Bisphénol A

2011


ANALYSE

24-

Études épidémiologiques

Au cours des dix dernières années, quelques études épidémiologiques ont été réalisées pour documenter l’impact sanitaire potentiel de l’exposition au bisphénol A (BPA) dans l’espèce humaine, notamment pour apprécier les conséquences d’une exposition sur la fonction de reproduction chez l’homme et la femme.

Effets sur la fonction de reproduction masculine

Trois études réalisées à Aichi (Japon) en milieu professionnel, auprès d’hommes consultant pour infertilité dans un service hospitalier du Massachusetts (État-Unis) ainsi qu’auprès de partenaires de femmes enceintes recrutés aux États-Unis (Study for Future Families) ont caractérisé l’association entre l’exposition au BPA et la concentration plasmatique de certaines hormones gonadotropes ou gonadiques (Hanaoka et coll., 2002renvoi vers ; Meeker et coll., 2010arenvoi vers ; Mendiola et coll., 2010renvoi vers).
Une étude réalisée en Chine entre 2004 et 2008 a comparé la fonction sexuelle de travailleurs potentiellement exposés au bisphénol A avec celle de travailleurs non exposés (Li et coll., 2010arenvoi vers ; Li et coll, 2010brenvoi vers). L’effet potentiel du bisphénol A sur les caractéristiques spermatiques a également été caractérisé par Li et coll. (2010crenvoi vers), ainsi que dans deux populations américaines de patients consultant pour infertilité dans un service hospitalier du Massachusetts (Meeker et coll., 2010brenvoi vers) et auprès des partenaires de femmes enceintes de la Study for Future Families (Mendiola et coll., 2010renvoi vers).

Hormones gonadotropes, gonadiques et thyroïdiennes

L’étude réalisée par Hanaoka et coll. (2002renvoi vers) dans la préfecture d’Aichi reposait sur une approche transversale auprès de 42 travailleurs utilisant le diglycidyléther de bisphénol A (bisphénol A diglycidyl éther, ou BADGE) mélangé à des solvants organiques afin de durcir des résines époxy, recrutés dans 3 usines, qui ont été comparés à 42 travailleurs des mêmes usines mais qui n’utilisaient pas de BADGE. Les travailleurs non exposés ont été appariés aux travailleurs exposés en termes d’âge (à 3 ans près) et de nombre de cigarettes fumées quotidiennement. Un prélèvement urinaire a eu lieu entre 10 et 12 h du matin afin de doser la concentration en BPA et en métabolites de solvants organiques auxquels les travailleurs étaient potentiellement exposés ; une prise de sang le même jour a permis le dosage des concentrations plasmatiques de 3 hormones (LH, FSH et testostérone). Le niveau médian de bisphénol A était environ le double pour les travailleurs utilisant le BADGE que pour ceux ne l’utilisant pas ; la moyenne était supérieure de 2,5 μMol/Mol de créatinine pour les exposés (p=0,002) (tableau 24.Irenvoi vers).
Les niveaux médians de LH et testostérone libre étaient similaires chez les travailleurs exposés au BADGE et ceux qui ne l’étaient pas. La concentration de FSH plasmatique tendait à diminuer en fonction de la concentration urinaire de bisphénol A (p=0,05, après ajustement sur l’âge et la consommation d’alcool), mais apparemment pas sur les concentrations des métabolites des solvants organiques. La concentration urinaire d’acide 2-butoxyacétique, métabolite du 2-méthoxy éthanol (solvant organique), dosé lui aussi dans les urines, tendait également à être associée au niveau de FSH plasmatique (p=0,12).
La corrélation entre le bisphénol A et l’acide 2-butoxyacétique (probable car les auteurs indiquent que le BADGE est utilisé conjointement à des solvants organiques) n’a pas été rapportée, ce qui ne permet pas d’apprécier complètement dans quelle mesure ce métabolite pouvait expliquer l’association statistique entre bisphénol A et FSH.
L’étude réalisée dans le Massachusetts par Meeker et coll. (2010arenvoi vers) concernait des hommes consultant pour infertilité et a priori non exposés professionnellement. L’étude américaine s’est intéressée à davantage de paramètres hormonaux, et notamment l’inhibine B (marqueur de l’activité des cellules de Sertoli, qui sont les cellules de soutien de la spermatogenèse dans le testicule) et les hormones liées à la fonction thyroïdienne. Les hommes inclus étaient âgés de 18 à 55 ans, sans vasectomie, consultant au laboratoire d’andrologie du Massachusetts General Hospital (Boston). Le taux de participation approximatif des sujets éligibles approchés était de 65 %, et 167 hommes ont pu être recrutés. La concentration de bisphénol A a été estimée à partir de prélèvements urinaires réalisés le même jour que les prélèvements de sérum ayant permis les dosages hormonaux. La concentration urinaire de bisphénol A était associée à une augmentation du taux plasmatique de FSH (contrairement à l’étude de Hanaoka et coll., 2002renvoi vers), à une diminution du taux d’inhibine B et du ratio œstradiol/testostérone (considéré comme un marqueur de l’activité aromatase), ainsi qu’à une augmentation du ratio FSH/inhibine B (considéré comme un marqueur de l’activité des cellules de Sertoli). De façon statistiquement non significative, le taux de LH avait tendance à augmenter avec l’exposition (p=0,07). Le taux de bisphénol A n’était pas associé aux concentrations d’hormones thyroïdiennes (TSH, triiodothyronine T3, tétraïodothyronine T4).
Pour 75 hommes, des prélèvements urinaires ayant permis des dosages supplémentaires du bisphénol A ont été réalisés dans la période suivant le jour du prélèvement sanguin lors duquel le dosage hormonal a été fait ; l’objectif de ces dosages supplémentaires était d’améliorer l’estimation de l’exposition en utilisant la moyenne de plusieurs dosages plutôt qu’un unique dosage du BPA. La pertinence de l’approche utilisée est discutable, dans la mesure où la taille de l’échantillon était bien plus faible que dans l’analyse principale, et où les dosages supplémentaires de BPA ont eu lieu ultérieurement aux dosages hormonaux. Les analyses statistiques ont été répétées, en prenant cette fois en compte la moyenne géométrique des dosages de bisphénol A successifs. Dans ce sous-groupe, les paramètres caractérisant les associations entre bisphénol A et dosages hormonaux étaient très similaires qu’on estime la dose de bisphénol A à partir du premier dosage ou des dosages successifs. Les dosages additionnels de bisphénol A ayant été réalisés après le dosage des hormones plasmatiques, cette nouvelle analyse présente un intérêt limité et doit être interprétée avec prudence, d’autant que le nombre de sujets était bien plus faible que dans l’analyse principale. Elle n’apportait donc pas réellement d’information supplémentaire par rapport aux résultats rapportés plus haut.
La principale limitation de ces deux études est leur approche transversale, consistant en un dosage simultané des niveaux de bisphénol A et des paramètres hormonaux d’intérêt. Un tel protocole ne permet pas d’estimer l’imprégnation au bisphénol A dans la fenêtre de temps biologiquement pertinente qui, si elle n’est pas connue avec précision, est nécessairement antérieure à la période du dosage hormonal ; selon que cette fenêtre est située quelques jours, quelques mois ou années avant le moment où les paramètres hormonaux sont dosés, le niveau de bisphénol A le jour du dosage hormonal représentera plus ou moins bien la dose dans la fenêtre d’exposition biologiquement pertinente. Ce protocole ne permet pas non plus d’écarter un biais de causalité inverse, qui pourrait survenir si le statut hormonal était associé à une modification du métabolisme du bisphénol A, ce qui serait susceptible d’entraîner une association statistique entre dosages hormonaux et concentration urinaire de bisphénol A dans laquelle les variations des concentrations hormonales seraient la cause et non pas la conséquence de l’exposition au bisphénol A. Un protocole plus satisfaisant pour documenter les effets à court terme de polluants ayant une demi-vie dans l’organisme courte (Bonde et coll., 1996renvoi vers) consisterait à réaliser des dosages urinaires répétés de bisphénol A, suivis d’un ou plusieurs dosages hormonaux, et de mettre en relation les niveaux de bisphénol A (moyennés sur une certaine fenêtre temporelle) avec le statut hormonal ultérieur. Toutefois, il faut noter que ce protocole assez lourd à mettre en œuvre est jusqu’ici très rare dans la littérature, en particulier lors des premières études réalisées sur un contaminant.
Enfin, Mendiola et coll. (2010renvoi vers) ont abordé la problématique de l’influence possible du BPA sur les caractéristiques hormonales parmi les hommes de la Study For Future Families réalisée dans quatre villes des États-Unis. Cette étude transversale diffère des études mentionnées ci-dessus essentiellement par le fait qu’elle ne concernait que des hommes dont la partenaire était enceinte lors du recrutement, et donc fertile. Au total, 317 hommes recrutés entre 1999 et 2005 dans 4 villes de Californie, Iowa, Minnesota et Missouri ont été pris en compte. Des recueils d’urine (à partir duquel le BPA a été dosé), de sang (permettant les dosages hormonaux) ainsi que de sperme (voir plus bas, caractéristiques spermatiques) ont été réalisés le même jour. Une analyse par régression multiple ajustée sur les facteurs de confusion potentiels a indiqué une diminution de l’indice d’androgènes libres (free androgen index, FAI) et du ratio FAI/LH en association avec le BPA. Les concentrations sériques de SHBG étaient positivement associées au BPA. Des associations non significatives statistiquement au seuil retenu par les auteurs étaient observées entre le BPA et le ratio testostérone libre/LH (corrélation négative) et entre le BPA et la concentration sérique de LH (corrélation positive). Le taux estimé de testostérone libre n’était pas associé au BPA, pas plus que la concentration d’inhibine B ou de FSH.
Comme les études précédentes, celle-ci est limitée par sa nature transversale. Les résultats de cette étude forment un ensemble peu cohérent avec ceux décrits par Meeker et coll. (2010arenvoi vers) ; ceux-ci (voir plus haut) avaient rapporté que le bisphénol A était associé à une augmentation du taux plasmatique de FSH, à une diminution du taux d’inhibine B et du ratio œstradiol/testostérone, ainsi qu’à une augmentation du ratio FSH/inhibine B.

Dysfonction sexuelle

L’étude transversale portant sur la fonction sexuelle (Li et coll., 2010arenvoi vers) a consisté à identifier une usine produisant du bisphénol A et trois usines en utilisant (usines dites exposées), à chercher à y recruter tous les travailleurs masculins exposés au bisphénol A, et à estimer par questionnaire la fréquence de certains troubles de la fonction sexuelle, déclarés lors d’un entretien en face-à-face standardisé. La fréquence de ces troubles a été comparée à celle observée selon une même approche dans une population témoin constituée de travailleurs d’usines n’utilisant pas de bisphénol A, et de conjoints masculins de femmes non exposées recrutées dans ces usines pour une étude ancillaire portant sur la santé de la femme. Le taux de participation des 373 travailleurs potentiellement exposés éligibles était de 62 %, d’où 46 travailleurs à la retraite ont été exclus ; parmi les travailleurs participant, 20 travailleurs (9,2 % des travailleurs exposés acceptant de participer) ont été exclus car ils n’ont pas répondu aux questions sur la vie sexuelle, d’après les auteurs bien souvent du fait d’une absence d’activité sexuelle récente. Parmi les travailleurs des usines n’utilisant pas de bisphénol A, le taux de participation des travailleurs éligibles était de 55 % ; ce groupe a été augmenté d’un groupe de 120 conjoints de femmes travaillant dans les usines non exposées (taux de participation non mentionné). Parmi ces travailleurs non exposés participant, 18 (4,4 % des sujets non exposés participant) ont été exclus du fait d’une absence de réponse aux questions sur l’activité sexuelle, ce qui correspond à un taux inférieur de moitié à celui constaté parmi les travailleurs exposés. Au final, 164 travailleurs potentiellement exposés et 386 travailleurs n’utilisant pas de bisphénol A ont participé.
La proportion d’hommes rapportant une difficulté à obtenir une érection était de 15,5 % chez les travailleurs considérés exposés, contre 4,4 % chez les travailleurs considérés non exposés, ce qui correspondait à un odds-ratio de trouble de l’érection de 3,9 après ajustement (intervalle de confiance à 95 %, 1,8 à 8,5). Une augmentation nette statistiquement et d’amplitude élevée était également observée pour toutes les autres caractéristiques de la vie sexuelle étudiées en relation avec l’exposition au bisphénol A (tableau 24.Irenvoi vers). Ces associations se maintenaient après exclusion des sujets déclarant avoir été exposés à d’autres produits chimiques ou à des métaux lourds à un moment quelconque de leur vie professionnelle, exposition quatre fois plus fréquente chez les travailleurs du groupe exposé au bisphénol A. L’association entre ces autres expositions et les caractéristiques de la vie sexuelle n’a pas été décrite.
En outre, les auteurs ont quantifié les niveaux de bisphénol A dans l’air de certains ateliers des usines produisant ou utilisant du bisphénol A, ainsi que les concentrations urinaires chez un sous-échantillon des travailleurs considérés exposés (n=123) et non exposés (n=254). Ces dosages ont confirmé qu’en médiane, les travailleurs du groupe considéré exposé étaient effectivement davantage exposés (dose médiane, 58 μg/g créatinine, 25-75e centiles, 13-467) que les travailleurs du groupe considéré non exposé (dose médiane, 1 μg/g créatinine, 25-75e centiles, 0-11). Les dosages dans l’air ont permis de construire un indice d’exposition (combinant les niveaux de bisphénol A mesurés dans chaque atelier au nombre d’années passé par chaque travailleur dans l’atelier). Dans des analyses prenant en compte cet indice (en choisissant toujours le groupe des travailleurs des usines n’utilisant pas de bisphénol A comme référence), les auteurs ont décrit l’évolution des odds-ratio de troubles de la vie sexuelle entre le groupe non exposé et les 3 tertiles d’exposition au bisphénol A. Une association dose-réponse monotone a été observée entre niveau croissant d’exposition cumulée au BPA et risque de dysfonction sexuelle.
On notera que, si l’objectif précis de l’étude n’avait pas été indiqué aux ouvriers lors du lancement de ce travail, on peut s’attendre à ce que cet objectif ait été connu dès que les premiers ouvriers ont répondu au questionnaire ; de plus, les entretiens ne se faisaient probablement pas à l’aveugle du statut du travailleur vis-à-vis de l’exposition, cette exposition étant totalement définie par la connaissance de l’usine, où les entretiens ont apparemment eu lieu. Ceci a pu avoir une influence sur la fréquence des troubles de la fonction sexuelle estimée dans les usines utilisant et n’utilisant pas de bisphénol A. Cette limite ne s’applique pas à l’analyse restreinte aux travailleurs non exposés (Li et coll., 2010arenvoi vers). L’écart très important dans la fréquence des troubles de la vie sexuelle entre les sujets exposés et non exposés mérite d’être noté, et pourrait être attribué à un biais (par exemple celui mentionné ci-dessus) et/ou à un effet très important de l’exposition au bisphénol A (environ 50 fois plus élevée parmi les travailleurs exposés qu’en population générale) et des expositions corrélées au bisphénol A et non prises en compte dans l’étude. On peut également évoquer un biais potentiel lié au choix des valeurs seuils des événements de la vie sexuelle estimés à partir d’une échelle, choix dont le principe n’a pas été explicité.
Dans une seconde publication (Li et coll., 2010brenvoi vers), les auteurs ont réalisé des analyses complémentaires dans un sous-groupe des sujets inclus dans la première étude. Cette nouvelle publication est limitée à 427 travailleurs de la première étude chez qui un dosage de BPA a été réalisé dans les urines (à partir d’un échantillon dont le calendrier de prélèvement par rapport au moment de l’entretien sur la fonction sexuelle n’est pas indiqué). Cette analyse, qui n’est pas indépendante de la précédente, retrouve une association entre exposition au BPA (cette fois estimée sur une échelle quantitative) et la dysfonction sexuelle. L’apport principal de cette nouvelle publication est de proposer une analyse restreinte aux 253 sujets ne travaillant pas à un poste auquel ils étaient exposés au BPA. La dose médiane de BPA dans cette population était de 1,2 μg/g créatinine (25-75e percentiles, 0 à 11,4 μg/g créatinine), contre 53,7 μg/g créatinine chez les travailleurs exposés (25-75e percentiles, 8,6 à 558,9 μg/g créatinine). Les doses internes de BPA chez les travailleurs non exposés étaient donc proches de celles généralement constatées en population générale. Dans le groupe de travailleurs non exposés, les coefficients quantifiant l’association entre le niveau urinaire de BPA et certains marqueurs de la fonction sexuelle (notamment le désir sexuel et la satisfaction générale avec sa vie sexuelle) étaient similaires à ceux rapportés pour l’ensemble des 427 travailleurs, bien que l’association soit statistiquement moins nette (en terme de p-valeur), avec un effectif plus réduit. Les auteurs indiquent que les résultats étaient sensibles aux observations extrêmes (« outliers »), sans préciser de quelle façon. Le principal intérêt de cette nouvelle étude (Li et coll., 2010brenvoi vers) par rapport à la précédente (Li et coll., 2010arenvoi vers) est lié au groupe de population étudiée, c’est-à-dire les travailleurs non exposés, qui permet de caractériser une population dont les niveaux d’exposition sont du même ordre de grandeur que ceux de la population générale, et de limiter le biais possible lié à la connaissance par l’enquêteur du statut des travailleurs vis-à-vis de l’exposition.

Caractéristiques spermatiques

Trois études transversales ont caractérisé l’association entre l’exposition au BPA et les caractéristiques spermatiques, à partir de populations de partenaires de femmes enceintes recrutés dans 4 villes des États-Unis (Mendiola et coll., 2010renvoi vers), d’hommes recrutés dans une clinique d’infertilité du Massachusetts (Meeker et coll., 2010brenvoi vers) et de travailleurs chinois exposés professionnellement au BPA (Li et coll., 2010crenvoi vers). Ces travaux s’appuient sur les populations à partir desquelles l’association entre BPA et caractéristiques hormonales (Mendiola et coll., 2010renvoi vers ; Meeker et coll., 2010arenvoi vers) et entre BPA et dysfonction sexuelle (Li et coll., 2010arenvoi vers) avaient respectivement été décrites.
L’étude de Meeker et coll. (2010brenvoi vers) concernait 190 hommes du Massachusetts, chez qui le BPA a été dosé dans les urines (taux de détection, 89 %) ; le prélèvement urinaire avait lieu le même jour que le recueil de sperme. La concentration urinaire de BPA (codée en continu) était associée à une diminution de la concentration spermatique (p=0,05), de la mobilité spermatique (p=0,10), et de la proportion de spermatozoïdes avec une morphologie considérée normale (p=0,05). Quand il était estimé pour une augmentation correspondant à l’écart entre le 1e et le 3e quartiles de la concentration de BPA et prédit pour les sujets dont les caractéristiques spermatiques correspondaient à la médiane observée dans la population, l’effet estimé du BPA correspondait à une diminution de la concentration spermatique de 23 % (IC 95 %, [-40 ; 0%]), de la mobilité spermatique de 7,5 % (IC 95 % [-17 ; +2 %]) et de 13 % de la proportion de spermatozoïdes avec une morphologie considérée normale (IC 95 %, [-26 % ; 0 %]). Il n’y avait pas d’association nette avec la numération spermatique totale (p=0,27). L’exposition au BPA était également associée à une augmentation de la fragmentation de l’ADN du noyau des spermatozoïdes, estimée à l’aide du test de la comète chez 132 hommes. Une autre publication de la même équipe a indiqué que cette association entre BPA et fragmentation de l’ADN spermatique persistait après ajustement sur les niveaux de butyl-parabène (Meeker et coll., 2011renvoi vers). Quand les caractéristiques spermatiques étaient analysées de façon dichotomique (inférieures versus supérieures aux niveaux de référence), les associations avec le BPA allaient aussi dans le sens d’une altération de ces caractéristiques spermatiques avec l’exposition au BPA, tout en étant moins nettes statistiquement.
La principale limitation de cette étude est liée à son caractère transversal qui, dans la mesure où la durée de vie dans l’organisme humain du BPA est faible, empêche d’estimer l’exposition dans les mois ou les années précédant la mesure des caractéristiques spermatiques.
Li et coll. (2010crenvoi vers) ont étudié une population de 218 hommes, dont 130 étaient exposés professionnellement. L’exposition au BPA était estimée à partir d’un dosage urinaire. Cette exposition était associée à une diminution de la concentration, de la numération totale, de la vitalité et de la mobilité spermatiques. La morphologie spermatique n’était pas associée à la concentration de BPA (p=0,95). L’intégrité de l’ADN n’avait pas été étudiée par Li et coll. Comme dans l’étude sur la dysfonction érectile (Li et coll., 2010), les auteurs ont répété l’analyse en excluant les hommes exposés professionnellement, pour discuter si les associations observées sont susceptibles d’être aussi observées aux doses « environnementales » ; les doses internes des hommes exposés professionnellement étaient en effet environ 50 fois supérieures à celles des hommes non exposés professionnellement. Parmi les 88 hommes non exposés professionnellement, la concentration urinaire de BPA était associée à une diminution de la concentration spermatique (p=0,02), et de la numération totale (p=0,04). Les paramètres des modèles de régression estimant l’association entre ces deux caractéristiques spermatiques et le BPA urinaires étaient en valeur absolue similaires ou supérieurs à ceux estimés en incluant les hommes exposés professionnellement. En revanche, pour ce qui concerne la vitalité ou la mobilité spermatiques, le paramètre avait tendance à se rapprocher de 0, sans qu’on puisse dire si ceci était dû à une modification de la relation dose-réponse aux doses plus faibles ou à une perte de précision due à la forte diminution de l’effectif après restriction aux hommes non exposés professionnellement.
Enfin, Mendiola et coll. (2010renvoi vers) ont étudié eux aussi l’association entre BPA et caractéristiques spermatiques dans la Study for Future Families, réalisée dans 4 villes des États-Unis. Dans l’ensemble, l’analyse, portant sur 317 partenaires de femme enceinte, ne mettait pas en évidence d’association entre BPA et caractéristiques spermatiques (concentration, mobilité, morphologie), estimées à partir d’un recueil réalisé le même jour que le prélèvement urinaire. Le fait que l’étude ait porté sur des hommes tous fertiles a pu limiter la variabilité des caractéristiques spermatiques dans la population, et donc diminuer la puissance statistique de l’étude, par rapport à une étude incluant hommes fertiles et moins fertiles.

Effets sur la fonction de reproduction féminine

Quatre études conduites chez la femme sont rapportées (tableau 24.IIrenvoi vers). Elles se sont intéressées respectivement aux taux d’hormone, à l’endométriose, au cancer du sein et à la survenue de fausses couches spontanées.

Hormones

Une étude rétrospective a porté sur un groupe de 19 femmes non obèses, 7 femmes obèses avec des cycles menstruels considérés normaux, 7 patientes souffrant d’hyperprolactinémie, 21 femmes souffrant d’aménorrhée d’origine hypothalamique et 19 femmes avec un syndrome des ovaires polykystiques, dont 6 étaient obèses (Takeuchi et coll., 2004renvoi vers). Le taux sérique de bisphénol A a été dosé et corrélé à des dosages hormonaux dans l’ensemble de la population. Une association était notamment retrouvée pour la testostérone totale et libre, l’androstènedione et le DHEAS (déhydroépiandrostérone).
Cette étude est difficile à interpréter, du fait notamment de son caractère rétrospectif, gênant dans le cas des pathologies considérées, et de l’absence d’information sur le plan d’échantillonnage (il s’agit apparemment d’un échantillon de population de convenance). La corrélation entre bisphénol A et paramètres hormonaux ne peut pas être interprétée, dans la mesure où les pathologies des sujets (toutes associées à des variations possibles du métabolisme ou du comportement alimentaire, source d’exposition au bisphénol A) n’ont pas été prises en compte.

Endométriose

Deux études se sont intéressées à la relation entre endométriose et taux de bisphénol. Une étude italienne portait sur 69 femmes fertiles consultant à l’hôpital de Naples, pour troubles du cycle menstruel, kystes ovariens ou douleurs pelviennes chroniques (Cobellis et coll., 2009renvoi vers). Au sein de cette population, 58 femmes souffraient d’endométriose (cas), alors que 11 femmes n’avaient pas d’endométriose, et ont été comparées aux cas. Le taux de détection du bisphénol A dans le sang était très faible, ce qui est une limite de l’étude. Le taux de détection du bisphénol A était de 0 % parmi les 11 « témoins », et de 52 % chez les cas. Le niveau de bisphénol A n’a pu être quantifié que pour environ 25 % des cas.
Antérieurement, une étude réalisée sur une population de 140 patientes japonaises choisies parmi 166 femmes se plaignant de stérilité (Itoh et coll., 2007renvoi vers) n’a pas trouvé de différence dans le taux urinaire de bisphénol A entre les femmes avec un diagnostic d’endométriose et celles sans endométriose. Ces deux études utilisent des technologies distinctes pour doser le bisphénol et concernent des populations différentes. Comme pour l’étude sur les concentrations hormonales (Takeuchi et coll., 2004renvoi vers), le dosage rétrospectif du bisphénol A est particulièrement problématique, et ne permet pas de savoir si c’est le taux de bisphénol A qui est susceptible d’influencer la survenue d’endométriose, ou le contraire. Dans l’ensemble, ces études rétrospectives en milieu clinique sont méthodologiquement limitées (absence de plan d’échantillonnage, d’estimation du taux de participation, approche rétrospective...).

Cancer du sein

À notre connaissance, une seule étude épidémiologique a cherché à caractériser l’influence de l’exposition au BPA sur le risque de cancer du sein chez l’humain (Yang et coll., 2009renvoi vers). L’étude était de type cas-témoins, et a porté sur 70 femmes chez qui un cancer du sein a été diagnostiqué (entre 1994 et 1997) à l’hôpital national universitaire de Séoul (Corée du Sud), et 82 femmes témoins appariées sur l’âge et recrutées dans le même hôpital, où elles consultaient du fait d’inquiétudes concernant le cancer du sein, mais chez qui la pathologie n’a finalement pas été diagnostiquée. Le BPA n’était détectable dans le sang que d’environ 51 % des sujets (différence éventuelle entre cas et témoins non indiquée). Il n’y avait pas de différence nette dans le taux de BPA entre les cas (médiane, 0,61 μg/l) et les témoins (médiane, 0,03 μg/l, test de Wilcoxon, p=0,42). La limite importante de cette étude est que le prélèvement ayant permis le dosage du BPA a été fait après le diagnostic du cancer du sein, et qu’il s’agit d’un unique prélèvement, ne permettant pas d’estimer l’exposition moyenne, dans une fenêtre d’exposition cohérente avec celle suggérée dans l’expérimentation animale (exposition fœtale ou périnatale). Le fait de prélever le sang après le diagnostic ne permet pas d’exclure que le taux de BPA est influencé par le statut des sujets vis-à-vis de la maladie (modification des taux de BPA du fait des traitements, de changements de comportement, ou de modifications physiologiques induites par la maladie). Par ailleurs, l’effectif considéré est modeste, et la proportion élevée de valeurs non détectées diminue l’aptitude de l’étude à caractériser efficacement l’impact du BPA sur le cancer du sein.

Effets sur la survie fœtale/survenue de fausse-couche spontanée

Sugiura-Ogasawara et coll. (2005renvoi vers) ont dosé le bisphénol A dans le sérum de femmes de Nagoya (Japon) ayant un antécédent d’au moins 3 fausses-couches spontanées (45 femmes), ainsi que chez 32 femmes n’ayant jamais accouché et n’ayant pas d’antécédent d’infécondité. Les taux de bisphénol A étaient plus élevés chez les femmes ayant un antécédent de 3 fausses couches spontanées. Les auteurs ont aussi réalisé un suivi prospectif de l’ensemble de ces femmes, chez qui 35 grossesses ont été observées, dont 17 fausses couches spontanées. Les femmes ayant eu une fausse couche spontanée au cours du suivi avaient un taux de bisphénol A plus élevé que celles ayant eu une naissance vivante, sans que la différence soit statistiquement significative d’après les auteurs.
Cette étude est difficile à interpréter du fait de l’approche rétrospective, et du choix d’un groupe de comparaison qui semble peu adapté. Un groupe de femmes ayant obtenu une naissance vivante aurait permis de discuter si le niveau de bisphénol A différait selon l’issue de la grossesse ; une mesure de l’exposition avant la survenue de la grossesse plutôt qu’après aurait permis d’éliminer un biais de causalité inverse, qui pourrait créer une différence dans le taux de bisphénol A entre les groupes comparés si le fait d’avoir une grossesse entraînait une modification du taux de bisphénol A (par exemple via une modification du métabolisme, des comportements, notamment alimentaires, de la corpulence...). La partie prospective de l’étude est elle aussi difficile à interpréter du fait de la modalité de sélection de l’échantillon. Cette étude, prise isolément, peut donc être considérée comme étant très peu informative sur l’association entre exposition au bisphénol A et risque de fausse couche spontanée.

Autres effets potentiels du bisphénol A n’entrant pas dans le champ de l’expertise

On peut noter qu’un petit nombre d’études chez l’Homme ont cherché à caractériser l’impact potentiel de l’exposition au bisphénol A sur d’autres événements de santé n’entrant pas dans le champ de cette expertise, et notamment le stress oxydatif et des marqueurs d’inflammation (Yang et coll., 2009renvoi vers), la croissance fœtale (Wolff et coll., 2008renvoi vers), le comportement de l’enfant (Braun, et coll., 2009renvoi vers ; Longnecker, 2009renvoi vers), la survenue de diabète et la fonction hépatique (Lang et coll., 2008renvoi vers).
En conclusion, dans l’ensemble, les études épidémiologiques sont trop peu nombreuses pour déterminer la plausibilité chez l’Homme des effets observés dans l’expérimentation animale. À l’heure actuelle, les études réalisées chez la femme concernant le risque de cancer du sein ou d’endométriose reposent toutes sur une approche rétrospective (particulièrement limitée pour un composé non persistant comme le bisphénol A) et des populations cliniques de convenance, sans plan d’échantillonnage précis. Du côté masculin, une étude en Chine suggère une association entre exposition professionnelle au BPA et troubles de la fonction sexuelle ; de plus, deux études, à partir de cette même population, et d’une population d’hommes consultant auprès d’une clinique d’infertilité du Massachusetts, ont rapporté une diminution de la concentration spermatique en association avec l’exposition au BPA à l’âge adulte, à des doses correspondant aux niveaux rencontrés en population générale. La cohérence de ces deux études et leur caractère transversal impliquent de considérer sérieusement l’hypothèse d’un effet du BPA à l’âge adulte sur la concentration spermatique. La confirmation ou l’infirmation de la plausibilité de retrouver chez l’homme certains des effets mis en évidence dans l’expérimentation animale à la suite d’expositions durant la phase du développement impliquerait la réalisation d’études avec un suivi régulier des expositions chez la femme enceinte puis un suivi sanitaire de sa descendance, longues et lourdes méthodologiquement, auprès de populations de taille importante.

Tableau 24.I Études concernant les effets possibles de l’exposition masculine humaine au bisphénol A ou BADGE sur des paramètres de fertilité

Étude
Population
Exposition
Paramètres de santéa
Résultats et remarques
  
Estimation
Niveau d’exposition
Co-expositions
Estimation
 
Fonction hormonale
      
Hanaoka et coll., 2002renvoi vers
Aichi (Japon)
42 travailleurs exposés, affectation à un poste où le BADGE est utilisé
42 travailleurs non exposés
Dosage urinaire de bisphénol A (prélèvement urinaire et plasmatique le même jour)
Médiane [min-max] :
Exposés :
1,1 [<LOD-11] μg/mol créatinine
Non exposés :
0,5 [<LOD-11] μg/mol créatinine
Solvants organiques
Dosage plasmatique de LH, FSH, T libre
↓ de la FSH (p=0,05) chez les exposés par rapport aux non exposés ;
Pas de différence nette de LH (p=0,65) , T libre (p=0,17) ;
après ajustement sur l’âge et la consommation d’alcool
Meeker et coll., 2010arenvoi vers
Massachusetts (États-Unis)
167 patients masculins consultant pour infertilité
Dosage urinaire (prélèvement urinaire et plasmatique le même jour)
Médiane et moyenne géométrique [25e-75e percentiles] :
1,3 [0,7-2,4] μg/l  de BPA
Non décrites
Dosage plasmatique LH, FSH, Inhibine B, FSH/Inhibine B, T, T libre, SHBG, FAI, T/LH, E2, E2/T, proline, T4 libre, T3 totale, TSH
↑ de FSH, FSH/ Inhibine B et E2/T
↓ de Inhibine B
Mendiola et coll., 2010renvoi vers
(4 villes des États-Unis)
375 hommes partenaires de femme enceinte
Dosage urinaire (prélèvement urinaire et sanguin le même jour)
50e percentile [25e-75e percentiles]
1,7 [0,80-3,0] μg de BPA/l d’urine
Non décrites
Dosage plasmatique LH, FSH, T, Inhibine B, SHBG, E2, FAI, T libre, FAI/LH, FT/LH, T/E2 ratio, T/LH
↓ FAI (free androgen index) et ratio FAI/LH
↑ SHBG
Caractéristiques spermatiques
      
Meeker et coll., 2010brenvoi vers
Massachusetts (États-Unis)
190 patients masculins consultant pour infertilité
Dosage urinaire (prélèvement urinaire et recueil de sperme le même jour)
Médiane et moyenne géométrique [25e-75e percentiles] :
1,3 [0,8-2,5] μg de BPA par l d’urine
Non décrites
Caractéristiques spermatiques
Concentration urinaire de BPA (codée en continu) associée à ↓concentration spermatique (p=0,05), ↓mobilité spermatique (p=0,10), ↓ proportion de spermatozoïdes avec une morphologie considérée normale (p=0,05)
↑fragmentation de l’ADN du noyau des spermatozoïdes
Li et coll., 2010crenvoi vers
(Chine)
218 hommes (130 exposés professionnellement et 88 non exposés professionnellement
Activité professionnelle et validation par dosage urinaire
50e percentile [25e-75e percentiles]
Exposés :
39 [6-354] μg/g créatinine
Non-exposés :
1 [0-18] μg/g créatinine
Autres polluants chimiques, métaux lourds
Caractéristiques spermatiques
↓concentration, de la numération totale, de la vitalité et de la mobilité spermatiques
Mendiola et coll., 2010renvoi vers
(États-Unis)
317 hommes partenaires de femme enceinte
Dosage urinaire (prélèvement urinaire et recueil de sperme le même jour)
50e percentile [25e-75e percentiles]
1,7 [0,80-3,0] μg de BPA par l d’urine
Non décrits
Caractéristiques spermatiques
Pas d’association observée entre BPA et caractéristiques spermatiques parmi ces hommes fertiles
Fonction sexuelle
      
Li et coll., 2010arenvoi vers
4 régions
(Chine)
164 travailleurs exposés  - travailleurs de 4 usines produisant ou utilisant du bisphénol A
386 travailleurs non exposés : travailleurs n’utilisant pas de bisphénol A, ou certains maris non-exposés de femmes travailleuses non-exposées
Intitulé du poste de travail (matrice emploi exposition) et validation par dosage urinaire
50e percentile [25e-75e percentiles]
Exposés :
58 [13-467] μg/g créatinine
Non-exposés :
1 [0-11] μg/g créatinine
Autres polluants chimiques, métaux lourds (13 % des sujets non exposés, 59 % des exposés)
Questionnaires sur dysfonction érectile, dysfonction orgasmique, désir sexuel, satisfaction vis-à-vis de la vie sexuelle
Odds-ratios (OR) associés à l’exposition au BPA :
OR=3,9 (IC 95 % : 1,8-8,5) pour la difficulté à obtenir une érection >50 % des rapports ;
OR=7,1 (2,9-17,6) pour le fait de rapporter des difficultés à éjaculer ;
OR=3,9 (2,3-6,6) pour un niveau de satisfaction vis-à-vis de la vie sexuelle < à 10 (sur une échelle de 0 à 10)
Résultats globalement inchangés après exclusion des hommes déclarant être exposés aux autres polluants chimiques et métaux lourds
Li et coll., 2010brenvoi vers (Chine)
427 travailleurs :
174 exposés et 253 non exposés (inclut les sujets de l’étude Li et coll., 2010arenvoi vers)
Dosage urinaire du bisphénol
Idem
Idem
Questionnaires sur dysfonction érectile, dysfonction orgasmique, désir sexuel, satisfaction vis-à-vis de la vie sexuelle
Associations monotones entre le taux de bisphénol urinaire et les différents paramètres de dysfonction sexuelle étudiés. Résultats globalement inchangés après exclusion des hommes déclarant être exposés aux autres polluants chimiques et métaux lourds. Les tendances se maintiennent (mais intervalles de confiance plus larges) quand la population est restreinte aux hommes exposés à des niveaux environnementaux (sans exposition professionnelle)

a E2 : œstrogène ; FAI : Free androgen index, correspondant au ratio entre la concentration totale de testostérone et la concentration de SHBG ; FSH : hormone folliculo-stimuline ; LH : hormone lutéinisante ; SHBG : Sex hormone binding globulin, T : testostérone, T4, T3 ; TSH : Hormone thyroïdo-stimuline ; LOD : limit of detection

Tableau 24.II Études concernant les effets possibles de l’exposition féminine humaine au bisphénol A sur des paramètres de fertilité

Étude
Population
Exposition
Paramètres de santéa
Résultats et remarques
  
Estimation
Niveau d’exposition
Estimation
 
Fonction hormonale
     
Takeuchi et coll., 2004renvoi vers
Tokyo
(Japon)
19 femmes non obèses, 7 femmes obèses avec des cycles menstruels normaux, 7 patientes souffrant d’hyperprolactinémie (Hyper-pro), 21 femmes souffrant d’aménorrhée d’origine hypothalamique (HA) et 19 femmes avec un syndrome des ovaires polykystiques (SOP), dont 6 obèses
Dosage sérique de bisphénol A
Non obèses : 0,71±0,09
Obèses : 1,04±0,09 (p<0,05)
Hyper-pro : 0,83±0,12 (ns)
HA : 0,84±0,10 (ns)
SOP (non obèses) : 1,05±0,10 (p<0,05)
SOP (obèses) : 1,17± 0,16 (p<0,05)
Dosage sérique de LH, FSH, E2, T totale, T libre, A, DHEAS, prolactine, Insuline
Mesure de l’IMC
Association entre le taux sérique de bisphénol A de l’ensemble de la population et la T totale, T libre, A et DHEAS
Étude difficile à interpréter car les facteurs de confusion propres à chaque pathologie n’ont pas été pris en compte et absence d’information sur l’échantillonage de la population
Endométriose
     
Cobellis et coll., 2009renvoi vers
Naples
(Italie)
Sur 69 femmes fertiles en consultation à l’hôpital
58 femmes souffrant d’endométriose
11 femmes non atteintes
Dosage sérique de bisphénol A
Détection chez 52 % des cas
Aucune détection chez les témoins
Endométriose
Étude difficile à interpréter car les taux de détection du bisphénol A dans le sang sont faibles
Itoh et coll., 2007renvoi vers
Tokyo
(Japon)
Sur 166 femmes infertiles consultant à l’hopital
140 femmes avec un diagnostic d’endométriose
Dosage urinaire de bisphénol A
Médiane [25e–75e percentiles]
Grade 0-IV : 0,80 [0,45-1,3] μg/g créatinine
Grade 0-I : 0,74 [0,45-1,21] μg/g créatinine (ns)
Grade II-IV : 0,93 [0,5- 01,48] μg/g créatinine (ns)
Endométriose avec détermination du grade de sévérité (0 à IV)
Pas d’association entre le taux de bisphénol A urinaire et l’endométriose
Étude difficile à interpréter difficile car elle comporte des limites méthodologiques
Cancer du sein
     
Yang et coll., 2009renvoi vers
Séoul
(Corée du Sud)
70 femmes avec un cancer du sein diagnostiqué
82 femmes consultant dans le même hôpital
Dosage sérique du bisphénol A
Médiane
Cas : 0,61 μg/l (test de Wilcoxon, p=0,42)
Témoins : 0,03  μg/l
Cancer du sein
Pas d’association entre taux de bisphénol A et survenue de cancer du sein
Étude difficile à interpréter car elle comporte des limites méthodologiques
Survenue de fausses-couches
     
Sugiura-Ogasawara et coll., 2005renvoi vers
Nagoya (Japon)
45 femmes ayant eu au moins trois fausses-couches spontanées
32 femmes n’ayant jamais accouché et sans antécédent d’infécondité
Dosage sérique du bisphénol A
Moyenne ± SD
Cas : 2,59±5,23 μg/l (p=0,024)
Témoins : 0,77±0,38 μg/l
Grossesses
Fausses-couches spontanées
Pas d’association significative entre taux élevé de bisphénol et la survenue d’une fausse-couche selon les auteurs
Étude difficile à interpréter car elle comporte des limites méthodologiques

a A : androstènedione ; DHEAS : déhydroépiandrostérone ; E2 : œstrogène ; IMC : Indice de masse corporelle ; FSH : hormone folliculo-stimuline ; LH : hormone lutéinisante ; SHBG : Sex hormone binding globulin, T : testostérone, TSH : Hormone thyroïdo-stimuline

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