MI NIS TE RE DE LA SANTE PU BLIQUE MONOGRAPHIE DE L'INSTITUT NATIONAL D’HYGIENE N° 30 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT (III. IRAK) DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES PA RIS 1 9 6 4 VRTVTE DUCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEM par C. LAURENT J. LEGUERINAIS Chet de la Section du Cancer Chef de la Documentation de l’Institut National d'Hygiène et Avec la collaboration de L. MAUJOL M I NIS TE RE DE LA SANT E PU BLIQUE MONOGRAPHIE DE L’INSTITUT NATIONAL D'HYGIENE M° 30 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT (III. IRAK) DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES P A RIS 1 9 6 4 VIRTVTE DVCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEAM par C. LAURENT J. LEGUERINAIS Chef de la Documentation Chef de la Section du Cancer de l’Institut National d'Hygiène et Avec la collaboration de L. MAUJOL MONOGRAPHIES DE L’INSTITUT NATIONAL D’HYGIENE DEJA PARUES Documents statistiques sur la morbidité par cancer dans le monde, par P. F. DENOIX, Paris, 1953. Epuisé. L’économie de l'alcoolisme, par L. DEROBERT, Paris. 1953. Epuisé. Mortalité urbaine et rurale en France en 1925, 1933 et 1947. par Ch. CANDIOTTI et M. MOINE, Paris, 1953. Prix : 9 F. Contribution à l'étude de l'anophélisme et du paludisme en Corse, par C. TOUMANOFF, Paris, 1954. Prix : 12 F. De la diversité de certains cancers, par P. F. DENOIX, Paris, 1954,. Epuisé. La lutte préventive contre les maladies infectieuses de l’homme et des animaux domestiques au moyen des vaccins. par G. RAMON, Paris, 1955, Prix : 12 F. Etudes de Sociopsychiatrie, par H. DUCHENE et coll. Paris, 1955. Prix : 9 F. Rapport sur la fréquence et la sensibilité aux insecticides de "’Pediculus humanus humanus K. Linnaeus ", 1758. (Anobluxa) dans le sud-est de la France, par R. M. NICOLI, Paris, 1955, Prix : 5 F. Etude sur la maladie de Bouillaud et son traitement, par T. CHEVALLIER, Paris, 1956. Prix : 11 F. Rapport d’enquete sur la réadaptation fonctionnelle des adultes en France, par H. G. POULIZAC, Paris, 1956. prix : 10 F. Etude pour l'établissement de rations alimentaires pour le tuberculeux en sanatorium, par F. VINTTet J. TREMOLIERES, Paris, 1957, Prix : 12,50 F. Le cancer chez le Noir en Afrique française, par P. F. DENOI et coll., Paris, 1957,. Prix : 15 r. N° 13 - Broncho-pneumopathies virus et a Rickettsies chez l'en fant, par R. SOHIER et coll., Paris, 1957, Prix : 13 F. N° 14 L'assistance psychiatrique aux malades mentaux d'origine nord-africaine musulmane, en métropole, par G. DAUME¬ ZON, Y. CHAMPION et coll., Paris, 1957. Prix : 12 F. 15: N Documents statistiques sur épidémiologie des infections typhon-baratybhotdiques, de la poliomyélite et des brucelloses en France en 1934 et 1935, par P. CHASSAGNE et Y. GAIGNQUX, Paris, 1956. Prix : 11 F N° 16 La pathologie régionale de la France, Tome I. Régions du Sud et de l’Ouest par R. MAROT, Paris, 1958. Prix : 35 F. 17 - La pathologie régionale de la France, Tome IL. Régions du N Nord, de l'Est et du Centre par R. MAROT, Paris, 1958. Prix : 34 F. N° 18: De la destruction des bactéries par la chaleur. Étude de l'efficacité de la pasteurisation du lait, par A. NEVOT et colL., Paris, 1958. Prix : 14 F. N° 19 Le cancer au Moyen-Orient (Israël et Iran) données épidémiologiques, par C. LAURENT et J. LEGUERNAIS, Paris, 1960. Prix : 13 F. 20 N Problèmes poses par la définition des aliments (Hbital Bichat, 13-14 ma 1960), par l’Unité de Recherche de Nutrition Humaine de l’Institut national d’hygiène, Paris, 1960. Prix : 15 F. N° 21 Accidents du travail et facteur humain, par H.G. POULIZAC. paris, 1960. Prix : 18 E N 22 Enquête sur les enfants et les adolescents atteints d'infir¬ mité motrice, par F. ALRSON, J. FABIA et J. RAYNAUD, Paris, 1961. Prix : I1 F. Ne° 23 L’hospitalisation des enfants. Une étude de pédiatrie sociale dans l'agglomération parisienne, par P. STRAUS, Paris. 1961, prix : 16 F. N° 24 Méthodes psychologiques, pédagogiques et sociales en psy¬ chiatrie infantile, sous la direction de G. AMAD0, Paris. 1961. Prix : 19 F. Epidémiologie et prophylaxie de la variole Etude des in¬ N° 25 cursions de la variole Paris, au cours des vingt dernières années. Déductions épidémiologiques et prophylactiques. par J. BOYER et A. ROUSSEL, Paris, 1962. Prix : 9, 50 r. Le cancer au Moyen-Orient, H. Turquie et Liban, Données N° 26 épidémiologiques, par C. LAURENT et J. LEGUERNAIS. Paris, 1962,. Prix: 16 F. La recherche médicale en 1961 (Rapport d’activité), par 27 N J.P. BADER, Paris, 1962. Prix : 15 F. Les effets physiopathologiques des graisses alimentaires. N° 28 symposium organisé par G. CLEMENT (Dijon 26-27oct, 1962). Paris, 1963, Prix : 18 F. La Recherche Médicale en 1962 (Rapport d'activité ), Paris N° 29 1963, Prix : 15 F. N30 Le cancer au Moyen-Orient. III. Irak par C. LAURENT et J. LEGUERINAIS, Paris, 1964, prix : 8 F. Vente des publications L'INSTITUT NATIONAL D'HYGIENE 3, rue Léon-Bonnat, Paris (16e). — AUTeuil 32,84 numéro de chèque postal : Institut National d’Hygiène, Paris 9062-38 Cette monographie clôt la série des enquêtes effectuées par l'un de nous, au Proche et au Moyen-Orient, grâce une bourse accordée au Ministère de la santé par l’Organisation Mondiale de la Santé.). Les précédentes études portaient sur l'épidémiologie du cancer en Israël et en Iran (1), en Turquie et au Liban (2). Le présent travail concerne I’Irak, dont la situation intermédiaire entre les quatre pays déjà prospectés présente un intérêt évident : nous pouvions ainsi confirmer ou infirmer les observations relevées dans ces différents pays. Nous avons rencontré parmi les membres du corps médical irakien l’accueil chaleureux que nous avaient réservé ceux des autres pays, le même désir de nous aider dans notre tâche, malgré les difficultés du moment, qui nous ont d’ailleurs empêché de prospecter également la Syrie. A toutes les personnalités qui ont bien voulu nous guider dans l'accomplissement de cette enquête, nous adressons nos vifs remerciements. Le travail que nous présentons, de même que les opinions que nous y exprimons, ne reflètent que nos impressionnons personnelles, Elles ne traduisent en aucune façon les vues que bourrait avoir l’Organisation Mondiale de la Santé sur les problèmes que nous envisageons au cours de cette étude. (1) Monographie de l’Institut National d’Hygiène n° 19, 1960. (2) Monographie de l’Institut National d’Hygiène n° 26 1962. IRAK LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 3 GENERALITES ET RAPPEL GEOGRAPHIQUE L’Irak, créé ex nihilo et reconnu à l’unanimité en 1932 comme état souverain et indépendant par la Société des Nations, ne présente guère d’unité géographique et ne possède pas de frontières naturelles. Placé entre les solitudes de l’Arabie et le chaos des montagnes iraniennes, il peut être divisé géographiquement en trois régions : les déserts du sud et de l’ouest qui se terminent sur le côté abrupt de l’Euphrate : la plaine centrale, comprenant les pays du delta, au sud de Bagdad, où les alluvions de deux des plus grands fleuves du monde, le Tigre et l’Euphrate, ont comblé le détroit marin qui les séparait et la Djezira (ile) entre ces deux fleuves, au nord de Bagdad, avec la plaine du nord-est et les collines : enfin, la région montagneuse du Kurdistan irakien Les frontières avec le Koweit et l’Arabie Saoudite au sud, avec la Jordanie et la Syrie à l’ouest, se trouvent dans la région désertique. L’Irak est limité au nord par la Turquie : à l’est, par l’Iran, qui se trouve isolé de la plaine de Mésopotamie par le haut massif du Zagros : au sud-est il atteint le fond du Golfe Persique sur lequel il possède une étroite façade. Il couvre une superficie d’environ 453 000 Km2. Trois régions climatiques s’identifient aux régions géographiques déserts du sud et de l’ouest, plaines centrales et districts montagneux du nord. Au sud de Bagdad, les étés sont torrides et les hivers assez doux : au nord, dans la région de Mossoul, le climat est excessif et les hivers assez froids en raison de l’altitude. Au nord de la Mésopotamie, les montagnes du Kurdistan jouissent d’un climat tempéré en été, rigoureux en hiver. L’intérieur de l’Irak est un des pays les plus rudes, les plus durs et les plus chauds (Samawa). L’Irak est essentiellement un pays d’agriculture et d’élevage, Toute la vie est fondée sur l’agriculture, mais les 4/5es du territoire ne sont ni cultivés, ni cultivables: sur le I/5e restant. 1/5e des terres est réellement mis en valeur. Actuellement, la production agricole est insuffisante pour satisfaire les besoins du pays, bien que 80 % de la population totale soit employée dans l’agriculture. LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 10 On cultive surtout le blé et l'orge, pendant la saison d’hiver : le riz, le coton, le sésame, le mais en moindre quantité, pendant la saison d’été. Les dattes sont produites en grande quantité dans le sud et au centre du pays (environ 80 % de la production mondiale et l’Irak en est le premier pays exportateur. Le tabac pousse dans les régions montagneuses du nord: il fait l’objet d’un monopole d’état. Les ressources intrinsèques du sol et du sous-sol, et en particulier les abondants gisements de pétrole font que l’Irak est à même de jouer un rôle dans le monde. En 1955, la production annuelle atteignait près de 34 millions de tonnes. Administrativement, l’Irak est divisé en 14 districts ou liwas à la tête desquels se trouve placé un gouverneur relevant directement de l’autorité du Ministère de l’intérieur. RACES. LANGUES, RELIGIONS L’élément sémitique domine dans un grand mélange de races. On trouve la pure race arabe dans certaines tribus de bédouins du désert. Il existe une forte minorité kurde au nord et au nord-est du pays et de nombreux turcs disséminés depuis la frontière turque et Mossoul jusqu’à Kirkouk. Les arméniens sont assez nombreux, surtout dans les grandes villes. La langue officielle est l’arabe, mais on parle également le turc et l’anglais. Il existe une extrême diversité confessionnelle. Le sunnisme ou orthodoxie musulmane est la principale religion, mais d’importantes minorités du schisme chiite sont établies près des lieux de pèlerinage chiites (Karbela. An Nadief Kazimein Samarra). L'ensemble de ces musulmans constituait en 1957 une population de 6 millions environ de personnes. Dans la région de Mossoul sont installés plusieurs milliers de chrétiens de divers rites, surtout nestoriens. Une secte spéciale, les Yazidis ou adorateurs du diable, dont la religion est un mélange de superstitions et de pratiques des diverses confessions, comptait dans le nord près de 56 000 âmes en 1957. POPULATION Au dernier recensement de 1957 (1) la population de l’Irak atteignait 6 339 960 habitants dont 3 185 117 du sexe masculin et 3 154 843 du sexe féminin. L’examen du tableau L et du graphique t nous montre que l’élément masculin prédomine légèrement en lrak (50, 2 contre 49,8). (1) Renseignements fournis par le Ministère de la santé de Bagdad. IRA K 11 fait que nous avons déjà constaté en Turquie (50, 8 contre 49,2)., H révèle aussi que près de 45 % de la population a moins de 15 ans et qu’il existe un centenaire sur 1 000 personnes. Les différences selon le sexe sont faibles. La population rurale atteignait 3 879 405 habitants en 1957, alors que la population urbaine était de 2 437 638 habitants, répartis entre 3 villes de plus de 100 000 habitants : Bagdad,. Mossoul et Bassorah et d’autres villes de moindre importance, dont les principales sont Kirkouk. Suleimanya. Karbela. En 1950 (1), la population évaluée des 3 premières villes était respectivement de 1371 000, 782 000. et 529 000 habitants. La population totale qui s’élevait en 1941 (2) à 3 745 000 habitants a passé en 1961 (3) à 6 808 299 habitants (soit une densité de 14 habi¬ tants par Km2), elle a donc presque doublé en l’espace de 20 ans. Cette évolution témoigne de la vitalité de la race, car elle provient exclusivement de la fécondité et ne doit rien à l’immigration. TABLEAU I (*) REPARTION DE LA POPULATION PAR GROUPES D'AGES ET PAR SEXE (selon le recensement de 1957). () Renseignements émanant du service de statistique du Ministère de la santé publique. (1) statistiques épidémiologiques et démographiques annuelles. O. M. S, 1986 (2) Annuaire démographique 9 M.S, 1934. (3) Ministère de la sante - Bagdad. LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 12 Graphique 1 - Répartition de la population par groupes d'âges et par sexe (selon le recensement de 1957). CONDITIONS ET MODE DE VIE Le mode de vie est presque exclusivement rural : plus des 3/74 de la population sont des fellahs et des agriculteurs sédentaires des montagnes (tribus). Le quart restant est constitué par les nomades (éleveurs de chameaux et de moutons) dont certains tendent à devenir sédentaires, et les citadins. Le vêtement national consiste en une longue tunique, l’abayeh. portée à la campagne aussi bien par les hommes que par les femmes et qui les protège de la terrible ardeur du soleil et des intempéries. Le problème particulier de l’Irak réside dans l’existence d’un nombre élevé de tribus qui constituent plus de la moitié de la popula¬ tion et qui se soucient fort peu de cultiver à plein rendement le sol pourtant riche du pays qui fut le berceau de la plus ancienne civilisation agricole du monde. IRAK 13 Aussi, le revenu national est-il bas, et le niveau de consommation faible. En effet, l’Irak (1) étant principalement un pays d’agriculture et de faible productivité, on peut s’attendre que la fréquence de la sous-nutrition et de la mal-nutrition soit élevée parmi la population. L’alimentation de la majorité de celle-ci est, en effet, soit mal équilibrée, soit déficiente. Elle se compose principalement de pain, fait de blé ou d’orge ou d’un mélange de ces deux produits. Elle est certainement déficiente en protides animaux, et par suite en vitamine B 12. Une enquête menée par l’Institut de nutrition (2) de l’Irak, dans les régions rurales autour de Bagdad, a montré que la consommation en protides animaux variait entre 5, 8 à 10 g par personne et par jour (alors qu’elle est de 32 à 57 g dans les régions rurales françaises). I y a aussi carence en vitamines A et C. due à la trop faible consommation de légumes verts, de fruits, de produits laitiers et d’œufs. L’'eau de boisson est, dans la plupart des régions, impropre à la consommation. L'état sanitaire, lié à ces conditions, est assez peu satisfaisant : les maladies endémiques les plus répandues sont la tuberculose. (tableau I), le trachome, qui serait do aux nuages de poussière soulevés par le vent : la syphilis non vénérienne (bejil) et surtout la bilharziose (tableau III) : par contre, le paludisme qui sévissait autrefois (423 954 cas en 1936 pour tout l’Irak) (3) a été supprimé dans le nord grâce aux moyens d’éradication modernes de la maladie. employés par l’institut des maladies endémiques du Ministère de la santé. Les produits susceptibles de porter atteinte à la santé des habitants sont : le tabac, dont l’Iral est grand producteur et qui est fumé par les hommes à partir de l’age de 25 ans (les femmes s’adonnent très peu au tabagisme) : l’arak, boisson incolore, très alcoolisée, à base d’orge ou de dattes, qui contient de l’anis ou de la gomme arabique exportée de Grèce, et dont la consommation n’est pas négligeable: (1) L. rac. Med. Bagdad 371, 12-16, 1961 : M. DPMARCHI. (2) J. Fac. Med. Bagdad 4/4, 140-149, 1962 : M. DEMARCHI. (3) Rapport de la santé publique : 19368-37-38. PAR RADIOGRAPHIE, PAR AGE ET PAR SEXE POUR 1960 (3) L’allaitement au sein des nourrissons est général dans tout l’Irak. LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 14 TABLEAU II NOMBRE DE CAS DE TUBERCULOSE CONFIRMÉE () Directorate of vital and heaith statistics, 1959-1960. Ministry of health. (tableau 21). L’Irak, comme tous les pays en voie de développement, aura encore de grands progrès à effectuer dans le domaine de l’instruction : en 1947, le pourcentage des illettrés s’élevait à 91, 5 % : il est certai¬ nement plus faible en 1963. La majorité de la population étant musulmane, la circoncision des garçons est quasi générale : elle s’effectue habituellement, à la ville. de 7 jours à l mois après la naissance, et à la campagne à l’âge de 7 ans. Les femmes se marient jeunes dans la population rurale (14 à 18 ans) et ont une moyenne de 7 enfants alors qu’à la ville elles se marient entre 18 et 25 ans et ont une moyenne de 4 ou 5 enfants. L’avortement bien qu’interdit et considéré comme un crime est pratiqué comme partout ailleurs dans le monde. TABLEAU NOMBRE DE CAS DE BILHARZIOSE CONTIR PAR SEXE, AGE ET (4) Directorate of vital and health statistics, 1959-1960. Ministry of hea m ( MES PAR L’EXAMEN BACTERIOLOGIQUE LIWA POUR 1960 16 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT ORGANISATION DE LA SANTE ENSEIGNEMENT DE LA MEDECINE L’Irak (1) possède deux collèges de médecine dépendant des universités de Bagdad et de Mossoul, Fondés respectivement en 1927 et en 1948 par le gouvernement, ils fonctionnent suivant le système d’enseignement appliqué à Édimbourg. Après le baccalauréat, l’étudiant fait 6 années d’études. La répar¬ tition des matières s’effectue de la façon suivante : en 1re année. biologie, physique et chimie : en 2e et 3e années, physiologie. anatomie, biochimie et micro-anatomie : en 5e et 6e années, médecine clinique, chirurgie clinique et gynécologie : en 6e année, l’étudiant doit faire des stages dans tous les services médicaux (rotating student). Puis, c’est le service militaire qui dure une ou deux années. Au retour, l’étudiant devient pendant un an "rotating intern" et choisit alors la spécialité qui lui agrée, puis "resident" pendant 2 années. enfin "day doctor", c’est-à-dire qu’il passe ses matinées à l’hopital et reçoit sa clientèle privée l’après-midi. S’il désire obtenir des grades supplémentaires, le médecin va compléter ses études à l’étranger, à des titres divers (chargé de mission, bénéficiaire de bourse ordinaire ou de bourse de fin d’études) aux U. S. A, ou en Angleterre dans la majorité des cas. C’est parmi les médecins qui se sont perfectionnés à l'étranger que sont choisis les membres du corps enseignant, tant au collège de médecine de Bagdad, dont l’effectif est de 250, qu’au collège de médecine de Mossoul. Leurs études terminées, les médecins sont tenus de rester au service du gouvernement pendant 6 ans et d’occuper le poste que leur assigne le ministère de la santé. 120 à 130 médecins sont formés chaque année au collège de médecine de Bagdad. (1) Renseignements donnés par le Dr Salim DAMLUJI, medical department, republican hosp. Bagdad. IRAK 12 Le nombre total des médecins (tableau IV) a passé de 1 245 en 1959 à 1 257 en 1960: il s’élevait à 1 360 en 1962. Pour le seul ministère de la santé il était de 602 en 1959, de 662 en 1960 et il atteint actuellement 835, chiffres qui témoignent d’un développement constant de la profession médicale. En 1954, en effet il y avait un médecin pour 5 900 habitants (1), alors qu’en 1960, il y en avait un pour 3 300 habitants environ. Ce nombre est actuellement bien dépassé. TABLEAU NY (:) NOMBRS DE MEDECNS EN 1959 ET 1960 (*) Directorate of vital and health statistics, 1959-1960, Ministry of health, IRAQ. HOPITAUX Les hopitaux, au nombre de 35 (dont 10 à Bagdad) avec 2 565 lits en 1937, se sont développés au point qu’en 1962 ils atteignaient le nombre de 118 (dont 28 à Bagdad) avec 13 437 lits (tableau V). A cette même époque, le nombre de dispensaires atteignait 763 et celui des organismes de protection maternelle et infantile, 39 (dont 16 à Bagdad). (1) I problemi della Sicurezza Sociale. Anno XV N 6, p. 978-934, 1960. TABL NOMBRE D’HOPITAUX ET DE LITS SEL 128 Nombre total d’hôpitaux : Nombre total de lits 12722 3 Directorate of vital and health statistics, 1959 and DN LA NATURE DES HOPTTAUX EN 1960 68 IRAK 12 Le département des services sociaux rattaché au ministère des affaires sociales assume, depuis 1959, la responsabilité de l’assistance aux indigents (1). Le tableau Y présente la répartition des hôpitaux et des lits en 1960, selon les organismes dont ils dépendent et leur spécialisation. Comme on le voit, il n’existait pas de centre anticancéreux à cette époque. La Fondation nationale contre le cancer créée en 1961 par le ministère de la santé a prévu pour 1964 l’institution d’un centre anti¬ cancéreux modèle, dont la construction très moderne dans l’enceinte même du Republic hospital, est déjà bien avancée. Ce centre prévu pour 200 lits possédera une "’unité de cobalt", capable de traiter 3 000 personnes par an, un service de radiothérapie, un centre de dépistage, un service d’anatomie pathologique et de recherche. Il fonctionnera grâce à l’aide de l’ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE, de la Fondation GULBEMKTAN (de Lisbonne) dont la contribution sera de 75 000 dinars (t dinar vaut l livre anglaise) et probablement grâce à des subsides fournis par l’Irak petroleum company. Le programme de lutte anticancéreuse est résumé dans l’organigramme ci-joint que nous a aimablement remis le docteur Saad Hassan. Qutre la tâche dévolue à toute association de ce genre, la fondation a déjà réuni à Bagdad, en 1962, la première conférence annuelle contre le cancer, dont le dessein était d’organiser la campagne pour le dépistage précoce et le traitement des affections malignes. d’encourager la recherche et d’instruire le public du risque de cancer. A cette première conférence assistaient environ 400 médecins du Medical college et du Republic hospital de Bagdad. Des travaux originaux y ont été présentés, entre autres celui du Docteur AL HASSANI sur le rôle de l’éducation du public dans la lutte anticancéreuse (2). La deuxième conférence, prévue pour l’automne de 1963, devait réunir, non seulement les médecins et chercheurs du Republic hospital. mais également ceux des autres hopitaux d’Irak. (1) Bull, assoc, intem, sécurité sociale. XIll - 10-11, 592-593, 1960. (2) The first annual conference, Amanah Hall : 24-26 février 1962. LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 20 LUTTE ANTICANCÉREUSE IRAE 21 LES STATISTIQUES MORTALITE GENERALE Le nombre total de décès enregistrés, en 1960, (tableau VI) a été de 29 973 alors qu’il n’atteignait que 27 943 en 1959. Cette augmen¬ tation est peut-être due à un meilleur enregistrement des décès. Cet enregistrement reste cependant très imparfait puisque le taux de 4,7 habitants est nettement inférieur à ceux de l’Iran et de la Turquie (1) qui avoisinent 7, et sont eux-mêmes nettement inférieurs à celui observé en France (11, 3), au cours de la même année. Les décès sont sensiblement plus nombreux dans le sexe masculin (17 253), que dans le sexe féminin (12 720). Il est habituel d’observer dans de nombreux pays - en Europe comme en Asie -— une surmortalité masculine. Pourtant celle-ci apparait en Irak véritablement exceptionnelle : elle représente un accroissement de près de 1/3 par rapport à la mortalité féminine. Cela s’explique assez bien si l’on considère la répartition par sexe de la population qui fait apparaître une sex-ratio de 1, 3571 : on retrouve donc ici les mêmes proportions dans la prédominance masculine (1/3 en plus). L'étude des taux de décès par tranches d’âge (graphique 2) ne fait apparaître que peu de différences entre les sexes, tout au moins jusqu’à 70 ans, âge après lequel on retrouve la longévité habituel¬ lement plus marquée des femmes (36, 8 % contre 27,9 6). C" est l’enfant jeune (5 à 9 ans) et l’adolescent (15 à 19 ans) qui présentent les taux les plus bas (2, 6 6). Pourtant, la mortalité infantile reste élevée, puisqu’on observe plus de décès dans la première année de la vie que chez le sexagénaire (11. 7 % contre 10, 2). Le nourrisson reste très vulnérable dans ces régions au climat dur et à l’hygiène souvent rudimentaire. L'organisation de la protection infantile est un problème de première importance en Irak : les 39 organismes de protection maternelle et infantile (16 à Bagdad) sont nettement insuffisants pour le résoudre actuellement. (1) Monographie de l’Institut national d’hygiène, n° 19 (1960), et n° 26 (1962). LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 22 TABLEAU VI MORTALTE GENERALTE EN PAE SELON LE GROUDE D'AGE ET LE SEXE DOUID 1960 pirectorate of vital and health statistics, 1959 and 1960, BAGDAD. (tableau 9). IRAK 23 Au total, près du quart des décès (23%) s’observe avant la quinzième année. Cet état de choses - commun à bien des pays afro-asiatiques place l’Irak assez loin des caractéristiques démographiques des pays occidentaux. Il retentira fatalement sur l’épidémiologie du cancer, maladie élective de l’Âge mor. Comme dans de nombreux pays en voie de développement, on relève, en frak (tableau VII et graphique 3), une proportion fort élevée de décès dus à la sénilité et aux causes mal définies : plus de 53 % en 1959. Il semble qu’un certain progrès doive se faire sentir dans l'avenir, puisque, dès 1960, ce taux se réduit à 40 %. Aucun pays d’Europe n’atteint des chiffres aussi élevés : en France. on relève, en 1960. 14, 5 % de décès dus à la sénilité et aux causes mal définies. En Grande Bretagne qui a fait un gros effort dans ce sens, la proportion est tombée à 2, 8. Quoi qu’il en soit, l’importance des décès de causes mal définies dans les statistiques irakiennes nous oblige à ne les considérer qu’avec une certaine circonspection. Comme c'est la règle, les affections cardio-vasculaires sont ici les plus meurtrières avec 7, 4 % des décès, en 1960. Ce taux est très inférieur à ceux observés en Europe, où il n’est pas rare de relever un décès sur 4 attribuable aux cardiopathies. La proportion élevée d’infections néo-natales est en corrélation avec la mortalité si élevée au cours de la première année de la vie. signalée plus haut. Il est également à remarquer qu'à certains égards, l'’Iral se trouve actuellement dans la situation de la France avant la dernière guerre : la tuberculose y cause beaucoup plus de décès que le cancer (la proportion est presque du simple au double). Grophique 3 - Les 10 principales causes de décès pour 1960. clasées por ordre déeroissont pour 1960 TABLE MORTALTTE LES DIX PRINCIPALES CAUSES CLASSEES PAR ORDRE L Directorate of vital and health statistics, 1950 and 1 (1) M. C. Mortalité générale. GENERALE DE DECES POUR 1959 ET 1960 ECROISSANT POUR 1960 MORTALTE PAR CANCER PAR GROUPES D'AGE EN 1959 ET 1960 1RA K 25 Il ne faut sans doute attribuer qu’une valeur très relative au taux de mortalité toutes causes, relevé en 1960 en frak : 470 pour 100 000 habitants, Il serait, en effet, plus de deux fois plus faible que le taux français (1 140 pour 100 000 en 1960). Les différences sensibles dans la répartition de la population ne sauraient à elles seules expliquer une telle disproportion. Il est certain, par contre. que l'enregistrement des décès reste au Moyen-Orient, et particulière¬ ment en frak, trop souvent incomplet. Enfin, le cancer, objet de notre enquête, n’occupe que le neuvième rang dans les causes de décès, avec un taux de 1, 8 pour cent décès. Ce taux si faible doit être lié au défaut d’enregistrement, Par com¬ paraison, en France, on admet qu’un décès sur 5 est le fait du cancer. MORTALITE PAR CANCER Le tableau VII nous donne la mortalité par cancer en 1959 et 1960. par groupes d’age de 5 ans jusqu’à 19 ans, de 10 ans ensuite, pour les deux sexes. On constate qu’en frak, comme ailleurs, les décès par cancer en nombres absolus sont en constante augmentation depuis le début de la vie jusqu’à la soixantaine, après quoi le fléchissement est notable. TABLEAL VI Directorate of vital and health gtatistics, 1959 and 1960,. Bagdad. 26 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT D’après ce tableau, le nombre de décès serait moindre en 1960 qu’en 1959, ce qui est en contradiction avec ce que nous savons de l’augmentation croissante de cette maladie dans le temps. Mais le caractère incomplet de l’enregistrement retire beaucoup de valeur à cette constatation. On retrouve ici, pour le cancer, la surmortalité masculine déjà signalée à propos de la mortalité générale. Elle atteint en 1960 presque exactement le double de la mortalité féminine. Ce fait est particulier à l’Irak. La courbe des âges qu’on obtient à partir de ce tableau (graphi¬ que 4) a tendance à revêtir l’aspect gaussien pour le total des cas mais le sommet de cette cloche ne se situe pas dans le même groupe d’âge dans l’un et l’autre sexe. Il y a un décalage d’une vinctaine 3 IRAK 27 d’années (que l’on retrouve en 1960, comme en 1959), les femmes présentant le maximum de fréquence à la quarantaine, les hommes à la soixantaine. L’explication pourrait résider dans la proportion fort élevée de tumeurs du sein et du col de l’utérus dans la période pré-ménopausique. Chez l’homme, la prédominance des localisations digestives et cutanées est habituellement l’apanage des ages plus avancés. L’influence de ce facteur n’est pas compensée par l'espé¬ rance de vie plus courte dans le sexe masculin. L’allure gaussienne de la courbe résulte du fait qu’il n'est pas tenu compte de la répartition de la population par tranches d’age. Cette correction effectuée en partant de la population de 1957 (tableau D), la courbe prend l’allure régulièrement ascendante que l’on observe dans tous les pays du monde. On sait que la fréquence du cancer augmente plus ou moins régulièrement avec l’age. Nous ne disposons d’aucune autre donnée sur la mortalité par cancer, notamment sur la répartition des cas de localisation. Nous savons seulement que les tumeurs malignes y compris les tumeurs des tissus lymphatiques et hématopoïétiques ont provoqué le décès de 595 personnes en 1950 (370 du sexe masculin et 225 du sexe féminin) et de 528 personnes en 1960 (353 hommes et 175 femmes), ce qui représente un taux de 2, 1 pour 100 décès en 1959 et de 1.8 en 1960. MORBIDITE PAR CANCER Un ancien tableau (Ix), remontant à 1939, présente les cas de cancer dans les institutions gouvernementales de santé de 1933 à 1937, par localisations et par ordre de fréquence décroissante. Il en ressort que le cancer de la peau est prédominant en frak (17, 3 ), comme dans tous les pays du Moyen-Orient que nous avons prospectés, alors qu’il ne représentait en France que 6 % de l’ensemble des cancers dans l'enquête menée en Loir-et-Cher, en 1951-52, par l’Institut national d’hygiène. Il est suivi de près, dans le sexe féminin, par le cancer du sein (17, 1 6). Le tube digestif arrive au 3e rang de fréquence des cancers et la bouche et la gorge", au 4e. Le cancer du poumon était pour ainsi dire inexistant durant, cette période (0, 5 %). I était, il est vrai, rare également en Europe. La localisation génitale féminine occupe le 5e rang avec 14. 8 %. taux assez faible par rapport à celui des pays du Moyen -Orient avoisinant (20, 16 % au Liban). Mais le cinquième des localisations n’étant pas spécifié, tous ces taux ont peu de valeur en eux-mêmes. Il faut également considérer que ces données remontent à une trentaine d’années. 29 LE CANCER AU MOYEN ORIENT TABLEAU IX CAS DE CANCER DANS LES NSTTTUTIONS DE SANTE GOUVERNEMENTALES, 1933 — 1937 Ici, le sexe masculin est moins touché par le cancer (45, 8 %) que le sexe féminin (54, 2 %), ce qui semble en désaccord avec les données précédemment rapportées, concernant la mortalité par cancer en 1959 et 1960. Cette statistique a été probablement établie d’après les méthodes utilisées par les anglais, qui occupaient depuis longtemps l’Irak avant qu’il ait acquis son autonomie en 1932. Ce premier essai faisait présager un enregistrement acceptable des cas de cancer dans les diverses institutions de santé gouverne¬ mentales. Il ne semble pas avoir été poursuivi, car le ministère de la santé de Bagdad ne présente pas de statistiques de morbidité dans son bulletin de 1959-1960, le dernier paru. Il signale cependant les travaux de l’Institut central d’Anatomie pathologique du collège médical de Bagdad, dirigé par le Docteur AL ALOUST. A la première conférence annuelle sur le cancer de Bagdad, ALOUSI a insisté sur les critères de malignité au niveau des tissus et au niveau cellulaire, et sur les bases biochimiques des modifications observées. Il a souligné "la nécessité de classer les tumeurs malignes par stade, spécialement pour certains organes, tels que la lèvre, la langue, le col de l’utérus, le rectum et l’endomêtre". "L’établis¬ sement, dit-il, d’un diagnostic anatomo-pathologique reliant ensemble I R AK 26 ces critères n’a pas de valeur suffisante en lui-même : il doit impli¬ quer une connaissance et une expérience approfondies consécutives à de nombreuses années d’études, de travail acharné, de surveillance des cas et d’examen des cas difficiles". Le Docteur AL ALQUISI et son assistant le Docteur FAWSI, ont eu l’amabilité de nous communiquer certains chiffres, lors de notre passage à Bagdad, concernant l’activité de l’Institut d’anatomie pathologique, qu’ils ont recueillis avec l’aide du personnel de l’mstitut pendant l’année 1962. A la connaissance du Docteur ALQUSI c’est la première étude statistique qui ait été réalisée, à l' exception de certains travaux statistiques effectués dans des domaines spéciaux. Sa valeur dépendra du nombre d’années pendant lesquelles elle sera déplovée. En 1962, donc, l’Institut central d’anatomie pathologique a examiné 4 000 biopsies : 1 744 provenaient de services de gynécologie (consti¬ tuant le quart du travail) et 460 de services de dermatologie, Sur cet ensemble, on a décompté 225 tumeurs malignes, se décomposant comme suit : 126 cancers de type baso-cellulaire, 75 de type spino¬ cellulaire, 9 mélanomes (chez 8 femmes et 1 homme), et 15 de types divers. sur 87 biopsies du foie, il y avait 38 cancers du foie dont 9 primitifs (8 hépatomes et l cholangiome) et 29 métastatiques; 2 des hépatomes atteignaient des enfants de moins de 2 ans. 29 biopsies du poumon ont révélé des tumeurs malignes : 13 indif¬ férenciées, 15 spino-cellulaires et 1 adéno-cancer répartis entre 24 hommes et 5 femmes (sex ratio : Hr : 5 : 1). Pour la thyroide, 20 biopsies (11 femmes et 9 hommes) ont montré un cancer, soit du type papillaire - le plus fréquent -— soit un adénocarcinome. sur 157 biopsies du sein, 71 ont révélé un cancer, dont les types histologiques se répartissaient ainsi : Pour les voies biliaires, on a trouvé 4 cas de tumeur maligne sur 23 biopsies, dont 4 adénocarcinomes. A part les résultats intéressants d’un travail réalisé à partir de prélèvements biopsiques, nous n’avons pas eu connaissance d’autres études importantes sur la morbidité hospitalière à Bagdad. Nous nous LE CANCER AU MOVEN ORIENT 30 sommes donc efforcés de recueillir au Republic hospital (Jumbooria) — le plus grand hôpital de Bagdad -— des chiffres susceptibles de donner une idée, d’une façon évidemment très fragmentaire, de la répartition des tumeurs malignes dans cet hôpital. C'est le Docteur ALT SHIKARA, qui nous a procuré cette occasion. en nous donnant accès à ses registres, dans le service de radiologie qu’il dirige. Nous avons ainsi pu dresser une liste des 770 nouveaux cas de cancer examinés dans son service en 1962, et obtenir pour 890 d’entre eux des données sur le sexe et l’âge des malades, en plus de la localisation (tableaux X, X1 et XH). A l’examen du tableau X, nous constatons que la répartition des localisations cancéreuses est, par certains aspects, assez proche de celle observée dans divers centres anticancéreux français. TABLEAU X REPARTTTION PAR TRANCHE D'AGE ET SEXE DES 89 CAS DE CANCER DEPISTES - DANS LE SERVICE DU DT SHIKARA Pour que ce tableau ait quelque valeur il faudrait qu’il fot établi n est difficile d’attribuer une valeur réelle à cette répartition qui porte sur moins de 100 cas. Au demeurant, elle est à peu près conforme à ce que nous savons de la répartition par age des tumeurs malignes;: le plus grand nombre de cas s’observe toujours entre 40 et 64 ans. Pour que ce tableau ait quelque valeur il faudrait qu’il fot établi sur plusieurs centaines de cas et que les chiffres fussent rapportés à la répartition par tranche d’âge de la population. IRAK 31 TARLEAU XI BEPARTTION PAR LOCALRATION ET SEXE DES 770 CAS DEDRTES DANS LE SERVICE DU DOCTEUR SHIKARA 32 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT TABLEAU XI REPARTITION PAR LOCALISATION ET PAR SEXE DES 770 CAS DE CANCER DEPISTES DANS LE SERVICE DU DOCTEUR SHIRARA. PAR ORDRE DECROISSANT RA E 33 La proportion fort restreinte de tumeurs digestives (1. 6 %), 9 cas seulement dont 4 de l’œsophage, tient certainement au fait que les malades atteints de ces localisations sont plutôt orientés vers les services chirurgicaux. On peut remarquer que la localisation mammaire - la plus fréquente dans cette statistique -— représente 12, 2 % des 770 cas relevés en 1962 et 29 % des cancers féminins, taux qui semble étonnamment élevé pour une population féminine très féconde et qui allaite pendant de longs mois. Par contre, le cancer du col utérin ne représente que 6,3 % (16 % des cancers féminins), alors qu’il est classiquement admis que la multiparité favorise le cancer du col. Cette répartition. certainement biaisée, est vraisemblablement due au recrutement même du service. On peut également être frappé de la proportion anormalement élevée de tumeurs des voies aériennes supérieures (le larynx vient en tête chez l’homme), contrastant avec la relative rareté des tumeurs broncho-pulmonaires : 13, 5 % pour la localisation au pharyngo-larynx contre 3, 7 % pour celle au cancer du poumon (28 cas). La situation est à peu près inverse dans les pays occidentaux. Pour mieux faire apprécier les fréquences relatives de ces diffé¬ rentes tumeurs, nous avons établi le tableau XII, selon l’ordre de fréquence décroissant. Pour les 10 plus importantes localisations. nous avons indiqué le taux rapporté à 100 cas. Il va sans dire qu’un tel tableau portant seulement sur un total de 770 cas n’est nullement représentatif de la morbidité cancéreuse du pays. Il ne donne qu’une idée de l’activité et de l’orientation particulière du service du Docteur SHIKARA. A la première conférence de Bagdad sur le cancer (24 au 26 février 1962), les membres du corps médical ont souligné la fréquence des cancers de la cavité buccale. Le Docteur RAHIMO a estimé que 7 000 habitants, vivants en 1962, étaient appelés à mourir d’u cancer de la cavité buccale et des organes voisins; le Docteur S. ALI a insisté sur la nécessité d'un dépistage précoce et le Docteur OVANESSOE a signale l'importance du cancer du nez et des sinus, en trak. Dans la statistique de SHIKARA, on compte 17 cancers de la lèvre (2 2%) et 27 de la langue (3, 4 %). GUYS (1), dans son enquête au Pakistan, pays assez voisin de l’Irak, a obtenu d’un service de radiothérapie de Dacca des chiffres qui accusent les mêmes phénomènes, d’une façon encore plus marquée, cependant : fréquence élevée des tumeurs de la cavité (1) Laval médical : 34710, p. 1281-1287, 1963. 34 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT buccale (14 6 chez les hommes, 17 6 chez les femmes), et des voies respiratoires supérieures (pharynx 10 ( : larynx 21 % chez les hommes, le pourcentage pour les femmes n’étant pas donné pour ces deux localisations), sur 4 373 nouveaux cas vus de 1960 à 1962. n est vrai qu'au Pakistan on chique couramment le bétel et que, ce produit crée une irritation susceptible de favoriser le développement de ces cancers. Devant ces constatations, serions-nous en droit d’émettre une hypothèse sur l’étiologie de ces cancers de la cavité buccale et des voies aériennes supérieures, alors que les praticiens de l’Irak ne l’ont pas formulée 2 Serait-ce que la chaleur torride qui règne dès le printemps en frak (elle peut atteindre 60e dans la région du golfe Persique et à Bagdad, 50° sont monnaie courante), irrite ou altère les tissus des voies aériennes supérieures mis directement en contact avec une atmosphère surchauffée et, de plus, envahie par une épaisse poussière que le vent fait sans cesse tourbillonner 2 Il ne faut pas se disgimuler qu’une telle hypothèse demeure bien fragile. Nous présenterons les quelques données complémentaires que nous avons pu recueillir, par localisations, dans l’ordre de la nomenclature internationale des cancers. TUBE DIGESTIE (150-184) D'après GAILANI (1), le cancer du tube digestif est très fréquent en frak : malheureusement, il ne donne aucun chiffre à l’appui de cette assertion. Il déclare simplement que l’intestin grèle est 90 fois moins touché que l’estomac ou le colon. POUMON (162) Le Docteur S. DAMLUII, du Republic hospital (service de médecine) nous a remis la liste suivante des cas de cancer du poumon vus en frak, tant dans les congultations externes que dans les hopitaux, de 1924 à 1959 (tableau XIH). Il ressort de ce tableau que cette localisation du cancer, quasi inconnue en frak en 1924 a augmenté progressivement de fréquence de 1952 à 1958 et a atteint dans la dernière année 1959 le nomtre de 549 cas. Il est évident que cette augmentation massive doit être due davantage à l’amélioration des moyens diagnostiques et des méthodes d’enregistrement qu’à une augmentation réelle du risque de cancer du poumon. (1) First anmual Cancer conference (24-28 feb, 1962). 1RA K 35 Fait curieux, on relève en 1959 davantage de femmes (313) que d’hommes (236) dans cette statistique, ce qui est en désaccord complet avec la sex ratio moyenne de ce cancer en occident (7 hom¬ mes pour 1 femme). Il est probable que des facteurs de recrutement des malades sont à l’origine de cette anomalie. A ce sujet, il serait intéressant de comparer la consommation de tabac des deux sexes et de savoir si les femmes fument autant que les hommes. TABLEAU XII LE CANCER PULMONAIRE EN IRAK (4) Hopitaux et consultations externes. Un autre document sur le cancer du poumon nous a été fourni par le Docteur E. COTTA, directeur du service de phtisiologie au Republic hospital. Le dépistage systématique de la tuberculose s’y pratique de façon courante et quelques cas de cancer du poumon sont ainsi décelés : en 1960, on a trouvé 3 cas de cancer sur 64 102 examens radiographiques (4 038 cas de tuberculose) : en 1961, on en a trouvé 1 cas sur 80 496 examens (4 578 cas de tuberculose) et en 1962. 11 cas sur 87 000 examens (5 521 cas de tuberculose). VESSIE (18I A) Selon la statistique établie d’après les registres du Docteur SHIKARA, sur 770 nouveaux cas diagnostiqués en 1962, 91 étaient localisés à la vessie, soit 12 %. 34 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT D'autre part, le tableau 57 du Directorate of vital and health statistic, pour 1960 fait état d’examens et de radiothérapies effectués par les services de radiographie des différentes villes d’Irak. Ils se montent, sans qu’il soit établi de digtinction entre examens et traitements, à 100 cas pour le cancer de la vessie chez l’homme et 32 chez la femme, et pour leg tumeurs de la vessie (sont-ce les tumeurs bénignes 7) à 111 cas chez l’homme et 74 chez la femme. Cette localisation fera l’objet d’un commentaire, au cours de cette étude (voir page 38). PEAU (190-191 La seule statistique de morbidité déjà ancienne dont nous disposions (tableau IX) met le cancer de la peau au premier rang des tumeurs malignes en frak. Dans le tableau XII, il occupe le 2e rang. D'autre part, les données fragmentaires émanant de services d’anatomie pathologique et de radiographie ne font pas état d’une localisation dont le diagnogtic ne nécessite ni examen histologique ni radiographie. Cependant, tous les médecins interrogéa aur place au qujet de cette localisation nous ont affirmé que le cancer de la peau était le plus fréquent en frak. Et G. RAHM, à la première conférenct annuelle contre le cancer a ajouté : "le cancer de la peau a la fréquence la plus élevée chez l’homme et celle-ci est quatre foig plus élevée que chez la femme". LE CANCER DE L’ENEANT Quelques précigions ont été données sur ce capcer à la première SC PATE T2OCCCHX MATUENLCL UIU LLDUDLIC HOSDILE, de Bagdad. A coté des lymphones malins qui comprennent la maladie de Hodgkin, les Iympho-et réticulosarçomes, les tératomes sont les plus fréquents : ils apparaissent dans les premiers mois de la vle et sont généralement rêtropéritonéaux ou thoraciques. Le cancer de la thyroide est également fréquent chez l’epfant : il s’étend aux ganglions régionaux cervicaux et plus tard au poumon et aux o5. Les tumeurs du cortex surrénalien peuvent donner naigsance au syndrome surrénalo-génital. IRAK 37 Les (hymomes malins se présentent sous la forme de tumeurs du médiastin : ils sont très radio-sengibles : mais le pronostic en est sombre. Les tumeurs génitales sont fréquentes : séminomes ou tératomes testiculaires, chez le garcon, quelquefoia bilatéraux : cancer de l’ovaire et sarcome botrvoide du vagin, chez la fille. La tumeur de Wilms, trèg maligne, est la plus fréquente des tumeurs abdominales chez l’enfant. Elle représente 20 à 40 % des cancers de l’enfance. Parmi les tumeurs d’origine nerveuse, le médulloblastom, est spécial à l’enfant : on rencontre également des rétinoblastomes. quelquefois bilatéraux, et des neuroblastomes de la medulla surréna¬ lienne ou de la chame sympathique. Toutes ces tumeurs sont très malignes. Le cancer du colon, à partir d’une polypose héréditaire multiple, peut ge produire chez le jeune enfant. Certaineg tumeurs comme le cancer des voies respiratoires supérieures, du poumon et du tube digestif sont rares et le cancer de la peau est extrèmement rare chez l'enfant, à l’exception, peut¬ être, du naevocarcinome. SHURRI note auasi l'existence de tumeurs des 05, de cancers primitifs du foie et de sarcomes de l’intestin grèle parmi les enfants irakiens. 38 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT ESSAL D’INTERPRETATION DE QUELQUES DONNÉES CONCERNANT CERTAINES LOCALISATIONS 1. VESSIE La fréquence des tumeurs de la vessie est notable en frak, Bien que cette localisation ne figure pas dans le seul tableau dont nous disposions (tableau IX) pour 1932-37, elle noug a été gignalée par les différents membres du corps médical que nous avons rencontrég à Bagdad. D'autre part, la statistique du service de radio-diagnostic établit la fréquence du cancer de la vessie à 12 % de tous les nouveaux cas de cancer, en 1962 (voir ci-dessus). Le rapport présenté par le Docteur Talal N. SHAWKAT (1) qui dirige le service d'urologie au Republic Hospital de Bagdad constitue un document fort intéressant. En éffet, il souligne l’importance étiologique de la bilharziose dans le développement du cancer de la vessie. Ce rapport repose sur la recherche urologique approfondie (questionnaire ci-joint) de 200 cas de bilharziose chronique, provenant de différentes régions fortement infestées d’Irak et où, par conséquent. ces malades étaient exposés à de fréquentes crises de bilharziose aigué. L’âge de ces malades variait de 7 à 65 ans, la maladie étant plus fréquente entre 20 et 40 ans. Le sexe masculin comptait 167 cas et le sexe féminin 33 cas, soit une sex-ratio de 5 : 1. Les complications de la bilharziose affectaient soit les voies urinaires supérieures (30 % des cas) soit les voies urinaires inférieures, sous formes de calcifications de la vessie, d'ulcères bilharziens solitaires ou multiples, de contractions de la vessie. de papillomes bilbarziens simples, de calculs vésicaux, enfin de tumeurs de la vessie. (1) I. rac. Med, Bagdad 5 (N.S.) n°2, 1963. LRAE 36 SERYICE D'UROLOGIE ET SERVICE D’ANATOMIE PATHOLOGIQUE UNIVERSITE DE BAGDAD QUESTIONNAIRE CONCERNANT LES CAS DE RILHARZIOSE CIUN VL CIISN 49 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT année. IRAE 41 Dans cette série de 200 cas, 32 cas de cancers de la vessie soit 16 % ont été décelès. Dans 50% des cas, la tumeur était du type spino-cellulaire. D'autre part, le nombre de cas de bilharziose observés en frak (tableau II) en 1960 s’élevait à 13 303 pour le sexe masculin et 3 613 pour le sexe féminin, soit au total 16 916 cas (sex-ratio : 4 : 1). En extrapolant, on pourrait supposer, d’après les résultats obtenus dans l’enquête du Docteur SHAWKAI, qu’un millier de personnes atteintes de cette maladie ont été à même de contracter un cancer de la vessie, comme complication de la bilharziose, en cette meme La bilharziose se présente sous plusieurs formes: la bilharziose intestinale provoquée par Schistosoma mansoni, la bilharziose artério¬ veineuse due à Schistosoma japonicum et la bilharziose urinaire (ancienne hématurie d’Egypte ou bilharziose vésicale) provoquée par Schistosoma hématobjum. C’est cette dernière forme qui sévit en frak. "Le cycle parasitaire est simple (1) : (BOUVRY), les larves traversent la peau à l’occasion de l’immersion d’une partie du corps dans l’eau douce (marigot, rivière, canal d’irrigation). Elles sont entrainées par le courant veineux vers le cœeur, parcourent la circulation pulmonaire et gagnent le foie. Elles deviennent adultes dans les ramifications de la veine porte. Les femelles fécondées migrent le plus souvent vers les veines du système hypogastrique. Elles y pondent leurs oeufs qui, traversant les parois des capillaires et l’épithélium des organes génito-urinaires, sont responsables des lésions spécifiques. Rejetées avec l’urine dans les collections d’eau douce, les œufs y éciosent : les larves doivent subir une évolution chez un mollusque aquatique avant de devenir infestantes". Les sujets qui marchent pieds nus ou se baignent dans les eaux douces infestées ont donc des chances de contracter la bilharziose. "Or. (LE CHUTTON) (2) ces bibarzies qui vivent dans les tissus humains et provoquent les lésions des bilharzioses peuvent engendre¬ au bout d’un certain temps des comcors pcrgnes» ar pe «e Sacex sont susceptibles de se cancériser. D’après certains auteurs, la proportion de cancers consécutifs aux bilharzioses pourrait varier de 5 à 10 % des cas... Dans l’étude de SHAWKAI, cette proportion était de 16 % des cas de bilharziose. (1) Presse medicale 71748, 2313, 1963. (2) La lute contre le cancer, 407142, 11, 1963. 42 LE CANCER AU MOVYEN-ORIENT En zone d’endémie, la découverte dans les urines des œeufs du parasite est la règle. Cette parasitose est généralement contractée dès l’enfance. C’est ainsi que, dans les régions rurales de la province de Bagdad, DEMARCHI (1), à l’occasion d’une enquête alimentaire effectuée en 1961, a trouvé que sur 1 081 enfants d’écoles primaires, 18, 5 % étaient atteints d’une bilharziose urinaire. Cette constatation n’est pas seulement particulière à l’Irak. En Afrique noire. DAYET (2) a constaté que, dans un certain village africain, presque tous les enfants parvenus à l’âge de 8 à 10 ans urinaient du sang, et ceci pendant 4 ou 5 ans. A l’âge adulte, les hématuries caractéristiques sont habituellement assez rares : elles sont remplacées par une infection génito-urinaire chronique qui ne cessera de progresser insidieusement. Des troubles de la miction apparaissent ensuite. Les réinfestations et l’infection empèchent la régénération de l’épithélium vésical et aboutissent à une prolifération exubérante, et, dans certains cas, à un cancer de la vessie. Il semble que si l'étiologie d’une tumeur maligne de la vessie consécutive à une bilharziose s’explique surtout par l’irritation chronique due à l’action traumatisante du parasite, on peut considérer également pour l’Irak, un facteur de carence alimentaire, car les bilharzioses se rencontrent dans des populations pauvres, sous¬ développées, dont l’alimentation mal équilibrée présente des carences notables en protêines. Ni au Liban où l’on nous avait signalé une fréquence notable de cancers de la vessie (3), ni en fran où cette localisation ne comptait que pour 0., 59 % de tous les cancers dans la statistique du Ministère de la santé, et que pour 1, 2 % dans la statistique hospitalière (4) on ne nous a signalé la possibilité d’une relation étiologique entre la bilharziose et le cancer de la vessie. Par contre, cette relation existe en Egypte. Aboul NASR (5) signale que dans un grand hôpital du Caire, 1 696 cas de cancer de la vessie ont été dénombrés, de 1932 à 1940, et que 43 % étaient liés à une bilharziose, ce qui représente un taux de 11 % par rapport à l’ensemble des cancers. (1) L. Fac. Med. Bagdad : 47/4, 140-149, 1962. (2) Méd. Afrique Noire, n° 3, p. 249, 1963. (3) Monographie de l'Institut national d’hygiène, n° 26, 1962. (4) Monographie de l’Institut nationai d’hygiène, n° 19, 1960. (5) Acta U.L.C.C. XVIA, 528-537, 1962. LRAE 43 Ses observations personnelles lui ont permis de recueillir 303 cas de cancer de la vessie sur 734 bilharzioses (40 %), soit 17 % de l’ensemble des tumeurs. En frak et en Egypte, les conditions de vie sont semblables : larges fleuves (Tigre. Euphrate) sujets comme le Nil à des crues génératrices d’inondations et provoquant l’accumulation d’eaux douces croupissantes, propices au développement des larves de schistosoma : culture du riz dans les marécages laissés par les inondations : habitude de marcher pieds nus : populations pauvres et sous-alimentées habitudes religieuses qui nécessitent des ablutions répétées favorisant les risques d’infestation dans des bassins souilles. HIGGINSON (1), à ohannesburg, a trouvé 15 cas de tumeur maligne de la vessie associée à une bilharziose sur 25 cas hospitaliers consécutifs. Au Sénégal. PAYET (2), tout en dénoncant l’existence d’une infes¬ tation bilharzienne relativement discrè̂te, dans un milieu particulier et sélectionné, ne peut établir, d’une façon certaine statistiquement. les rapports de cette maladie avec le cancer de la vessie. En Mozambique, PRATES (3) montre que le taux des cancers de la vessie chez le mélano-africain atteignait entre 1944 et 1957 9, 8 pour 100 000 dans une population de 45 260 femmes et 9. 2 pour 100 000 dans une population de 53 775 hommes (9, 5 pour les sexes réunis). La sex-ratio, presque équilibrée s’établit donc à 1 : 1, 06. La légère prédominance dans le sexe féminin pourrait être liée aux habitudes de travail en Mozambique : les femmes travaillant seules aux champs seraient plus que les hommes exposées à une infestation par la bilharziose. En Afrique du sud. DODGE (4) rapporte que le registre de Kampala. a noté, au cours de la période de 1952 à 1959, 3 712 cas de cancer dont 108 (3, 4 62) étaient des cancers de la vessie. Ici, la schistosomiase ne semble pas jouer un rôle essentiel dans la carcinogénèse. En effet, sur ces 108 cas, 31 présentaient une rétention urinaire due à un rétrécissement urétral. On peut alors penser que l’irritation chronique qui en résulte est favorable au développement d’une tumeur maligne de la vessie. (1) Acta U. L. c. C. XVIIUA, 579-584, 1962. (2) Acta U. L.C. C. XVILA, 641-642, 1962. (3) Acta U.L.C.C. XVIUA, 643-647, 1962. (9) Acta U.J. C. C. XVIA, 548-52, 1962. 44 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT Dans les pays occidentaux, la bilharziose ne saurait être incriminée dans l’étiologie du cancer de la vessie. En effet, dans nos pays, ou cette parasitose n’existe pas, ce cancer semble assez fréquemment lié à des contacts avec des substances cancérogènes, telles que les amines aromatiques. Il est donc un cancer essentiellement professionnel. En Argentine. PICENA (1) estime la fréquence du cancer de la vessie à 15 % des cancers professionnels. BILLIARD-DUCHENE (1) a enregistré, de 1947 à 1953, 52, 21. et 12 cas respectivement dans trois usines françaises de Haute¬ Normandie, et des régions parisiennes et grenobloise. TEDESCHI (3), aux Etats-Unis, cite une enquête effectuée auprès de 207 malades atteints de cancer de la vessie. Dans 17, 9 % des cas, il y avait eu un contact professionnel (1 seul cas avant travaillé dans une usine de 2-naphthylamine) : dans 11 %6 des cas, il y avat une histoire familiale de cancer de la vessie, ce qui souligne le rôle de la prédisposition et de la vulnérabilité individuelle. 16,4% seulement des malades avaient indiqué une infection du tractus urinaire. Nous savons cependant que d’autres facteurs peuvent intervenir dans la genèse des tumeurs vésicales. Le rôle cancérogène éventuel du tabac a été signalé par divers auteurs, dont LOCKWOOD, à Copenhague. Dans l’enquête de TEDESCHI aux Etats-Unis auprès de 207 cas de cancer de la vessie, 68 7 fumaient à cette époque et 14, 5 % avaient fumé. D’autre part. DORN (4) signale qu’aux Etats-Unis la fréquence des cancers de la vessie est plus élevée dans les régions urbaines que dans les régions rurales, ce qui laisserait supposer un facteur étiologique de milieu (pollution atmosphérique ou autre) : et également plus ejèvee chez les hommes que chez les femmes. A ce propos, la sex-ratio est très variable selon les différents pays. Si DODGE en Afrique du sud obtient un rapport HF de 10 : 1. ABOUL NASR, en Egypte, en obtient un de 5 : 1 (à partir de 543 cas masculins et 109 féminins), semblable à celui obtenu pour l’Irak (5 : 1 et un peu supérieur à celui signalé par PAYNE en Angleterre (4: 1). (1) Med, Trabalo, xxVI1238-239, 178-182, 1962. (2) Bul, du cancer, 49-45, 376-380, 1958. (3) Boston Med. Quarterly 1963, 14/2 (52-56), 1963. (4) Aeta V. J. C.C. XVI4,553-560, 1962. IRAL 45 Par contre, en Mozambique, PRATES constate qu’elle s'équilibre à 1: 1. 06 (voir page 43), et GILLMANN (1) à Johannesburg, obtient un rapport de 1, 75 : 1, qu’il considère devoir être corrigé, du fait de la différence entre les sexes dans l’hospitalisation. En ce qui concerne l’âge auquel sont consignés les cancers de la vessie, il est impossible à apprécier en frak, si ce n’est dans la petite statistique hospitalière du Docteur SHIKARA. Mais, en Egypte. ABQUL, NASR constate que le plus grand nombre de ses cas (40 % environ) se situent dans la 5e décennie et que les 374 des cas (73 () ont moins de 50 ans (âge moyen : 44 aas), alors qu’en Angleterre PAYNE considère que seulement 12, 4 % des cas avaient moins de 50 ans. et pour GILLMANN (2), il y aurait plus de cas à un âge inférieur D’après DODGE, 12 cas sur 108 (11 7) avaient moins de 40 ans : à 50 ans chez les habitants de l’Afrique orientale portugaise que chez les anglais et les américains. Quant au type histologique il semble varier avec l’étiologie de la tumeur vésicale. C'est ainsi qu’HIGGINSON (3), à Johannesburg, a constaté que la plupart des formes de cancer de la vessie étaient du type spino¬ cellulaire chez le bantou africain, comme le montre le tableau ci-joint: GILLMANN a également remarqué que sur 100 cancers de la vessie en Afrique orientale portugaise, 59 % étaient du type spino-cellulaire, 21 % du type intermédiaire et 13 % du type anaplasique. ABOUL NASR, en Egypte, relève 60 ( de cancers vésicaux de type spino-cellulaire et 34 % de type intermédiaire sur 299 cancers. En Afrique orientale portugaise. PRATES en indique 58, 6 % de type spino-cellulaire. (1) Adta U.J. C. C. 560-575, 1962. (2) Acta U. J. C. C. XVIIA, 560-574, 1962. (3) Acta U. L. C. C. XVHIUA, 579-584, 1962. 46 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT Il semblerait donc que, dans ces pays, où la bilharziose règne, elle fut à l'origine de cancers de type spino-cellulaire. Cette hypothèse est étavée par le fait que DODGE, en Ouganda, ne signale que 34, 2 % de cancers du type spino-cellulaire : or, dans ce pays, la bilharziose n’est pas fréquente. D'autre part, HIGGINSON déclare: "Les cancers des types papillaire et à cellules intermédiaires sont extrèmement rares dans la population bantoue indigène de l’Union sud africaine. Les cancers spino-cellulaires, par contre, sont plus fréquents qu’au Danemark et aux Etats-Unis. Ces résultats confirment l’opinion selon laquelle la schistosomiase est le facteur étiologique principal dans le cancer de la vessie chez les bantous sud africains. Il remarque également : "le type histologique le plus susceptible d’être le résultat du tabagisme, c’est-à-dire le type à cellules inter¬ médiaires, est rare dans cette région, ce qui semble indiquer que le tabagisme n’est pas un facteur majeur dans le développement du cancer de la vessie dans cette partie du sud africain. GILLMANN exprime la même opinion en ces termes : "Le cancer spino-cellulaire est rare en Angleterre alors qu’il est le type le plus fréquent en Egypte et chez l’africain de Johannesburg et de Lourenco Marques. La fréquence inhabituelle du cancer spino-cellulaire parmi les africains et les égyptiens suggère l’action de facteurs de milieu semblables en Afrique orientale portugaise et en Egypte, dont l’un peut être différent de celui de l’Angleterre. Enfin DODGE : "La fréquence élevée des cancers de la vessie du type spino-cellulaire en Egypte est attribuée depuis longtemps à une association avec la schistosomiase. En conclusion, il semble bien que le cancer vésical en frak soit lié étroitement à la fréquence élevée de la bilharziose dans ce pays. Il serait donc éminemment souhaitable que le gouvernement irakien aidé peut être par l’Organisation Mondiale de la Santé fut en mesure d’appliquer dès maintenant les mesures de prévention qui s’imposent. Sur le plan collectif, l’introduction de produits chimiques mollusci¬ cides tels que le sulfate de cuivre, le chlorure de Barvum, le penta¬ chlorophénate de sodium de prix de revient modique, le carbonate de barvum, etc. dans les canaux infectés, serait plus efficace que le port de chaussures impossible à obtenir dans un pays pauvre et de climat torride. On éviterait ainsi en frak un bon nombre de bilbar¬ zioses et par suite de tumeurs malignes de la vessie. Mais l’éducation sanitaire reste le complément indispensable de l’action préventive : il suffirait que l’interdiction d’uriner dans l’eau ou près de l’eau fut comprise et respectée de la population. 47 IRA L’amélioration de l’équipement sanitaire est une des méthodes dont on peut attendre le plus : construction de lavoirs, de piscines et. dans le cas particulier de l’Irak, de latrines. Dans la grande ville qu’est Bagdad, il suffit de se promener le long du Tigre pour se rendre compte du caractère urgent de cette dernière mesure. Le gouvernement irakien ne méconnaît pas l'importance de ces problèmes qui furent ceux de la France au siècle dernier. Sans doute est-il difficile de changer les habitudes séculaires d’un peuple. mais la richesse prodigieuse que représente le pêtrole doit pouvoir faciliter beaucoup la modernisation du pays. L’hygiène collective devra être parmi les premières à en bénéficier. 1- PEAU La fréquence du cancer cutané en frak frappe par sa similitude avec celle de ce cancer dans les pays du Moyen-Orient, l’Iran et la Turquie (1), que nous avons prospectés. Elle diffère considérablement, par contre, de celle observée dans les pays du Proche-Orient, Israel et le Liban (1), pourtant situés sous la même latitude, mais dont l’irradiation solaire est tempérée par la proximité de la mer et par la forte humidité de l’atmosphère qui ampute largement le spectre des ravons ultra-violets. En frak, comme dans ses deux pays limitrophes, l’Iran et la Turquie, le soleil brille toute l’année et, pendant 9 mois, d’une façon inexorable, réalisant ainsi des températures parmi les plus élevées du globe. Il y a donc tout lieu de supposer que l’irradiation solaire intense et continue, à laquelle sont exposés les 273 de la population (agriculteurs) est à l’origine du nombre important de cancers cutanés observés en frak. L’hypothèse que la lumière solaire est un facteur étiologique important dans le cas de cancer de la peau est étavée par cind groupes d’arguments : 1) ce cancer est le plus souvent localisé sur la face et les mains (environ 95 % des cas) : 2) les personnes occupées en plein air sont le plus sujettes à ce genre de cancer : (1) Monographies de l’Institut national d’hygis̀ne, nes 19 et 26. 48 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT 3) les noirs qui sont peu susceptibles aux coups de soleil sont auesi relativement réfractaires au cancer cutané : 4) les ravons ultra-violets présents dans la lumière solaire produisent des cancers de la peau chez les souris et les rats : 5) le cancer cutané humain est plus fréquent sous les latitudes méridionales que dans les régions nordiques. C’est ainsi qu’en Australie. BELISARIO (1) note que la fréquence du cancer cutané atteint 33 % de l’ensemble des cancers à Melbourne. 50 % en Adélaide, 60 % à Sidney et 70 % à Brisbane : encore plus au nord, c'est-à-dire plus près de l’Equateur, elle est de 75 %. En UI. R. S. S.. SHANIN signale également que la fréquence de cette localisation augmente à mesure qu’on avance vers le sud, de la Carélie à la Biélorussie et de la Moldavie à la Bulgarie : 8, 4 : 13, 9 : 20, 6 et 32 respectivement. Dans cette dernière région, les 80 % de la population sont des agriculteurs. Le mécanisme de la cancérisation cutanée peut, semble-t-il, se schématiser de la façon suivante (2) : à la phase d’érythème du début succède, comme chacun sait, une desquamation et une pigmentation plus ou moins intenses. Avec le temps - de longues années - cette pigmentation est suivie d’altérations cutanées plus importantes : télangiectasie, atrophie dermo-épidermique et hyperkératose. Cette dernière lésion est susceptible, chez le vieillard, de se transformer assez fréquemment en cancer. En frak, outre l’irradiation solaire, la malnutrition, les carences en vitamines A et C doivent également jouer un rôle dans la genèse de la localisation cutanée, en retardant la cicatrisation des plaies ou en provoquant des dermatoses, de même que le manque d’hygiène et spécialement d’hygiène de la peau. (1) lap, J. Derm, 7279, 721-732, 1962. (2) Peut-on prévenir le cancer 2 par J. LEGUFRINAIS, Ed. NEYRET, 1962. LR A K 46 APERCU D’ENSEMBLE ET CONCLUSIONS L’Irak, créé en 1932 par la Société des nations, développe ses déserts immenses sur les 4/5es d’un territoire dont la superficie est légèrement inférieure à celle de la France. Le cinquième restant. fertilisé par le Tigre et l’Euphrate, n’est que peu exploité et nourrit insuffisamment une population sept fois moins importante que celle de notre pays. Les difficultés politiques, les séditions militaires, qui le troublent depuis des années, n’ont pu qu’entraver le développement économique d’un peuple dont le gros handicap est la présence de tribus belliqueuses (eles constituent la moitié de la population) de races très diverses. pourtant unies par le lien de la religion musuimane. Les carences alimentaires, la mauvaise qualité de l’eau, impropre à la consommation, la malnutrition, le manque d’hygiène et la chaleur torride qui règne une partie de l’année, sont à l’origine d’un état sanitaire peu satisfaisant : la tuberculose, la syphilis non vénérienne (beil) et surtout la bilharziose y règnent à l’état endémique. de médecins (1 pour 3 300 habitants en moyenne), le nombre insuf- Si la morbidité est élevée, la mortalité l’est également. La pénurie fisant d’hopitaux, les communications difficiles et les habitudes ancestrales en sont la cause. Les deux collèges de médecine des universités de Bagdad et de Mossoul forment en 6 années d’enseignement les médecins qui seront appelés à donner leurs soins aux malades, soit à titre de médecins du ministère de la santé, soit en clientèle privée. De plus, ils s’efforcent de donner à leurs étudiants une formation supérieure et une spécialisation, en les envovant achever leurs études dans des universités étrangères. Il n'existe pas de chaire de cancérologie en frak, Toutefois, la progression du cancer a incité le ministère de la santé à créer, en 1961, la "Fondation nationale contre le cancer". Un centre anti¬ cancéreux modèle, dont la construction dans l’enceinte du Republic hosnital le plus grand nôpital de Bagdad - était déjà bien avancée en avril : 63, fonctionnera d’ici peu et sera équipé d’une bombe au cobalt qui pourra traiter 3 000 malades par an. 50 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT D'autre part, la Fondation nationale contre le cancer a réuni à Bagdad, en 1962, la première conférence annuelle sur le cancer, à laquelle participaient tous les membres éminents du corps médical de Bagdad. La deuxième conférence a da avoir lieu en automne 1963. L’enregistrement des décès est encore très imparfait : le taux de mortalité était de 4, 7 % en 1960, alors que celui observé en France la même année atteignait 11, 3 6. Les décès sont sensiblement plus nombreux dans le sexe masculin que dans le sexe féminin, fait expliqué par la répartition par sexe de la population (sex-ratio H : F : 1, 35 : 1). Les taux de décès par tranches d’âge accusent peu de différences entre les sexes. La mortalité infantile reste élevée : près du quart des décès s’observe avant la quinzième année et parmi ceux-ci, la moitie se prouit avant l’agc de un arr. La propUT tronr des ueces Hus. à la sénilité et aux causes mal définies (40 % en 1960) est le reflet de l’insuffisance qualitative et quantitative des déclarations des causes de décès. Si les affections cardio-vasculaires occupent le premier rang des causes de décès, le cancer n’occupe que le 9e rang (1, 8 pour cent décès) : il ferait deux fois moins de victimes que la tuberculose. mais ce taux si faible est certainement lié au défaut d’enregistrement de cette maladie. Les décès par cancer (nombres absolus) sont en constante augmen¬ tation depuis, le début de la vie jusqu’à la soixantaine, Age à partir duquel ils diminuent. La mortalité chez l’homme en 1960 est presque exactement le double de la mortalité féminine, constatation particulière à l’frak et parallèle à celle concernant la mortalité générale. La répartition par Âge des décès "par cancer montre que chez les femmes le maximum de fréquence (nombres absolus) se situe à la quarantaine, alors que chez les hommes Il n'apparat qu’à la soixantaine. De toute facon, la fréquencc réelle du cancer augmente plus ou moins régulièrement avec l’age, ainsi qu’on l’observe dans tous les pays du monde. Si, au total, les données sur la mortalité apparaissent encore très insuffisantes, les documents que nous possédons sur la morbidité par cancer témoignent de lacunes plus importantes encore. Nous ne disposons dans ce domaine que d’un tableau des cas de cancer dans les institutions de santé gouvernementales pour les années 1933-1937. Le L/5e des localisations n’y est pas spécifié, ce qui en diminue la valeur, Pour l’ensemble de ces années, c'est le cancer de la peau qui prédomine. suivi de près par le cancer du sein chez la femme. Viennent ensuite les localisations digestives et les tumeurs de la cavité buccale et du phey, Ps5, e "oblcsu le sese maséulin semhe pons joune que le sexe féminin. IRAK 51 Sur le plan de la morbidité hospitalière, on ne dispose actuellement que de renseignements proyenant de l’Institut central d’anatomie pathologique du collège de médecine de Bagdad, qui ne suffisent pas à donner une idée de la morbidité par cancer en frak. On y a décelé en 1962, 225 tumeurs malignes sur 4000 biopsies. D’autre part, grâce au Docteur SHIKARA, nous avons pu établir une statistique des nouveaux cas de cancer examinés dans le service de radiologie du Republic hospital, en 1962, statistique portant sur 770 cas. Dans le sexe féminin, la localisation mammaire y représente 12, 3 % de l’ensemble des cas et le col utérin 5, 1 %, Pour les deux sexes, le cancer de la vessie représente 12 6. Le tube digestif ne figure qu’en proportion très restreinte alors que les tumeurs des voies aériennes supérieures ont une fréquence anormalement élevée qui contraste avec la relative rareté des tumeurs broncho-puimonaires. D’un tableau émanant du service de médecine du Republic hospital, il ressort que le cancer du poumon, presque inconnu en 1924, à augmenté progressivement de fréquence de 1952 à 1958 pour atteindre le total de 549 cas en 1959. L’Irak suit donc à ce point de vue la tendance relevée un peu partout dans le monde. Quelques observations sur le cancer de l’enfant présentées à la première conférence annuelle sur le cancer font l’objet d’un bref commentaire. La fréquence relativement élevée du cancer de la vessie constitue la grande particularité des localisations tumorales en Irak. Toutes les observations concourent à établir un lien entre la fréquence de la bilharziose et celle du cancer de la vessie. La bilharziose qui règne à l’état endémique dans les régions inondées et croupissantes voisines du Tigre et de l’Euphrate, est causée par schistosoma hematobjum qui pénêtre les tissus humains en contact avec l’eau et dont les femelles fécondées pondent des œufs qui. traversant les capillaires et l’épithélium des organes génito-urinaires sont responsables des lésions spécifiques. Celles-ci aboutissent fréquemment à une réaction proliférative inflammatoire, qui, à la longue, fera le lit du cancer. C’est ainsi que SHAWKAL a trouvé 32 tumeurs de la vessie. Une rapide revue de la littérature sur les rapports de la bilharziose et du cancer de la vessie rend compte d’une étiologie semblable en Egypte - où les conditions de vie sont proches de celles de l’Irak et en Mozambique. 52 LE CANCER AU MOYEN-ORIENT On évoque les autres facteurs étiologiques éventuels du cancer de la vessie, liés à la profession et au tabagisme, et l’on propose certaines mesures propres à lutter contre la bilharziose et, par conséquent, contre le développement des tumeurs de la vessie. La localisation cutanée, fréquente en frak, semble être en relation. comme dans les pays voisins du Proche-Orient, avec l’irradiation solaire. Il faut bien reconnaitre qu’en dépit des progrès réels accomplis ces dernières années dans la lutte contre le cancer, il reste encore beaucoup à faire en frak, que ce soit dans le domaine de la préven¬ tion, du dépistage ou dans celui de l’enregistrement des cas. Encore faut-il admettre que les mesures préventives sont difficiles à déterminer, plus difficiles encore à faire appliquer. On pourrait sans aucun doute faire diminuer la fréquence des tumeurs vésicales et cutanées en luttant plus efficacement contre la bilharziose et en avertissant les populations des dangers d’une irradiation solaire prolongée. Mais sommes-nous en droit d’insister sur ces notions alors que, avec tous les pays occidentaux, nous nous sommes montrés incapables d’endiguer l’impressionnante poussée du cancer broncho¬ pulmonaire favorisé de toute évidence par le tabagisme. Si le Moyen-Orient a ses faiblesses, n’avons-nous pas aussi les nôtres 2 Dans ces immenses territoires désertiques du sud et de l’ouest irakien, habités par des populations presque toujours nomades, on concoit combien il peut être difficile d’organiser un système de ancestrales, les traditions séculaires si solidement enracinées chez dépistage précoce des lésions cancéreuses. D’ailleurs, les habitudes ces paysans attachés à la vie tribale, demeurent un obstacle majeur à l’introduction des méthodes occidentales. De même que dans les jeunes républiques africaines, cette situation est appelée à disparaître progressivement dans l’avenir, et l’on peut tenir pour certain que dans une vingtaine d’années - l’espace d’une génération - les conceptions européennes auront prévalu dans presque tous les pays du monde musuiman. I reste que, pour le moment, la pathologie irakienne est une pathologie tropicale dans un pays encore sous-développé. Le cancer n’y apparait que comme une maladie en quelque sorte mineure, qui se situe au e rang des grandes causes de mortalité. La tuberculose. la bilharziose, le trachome y sont des fléaux autrement redoutables: 17 000 bilharzieux, 23 000 tuberculeux ont été dépistés en 1960, et la tuberculose reste deux fois plus meutrière que les tumeurs malignes. C’était à peu près la situation de la France il y a un demi-siècle. IRA K 53 I1 faut donc comprendre que le gouvernement irakien soit plus préoccupé de ces grands fléaux sociaux que de la lutte anti-cancéreuse. Celle-ci n'a pourtant pas été négligée depuis quelques années et la construction du nouveau centre anticancéreux de Bagdad (sous les auspices de la Fondation nationale contre le cancer) en est le témoignage le plus tangible. Avec ses 200 lits et son équipement ultra-moderne, il n'aura rien à envier à la plupart des centres anticancéreux français. H reste à souhaiter qu’il disnose par la suite d’une unité de recherches statistiques permettant un enregistrement systématique des nouveaux cas. La connaissance exacte de l’épidémiologie est une des conditions indispensables à la lutte contre les grands fléaux sociaux. Nul doute que la prodigieuse - et inépuisable - source de revenus que représente l’Irak petroleum Company doive largement faciliter les futures réalisations dans ce domaine. 49 55 TARLE DES MATIERES GENERALITES ET RAPPEL GEOGRAPHIQUE........ 8 Races, langues, religions......................... 10 10 Population ................................... 12 Conditions et mode de vie........................ ORGANISATION DE LA SANTE...... 20 16 Enseignement de la médecine..................... 17 HôpitAux :................................... 20 LITTE ANTICANCEBEIISE. LES STATISTIQUES........... 21 21 Mortalité générale.............................. 25 Mortalité par cancer............................ 27 Morbidité par cancer ........................... 34 Tub6 digestif............................... 34 POUmOH : : .. : .: : : : : : :.::.:: :: ::: ::::: : 35 V68816 .................:...:... 36 1640 : «: 3 3:33333»»»3»» 3:332 3» 36 Cancer de l’enfant ......................... ESSAT D’INTERDBETATION DE QUELQUES DONNEES 38 CONCERNANT CERTAINES LOCALISATIONS..... 38 V68816 ................................. 47 D6aU ........................ APERCUL D'ENSEMRLE ET CONCLIISIONS.. Composition R Impresion RAMBAULT R GUIOT 18 rue de Calais. PARIS pe INSTITUT NATLONAL D’HYGIENE 3. RUE LÉON BONNAT, 3 NR 1 S- X Y 1: AUT, 32,84