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Med Sci (Paris). 38(3): 280–287.
doi: 10.1051/medsci/2022029.

La contraception dans d’autres pays
État de la situation au Brésil

Marcio A. Hipolito Rodrigues1 and Marcia Mendonça Carneiro1*

1Department of Gynecology and Obstetrics, Federal University of Minas Gerais , Belo Horizonte , Brésil
Corresponding author.
 

Vignette (© Inserm/Universcience/CNDP/Picta production-Véronique Kleiner).

Au Brésil, l’accès des femmes à la contraception est gratuit grâce au système de santé publique, le Système de santé unifié (SUS), qui offre, du nord au sud du pays, plusieurs options de méthodes contraceptives et des actions pour aider à la planification sexuelle et reproductive. Huit types de contraceptifs sont ainsi disponibles, comprenant, entre autres, le dispositif intra-utérin (DIU) au cuivre, les préservatifs masculins et féminins et les contraceptifs hormonaux oraux (contraceptions hormonales combinées) ou injectables. Il est également possible de choisir une contraception définitive, vasectomie et stérilisation féminine, si l’homme ou la femme ont plus de 25 ans ou deux enfants.

Malheureusement, les retards fréquents dans la prise de rendez-vous, le manque d’informations sur les méthodes disponibles, le défaut de connaissance des effets bénéfiques et l’insuffisance d’informations sur les effets indésirables possibles, en plus de l’offre limitée des différentes méthodes, contribuent encore au fort taux de grossesses non désirées, aux modifications de choix conduisant à l’utilisation de méthodes contraceptives pourtant moins efficaces, aux changements fréquents entre les options disponibles, ou à l’utilisation de la contraception sans ordonnance formelle d’un professionnel de santé, lors de la recherche ou même de l’achat par l’intermédiaire du pharmacien.

Malgré tous ces éléments, une forte baisse du taux de fécondité a été observée au cours des dernières décennies, passant de 6,3 enfants par femme en 1960 à 1,7 enfants en 2018. En parallèle, l’utilisation des méthodes contraceptives chez les femmes âgées de 15 à 49 ans est passée de 66,2 % en 1986, à 80,6 % en 2006 [ 1 ]. Les données obtenues dans le cadre de la recherche « Pesquisa Nascer » au Brésil, réalisée en 2014, qui a inclus 23 894 femmes suivies dans les maternités publiques, révèlent que 55,4 % des grossesses n’étaient cependant pas désirées [ 2 ].

Les manques de planification familiale et de disponibilité d’une contraception efficace ont des effets néfastes sur les femmes et leurs enfants, augmentant la mortalité maternelle et les complications obstétricales maternelles, fœtales et néonatales. Une grossesse non planifiée, en particulier chez les jeunes femmes, peut également compromettre leur accès à l’éducation et leur avenir professionnel, les condamnant à des situations socio-économiques précaires. Le bien-être des familles et des communautés concernées peut également être affecté. Donner une assistance contraceptive adéquate est donc une mesure fondamentale, en particulier lorsque les ressources financières sont rares, comme dans d’innombrables régions brésiliennes.

Bref historique

En 1984, le gouvernement brésilien a lancé le Programme d’assistance globale pour la santé des femmes (PAISM) dans le but de permettre à la population d’accéder à la contraception et d’élargir cette assistance, en y incorporant des mesures éducatives, préventives, de promotion, de diagnostic, de traitement et de rétablissement dans différents domaines (gynécologie, prénatal, accouchement et puerpéralité, climatère 1 , planification familiale, infections sexuellement transmissibles, cancers du sein et du col de l’utérus). En 1996, le ministère de la Santé, en partenariat avec la Fédération brésilienne des associations de gynécologie et d’obstétrique (FEBRASGO), le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et l’Organisation panaméricaine de la santé (OPAS), a lancé le projet de maternité sans risque, avec l’objectif de réduire la mortalité maternelle et périnatale, en travaillant sur l’amélioration de l’accouchement et des soins aux nouveau-nés. En 2004, la PNAISM (politique nationale pour une attention globale à la santé des femmes - principes et directives) a été élaborée par le ministère de la Santé, garantissant, à son tour, les droits des femmes, dans le but de réduire les blessures dues à des causes évitables, avec un objectif principal dans les soins obstétricaux, la planification familiale, les soins en cas de fausse couche à risque et la lutte contre les violences domestique et sexuelle [ 3 , 4 ]. Les premiers efforts pour mettre en œuvre la PNAISM comprenaient l’offre de produits contraceptifs pour les services de santé publique et la formation de professionnels afin d’assurer des soins de planification familiale de qualité. Malgré les efforts mis en œuvre, peu de progrès ont été réalisés en raison d’une certaine discontinuité de la politique, et de sa faible efficacité [ 5 ]. La planification familiale est également un objet d’attention dans la Constitution Fédérale du Brésil, qui, comme explicité dans son article 226, septième paragraphe 2 , est considérée comme la libre décision de chaque couple [ 6 ]. En 1996, la loi n° 9263 a commencé à réglementer la planification familiale. L’article 2 de cette loi définit la planification familiale comme l’ensemble des actions de régulation de la fécondité qui garantissent l’égalité des droits de constitution, de limitation ou d’augmentation du nombre de descendants des femmes, des hommes ou des couples. L’utilisation des actions auxquelles elles se rapportent, est, par ailleurs, interdite à n’importe quel type de contrôle démographique [ 7 ]. Le ministère de la Santé, sur la base de cette loi qui réglemente la planification familiale, détermine, en tant que compétence des professionnels de santé, l’aide à la conception et à la contraception des individus, en les guidant sur les options, pour les deux objectifs, concernant les méthodes contraceptives autorisées par le système de santé publique et mises à disposition au Brésil [ 8 ]. Plus récemment, en 2007, la politique nationale de planification familiale a été créée, offrant huit méthodes contraceptives gratuites, en plus de la vente de contraceptifs à prix réduit dans le réseau appelé « Farmácia Popular » [ 9 ].

Épidémiologie

Le Brésil subit un changement progressif dans la structuration de sa population et, par conséquent, des naissances. Ces modifications ont un impact considérable sur les mesures à adopter dans l’ensemble de la structure des soins de santé. Ainsi, récemment, l’Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE) a publié des données sur divers aspects et comportements de la population brésilienne et, en 2019, d’importantes données d’état civil ont été présentées, ce qui a contribué grandement à la compréhension de l’analyse proposée pour cet article, et a permis de suggérer de nouvelles stratégies pour améliorer l’assistance à la planification familiale.

En 2019, on comptait 2 888 218 enregistrements de naissances dans les bureaux de notaires au Brésil, ce qui correspond à une baisse de 3 % par rapport à l’année précédente, avec une moyenne mensuelle de 234 336 enregistrements [ 10 ]. Selon les données obtenues lors des précédents recensements démographiques, une tendance à la réduction du taux de fécondité est observée chez les femmes les plus jeunes. En 1999, 30 % des naissances enregistrées étaient le fruit de femmes âgées entre 20 et 24 ans. En 2009, une diminution relative des naissances dont les mères appartenaient à ce groupe d’âge a été constatée, avec en parallèle, une augmentation des naissances pour les mères âgées de 25 à 29 ans (25,3 % du total). En 2019, la participation des groupes âgés de 20 à 24 ans et de 25 à 29 ans était respectivement de 24,5 % et 23,8 %. La Figure 1 présente la distribution des naissances au cours des trois années analysées, 1999, 2009 et 2019 [ 10 ].

L’enquête nationale de santé 2013 (PNS-2013), réalisée auprès de femmes âgées de 18 à 49 ans, sexuellement actives au cours des 12 derniers mois et réglées, révèle que 61,1 % d’entre elles utilisent des méthodes pour éviter une grossesse, les pourcentages les plus élevés concernant les femmes de race blanche ayant un niveau d’éducation élevé. Cette enquête estime également l’âge moyen de leur première grossesse à 21 ans, mais les femmes ayant un niveau d’éducation inférieur ont déclaré avoir eu leur première grossesse plus tôt que les femmes ayant un niveau d’éducation plus élevé. Parmi ces femmes, 69,2 % ont été enceintes une fois, mais dans les régions du nord et du nord-est du pays, les pourcentages observés sont supérieurs à cette moyenne nationale (respectivement 73,6 % et 72,9 %), le pourcentage le plus faible (66,1 %) ayant été observé dans la région du sud-est. Les pourcentages les plus élevés de femmes enceintes ont été enregistrés parmi celles qui étaient le moins scolarisées, ces pourcentages diminuant au fur et à mesure que le niveau d’éducation augmente [ 11 ]. Ces données sont très préoccupantes car une partie importante de la population sans éducation formelle adéquate et sans information sur la planification familiale est vulnérable aux grossesses non désirées et à leurs conséquences. Une enquête réalisée entre 2011 et 2012, met ainsi en évidence un taux élevé de grossesses non désirées, atteignant 55,4 % des femmes interrogées. Les données recueillies ont en outre montré que 25,5 % des femmes préféraient remettre à plus tard leur grossesse et que 29,9 % ne voulaient tout simplement jamais être enceintes, ni dans le présent ni dans le futur [ 12 ].

Le problème des grossesses chez les adolescentes a fait l’objet de nombreuses discussions, non seulement au Brésil mais dans le monde entier. Un rapport publié en 2018 par l’Organisation panaméricaine de la santé et l’Organisation mondiale de la santé (OPAS / OMS), le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), souligne que l’Amérique latine et les Caraïbes ont le deuxième taux le plus élevé de grossesses d’adolescentes dans le monde, estimé à 66,5 naissances pour 1 000 jeunes filles âgées de 15 à 19 ans, dépassés uniquement par l’Afrique subsaharienne. Parmi les recommandations de ce rapport pour réduire ce nombre élevé de grossesses chez les adolescentes, l’accès accru aux méthodes contraceptives et à l’éducation sexuelle est une priorité [ 13 ]. Ce rapport souligne en outre que même si la fécondité totale - nombre d’enfants par femme - en Amérique latine et dans les Caraïbes a diminué au cours des 30 dernières années, les taux de fécondité des adolescentes n’ont que légèrement baissé pendant cette période. Selon l’UNFPA, cette région du monde est la seule ayant une tendance à la hausse des grossesses chez les adolescentes de moins de 15 ans. On estime que, dans cette région, chaque année, 15 % de toutes les grossesses concernent des jeunes filles de moins de 20 ans, et deux millions d’enfants naissent de mères âgées de 15 à 19 ans. Pour Estéban Caballero, directeur régional de l’UNFPA pour l’Amérique latine et les Caraïbes, réduire les grossesses chez les adolescentes nécessite de garantir l’accès à ces jeunes filles à des méthodes contraceptives efficaces. Un autre point important mis en évidence par le rapport est que, dans la plupart des pays, les adolescentes sans accès à l’éducation ou n’ayant qu’une éducation primaire, sont quatre fois plus susceptibles d’être enceintes que les jeunes filles ayant fait des études secondaires ou supérieures : les jeunes filles dont les familles font partie du quintile de richesse le plus bas sont trois ou quatre fois plus susceptibles de devenir mères que celles du quintile le plus élevé du même pays. Les adolescentes indigènes, en particulier dans les zones rurales, sont ainsi plus susceptibles de concevoir jeunes [ 13 ].

Dynamique du flux de soins dans la planification familiale au Brésil

L’aide à la planification familiale, l’un des sept domaines d’intervention prioritaires en soins primaires, est proposée au Brésil par des équipes du Programme de santé familiale (PSF). Ce système de politique de santé publique propose un travail d’équipe, reliant les professionnels de santé à la communauté, et valorisant et encourageant la participation de la communauté à l’élaboration de la politique et son application. Les équipes du PSF sont constituées d’un médecin, d’une infirmière, d’une infirmière auxiliaire et de six agents de santé communautaire 3 [ 14 ].

Plusieurs méthodes contraceptives sont autorisées et disponibles au Brésil : préservatifs masculins et féminins, diaphragme, spermicide, dispositif intra-utérin au cuivre (DIU), hormones contraceptives combinées orales et injectables, progestatifs oraux microdosés et injections trimestrielles d’acétate de médroxyprogestérone (DMPA), pilule d’urgence, stérilisation féminine et vasectomie [ 15 ]. Les dynamiques de prise en charge et de délivrance de ces méthodes varient néanmoins selon les équipes du PSF, aucune standardisation formelle ou routine de soins n’étant appliquée de manière systématique. La prescription et la délivrance des contraceptifs sont en fait liées à des barrières institutionnelles et professionnelles, telles que le souci du médecin d’effectuer chaque première consultation de planning familial, de prescrire des contraceptifs hormonaux oraux et injectables, d’insérer un DIU et de rendre des soins aux adolescentes [ 14 ]. Les services proposés sont également différents en fonction des équipes du PSF :

  • prescription de méthodes contraceptives par les infirmières, dans 14 équipes (48,3 %) ;
  • prescription de la plupart des méthodes contraceptives par les infirmières, à l’exception des contraceptions injectables, dans cinq équipes (17,2 %) ;
  • prescription de méthodes contraceptives par les infirmières, à l’exception des méthodes contraceptives combinées injectables et orales, dans quatre équipes (13,8 %) ;
  • prescription de méthodes contraceptives uniquement par le médecin dans quatre équipes (13,8 %) ;
  • livraison de méthodes contraceptives par des infirmières, pas formellement prescrites par celles-ci par crainte d’être dénoncées, dans deux équipes (6,9 %) [ 14 ].

Certaines différences de dynamique du flux de soins des patientes sollicitant une assistance en planification familiale, ont également été révélées dans une enquête menée en 2006. Celle-ci montrait en effet que les actions de planification familiale étaient marquées par l’indisponibilité des méthodes contraceptives dans les services de santé publique, et par des formations inégales entre équipes et l’insuffisance de professionnels pour travailler dans ce domaine. Autre aspect important de cette enquête, les professionnels des équipes de santé familiale n’apparaissaient pas qualifiés pour aider les femmes dans les soins de santé, et ils ne considéraient pas la planification familiale comme faisant partie des soins de base [ 16 ].

Toujours concernant la dynamique des soins, un groupe qui mérite une attention particulière est composé de femmes ayant subi un épisode de fausse couche, spontanée ou non. Dans une enquête récente, les femmes qui ont déclaré avoir utilisé des conseils en matière de contraception ou une consultation médicale dans le mois où elles ont subi une fausse couche, se sont montrées plus susceptibles de déclarer avoir utilisé des contraceptifs pendant la période de six mois (après la fausse couche), comparées à celles qui n’ont pas utilisé ces services de planification familiale. Les auteurs de l’enquête soulignent que l’accès à l’un ou à l’autre des services, à lui seul, n’a pas contribué à l’utilisation de contraceptifs. Par contre, l’âge (25 à 34 ans versus 15 à 24 ans) a été statistiquement associé à l’utilisation de contraceptifs. Il semble donc que l’état de la planification de la grossesse, le désir d’avoir plus d’enfants, et l’éducation ne contribuent pas à l’utilisation de contraceptifs. Par contre, l’âge semble un facteur important [ 17 ].

Les raisons de l’arrêt d’une méthode contraceptive

Parmi les actions relevant de la compétence du SUS, figure la disponibilité de méthodes contraceptives à toutes les femmes. Une question importante est donc de connaître les raisons pour lesquelles les femmes brésiliennes, malgré cette disponibilité, ont des taux élevés d’arrêt de ces méthodes.

L’arrêt de la méthode peut être lié au processus d’administration des contraceptifs ou à des raisons personnelles (le choix de la méthode devant être libre et éclairé, dans le respect des critères cliniques). Afin d’améliorer l’offre de nouvelles options contraceptives, en particulier chez les adolescentes, un groupe de femmes d’une particulière importance, la FEBRASGO a demandé en 2016 au ministère de la Santé du Brésil d’inclure dans le champ d’application du SUS, un implant par voie sous-cutanée (libérant de l’étonogestrel à 68 mg). Cependant, en avril 2016, la décision de ne pas accepter ce système de contraception pour les jeunes filles âgées de 15 à 19 ans a été malheureusement annoncée [ 18 ].

Une enquête transversale, menée au moyen de questionnaires auto-administrés en ligne dans huit pays auprès d’utilisatrices de contraceptifs hormonaux, âgés de 18 à 44 ans, a déterminé que les taux d’arrêt ou de changement pour un autre contraceptif hormonal au cours de l’année précédant l’enquête atteignaient 81 % au Brésil, ce taux étant plus élevé chez les plus jeunes filles, âgées de 18 à 24 ans. Chez 86 % des utilisatrices, la méthode contraceptive la plus utilisée était la pilule, pour 9 %, la contraception injectable, pour 1 %, la contraception par voie transdermique (le patch), pour 2 %, le DIU, pour 2 % l’anneau vaginal et pour 1 % l’implant sous-cutané. Dans 57 % des cas, la raison du changement de méthode par les femmes brésiliennes était liée à des effets secondaires de la contraception utilisée. Un autre fait intéressant observé dans cette enquête est que 85 % des femmes interrogées ont préféré une option de contraception mensuelle, avec une dose plus faible d’hormone, plutôt qu’une pilule quotidienne, et que 80 % ont envisagé de changer de contraceptif afin de minimiser leur exposition aux œstrogènes. Par ailleurs, dans tous les pays interrogés, les utilisatrices de contraceptifs oraux ont reconnu avoir oublié (65 % au Brésil) ou avoir pris une pilule au mauvais moment (67 % au Brésil) au cours des 3 derniers mois [ 19 ].

Une autre étude quantitative transversale impliquant 668 femmes âgées de 18 à 49 ans qui fréquentaient les unités de santé de base de la ville de São Paulo, a montré que l’âge moyen du premier rapport sexuel était de 17,2 ans. Cette étude a également révélé que 59,4 % des personnes interrogées souhaitaient ne plus avoir d’enfant. Parmi les méthodes contraceptives proposées, les contraceptifs par voie orale (37,9 %), les préservatifs masculins (23,5 %) et les contraceptifs injectables (23,4 %) ont été les méthodes les plus rapportées.

Concernant la satisfaction de la méthode choisie, 78,7 % des personnes interrogées se sont déclarées satisfaites, la proportion la plus élevée étant observée chez les utilisatrices de DIU, suivie des méthodes irréversibles. Les femmes qui ont déclaré avoir reçu des conseils en matière de contraception, étaient plus satisfaites de leur méthode [ 20 ].

L’état matrimonial des femmes est aussi important à considérer. Le changement de méthode est en effet plus fréquent chez les utilisatrices mariées que chez les célibataires. De même, l’arrêt de la méthode utilisée, qui est inversement lié au niveau de scolarité, est plus fréquent chez les femmes vivant en couple. Dans 27,8 % des cas, les raisons de l’arrêt ou du changement de contraception sont liées à la méthode utilisée, quelle qu’elle soit, et 21,6 % des femmes ont changé de méthode au cours de la première année d’utilisation, 10,3 % l’ont abandonnée [ 21 ].

Dans une cohorte rétrospective (reprenant les données sur 12 mois) intégrant un échantillon de 1 679 étudiantes d’une université publique brésilienne âgées de 18 à 24 ans, l’âge moyen d’initiation sexuelle a été évalué à 17 ans. Trente-sept de ces étudiantes (2,2 %) ont déclaré avoir déjà été enceintes (24 de ces grossesses s’étant conclues par une fausse couche). Un peu plus de 67 % de ces jeunes brésiliennes utilisaient une pilule orale, 22,5 % des préservatifs, 5,1 % des méthodes moins efficaces, telles que le retrait ou le diaphragme, et 5,2 % n’utilisaient aucune méthode. Les raisons de l’arrêt de la méthode étaient dans 27,63 % des cas pour des raisons liées à la méthode elle-même (à cause d’effets secondaires dans 66 % des cas) et dans 18,2 %, la méthode a été abandonnée pour une méthode moins efficace mais mieux acceptée. Cette étude a également recherché l’influence sur la contraception de l’origine ethnique et de l’âge des étudiantes. Les pilules contraceptives s’avèrent être favorisées par des étudiantes ayant des origines caucasiennes, plus âgées, et ayant plus d’années d’expérience sexuelle, mais n’ayant eu qu’un seul partenaire, en relation stable. Les étudiantes de la même catégorie mais plus jeunes, ayant un début de vie sexuelle plus récent et des relations occasionnelles avec plus d’un partenaire sexuel, apparaissent, quant à elles, plus susceptibles d’utiliser des préservatifs. Dans les deux cas, qu’elles soient utilisatrices de pilules ou de préservatifs au cours de relations occasionnelles, les jeunes filles étaient plus susceptibles d’interrompre leur méthode de contraception, une grossesse antérieure augmentant la probabilité de l’arrêter. Les utilisatrices de faible statut socio-économique utilisant la pilule ou qui ont signalé avoir eu plusieurs partenaires sexuels se sont révélées être plus susceptibles d’interrompre, d’abandonner ou de changer leur contraception pour une méthode moins efficace. Les risques d’arrêter la pilule contraceptive augmente également lorsque le nombre de partenaires sexuels augmente [ 22 ].

Comme nous l’avons vu, certains obstacles empêchent un accès satisfaisant à la planification familiale de la population brésilienne. Ceux-ci vont au-delà des facteurs économiques, de la faible disponibilité des professionnels ou des options de méthodes offertes par le SUS.

En ce qui concerne le DIU, citons, par exemple, les difficultés liées à son insertion, ou l’absence ou l’indisponibilité d’un professionnel expérimenté. Il s’en suit une faible prévalence de cette méthode, avec moins de 2 % d’utilisatrices chez les femmes âgées de 15 à 49 ans, mariées ou en relation stable [ 24 ]. Le faible nombre de professionnels expérimentés dans ce pays de dimension continentale, et leur absence dans les régions reculées, seraient ainsi une des causes de ce taux réduit d’utilisation du DIU. Afin de remédier à cette lacune de professionnels, une étude a évalué les résultats obtenus par différentes catégories de professionnels de santé (médecins, internes ou infirmiers de niveau supérieur) pour l’insertion du dispositif (DIU au cuivre ou système intra-utérin de lévonorgestrel). Les taux d’expulsion après implantation se sont révélés similaires pour les trois catégories de professionnels analysées. En effet, lorsque des infirmières avaient reçu une formation, les taux d’expulsion n’étaient pas plus élevés que si un médecin l’avait effectuée. Grâce à ces infirmières, cette méthode peut donc être accessible aux femmes dans les régions dépourvues de médecin spécialiste [ 25 ].

La formation des médecins gynécologues, leurs attitudes et leurs perceptions de la contraception sont des points importants à considérer. Dans une étude impliquant 101 gynécologues, leurs connaissances et leur opinion sur l’utilisation des méthodes de contraception intra-utérine chez les femmes nullipares ont été évaluées à l’aide d’un questionnaire en ligne. Celui-ci comprenait des questions liées aux données démographiques et professionnelles, les principaux obstacles à la prescription de contraception intra-utérine, pour les femmes en général et les femmes nullipares en particulier. Il comprenait également des questions concernant leurs attitudes pour l’inclusion de ces méthodes lors du conseil en contraception qu’ils promulguent et leurs opinions sur ce qui pourrait augmenter leur prescription pour les femmes nullipares. Une question sur la connaissance des critères d’éligibilité médicale de l’OMS a également été jointe à l’enquête. Les résultats de cette enquête ont révélé les obstacles les plus fréquemment rapportés concernant les méthodes de contraception intra-utérine comme option contraceptive pour les femmes nullipares : la survenue possible d’une maladie inflammatoire pelvienne, et une insertion difficile ou douloureuse. Le défi actuel est donc de s’assurer que les gynécologues brésiliens connaissent les recommandations de l’OMS, ne rejettent pas ces méthodes, et les envisagent comme une option potentielle pour les femmes nullipares [ 26 ].

Les attitudes et croyances des femmes brésiliennes par rapport à l’utilisation de certaines méthodes contraceptives, telles que le DIU, sont également un autre point qui peut rendre l’utilisation de ces méthodes difficile. Une étude visant à comprendre les obstacles perçus par les femmes à l’utilisation de la contraception intra-utérine hormonale ou non hormonale, dans quatre pays d’Amérique latine, dont le Brésil, révèlent que des croyances et des informations incorrectes persistent. Les femmes ont encore des idées fausses sur les effets indésirables et les risques de cette contraception. L’éducation sur les risques et les avantages réels de ces méthodes est donc essentielle pour améliorer l’acceptation et l’observance de ces femmes, afin de réduire les grossesses non désirées et les fausse-couches à risque [ 27 ].

Contraception et adolescence au Brésil

Les adolescentes représentent une partie de la population féminine extrêmement vulnérable. Les professionnels de santé se sont donc intéressés au comportement sexuel de ces jeunes filles pour établir des stratégies visant à réduire les taux encore élevés de grossesses non désirées à cet âge ainsi qu’à diminuer les infections sexuellement transmissibles. Dans une étude transversale nationale réalisée en milieu scolaire, qui concernait les risques cardiovasculaires des adolescentes (étude ERICA), des aspects importants du comportement sexuel de ce groupe d’âge ont été révélés. Il a en effet été observé que 28,1 % des adolescentes avaient déjà commencé leur vie sexuelle, avec une prévalence plus élevée parmi celles âgées de 17 ans. Parmi celles-ci, 82,3% ont déclaré avoir utilisé une contraception lors du dernier rapport sexuel, le préservatif masculin étant utilisé par 68,8 % et la pilule contraceptive par 13,4 % [ 28 ]. Une autre étude (enquête nationale sur la santé scolaire, PeNSE) réalisée en 2009 et 2012, indique un début plus précoce de l’activité sexuelle, 20,5 % à 28,7 % des élèves âgées de 13 à 15 ans ayant déjà commencé leur vie sexuelle [ 29 , 30 ]. Les adolescentes plus jeunes et celles qui vivent dans la région du nord du Brésil apparaissent être plus vulnérables aux conséquences des rapports sexuels non protégés [ 28 ]. Dans l’étude ERICA, la région nord du Brésil présentait également la prévalence la plus élevée d’initiation sexuelle précoce. Or, dans cette région, la prévalence de l’utilisation de la contraception, en particulier la pilule orale, est l’une des plus faibles des macro-régions. Les grandes villes de ces régions font partie des villes où les adolescentes déclarent souvent avoir eu des relations sexuelles. Pourtant les contraceptifs, en particulier les pilules orales, n’apparaissent pas être utilisés souvent [ 28 ].

La faible organisation des soins dans le planning familial des adolescentes, en plus des conflits éventuels avec des professionnels de santé concernant l’autonomie des adolescentes à assumer la responsabilité de leurs soins et à prendre des décisions sur l’utilisation des méthodes contraceptives, constitueraient ainsi toute une chaîne d’obstacles aux soins de santé.

Conclusion

Le Brésil est un pays aux dimensions continentales dont le taux de fécondité a été réduit au cours des 15 dernières années, entraînant un ralentissement de la croissance démographique. On estime désormais qu’environ 80 % des femmes âgées de 15 à 49 ans, mariées ou en union avec un partenaire, utilisent une forme de contraception. Le droit d’accès et le libre choix de la méthode contraceptive sont un droit garanti par la constitution brésilienne. Pourtant, le taux d’arrêt d’une méthode contraceptive reste élevé. Le taux de grossesse chez les adolescentes est particulièrement important et chez les femmes de plus de 30 ans, les accouchements ont augmenté au cours des 20 dernières années.

Bien que le ministère brésilien de la Santé, ainsi que des entités médicales telles que la FEBRASGO (Fédération brésilienne des associations de gynécologie et d’obstétrique), développent des politiques publiques et améliorent l’éducation des médecins et des patients, les défis posés par la santé sexuelle et reproductive sont nombreux. L’analyse précise de la situation concernant la mise en œuvre des politiques de planification familiale et l’utilisation des méthodes contraceptives au Brésil, est en fait entravée par le manque de données permettant un diagnostic précis du problème et, ainsi, de développer des stratégies de politique sanitaire qui seraient pertinentes.

À côté de mesures garantissant l’accès à la planification de la reproduction, il est en effet nécessaire de promouvoir une recherche qui identifierait non seulement les problèmes épidémiologiques des différentes régions du pays, mais aussi les lacunes éducatives touchant la population et les professionnels de santé.

Améliorer les options contraceptives disponibles gratuitement dans le SUS (Sytème de santé unifié) et stimuler l’éducation des femmes brésiliennes sur l’importance de la planification de la reproduction et des soins pour leur santé sexuelle, sont des priorités. L’accès aux méthodes contraceptives est en effet un facteur primordial afin de parvenir à l’autonomie des femmes. Il représente également un indicateur de qualité des services de santé et du développement local. Les difficultés politiques, financières et opérationnelles pour la mise en œuvre d’un programme de santé reproductive, avec un accès universel et gratuit, sont proportionnelles à la taille du pays. Il n’y a cependant pas d’alternative à ce développement si nous voulons offrir des soins de santé complets et efficaces aux femmes.

Tableau I.

Raisons du changement de contraception pour une contraception dite LARC (selon [ 23 ]). *malaises, crampes ou symptômes prémenstruels lors de l’utilisation du contraceptif précédent, désir d’avoir une aménorrhée, ou grossesse non désirée lors de l’utilisation de la dernière méthode contraceptive.

Raisons personnelles n (%)
Peur d’être enceinte 682 (59,1)
LARC est une méthode facile à utiliser 280 (24,3)
Peur d’oublier de prendre la pilule 262 (22,7)
LARC est plus économique 50 (4,3)
Désapprobation du partenaire 28 (2,4)
Raisons médicales
Nausées et vomissement 193 (16,7)
Saignement utérin anormal 169 (14,6)
Gain de poids 160 (13,9)
Céphalée 136 (11,8)
Autres raisons* 232 (20,1)

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

 
Footnotes
1 Modification biologique hormonale qui apparaît chez la femme au moment de la ménopause.
2 « Sur la base des principes de la dignité de la personne humaine et de ceux de la parentalité responsable, la planification familiale est la libre décision du couple, l’État devant fournir des ressources pédagogiques et scientifiques pour l’exercice de ce droit, toute forme de coercition de la part des organismes et institutions officielles étant interdite ».
3 Les agents communautaires de santé sont les principaux acteurs de terrain de la mise en place de la politique publique du Programme de santé de la famille et de son volet de prévention, par leurs visites à domicile dans les quartiers habités par des populations dites à risque.
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