Médicaments psychotropes
Consommations et pharmacodépendances

2012


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Cet ouvrage présente les travaux du groupe d’experts réunis par l’Inserm dans le cadre de la procédure d’expertise collective (annexe 1), pour répondre à la demande de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) concernant les consommations de médicaments psychotropes et le phénomène de pharmacodépendance.
Ce travail s’appuie sur les données scientifiques disponibles en date du second semestre 2011. Près de 1 100 articles ont constitué la base documentaire de cette expertise.
Le Centre d’expertise collective de l’Inserm, rattaché à l’Institut thématique multi-organismes Santé publique d’Aviesan (Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé), a assuré la coordination de cette expertise collective.
Pour citer ce document :
INSERM. Médicaments psychotropes : consommations et pharmacodépendances. Collection Expertise collective, Inserm, Paris, 2012

Groupe d’experts et auteurs

Agnès cadet-taïrou, Pôle Tendances récentes et phénomènes émergents, Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Saint-Denis La Plaine

Tiphaine canarelli, Pôle Indicateurs, Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Saint-Denis La Plaine

Serge escots, Institut d’anthropologie clinique, Toulouse

Françoise facy, Unité mixte de recherche épidémiologique et de surveillance transport travail environnement (Umrestte), UMR 9405, Ifsttar-Université Lyon 1, Bron

Laurence lanfumey-mongredien, Équipe Physiopathologie des troubles de l’humeur et de l’addiction, Centre de psychiatrie et neurosciences, Inserm, UMR-S 894, Université Pierre et Marie Curie, Paris

Maryse lapeyre-mestre, Équipe Pharmaco-épidémiologie, Laboratoire d’Épidémiologie et analyses en santé publique, Inserm, UMR 1027, Université Paul Sabatier ; Centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance et d’addictovigilance (CEIP-A) de Toulouse, Service de pharmacologie clinique, CHU, Université Paul Sabatier, Toulouse

Philippe le moigne, Cermes3 (Centre de recherche médecine, sciences, santé, santé mentale et société), Inserm U 988, CNRS UMR 8211, EHESS, Université Paris Descartes, Paris

Florence noble, Unité de Neuropsychopharmacologie des addictions, Inserm UMR-S 705 / CNRS UMR 8206, Université Paris Descartes, Paris

Xavier thirion, Équipe Évaluation hospitalière – Mesure de la santé perçue EA 3279, Laboratoire de Santé publique, Faculté de médecine de Marseille ; Centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance et d’addictovigilance (CEIP-A) de Marseille, Aix-Marseille Université, Marseille

Marie tournier, Pharmaco-épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de santé sur les populations, Inserm U 657, Centre hospitalier Charles Perrens, Université Bordeaux Segalen, Bordeaux

Florence vorspan, Csapa (Centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) Espace Murger, Hôpital Fernand Widal, AP-HP ; Unité de Neuropsychopharmacologie des addictions, Inserm UMR-S 705 / CNRS UMR 8206, Université Paris Descartes, Université Paris Diderot, PRES Sorbonne Paris Cité, Paris

Ont présenté une communication

Frédéric baud, Réanimation médicale et toxicologique, Hôpital Lariboisière, AP-HP, Université Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité, Paris

Emmanuel lagarde et Ludivine orriols, Prévention et prise en charge des traumatismes, Épidémiologie et biostatistique, Inserm U 897, Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement (Isped), Université Bordeaux Segalen, Bordeaux

Ivana obradovic, Pôle Évaluation des politiques publiques, Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Saint-Denis La Plaine

Caroline victorri-vigneau, Équipe Biostatistique, pharmaco-épidémiologie et mesures subjectives en santé EA 4275 ; Centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance et d’addictovigilance (CEIP-A) de Nantes, Université de Nantes

Remerciements L’Inserm et le groupe d’experts remercient François beck et Romain guignard (Département Enquêtes et analyses statistiques, Inpes), pour les premières analyses des données du Baromètre santé 2010 sur la consommation de médicaments psychotropes.

L’Inserm et le groupe d’experts remercient également Bruno falissard (Inserm U 669, santé mentale et santé publique ; Faculté de médecine Paris-Sud, Université Paris-Sud), Nathalie richard (Département Stupéfiants et psychotropes, Afssaps) et Nadia younes (Service de psychiatrie adulte, Centre Hospitalier de Versailles, Université Versailles Saint Quentin) pour leur relecture attentive de l’ouvrage et leurs conseils.

Coordination scientifique, éditoriale, bibliographique et logistique

Fabienne bonnin, attachée scientifique, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Catherine chenu, attachée scientifique, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Jean-Luc daval, chargé d’expertise, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Jeanne etiemble, directrice de recherche émérite, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Cécile gomis, secrétaire, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Marie-Christine lecomte, directrice, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Anne-Laure pellier, attachée scientifique, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Chantal rondet-grellier, documentaliste, Centre d’expertise collective de l’Inserm, Faculté de médecine Xavier-Bichat, Paris

Iconographie

Jean-Pierre laigneau, Inserm


Avant-propos

Les médicaments composés de substances classées comme psychotropes ou stupéfiants sont soumis à un cadre réglementaire de prescription et de délivrance qui tient compte de leur statut. Cette réglementation vise à encadrer l’utilisation et à limiter le mésusage et l’abus éventuels de ces médicaments psychotropes tout en garantissant l’accès pour leur intérêt thérapeutique.
En France, plusieurs rapports publics ont souligné les niveaux élevés de consommation de médicaments psychotropes dans la population générale et ont analysé les conditions ou les conséquences de leur usage. Ce sont principalement le rapport Legrain (1990)1 , le rapport Zarifian (1996)2 et le rapport plus récent de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé (Opeps) sur le bon usage des médicaments psychotropes (2006)3 .
Du fait de leurs propriétés psychoactives, les médicaments psychotropes sont parfois consommés en dehors de tout contexte médical et ils peuvent faire l’objet de détournements voire de trafic au même titre que les drogues illicites. Les médicaments de substitution prescrits face à une dépendance aux opiacés sont également concernés. Dans les populations usagères de drogues, la polyconsommation et la polydépendance sont souvent la règle.
Conformément aux recommandations du Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies 2008-2011, la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) a sollicité l’Inserm pour la réalisation d’une expertise selon la procédure d’expertise collective, sur le thème « Médicaments psychotropes : consommations et pharmacodépendances » avec l’objectif d’identifier de nouvelles stratégies de santé publique adaptées à la situation française actuelle.
Pour répondre à cette demande, l’Inserm a réuni un groupe pluridisciplinaire de 11 experts dans les champs de l’épidémiologie, la pharmaco-épidémiologie, la pharmacovigilance, la santé publique, la sociologie, l’anthropologie, la toxicologie, la psychiatrie, la neurobiologie. La réflexion a été engagée sur la base des principales questions suivantes :
• Comment se situe la France parmi les autres pays européens quant à la consommation globale de différents médicaments psychotropes ? Quels sont les phénomènes émergents concernant l’usage des divers médicaments ?
• Quelles sont les données disponibles sur la consommation de médicaments psychotropes en population générale française ? Comment se répartit la consommation dans les différentes tranches d’âge (jeunes, adultes, personnes âgées) ? Quelles sont les évolutions observées ?
• Quelles sont les données de consommation de médicaments psychotropes dans les populations spécifiques (usagers de drogues, personnes détenues...), et quels sont les contextes d’usage et les facteurs de risques ? Quels sont les médicaments détournés et quelles évolutions observe-t-on ?
• Comment définir et appréhender la pharmacodépendance en population générale ? Comment définir et appréhender le mésusage et la pharmacodépendance chez les usagers de drogues, les personnes alcoolo-dépendantes, dans les populations psychiatriques... ?
• Quelles sont les conséquences cliniques (sur le neurodéveloppement, les dépendances ultérieures...) d’une exposition précoce aux médicaments psychotropes ? Quels sont leurs fondements neurobiologiques ?
• Existe-t-il des spécificités neurobiologiques de la dépendance aux médicaments psychotropes ? Comment se manifestent les interactions médicamenteuses en cas de polyconsommation ? Quelle est la part des vulnérabilités individuelles (facteurs génétiques et épigénétiques) ?
• Quelle est la réglementation en France régissant la prescription et la délivrance des médicaments psychotropes à risque d’abus et de dépendance ?
• Quels sont les modes de détournement de médicaments psychotropes ?
• Quelles sont les politiques publiques visant à prévenir le mésusage, la dépendance et le détournement des médicaments psychotropes ? Quelles sont les perspectives de prévention ?
Au cours d’une dizaine de séances de travail en 2010-2011, le groupe d’experts a effectué une analyse critique des données disponibles en s’appuyant sur près de 1 100 publications scientifiques sélectionnées à partir des bases bibliographiques internationales, ainsi que sur différents rapports nationaux et internationaux. Dans cette expertise, quatre communications complètent l’analyse de la littérature sur des points particuliers : la place des médicaments psychotropes dans l’insécurité routière ; les traitements des dépendances en prison ; l’apport du développement de nouvelles formes galéniques dans la lutte contre le mésusage ; l’évolution, entre 1997 et 2008, des intoxications admises en réanimation en Île-de-France. La réflexion collective des experts prenant appui sur les données scientifiques récentes a permis d’émettre un certain nombre de recommandations d’actions et d’identifier quelques axes de recherche à développer.

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