encore en développant certains acquis dans l’univers familial utilisables par les enseignants et les éducateurs (Jamieson, 2004renvoi vers). Reconnaître la famille comme un acteur à part entière du processus, incite également à s’interroger sur les compétences mobilisées par celle-ci pour faire face à certaines exigences et sur celles qu’il convient d’acquérir par le biais de formations qui peuvent être menées conjointement avec des professionnels. Mobiliser les acteurs des secteurs médical, paramédical et social autour de la trajectoire de l’enfant est une autre exigence que rappelle, notamment, le plan handicap rares lorsqu’il prévoit la création de 12 250 places de services d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) pour soutenir la scolarisation et le développement de l’autonomie des enfants. La mobilisation conjointe de ces acteurs offre une perspective holistique de l’enfant, confère aux acteurs en présence une connaissance de l’enfant plus vaste que celle qu’autorise leur discipline et incite à inclure dans le processus éducatif, outre les savoirs scolaires, ceux acquis lors des activités extra-scolaires. S’attacher au développement d’un modèle transdisciplinaire de coopération fondé sur le partage d’informations et la complémentarité des compétences au service d’un projet d’action commune conjointement défini est un autre enjeu majeur pour que puissent agir de manière coordonnée et planifiée les différents acteurs impliqués dans le processus (Anesm, 2011renvoi vers). Un tel modèle évite que la pluralité des intervenants ne conduise à des tensions disciplinaires qui peuvent être source de cloisonnement entre les différents services et engendrer des conseils aux familles parfois contradictoires. Il contribue également à souligner la complémentarité des regards portés par les uns et les autres sur les enfants et leurs familles ainsi que sur leurs pratiques et facilite le développement de techniques d’inter-accompagnement (Ewing et coll., 2003renvoi vers ; Van der Putten, 2009renvoi vers). Il empêche ainsi une atomisation des activités que chaque acteur concerné serait amené à réaliser dans son coin et favorise la polyvalence des rôles de chacun et le développement d’un système équitable de coopération (Ebersold, 2003renvoi vers).

Ancrer la scolarisation dans un projet individualisé de transition

L’ancrage du projet personnalisé de scolarisation dans un projet individualisé de transition est à ce titre essentiel : il incite les établissements à organiser le processus éducatif autour du parcours de vie de l’enfant et à faire de la transition entre les différents espaces éducatifs, une des composantes de leur politique d’établissement et à l’intégrer de manière pragmatique dans leur approche du curriculum, des modes d’évaluation, de la mobilisation des intéressés (Ebersold, 2010renvoi vers ; OCDE, 2012). Il permet de placer le devenir de l’élève au cœur des préoccupations et de formaliser les différentes étapes jalonnant le processus de transition. Il est alors possible de mobiliser en temps utile les acteurs contribuant à un moment ou à un autre au processus, à la continuité et à la cohérence des cheminements ainsi que de définir leurs conditions d’intervention. Il facilite notamment la mobilisation des parents en les incitant à participer aux réunions qui peuvent être organisées, en cernant le rôle qu’ils peuvent éventuellement jouer, et en les incitant à acquérir, le cas échéant, les compétences nécessaires. Il concourt également à la mobilisation active d’outils, de méthodologies et de documents dotant les parents d’un écrit consignant les aptitudes acquises, les progressions ainsi que l’impact des aménagements et des soutiens (Brousseau et coll., 2010renvoi vers ; Ebersold, 2011renvoi vers).

Développer la formation des acteurs du système éducatif et médico-social

Cette capacité d’innovation se heurte toutefois à l’heure actuelle à des obstacles majeurs. La formation des enseignants n’attache qu’une importance relative à la pédagogie inclusive alors même que la plupart des enseignants se jugent peu à même de répondre aux exigences qu’imposent les élèves à besoins éducatifs particuliers, notamment ceux présentant une déficience sévère (OCDE, 2009renvoi vers). Il n’est pas rare que les enseignants ne disposent pas des connaissances adéquates sur les particularités des déficiences et se trouvent ainsi privés des éléments d’information nécessaires à l’adaptation des pratiques (Horrocks, 2011renvoi vers). Il n’est pas rare qu’ils ne maîtrisent pas les connaissances pédagogiques ainsi que les techniques, les procédures offrant la vision réflexive sur les pratiques et les postures que requiert une forte personnalisation des pratiques (Bruce et coll., 2008renvoi vers ; Van Donderen et coll., 2010renvoi vers). Les formations proposées les sensibilisent insuffisamment à l’importance que revêt l’analyse des pratiques alors même que la qualité du processus éducatif dépend bien souvent de la formalisation des apports et des lacunes des innovations ordinaires mises en œuvre au quotidien, des postures adoptées, des activités ciblées, des instruments mobilisés, des aménagements proposés. Il s’agit d’acquérir une meilleure connaissance des déficiences et de leurs caractéristiques et de trouver les ressources nécessaires à la différenciation des pratiques et à l’adaptation des soutiens aux rythmes et aux besoins de l’enfant (Rowland et coll., 2000renvoi vers ; Squillaci Lanner, 2005renvoi vers).

Développer des outils de planification pédagogique

Cette capacité d’innovation se heurte aussi à l’absence d’outils permettant aux acteurs de mettre en sens la scolarisation des élèves présentant plusieurs déficiences, de planifier et de piloter les différentes dimensions autorisant la personnalisation des pratiques. Les outils d’évaluation existants sont peu adaptés à la complexité des situations que connaissent les enfants présentant des déficiences associées privant ainsi les acteurs d’éléments d’information pour connaître précisément les besoins éducatifs et identifier les stratégies éducatives appropriées (Tremblay, 2010renvoi vers). Ils se trouvent notamment privés de la possibilité d’appréhender les diverses dimensions susceptibles d’optimiser les possibilités de communication de l’enfant et d’encourager ses interactions avec son environnement au risque de rapporter prioritairement les possibilités d’éducation et de scolarisation aux difficultés de l’enfant au détriment des conditions susceptibles de les pallier (Rowland et coll., 2000renvoi vers). Ils peuvent par exemple connaître des difficultés à cibler des possibilités communicationnelles et cognitives mobilisables dans les activités quotidiennes de la classe pour permettre ainsi aux élèves de transférer leurs acquis dans d’autres domaines que les seuls domaines scolaires en acquérant notamment une autonomie (Rowland et coll., 2000renvoi vers). Par ailleurs, les projets personnalisés de scolarisation (PPS) ne comprennent pas toujours des objectifs suffisamment précis ou adaptés à la particularité de l’élève pour relier les acquis et les apprentissages aux pratiques développées. Les PPS incluent rarement l’ensemble des dimensions permettant d’avoir une vision holistique de l’enfant ou encore privilégient l’acquisition de savoirs au détriment de l’entraînement et de la stimulation des fonctions cognitives, physiques et sensorielles au risque de ne pas permettre à l’enfant de développer ses aptitudes communicationnelles et comportementales (White et coll., 2003renvoi vers ; van den Putten et coll., 2009renvoi vers). Les PPS peuvent de surcroît insuffisamment considérer les apprentissages scolaires, les conditions facilitant les interactions entre les enfants présentant des déficiences multiples et ceux ne présentant aucune déficience. Ils peuvent également être elliptiques sur les moyens pédagogiques mobilisés, ne pas toujours prévoir les matériels pédagogiques appropriés à la particularité de l’enfant et ne pas toujours permettre l’usage de techniques d’évaluation alternatives (Rowland, 2000renvoi vers). Les acteurs peinent à organiser leurs pratiques autour des aptitudes de l’enfant, à veiller à l’acquisition de nouvelles aptitudes en lui accordant suffisamment de temps, en le soutenant positivement et précisément, à corréler les activités du PPS avec les enseignements ordinaires et avec l’usage de matériel pédagogique hautement diversifié (Sall et coll., 1999renvoi vers). Ces difficultés sont d’autant plus importantes qu’ils se trouvent privés des repères nécessaires pour penser leurs pratiques et l’enfant dans ses aptitudes au risque de subordonner prioritairement l’éducation et la scolarisation des élèves à leur volontarisme, à leurs sens de l’engagement et de la résumer à ses dimensions les plus restrictives.

Se doter de données statistiques fiables et internationalement comparables

Cette capacité d’innovation se heurte aussi à l’absence de données statistiques permettant notamment de comparer la situation des élèves présentant un handicap rare à celles d’autres élèves (y compris ceux présentant une déficience) ou d’identifier l’impact des aménagements et des soutiens en termes d’acquis et d’apprentissages. Cette absence de données interdit de cerner précisément les facteurs intervenant dans les trajectoires individuelles des élèves, de corréler l’attribution de ressources additionnelles aux exigences du projet personnalisé de scolarisation et aux besoins d’accompagnement identifiés, de cerner la qualité du travail d’accompagnement. Les obstacles à la concrétisation du droit à l’éducation ne se révèlent qu’indirectement et le plus souvent au travers de données essentiellement qualitatives, peu systématiques, voire anecdotiques (OCDE, 2011renvoi versrenvoi vers ; Ebersold et Watkins, 2011renvoi vers).
En conclusion, concernant les personnes présentant un handicap rare, la concrétisation du droit à l’éducation place les systèmes éducatifs face à un défi d’envergure : reconnaître tout enfant comme un sujet de droit pouvant prétendre aux mêmes possibles scolaires que tout un chacun, comme un être en devenir disposant des aptitudes cognitives nécessaires aux apprentissages, y compris scolaires, pour peu que soient menés des projets éducatifs ambitieux, développées des pratiques pédagogiques adaptées à ses particularités et mobilisés, le cas échéant, les soutiens et les aménagements nécessaires. Outre les aspects humains et éthiques qui renvoient à l’aptitude d’une société à reconnaître chacun des siens comme un membre à part entière et à l’aptitude de chacun à reconnaître autrui dans son humanité, ce défi porte en lui un certain nombre d’exigences majeures. Il exige d’admettre que les enfants présentant un handicap rare se singularisent moins par la rareté et la sévérité des déficiences que par la complexité des besoins éducatifs et qu’avant d’être des handicapés ils sont avant tout des élèves qui ont, comme tout élève, des besoins éducatifs particuliers. Il demande en cela de relier les possibilités de scolarisation des enfants présentant un handicap rare à l’aptitude des systèmes éducatifs à se préoccuper de la réussite et du bien-être de tout élève et à ne pas méconnaître le rôle de l’école dans l’apprentissage du « vivre ensemble » et dans la lutte contre les préjugés. En cela, la scolarisation des enfants présentant un handicap rare ne peut être subsumée au seul développement de politiques spécifiques à l’attention des personnes handicapées pour la relier également à l’inclusion de la différence liée au corps infirme dans les politiques éducatives. En cela, les possibilités de scolarisation des enfants présentant un handicap rare résident tant dans les dimensions retenues par la loi du 11 février 2005 que dans les possibilités de personnalisation des parcours éducatifs qu’offre la loi d’orientation du 23 avril 2005 pour l’avenir de l’école en invitant, notamment, le système éducatif à mettre l’accent sur l’acquisition d’un socle de compétences.
La scolarisation des enfants présentant une déficience est par ailleurs indissociable d’un cadre juridique et règlementaire responsabilisant les acteurs des systèmes éducatifs. Les législations non discriminatoires contraignantes jouent à cet égard un rôle majeur : en rendant les établissements scolaires légalement responsables des discriminations que peuvent expérimenter les élèves, le Royaume-Uni a sans doute incité les établissements à inclure la question de l’accessibilité et l’ouverture à la différence dans leurs politiques d’établissements alors qu’en associant l’inaccessibilité à une forme de discrimination la Norvège, les a incités à voir dans l’accessibilité un enjeu et une responsabilité collective. La législation française, bien qu’interdisant la discrimination liée au handicap, est bien moins comminatoire en la matière que ces deux pays. Elle risque de coupler l’application effective du droit à l’éducation à une lutte perpétuelle bien souvent évoquée par les parents et ceci d’autant plus fortement que l’absence de définition juridique de la notion de besoin rend très imprécis l’engagement effectif des pouvoirs publics à l’égard des personnes présentant une déficience et elle rend également l’action en justice des familles assez difficile parce qu’extrêmement complexe (Ebersold, 2005renvoi vers).
La scolarisation des enfants présentant une déficience est en outre consubstantielle des synergies instaurées par les acteurs des secteurs éducatif, social et médico-social et sanitaire. Ces synergies inscrivent les pratiques pédagogiques dans une logique « transformationnelle » grâce à laquelle les individus, comme les organisations, peuvent trouver les ressources nécessaires au dynamisme (pédagogique, méthodologique, professionnel, organisationnel…) requis par les stratégies éducatives. Cela situe la qualité du travail éducatif dans un processus collectif impliquant l’ensemble des parties en présence et la définition et la mise en œuvre de parcours éducatifs ambitionnant la réussite et le bien être de tout élève, y compris ceux présentant des besoins éducatifs complexes. Ces synergies peuvent être favorisées, comme c’est le cas dans certains pays, par le rattachement du secteur médico-social au secteur éducatif. Elles peuvent également l’être comme en France, par la création d’unités d’enseignement mobilisant conjointement et contractuellement les acteurs de ces deux secteurs (OCDE, 1999renvoi vers). Cette contractualisation des liens entre les systèmes éducatifs est susceptible de relier les formes de coopération aux particularités locales, de leur donner un caractère organisationnel à même d’inscrire les liens et les échanges dans le temps. Elle est propice au développement de systèmes ouverts fondant leur unicité autour de l’ouverture à la diversité des profils éducatifs et situant leurs possibilités d’action dans les liens tissés avec leur environnement.
Si la scolarisation des élèves présentant un handicap rare est indissociable de l’ouverture des systèmes éducatifs à la diversité des profils éducatifs, et ceci indépendamment de l’existence d’une déficience, elle est cependant traversée par des enjeux bien particuliers. Plus que pour tout élève présentant une déficience, leur scolarisation suppose la mobilisation de soutiens tant à l’attention des intéressés que des établissements et de leurs membres. Lorsqu’il s’agit des intéressés, ces soutiens peuvent bien sûr prendre la forme d’aides humaines, techniques, pédagogiques et financières et il importe à cet égard de ne pas résumer le besoin éducatif à un besoin de service sous peine de faire du « besoin » le révélateur du handicap et de ne pas pouvoir porter prioritairement le regard sur le rôle joué par le système éducatif dans le « handicap » des intéressés. Lorsqu’il s’agit des acteurs des systèmes éducatifs, ces soutiens peuvent être des formations à l’attention des personnels provenant d’horizons professionnels différents et ceci d’autant plus fortement que les enseignants français sont moins nombreux que leurs collègues européens à juger avoir été sensibilisés à l’importance de la créativité durant leur formation (14 % contre 41 %), à avoir été formés aux méthodes pédagogiques innovantes (35 % contre 62 %) avec l’idée que leur créativité favorise le développement de la créativité de l’élève (Commission européenne, 2009). Les soutiens peuvent également prendre la forme d’appuis offerts par les Centres nationaux de ressources handicaps rares, les Sessad ou d’autres acteurs du secteur médico-social à même de permettre aux acteurs concernés d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies éducatives complexes par-delà le seul enseignement. Aussi, importe-t-il que les soutiens prennent également la forme d’outils facilitant la différenciation des pratiques pédagogiques, la planification des processus éducatifs ainsi que le développement de synergies entre les secteurs éducatifs, médico-social et sanitaire. Il peut alors s’agir de pallier le manque d’outils d’évaluation à même de cerner précisément les besoins et les aptitudes des personnes. Il peut également s’agir de développer des parcours personnalisés de scolarisation structurés autour d’un projet personnalisé de scolarisation incluant un projet de transition ; il peut également s’agir de formaliser des démarches favorables à l’instauration de systèmes équitables de coopération mobilisant l’ensemble des acteurs concernés par le processus éducatif autour du devenir de l’enfant.

Bibliographie

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