MINISTÈRE DE LA SANTÉ PUBLIQUE ET DE LA POPULATION MONOGRAPHIE UE L’INSTITUT NATIONAL D'HYGIENE N° 24 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES. PÉDAGOGIQUES ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE PARIS 56 1 VIRTVTE DVCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEM Sous la direction de G. AMADO par l’équipe du Centre d’Observation et de Traitement accéléré «Le Coteaux à Vitry-sur-Seine MINISTÈRE DE LA SANTÉ PUBLIQUE ET DE LA POPULATION MONOGRAPHIE DE L'INSTITUT NATIONAL D'HYGIENE N° 24 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES PÉDAGOGIQUES ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE PARIS 19 8 1 VIRTVTE DVCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEM Sous la direction de G. AMADO par l’équipe du Centre d’Observation et de Traitement accélère " Le Coteau " à Vitry-sur-Selne Cette monographie, présentée par G. AMADO, a été préparée avec la collaboration suivante : M. CAPUI, : Psychopathologie sociale des enfants inadaptés. J. ROY, L. TALL-BONATE, M. CAPUL : Rôle du psychologue et de l’examen psychologique. R. CAHN. R. HAMELIN. D. BIBARD : Placement familial psychothérapique. M. CAPUL avec L. AZEMA. G. BEAUYAIS, S. CAPUL. G. CRAMHES R. et B. DIES¬ CHRQURG. L. et G. DREANO, R. DURIEUX, S. GINGER. G. GUTXOT, S, et E. MAZOTTI. G. SCHEURER, J. SIMONIN : Psychopédagogie des groupes. H. COURSAGET avec A. BESSIS. J. DUFAU, S. GELUGNE, J. RICHARD, N. RO¬ BIEUX : Psychopédagogie scolaire. J. RICHARD : Structure des relations dans les classes. S. CAPUL, et J. MANCEL : Rééducation scolaire individuelle en intemnat et dans un placement familial. R. DURTEUX : Rééducation psychomotrice. J. HEAMEN M. SIMON-PERRET. C. STAMM avec D. BIBARD, J. DUMONT. R. HAMELIN, J. RoY : Méthodes de service social. INTRODUCTION « (La spécialisation) est une conséquence nêces¬ saire et la conséquence positive de l’être de la science moderne. La délimitation des domaines d’objets entre eux. leur inclusion dans des régions spéciales ne détachent pas les science les unes des autres mais seules. au contraire, rendent possibles entre elles des rapports frontaliers, par quoi qe dessinent des zones frontières. De ceq dernières part une impulsion particulière qui déclenche des inter¬ rogations nouvelles, souvent décisives ». MARTIN HEIDECCER (Science et méditation) La psychiatrie infantile existe. Il n’y a pas bien longtemps que cette affirmation n’est qu’une vérité première. Il y en a bien moins encore que le principal objet de cette discipline s’est dégagé clairement (1). En effet, n’ont été considérés tout d’abord que les retards intellectuels et les encéphalopathies qui, sans doute, forment encore un chapitre de la neuro-psychiatrie infantile, comme de celle des adultes. Cependant ce n’est pas le plus important. Et la majorité des troubles utiles à connaitre et à étudier était, tout récemment encore, désignée sous le terme général et vague de « troubles du caractère ». Cette désignation ne tenait compte que de l’aspcct social des troubles. Un enfant pouvait être inadapté à la société parce qu’il était arriéré, ou infirme moteur ou trop difficile à éduquer. Chez ces récalcitrants, on ne songeait pas à rechercher, derrière les manifestations extérieures, autre chose que des tempéraments ou des constitutions, jusqu’à ce qu’on s’avise de l’importance (1) Certes, il a été publié depuis quinze ans plusieurs manuels de psychiatrie infantile en langue française, mais aucun ne l’envisage encore comme cela parait s’imposer aujourd’hui. Dans l’important araite de peychiatrie de l’Encyclopédie médico-chirurgicale paru en 1955. les différents buts de la neychiaurie infautile ne sont qu’esquissés. Il eat à noter que, dans le Manuel de Psychiatrie de Ey, BRLSSET etL RERNARD, puru 6n 1960, le terme même de psychia¬ trie infantile n’est pas évoqué, saus doute volontairemnent. Cependant, cet ouvrage fait une large part à la paychanalyse et à la psychologie géuétique, à la psycho-sociologie, etc. On pourrait donc craindre que, pour les auteurs, la psychiatrie ne commence qu’après l’adoles cence, et qu'auparavant il ne puisse s'agir que de psychologie; ce qui n'est certainement pas le cas. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PEDAGOGIQUES 6 de la vie des émotions et des sentiments : c’est alors que fut créée la catégorie des troubles « affectifs ». C’était une nouvelle étape. Parvenus à l’âge adulte, les caractériels devaient s’équilibrer plus ou moins grâce à la maturité acquise au long des années, ou demeurer caracté¬ riels, présentant même parfois des états psychopathologiques pouvant favo¬ riser l’apparition de troubles psychotiques, alors que les enfants présentant des troubles affectifs rentraient dans la norme ou devenaient plus ou moins névrosés. On ne pensait pas qu’ils devaient venir s’insérer dans le domaine de la véritable psychiatrie des adultes, dont la schizophrénie constituait la manifestation la plus précoce. On ne possédait d’ailleurs pas le recul suffisant pour connaitre le devenir des enfants examinés aux consultations spécialisées pour « troubles du caractère ». On ne savait pas non plus approfondir sufi¬ samment les examens psychiatriques des enfants, et même, dans un certain sens, ceux des adultes. On n’était pas a même de retrouver des structures men¬ tales comparables aux différents âges de la vie. Bien sur, les troubles mentaux. au sens où on les entend chez les adultes, sont rares chez les enfants. Encore qu’ils soient surtout beaucoup plus difficiles à déceler, si l’on ne se réfère qu’à ceux de l’adulte et si l’on ne possède pas une connaissance précise des étapes par lesquelles passent la pensée et la conduite, depuis les premières années de la vie. Faisons le point de ce problème. D’une part on connait désormais chez l’enfant des états pathologiques comparables à ceux des adultes : névroses de toutes les catégories (d’angoisse, phobique, hystérique, obsessionnelle. de caractère), déséquilibres psychopathiques, psychoses (ne réalisant pas toujours les aspects de la schizophrénie infantile). Ces états pathologiques. méritant d’être traités, ont toutes les chances d’aboutir, si rien de sérieux et de prolongé n’est entrepris, à des maladies mentales. D’autre part, il existe quantité de manifestations plus ou moins patho¬ logiques qualifiées aujourd’hui d’états prénévrotiques ou prépsychotiques : on ne peut absolument pas en prévoir l’évolution, et l’on a aujourd’hui l’impression qu’un certain nombre d’entre eux se régularisent au point de n’être plus remarquée après l’adolescence. On décrit également des états de prédélinquance. (Nous avons même tenté d’isoler des états préalcooli¬ ques). Ces diagnostics peuvent être posés, non pas en faisant appel aux antécédents congénitaux, aux facteurs biologiques constitutionnels ou héré¬ ditaires, ni aux événements traumatisants vécus, mais grâce à la connais¬ sance, enseignée par la psychanalyse, des structures psychologiques. Il est aujourd’hui possible de retrouver chez des malades-enfants les mêmes struc¬ tures psychopathologiques de base que chez des malades-adultes. La dificulté réside alors en ceci : chez l’adulte, le pathologique éclate plus souvent comme tel aux regards de tous, alors qu’on se demande toujours, chez l’enfant, si ce qui apparait comme anormal reprégente autre chose qu’un moment physiologique de l’évolution, et si l’équilibre ne se rétablira pas spontanément grâce à la seule maturation. Les prénévrotiques, prépsychotiques ou prédélinquants peuvent très bien devenir d’anciens « pré¬ malades guéris p. Cependant on ne saurait encore désigner à l’avance les cas qui accentueront au contraire leur glissement vers le pathologique. Une surveillance régulière parait au minimum nécessaire. Bien des fois, des mesures ET SOCIALES EN PSYCHIATRE INFANTILE thérapeutiques ou pédagogiques, un changement de milieu, une action sur la famille, rendront plus probable l’éventualité d’une issue favorable. La plupart des personnalités infantiles de structure prépsychotique sem. blent ne pas évoluer vers l’aliénation mentale véritable, mais vers des états de déséquilibre où le moi, restant infiltré de mécanismes psychotiques, converge suffisamment de cohésion et de contacta avec le réel pour permettre une adaptation relative mais au prix de difficultés importantes dans la vie fami¬ liale, sociale et professionnelle, ou parfois de troubles psychosomatiques graves. Il serait peut être plus juste de dénommer ces enfants « para-paycho¬ tiques » plutôt que « pré-psychotiques »). Nous ne saurions dire personnel¬ lement si, à l’âge adulte, ces cas seront particulièrement peu « solides » du point de vue mental et capables de résister aux pressions extérieures ou biolo¬ giques (nous voulons parler du seuil de tolérance aux pressions et aux firusta¬ tions, tel qu’il est étudié par la socio-psychiatrie). En particulier, nous ne savons pas dans quelle mesure ils seront spécialement exposés aux bouffées délirantes et autres accès plus ou moins temporaires de destructuration. A considérer le nombre important de ces cas dépistés aujourd’hui, alora que la prophylaxie mentale n’en est encore qu’à ses débuts, on peut induire qu’un plus grand nombre en est encore inconnu des services spécialiste. En particulier tous les enfants dont les troubles restent tolérables (parfois parce que l’entourage se montre particulièrement tolérant ou indifférent). Ces derniers (parmi lesquels on cite toujours les « névroses d’enfants sages »), passaient totalement inaperçus autrefois. Qui nous dit qu’un certain nombre de névroses graves de l’adulte, de déséquilibres, de toxicomanies voire de délires de l’âge mûr ne sont pas déjà inscrits dans ces personnalités, dont la structure. envisagée sous l’aspect des fixations infantiles, des relations objectales. des investissements libidinaux, des mécanismes de défense du moi, gerait. dès les premières années, inhabituelle (1) 2 A partir d’une certaine « intensité » des fixations prégénitales par exemple. à partir d’une certaine persistance de mécanismes archaïques, d’une certaine immobilité de la personnalité n’amorçant aucune évolution au cours de plu¬ sieurs années, n’est-on pas autorisé à penser que les chances de reprise spon¬ tanée de l’évolution deviennent faibles, ou en tous cas que, dans l’hypothèse la plus favorable, celle-ci restera incomplète, anarchique, fragile 2 Elle gera à la merci des circonstances ultérieures, événements biologiques ou pressions du milieu, qui risquent fort d’avoir facilement raison de cet équi¬ libre factice. On peut aussi bien comprendre cette éventualité dans la concep¬ tion organo-dynamique de H. Ey, en termes de désintégration globale et apicale, « régression » impliquant l’efflorescence des structures inférieures sous jacentes. Soulignons en même temps, pour nous intégrer dans les vues de cet auteur, non pas tellement la fréquence des troubles psychopathiques divers (1) Pour la psychoge maniaco-dépressive pure, la plus franchement héréditaire des maladies mentales, on ne retrouve gùe d’antécédent dans les états infantiles d’excitation ou de dépression, qui e rapprochent plutôt des états d’excitation ou de dépression « sty¬ piques » de l’adulte. Récemment certains auteurs ont pourtant cherché de structures men¬ als particulières de l’enfance chez les malade présentant plus tard des troubles cyclo- thymiques. METHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 3 dans les familles des enfants perturbés, ce qui est bien connu, mais la fré¬ quence chez eux des difficultés neuro-biologiques du développement : depuis les perturbations de la vie fœtale et de l’accouchement, les poids de naissance anormaux, l’irrégularité du premier développement et des manifestations instinctives précoces, jusqu’aux troubles psycho-anormaux et perceptivo¬ moteurs persistant jusqu’à et au cours de la scolarité (1). On ne peut certes pas affirmer que les événements vécus, familiaux ou sociaux, soient seuls à devoir être incriminés en psychiatrie infantile, bien que leur importance soit très grande. Il nous semble done que rien ne permet plus d’affirmer, aujourd’hui. qu’aucune maladie mentale de l’adulte éclate comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Il n’est pas interdit de penser, au contraire, que, dès l’enfance, des prodromes pourraient être souvent retrouvés. Mais la nature de ceux-ci reste encore très incertaine (de même que les causes immédiates de déclanche¬ ment des troubles mentaux de l’adulte sont souvent obscures). Les recherches dans cet immense domaine revêtent une importance capitale. Nous ne voudrions pas qu’on pât croire, à nous lire, que nous faisons délibérément passer les problèmes de l’enfance inadaptée dans le secteur de la pathologie mentale. Nous y sommes au contraire très opposés et dirions volontiers que le psychiatre d’enfants ne voit pas plus de malades sérieux que le médecin de médecine générale. Appelé à examiner le plus souvent des affections bénignes, spontanément ou facilement curables, il n’en dépiste pas moins quelques maladies graves. On sait les services qu’ont rendus les exa¬ mens systématiques, en matière de tuberculose par exemple. On ne voit donc pas pourquoi le fait d’examiner un enfant signifierait, pour un psychiatre, qu’il le considère comme un cas pathologique. Cependant, son concours est nécessaire, car ceux qui ont à intervenir en faveur des enfants inadaptés, pédagogues, psychologues, assistantes sociales, juges d’enfants, ne possèdent pas, comme lui, la référence au pathologique. Il est indispensable d’évaluer l’enfant à cette mesure, dans le double dessein de la thérapeutique et de la prophylaxie. Il va sans dire que, dans la majorité des cas, son intervention ne doit pas aller au delà, que l’enfant réintégrera le plus souvent le domaine des spécialistes de l’éducation et de l’enseignement et sera définitivement exclu de celui de la psychiatrie. Une certaine confusion est, certes, difficile à éviter. Car l’habitude de porter des diagnostics de structures mentales peut faire oublier que, par exemple, les termes de « structure hystérique » ou de « structure obsessionnelle » ne signifient rien de pathologique mais représen¬ tent chacun une des grandes formes d’organisation normale de la person¬ nalité. Mais s’il s’agit de formes d’évolution de structures des deux premières années de la vie, physiologiques à cet âge, mais pathologiques quand elles subsistent, ou lorsque du fait d’une régression ultérieure, elles réapparaissent au premier plan, on voit ainsi le passage toujours possible du normal au patho¬ logique et du pathologique au normal. Et l’on conçoit que des « traits » ou des « secteurs » pathologiques (ou normaux) puissent exister, ou bien apparaitre (1) G. AMADO : « Les poids de naissance des enfants inadaptés intelligenta ». Remue de neuro-pschiatrie infantile et d’hygiène mentale de l’enfant, mai-juin 195. ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 6 et disparaître, chez la plupart des individus (et aussi selon les normes cultu¬ relles et les conditions socio-économiques). Sans vouloir reprendre l’éternelle discussion entre normal et pathologique remarquons comment la psychiatrie infantile et les problèmes de la formation et de l’évolution de la personnalité l’actualisent d’une nouvelle façon. Une exagération de l’attitude psychanalytique amènerait à penser que tout est pathologique (et la conception de- l’enfant « pervers polymorphe » sy ratta¬ che). Au contraire, pour un certain « humanisme » chaque homme détient la même « humanité » (conception peu éloignée dé la vision religieuse pour laquelle chaque homme est un représentant du divin). On pourrait tenter une synthèse de ces points de vue en développant l’idée célèbre que l’homme n’est qu’un « candidat à l’humanité », qui permet d’englober les idées d’évolution et d’imperfection. Le normal et le patholo¬ gique ne représentant plus alors que des étapes sur une voie progressive. Plus le sujet est normal (ou plutôt se rapproche du normal), plus il est capable des qualités proprement humaines, intelligence universelle et indépendante. action efficace, amour oblatif. Plus il est malade, plus ces qualités sont obs¬ curcies et leur libre jeu entravé. On a déjà fait la critique du « psychiatrisme » et insisté avec raison sur la nécessité de critiquer, non seulement la description des troubles, rapportés par des parents ou des maîtres d’école, mais aussi les éléments mêmes de l’examen psychiatrique. On sait que la technique de cet examen, la person¬ nalité du médecin, les conditions de temps et de lieu, la situation même de consultation, peuvent amener l’extériorisation de fantasmes et d’attitudes non habituels pour l’enfant examiné. Il convient donc d’en juger en les rap¬ portant, en particulier, à la situation de transfert ce qui permet de les criti¬ quer et de leur redonner leur juste valeur. Mais il nous parait encore plus important d’essayer de voir, outre la structure actuelle, la dynamique de la personnalité, c’est-à-dire les possibilités d’évolution qui demeurent. La nature du contact est un élément important de cette appréciation. ainsi que l’existence d’anxiété, apparente ou facilement mobilisable. Ces critères, parmi d’autres, pourront indiquer une certaine liberté de dépasger l’organisation psychologique actuelle, c’est-à-dire la faculté d’attachement affectif la possibilité d’intérêts dans les domaines de l’intelligence et de l’action. Le désir de changer, de progresser, la persistance de forces vives non encore immobilisées, sont aussi utiles à connaitre que la structure, si celle-ci est considérée comme une armature régie par une mécanique plus ou moins inéluctable, ce dont il ne faut pas se contenter. Nous retrouvons ici ce à quoi aboutit la phénoménologie d’E. Minkowski, quand il distingue « affectivité confit » et « affectivité contact ». Fort heureusement, en effet, l’attitude phénoménologique vient mettre l’accent sur le désir de libération de l’homme, alors que la psychanalyse risquerait de trop s’appesantir sur le souci d’organisation. Une récente conception de M. Balint fait preuve de la même tendance. Abandonnant délibérément la conception freudienne du narcissisme pri¬ maire, cet auteur propose celle d’un « amour primaire », dans lequel «baigne MéTHODES PSTCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 19 l’enfant à sa naissance, sans qu’il existe encore d’objets limités. Ce n’est que lorsque les objets émergent graduellement, et que certains viennent apporter un trouble, qu’il se produit un retrait de la libido, le narcissisme, qui n’apparaîtrait ainsi que secondairement. Outre qu’elle rejoint des conceptions traditionnelles, cette théorie a le mérite de mettre l’accent sur le caractère primordial de l’amour parfait, qui constitue pendant toute la vie une recherche permanente. En même temps le narcissisme, besoin contradictoire mais essentiel, demande à être préservé. Ainsi serait retrouvée la base d’une psychologie non moins profonde que la psychanalyse, mais peut-être la complétant en ce qu’elle devrait tenir compte, dans les contacts interhumains, du besoin persistant de retrouver cet amour primaire au-delà des besoins de préservation du moi. Disons même que c’est à cela que servent les sciences humaines et leurs techniques : à ouvrir toutes les portes de la compréhension, à écarter les barrières qui s’opposent à la libre communication entre les hommes et avec le monde. Si, au mépris de leur source et de leur raison d’être, elles se figeaient dans un nouveau système de restrictions et de défenses, une nouvelle systé¬ matisation, elles manqueraient leur but et n’auraient d’autre sens que celui de renforcer le narcissisme de leurs tenants. Résumons ce que nous venons d’énoncer. Il importe, parmi les enfanta inadaptés, de distinguer les malades de ceux qui présentent des troubles momentanés ou réactionnels. Les premiers devront être traitée sérieusement. les autres seront seulement surveillés, ou bien feront l’objet de mesures mineures. Tel est le premier aspect, clinique et thérapeutique, de la psychiatrie infantile. Voici le second : ces enfants, malades ou non, devront être placés sous surveillance attentive, afin qu’on puisse connaitre leur évolution et ultérieurement observer l’apparition éventuelle, à l’âge adulte, d’une affection mentale, ou plus exactement, s’opposer à cette apparition. Tel est l’aspect de recherche scientifque en même temps que l’aspect prophlacique de la psychia¬ trie infantile. Les méthodes modernes de la psychiatrie infantile s’eforcent de répondre à ces deux néceasitég. C’est ce que nous avons tenté de faire au centre de Vitry, à la fois pendant la période d’observation, s’accompagnant parfois d’un traitement court, et pendant celle de suite, très longue et se prolon¬ geant jusqu’à l’âge adulte. Bien que ce travail soit très imparfait, nous noue y référons au cours de cette monographie, où nous ferons le point des méthodes psychologiques, pédagogiques et sociales. On recherche d’abord l’approfondissement du diagnostic, pour les cas où les examens de consultation laissent persister un doute. La séparation de la famille et de l’école, la vie dans un milieu psycho-pédagogique actif, les examens répétés dans différentes situations, laisseront une plus faible marge aux erreurs. Or, une erreur risquerait d’engager une vie entière dans une fausse voie. L’obgervation dynamique permet, on le verra au cours de cet ouvrage. non seulement un triage suivi d’une orientation (adéquate dans la mesure où l’équipement spécialisé le permet), mais aussi une tentative de traitement ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 83 accéléré. Celui-ci doit être basé sur les thérapeutiques habituelles, médica¬ ments et psychothérapie, en même temps que sur les rééducations diverses : de la motricité, du langage, des difficultés scolaires spécifiques. La prise en charge des parents, suivant les techniques du service social moderne, au besoin leur orientation vers des traitements nécessaires pour eux-mêmes. s’intègre à cette perspective d’ensemble. Jusqu’ici, l’action que nous venons d’indiquer correspond au premier dessein de la psychiatrie infantile, le diagnostic et la thérapeutique. C’est surtout dans la période ultérieure que se réalise le second dessein prophylaxie des maladies mentales de l’adulte, au sens large, et, corrélati¬ vement, recherche catamnestique de l’avenir des enfants inadaptés (succédant à la recherche anamnestique entreprise dès la première consultation). L’action thérapeutique ne s’en poursuit pas moins, en liaison entre les différents orga¬ nismes d’hygiène mentale, pendant cette longue période. Un service de suite, dont le rôle est à la fois médico-social et de recherche scientifique, doit conserver le contact avec les enfants et provoquer en cas de besoin une intervention sociale, pédagogique ou thérapeutique. Les exa¬ mens ultérieurs, à périodicité irrégulière, d’un certain nombre de cas, per¬ mettent d’observer la modification des troubles, l’évolution des structures au cours des années et de pénétrer au cœur du problème : à savoir les relations de la personnalité infantile avec la personnalité adule, des troubles de l’enfant avec les troubles ou l’absence de troubles de l’adulte. La période de l’adolescence, ainsi étudiée dans une continuité entre l’enfance et l’âge adulte, revêt toute sa signification et prend une valeur décisive : comment cette personnalité perturbée prendra-t-elle le virage 2 Le prénévrotique, le prépsychotique deviendront-ils ou non un névrosé, un psychotique " Le prédélinquant, un délinquant " etc. Des troubles jusqu’alors mineurs seront-ils mis brusquement en évidence au cours d’une poussée dysharmonique 2 Ou s’effaceront-ils définitivement dans un vaste mouve¬ ment ascendant et structurant 2 Quelques années encore et le jeune adulte a passé cette première rour. mente. Déjà les déséquilibres, les névroses, la schizophrénie, la délinquance ont éclaté ou tout au moins, à un examen attentif, apparaitront comme avant toutes les chances de se manifester sous peu. L’étape suivante dure beaucoup plus longtemps et devient presque impossible à suivre. En effet, la psychose maniaco-dépressive, les délires chroniques (ainsi qu’un certain nombre de manifestations psychiatriques aiguës) ne se verront que beaucoup plus tard, et l’on imagine assez mal (bien que ce ne soit plus tout à fait impossible), comment ces cas pourraient être suivis jusqu’à la cinquantaine : Sans penser encore aller aussi loin, nous nous contentons pour le moment d’une enquête concernant tous les cas passés au centre de Vitry dix ans plus tôt environ, et portant sur la totalité des entrées de trois années, c’est-ଠdire sur environ cinq cents cas (1). Ce travail, qui s’appuie sur des dossiers (1) R. CAHN, M. CAPUL. D. CAHN-FILACHET. Le deenir des enfanta inadaptés, Sauve garde de l'’enfance, sept.-oct, 1961 et : La Pachiagrie de l’onfant, Tome V, à pargitre en 1962. ET SOCIALES EN DSYCHIATRIE INFANTLG 103 fonction de certaines de celles de sa collègue. Le comportement de l’enfant. souvent différent selon qu’il se trouve avec l’un ou l’autre, peut prendre encore d’autres nuances lorsqu’il est avec tous les deux. En effet, de façon générale. le travail de l’éducatrice est plus délicat que celui de l’éducateur si l’on tient compte : - de la plus grande autorité du père [16] — dee phénomènes d’opposition à la mere, plus fréquents et plue intenges. — de la valorisation de l’homme dans notre contexte socio-culturel. — de l’absence fréquente d’une image virile sufisante dans la viedel’enfant (1) et donc, de la recherohe d’une fgure paternelle. On ne peut parler de comportement semblable mais équilibré, chacun gardant sa personnalite et son style propre. Leurs attitudes doivent être aussi complémentaires. Elles vont se diffé¬ rencier selon qu’il existe un transfert ou non, et que ce transfert est plus ou moins intense, durable, de tonalité différente, sur l'un ou l’autre, ou les deux. Cela avec toutes les possibilités d’interférences, de décalages., et aussi avec le danger que l’enfant exploite la situation. Lorsque, le plus souvent, le transfert négatif est polarisé sur l’un (l’éducatrice la plupart du temps) (2). l’autre peut « décharger son (ou sa) collègue d’une partie du poids des réactions négatives de l’enfant, non pas en s’y opposant, mais en les dérivant aux moments nécessaires en utilisant ses bonnes relations avec l’enfant pour le soutenr et tenter d’obtenir des progrès drects 121 ». Il faudrait ici insister sur un aspect du travail de l’éducatrice, très important dans certains cag. le maternage (soins maternels élémentaires : laver, coucher, faire manger. nettoyer., avec beaucoup de contacts affectueux et démonstratifs), surtout avec les plus petits ou avec les enfants sane mère, dont la mère e’est mal occupéo ou qui l’ont resgenti ainsi. Cet ajustement reciproque et permanent suppoge, lui aussi, un long et difficile apprentissage sur les détuils duquel nous ne pouvons nous étendre ici. « Leur entente sera établie quend leuxs propres interrelatione auront été suffigamment comprises et acceptées 121 » Ce promier stude de travail on équipe implique de donner à son collègue le maximum d’informations eur son propre travail, donc, de soumettre celui-ci à sa crtique. Nous voyons là comment s’opère, à un premier niveau, le contrôle du travail de l’éducateur. 4. Limites. Pour toutes les questions que le maniement de ta relation enfant-éduca¬ teur peut soulever et comme il s’agit d’une perspective assez nouvelle, il importe de délimiter, en première approximation, le champ d’action de l’édu¬ cateur par rapport à celui du psychothérapeute, tout en se rappelant que (1) Lors d’une recherche Il portant aur 500 cas, noua avons trouve 2 % de pèrea seuls et 20 9% de mères seules au moment du géjour au Centre d’observation de Vitry. (2) Rappelons les problèmes de frustration par la mère. 12 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES déjà substantiels, apparait comme la suite logique de celui engagé au cours du séjour des enfants. Il se rapporte à l’action prophylactique et de recherches dont nous avons vu la nécessité en psychiatrie infantile. Nous venons d’indiquer brièvement comment l’étude des structures mentales selon la théorie psychanalytique permettait aujourd’hui et le déve¬ loppement de la psychiatrie infantile (par la discrimination entre structures pathologiques, structures à la limite du pathologique, et structures normales). et l’approfondissement de la psychiatrie des adultes (par des recherches à la fois prospectives, consistant à suivre pendant des années les cas patholo¬ giques et « limites », et rétrospectives, s’attachant davantage à l’anam¬ nèse des malades adultes). Il devient ainsi possible de poser les bases d’une prophylaxie mentale. Mais il convient de noter que la psychanalyse n’est pas seule à permettre cette recherche et cette action. Une formule polyvalente de travail permettrait de tenir compte de bien d’autres conceptions. Il serait aisé, par exemple, de retrouver dans les observations, les éléments d’une phénoménologie. Une étude pourrait être faite de ce point de vue, en accordant une valeur privi¬ légiée à la situation actuelle du sujet, au vécu de ses relations, en envigageant son évolution comme une possibilité ouverte à la réalisation de son « être dans le monde » par son « projet » vital, au moyen de l’occasion qui lui est offerte, à travers le développement de son processus évolutif, de se faire reconnaitre par les différents membres d’une équipe de psychiatrie infantile et de se reconnaitre lui-même tel qu’il est. Aussi bien, du point de vue du behaviorisme, pourrait-on mettre l’accent sur les influences évidentes auxquelles il a été et est soumis. Il serait égale¬ ment possible, suivant la réflexologie, d’étudier les réactions aux conditionne¬ ments et aux déconditionnements d’après les types nerveux pavloviens et selon les milieux et les systèmes de signalisation utilisés. On sait, d’autre part, comment la psychologie génétique est venue à la fois limiter et compléter les hypothèses de la psychologie analytique par un travail de critique et d’approfondissement réciproques. Nous avons cherché nous-mêmes à ce que les méthodes et techniques employées au centre de Vitry, si elles s’appuient aujourd’hui davantage sur la psychanalyse, n’excluent aucune autre théorie ou voie d’abord, pré¬ sente ou à venir. Il nous semble nécessaire, au contraire, d’accueillir les recherches originales qui, si elles sont valables, ne pourront manquer de s’intégrer à tout ensemble scientifique et humain, qu’elles contribueront à faire progresser. C’est ainsi que la psycho-sociologie, la psychologie des groupes sont venues enrichir la compréhension des phénomènes se produisant dans la collectivité. C’est ainsi encore que l’ethnologie sociale apporte des enseignements indis¬ pensables sur les intrications des conditions de vie économique et sociale et de l’équilibre mental. Il n’est pas jusqu’à l’ethnographie et surtout l’anthro¬ pologie culturelle qui, en permettant la comparaison des modes d’éducation dans les différentes civilisations, ne constituent une source inépuisable d’infor¬ ET SOCLALES EN PSYCHLATRIE NFANTIE 13 mations concernant le développement normal ou pathologique de la per¬ sonnalité. De même que les différents membres d’une équibpe, dont l’orientation. la formation, la personnalité, sont dissemblables, doivent contribuer à égante à la compréhension d’un cas, de même différentes disciplines et différentes théories doivent aider à cerner au plus près la réalité humaine, dans une perapective à la fois globale et progresive. C’est sur les bases théoriques énoncées ci-dessus que nous parait pouvoir se fonder une action en psychiatrie infantile. Il nous a semblé utile d’en préciger les modalités, non pas tellement en ce qui concerne les examens médicaux et les traitements relevant uniquement du médecin, que pour tout ce qui est juxta-médical. En effet, gi les médecins ressentent de plus en plus eouvent le begoin de g’intégrer à une équipe et de s’informer eux¬ mêmes de aciences voisines et nécesaires pour l’exercice de, nombre de spécialitég, l’application de ces sciences à la psychiatrie infantile nécessite l’élaboration de méthodes adaptées à leur objet et de techniques très précises. Les unes et les autres ont été très étudiées depuis une quinzaine d’années mais, à notre connaissance, l’état actuel de la question n’a pas été souvent exposé dans une monographie d’ensemble, où chacune soit envisagée à la fois en théorie et dans la pratique concrête. Nous nous sommes crus autorisés à le faire pour avoir SuIvI, avec notre équipe, leur développement depuis plus de treize ang. Ainsi si nous nous référons nécessairement à une expérience particu¬ lière, nous nous sommes cependant instruits à toutes les gources valables. réalisations et publications, françaisee et étrangères. Nous aurons le souci de tenter de débpasser noa propres expériences et de faire le point général actuel de ces méthodes. CHAPITRE L PSYCHO-PATHOLOGIE SOCIALE DES ENEANTS INADAPTES() (Population du centre de Vitry) La psycho-pathologie sociale des enfants inadaptés de la région pari¬ sienne a été admirablement étudiée par Mme Chombart de Lauwe (2). La population d’enfante du centre de Vitry vient s’intégrer dans cet ensemble. Cependant, on verra que, d’une manière générale, le niveau des variables de milieu ge trouve manifestement inférieur à celui des consultants de l’ensemble des organismes d’hygiène mentale, qui se gitue lui-même très au-dessous du niveau global du département de la Seine. Nous avons étudié, suivant les méthodes du Groupe d’ethnologie sociale du CN. R S., et en adoptant les variables de Mme Chombart de Lauve, tous les sujets sortis du centre en 1950 (146), 1952-1954 (500) et 1959 (156). I1 nous a ainsi été possible de comparer, presque point par point cette popula¬ tion d’enfants avec celle des organismes d’hygiène mentale et avec la popula¬ tion globale du département de la Seine. De, plus, noue avons pu faire dee comparaisons longitudinales entre 1950 et 1959 (3). La population du centre de Vitry ge trouve donc spécialement défavo¬ risée. On verra plus loin que des niveaux considérés comme dangereux sont parfois atteinte par la moyenne des cas. On comprendra ainei que dee méthodes particulièrement approfondies et actives doivent leur être appli¬ quées, et que des mesures insuffisantes ne peuvent guère avoir d’utilité. (1) Travail effectué avec les éducateurs du centre de Vitry, les élèves stagiaires des écoles d’éducateura gpécialigés de l’A. R.S.E.A, à Epinay et de l’Institut Catholique de Parig. et M. Raimbault. (2) M. J. CHOMBART de LAUWE : Psycho-pathologie sociale de l’enfant inadapté, Editions du CN. R. S, Parig, 1959. Il s’agit d’enfants de moins de 14 ane, d’intelligence gengiblement normale, ne prégen¬ tant paa de troubles organiques vidents. Ces critères ge trouvent être pratiquement les même que ceux des enfants obaervés au centre de Vitry. (3) Les cources et les références de ce chapitre ge trouvent dans la bibliographie en fin de volume. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PéDAGOGIQUES 16 On ne peut s’étonner de ces constatations gi l’on se rappelle que les enfants proposég à l’admission représentent les cas les plus préoccupants des consultations, et ceux pour lesquels la séparation du milieu familiol est indispensable. Les conditions de milieu sont donc forcément très insuf¬ fsantes. Les troubles en dépendent, sinon pour ces seules conditions, du moins partiellement et, en tous cas, ils en subissent par contre-coup une aggravation progressive. Signalons ausgi que, à condition qu’un enfant puisse suivre les mouve¬ ments principaux de la vie collective sans trop de décalage, c’est-à-dire qu’il ne présente pas de handicap physique ou neurologique important, la gravité du cas n’est pas un critère de non-admission. Les seuls enfants refusés sont ceux qui paraissent ne pas devoir bénéficier du séjour et pouvoir être traités plus eficacement dans d’autres conditions, qu’ils soient superficiellement ou sérieusement atteints, et qu’ils appartiennent à des milieux bourgeois ou sous-prolétariens. D’autre part, le centre de Vitry est un des rares établissements dont l’équipement en personnel permette d’acepter, d’observer, et parfois de traiter ces cas, dépistés de plus en plus souvent par des consultations dont la compétence augmente chaque année. Les demandes d’admission pour eux augmentent donc régulièrement en nombre, ce qui pose le problème inquiétant de la saturation du milieu thérapeutique en cas graves. (Cf tableau l des diagnostics en 1950, 1950 et 1960). TABLEALII AGES Avec les années, on observe une tendance très nette à l’homogénéisation des âges autour de 9 ans (cf, normalisation de la courbe — graphique 1). La moitié des enfants se situe de 8 à 10 ans (tableau 2.). ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTLE GRAPHIQUE L ET TABLEALU 2 Le recrutement est donc plus homog̀ne en Age que dane les autres centres d'’hygiène mentle (graphiques 2 et 3), mais ee rapproche cependant de celui de ces centres, les courbes d’âges présentant partout les mêmes sommets, entre 8 et 10 ans. On peut en fournir une explication : au début de la scolarité, la majorité des enfants sont assez jeunes nour ne pas poser de problèmes de comportement insolubles, après 10 ans les principaux troubles du caractère. l’instabilité, commencent à pouvoir être mieux contrôlés. Un autre type de difficultés, en particulier la délinquance, se manifeste surtout après 14 ans. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 18 Répartition de la poputation par sexe ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 6 SEXES (graphique 4). On conetate peu de changement avec les années. On trouve un peu plus de filles (de 1 à 6 0%) au centre d’obgervation que dans les autres centres d’hygiène mentale. On trouve beaucoup moine de illes que dane la population globale : 21, 36 9% de moins. GRAPHIQUE 4 A vrai dire, la proportion de flles pouvant être admises a été fxée arbitrairement : au début un groupe de illes et un groupe mixte de petits. puis deux groupes de filles. Cette répartition était cependant dictée par le demandes d’admission et correspond finalement à la situation des enfants Domicile dex entants passés au Cengre (1947-1959). 20 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES. inadaptée de la Seine. Les flles sont moins souvent amenées aux conaulta¬ tions, probablement du fait que leurs troubles sont moins bruvants, plus intériorisés, donc plus tolérables que ceux des garcong. ASPECTS ÉCOLOCIQUES Nous donnons ici trois cartes indiquant la répartition deg qomere des enfants, entre 1947 et 1959. Dans la carte de Paris (n° 1), chaque point représente un cas et il est gitué à l’adresse exacte de l’enfant. On remarquera la localisation plus dense dans certains quartiers, parties de quartierg, ilots ou même le long de certaines artèreg. La répartition correspond, en gros, à celle des différents centres d’hygiène mentale pendant l’année 1954, et ausi à celle de la consultation du professeur Heuver, aux Enfants Malades puis à la Salpêtrière, pendant onze ans. Cette dernière population est représentative de celle de la Seine et comprend des familles de tous les quartiers, sans infuence de son insertion géogrephique. CARTE N° 1 Aucune conclusion ne saurait en être tirée, quant à ceg quartiefs et conditions écologiques, étant donné que les demandes d’admisgsion provien¬ nent surtout de certaines congultations de dispengaires ou hopitaux par ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 21 l’intermédiaire des asgistantes sociales ou des médecins entretenant les rela. tions les plus proches avec le Centre. On peut seulement remarquer que la plupart de ces quartiers sont parmi les plus défavorisés : ilots ingalubres. habitat inconfortable, hôtels meubléa. La carte de Paris (n° 2) indique la fréquence, par quartier, entre 1957 et 1959 inclus, par progression de 1 en I, entre 0 et 3 et plus, pour 10 000 habi¬ tants. CARTE N° 2 Le carte (no 3) indique le nombre d’enfantes originaires des diff́rentes communes de la banlieue de Paris, situées dans le département de la Seine. 22 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES CARTE N° 3 LOGEMENT 1, Indice « nombre de personne par pièces » : Par rapport à 1950, on trouve (sauf pour l’indice 4 à 4, 9) des indicee plus élevés. Donc, dans l’ensemble, les famillee ceraient au moine ausi (sinon plus) mal logées, en ce qui concerne le surpeuplement, qu’il y a dix ang. (grepbique 3) C, le ponxcentage d’enfants couchant ceulf dans leur lit (te bleau 4). ET SOCIALES EN PSYCHIATRE NFANTILE 23 TARLEAU A Il gemble que la population du centre soit plus « entaéey que celle de l’ensemble dee centres d’hygìne mentale (grebhique 6 et 7). 24 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES, CRAPHIQUE G GRAPHIQUE 7 Ceci est confirmé par l’échelle des moyennes des indices (tableau 6) et par la comparaison des types d’habitation (tableau 5) de même que par le pourcentage de chambres personnelles pour l’enfant. TVPES D’HABITATION 1. Habitotions inadaptées de toutes fucons : 72 9%, dont : 2. Habituations en principe adaptées : 28 9% dont : MILIEU SOCIO-ÉCONOMIQUE ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 25 TABLEAU S TABLEAU e Moyennes comparées du nombre de personmes par pièce La population du centre est beaucoup plus mal logée que l’engemble de la population de la Seine. La moyenne des indices est deux fois plus élevée que celle de la commune la plus surpeuplée (tableau 6). D’après les études du Croupe d’ethnologie sociale et de Madame Chom¬ bart de Lauwe, le seul indice « nombre de personnes par pièce », a’ilatteint 2,5. peut être considéré comme pathogène : or le graphique 6 montre que l’indice 2 à 2, 9 est le plus fréquent parmi les familles des enfants du Centre et le tableau 6 indique une moyenne générale de 2, 6 par pièce. 1. Catégorie aocio-profeasionuelle du pre. (tableau 7) 19 On trouve de moins en moins d’ouvriers et de plus en plue d’employes et d’intermédiaires 1. Donc, le niveau « s’élève » de plue en plus. Mais. 20 le milieu socio-profeseionnel est plus « bas » que pour le centre d’hygiene mentale et que pour la Seine (10 0% de plus d’ouvriers et 10 9% de plus d’em¬ Ployés). Madame Chombart de Lauve remarque « combien l’appartenance MÉTLODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 98 à une catégorie socio-professionnelle détermine les conditions de vie de la famille et, par là, le trouble de l’enfant. Les niveaux socio-économiques les plus bas qui existent, surtout chez les ouvriers et employés non qualifés ne permettent pas d’assurer à l’enfant une ambiance familiale et des moyeng éducatifs satisfaisants. » TABLEAI 7 Catégorie socio-profesionnelle du père D’après elle, ces enfants consultent rarement avant l’apparition de délin¬ quance, c’est-à-dire guère avant l’adolescence, les parents n’étant pas à même de juger de la perturbation de leurs enfants ni des mesures à prendre préco¬ cement et, d’autre part, le seuil de leur tolérance n’étant pas dépase, S5. parmi les enfants admis à vitry, il existe peu de délinquants effectifs, étant donné leur âge, par contre un grand nombre d’enfants, garçons et flles. peuvent être classés comme prédélinquants, leur conduite et leur atructure psychologique faisant redouter dès le jeune âge cette évolution. De même. on peut considérer qu’un grand nombre d’entre eux présentent les prémisses de la structure psychologique des alcooliques et peuvent être, pour cette raison et pour des raisons de milieu, considérés comme préalcooliques (1). Le taux moyen des ressources familiales par personne est extrêmement faible (2). D’autre part, il nous avait paru intéressant de rechercher les principales attitudes éducatives des parents suivant la catégorie socio-professionnelle (2). (1) C. C. AMADO : « Des enfants pŕdlcooliques 2» L’évolution poychiatrique, 1959. Dane cette étude eont envigagés lee facteura paychologiques, l’identifcation aux images parentales en particulier et la gtructure générale de la personnalité, qui paraiagsent devoir favoriger, à l’âge adulte, l’alcoolomanie. (2) On avait obtenu en 1952-54, sur 500 cas, les revenus totaux individuele guivante : — pour 16 9% moins de 6 000 F par mois. — pour 66 2%, de 6 000 F à 13000 F. — pour 18 0% plus de 13 000 F. M. CArUT et les éducateura du Centre de Vitry : Conditions de vie et atitudea éducatives des famillea de enfanta inadapte de la région parigienne. La Semaine des Hépitoux, 26-30 aot 195. 97 ET SOCIALES EN PSYCHATRIE INTANTILE Il semblait que c'était dans le milieu ouvrier qu’on trouvait l'’attitnde édu¬ cative la plus relâchée, les sanctions les moins fortes et corrélativement, moins de réactions d’opposition des enfants à, l’intérieur de la famille. Par contre, la catégorie « employés » se signalait par la nervosité des parents. leur gévérité et les fortes réactions d’opposition des enfants. Les professions libérales tendaient à présenter les mêmes caractères mais moins accentue avec cependant des réactions d’opposition encore plus vives. H. Profession de la mère. (Graphique 8). 19 On trouve à peu près autant (à peine un peu plus) de mères qui travillent. gelon les années. 2° On en trouve autant que dans les centres d’hygìne mentale. 39 On en trouve beaucoup plus que dans la population d’ensemble de le Seine. tions d’opposition chez les enfants. 28 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES. HI. Catégories eocio-professionnelles des mères qui travaillent au dehorg. (tableau 3). TABLEAU 8 Catégories socio-professionnlles des môres qui travaillent qu dehora 19 On trouve de moins en moina d’ouvrières et de plus en plus d’emplovées et d’intermédiaires 1. Ce qui corrobore, point par point, ce qui a déjà été observé pour les pères, mais, comme pour les pères : 29 On trouve davantage d’ouvrières que pour les centres d’hygiène mentale. de même, davantage d’ouvrières et d’employées que dans la population d’en¬ semble féminine active de la Seine, et enfin, beaucoup moins d’intermédiaires 1 et 2. Rappelons que, d’une façon générale, le travail de la mère semble plutôt perturbant pour l’enfant, tout au moins lorsqu’il e’agit d’un niveau socio¬ économique et d’une rémunération faibles, ce qui est le cas ici. Cependant, il nous avait semblé, dans le travail cité ci-dessus, que leg mères restant au fover étaient beaucoup plus « nerveuses » et suscitaient de très fortes réac¬ MILIEU FAMILIAL J. Composition du couple parental. Le pourcentage de dissociation est, en général, plus élevé pour le centre de Vitry que pour les autres centres d’hygiène mentale de la Seine. (graphi¬ que 9). Nombre d’entants par Amilte ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE 29 CRAPRIQUE O Nota : Lire thège MENUT au lieu de MANUT. En fait, il l’est encore davantage que dans ce graphique, car il n’a pas été tenu compte, dans les calculs, contrairement à ce qui a été fait pour d’autres centres, de la « mauvaise entente » entre les parents, non plus que de leur situation juridique. H. Type de famille cuivant le nombre d’enfants. (tableau 9). TABLEAU 30 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Les fratries cont beaucoup plus nombreuges parmi la population du Centre de Vitry. Par rapport aux autres centres d’hygiène mentale, on trouve moins de familles comprenant un enfant unique ou deux enfants, un nombre égal de familles de troig enfants, mais davantage de familles de quatre, et gurtout de cinq enfants et plus. Le décalage est dans le même sens, mais beaucoup plus important, avec la population générale, qui comprend deux foig et demi plus d’enfants uniques, autant de familles de deux enfanta et entre 15 et 18 2% de familles plus nombreusee (alors qu’il en existe 55 0% à Vitry). Le décalage est considérable surtout pour cinq enfants et plus (20% à Vitry, soit 3 fois plus). (1. On sait que ces dernières familles sont plus fréquentes dans la population pathologique. Il n’y existe guère de limitation volontaire des naissances. Bien entendu, le revenu total individuel, pour un salaire en général faible, est extrémement bas. IH. Les placements antérieurs. Les enfants du centre ont été davantage placés que ceux des centres d’hygiène mentale. (Tableaux 10 et 1I.) Rappelons que le Groupe d’ethnologie sociale a défini un seuil dangereux au niveau de quatre milieux différents, les enfants avant vécu dans deux ou trois milieux étant déjà plus atteints que ceux qui sont restés auprès des mêmes personnes. TARLEAU 19 Les placements antérieura de 3 mois et plus N’ont jamais vécu hors de leur famille — Centres d’hygiène mentale de la Seine : 58 9% — Centre d’obgervation de Vitry. : 36,39% (chiffre inférieur, car ealeulé seulement sur placement en nourrice) 31 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INTANTILE TABLEAU 11 Pourcentares des onfants places plhu de3 mois ovantlaur admision à Vigry On a souvent insisté aur la gravité de la aucceasion des milieux pour le développement de la personnalité de l’enfant. Plus ces changements sont précoces et moins le moi a la possibilité de se constituer par internalisation des images parentales. Le désarroi qui en résulte est infiniment plus grave qu’on peut l’imaginer car ce sont les bases mêmes de la vie psychique qui se dérobent constamment. On comprend que les changements de milieu puisgent à eux seuls créer une insécurite que traduisent un état dépressif ou des réac¬ tions d’ingatisfaction, gurvenant sur un fond mental très faible et labile. Ces réactions entrainent des rejets successifs, d’où d’autres placements, qui structurent les troubles et s’opposent encore au renforcement du moi. Ainsi. ces états d’e abandonnisme » ou d’e hospitalisme » se présentent-ils, après quelques années, sous la forme de personnalités para-psychotiques avec conduitea dépreagives, caractérielles ou délinquantes. Certaines restent assez longtemps plastiques, l’avidité affective apparaissant aussitôt qu’une suffisante tolérance et une relative sécurité du milieu extérieur le permettent. C’est ainsi que, au dessous de 8 ou 9 ans, nombre de ces enfants font, quand ils peuvent être pris en charge, une évolution spectaculaire. Ils restent cepen¬ dant extrémement fragiles, ce qui constitue souvent une indication d’un placement familial psychothérapique. TROUBLES MENTAUX ET ALCOOLISME DES PARENTS (CE, tableaux 12, 13 et 14) Nous n'avons pu définir de points de comparaison entre les proportions trouvées parmi les parents du Centre de Vitry et ceux des consultations d’hygiène mentale, ainsi qu’avec la population générale. En effet, les critères ne sont pas identiques. Nous avons voulu que les nôtres soient très stricte. Par exemple, nous n’avons compté que les troubles mentaux reconnus et traités, ceux-ci comprenant non seulement des psychoses, mais aussi des trou¬ bles névropathiques, à condition qu’ile aient nécessité un traitement. De 32 MéTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES, même, parmi les cae d’alcoolisme, nous n’avons retenu que les cas notoireg et non pas seulement ceux qui semblaient possibles. TABLEAU 12 Parontt avant ou avant eu des troulles mentaux reconnus et traités (92). TABLEAU 13 Parents olcoolique quere (96). TARLEAU 14 Troulles montqux alcolismne (2). On remarquera l’augmentation de tous les chifres entre 1950 et 1959. correspondant à l’aggravation générale des cas des enfants. D’une manière générale, les proportions sont extrêmement fortes. ANTÉCÉDENTS ORGANIQUES DES ENFANTS Iei encore, noug n’avong pu comparer valablement avec deg indiceg extérieurs. En 1959, noua avona relevé 104 9% de traumatismes obstétricaux, aux¬ quels s’ajoutent 11 % de prématurité ou de débilité physique congénitale. Notons le chiffre de Mme Chombart de Lauwe, pour l’ensemble des organismes d’hygiène mentale, présenté avec les réserves de l’auteur : traumatisme obgtétrical, plus naissance avant terme : 27,7 9%. Les perturbations organiques gérieuges au cours des premières années se chiffrent entre 1I et 19 2% (entre 1950 et 1959). Nous donnons nous-même ce chiffre sous toutea régerves. ET SOCALES EN DSYCHLATRIE INFANTILE 38 En résumé : a) On sait qu'il est très important de connaître la profession du père pour situer la famille dans un milieu socio-économique donné. Au centre d’observation (cf, étude de 1952-1954), et comme l’a montré aussi Mme Chom bart de Lauwe, le type de logement (et le niveau de revenu) varie avec la catégorie socio-professionnelle. Or, malgré l’élévation, relative, du niveau socio-professionnel des pères et des mères, on constate une certaine aggravation du surpeuplement (paral¬ lèle à l’aggravation des cas d’enfants recus et au fait que davantage de parents présentent des troubles mentaux). 6) Dans l’ensemble, le niveau socio-professionnel et économique d’une part, les conditions favorables de logement d’autre part, sont moins élevés que pour l’ensemble des centres d’hygiène mentale de la Seine, et bequcoup moins élevés que pour l’ensemble de la population de la Seine. Corrélativement, on trouve davantage : — de dissociations familiales. — de familles nombreuses. — d’enfants placés. Des méthodes psychologiques, pédagogiques et sociales précises méritent d’être recherchées pour observer et traiter ces cas difficiles à la fois du fait de la perturbation de la personnalité et de celle du milieu. CHAPITRE IL METHODES PSYCHOLOGIQUES ROLE DU PSYCHOLOGUE ET DE L’EXAMEN PSYCHOLOGIQUE Dans ce chapitre, nous tenterons de rechercher, à l'’aide d’une expé¬ rience de plus de dix années de travail, la spécificité du rôle de l’examen psychologique dans les centres de psychiatrie infantile. Pour cela, noua dégagerons de cette expérience les périodes essentielles (1). Une place impor¬ tante sera donnée d’abord à la participation du psychologue à une équipe. élément dynamique de son activité. En effet, les relations avec les autres techniciens modifent ses conceptions car il a constamment à se poser des quegtions sur la signification d’une épreuve ou d’un résultat. De ce fait, les pogitions de l’examen psychologique et du psychologue se trouvent trans¬ formées. Nous aborderons ensuite le travail de laboratoire, c'est-à-dire le maté- riel, les méthodes. Nous concluerons par quelques réfexions qui pourront contribuer à l’approfondissement du métier de psychologue dans les centres d’observation et de rééducation. Quand nous avons débuté, il y a quelques années, noue concevions le rôle du peychologue comme celui d’un membre de l’équipe qui, avec 6e techniques propres, venait apporter des résultats numériques, accompagnés de commentaires, dans le but d’éclairer les autres techniciens. Son obser¬ vation, s’ajoutant aux autres observations, devait permettre d’établir une conclugion et d’envigager une orientation pour l’enfant. C’est ce que nou8 pengions etre « un travail d’equipe », sachant déjà que le psychologue ne pouvait être un technicien au rôle prévalent qui, à l’aide de ses techniques. pouvait poser un diagnostic et distribuer dea conseils pédagogiques. Mais pon apport ajouté à celui des autres, d’égale qualité, était indispengable pour (1) C. G. AMADO. L. de BorroN, J. DUMONT : Problèmes posés par les enfants ina¬ datés de O. I, limite. Squvegarde de l’Enfance, 1950. G. AMADO, J. de BOTrON, M. CAPUL, S. CAREL. Valeur et limites des testa de nivean cboy le enfanta ipadaptes, Pfnce, sept-oct, 1952. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 38 l’observation. Dans cette conception première, une discussion était natu¬ rellement nécessaire entre les différents techniciens, mais elle ne concernait pâs le contenu même de l’examen psychologique. L’examen psychologique, constitué par un ensemble d’épreuves, stan¬ dardisées ou non, et par une interprétation des résultats, devait servir à nos collègues, non pas dans leur travail quotidien et leur compréhension détaillée des diffcultés, mais dans l’évaluation globale du cas. La conception du travail de groupe consistait donc à apporter une conclusion, à la proposer à la discussion, à admettre que tous puissent ne pas être d’accord. On le constatait simplement. Cette méthode visait à proposer des données simples et claires : on cherchait à se faire comprendre, à se servir d’un « langage adapté ». Les enfants perturbés, on le sait, présentent dans leur grande majorité un retard scolaire malgré une intelligence normale. Cette contradiction motiva, au centre de Vitry, la renoontre des instituteurs et des psychologues. Nous nous permettrons d’exposer ici comment ces confrontations nous amenèrent à modifier nos conceptions du rôle du psychologue et de l’examen psychologique. Un cercle réuni menguellement essava de clarifer les notions utilisées (rythme d’acquisitions, difficultés perceptives et motrices, instabilité, intérêt pour la classe, maturité et immaturité scolaire), de coordonner l’observation et de l’enrichir par le travail en commun, afin de mieux comprendre les diffcultés des enfants dont nous nots ocupions. Les instituteurs présentèrent d’abord des exposés sur leur enseignement aux différents niveaux. C’est l’enseignement du calcul qui ft l’objet des premiers exposés, paraissant un matériel moins complexe que la lecture et l’orthographe, Après avoir rappelé les positions théoriques sur l’enseignement du calcul et l’oeuvre de Piaget en particulier, les instituteurs firent la remarque générale que les enfants dits « d’intelligence normale » présentaient des dif¬ cultés de comprélension, d’acquisition et d’intégration des connaissances scolaires qui déterminaient : — des observations qui apparentaient parfois ces enfants à des enfants débiles, en particulier, en raison des diffcultés à passer d’une notion concrête à une notion abstraite, et ceci souvent à cause de la déficience de leur langage et de leur compréhension sociale: des rythmes d’apprentissage assez lents, comparables à ceux des classes de perfectionnement. Devait-on employer, de ce fait, des méthodes assez semblables à celles utilisées dans les classes de perfectionnement 2 la notion générale, que plus les enfants étaient Agés, moins leur retard était rattrapable. Les enfante n'’avaient donc pas un rythme d’acquisigions normal même quand ils étaient placés dans une atmosphère déconditionnante dans de classes à efectif réduit, avec des maitres spécialisés, dans des conditions pédagogiques spéciales, rééducatives, voire psychothérapiques. utilisée pour définir les catégories d'établissements. 31 ET SOCIALES EN PSYCHLATRE INTANTItE On eut à se poser alors la question suivante : l’enfant qu’on appelle « le caractériel intelligent » (1) est-il vraiment intelligent 2 Pour préciser ces constatations générales, nous entreprimes des études de cas. Quatre d’entre eux sont résumés ici, parce qu’ils ont paru assez signifcatifs : Les 4 enfants âgés respectivement de 7, 9, 8, 11 ans avaient un O.L. (Binet-Simon échelle de points ou Terman) comprig entre 26 et 107, donc d'intelligence moyenne. Or, les maîtres gignalaient que leur rythme d’acquisitions scolaires était lent, que leurs possibilités intellec¬ tuelles apparaissaient médiocres ou bien ils réservaient leur appréciation aur le niveau intel¬ lectuel. A la fin du séjour, on note, pour le premier, que l’appréciation « intelligence médiocre et rythme lent d’acquisitions » est confirmée. Dans le groupe, l’enfant n’a pas évolué non plus. Pour le second (qui a 107 de O. J.), l’évolution dans le groupe a été favorable quoiqu’encore fragile, mais l’appréciation de l’instituteur reste la même (« possibilités médiocres p). Pour les deux autres, par contre, parallèlement à une évolution du comportement. les instituteurs constatent des progrès, « un éveil de la compréhengion », l’acquisition plus rapide des mécanismes. Ces observations montraient que niveau et aptitudes scolaires, niveau et possibilités intellectuelles, s'ils ne coïncidaient pas toujours, ce qui est souvent constaté dans les consultations, ne suivalent pas forcément une évolution parallèle. A des évolutions nettes du comportement pouvaient ou non corespondre l’évolution de l’acquisition et de l’intégration des méca¬ nismes scolaires. Les enfants pouvaient conserver des obtusions plus ou moins importantes, plus ou moins durables, tout au moins pendant les quelques mois de leur séjour au Centre. Bien sar, il était possible, pour le psychologue, de trouver des explica¬ tions à ces obtusions. Le détail des épreuves pouvait mettre en valeur des difficultés perceptives, motrices, des dificultés affectives, les unes agissant sur les autres, et déterminant ces blocages ou une immaturité. Mais ces constatations ont permis d’avancer plusieurs hypothèses générales de travail : — 4 l’exception de suiers particulièrement doues, les inadaptes O. L. moyen ont des difficultés de compréhension scolaire. Il faut qux classes d’inadapts, meme intelligents, un enseignement spécial par des maîtres expérimentés. L’enseignement direct de cette étude fut : pour les instituteurs, de modifier et compléter les méthodes employées pour faciliter aux enfants l’acquisition et l’intégration des connaissances : pour les psychologues. d’apporter des renséignements plus utiles aux instituteurs. Les examens pychologiques devaient donc rechercher, dans un premier temps, les aptitudes nécessaires à la scolarité, en insistant sur le langage (vocabulaire, ́laboration, expression), sur la compréhension, le jugement et là mémoire, dans des conditions, bien sur, diff́rentes de celles de rec (1) Cette notion est encore couramment employée dans les milieux de rééducation et 38 MÉTHODES PSYCHOLOGLQUES ṔDAGOGIQUES mais qui, par la rigueur d’épreuves hiérarchisées et standardisées dans des situations contrôlées, permettaient mieux de rechercher les difficultés à tous les niveaux. Dans un deuxième temps, la question suivante pouvait être posée : « pourquoi la scolarité a-t-elle été entravée 2 » C’est alors l’interpré¬ tation des difficultés (d’ordre intellectuel, « spécifque » (1) ou affectif, par exemple) qui constitue les éléments de discussion. Aussi avons-nous, dans un premier temps, comparé les aptitude révé¬ lées par les tests emplovés et les aptitudes scolaires. L’importance accordée au langage dans les observations apportées nous a amenés à étudier diffé¬ rentes formes de difficultés de langage, Par la suite, nous avons pu com¬ mencer à aborder avec les enseignanta le problème si épineux et si conflictuel de l’apprentissage de la lecture et celui de la dyslexie. Notre ecamen psycholgique consiste donc, maintenant, donner une information des psychologues en réponse à une information des enseignants. Il' ne s’agit plus tellement de rechercher si tel ou tel enfant est intelligent ou non, si l’on est d’accord ou non sur cette question, mais de discuter le détail des épreuves en rapport avec tel comportement ou telle aptitude scolaire. Ce sont les divers éléments recueillis par l’examen pgychologique et non des notions globales qui fournissent les bases de discussion. Marie-Joge, 12 ang. Pendant les premiere mois de son sefjour, l’ingtituteur dignale « acquisitions faibles et lentes — 2 ans de retard — intlligence très moyenne ». A l’examen paychologique, on trouve au WISC: échelle verbale : O.T. 103: échelle performance : O I, 94; échelle globale : 01, 98. Le détail des teste met particuligrement en valeur la faiblease de la acolarité pour lea subtests de forme acolaire, ceci en liaison avec une affectivité agsez fruste. Mais le vocabulaire est bon et les items montrent, au contraire, de bonnes qualités d’acquigition, de compré¬ hension, de jugement, de mémoire. Il apparsit que l’enfant manque aurtout d’organigstion, de méthode. Dane la discusgaion au cours de la réunion de aynthèse, nous tentons de montrer qu’elle a investi une part de sea difficultés affectives dang la scolarité, en particulier par son genti¬ ment d’échec. Par ailleurs, dans le groupe, on perçoit qu’elle a fait des progrèe dane la megure où elle se sent « la première ». A l’occagion du départ du « leader » de la claage, le mâtre valorise son travail et elle ge met alors, malgré une attitude désinvolte et un intérêt encore variable, à devenir plus coopérante et à faire des progr̀s. Cette discussion a permis de mieux situer son niveau intellectuel, ges aptitudes et geg troubles. Monique, 7 ana 6 mois. A son entrée, la conclugion de l’examen paychologique eat la guivante : « enfant ge plaçant actuellement aux tests dans une zone limite. Cependant, la formulation verbale aagez bonne, la très bonne adaptation et la compréhension aux testa des plateaux de Rey, l’attitude bloquée dans la aituation du teat, neuvent faire penger à une opposition et un refte dans une ettitude globale d’inhibition, Par ailleurs, les diffcultés grapho-motrices manifestées (1) Nous appelons ainsi les diffcultée de la représentation gpatiale et temporelle et du ochêma corporel qui ont un retentissement dans l’acquisition de la lecture et de l’ortbo graphe, en particulier. 39 ET SOCIALES EN PSYCHIATRE INFANTHE dans le Bender sont asgez importantes. D’où nécegsité de faire un nouvel examen en fn de séjour. (Binet Simon, Echelle de pointe : O.J. 84) ». L’observation ccolaire note à l’entrée : « niveau : quelques mois de cours préparstone — 1 an de retard. Connait la plupart des lettres et quelques sons. Semble intelligente et devrait progresser en claase ». A la gortie, l’examen paychologique de contrôle note : « le niveau est tonjours limite. avec les mêmes obgervationg. Eet moins inhibée qu’au premier examen, maie pa encore suffisamment épanouie cependant. (Binet Simon, Echelle de points: Q.I. 84 - Bender sans amélioration gengible). Les progrès ne eont pas notablee, quantitativement à l’oxamen de contrôle. Obgervations scolaires : niveau début Cours Elémentaire lre année — l an de retard progrès — a acquis la lecture — bonnes pogsibilités, maia recherche l’attention à tout prix. Son rythme d’acquisition est rapide quand elle eat décidée ̀ travailler. La discussion s’étant pourguivie lors de chaque réunion mensuelle, il est appara que l’enfant, dans le collectivité acolaire, ragsemblait tous ses moyens, ge defendant en quelque gorte, par ses réuasites acolaireg. Son condit trèa vif avec la mère lui interdisait toute réussite dans la situation de l’examen paychologique. Ces deux exemples illustrent deux cas oppogég. Dans le premier, l’apport de l’examen psychologique a pu aider l’instituteur dans sa tâche, celle de stimuler les acquisitions, compte tenu des aptitudes, en utilisant une gituation de groupe. Dans le deuxième cas, les enseignants ont montré par l’observation des progrès, les raisons du blocage de l’enfant dans l’examen psychologique et ses possibilités réelles. La contradiction intégrée dans le diagnostie final est ainsi apparue comme un point essentiel du comportement. Dela même façon, nous avions été frappés par le fait que les éducateure. dans leurs observations, décrivaient des aspects de compréhension ou de déficience quelquefois très diff́rents des indications données par les examens psychologiques. lean-Piere, 9 ana ( mois. On notait à l'’eramen paycholbogique : « Bon niveau intellectuel avec inauffgance de l’organiation perceptivo-motrice et caractère pagsif, infantile. Vocabulaire faible et formu¬ lation pauvre ». Au Bender, qui est inf́rieur, il tourne sa feuille dans tous les gens, quepd Il reproduit les desains. Dans le groupe, au contraire, on conatate ea capacit de pŕdiaion, de faire un plen. Ces qualités se manifestent paralllement à sa situation progregive de leader et À l’ocatsior de la onstmuction dune cobone. Il parvient ena partielier drener un plan remardable du parc. L’exemen paychologique avait inaigté eur son émotivité et son introvergion, l’obger¬ vation dans le goupe à pemis d’appréhender le très bone socialigation, qpi a ét pour lui uine ocacion de aumonter sea diffcultéx. Cette capacite de progrs conatituera un poipt important dana la conclusion nale de l’obaervation. Autre exemle : Une ducatrice demande ai lean-(laude qui ent entré depuis une quin¬ 2gine de jours, est débile. Il est ti dificlement acceaible, qu’elle se demande ’il s’agit uniquement de trouble du caractre, et ei es moyens intellectuels ne sont pas rellement faibles. Si poue lui domons un résultet globl, lle peut conatater qu’il s’agit d’un garçon de niveau faible (WISC- échelle verbale Q.I. 84 - échelle performance Q.I. 95 - échelle globale O.1. 86). 49 METLODES PSYCHOLOGQUES, PÉDAGOGIQUES Mais l’analve des teate montre : 19 Qu’au delà des mauvaises qualités d’organisation, en raison de l’instabilité et de l’impulgivite, l’enfant a des possibilités de compréhension et d’intuition très manifestes dans les cubes, l’assemblage d’objets et la Figure Complexe de Rey. 20 Qu’il eat satisfait de façon excegaive de gea réusites et agresif dans ses échecs. ce qui rend ses progrès dificlles. Nous pouvons donc lui répondre qu’il n'est pas débile, mais que ses capacités d’acqui¬ sition gont entravées par ses troubles du caractère. Quand l’éducatrice vient demander une pareille prévision, ce n’est pas pour obtenir un avis définitif sur le garcon, mais pour rechercher ce qui peut l’aider à le faire sortir de sa situation de « rejeté » du groupe. Il a pu lui être utile de connaitre ses aptitudes, ses points positifs, pour le valoriser aux veux des autres. Une discussion s’ouvre avec elle sur l’attitude à adopter. C’est pourquoi, sur la fiche d’observation des éducateurs, à côté des questions concernant l’intégration de l’enfant dans le groupe ou le compor¬ tement dans les différentes situations quotidiennes, est posée la question suivante : « cet enfant vous parait-il intelligent 2 ». La discussion peut ainsi s’ouvrir et les contradictions, si elles se font jour, sont intégrées dans la conclusion commune. Il s’agit donc aussi pour les psychologues de déterminer les éléments pouvant faire ressortir les aptitudes et permettant aux éducateurs d’aider l’enfant à révéler ses qualités, et à apprécier ses insuffisances. C’est ainsi qu’il nous est apparu que les sub-tests ou les items à caractère social mettaient en valeur des points intéressants pour la discussion avec les éducateurs, Par exemple, l’épreuve de compréhension générale du WISC permet d’apprécier la capacité d’adaptation à une, situation simple, puis de plus en plus complexe et pouvant être rapportée à des situations de groupe analogues. Dans le même ordre d’idées, l’aspect projectif de cette épreuve a également son intérêt dans la confrontation avec le travail d’observation dans le groupe : elle permet d’apprécier la bonne socialisation ou bien la passivité ou bien encore le caractère délinquant du jugement par exemple. C’est ainsi que pour trois enfants différents, on obtient les réponses suivantes à la question : « si un garçon plus petit que toi veut se battre avec toi 2 » « le le laisse faire ». « le lui casse la figure ». « le lui dis non ». De même, les contacts avec les rééducateurs de la parole, de la lecture. ainsi qu’avec les instituteurs ont permis de mieux cerner les difficultés perceptivo-motrices en comparant les troubles du langage, de la lecture et de l’orthographe. Si les psychologues ont pu mieux apprécier les difficultés, les rééducateurs, à leur tour, ont pu poser plus sarement l’indication de rééducation. Ainsi, nous avons tenté de montrer comment, dans la relation de nos 33 ET SOCIALES EN PSYCLIATRIE. NFANTILE examens, le vocabulaire psychologique, le langage technique, deviennent essentiellement un moyen de communication allant de pair, d’ailleurs, avec une information et une formation plus poussées du personnel pédagogique S’il est vrai que la psychologie informe la pédagogie, cette dernière a beau¬ coup appris à celle-là et a fait que les examens psychologiques sont devenus des instruments plus qualifés, plus directement utilisables, car servant à la confrontation. Il n’entre pas dans notre propos d’envisager l’apport de la peychologie à la pratique pélagogique. Cependant, notone que plue questions ont pu être étudiées en commun : psychologie du groupe, sociologie des familles, techniques d’observation systématique, techniques sociomé triques, etc... Ainsi, dans un groupe de travail, chaque membre de l’équipe est « psy¬ chologue » : le psychiatre dans son examen clinique, l’éducateur dans son observation de groupe, les instituteurs dans leur classe, les rééducateurg dans leurs examens plus spécialisés. Ils appréhendent des aspects qui cherchent à saisir l’ensemble de la personnalité de l’enfant. Chaque membre de l’équipe. en outre, est informé des autres techniques. La rencontre de ces techniciens n’est pas une simple coordination. mais une confrontation dont les éléments de contradiction aideront à la compréhension et au traitement de l’enfant. Les techniques, les conceptions de chacun se modifent avec le contrôle du collectif de travail. D’où l’intérêt d’une méthode qui permet de « repenser » ses techniques, donc de les faire progresser, de renforcer le caractère spécifique individuel du métier de chacun. celui du psychologue en particulier. Si les tests sont des épreuves standardisées, l’examen psychologique. qui comporte différentes épreuves, n’a pas une composition type. Il dépend d’une situation et de son utilisation, dont nous avons parlé plus haut. De plus, il permet de contribuer au choix d’une orientation a la sortie et de cones¬ tituer une informarion pour le service qui suivra le sujet ou l’établissement qui l’accueillera, ce dont le psychologue doit tenir compte. La situation de l'’enfant est d’abord déterminée par ses origines, et les dificultés qu’il a rencontrées dans le passé. On a lu, plus haut, la description de la population du centre de VitrY, de ses origines sociales et culturelles. Sur le plan psychologique, on constate, par un sondage portant sur l’effectif total d’une année, qu’environ 65 % de l’effectif a un O.I, compris entre 90 et 110 ou supérieur à 110. Le reste se place dans une zone comprise entre 80 et 90. Tous les enfants présentent un retard scolaire, pour la moitié d’entre eux supérieur à un an. L’enfant céjoumnant dans un établisement epécialisé va tre dterminé par son intégration progresive à un groupe et, à une gcolarite nouvelle. L’examen peychologique doit tenir, compte de son évolution, sinon, il ne représente du’n instant fgeant l’adaptation oul’inadaptation et risque d’être bientôt périmé. Les examens faits antérieurement à l’entrée, reprégentent ainsi un apport précieux, les diff́rences de résultate et d’interprétation pouvant servir à apprécier le déconditionnement. 42 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Jean-dlaude. I ane Dans l’examen psychologique fait au dispenaire qui nous a adregsé l’enfant, le Terman donne un O. L. de 80. Les tests non verbaux ne donnent pas de meilleurs régultate, mutismes apathie, indifférence. Au centre, pendant les trois premiers mois, les épreuves partielles (Fay, Matrix 47. Plateaux de Rey) confrment les résultats globaux du Terman, mais font augsi apparaître des aspecte positife (hniveau aupérieur aux Plateaux de Rey, par exemple). Après 6 mois, le WISC donne les récultats cuivante : Le niveau est moven, mais les résultate sont meilleurs au fur et à mesure du tecting. Pauvreté et brièveté verbales, maie adaptation aggez bonne aux épreuves non verbales. Enfant lent, mais capable de progrès. Ces derniers gemblent dos aux échanges sociaux, avec les adultes et les enfants, qu’il noue lentement au cours de son aéjour. Par ailleurs, l’examen psychologique doit servir à révéler le maximum de qualités et de rendement d’un sujet. Pour cela, il est souvent nécessaire de faire des examens progressifs en choisissant les meilleures conditions. par exemple, en évitant l’angoisse des premiers jours. L’examen est présenté comme devant aider l’enfant. Il est difficile de généraliser, car chaque cas est différent, mais le placement est souvent vécu, au début, comme une punition de la part des parents. Nous essavons alors, au cours d’un entretien précédant l’examen, de déculpabiliser l’enfant et nous lui montrons, par exemple, chaque fois qu’il parle de « défauts », qu’il a des « difficultés ». en dédhamhRtIgapt son placement. Sans valorisation excesaive, nous lui parlons éventuellement, en fin d'examen, des aspects positifs de ses résultats. Dans le même esprit, nous faisons des épreuves de contrêle au cours et à la fn du séjour, dans le cas de modifcations sensibles du comportement et de progrès sociaux et scolaires. Cela permet de constater les acquisitions, mais aussi d’apprécier les difficultés permanentes. Evelye, 6 ans 8 moia. Quand elle a pagsé la congultation au diapenaire, elle préentait au Binet-Simon un O.J. de 65 (Rectifcstion R. 732%0). Les observations cliniques étaient les auivantea : « im¬ portantes difficultés intellectuelles, afectives et motrices, donnant l’impression d’une désor¬ ganisation de la personnalité et d’un grand déearroi (séquelles d’encephalite aigué et abandon affectif) ». On ne la teate qu’un moia aprèa aon entrée, en raison de aa dégorientation et de son gentiment d’abandon. L’engemble des épreuves (Bender. Matrix 47, Plateaux de Rey, dessin, lengagella classe au niveau de 5 ana 6 pour 6 ana 9. On note qu’il est difcile de parler de retard dans une gituation abandonnique auagi grave. Quatre moie plus tard, elle obtient au Binet Simon Echelle de pointa, un âge mental de 6 gns 6 pour 7 ans 1 (O.L. 91). Elle est moins ingtable qu’à l’examen d’entrée, ge fxe mieux, se aitue mieux. Christian, 9 ans. A son eptrée, le premier examen aboutit à la concluaion auivante: « enfant de bon niveau intellectuel (O. L. au Binet Simon Echelle de pointa — 104) avec de bonnes qualités verbales : vocabulaire, compréhension. Les teata non verbaux donnent des résultats inférieurs, qui peuvent être espliqnés par des difeultés perceptives et notrices aur un fond asses impulaif et émof». tion. ET SOCIALES EN PSYCHIATRES NFANTILE 48 A l’examen de contrôle, avant la aortie, aix mois plus tard, le WISC donne les régultete guivante : L’agpet de l’exemen s’est modifié le niveau des performances est maintenant nettement gupérieur au niveau verbal (comparaison en particulier du Kohs classique et du Kohs Wech¬ gler). L’enfant a un comportement moins émotif, plus équilibfé sur le plan affectif. Il précente de meilleures qualitée d’orgonisstion. Ces progrès peuvent s’expliquer par une volution favorable dans le groupe, aidée par une paychothérapie. Mais cette modification révèle main¬ tenant une certaine discordance avec le vocabulaire, qui apparait un peu insuffisant, et avec le jugement encore entaché de puérilisme Il n’est pas inutile de consacrer quelques lignes au choix des épreuveg. Celles-ci varient selon l’âge, selon les instruments (par exemple, le Binet¬ Simon échelle de point n’est guère utilisable au-qela ue 6 a 9 angr et aussi gelon les dificultés de l’examen. Si le WISC nous apparait actuellement pré¬ férable pour les enfants au-dessus de 9 ans, parce que pourvu d’un bon étalon nage et d’une présentation plus moderne et plus attravante, nous avons montré dans une étude comparative (Terman et Binet-Simon échelle de pointes, d’une part, et WISC d’autre part) qu’il donnait moins d’indicatione analytiques que ne le fait le Terman dans son globalisme. En effet, un WISC peut apparaitre homogène, même pour un enfant présentant des diffcultée d’organisation perceptive, en raison de l’absence d’épreuve graphomotrice (copie- de dessins géométriques ou dessins de mémoire), et d’indications sur la reconnaissance latérale, Par contre, il apparaît très valable pour un enfant devant être suivi plusieurs années dans un institut médico-pédagogique par exemple. On peut, en effet, comparer plus précisément les résultats d’années en années grâce à l’étalonnagxe pondéré des différents aub-teasts. Chaque examen psychologique doit comporter des épreuves permettant d’apprécier : — le langage : vocabulaire, information, compréhension à différents degrés. jugement, activité catégorielle. — les aptitudes non verbales : activité grapbo-perceptive (graphisme de l’écriture, dessins, copie de dessins). organisation perceptivo-motrice (type Kohs et épreuves plus spécifiques). 23 — activité catégorielle aur le plan non verbal (Matrix par exemple). — eficience paycho-motrice (type Planche de Seguin ou deux barrages de R. 7azzo). — Les aptitudes scolaires. Il n’est pas nécessaire de procéder au cours de chaque examen, de façon systématique, à un test projectif, mais seulement dans la mesure où l’engemble des teste, l'’entretien avec l’enfant, le dessin libre ne semblent pas révéler les dificultés réelles: et aussi quand l’observation et l’examen clinique ont des positions différentes. Non pas que les techniques projectives « départagent» mais elles apportent un aspect supplémentaire à la recherche d’une explic¬ 4 MÉTUODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Daniel, 9 ans 6 mois. Les éducateure signalent, dans leur observation, l’atitude perturbée de l’enfant, ga coupure du réel, son autisme. Le médecin, dens son examen clinique, constate la dysharmonie de la peraonnalité mais ne pense pas que le contact soit celui d’un enfant psychotique. A l’examen psychologique, la conclusion, après les tests de niveau global et les testa complémentaires est la suivante : Niveau intellectuel moyen, quoique les dysharmonies dans les tests rendent faibles les résultats d'ensemble. Langage au vocabulaire signifiant pauvre. mais expression verbale parfois bonne. Quelques troubles de l’articulation. Organisation perceptivo-motrice faible. Le jugement a un caractère anxieux, mais non perturbé. L’enfant a une réserve qui semble une forme d’autisme. Les positions direntes des éducateurs et du médecin conduisent à demander un T.A T, et un Rorschach. Le T.A T, en particulier, met en valeur l'’incohérence des récits ou des interprétations. l’ambivalence, les thêmes régreseifs et la violence des fantasmes, mais augsi un certain refet de l’atmosphère familiale dans cette violence, montrant l’infuence éducative, et le désir et la possibilité chez l’enfant de « se réveiller », de sortir de son autisme. Cet aspect positif révélé par les tests projiectifs a déterminé la prolongation de l’obser¬ vation. On a pu constater une évolution très gensible au bout de quelques moig, l’enfant nouant des contact, vivant plus proche du réel, manifestant spontanément son afection. Abordons maintenant le fond du suijet, c’est-à-dire, ce que nous recher¬ chons dans l’examen psychologique qui soit utile pour l’observation. Une défnition de l’examen semble pouvoir être celle-ci : l’étude des aptitudes et de la personnalité, dans une situation privilégiée, duns le but d’abord de classer le sujet par rapport à la population de son êge (nipeau global) mais aussi de dégager ses possibilités d’ocquisition, d’adantation, compte tenu des déficits constatés, de rechercher une explication, enfin d’apprécier les possibilités de dépassement de ses diffcultés. Ils’agit d’apporter une observation originale qui se différencie de l’examen clinique du médecin, de l’observation pédagogique ou scolaire. Les données numériques des tests permettent de classer l’enfant. L’étude de la dispersion par l’analyse des échecs et des réussites, si elle est utile grâce à l’expérience du test qu’a le psychologue, ne donne pas de l’enfant un aspect suffisamment différencié. On constate, souvent, par exemple, qu’un test dispersé d’instable psycho-moteur avec upe certaine immaturité intellectuelle peut êtrc à peu près identique dans la répartition des réussites et des échecs à celui d’un cnfant pré-psychotique. L’appréciation du comportement nous permet une différenciation, mais celle-ci apparait cependant encore insuffi¬ sante. Bernard, âge réel : 19 ans. Au Terman, âge mental: 10 ane 3 mois — test digpersé de 6 à 12 ans — vocabulaire : 28 mots. Gérard, âge réel: 9 ans 8 mois. Au Terman, âge mental : 10 ans — test dispersé de 8 à 12 ans —- vocabulaire : 27 moig. Si on considère les items qui les différencient, ils sont peu signifcatifs: de plus ils sont manqués ou réussis à la limite. Le premier est un enfant de niveau intellectuel normal présentant une instabilité psycho¬ motrice et un grand infantilisme. Les inhibitions et les blocages sont légers. Le deuxième est également un enfant très instable, mais dont l’anxiété dans le contenu des réponses et dans le comportement fait penser à une pereonnalité pré-paychotique. 45 ET SOCIALES EN PSYCHATRIE INFANTILE On peut faire des observations analoguea si l’on compare la dispergion à des épreuves diff́rentes pour des enfants de tableaux cliniques tout-à-fait diff́rents. C’est pourquoi, tenant compte des défcits majeurs des enfants et aussi¬ des modes de traitement et de rééducation pouvant être indiqués (langage. orthographe, psycho-motricité, psychothérapie), on étudie les résultats des tests sous le triple aspect du langage, de la motricité, de l’affectivité, essavant d’isoler ces trois aspects, souvent liés, pour déterminer les déficits prédomi¬ nants. On ne s’étonnera donc pas de retrouver dans l’analyse ci-après des éléments se recouvrant. Les différents items ou sub-tests des tests globaux prennent une valeur d’épreuve par l’analyse qui en est faite. Le langage est étudié à travers le vocabulaire, les épreuves d’information. de compréhension d’une image, d’une situation ou d’un récit, l’activité catégorielle. Il faut noter aussi minutieusement que possible les réponses pour apprécier son niveau et sa qualité (dans le vocabulaire, l’expression. l’élaboration et la compréhension) ainsi que le niveau culturel. Pour le vocabulaire, par exemple, on analyse les échecs et les réussites en considérant : — le type de défnition (par l’usage, supérieur à l’usage, possibilité de géné¬ ralisation). — la forme (expression, élaboration). La répartition dans la connaissance des mots : verbes, par rapport aux noms et aux adiectifs : noms usuels par rapport aux noms non usuels (adaptation à la réalité) : confusions phonétiques (auditives et culturelles) : réponses fabulées. — L’enfant qui donne toujours une réponse (excitation verbale, réactions de prestance) et celui qui préfère dire qu’il ne sait pas. Le langage écrit est étudié par les épreuves de lecture, par la dictée d’une phrase, par les phrases en désordre. Dans la lecture, on remarque le temps, les types d’erreurs. Les souvenirs de lecture fournissent des renseigne¬ ments précieux quand on observe l’ordre, l’exactitude, la logique du récit, la mémoire, la fabulation. En dernier lieu, le langage permet d’apprécier parfois la qualité de la motricité par l’observation de son rythme, de son débit (langage heurté. explosif, monotone..). Les troubles d’articulation sont mis en évidence en même temps que leur possibilité de correction. La mtricité elle même peut être étudiée au cours des examens psycho¬ logiques. D’une part dans les épreuves d’organisation perceptive et motrice incluses dans les épreuves de niveau global. D’autre part à l’aide d’épreuves spécifiques sur le plan graphique et d’épreuves d’organisation du matériel (les épreuves plus purement motrices faisant partie de l’examen du spé¬ cialiste de la psycho-motricité), par les tests d’efficience psycho-motrice (du type de la planche de Seguin pour les plus petits ou des 2 Barrages de Cazzo). enn par l’observation elinique du comportement au cours de l’examen (instabilité, impulsivité) et dans la manipulation (grossière adhésive, crispée. hypotonique, etc.). de catastroppog natureneg. 46 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Il convient d’accorder une grande importance à l’organisation perceptivo¬ motrice, c’est-à-dire à l’appréhension du temps et de l’espace, liée à la connais¬ sance du schéma corporel et de la latéralisation. Ce sont les défauts de cette organisation qui, avec le langage, déterminent en grande partie, les difficultés scolaires. Cependant, il est souvent ardu de les séparer des défcits intellectuels et des troubles affectifs. Mais ces difficultés instrumentales ne peuvent pas toujours être mises en évidence par l’examen clinique neurologique ou moteur le plus fin. Si des indications sur ces difficultés ont déjà pu être recueillies à travers les items des tests de niveau global (dessins de mémoire, copie de degsing géométriques, chiffres à l’envers, Matrix), il est nécessaire de les analyser de plus prèg au moyen d’autres tests (Bender. Head, Piaget. Kohs. Rythme : en se référant aux travaux de R. Zazo et de ges collaborateurs). L’afectivité est analysée soua différents agpecta. Dans le langage, par l’étude du contenu des réponses à l’ensemble des tests : interprétationg d’image, jugement dans les tests verbaux, par exemple. On note particuliè¬ rement la nature de la fabulation éventuelle dans le vocabulaire ou les sou¬ venirs de lecture. Elisebeth, 7 ans 6 mois. Souvenirs du texte de lecture du Terman : « un incendie, près d’une uaine, une école qui avait des petits enfants, une jeune fille, qui était brôlée. Un pompier est venu la gauver. elle dormait, il l’a prige, il l’a sauvée.. Les petits enfanta n’ont rien eu ». L’excitation verbale, l’excès de détails, la fabulation, le contenu sexuel de ce texte. augai « projectife » qu’une réponse à une planche de T.A T., nous aideront à poger le diagnostic d’une structure hyetique. On étudie également le ton et le style du récit. On observe aussi la façon d’appréhender les épreuves (sentiment d’échec, participation, passivité). Enfin. on doit être attentif à la qualité de la relation de l’enfant avec le psychologue au cours de l’entretien. Les renseignements recueillie doivent permettre en général de saisir la personnalité de l’enfant. Cependant, comme nous le signalions plus haut. on peut encore pratiquer des tests projectifs. Rorschach et T.A.T. On y étudie d’abord le langage dans ses rapports avec le contenu de l’image : c’est-à-dire le langage du récit, son contenu, son unité, aa logique, appréciés dans leur distance à l’image. En second lieu, le mode de résolution des confits dans les récita, ce qui permet de aituer les mécanismes de défense, exprimég au contact d’un matériel angoisgant, sans doute plus importants que les confits eux-mêmeg. Gilles, 10 ans 6 mois. Au Terman : O. I. — 102 avec compréhengion et jugement de caractère anxieux, mais non perturbe Bon jugement dane les fables, dans les phrases absurdes mais avec nne certaine dramatisation. Au T.A T. : grande faiblese de la personnalité avec tendance à la d'asodintom de délire, identification directe à l’image : « je suie., ». Histoire sans rapport avec l’image. Soliloque. Désorientation affective (il est 2 personnes à la fois). Morcellement et évocation 47 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INANTILE La comparaison des réponge dene les 2 teste permet de modifer l’appreciation eur les troubles: les réponses au test de niveau global montrent une adaptation indéniable au réel. Comment peuvent etre utiliaées les techniqrutes exposées ci-dessue, com¬ ment doit-on présenter les résultats et les obsèrvations 2 Les conclusions des examens du psychologue, qui constituent son mode de communication avec les autres techniciens , sont, croyons-nous, essentiel- lement basées sur la mise en valeur, la comparaison et l’interprétation des contradictions apparues dans les digerses épreuves. Ceci ne prend d’ailleurs gons sens que dans la confrontation avec les données numériques des tests. La rédaction doit done faire apparaitre : la similitude ou l’opposition entre les régultats qualitatifs à l’intérieur de chaque épreuve, entre les résultats numériques des différentes épreuves, entre les résultats numériques et les résultats qualitatife sur le plan global. Fabien, 12 ans. Au WISC : on trouve : échelle verbale O.J. — 94, échelle performance O.J. — 113. échelle globale O.J. — 103. A l’échelle verbale qui est globalement inférieure, on congtate une dicordance entre les qualités de compréhengion sociale et de jugement catégoriel qui sont excellentes, et le vocabuleire et l'information, extrêmement faibles. Ceci d en partie au milieu culturel pauvre et ausgi à une abgence particulière de connoissances usuelles comme la date de najegance et le mois de l’année. L’expression verbale est médiocre. L’échelle de performance est supérieure, avec des blocages aux cubes qui entrainent une désorganigation, que l’epfant rapporte lui-même à la crainte de l’échec. Il est excellent sux épreuves d’asemblage. L’agpect de ces régultats détermine un examen plus approfondi. Head, Pisget, rythme. Figure Complexe font apparatre des dificultés d’organisation et d’orientation assez impor¬ tantes miges en valeur par une grande émotivité qui peut expliquer aussi sa désorientation dans le tempe. Enfn le T.A. T. et le Rorachach éliminent les perturbations de type psychotique et mettent en valeur l’émotivité et la faiblesse de la perception. On voit comme il est utile de tenter d’extraire des épreuves les cantra¬ dictions, qui, sur les plans quantitatif et qualitatif, ont paru les plus impor¬ tantes. Il ne s’agit pas ici d’apporter une critique aux méthodes de profils. de recherche de gignes, ou de scatter qui, elles, cherchent à faire coincider un calcul statistique ou des formes avec une conception structurale de la person¬ nalité. En tentant davantage de révéler la possibilité d’un mouvement, nous disons volontiers que nous devons dégager les dysharmonies plutêt que porter des jugements de caractère diagnostic. Cette notion est complexe, puisqu’il est difficile de se référer à des stades de développement précis. D’autre part. elle ne peut pas être confondue avec celle de « dysharmonie d’évolution » utiligée en clinique pgychiatrique, quoique ces deux notions coincident souvent. On peut alors poger la question euivante : les dysharmonies dans les tests ne sont-elles le fait des enfants inadaptés 2 Ceux-ci ne présentent-ils pas tous des dysharmonies, le but de l’examen psychologique étant justement de les apprécier 2 Il nous paraît difficile de répondre avant d’avoir fait une MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 48 comparaison précise avec la clinique, l’observation du comportement et avec une population d’enfants normaux. Nous aurions cependant tendance à le croire, nous appuvant pour cela sur la constatation que : plus un examen révèle de dysharmonies, c’est-d̀-dire de contradictions, plus l’enfant est inadapt. Un test d’enfant prépsychotique s’il n’est pas plus dispersé autour du résultat moyen que celui d’un instable psycho-moteur, contient, par contre, plus de contradictions. Un tel enfant peut présenter un vocabulaire insufisant dans une excellente expression verbale, de nombreux échecs à l’organisation perceptive et motrice et réussir parfaitement une épreuve du même type: il peut avoir un excellent niveau de lecture et ne pas savoir ni pouvoir compter. Cela peut expliquer que les notions de pseudo-debilité, d’intelligence « limite » ou « suffisante » restent encore confuses et sujettes à discussion. Mais l’ambiguité en provient aussi de ce qu’elles sont fondées sur une concep¬ tion de retard global, alors qu’il s’agit en vérité de dysharmonies. Cela permet aussi de mieux répondre à la question posée par les pédagogues : l’inadapté intelligent estuil intelligent 2 En fait, ses acquisitions sont dysharmoniques. et c’est la raison pour laquelle on trouve souvent de ces enfants qui demeurent au niveau d’acquisitions scolaires d’enfants présentant un plus important retard global. A la notion de retard, en cours quand nous avons débuté notre pratique. s’ajoute et se substitue aujourd’hui la notion de dysharmonie. Celle-ci a le mérite de présenter un aspect plus dynamique, puisqu’elle permet, à côté des éléments négatifs, de dégager les éléments positifs, de « dépassement ». En définitive, le rôle de l’examen peychologique dans l'’observation des enfants inadaptés nous parait être la mise en évidence des éléments quantitatifs et qualitatifs en rapport avec le niveau évolutif de l’enfant. Ses résultats fournisent des bases de discussion, qui, intégrées à l’observation clinique et pédagogique, contribueront à la synthèse finale qui est en quelque sorte « le diagnostic dynamique » du sujet. Au cours de cet exposé, des données de diverges origines ont été évoquéea : génétiques, dans la tentative de lier les résultats obtenus à l'’évolution de l’enfant : phénoménologiques, dans la façon d’envisager la signifcation d’une situation globale, par exemple le langage, les aspects moteurs et affectifs. le niveau culturel : psychanalytiques, dans la compréhension de l’entretien et du contenu des réponses. De même, dans le détail des épreuves, on devra tenir compte aussi bien des données structurales en observant l’organisation d’éléments signifiants. que des données dynamiques dans la recherche de l’organisation perceptivo¬ motrice par exemple. Il semble qu’on s’éloigne ainsi de la conception du « diagnostic peycho logique » et donc du risque de rivalité avec les fonctiona médicales et péda¬ gogiques. C’est de cette façon que nous pensons pouvoir différencier le rôle du paychologue dans une équipe de travail. CHAPITRE I MéTHODES PSYCHOTHERAPIQUES A. PSYCHOTHÉRAPIES INDIVIDUELLES La paychanalyse et les paychothérapies qui en sont dérivées constituent généralement des méthodes thérapeutiques en elles-mêmes, appliquées igolé¬ ment. On peut donc se demander dans quelle mesure elles peuvent être utles et utilisables dans un mlieu paycho-pédagogique. Les premiers essais qui en avaient été faits en France se sont soldés par des résultats négatifs. Certains auteurs en ont conclu que la vie collective g’opposait à ces méthodes. Dans la psychothérapie, appliquée comme méthode de traitement externe, d’une part les conflits intérieurs, qui ont été suscités par la vie familiale, sont constamment entretenus par celle-ci, ce qui en permet l’examen et la liquidation ; d’autre part, en internat, l’attitude de neutralité du thérapeute risque d’être mal comprise des éducateurs et de nuire à l’eficacité de leur action. Enfn, les impératifs du groupe et sa struc¬ ture e’opposaient au déroulement des traitements individuels. On préconisa alorg, en internat, des psychothérapies de groupe, dans le dessein de favoriser l’adaptation des individus aux groupes d’internat et d’aider à l’évolution positive de ceux-ci¬ Notre expérience a été très différente. En effet des psychothérapies ne semblent véritablement nécessaires que pour des cas où les confits sont sufisamment intériorisés et structurés pour ne pas pouvoir être modifiés par le changement de milieu et la psycho-pédagogie des groupes, Toute une partie de cet ouvrage décrit comment ces structures intérieures sont projetées sur le nouveau milieu, réalisant de véritables transferts. La psychothérapie sans géparation du milieu familial confictuel (parfois d’ailleurs différent de celui dans lequel s’est constituée la personnalité), n’est donc pas nécessaire. Par ailleurs, le placement est eouvent imposé par la nature des troubles qui rendent l’enfant intolérable en famille et à l’ecole. Nous verrons plus loin comment la séparation constitue au contraire un avantage pour le traitement. D’autre part, des tentatives de psychothérapies de groupe ont dù être abandonnées au centre de Vitry pour deux raisons esentielles : l’impossibilité de maintenir stable la composition d’un groupe de traitement, en raison de la MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 59 brièveté du séjour des enfants, et l’importance des manifegtations collectivea g’opposant à ces traitements. Deux raisong, au contraire, nous incitaient à pourguivre les traitements individuels. D’abord la remarque que, si la psychopédagogie des groupes pouvait, à notre étonnement, permettre le dépassement de conflite déjà bien intériorigés, certains enfants y gemblaient ingensibles, se contentant de repro¬ duire indéfniment les mêmes conduites inadaptées. Enguite nous fames frappés de ce que, dans une collectivité, les enfants n’avaient pratiquement pae d’entretiene geule à geule avec les adultes, ceux-ci étant accaparés par le travail des groupes. Or ils réclamaient pratiquement tous une attention personnelle, ne fâtce que pour évoquer les questions les plus urgentes et les plus concrêtes. C’est ainsi qu’ont pu ge pourguivre des paychothérapies individuelles. Nous estimong qu’elles doivent être entreprises pour environ un tiers des des enfants placés au Centre de Vitry. Le problème des indications des diff́rentes méthodes n'’a pas à être traité ici dans son engemble. Nous nous bornerons à dire comment se pré¬ sente la situation particulière des enfants traités en internat. En premier lieu, il n’est pas rare que surviennent des modifications des indications. Les symptômes et les attitudes notés par les médecins des consul¬ tatione externes, g’ils sont en général retrouvés à la consultation d’admission, sauf parfois si celle-ci est déjà éloignée de la première, n’apparaissent plus toujours aussi clairement par la suite. Cela ne s’explique pas seulement par le changement de médecin, la différence de personne et de contact, mais qussi par la géparation du milieu familial : l’ehfant est dégormais seul, sane qu’il sache qu’un parent reste à proximité. Il est soustrait, pour une période qu’il sait assez longue, aux infuences immédiates de son milieu. Cela peut soit l’inquiéter, soit le rassurer. De plus, la erainte du placement et des traitements punitifs divers imaginés disparait devant la réalité de la vie du centre, expérimentée depuis quelques jourg. Les superstructures se modi¬ fient, et l’on appréhende diff́renment la distance qui les sépare des fxations profondes. Des attitudes ou des fantasmes apparus aux examens antérieurs paraissent dépagsés sans dommage, des mécanismes de défense qui gem¬ blaient rigides ge gont évanouis. En particulier certaines inhibitions de congultation, paraissant assez ancrées, disparaissent pour faire place à une aisance excessive, de sorte qu’il n’y a plus lieu de tenir compte de l’indi¬ cation de paychothérapie portée auparavant. Dans le cours d’un séjour en internat, si l’on hégite à entreprendre un traitement, si l’examen médical et les renseignements extérieurs ne per¬ mettent pas de conclure absolument, les modifcations et l’évolution rap¬ portées par les divere observateurs emporteront la décision dans l’un ou l’autre sens. Il arrive d’ailleurs que peu de temps avant la sortie geulement, une stagnation, inattendue à l’origine, et la confirmation progressive, à la longue, d’une structure résistante, amènent à préconiser une psychothérapie, mais trop tard pour que celle-ci puisse être engagée. Les possibilités de traitement dépendent des conditiona et de la durée du géjour et non pas de considérations concernant le milieu extérieur, le ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 51 point de vue des parents, les dificultés pratiques de conduire l'enfant aux géances, etc. Hors la limitation dans le temps, il n’y aurait en principe aucun obstacle à la décision. Mais cette clause oblige à en réduire le nombré. Les gtructures prépsychotiques, les dygharmonies sérieuges d’évolution, les névroses de caractère et les névroses très structurées du type obsesionnel sont, en principe, éliminées en raison de la durée des traitements qui geraient nécessaires. On sait pourtant que ces diagnostics ne peuvent parfois appa¬ raître avec évidence qu’après plusieurs mois de traitement. Aussi gommes¬ nous amenés parfois, bar 'ereur en quelque sorte, à poursuivre pendunt un an et plus un traitement prévu pour quelques mois. On sait, en effet, qu’on ne peut plus, le traitement entrepris, se dégager de la grave responaabilité assumée que par la poursuite de l’analyse jusqu’à son terme. D’un autre côté, il arrive aussi qu’on prévoit dès l’entrée au centre et parfois même auparavant, qu’une analyse y soit commencée pour être poursuivie à l’exté¬ rieur, ou dans notre placement familial, après 2 ou 3 trimestres, par la même thérapeute. Ces disbositions, éminemment souhaitables, ne peuvent être qu’aggez rarement réalisées du fait des circonstances pratiques et aussi parce que, très souvent, le géjour au centre constitue un tout dont il est difficile de prolonger une partie : outre qu’il faut convaincre la famille de la nécessité de continuer le traitement après la gortie, l’enfant lui-même éprouve une gêne en ce qui concerne les relations avec ses parents et avec la psychothérapie, commencée dans des conditions différentes. Son transfert n’avait, jusqu’alors, soulevé de problèmes que pour lui, et il ge trouve désormais dans une situation où sont impliqués réellement ses parents dans ses relations actuelles avec eux. Ceux-ci n’ont pas été amenés à saisir pro¬ gresaivement le rôle du thérapeute. Une telle situation peut se rencontrer aussi quand un enfant sort du centre pour un placement nourricier : la famille éducatrice n’est pas toujours coopérante pour la poursuite de l’analyse et l’enfant, qui y vit une situation nouvelle qu’il pressent devoir constituer un nouveau transfert, n’est souvent plus assez disponible pour poursuivre des relations de la même intensité avec la thérapeute. En général, il nous faut donc nous abstenir d’entreprendre des paychana¬ lyges prolongées véritables qui restent parfaitement possibles en internat ou en placement familial. Cependant, pour de nombreux sujets, des psychana¬ lyses courtes gont possible et indiquées. Elles ont lieu à raison d’au moins deux géances par gemaine, parfois troig ou quatre, pendant une année scolaire par exemple. D’autre part, des psychothérapies analytiques sont entreprises régulièrement. Les cas pouvant bénéficier de cos techniques ge gituent entre les névroses graves à structure rigide et lea troubles réactionnels ne nécesgi¬ tant pas de peychothérapie ou seulement sous forme d’entretieng d’expli¬ cation et de soutien. (Nous verrong plus loin l’utilité des psychothérapies de soutien dans les cas le plue graves.). Rappelons que la plupart dea enfants que noua avona à traiter sonr dans l’Âge de la période de latence théorique. (On pourrait d’ailleurs discuter l’existence même d’une période de latence dans les cas, les plus nombreux, où le moi est resté prégénital et où différents caractères psychologiques, psycho- et perceptivo-moteurs témoignent également d’une immaturité neuro¬ logique. Au minimum, cette phase est retardée de plusieurs années.) Les féreontielles, une importance inhabituelle. 8 MéTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES plus agés seulement sont prépubères ou, pour quelques filles, atteignent la puberté. Les cag relevant d’une analyse courte eont avant tout des névroses. Le diagnostic ne se fonde pas tant, on le sait, sur la nature des symptômes que sur les notions de permanence des troubles et de répercussion sur le processus de maturation. Ce sont des cas où l’élément réactionnel n’inter¬ vient que trèe peu et pour lesquels le changement de milieu et la psycho¬ pédagogie, telle qu’elle est conduite au centre, restent sans effet. Tout au moins éprouve-t-on l’impression qu’il faudrait que les mêmes méthodes soient poursuivies très longtemps, pendant plusieurs années, pour obtenir un résultat appréciable. Et encore le doute persiste-t-il à ce sujet. Au contraire, on est convaincu de pouvoir gagner du temps, de permettre l’action de la psychopédagogie, de dénouer une situation qui risque de ne plus pou¬ voir l’être plus tard, en décidant une psychothérapie individuelle. Nous ingisterons sur un type de cas très fréquent où l’analyse courte produit un bénéfice particulièrement important. Il s’agit de certaines grandes immaturations de la personnalité qu’on peut étiqueter hospitalisme, aban¬ donnisme, dysharmonies de la personnalité ou parfois pré-psychoses. Une peychothérapie est indiquée s’il n’existe pas de véritables mécanismes psycho¬ tiques, identification projective et fusion avec l’objet, ou, au minimum, gi le contact avec le réel est conservé dans la plupart des situations — 5i l’angoisse n’est pas trop extériorisée et fgée dans une armature caractérielle (les troubles du caractère existant toujours dans ces cas) — à condition aussi qu’il n’existe pas de véritables défenses obsessionnelles (dont on découvre le plus souvent l’ébauche). Ces cas, qui paraissent pouvoir facile¬ ment évoluer vers la psychose ou la délinquance, conservent encore une remarquable plasticité. Les graves frustrations réelles subies au début de la vie, la profonde angoisse persistante, ont empêché une structuration véri¬ table de la personnalité de ces enfants. Cela peut expliquer l’impression de vide qu’on éprouve à leur contact, et l’avidité qu’ils montrent, dès qu’ils gont placés dans une situation où ils y sont enfin autorisés, à combler ce vide. Ces caa a’opposent à ceux où une structure déréelle ou antisociale a masqué ce besoin d’une manière parfois déjà défnitive. La digponibilité pergistante de ces enfants leur permet de nouer assez rapidement, après un à quatre mois de séjour, des relations affectives. Mais celles-ci sont trop archaiques pour pouvoir être vécues suffisamment dans le groupe. Encore moins pouvaient-elles l’être dans une famille. Une analyse est nécesaaire. Mais celle-ci peut rester asgez courte, la régression étant immé¬ diate et les différenta atadea pouvant ensuite être franchis rapidement. Sans doute, à la fn du traitement, ces personnalitée restent-elles fragiles. Mais il faut tenir compte de l’énorme importance des investissements extérieurs (1) réalisés dans le centre, du déblocage intellectuel et des progrès acolaires qui sont habituels. Ces enfants ont cependant besoin d’être protégés pendant de nombreuses années dans un milieu affectueux et éducatif. (1) Même dane l’analyae les relationa réellea prennent, par rapport aux relations trana¬ ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INEANTHE 83 Nous donnons une grande place, en établissant les indications thérapeu¬ tiques, à la nature du contact avec l'enfant pendant les examens, et plus particulièrement à l’intensité de l’anxiété mobilisable. Nous nous commes souvent étonnés d’entendre afirmer, à la suite d’Anna Freud, que l’enfant ne souffrait pas de sa névrose. Au contraire, nous avons toujours eu tendance à penser, ce que nous avons trouvé confirmé par Mélanie Klein, que l’enfant ou l’adolescent ressent l’angoisse avec plus d’intensité que l’adulte. Dès qu’il gait qu’une aide peut lui être apportée, il l’accepte presque toujours avec soulagement et reconnaissance, ce qui l’incite à aller plus avant bien que. par la suite, se développent des résistances pouvant parfois faire échouer un traitement. Notre expérience des psychanalyses d’enfants s’inscrit dana celle de Mélanie Klein, compte tenu des réserves faites, du point de vue génétique, par Ajuriaguerra, Lebovici et Diatkine. Une véritable névrose de transfert peut être développée sans difficultés. Et, contrairement aux vues exprimées à ce sujet par certains auteurs et que nous avons rapportées ci-dessus, le transfert peut être interprété vis-d-vis des parents, leur absence ne modifiant en rien l’évolution à laquelle on peut s’attendre dans toute psychanalyse. l’angoisse ne se rapportant pas uniquement aux véritables parents, mais plus particulièrement aux parents introjectés, aux relations objectales. Il est rare qu’il y ait lieu, au contraire, d’interpréter les relations extra-parentales établies entre les enfants et leurs éducateurs ou avec le groupe. Par ailleurs. l’attitude thérapeutique pourra facilement être débarrassée de toute pré¬ occupation éducative. Ce souci pourra être laissé aux parents éclairés que sont les éducateurs. Cependant, nous faisons nêtre la remarque de Berge (1) quand il rap¬ pelle qu’il existe trois attitudes vis-à-vis du transfert : l’analyser, s’en gervir pour satisfaire en particulier les besoins du malade ou ofrir une image paren¬ tale favorisant l’identification, cette dernière faisant souvent partie des deux autres. En effet, analyser n’est pas tout, les interprétations ne doivent être données que dans la mesure où elles sont nécessaires. Il convient de se régler sur un ensemble de faits pour décider ou non de la poursuite du « vorking through ». Il est certes nécessaire de ne jamais rester sur un plan superficiel, en particulier de pénétrer toujours dans les problèmes prégénitaux, qui sont prédominants, ces enfants faisant toujours un transfert presque uniquement maternel ou, plus exactement, les imago paternelle et maternelle étant encore peu diff́renciées. Par contre les interprétations de toutes les situatione archaiques, interprétations qu’on voudrait parfois exhaustives (et qui n’épuisent d’ailleurs jamais les multiples aspects du vécu, totalité non recons¬ tituable par définition) ne sont pas toujours indispensables. On sait que lea fixations prégénitales ne pourront jamais être tout à fait liquidées et qu’elles ne seront finalement que recouvertes par des structures guecessives. Ce qui compte c’est la solidité des défenses et de la distance prise par rapport à elles, la « quantité » d’énergie débloquée à partir de ces fxations. Dans la mesure où la libido, le besoin d’aimer, s’extériorise et s’investit, où les pulsions (1) A. BERCE, « Psychanalyae et Education ». La Pachanalyae d’aujourd’hui, P.UF. 54 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES négatives, qui persistent dans l’inconscient, entrainent moins d’angoigse et moins de déséquilibre des conduites, peu importe si tous les recoins n’ont pas été visités et éclairés. C’est l’élévation du niveau de l’engemble qui compte. Pour comprendre l’action de la paychanalyge chez l’enfant, il faut ge reporter à d’autres impératifes qu’à ceux de la technique et de la théorie. c’est-à-dire aussi aux besoins d’amour et de sécurité, essentiels pour tous les enfants. Aussi ne doit-on s’arrêter à la seule analyse du tranafert qu’autant que les élémente du traitement et ceux qu’anporte régulièrement l’informa tion extérieure le montreront indispensable. Il vaut mieux, en particulier, éviter de trop e’attacher à la signification symbolique du matériel inconscient, dont le gens ne reste jamais qu’approximatif, et accepter de le laisser pagser ou de le délaisser si d’autres critères, parmi lesquels les modifcations du contact de l’enfant, y autorigent. Il convient de se rappeler que le matériel analytique, comme le remarquent Lebovici et Diatkipe, est recueilli dans la situation de transfert et n’a de signification qu’en fonction de cette situation. Il peut être retrouvé, dans les mêmes conditions, au cours des traitements des enfants et des adultes les plus normaux. Il traduit le déroulement iné¬ luctable de gitutions affectives passées ou, seulement, rattachées imaginaire¬ ment au passé : il peut s’agir aussi bien du développement phénoménolo¬ gique d’une relation poussée jusqu’aux arcanes collectife de la payché humaine. Cela ne g’oppose pas à ce que l’analvete reste trèa attentif à ce matériel, pour ne pas manquer d’apercevoir chacune de ses modifcations, mais tout en gardant présent à l’esprit l’ensemble de la personnalité de l’enfant et le déroulement général de son traitement et de ges conduites extérieureg. Disons encores à propos de la technique de l’analyse chez ces enfants. qu’il n’est pas toujours possible ni souhaitable de rester strictement neutre. Rappelons que dans la plupart des névroses d’abandon et des névroses de caractère, on parvient, (c’est souvent très vite à cet âge et après les incohé¬ rences de la vie passée), à des positions dépressives. Ces effondrements néces¬ sitent une attitude plus active et gratifante, comme on est conduit à le faire dans les analyses de psychotiques. A ces enfants gravement frustrés s’applique particulièrement la remarque de Mélanie Klein : « la foi en l’existence de personnalités bienveillantes et secourables, due à l’action de la libido, permet aux objets réels de s’imposer de plus en plus fortement et aux images fantas¬ matiques de passer au seçond plan ». Mais il est fréquent que ce type d’aide ne soit nécessaire qu’un temps et que la restructuration permette bientot de reprendre une attitude plus réservée. D’ailleurs, la marche des traitementes n’est pas sans être influencée par le comportement des enfants en dehors des géances. De même leur terminaison. Celle-ci ne peut être décidée par l’analyste avant que le conffit œdipien ait été abordé et que des pogitions gépitalea, viriles ou féminines, sufisamment golides puissent être assumées. Mais presque toujours ces événements sont contemporains d’une évolution très positive dans les différents milieux de vie et dans les différentes activités, évolution qui, parfois, aura même précédé celle du traitement. Envisageant maintenant les psychothérapies analytiques, nous ferons une remarque à propos des interprétations de transfert : théoriquement, 65 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE NEANTILE elles ne devraient pas être données au cours de cures non strictement analy¬ tiques. En fait, d’autres que nous ont déjà remarqué la valeur dynamique de ces interprétations au cours de psychothérapies. Il est rare finalement qu’on puisse mener à bien une véritable psychothérapie sans utiliser ce moyen efficace de débloquer rapidement une situation et de faire appréhender des explications données en dehors du transfert. psychothérapies, nous ne pensons pas non plus qu'elle doive être systémati- Quant à la règle d’éviter une régression sur le plan pré-génital dana les quement respectée. D’une part ce serait se condamner, vis-à-vis de beaucoup d’enfants, à ne rien faire que les raggurer, car il ne leur est pas begoin de régresser beaucoup pour livrer des fantasmes oraux et anaux. D’autre part la régression n’est pas bien grave, justement pour cette raison, et elle devient fructueuse si le thérapeute reste capable de contrôler l’ensemble de la marche du traitement sans relâcher son contact et en s’efforcant de maintenir l’enfant sufisamment hors de l’eau pour que l’angoisse soulevée reste supportable et passagère. Bien entendu, il ne s’agit pas, dans cette technique, de laisser se développer de bout en bout les relations prégénitales. Aussi éviterons-nous de donner ce conseil à des thérapeutes de peu d’expérience. A la n de la période prépubertaire et au début de la puberté, les probl¬ mes de psychothérapie ne sont pas essentiellement différents chez les garçons: les pulsions sexuelles violentes ne font chez eux que recouvrir des préoccupa¬ tions orales et anales. Le contact peut être excellent avec une thérapeute dont l’attitude favorise l’accession à un statut viril. Avec un homme, le besoin d’imitation directe d’un adulte du même gexe peut être utilisé très vite avec profit. Par contre, avec les flles d’une douzaine d’années, les relations nous ont paru beaucoup plus difficiles. A cet âge, en effet, les thérapeutes femmes sont considérées d’emblée comme des rivales, et cela suffit à bloquer le traitement dès le début. D’autre part, le contact avec un homme est trop érotisé pour ne pas provoquer une inhibition très génante. Il nous semble actuellement préférable de confier tout de même ces enfants à des thérapeutes femmes. qui devront d’abord s’efforcer de se faire accepter et ne pas s’attendre à en recueillir le fruit aussitôt. Si ce cap a pu être franchi, alors le tranefert positif deviendra excellont et le besoin d’imitation, avec l’infuence directe qui l’accompagne, gera une précieuse ressource, utilisable au cours des difficultée ultérieures de l’adolescence et même jusqu’à l’Âge adulte. On connait aussi l’utilité d’introduire des séquences psyehodramatique dans les traitements entrepris à cet age, au moins lorsque les techniques de jeu et de dessin sont refusées et que les difficultés d’exprimer verbalement ses conflits bloquent complè̂tement l’enfant. Les simples psychothérapies explicatives ou de soutien sont parfois d’une eficacité inespérée. Nous avons déjà dit combien ces enfants, séparés de leur famille et vivant en collectivité, éprouvaient le begoin d’une attention person¬ nelle. La plupart du temps ces entretiens sont destinés à éclaircir, à la faveur d’un contact affectif, la situation de l’enfant au cours de son placement et à la lui faire accepter, ou encore à lui permettre de parler ou à l’entretenir de fase, 2. 86 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES sa situation de famille, de ga fliation, de son avenir à la préparation duquel il est utile de l’asocier. Trop souvent en effet, l’enfant n’est pas congulté ou même averti de sa destination : c’est un colis expédié de place en place : il n’a pas voix au chapitre. L’incertitude de sa gituation l’amène alors à agir l’anxiété qu’il n’a pas le droit d’exprimer verbalement. Aussi ces contacts. qui reconnaissent son existence et sa personne propre, entrainent-ils parfois un effet libérateur. On observe alors la disparition subite de conditionnements qui paraissaient anciens et gtructurés et un épanouissement inattendu. On peut se permettre de prendre aussitôt une attitude valorisante et pédago¬ gique qui s’avère des plus rentables. Aussi, dans les cas les plus graves, cette technique, apparemment simpliste, mérite-t-elle parfois d’être tentée. Par contre, les psychothérapies uniquement dirigées contre un symptême particulièrement génant nous semblent très peu indiquées. On sait que, lorsqu’elles sont efficaces, ce peut bien être par la substitution au trouble d’un mécanisme psychologique moins visible, mais moins accessible, au détri¬ ment de la structure de la personnalité, Par contre, au cours d’une psycho¬ thérapie, un symbtôme peut être évoqué par le thérapeute, au moment où celui-ci perçoit qu’il est désinvesti et qu’une aide directe, à ce moment précis et grâce au transfert positif, entrainera sa disparition et un mouvement général de progrès. Les troubles sphinctériens, très fréquents, ne gont jamais abordés directe¬ ment (pas plus que ne devraient les aborder les éducateurs). Pratiquement, les enfants qui sont assez solides et assez âgés pour qu’on puisse employer sans risque les techniques de déconditionnement rapide ne nous semblent pas nombreux avant la puberté. Pourtant, au cours des séjours au centre de Vitry, plus de la moitié des enfants énurétiques ou encoprétiques deviennent propres, qu’ils aient ou non bénéficié de psychothérapie (ces troubles ne consti¬ tuant pas en eux-mêmes une indication). Nous utilisons parfois l’appareil de Lepoutre, suivant la technique que nous a enseignée Soulé (1), uniquement chez les enfants de plus de II ans, et pour les personnalités assez solides, qui ont déjà fait des progrès au cours de plusieurs mois de séjour, et chez lesquels l’énurésie parait en voie de désinvestissement. Nous vérifons aupa¬ ravant la sincérité de leur désir de la faire disparaitre, en demandant aux éducateurs d’observer particulièrement leur conduite à l’égard de ce trouble. L’application de cette technique nécessite le coucher à part, ou dang une infirmerie, et l’intervention de l’infrmière. Si nous avons ainsi obtenu quelques succès, ce fut chaque fois à la condition d’un contact psycho¬ thérapique proche. Les conditions de vie des enfants en internat, que nous avons évo¬ quées au début pour montrer qu’elles ne s’opposaient pas nécessairement à la psychothérapie, constituent au contraire des avantages congidérables pour l’application de cette technique. La séparation des parents d’abord. On sait que leur adhésion, puis leur (1) M. et N. SoUL « Traitement de l’nurégie ». La poohiatrie de l’enfant, vol. IL 57 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTIE collaboration prolongée, sont si diffciles à obtenir que leur action, consciente ou inconsciente, fait échouer un grand nombre de psychothérapies ambula¬ toires. Les dificultés qu’ils peuvent causer sont beaucoup plus importantes dans les milieux peu éduqués, d’autant plus que les problèmes pratiques d’horaires, de transports, d’accompagnement, souvent insurmontables. demandent en tous cas de gros eforts de coopération et peuvent facilement être utilisés pour interrompre les traitementa. Rien de tel dans notre cas. Il ne s’agit pas de dissimuler la psychothérapie à la famille, mais ce traitement fait partie d’un contexte médico-pédagogique auquel elle a donné son accord global lors de l’admission de l’enfant. Le problème ne va pas se poser à nouveau à l’occasion de chaque séance. Malgré cela, il arrive que certains cherchent à entraver, par leurs interventions auprèg de l’enfant, les progrès de la psychothérapie, comme ils le font d’ailleurs pour l’action du centre en général. Nous avons déjà indiqué que, contrairement à la crainte exprimée par certains auteurs, le traitement pouvait parfaitement se dérouler par rapport aux images des parents, malgré l’absence de leur personne réelle. La situation serait peut-être différente après une ou plusieurs années de séparation. Cependant, comme dans nombre d’établissements, la plupart des parente viennent visiter leurs enfants une ou deux fois par mois. Enfin, comme cela est exposé par ailleurs à propos du rôle des relations afectives nouées dans un centre et surtout dans un placement familial, l’expérience montre que, si la trace des premières années vécues demeure vivace et inscrite dans la structure de la personnalité, les expériences successives, surtout quand elles sont positives, parviennent à modifier complètement les réactions super¬ ficielles, à pénétrer dans le moi plus ou moins profondément suivant leur durée, c’est-à-dire selon la sécurité qu’elles apportent. Aussi, dans une psy¬ chanalyse ou une psychothérapie, l’enfant fait-il l’expérience non seulement du transfert en tant que répétition des émotions anciennes, mais aussi d’une relation nouvelle et irremplacable dans ce qu’elle apporte de compréhension et d’amour inconditionné. Un autre avantage de la psychothérapie en internat est celui d’éviter que des réactions instinctives, sexuelles et agressives, se produisent dans le milieu familial ou scolaire. Celui-ci, déjà intolérant à ces enfants, y réagit parfois très mal et les culpabilise à moins qu’il n’adopte une attitude arti¬ Bcielle, qu’il croit être la bonne, diamêtralement opposée à la position édu¬ cative antérieure. Parfois la crainte extérieure de la désapprobation des parents, renforcant un surmoi incomplètement autonome, interdit à elle seule le déroulement d’un traitement ambulatoire, celui-ci paraissant consister d’abord, pour l’enfant, dans le fait de juger ses parents. Il arrive ainsi que ces traitements, impossibles en ville, démarrent sans difficulté aussitôt après l’entrée au centre. Ajoutons encore que les « convocations » pour psycho¬ thérapies ou examens sont si nombreuses et fréquentes que l’enfant les accepte comme faisant partie de la vie courante. Mais c’est surtout le contexte psycho-pédagogique qui épaule effcace¬ ment ces traitements. Du point de vue du psychothérapeute d’abord; celui-ci éprouve une tran¬ MÉTHIODES PSYTCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 83 quillité essentiellement liée à l’absence de la famille et de ges ŕactions, ce qu lui laise une grande liberté de manœuvre. Il se sent d’autre part soutenu par toute une équipe et, s’il conserve de toutes façons sa responsabilité celle-ci n’est pas isolée mais partagée : ce qui est loin d’être négligeable pour les cas graves, et au cours des péripéties. En un mot sa sécurité est beaucoup plus établie, ce qui ne peut qu’influencer favorablement son contre-transfert. Par ailleurs, il bénéficie de plusieurs sources d’informations : outre l’anamnèse minutieuse qui lui est fournie et qu’il peut faire compléter sur tel point particulier, il peut connaître le comportement exact de l’enfant au centre et. par comparaison, les déformations que la vie familiale ou l’état d’esprit des parents lui ont fait subir. Il est tenu régulièrement au courant des modifi¬ cations de ce comportement ce qui l’aidera à doser les frustrations et les gratifications, suivant ce qu’on lui rapporte des réactions de l’enfant. Pour le thérapeute, il est souvent difficile d’évaluer dans quelle mesure l’apparition ou la liquidation de telle situation psychothérapique revêt une importance décisive ou ne doit être considérée que comme l’un des nombreux moments de la cure : le retentissement dans la vie courante servira à estimer ces situa¬ tions selon leur juste valeur. Il arive qu’un enfant soulève au cours d’une séance un problème inat¬ tendu qui fournit la clef de bien des malaises familiaux. Le thérapeute possède alors la faculté de faire appel à tel membre de l’équipe susceptible d’appro¬ fondir ce problème, de lui apporter une solution. La réciproque est aussi vraie : sans trahir la confance de l’enfant, le thérapeute pourra fdurnir des précisions sur la hiérarchie de ses problèmes et de ses besoins aux autres membres de l’équipe. Ceux-ci s’appuieront gur lui pour comprendre chaque phase de son évolution et lui adapter avec souplesse l’attitude appropriée. On ne peut évidemment guère dire ou faire dire à des parents, sous peine d’être mal compris, que leur style pédagogique devrait momentanément s’assouplir, ou au contraire se raidir. On ne peut non plus toujours leur demander de favoriser des investissements extérieurs, d’apporter un soutien affectif plus proche, etc. Tout cela peut au contraire être discuté sans risque avec les éducateurs. Les maitres de classe eux-mêmes participent d’une certaine façon à la psychothérapie, car ils sont habitués à comprendre ce qu’ils peuvent exiger d’un enfant et se tiennent au courant de son évolution. De même les assistantes sociales, lorsqu’on les avertit de la proche terminaison d’une cure, peuvent préparer la famille au retour au foyer, voire l’amener à la compréhension de l’évolution obtenue. Nous dirons maintenant en quoi les enfants eux-mêmes bénéfcient de conditions privilégiées pour la bonne marche de leur psychothérapie. Nous avons montré comment ils pouvaient se sentir plus à l’aise, n’avant pas à tenir compte des opinions de leurs parents, ni à rébondre à leurs ques¬ tions, ne dépendant de personne pour être conduits aux séances, ne risquant pas d’être génés par les rivalités et jalousies par rapport au thérapeute, ou par rapport au traitement lui-même. La plupart du temps, ils se rendent volontiere aux séances. S’ils hésitent ou s’opposent, les pédagogues savent mieux que les parents comment les 59 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INTANTILE inciter à le acepter. D’ailleurs, ils conservent toujours le droit de refuser de temps à autre, ce qui, en tout état de cause, serait difficile à admettre pour des parents. Il arrive également, comme en ville, qu’un enfant refuse totalement la psychothérapie. Des interactions nuisibles se proqungent augsr oaro entre plusieurs enfants pris en traitement, de même que certains, qui ne le sont pas, peuvent se sentir frustrés. Les réactions de groupe sont des plus rares, mais on les a vues géner ou saboter une évolution. Cependant, disons à nouveau que ces inconvénients sont loin de réduire à rien les avantages de la gituation au centre pour les psychothérapies. Ce qui revêt encore plus d’importance, c’est que la psychollérapie se poursuit dans tous les moments de la vie de l’enfant. On nous accordera que cette affirmation contient au moins une part de vérité si l’on se réfère à ce qui est dit par ailleurs : l’atmosphère psycho¬ thérapique imprègne véritablement l’établissement. Non pas que la situatiop analytique et les fantasmes régressifs puissent être explicités et interprétés ailleurs qu'’en psychothérapie, mais tous les adultes, ainsi que les activités. les règles de vie et les méthodes participent d’une compréhension que l’enfant ne peut manquer de percevoir. D’une certaine facon, la séance est une concen¬ tration d’un champ magnétique partout sensible. Il n’existe pas de contra¬ diction entre la séance et la vie au centre. On voit que cette ambiance représente une des raisons pour lesquelles cette vie collective reste artificielle, malgré les ouvertures sur l’extérieur, et ne peut durer qu’un temps. C’est aussi pourquoi elle est thérapeutique. Le déconditionnement pédagogique ne contredit pas la psychothérapie. les transferts sur les pédagogues ne s’opposent pas à celui sur le thérapeute. Il'est parfaitement possible que les adultes ne se jalousent pas pour l’attache¬ ment d’un enfant : les novices ont seuls besoin d’obtenir cette preuve de leur valeur et de leur efficacité, Au contraire, thérapeutes, éducateurs, insti¬ tuteurs, assistantes sociales, cherchent à utiliser, au mieux de l’intérêt de l’enfant, l’affection que celuisci peut éprouver pour l’un d’entre eux. L’habi¬ tude fait que les rôles complémentaires se répartissent sans heurts et tout naturellement. Il arrive qu’une éducatrice conduise un enfant à la séance ou vienne l’y chercher. D’autres fois, c’est la thérapeute qui congeillera à l’enfant de s’adresser à ses éducateurs pour régler tel problème. Les explications sur la fliation, les explications sexuelles, peuvent être données par les uns ou par les autres, suivant les cas, après qu’on a étudié en commun la solution la plus indiquée. Il peut se faire aussi que l’enfant aille voir le même jour et guccessivement l’assistante sociale et le thérapeute : si celui-ci dégire conserver une attitude strictement analytique, l’assistante fournira toutes les explica¬ tions souhaitables sur des affaires concrêtes et se chargera de la liaison avec les parente. Comme on le voit, il existe de multiples façons d’utiliser les compétences des diff́rents membres de l’équipe et les psychothérapies sont d’autant plus eficaces qu’elles font davantage appel à la collaboration de tous. Il est intéressant de noter comment se passe le sevrage dans ces conditions. C’est évidemment toujours une période importante, difficile, qui doit être 60 MÉTUODES PSYCHIOLOGQUES PÉDAGOGIQUES utilisée à la fois pour compléter ou approfondir la situation analytique et. dans un second temps, pour diriger l’énergie libérée vers des sublimations évoluées. Il nous parait nécessaire que la fin du traitement coincide avec la fn du séjour. La venue de cette période où les attachements doivent être rompus, où les intérêts auxquels l’enfant s’est ouvert vont lui être brusque¬ ment retirés, quand il quittera cette ambiance où, dans la majorité des cas il a vécu une expérience cruciale, pourrait être redoutée à juste titre. Nous ne cessons nous-mêmes de nous étonner qu’il n’en soit pas ainsi et que la fin du séjour et du traitement se passe en général assez bien (l’un et l’autre étant liés dans son esprit car il est attaché autant à ses éducateurs qu’à son thérapeute). Il faut dire que l’enfant a toujours su que la durée de son place¬ ment était limitée. Il percevait de longue date l’approche de son terme. Terme espéré par ailleurs : l’ambivalence vis-à-vis de l’internat n’a jamais complè̂tement disparu et, s’il est de mode, parmi les enfants, de réclamer la sortie, c’est avec une sincérité qui n’est qu’à moitié feinte. D’ailleurs, les intérêts du centre commencent à s’épuiser après un certain nombre de mois. La sortie est attendue aussi comme le terme de la séparation familiale et le retour au fover est d’autant plus désiré qu’il est idéalisé. Un nouvel internat peut aussi être accueilli favorablement car ceux qui restent regardent avec envie le sortant qui acquiert ainsi un nouveau prestige. N’exagérons pas cependant : certaines de ces conduites à la sortie ne sont que de prestance : il est des enfants véritablement anxieux, déprimés ou agités au point qu’on peut se demander s’il restera quelque chose des progrès qu’ils avaient fait peu de temps auparavant. En définitive, il sera extrême¬ ment difficile de savoir si le sevrage qui, dans la majorité des cas, parait superficiellement bien supporté, l’est aussi de façon durable et dans la pro¬ fondeur. Une enquête menée quelques mois plus tard pourra seule en juger et décider si de nouvelles interventions, psychothérapiques ou pédagogiques. gont nécessaires. Nous terminerons en insistant à nouveau sur l’intérêt, pour les psycho¬ thérapeutes, de s’intégrer à l’équipe de travail. Encore une fois la compré¬ hension psychanalytique d’une certaine psychologie profonde ne doit pas les faire s’enfermer dana une tour d’ivoire. Le temps est révolu où la distance séparant les données psychanalytiques de la pratique pédagogique était telle qu’il semblait préférable que rien ne transpirât de la marche d’un traite¬ ment. Aujourd’hui l’avidité des pédagogues justife une communication. Celle-ci a sans doute besoin d’être dosée. Mais déjà l’effort que fera l’analyste pour rendre compréhensible son langage et ses notions théoriques, l’obligeant à se référer aux termes habituels et au gens commun, lui permettra de préciser et de critiquer sa pensée pour la rendre assimilable. De ce fait, sa technique particulière se rapprochera du général et, en s’épurant des éléments mal assimilés ou purement formels, gagnera en efficacité. De même il est souhaitable que les psychothérapeutes possedent une connaissance concrète, quotidienne, des enfants. Sans doute ne peut-on pas exiger de tous qu’ils soient parents et éducateurs. Mais il reste préférable qu’ils aient fait preuve, avant leur formation psychanalytique, d’un intérêt spontané pour les enfants et aient eu le désir de s’en occuper avant toute idée B. PLACEMENT FAMILIAL PSYCHOTHÉRAPIQUE ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTLE 61 de psychothérapie. A défaut, on gera en droit de leur demander qu’il ne persiete aucune réticence dans les contacts extra-thérapeutiques avec les enfants. Ces contacts ne peuvent manquer de se présenter et ne doivent pas être évités sous des prétextes techniques. C’est, en effet, le but de la technique que de rapprocher les contacts, au-delà de la technique, afin que la distance avec l’autre diminue et, que les échanges réciproques deviennent de plus en plus spontanés et profonds. Si elle n’aboutissait pas à une disponibilité. correspondant à un éveil de l’intuition, la technique resterait vaine. La peur des enfants, en particulier des enfants perturbés, peut, en effet faire recourir à la situation psychothérapique comme moyen de dominer cette peur, à moins qu’on ne l’utilise pour s’approprier ou « absorber » l’enfant. Il peut en être de même avec les autres membres de l’équipe : « psy¬ chologisme » ou « psychiatrisme » constituent des systèmes défensifs destinég à surmonter la peur de l’autre en général. L’affectation de supériorité d’un côté trouve son pendant dans l’infériorité agressive de l’autre. D’où l’utilité pour tous d’étaler au grand jour la psychothérapie : aux seuls veux des psycho¬ logues, des pédagogues et des assistantes sociales s’entend : les réunions des psychothérapeutes, où sont exposés et discutés les cas, doivent être ouvertes à tous les membres de l’équipe, à l’exclusion des stagiaires. Cette seule liberté suffit à « désaliéner » la psychothérapie et, à la vérité, il ne vient à ces réunions que peu de participants en dehors des thérapeutes eux-mêmes. Outre les avantages psychologiques que chacun retire de ces contacts, ils rendent plus facile la discussion. Par exemple, on y voit bien comment la conduite de l’enfant dans un groupe et sa psychothérapie évoluent parallèlement ou sont en opposition apparente, ou quelle attitude pédagogique parait plus appro¬ priée dans telle période, voire, si l’enfant montre trop d’anxiété dans ses comportements, sil y a lieu, pour le psychothérapeute, de limiter l’angoisse. etc. Nous avons déjà indiqué comment d’autre part, les comportements des parents aux visites, la compréhension de leurs problèmes, etc., le tout relaté par les assistantes sociales, pouvait être utilisé par les thérapeutes. Dans cet esprit, la psychothérapie reste psychothérapie, mais cans être coupée totalement de la vie réelle de l’enfant. (Structure et dynamique des relations) Dans la gamme des mesures thérapeutiques destinées aux enfante inadaptés, le placement familial psychothérapique constitue une solution originale et riche d’intéret. Ele part en effet du principe que, les troubles des enfants étant liés à l’insuffisance ou aux perturbations des relations affec¬ tives avec leur famille, il devrait être possible que l’expérience vécue d’un apport affectif sufisant et de relations interhumaines équilibrées rende peu à peu inutiles ou inappropriées les positions caractérielles ou les mécanis¬ mes de défense jusqu’alors utilisés, en même temps que le moi se trouverait renforcé, à la fois par la sécurité qu’il pourrait ainsi trouver et par l’apport éducatif irremplacable que constitue une cellule familiale solide. 62 MÉTUODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Une telle expérience, pour être valable, auppose une infrastructure capable de répondre aux nécesgités suivantes : a) Des familles d’accueil triées avec le plus grand soin, où le mari comme la femme présentent une personnalité sengiblement équilibrée, avec des rela¬ tions conjugales satisfaisantes, des critères éducatifs non névrotiques, une grande compréhension des enfants allant de pair avec une attitude de tolé¬ rance éprouvée à l’égard de leurs éventuelles difficultés. Il importe, d’autre part, que ces familles comprennent parfaitement le rôle qu’elles se trouvent. appelées à jouer et qui nous paraît avoir une certaine originalité par rapport à la situation qui se prégente habituellement lorsqu’un enfant s’intègre dans une famille qui n’eat pas la sienne, cette situation n’étant retrouvée dane la plupart des cas que dans l’hypothèse d’un gardiennage provisoire chez une nourrice ou dans une adoption. Il ne suffit pas, en effet, que l’enfant soit pris en charge même consciencieusement sur le plan matériel et qu’il demeure un étranger vivant dans cette nouvelle famille à titre provisoire sans liens autres que très superficiels. Il est d’autre part contraire à nos buts, voire même néfaste, que les familles nourricières le considèrent comme leur véritable enfant avec toutes les implications sur le plan conscient et inconscient qu’une telle attitude comporte et les difficultés qu’elle ne manquerait pas de faire gurgir par rapport aux familles naturelles, celles-ci risquant de mal supporter leur éviction tandis que l’enfant se trouverait écartelé entre l’une et l’autre. La situation la meilleure consiste en une intégration réelle dans la structure et la vie de la famille nourricière auxquelles l’enfant participera sans discri¬ mination d’aucune sorte, tout en lui reconnaissant sa position originale et en respectant ses éventuelles déviations par rapport aux normes du milieu d’accueil quand elles sont dues à ses problèmes affectifs antérieurs ou à ceux que continuent à lui poser sa famille naturelle. Il pourrait paraitre difficile à priori d’exiger autant de familles nourricières que rien, avant l’expérience ainsi tentée, ne prépare à une telle tâche. L’expérience a cependant montré que si les critères personnels ci-dessus imposés se trouvent réunis, les familleg nourricières, dans leur immense majorité, se montrent capables de s’adapter remarquablement à de telles exigences, à condition néanmoins qu’elles se trouvent aidées ou guidées dans ce sens par les techniciens demeurant en contact extrémement suivi avec elles. Ces considérations nous amènent à envisager maintenant le second élément indispensable au bon fonctionnement d’une telle expérience, goit : b) Une équipe médico-sociale surveillant de très près l’évolution de l’enfant et les contre-attitudes des familles nourricières, gusceptible de faire face immédiatement aux difficultés ou aux confits qu’une situation de ce genre peut amener sur différenta plans : relations entre enfant et famille d’accueil, entre enfant et famille naturelle, entre famille d’accueil et famille naturelle, entre enfant et milieu scolaire ou de loisirs etc.. Il importe pour cette tâche d’éclairer les uns ou les autres sur la signification de tel ou tel comportement ou de telle ou telle difficulté, de dédramatiser, parfois d’inter¬ venir plus directement, pour atténuer ou supprimer, quand la chose est poasible, les sources des confits, entreprendre même en certains cas des traitements médicamenteux ou psychothérapiques, ou envisager une aide effcace lorsque les dificultés scolaires paraissent trop grandes ou qu’il subsiste ET SOCIALES EN DSYCHIATRIE INFANTHLE 63 d’importants troubles psycho-moteurs ou temporo-gpatiaux, ce qui suppose : e) Des possibilitée de rééducation scolaire et psycho-motrice permettant à l’enfant de dépasser ses insuffisances sur ce plan afn que les progrès qu’il est ainsi susceptible de réaliger renforcent les résultats acquis dans d’autres domaines, les familles nourricières et les rééducateurs spécialisés contribuant ainsi chacun dans leur sphère propre à faire vivre aux enfants une expérience de réussite tant sur le plan affectif qu’intellectuel. Il a fallu plusieurs années d’expérience et de tâtonnemente avant que ces conditions se trouvent réunies comme elles le sont à l’heure actuelle. Au Centre de Vitry, les techniques de travail des médecins et des assistantes sociales se sont peu à peu perfectionnées, leur rôle s’étant révélé absolument india¬ pensable. Il a permis d’éviter, en effet, de nombreux échecs, des conflits irréductibles ou des renvois de l’école. On peut dire que lorsque certains caps dangereux se trouvent dépassés, les progrès de beaucoup d’enfants se révèlent alors souvent tels que les difficultés ultérieures se montrent de plus en plus rares et de moins en moins intenges. Les indications du placement familial, les critères concrets du choix des nourrices, la structure et les techniques de travail de l’équipe médico-sociale et pédagogique, ont fait l’objet de publications antérieures (1). L’objet de ce travail consiste en un essai de compréhension et d’expli¬ cation de la structure et de la dynamique des relations nouées dans cette nouvelle situation entre l’enfant perturbé et les membres de la famille d’accueil afin de dégager les facteurs essentiels qui, dans cette relation, permettent à l’enfant de dépasser ses dificultés ou de modifier ses positions dans le sens d’une meilleure adaptation et d’un équilibre plus solide. Outre l’intérêt théorique d’une telle étude, elle ouvre la voie, au cas où ces conclusions se révéleraient positives, à une forme nouvelle de traitement en neuro-psychiatrie infantile susceptible d’uneygrande extension du fait de son cont réduit et du faible nombre du personnel utilisé. (1) C. C. AMADO et R. HAMELN dana Squtvegarde de l'Enfnce, septembre-octobre 1957. A. GREEN, R. HAMELN et D. BIDAnD au Congrès de l’U N.A.R., Strasbourg, aeptembre 1957. G. AMADO et R. CAHN dana Revue de neuro-psychiatrie infantile et d’hygìne mentale de l’enfance, juillet-aoot 1960. A titre d’indication, nous donnons le tableau des diagnostice posés pour lea enfants du placement familial du centre de Vitry en 1960. Troubles graves, c’est-a-dire avec perturbation profonde de la personnalité: 17 -1. 20 1 2 -L 1 - 10 50 gur 62, goit 80 %6. — emplové d’administration, courageux et travailleur, pourvu d’une excellente affectivité. 84 METHODES PSYCHOLOGIQUES PÉDAGOGIQUES D’une expérience de huit ans, il ge dégage que les facteurs esgentiels susceptibles de modifier les structures caractérielles et névrotiques et de faire progresser l’enfant dans le sens d’une maturation et d’un renforcement du moi sont les suivants : 19 Un apport dans tous les domaines, et notamment eur le plan affectif suffisamment important pour combler la carence antérieure qui, dans bien des cas, constitue la base même des troubles. 29 Des possibilités d’identification à des images parentales solides capa¬ bles éventuellement de modifer l’image faussée, insuffisante ou inexistante qu’il en avait jusqu’alors. 39 L’assurance d’une gécurité matérielle et morale qui, dans la plupart des cas, n’avait jamais été connue jusqu’à ce placement. 40 Une expérience souvent inédite de relations de confiance avec l’adulte. à la fois simples, naturelles et dédramatisées, sans coercition excessive. Nous envisageons successivement ces différents facteurs, en nous aidant d’exemples cliniques précie susceptibles d’éclairer chacun d’entre eux. A) La satisfaction des hesoins chez les enfants carencés sur le plan aactif constitue l’un des impératifs de base du placement familial. Nombre des cas. en effet, n’avaient jusqu’alors connu qu’une vie en collectivité ou chez de nombreuses nourrices plus ou moins indifférentes ou hostiles, ou auprès de mères ou de belles-mères débordées, rejetantes, accaparées par leurs propres problèmes ou ne prenant en charge leur enfant que de façon épisodique. Pour la première fois, ces enfants font l’expérience d’une vie de famille nor¬ male, avec un personnage maternel disponible, chaleureux, à la fois compré¬ hensif et oblatif. On assiste en effet dans tous ces cas, quelle que soit la person nalité des nourrices, à une étonnante compréhension de leur part des besoins affectifs de l’enfant, aux conséquences capitales. L’exemple suivant, prig parmi beaucoup d’autres, illustre bien l’évolution déclenchée à partir de telles cobrdonnées. Marie-Claire, née le 2 mai 1950, est entrée au Centre d’observation de Vitry le 29 jan¬ vier 1957 pour difficultés massives sur les plans intellectuel, affectif et moteur donnant l’impression d’une désorganieation de la pergonnalité et d’un grand désarroi ou dominent l’agitation, l’inaffectivité apparente, l’anxiété et un comportement auto-punitif avec convic¬ tione délirantes dont le thème habituel est sa famille. Née d’une mère prostituée, elle était élevée depuie ea naissance en nourrice puis en internat, puis, lorsqu’elle est reprise à quatre ana par le père et sa famille, ceux-ci la maltraitent et l’abandonnent. A cinq ans elle présente une encéphalite aigué avec syndrôme pseudodémentiel. Hospitalisée de nombreuses fois depuis cette époque elle échoue au dép̂t de l’Assistance publique avant son entrée au centre. L’évolution au cours d’un séjour de treize moie au centre d’observation ge montre favorable, amenant une disparition des fantagmes délirants, de même que des diffcultés motrices et d’un certain nombre de déficiences intellectuelles. Mais il persiste une intense revendication affective non satigfaite, une agitation psycho-motrice importante et une grande fragilité de la personnalité avec bizarreries. La famille d’acueil, qui vit en pavillon, est composee du père. M. C., ̂gé de 45 ane ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INTANTILE 65 de la mère, âgée de 43 ans, intelligente et compréhensive, très féminine et plus évoluée que gon mari. Ils ont six enfants : l’ainée âgée de 20 ans, la plus jeuno de 8 ang, bien adaptées. D’emblée Marie-Claire décidle d’appeler Mme C. « maman ». Celle-ci lors de cette première rencontre supporte avec ́normément de patience les fabulations de la fllette sur ga famille. Les premiers jours l'’enfant entre dens un état d’excitation permapent : logorrhétque, s’agitant sans cesge, montant et descendant les escaliers sang arrêt, g’émerveillant de ga nouvelle eituation, en parlant à chaque personne qu’elle rencontre sur son passage. Il lui faut à la fois expliquer qu’elle a « un papa, une maman, des sœura » avec un ravisement sans cesse renouvelé à prononcer ces mots, continuant par ailleure à fabuler eur son histoire familiale. Au moment des repas elle apparait comme boulimique, dévorant tout ce qui se trouve dans son assiette et réclamant fréquemment de nouvelles rations, buvant des quantitég massives de liquide, souvent même en dehors des repag. La famille C. accueille ces réactions avec un intérêt amusé et répond à ges exigences d’affection par beaucoup de chaleur et de compréhension. Marie-Claire demeure cependant réticente avec M. C. et le fils ainé, du fait probablement de certains fantasmes sexuels qui lui font appréhender toute image virile comme sale ou dangereuse. En classe, elle apparait comme un véritable petit animal sauvage. gane aucune attitude acolaire, parlant gang cesse à haute voix, toujours gur les mêmes thèmes. Entrée au coure préparatoire au milieu de l’année scolaire, elle est d’un niveau faible par rapport aux autres élèves. L’inatitutrice, bien que trèg compréhengive, ge trouve désorientée par ges bizarreries. Au bout de quelques semaines, l’agitation à la maison diminue genaiblement. Ses jeuxr gont plus stables, elle prend peu à peu les habitudes de la maison, copie l’attitude des autres enfants, commence même à faire preuve d’une certaine oblativité, de façon d’ailleurs encore très épisodique, Par contre, gon sommeil reste très agité, les difficultéa à l’école pergistent identiques: Marie-Claire réagit encore en ce milieu comme dans toutes les collectivités 9ù elle a vécu jugqu’alors, c’est-À-dire comme s’il s’agisgait sans cesse pour elle d’un véritable « gtruggle for life ». Tout changement dans son cadre habituel de vie la laisge désemparée (par exemple quand un meuble est déplacé ou que Mme C. est abgente quand elle rentre de classe): elle ne sait plus où elle va coucher, même si son lit n’a pas changé de place. Il faut alors chaque fois la rassurer. Un examen clinique pratiqué pour la première fois au Centre d’observation depuis son entrée dans sa famille d’accueil l’angoisse beaucoup, faisant même gurgir des éléments discordants dans son comportement, avec cloynigme : elle deggine une maison où habite une famille gans mère. Au coura des mois suivants, l’amélioration au sein du milieu d’accueil ge pourguit de façon apectaculaire. L’enfant devient de plus en plug stable et affectueuge : les bizarreries tendent à disparatre. Bien que restant agressive et diffcile en clasge, elle commence à faire des acquisitions gur le plan scolaire, ce qui lui permet de paeger dane la classe gupérieure. Agignaler quelques petita vols d’argent pour acheter dea friandises, ce quela nourrice comprend et pardonne. Chaque examen clinique la révèle encore trèa disperaée, avec une immaturité très importante dans les propos et les réactiong. Après les vacances d’été passées avec ges « geura » sane incident dang une colonie de vacances, la bonne évolution continue : pergistent cependant un certain égocentrigme (elle est encore incapable de prêter ses jouets) et quelques bizarreries (trempe un soir ses pieda dana l’urine avant de ge coucher). Chaque fois que Marie-Claire rentre de casge, elle se jette dane les brae de Mme C. et lui raconte ea journée avec force détails. La famille d’accueil la traite comme une petite fille avant de gros besoins dans tous les domaines, ne faisant pratiquement pas cas de ses bizarreries, ce qui constitue un facteur essentiel de normaligation de son compor¬ ment. Bien qu’encore assez instable, elle passe maintenant inapercue aux récréations. Elle est notée comme une élève intelligente mais irrégulière. La rééducation scolaire individuelle alors entreprise doit faire face à une inorganisation générale de la pensée nécessitant deg exercices quotidiens d’abstraction et d’attention. fci encore, la famille d’accueil qui lui a tant apporté sur le plan affectif et matériel, peut prendre en charge une grande partie de la réédu¬ cetion : une fille ainée, qui s’intérese à la scolarité, asiate aux lecons le jeudi et les fait répéter METHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDACOGIQUES 66 le soir à Marie-Claire. Cette nonvelle année acolaire acentue l’amélioration déjà tr̀s nette danes le gens notamment d’une congolidation du moi, avec acqruigition d’un bien meilleur contr̂le tant gur le plan paychique que moteur. Sa conduite en clase se normalise progresai¬ vement. Son intérêt pour la chose scolaire grandit. Elle reate cependant très fatigable et son gxeitation auxmente ausi bien à la maison qu’à l’école à chaque fn de trimestre. Les vacances ocolaires sont véritablement nécessaires pour elle. A la rentrée cuivante, on peut congidérer Marie-Claire comme pratiquement normnlisée. EHle est tout à fait calme, affectueuge à l'égard de tous, aes relations avec M. C, et le file aine ge sont à leur tour considérablement améliorées. Le premier trimestre débute bien. Marie¬ (aire, que l’on a préféré faire redoubler, fourit un très bon travail. Elle est dans les dix premières de sa clagse, et en mesure d’accomplir un efort intellectuel auivi et d’intégrer aigément lea connaisances qu’elle acquiert. Il faut noter cependant son extrême fragilité à toute infection. Au coura de ces quelques moig, elle prégentera succesgivement un abcès dentaire, une rougeole et une infection grippale qui atteignent chaque fois exagérément son état général avec véritable sidération tant phvaique que psychique et régression magive gur le plan affectif, chaque fois heureusement de courte durée. Elle commence, par ailleurs à prendre conacience de sa eituation particulière dans la famille d’accueil, alors que jusqu’a prégent celle-ci reprégentait tout gimplement ga nouvelle famille. C’est à l’occasion de la livrai¬ son d’un vestiaire de l’Aggistance publique qu’elle fait une allugion discrête à cette situation. Nous préparons la famille d’accueil de manière à ce qu’elle goit prête à aborder ces problmes avec l’enfant dans une perspective conciliant la mige au point de sa situation réelle et l’agsu¬ rance de l’irrévergibilité des liens établig avec son nouveau milieu. Cet exemple clinique illustre remarquablement la dynamique de l’évolu¬ tion de nombre de cas. L’expérience, vécue pour la première fois, d’images parentales affectueuses et gratifiantes sur tous les plans a créé au début du placement chez cotte enfant profondément frustrée en ce domaine un véri¬ table état d’ivresse avec excitation hypomaniaque accompagné de boulimie et de dipsomanie. Ce besoin de se nourrir dans tous les domaines s’accompa¬ gnait de celui de se délecter des termes « maman », « papa » etc. dont elle avait littéralement plein la bouche. Ces premiers besoins comblés, le comporte¬ ment se normalise de façon progressive et spectaculaire d’abord dans le milieu d’accueil, puis au bout de plugieurs mois seulement dans le milieu scolaire. On aegiete là à une véritable restructuration du moi, la dispergion, l’impulgivité. lea bizarrerieg, l’anxiété agie faigant place peu à peu à des attitudes de plus en plus contrôlées et de mieux en mieux adaptées dans toug les domaines jugqu’à une normalisation quasi totale du comportement au bout de deux ans, avec cependant durant toute cette période des régressions passagèrea mais spectaculaires au cours desquelles l’enfant ge déstructure à nouveau. chaque fois par exemple qu’elle revient au centre d’observation, ou qu’elle présente un état infectieux retentissant sur son état général. Tout ge passe comme si la satisfaction de besoins affectifs primitifs jusqu’alors jamais comblég, permettant à la fois une réassurance narcissique et l’investissement de l’image maternelle en tant que bon objet, constituait l’élément de bage permettant la restructuration et la consolidation du moi. On retrouve là les facteurs affectifs fondamentaux à la base de la genège du moi. Dans un premier stade en effet la satisfaction de la faim amène un sentiment de toute puissance: dans un deuxième stade, tout gage d’amour de l’adulte tout-puis¬ sant a dès lors le même effet qu’avait, pour le nourrisson, l’approvisionnement en lait. Faible lorsqu’il est rejeté, le moi se sent fort quand il est aimé. L’estime de soi est regagnée lorsque l’amour est retrouvé. Ce n’est qu’ensuite et lorsque ET SOCIALES EN PSYTCHLATRIE INTANTLE 67 ces conditions se trouvent remplies que le moi est en mesure de progresser encore dans le sens d’une plus grande maitrise de la réalité, acceptant par exemple de substituer à une partie des activités ludiques une pensée plus organisée et plus abstraite, avec pour corollaire l’apparition d’intérêt pour la chose scolaire. La diminution, ou la disparition de l’angoisse, de l’agressivité. du masochigme, rendue possible par l’acquisition d’une véritable sécurité intérieure et de l’estime de soi facilite encore un tel mouvement. L’effet thérapeutique parait donc dù à ce que l’on est en droit d’appeler une inter¬ gention réparafrice. C’est ainsi, semble-t-il, que s’expliquent les spectaculaires progrès réaligés dans les familles d’accueil chez les enfante présentant tantôt une structure prépsychotique, tantôt une dysharmonie massive d’évolution. tantôt une importante arriération affective, tantôt une anxiété intense vécue sur un mode névrotique ou agi. Le désir de faire plaisir à cet adulte ainsi investi constitue un facteur gupplémentaire de progrès. Il préfgure les processus d’identification qui se précigeront de plus en plus au fur et à mesure que le moi se renforce jusqu’à la phase œdipienne. Ce sera maintenant notre objet. B) Les possibilités d’identifcation à de nouvelles images parentales solides par l’intermédiaire d’une véritable expérience émofionnelle correctrice constituent up autre facteur fondamental de progrèg. L’exemple guivant eat à cet égard particulièrement démonstratif. Monique D, née le 2 mai 1950, est entrée au Centre d’observation de Vitry le 24 janvier 1959 pour troubles affectife réactionnels ò dominent l’inhibition avec alternance de mutigme. d’opposition pagsive et de grossìretés ou d’insolences, notamment à l’égard de son père. et l’enurésie diurne et pocturne. Le quotient intellectuel eat de 194 au Terman. Les parents sont séparés, la mère a quitté le foyer, décue par l’incompréhension de son mari, robuste maçon italien, par ailleurs gensiblement équilibré mais incapable de comprendre une femme bovarvque aux aspirations intellectuelles ingatigfaites, gupportant mal les contraintea de la vie étriquée de menagère que, geule, il pouvait concevoir pour elle. Celle-cei est elle-même extrêmement inhibée, hyperémotive, fuvant les contacts, à la fois coupable et agrexgsive, vivant dans un monde de rèves : elle n’a aucune idée des besoins de Monique, lui achête des vétemente tropgrands, lui parle comme a une ille de vingtens,secroiten mesure de la comprendre et lui fait partager le même univers irréel. Toutes deux, dit-elle, gont deg incompriges et finiront par ge retrouver isolées du monde. Une procédure de divorce est en coura laigaant provisoirement la garde des trois enfanta au p̀re; la mère s’est réfugiée chez ges parents. Au cours d’un aéjour de gept mois au Centre, Monique évolue agsez favorablement. Elle arrive à avoir d’asges bons contacta avec l’éducatrice maia demeure réserve avec l’édu¬ dateur. Ses relations avec ges parents ne ge modifent pas : elle reste extrêmement fixée à sa mère et ne degaerre pas les dents en prégence de gon père. Mme D. accepte assez mal la golution du placement familial mais les relations qu’elle a établies avec l’assistante sociale durant toute la période de l’obgervation de a ille au Centre lui permettent de ge gentir moina rejetée et lui font acepter une fomation professionnelle accélérée qui la valorige. La famille nourricìre et compogée du p̀re, Monsieur R.: ̂gé de 30 ang, jardinier, de caractère très équilibré, sthénique, avant construit lui-même son propre pavillon spacieux avec tout le confort, de la mère, du même age, affectueuge, intelligente, féminine, avant déjà obtenu d’excellenta régultata avec un garçon du Placement familial qu’elle a gardé durant otre ani et de deonx corcone de copt et cix am, Fle amnace mhe pogce vide a l'intontio de Monique. 68 MÉTLIODES PSYCLOLOGIQUES, ṔDAGOGIQUES Durant les deux premiers mois de gon placement, l’enfant demeure triate et renfermée. Elle communique avec les enfants de la nourrice, maie très peu avec celle-ci, qui doit sans ceage aller à elle (un jour Mme R. fait l’expérience de la laisser geule dans la salle de bain, l’invitant à l'’appeler ea toilette terminée, pour qu’lle lui apporte du linge propre. Mopique reste trois quarts d’heure sans appeler et Mme R, a l’impresion qu’elle gerait demeurée la matinée debout A attendre ai elle-même n’était intervenue). L’enfant ricane pour des riens, pleure très gouvent, et en particulier à table loraqu'elle ge trouve devant des mets qu’elle n’a jamais mangés (sa mère ne faisait aucune cuisine). Elle laige toute ges Affaires en dégordre, ne prend aucun soin de sa chambre et ne parakt pas génée par son énurégie. Elle n’aime pas jouer et dès qu’elle a fini ges devoire, elle lit ou fait des devoirs supplémentaires. En classe, elle est la meilleure élève mais l’institutrice remarque qu’elle ne parle qu’à deux ou trois élèves et qu’en récréation elle toure la tête ou va ge cacher dans un coin lorequ’une autre maitregse lui adrèse la parole. Elle écrit beaucoup à sa mère. ge plaint d’être triste et de s’ennuver. Elle est contente lorque celle-ci vient la voir, n’importe quand, gans prévenir, toujours à des heures incommodes. Mme R, accepte ces visites, ne vou¬ lant pas être celle qui gépare Monique de ea mère. Elle les laigse seules engemble car en sa prégence elles ne ge parlent pas. Les visites du père sont courtes à jour fixe. Monique ne dit pas un mot et semble mécontente de le voir. Son atitude figée exasp̀re son père et met Mme R. mal à l’aige. Au cours du mois suivant, Monique s'adresse de plus en plus ouvertement à Mme R.; elle l’appelle « tatie p et commence à lui poser des questiong : ses contacti avec M. R, sont plus fuvants. Elle rechigne beaucoup moins sur la nourriture et ges tics et minauderie régressent : il sufit cependant qu’une peraonne étrangère entre pour qu’elle recommence à ge tordre les mains, traner la jambe, froncer les sourcils. Elle lit moins mais ne joue que loraqu’elle ge croit geule. Mme R. est alors étonnée de constater la violence de ses gestes et a brutalité, contrastant avec sa douceur et son calme habituels ; elle bat, mord, griffe les enfants de Mme R. gous prétexte qu’ils sont de mauvais élèves (joue beaucoup à l’école) on elle jette. brige, poupée et animaux pour les punir « de leure sottiges ». Elle commence à paraitre préoccupée de gon énurtaie. Elle en parle à Mme R. et en prégence des autes epfante elle dissimule son lit mouillé. Mme R. soigne beaucoup ea toilette, lui arrange ses robes à aa taille. veille à ce qu’elle soit toujours bien coiffée et nous dit qu’elle est ravie parce que tout aon entourage trouve l’enfant transformée phyeiquement depuis qu’elle s’en occupe. Monique travaille toujours bien en clase et alors qu’elle disgimulait ses cahiers à Mme B., elle les lui apporte maintenant et attend ses compliments. Après plusieurs jours de vacances à Noel auprès de ga mère. Monique revient malade (troubles integtinaux, éruption). Pendant huit jourg, elle ne parle pas et tous ges tics réappa¬ raissent. Elle et triste et son comportement est redevenu celui du début. La famille d’acueil traverge alors un moment de découragement, et l’assistante sociale doit valoriser les efforts de Mme R, en l’engageant à patienter. Mme R, comprend, d’autre part, que Monique ne pent e’attacher à elle sans se gentir coupable vis-à-vis de ga mère. A cette période de régression fait suite une nouvelle phase d’amélioration. Monique commence à se mettre gur le même rang que les fils de Mme R. et essaie de les rendre jaloux. Elle fait des projeta d’avenir devant Mme R. « le travaillerai toujoura bien en clagse car plus tard ie ne veux dépendre de personne, et avoir un bon métier : je ne me marierai ijamaie je ne veux pas faire la vaisgelle et le ménage d’un bonhomme ». Comme Mme R., rit de sex remarques en lui faisant obgerver qu’elle-même n’aime pas begucoup g’occuper de la cuisine et du ménage mais qu’elle fait aussi autre chose, que tonton l’aide souvent et que de son coté il traveille pour nourrir toute la famille, Monique réplique « mais tu verras, plus tard. tonton il te battra ». Elle n’aime pas les travaux ménagers et ai Mme R. lui propose de l’aider elle parle tout de guite de l’cole. Elle mange de tout à table, ne pleure que tres rarement. accepte les observations, y compris celle de M. R. qu’elle n’oge toujours pas aborder de front maig autour duquel elle tourne visiblement. Elle traverse de courtea périodes de propreté et elle est ravie loraqu’elle peut le faire constater à Mme R. Après les visites de sa mère, ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 6 elle est toujours préoccupée et de nouveau un peu triste mais Mme R. se garde de faire aucun commentaire. Avec son père, elle est plus à l’aise, ainsi qu’avec ses frères. Mme R. et mieux préparée à la période de régresion qui auit les fêtes de Paquea; cette période est plus courte que la première, mais plus violente en ce sens que Monique est ouvertement agressive, opposante et énurétique. Cependant, la veille de partir huit joura en Bretagne avec toute la famille R., Monique se resaisit, et pendant tout le voyage, a un comportement tout a fait normal. Elle ne mouille pas une seule fois son lit. Plusieurs personnes la prennent pour la ille de Mme R., elle ne rectife pas et sourit à Mme R, loraqu’on trouve qu’elle lui ressemble. Dans les jours qui suivent, Monique déclare que plus tard elle veut épouser le fils ainé de Mme R., lui demande la permission de l’appeler « maman » et, comme Mme R. tente de la persuader que c’est une idée saugrenue, qu’elle n’a qu’une maman, quo cette appellation ne modiferait en rien leurs relationa mais rigquerait de peiner celle-ci. Monique rétorque qu’elle se gardera bien de le faire devant sa propre mère: Mme R. reste cependant sur ses positions et Monique déclare que dans ces conditions elle ne l’appellera plus du tout, Par la suite, cependant, elle lui dira « maman » chaque fois qu’elle se trouve auprès d’elle et elle risque ensuite « papa » de loin, ne se trompant jamais cependant devant ges parents. Durant cette période, son travail en classe est beaucoup moins bon. Peu à peu, du reste, le comportement de Monique et son travail en classe ge normalisent à nouveau. Dans sa famille d’accuell, elle évolue de plus en plus favorablement, devenant même expansive et très affectueuse avec les R. Les périodes de régression aont de plus en plus courtes après les visites de sa mère. Son énurésie disparait complêtement pendant un mois mais elle réapparait le jour où M. R. fait une mise au point avec elle sur le mode de leurs relationa car il remarque en effet que Monique ne l’aborde pas directement et lui crie toujours « bon¬ jour » ou « bonsoir » lorsqu’ils sont loignés l’un de l’autre. Quelques jours avant son départ en colonie de vacances, loragu’elle ge trouve geule avec Mme R., elle lui confe qu’elle pense gouvent à « son malheur d’avoir des parente sépare 2: puis elle gjoute qu’elle est moins malheureuse que d’autres parce qu’elle « l’a ». L’évolution de ce cas est instructive à plusieurs égards. a) L’enfant s’est montrée d’abord anxieuse et très culpabilisee à l’égard des affects positifs qu’elle éprouvait à l’égard de sa nourrice, fuvant tout contact et se réfugiant dans la lecture et le travail scolaire, s’identifiant ainsi plus que jamais à sa mère. Peu à peu, à travers maints aléas, le comporte¬ ment se modife dans le sens d’une meilleure acceptation de sa nouvelle situation. C’est la phase où elle appelle sa nourrice « tatie » et où elle g’épa¬ nouit peu à peu. Elle conserve néanmoins les même positions à propos des images parentales : elle ne veut pas être plus tard l’egclave d’un « bonhomme » qui la battra et sa réussite scolaire est le gage d’un avenir qui lui évitera une telle situation. b) Les progrès dans le sens d’un épanouiasement spectaculaire ge pré¬ cisent dans un second temps, en même temps que ses attitudes sur le plan œdipien se modifient de façon sensible. La peur qu’elle éprouvait en présence de son père disparait peu à peu, elle ébauche même, mais cette fois avec son père nourricier, un rapprochement à la fois érotisé et culpabilisé (un soir mouille à nouveau son lit lorsque celui-ci a fait la remarque que pour éviter de l’embrasser elle n’accepte de lui dire bonsoir que de loin). Elle appelle maintenant sa nourrice maman, participe de plus en plus à la vie du ménage et s’intéresse moins à la scolarité. Ainsi, Monique qui g’était jusqu’alors identifiée à sa mère avec les mêmes positions masochistes, les mêmes compen¬ sations intellectuelles et le même rejet de la gent masculine, a fait l’expérience 70 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES d’un ménage uni, avec une mère de famille épanouje, lui permettant peu à peu d’assumer des positions œdipiennes dynamisantes. e) La sécurité qu'elle éprouve dans ce nouveau cadre l’amène enfin. comme elle l’exprime elle-même remarquablement, à mieux supporter la dissociation familiale. De tels processus, même s’ile ne gont pas toujoura augi directement compréhensibles que dans cet exemple, se reproduisent dans de nombreux cas. Les enfants font l’expérience d’un autre style de vie, d’un autre mode de relations interpersonnelles, d’une autre « Weltanschauung » permettant l’assouplissement du surmoi, la dédramatisation de leurs difficultés, ofrant des possibilités d’identification à dee images parentales autres que celleg connues jusqu’alors, trop souvent anxiogènes, ouvrant aingi la voie à un réajustement des positions caractérielles, Parfois, cependant, les images parentales réelles, surtout quand elles sont pathogènes, rendent beaucoup plus difficile la résolution du conflit œdipien, l’enfant demeurant en effet encore trop souvent profondément imprégné par elles. Même alors les parents nourriciers exercent une influence bénéfique même gi celle-ci s’avère impar¬ faite ou partielle. Ele leur offre en tout cas la possibilité d’éprouver : C) L'assurance d'une sécurité affective permettant aux enfants de prendre appui sur les parents nourriciers pour dépasser leurs positions caractérielles ou netrotiques hatituelles. Il s’agit là du troisième aspect dynamique essentiel d’un tel placement, comme l’illustre l’exemple suivant : Pierre F, né le 12-10-1948, est entré au centre d’obgervation le 10 aeptembre 1957 pour d’importanta troubles affectifa avec organisation rigide du caractre, présentant certains aspects du type paranotaque, troubles ancieng liéa à un confit mère-6la remontant à ges pre¬ mières années. Un séjour de treize mois au coura duquel une paychothérapie a été pratiquée a permie une évolution d’engemble favorable, laisgant cependant subaister des eléments paranolaques importante : rigidité, gentiment de pergécution, hyperorganigation avec ten¬ dance à un certain degpotigme. Seule, la solution d’un placement familial du centre permettait de pourauivre l’action entreprise tant auprès de l’enfant que de la mère qui prégente à l’égard de celui-ci upe attitude de rejet, d’ailleurs très culpabilisé, qui est demeurée inébranlable an cours de cette période. Pierre F, a éte placé chez Mme D., veuve de 59 ans, de type pyenique, mre de famille de gix enfanta, tous bien équilibrés et adaptés, elle-même très solide gur le plan affectif, à la fois patiente et généreuge, vivant dans un pavillon amenagé avec go6t, avec l’un de ges fils, âgé de 30 ans, gerdant d’importantes géquelles d’une poliomvélite ancienne. D’emblée l’epfant ge révMle attachant, prévenant avec la nourrice et acceasible au raisonnement,. I noue rapidement de bonnes relations avec M. D. mais il demeure malgré tout sur la réserve dans son comportement, avec un sommeil agité et des cauchemarg. Peu à peu cependant, il devient démonstratif. Mme D, raconte que « Pierre ne gait pas embrager, maie qu’elle le lui apprend ». Il semble faire pour la première foits l'’expérience d’une relation poaitive avec un personnage maternel. Son travail acolaire n’eet pas brillant : il participe peu à la clagge. est toujours réveur. Il lui arrive de raconter à ea pourrice lea conflita qui l’ont toujoure oppoae à sa mère, à l’égard de laquelle il ge montre très agreaif Mme D), gur noa congcils, répond par une attitude neutre malgré son déaccord gur les méthodes éducntives de Mme F. Celle-ci rend visite à gon fils de temps en temps ou le recoit chez elle durant quelques jourg à l’occagion des vacances. Ces contacte tant̂t ge pansent ans incident notable, tantôt dégénèrent en conflits aigus au cours degquels la m̂re de Pierre redevient trs agregaive à l’égard de clui-6i fait de nombreux camarades. ET SOCALES EN PSCHIATRIE INFANTLE 3 ou charge injustement le nourrice, l’accusant par exemple d’adopter une attitude trop faible avec lui ou de le monter contre elle. Chacune de ces acènes laiese l’enfant désemparé et anxieux. Un début d’amélioration aur le plan scolaire ge révèle sans lendemain. Chaque fois, cependant, au décours de telles acènes, la nourrice rassure l’enfant, lui dit qu’il ne la quitera pas et qu’elle l’aime beaucoup. Elle s’efforce même de dépager ses première réactions de col̀re à l’égard de Mme F., garde des relations distantes mais polies avec elle, lui envoie môme ges vœux à l’ocasion du nouvel an, après lui avoir fait des excusex. L’agistante sociale, de pon ct́. parvient peu à peu à dédramatiser le gituation. Les deux femmes renouent alon à nouveau durant quelques mois de meilleures relations. Durant cette période, l’enfant fait d’importanta progrès, s’́panouit de plus en plue; son caractre s’asouplit beaucoup : il ge confie à la nour¬ rice chaque fois qu’il se trouve en difficulté, lui parle gouvent de gon pasé et de ses condits avec sa mère, révélant à cette occasion une compréhension de la gituation et une mémoire étonnantes. Il s’entend parfaitement avec M. D). avec lequel il bricole et diacute jardin et mécanique. Un nouveau confit aigu surviendra par la quite; la mère erévêle anouveau d’ane agreg¬ aivité dramatique à l’égard de son fils, lui reprochant notamment, à propos d’un détail mal interprêté par elle, de vouloir la brouiller avec toute ga famille. Cette fois, Pierre supporte le situation aussi bien que posaible; ilrépond à a m̀re calmement, gane agreaivite. Deretoul ensuite chez sa nourrice, il ne manifeste aucun des gignes d’anxiété ni aucune des réactions paranolaques qui lui étaient habituels après de telles acènes, et analyae la aitustion avec une lucidité étonnante, trouve qu’il est tra dificile de diacuter avec aa mre, car « elle n’éconte pas et elle guit sa petite idée. Pour que les choges aillent mieux entre eux, il faudrait en avoit envie et lle n’en à pas envie. Etant donné le caractère de celle-ci, il préfère être placé, mais il aime quand même bien la voir ». Illui arive maintenant d’établir souvent dea comparaison entre les habitudes et les activités de sa nourrice et celles de sa mère pour les conaidérer tantôt comme identiques, tantôt comme divergentes, mais de facon maintenant détendue et amusée. comme l’y encourage d’ailleurs la nourrice. De plus en plus son comportement se trangforme. Iln’a plus aucune dearéactions abruptes ou violentes qu’il prégentait dans le paae Àla moindre dificulté, son sommeil est calme, ges résultats acolaires sont excellents et devraient luiper¬ mettre d’entrer bientôt en cours complémentaire. Il n’est plus du tout rèveur et isolé et s’est On voit ici comment les relations nouées entre l’enfant et la nourrice lui ont permis de s’épanouir peu à peu, puis, en prenant appui sur la sécurité et l’affection qui lui étaient ainsi assurées, de progressivement mieux supporter l’attitude pathologiquement agressive de sa mère. Le riaque était grand de voir alors l’enfant utiliser la nourrice contre cette dernière et d’aggraver encore leurs relations jusqu’alors vécues sur le geul mode paranoiaque. Pourtant, grâce notamment au sang-froid et à la compréhension de la nourrice. très soutenue dans cette tâche par l’assistante sociale, l’enfant ge révèle peu à peu en mesure de mieux accepter sa mère telle qu’elle est, aidé encore dans cette évolution par l’interpénétration des deux images maternelles qui semble s’établir dans son esprit et que la nourrice, là encore, favorise intelli¬ gemment, de sorte que le personnage maternel authentique participe à son tour à la modification de ses relations avec les adultes en général et les femmes en particulier. Les cas où une situation analogue se présente, c’est-à-dire avec graves confits déjà très structurés entre l’enfant et sa famille réelle, ne revétent pas tous une évolution aussi favorable. La solidité des liens établie avec la famille d’accueil, les progrès qu’ils permettent, ofrent cependant aux enfants même si les confits avec leurs parents demeurent identiques, une issue à une 72 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES, gituation jusqu’alors insoluble, Tout se passe comme si, les structures parho¬ logiques non modifables persistant sous-jacentes, une amélioration sympto¬ matique parfois considérable se manifestait néanmoins jusqu’à ce que l’enfant parvenu à l’adolescence, devienne alors moins vulnérable à cette situation pathogène qu’il ne l’était jusqu’alors. D) Le dépassement du cercle vicieux agressiuité: contre-agresivité- culpa¬ bilité-agresstvte aans fesquet peaucoup d’entants demeuraient enfermés, constitue un autre facteur-clé de progrès. Bien que non spécifque à la situation du place¬ ment familial puisqu’en principe la règle dans tout milieu médico-pédagogique averti, le fait de répondre à l’agressivité de l’enfant par une attitude calme ou ferme sans aucun élément de rejet conscient ou inconscient peut être à l’origine d’un tournant décisif de son évolution. Jacques, âgé de II ans prégente une structure prépsychotique avec anxiété, excitation hypomaniaque alternant ave des périodes de dépression, recherche des contacta sans pou¬ voir les accepter, conduites fréquemment régresives et autopunitives avec mécanisme d’échec qu’un séjour de 14 mois au Centre d’observation n’a guère modifées, malgré une ten¬ tative de psychothérapie. Envoyé en placement familial du fait des risques de délinquance que sa guggestibilité fait craindre, après une première phase de progrès dans un milieu bien¬ veillant, multipliant pour lui centres d’intérêt et témoignages d’affection, il redevient très difile, instable, anxieux, oppogant, accumulant les confits, essavant manifestement de gusciter autour de lui exaspération et lassitude, demandant même à retourner au Centre. Noue lui montrons alors que bien qu’il lui ait été impossible jusqu’alors de vivre aucune rela¬ tion affective autrement que comme un rejet ou un échec il n’en est plus de même maintenant. la tolérance et la compréhengion du milieu d’accueil acceptant en effet de poursuivre l’expé¬ rience, malgré les dificultés, lui démontrant mieux que tout autre argument qu’il peut être aimé en dépit de son conbortement. Jacques, depuis lorg, ne parle plus de depart et parvient même Aréaliger durant certaines périodes d’importanta progrès, trop souvent remis en question par son extrême fragilité et l’infuence pathologique d’une mère paychopathe aux propos et aux réactions contradistoires ou incohérents. Le pronostie reate régervé, mais la certitude que l’enfant prouve d’une sécurité affec¬ tive réelle non démentie au cours d’un aéjour de deux ans, l'’autorité et la fermeté dépourvues de toute bostilitédu chef de la famille d’accueil lui permettent, en dépit de sa suggestibilité et de sges tendances constantes à agir son anxiété, de trouver pour la première fois un cadre à la foias aolide et bienveillant auquel il gemble peu à peu s’acrocher. On retrouve dans de nombreux cas de telles phases critiques, où l’enfant met en quelque sorte son milieu à l’épreuve. Si, spontanément, ou après inter¬ vention de l’équipe médico-sociale, la famille nourricière ne répond pas à cette tentative par des contre-attitudes agressives ou de rejet, une étape par¬ fois décisive se trouve franchie, amenant la rupture du cercle vicieux dans lequel l’enfant se trouvait jusqu’alors enfermé. Tele apparaissent les princinaux facteurs permettant soit d’importantes améliorations symptomatiques, soit de véritables remaniements structuraux, 73 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE les défenses névrotiques ou caractérielles faisant place à des mécanismes de défense sensiblement plus souples et mieux adaptés. Mais cette étude serait incomplête si elle n’abordait pas les causes des échecs du placement familial, correspondant statistiquement à environ up cinquième des cas. Parfois — mais il s’agit là d’une éventualité de plus en plus rare à mesure que les familles sont mieux sélectionnées — l’expérience échoue du fait de l’attitude maladroite ou de l’intolérance du milieu d’accueil. Parfois, c’est la famille naturelle qui parait à l’origine de dificultés insur¬ montables, non pas tant du fait d’une non-coopération ou d’une obstruction systématiduc (1) que de la persistance des attitudes pathogènes à l’origine des difficultés de l’enfant ou de réactions d’hostilité plus ou moins conscientes à l’égard des familles d’accueil. Celles-ci en effet peuvent être ressenties comme des rivales ou, situation plus dificile encore parfois à supporter, mettent trop évidemment en relief par leur réussite l’échec des parents. Ce sont là pourtant difficultés banales auxquelles l’équipe médico-sociale est amenée. très fréquemment, à faire face sans que pour autant l’évolution positive de la plupart des cas s’en trouve entravée. Une telle explication parait donc pour le moins insufisante. L’hypothèse suivant laquelle certains types de troubles ou certaines situations pathogènes particulières pourraient être à l’origine de ces échecs se révèle tout aussi décevante, la catégorie de ces derniers englobant les tableaux cliniques et les modalités conffictuelles les plus divers. On retrouve cependant un dénominateur commun à cet ensemble de cas. Tous en effet persistent à vivre leur séjour dans leur famille d’accueil comme une modalité apparemment nouvelle mais en réalité identique de situation de frustration ou d’abandon de la part de leurs véritables parents, avec, pour corollaire, leur incapacité aux investissements substitutife indispensables. comme cette étude l’a démontré, à tout progrès. Il est vrai que même dans les cas les plus favorables, les confits ou frustrations antérieurs ou placement laissent, comme le révèlent les thèmes des paychothérapies entreprises chez certains enfants du placement familial, des traces conscientes ou inconscientes gouvent indélébiles. Force est donc de reconnaitre que, pour des raisons qui nous échappent encore, facteurs constitutionnels ou qualités particulières des liens noués entre l’enfant et sa famille, peut-être structurés déjà à un stade archaique dans le sens d’une revendication affective perpétuellement insatisfaite quels que soient les apports ultérieurs, toute tentative visant à eurmonter leurs frustrations ou leurs confits demeurera dans de tels cae vouée à l’échec. Si l’objectif de cette étude met particulièrement en valeur le rôle capital du milieu d’accueil, le placement familial n’est pas simplement un placement dans une famille. Il s’insère dans une situation et un mouvement dont l’origine. le déroulement et l’épilogue dépassent singulièrement son cadre apparent. (1) Les placements familiaux ne doivent être réaliafs qu’avec l’acceptation, au moina de principe, d’une telle solution de la part des familles légales, après qu’elles aient été doment rengeignées sur leur but et leur fonctionnement. 7 MÉTHODES PSTCLOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES Son articulation avec un centre ou un organisme de soins aur lequel il ge greffe se révèle en effet indispensable. C’est ainsi que, dans le cas par exemple du centre d’observation de Vitry, un séjour de plusieurs mois dans ce dernier permet déjà un certain déconditionnement et l’expérience d’unc attitude nouvelle de la part des adultes. Chaque enfant d’autre part sait que c’est par l’intermédiaire du centre qu’il se trouve placé et que l’équipe médico¬ sociale et pédagogique à laquelle il a désormais affaire est directement rattachée à celui-ci. Il sait aussi que c’est par cette équipe qu’il se trouve suivi, et au besoin protégé, de façon vigilante ausi bien auprès de ga nourice que de ga famille ou du milieu scolaire et de loisirs, qu’un recours demeure possible au cas où sa famille d’accueil se montrerait défaillante, qu’une solution aussi satisfaisante que possible sera trouvée à la fin de son séjour et que même ensuite une aide sans discontinuité lui demeure assurée, Par les liens qu’il établit en outre avec d’autres enfants du placement familial, que certaines activités communes et la relative concentration des familles d’accueil dans le même espace favorisent, il se sent membre d’une communauté, dont chacun devient au besoin solidaire de l’autre et connait une situation sembla¬ ble, avec des points d’attache communs, les mêmes modes de relation avec les mêmes adultes membres de l’équipe qui leur montrent la même attitude bienveillante que celle qu’ils avaient connue au Centre. C’est en tous ces éléments que réside l’originalité de ce type de placement familial, indispensable à notre sens à la réussite d’une telle expérience. Sans vouloir sous-estimer le rôle capital des familles d’accueil, leur réussite serait gouvent impossible sans le déconditionnement et la connaissance de chaque cas que permet son séjour antérieur au centre, et la sécurité éprouvée tant par les nourrices que par les enfants, les uns et les autres se sachant assurés, en cas de difficultés, du soutien, voire de l’intervention active de l’équipe médico-sociale et pédagogique. On peut d’ailleurs se demander quel rôle respectif ont pu jouer les difé¬ rents personnages (parents nourriciers et leurs enfants, assistante gociale. médecin, rééducatrice) que l’enfant a ainsi connus de près et sur lesquels il s’est appuvé durant plusieurs années, et quelle place ils tiennent par rapport à celle de ses propres parents dans la topographie fnale de ses imago et de ses identifications. Le recul manque encore pour y répondre de façon satisfaisante. En outre chaque cas semble différent étant fonction notamment de la plus ou moins grande gravité des confits avec les personnages parentaux réels, du degré de profondeur des liens établis avec la famille nourricière, de l’importance qu’ont pu avoir les interventions de l’assistance sociale dans les difficultés de l’enfant et du rôle qu’elle n’a pas pu ne pas jouer lorsque celles-ci se révélaient essentielles soit au cours de son séjour, soit quand elle déterminait son avenir. Il semblerait que, lorsque le milieu familial légal est insuffsant ou inexie¬ tant, ce soit surtout les parents nourriciers qui contribuent à la formation de l’objet intérieur de l’enfant, Par contre, quand les liens avec les parents réels demeurent solides et sans conflits majeurs en dépit des difficultés avant motivé le placement (par exemple mère débordée par des problèmes maté¬ riels, décès d’un des conjoints, etc.) l’induence de ces derniers demeure 73 ET SOCALES EN PSYCHLATRE INPANTILE prééminente, les parents nourriciers jouant néanmoins un rôle pogitif en congolidant ou en enrichissant l’image introjectée des personnages parentaux. Enfin, lorsqu’existent d’importante confits avec les parents réels, l’asais¬ tante sociale ou le médecin de par l’attitude que l’un ou l’autre se trouve alors nécessairement amené à adopter, se verrait revétir dans l’esprit de l’enfant la fonction d’instance protectrice maieure, au mêmie titre en certains cas que les parents nourriciers. La propension de certains enfants à confier électivement à l’asistante sociale leurs dificultés ou à solliciter son aide. l’intérêt qu’ils portent parfois à son personnage et à sa vie, les relations épistolaires qu’ils entretiennent avec elle durant leurs vacances ou longtemps après leur séjour, constituent autant d’indices afhrmant son rôle d’image maternelle auxiliaire, avant sa part dans le processus du renforcement du moi des enfants et, chez les filles, l’élargissement du champ de leurs identifi¬ cations (1). Dans de tels cas, le besoin d’imago est tel que le caractère poaitif de chacun de ces personnages est appréhendé avec avidité, ce qui permet un éloignement, une neutralisation progressive des objets internes primitifs angoigsants. Un schéma souffre maintes variantes ou exceptions et, ne recouvre pas stricto sensu la réalité complexe de chacun des cas, à propos degquela l’in¬ fuence, réciproque des différents personnages varie gelon leur personnalité propre et les problèmes spécifiques de chaque enfant. Il n’est fourni qu’à titre d’hypothèse, fondé sur une impression d’ensemble, dont seule l’étude approfondie des cas les plus significatife d’une plus longue expérience per¬ mettra d’évaluer le bien fondé. En dépit de certaina échecs, une telle expérience se révle donc dana l’ensemble extrêmement encourageante. Elle démontre le rôle fondamental du déconditionnement et la valeur structurante des relations interhumaines nouvelles dans un cadre de structure familiale, souvent le plus apte à favoriger le comblement des besoins affectifs jusqu’alora insatisfaits, l’aceptation progressive d’une autorité rendant sans objet les attitudes sadomasochistes où l’enfant se trouvait jusqu’alore enfermé, la possibilité enfin d’aborder et de résoudre le conffit œedipien dans des conditions infiniment plus favorables. Si un tel bilan incite à promouvoir sur une plus vaste échelle ce type de solution pour certaines catégories d’enfants perturbég, il ne doit pas faire perdre de vue cependant la nécessité pour sa réuggite d’un centre gpécialisé permettant l’observation et le déconditionnement préalable des enfants. étroitement articulé à une équipe médico-sociale et pédagogique qualifiée. suivant chaque cas de très près dans ses différents milieux de vie, prête à (1) Le travail en équipe doit petmettre aux digf́renta membrea de celle-ci de prendra conacience aggez tot de certaines contre-attitudes congistant, par exemple, devant les réac¬ tiona violemment agreasives ou réjectrices de certaines mères, à ’identiffer par trop à l’enfant. A agreger la mauvaise mère, à laisger vibrer à l’excès la fibre maternelle. Il'est done important que chaque membre de l’équipe comprenne et contrôle ges affects ainai mobiligés gous peine de ge trouver par trop impliqué dang une gituation qui rigque d’être exploitée par les enfants. les nourices ou les prenta eux-memes et qu’il ne pourra plus mapier ni dépagser. Ceci emble confirmer à quel point il exiete sur le plan tant congcient qu’inconscient des échanges et des liens affectife puigants entre l’enfant et les membre de l’équipe d’un placement familial. notamment les assistante cociales. 76 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PEDAGOGIQUES intervenir aussi souvent que nécessaire, puis à l’orienter et le guider, forte de la connaissance qu’elle en a et des liens établis avec lui et sa famille d’accueil. bien au-delà de la période oficielle de séjour. C’est dans la megure où il ge trouve intégré dans cet ensemble que ce type de placement familial peut se prévaloir d’être thérapeutique. CHAPITRE IY MÉTHODES PSYCHOPÉDAGOGIQUES A. PSYCHOPÉDAGOGIE DES GRQUPES Plus que la description et le bilan global d’une expérience, nous nous sommes eforcés ici de tenter une ébauche de formalisation d’un ensemble de faits qui constituent la trame quotidienne du travail d’un éducateur. Nous avons voulu, par la, essaver de préciser la spécialité de l’éducateur chargé de groupe. L’accent sera donc mis sur des fonctions, des rôles, des méthodes et des techniques. Cette étude en paraitra un peu aride, d’autant plus que, pour ne pas trop l’alourdir, nous n’avons donné qu’un minimum d’exemples concrets : nous renvovons aux publications (signalées dans la bibliographie) sur des sujets précis, cas ou groupe d’enfants en particulier. Nous nous sommes heurtés à deux séries maieures de dificultés : — l’extraordinaire complexité d’une-réalité vecue, en perpétuel mouvement où chacun évolue dans de multiples réseaux de relations : l’enfant, le groupe, ses éducateurs, les autres techniciens, avec, en plus, le rythme plus ou moins important selon le type d’établisements, des renouvelle¬ ments d’efectifs. Pour la commodité de l’exposé nous avons donc été obligés d’isoler et de découper arbitrairement des ensemble en étroite interaction. Cette nécessité permettra de comprendre certains renvois ou redites : — l’absence quasi totale de travaux sur ce qu’on pourrait appeler la pédago¬ gie clinique 1221. Il sortirait de notre propos d’examiner les cauges du peu de communication entre pratique pédagogique et psychologie. Mais pour rendre compte de façon cohérente de certains faits observés nous avons dù faire appel à un minimum de notions psychologiques, relevant surtout de deux domaines voigins : — la paychologie des relations (paychanalyee en particulier) : — la paychologie de groupe (dynamique de groupe notamment) : Resterait à examiner en détail la validité de cet emprunt : disons gimple¬ ment qu’il ne s’agit pas d’un plaquage artificiel car : quences de leurs actes. 78 MéTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGLQUES — ces notions ne sont données que comme hypothèses de travail : — certains faits observée ici se recoupent (sans se recouvrir exactement) avec d’autres faite observés par ces mêmes disciplines : depuis plusieurs années, ces disciplines ont plus ou moins informé (au sens de modèle) certains aspects du travail dans quelques centres. Au delà de cet effort de formalisation, nous nous sommes attachés à restructurer, dans une perspective nouvelle, les différents aspects du travait de l’éducateur de groupe. Nous étudierons notamment les méthodes, les techniques et les situations psychopédagogiques, l’observation, pour teminer par quelques remarques concernant le perfectionnement de l’éducateur. Une régerve d’importance : nous manquons de recherches précises sur lu plupart des pointe examinés plug loin. Les faite rapportés sont les plus marquants par leur firéquence ou les plus gignificatifs par ce qu’ils indiquent. Maia gouvent, ile devraient être approfondis et différenciés selon de multiples variables : âge, gexe et troubles tout particulièrement. Nous ne saurions donc trop souligner que chaque partie de cette étude demanderait de plus longs développements et que beaucoup d’aspects traités ici soulèvent davantage de problèmes qu’ils n’en résolvent. En général, les enfants d’un établissement sont répartis dans des groupes. Au Centre d’observation de Vitry, on dénombre 6 groupes de 14 enfants (12 pour les plus petits), par âges chronologiques : 4 de garcons, 2 de filles. Chaque groupe se trouve sous la responsabilité d’un éducateur et d’une éducatrice. travaillant, selon les jours et les activités, partie simultanément, partie à tour de rôle. Réfectire collectif mis à part, la structure architecturale de ce centre est pavillonnaire. Disona d’abord quelques mots au sujet du comportement de ce type d’enfants. Il ne s’agit paa de reprendre la classifcation déjà établie IIl en fonction du niveau de profondeur des troubles, qui peuvent aller, avec ou gans problème organique, des difficultés réactionnelles assez simples jusqu’aux atteintes graves de la personnalité. Mais sans décrire en détail les grands types de conduites observables au niveau de la vie quotidienne, nous donne¬ rons quelques caractéristiques destinées à mieux les situer. La plupart des enfants ont souffert d’un « abandon » réel ou imaginaire de la mère : cet abandon est vécu plus ou moins intensément selon les cag. Il s’ensuit qu’ils présentent presque tous un seuil très bas de résistance aux frustrations, avec : — Agresaivité : dissociabilité faclle à déclencher, dificulté d’adaptation à la vie de groupe, (ils supportent mal les autres, « passages à l’acte » fréquentg et parfois très violents). Mauvaige appréciation de la réalité (désorientation sur le plan social, affectif spatial, et surtout temporel). Ils vivent dans l’immédiat, oublient vite le pasgé, gurtout désagréable, imaginent mal le futur et les congé¬ 2 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INTANTILE 79 Ils souffrent d’une anxiété latente, avec refua du nouveau, du change¬ ment, de l’échec, les moyens employés ne pouvant atteindre leur but. Ils présentent un manque flagrant de réalisme, une mauvaise adaptation aux gituatione nouvelles. - Revendication affective: leur exigence augmente avec la "gentillesse" de l’adulte, ils veulent tout (pour eux seuls) et tout de suite. — Personnalité infantile (moi plus ou moina faible) avec immaturité, insta¬ bilité des intérêts, comportements égocentriques, attitudes régresives. Ces remarques s’inspirent d’études de Fritz Redl1341 1681. Mais ilva sana dire qu’il ne s’agit que d’une énumération absolument non limitative : dans la réalité, toutes les combinaisons et toutes les nuances sont posibles gelon les cas (types et niveaux des troubles, âge, gexe, histoire). L. ÉVOLUTION DES MÉTHODES PSYCHOPÉDAGOGIQUES Nous ne pouvong retracer ici l’higtoire des expériences qui pourtant permettraient de mieux comprendre l’évolution des méthodes (1), et partant des techniques. Maig, au Centre de Vitry, on peut dire qu’elle a été étroitement hée : — à la nature des caa : — à la formation technique toujours plus poussée de tout le personnel : — A l’apprentissage d’un travail, devenu dans les faits, vraiment « d’équipe p — à des conditions de vie acceptables, permettant d’assurer une honne stabilité du personnel (2): — à un rythme très progressif et de plus en plus espacé de renouvellement du personnel : une sorte de sélection s’est opérée d’elle-même : sont resté les éducateurs « attirés » par le genre de travail particulier effectué. a) La période maison d’entants. En voici quelques traits principaux : — Introduction des méthodes d’éducation active sur le plan pédagogique. En particulier, activitée dirigées les plus diverges : — Structure hiérarchique assez rigide avec relations surtout verticales : peu de communication entre les moniteurs, encore moins entre les gervices : (1) Nous distinguerons méthodes: règles et plans de travail en fonction d'un projet, et techniques : procédés opératoires bien définis, transmissibles, adaptés au genre de pro¬ blèmes et de phénomencs en cauae. (2) L’ancienneté actuelle des éducateurs, au Centre d’Obaervation de Vitry, est de 8 ane en moyenne. Elle s’étage de 3 à 13 ans. Ces chifres sont à majorer si l’on tient compte de l’ancienneté dans le métier. permanente ; notons entre autres : MÉTHODES PSYCLOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 9 Atmosphère directive, à tous les niveaux, entre la direction et les moniteurs, entre ces derniers et les enfants : Méthode pédagogique essentiellement collective : axée sur le groupe er tant que tel ou sur tous les groupes pris comme ensemble : Le moniteur est quelqu’un qui sait s’occuper des enfants et les occuper par des activités précises. C’est l’époque du moniteur-ouvrier par opposi¬ tion à l’éducateur-intellectuel (sortant d’une école d’éducateurs). Le moniteur doit être capable d’observer l’enfant tel qu’il est. Sa fche d’observation comportait ces « directives » : « Le but de l’observation est double : d’abord constater et décrire, photographier le comportement de l’enfant, ensuite, dans la mesure du possible, le rattacher à ses causes, lui donner une signification, ». Il s’agissait moins d’observer une évolution ou des possibilités d’évolution que de fixer en des constats le maximum de traits relevés chez un enfant. La fiche, très analytique, comprenait 50 grandes rubriques (stabilité, irritabilité, activité, affectivité, opposition, obéissance, adaptation au réel, infériorité, jalousie, sentiment de culpabilité, vol, cauche¬ mar.) subdiviséos en plus de 170 sous-rubriques. Cet ensemble de traits, par leur accumulation et parce qu’ils n’étaient ni organisés, ni hiérarchisés, ne donnait pas de vue claire et cohérente du comportement de l’enfant. Malgre ces deux défauts, cette fiche a eu le mérite d’être le premier essai conséquent en ce gens, de commencer à familiariser les moniteurs avec un minimum de vocabulaire, technique, et de leur apprendre à préciser et à analyser leure descriptions. Elle a donc permis en définitive de passer à un autre stade plus élaboré, permettant de mieux cerner la réalité. Peu à peu cette fiche est devenue, de plan qu’elle était, un guide, puis un simple aide-mémoire. Les éducateurs ont commencé à regrouper leurs observations en fonction des situations vécues par l’enfant, tout en essavant de rattacher son comportement à des causes. Puis a commencé à se dégager peu à peu la notion que l’on obger¬ vait essentiellement une évolution des comportements. A la tête de quelques groupes, on trouve un moniteur et une monitrice. mais leurs rôles sont peu différenciés. Ils ont surtout le souci de la discipline de leur groupe (ordre, tenue, activités, etc.) et d’amener chacun à l’accepter. L’accent est mis davantage sur l’adaptation sociale dans le groupe que sur les problemes personnels. A part quelques exceptions, les manifestations de l’enfant qui posent le plus de problèmes, sont done celles d’indiscipline: « Les écarts du comportement (fâneries, lenteur dans l’exécution des tches quoti¬ diennes, fantaigies de toute espèce) risquent de compromettre l’ordre de la maison et d’empé¬ cher toute action concertée du personnel éducatif. On en arrive à ce régultat pourtant para¬ doxal que la maison d’enfants est un milieu souvent moins tolérant aux troubles caractériels que le milieu familial, même médiocre ». a-t-on écrit des maisons d’enfants de cette époque 1321. Ces écarts apparaissent comme relativement peu nombreux ou peu intenses grâce à un climat actif et détendu allant de pair avec une pédagogie plutôt directive. Ce climat général est cré par un style colonie de vacances ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 91 — une participation active des enfants à la marche de la maison : réunion de délégués de groupe où des projets sont étudiés, des critiques entendues. rappel congtant que l’établissement est la propriété des enfants et qu’ils doivent le respecter pour tous : — des activités présentées et menées de facon vivante : — un embllisement du cadre matériel (décoration par exemple) : — un souci des besoins de l’enfant dans les menus faita de la vie quotidienne. Aprèe étude des diverges tendances pédagogiques des institutions. Mulock Houwer 135l les a classées en 6 svestèmes principaux : 1° Disciplinaire : correctif autoritaire, classique : 29 Progregsif : l’enfant passe dans un cadre plus libre e’il a un compor¬ tement satisfaisant. 39 Individuel : atmosphère thérapeutique mais centrée uniquement sur l’enfant. 4° Socio-pédagogique : self-goyernment, auto-organigation, importance du travail et de la collaboration. 5° Anthropologique : pédaģogie basée sur les types d’enfantes. 60 Eclectique : chaque enfant est aidé selon ges besoins et selon le trai¬ tement qu’il requiert. Cette première période parait se rapprocher du système socio-pédagogique. Les avantages en sont évidents mais il nous parait convenirplutôt à des enfants peu perturbés. Avec des enfants gravement atteints on court le danger de plaquages artifciels, de pacudo-adaptations, favorisant l'’estompage de certains symptômes au détriment d’une véritable réduction des troubles réels. L’accent est mis davantage sur la réinsertion sociale que sur l’épanouis¬ gement de la personnalité. Mais compte tenu, gurtout, du niveau des éduca¬ teurs et de leur profession à l’époque, certains aspects de cette expérience pédagogique ont été très positifs et ont fourni la base indispensable sur laquelle ont pu se développer par la suite des techniques plus approfondies. b) La période actuelle. 1. Dbuts. Certaing changemente dans les cadres provoquèrent, plus ou moins en réaction, des modifications importantes : — Une atmosphère générale plus libérale permet les tentatives pédagogiques les plus diverses : — L’attrait un peu mystérieux d’une expérience de paychothérapie de groupe (Méthode Slayson), des connaissances plus ou moins th́oriques encore mal assimilées, un désir de progrès à tout prix, tendent à promou¬ voir une méthode pédagogique tendant vers le laisser-faire, Parallèlement l’attention commence à se porter, mais de façon peu rationnelle, sur les cas particuliers. On enregistre des « carreaux cassés en série » et des « masgifs de feurs saccagés ».. MÉTLIODES DSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 82 Cette expérience Slayson qui n’a pu être continuée (nombreux passages à l’acte lors des géances, avec diffusion à l’extérieur provoquant chez les autres enfants des réactions en chaine difficilement contrôlables) a mis en évidence aux veux des éducateurs, par son côté très spectaculaire, le problème de la paychothérapie en général. Jusque la, les psychothérapies, individuelles ou de groupe, étaient considérées comme un domaine un peu magique et secret. sans lien avec la vie de tous les jours, où une personne, en quelques courts moments, prétendait faire plus que les éducateurs sur de longues périodes. Cette vue ge teintait d’un certain sentiment de frustration (le partage de l’affection de l’enfant, l’ignorance du processus paychothérapique) et d’une agresgivité plus ou moins sous-jacente se traduisant par des remarques désobligeantes et une opposition passive à certaines convocations pour les séances : la psychothérapie était percue comme fondamentalement contra¬ dictoire avec la rééducation. Curieusement, des critiques d’éducateurs rejoi¬ gnaient celles de certains psychothérapeutes (les remarques de ces derniers concernaient les psychothérapies individuelles, au contraire des psycho¬ thérapies de groupe qu’ils estimaient préférables en internat et étaient émises à propos de centres assez comparables). On soulignait les confits entre « lee tendances anti-sociales si souvent réveillées au début des paychothé¬ rapies individuelles et les nécessités de la vie en groupe » 1311. De même « la psychothérapie semble proposer à l’enfant une critique et une prise de conscience de ses dificultés dans la famille, la vie en internat est organisée. au contraire, en vue de l’adoption des normes idéales du groupe dans lequel l’enfant est placé » 13II. En bref, la psychothérapie, individuelle ou de groupe. était resentie comme menacante (et donnait donc lieu à des résistances) dans la mesure exacte où elle restait, volontairement ou non, et de part et d’autre, un domaihe ignoré et tabou. Cf. l’expérience décrite par B. Diat¬ Kine 1321. Par gon irruption masgive dans la vie quotidienne du centre l’expérience Slayson a eu le mérite de mettre en lumière ces contradictions et, par suite. de favoriger les critiques ouvertes des éducateurs., Plusieurs réunions eurent lieu où furent abordés des problèmes comme ceux du développement affectif et social de l’enfant, des techniques et du processus de la psychothérapie. des rapports de celle-ci et de la vie en groupe, dans l’obgervation et la réédu¬ cation. Toutes les questions furent loin d’être réglées et beaucoup d’aspects davantage compris intellectuellement que réellement admis. Mais ce fut l’amorce timide d’une compréhengion et d’une collaboration réciproques entre psychothérapeutes et éducateurs, à propos de leurs difficultés propres et surtout des interférences entre leur deux domaines. Ceci se traduisit par des problèmee de paychothérapie abordés en réunion de synthèse et par des échanges de plue en plus nombreux entre psychothérapeutes et éduca¬ teurs, Par la guite cette collaboration évoluera vers une complémentarité de plus en plus nette 117 biel. Contrairement aux observationa des auteurs cités 1311 1321, l’abandon progressif de la psychothérapie de groupe (autre que la méthode Slayson) facilita ce travail en réduisant la diffusion à l’extérieur de certains compor¬ tements trop perturbants pour la vie en collectivité. Les fiches d’observation deviennent davantage globalistes mais aussi ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 83 trop succinctes. On commence à rattacher l’engemble des domaines observés à deux grands pôles : les relationg avec les éducateurs et les relations dans le groupe. Mais, par manque d’habitude, sans guide maintenant, avec un vocabulaire technique peu au point et en voulant un peu trop interpréter, les observations manquent de précision et de clarté. nelles, très riches mais aussi un peu anarchique. C’est une brève période de recherches, d’esgais et d’initiatives person¬ Les éducateurs commencent à prendre conscience du fait : — qu’ils sont diff́rents de moniteurs de colonie de vacances ou d’étudiants en instance de « faire autre chose »: que, jugqu’à prégent, geule leur a gervi leur expérience de chef scout ou de moniteur de colonie: que, pour travaller efficacement, il faut approfondir ses méthodes et ses techniques et fonctionner en coopération avec les autres services: qu’ils font partie intégrante d’un établissement avec ses buts propres mais aussi d’une profession qui s’organige. Ils commencent ̀ se gentir solidaires des autres techniciens (et des autrea éducateurs sur un plan plus général) en faisant porter leurs efforts sur l’amé¬ lioration de leurs conditions de vie et de travail, elles-mêmes hases indie¬ pensables de leur perfectionnement professionnel. Cette action corporative (A N.E. J. J.) (1) et eyndicale, en favorisant la critique constructive, la pogsi¬ bilité de d’exprimer, l’intérêt et non la passivité, l’initiative et le sens de la respongabilité, malgré les heurts et les tengions inévitables, a développé l’autonomie et la maturité du personnel en tant que tel et transformé la qua¬ lité de participation de chacun au travail collectif. Sur le plan pédagogique, cette période rappelle le sygtème individuel. Il existe une coupure entre la vie de groupe et chaque enfant en tant que cag particulier, le groupe étant plus ou moins congidéré comme une gène et un frein dans l’action pédagogique sur l’enfant : « Le lien entre l’enfant et la gociété manque » 1351. Commence alors une longue période de tâtonnement qu’on ne peut congidérer, même maintenant, comme achevée. Cette progression a eu lieu soit par découvertes brusques (la sociométrie, par exemple) soit par un lent marissement (le déconditionnement, par exemple). Elle a été la résultante d’une étroite collaboration entre les éducateurs et les autres techniciens qui les ont aidés à dégager les lignes esentielles de leur travail par leur ensei¬ gnement, gur la base d’expériences vécues en commun. On peut en digtinguer deux aspects dont l’interprétation est demeurée longtempe théorique. — La gociométrie et quelques premières notions de paychologie sociale ont permis d’établir un lien entre le groupe et les individus qui le composent et d’étudier de façon plus cohérente leurs interrelations, d’en rendre (1) Asociation Netionale des Educateurg de Jennes Inadapté. 2 MÉTRODES PSYCLIOLOGIQUES, PÉDACOGIQUES 84 compte de manìre plus pŕcise (vocabulaire). Cet apport est resté asez longtemps sur le plan de l’observation, mis à part le gouci de mieux s’occuper des isolés et rejetéa. On commence à parler de déconditionnement. Ce terme ne fait que rappeler de très loin le conditionnement au sens paylovien : opération qui rend efficaco, pour la production d’un certain réfexe, un stimulus qui normalement ne l’est pas. Le conditionnement qu’il s’agit ici de démon¬ ter est plutôt la façon globale de réagir d’un organisme (l’enfant) à son milieu (son entourage), compte tenu de son histoire particulière. L’atti¬ tude déconditionnante consistera schématiquement, pour l’éducateur à adopter une attitude diff́rente de celle des parents, pour essaver de rompre chez l’enfant le cyele de comportement antérieur parents-enfant (par exemple : opposition-punition-rejet). Ceci se traduit surtout par une attitude générale plus permissive mais aggez indifférenciée quant à l’age, le sexe, le cas et selon qu’il s’agit d’un éducateur ou d’une éducatrice. Cet ensemble, peu explicite, est ressenti encore un certain temps, comme en contradiction avec la conduite du groupe. C’est sur ces bases plua précises qu’a été élaborée, peu à peu, empirique¬ ment, une méthode de travail plus cohérente. A partir du moment où un éducateur et une éducatrice ont travaillé ensemble en adoptant une attitude plus souple qu’auparavant et surtout plus réféchie, on a pu mettre en évidence de façon plus nette que « dans une grande mesure, chaque enfant tend à reproduire assez rapidement envers chacun des éducateurs les relations qu’il a envers ses parents (de même qu’avec ses camarades il reporte certaines de celles qu’il entretient avec ses frères et sœurs) » 121 1191. Il est apparu qu’en certains cas, une attitude plus particulière des éducateurs permettait d’inféchir ou de modifer certains comportements. L’étude en commun des motivations de l’éducateur, de ses implications personnelles dans ses relations avec les enfants, de cas d’enfants les plus divers, des nécessités du travail en équipe à tous les niveaux, a facilité cette évolution (1). L’apport de la dynamique de groupe a aidé à mieux comprendre les processus de groupe. les enfants dans leurs interrelations, le statut et le rôle des éducateurs dans le groupe, et, par voie de conséquence, ces derniers ont pu apprendre un mode de conduite de groupe plus adapté. L’obgervation, davantage centrée eur les relations de l’enfant en situa¬ tion, est devenue plus précise et surtout plus dynamique. En se référant aux grandes tendances pédagogiques inventoriées par Mulock Houver 1351, cet ensemble évoque le gystème dit éclectique où chaque enfant doit être aidé selon ses besoins et selon le traitement nécessaire. On s’eforce de créer une atmosphère et de telles relations entre lee enfants (importance du groupe), qu’ils puissent, avec l’aide de l’adulte, surmonter (1) Rappelons que tous les éducateurs doivent posséder au Centre de Vitry le dipl̂me d’éducateur spécialisé. Ce diplôme est délivré par les écoles d’éducateurs après 3 ans d’études théoriques et pratiques, sanctionnées par un examen (comportant entre eutres potes de stages et rédaction d’une monographie). ET SOCALES EN PSYCHIATRE NFANTILE 8 leurs dificultés. Et ceci en s’appuvant sur ce que peut apporter de valable chaque système en vue du but souhaité. Toutes proportions gardées, cette évolution des méthodes n’est pag gans rappeler, sous certains aspects, les grandes étapes ou tendances de la péda¬ gogie moderne : éducation de groupe, éducation individualisée, éducation des membres d’un groupe. (cf : les gystèmes socio-pédagogique, individuel et éclectique). Elle peut faire penser aussi, grossièrement, aux trois types clas¬ siques de conduite de groupe, étudiés par la dynamique de groupe : auto¬ ritaire, laisser-faire et démocratique 151). La période actuelle, dans ses grandes lignes, peut être considérée comme un dépassement des deux premières périodes, où ont téintégré leurs apports les plus positifs dans une perspective nouvelle, résolument psychopédagogique. 2. La situation psychopédagogique et ses cadres. Cette esqmuiase va permetre de préciser et de situer le travail prégent de l’éducateur. Le centre doit être considéré comme un tout, ouvert et en mouvement, dont les différentes parties, interdépendantes, concourent de façon harmo¬ nisée à un essai de réadaptation rapide de l’enfant. Si on envisage, schéma¬ tiquement, les difficultés de l’enfant soue l’angle d’une perturbation de ses relations avec son entourage, familial et scolaire notamment mais aussi avec lui-même, l’essentiel, de l’action des personnes s’occupant de lui, va consister à modifer ses relations, selon des niveaux ou des domaines différents. « On va lui réapprendre réellement à faire des relations., en lui offrant la possi¬ bilité d’expérimenter de nouvelles relations sur tous les plans » fAIl. Le brusque changement de milieu et ce que F. Bedl appelle l’atmos¬ phère thérapeutique globale 1341 vont amorcer ou favoriser les interventions particulières. Ce climat dépend : — du cadre matériel : mobilier, décoration, nourriture... — du cadre spatial : locaux, ferrains de jeux... Signalons la remarque qu’émettent souvent des parents (et d’autres personnes), dès la première visite, après le placement, et concernant le rôle du parc, de la cour, des arbres, bref de l’espâce, quant à sa dimension, sa dis¬ position et sa présentation esthétique, dans la détente et l’épanouissement - du cadre temporel: rythme de la journée, des activités, des fêtes,... de leurs enfants (« Ah, ils peuvent se dépenser ici 1 »). du cadre social : règles de vie collective, nécessités administratives, les différentes personnes et leurs rôles : et aussi les cadres matériel, spatial et temporel, en tant qu’institutionnalisés. du cadre psychopédagogique : attitude compréhensive de tout le per¬ sonnel, possibilités offertes à l’enfant sur tous les plans. « C’est l’ensemble de la maison qui exerce une influence bénéfique et les MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 86 meilleurs eforts des psychothérapeutes ou des éducateurs seront gérieusement remis en question s’il existe des déficiences dans ce domaine » 1341. Alors que la vie en classe va être centrée gur des apprentissages scolaires, à travers les relations (1) de l’enfant et du maître, la vie dans le groupe qura pour but l’établissement de relations nouvelles à travers les actes de toua les jours et certaines activités, avec leurs apprentissages spécifiques. L’essentiel du travail de l'éducateur va partir de ce fait qu’en général les en¬ fanta tendent à reporter, aur l’éducateur et l’éducatrice, les sentiments posi¬ tifs, négatifs ou ambivalents éprouvés à l’égard de leur père ou de leur mère. L’éducateur (2) va esgaver d’instaurer entre lui et l’enfant un nouveau ava¬ tème de relations dans le dessein d’aboutir à une modification générale du comportement. Le travail de l’éducateur ne peut être qu’une contribution plus ou moins importante, selon les cas, à celui de tous : assistante sociale, médecin, psy¬ chologue, rééducateur scolaire ou de la psychomotricité, instituteur et psychothérapeute, en particulier pour certains enfants aux problèmes plus difilles. Il exiate, en réalité, interférences et chevauchements multiples que, seul, un travail d’équipe permet d’intégrer de la façon la plus positive. L’observation permettra d’apprécier les possibilités d’évolution dans toutes ces situationg. Ces particularités constituent le cadre mais aussi les fondements et les lignes générales de notre méthode actuelle. 3. Les atitudes de base. Attitulde de bage centrée sur l’enfant. De façon profonde et avant toute chose, l’éducateur doit avoir une attitude de sympathie à priori envers chaque enfant considéré comme cas singulier, avec son drame personnel (1). Mais de façon discrè̂te, sans l’imposer ni gurtout chercher à provoquer celle de l’enfant. En général, l’éducateur maintiendra une certaine distance dans ses relationg avec les enfants : para¬ doxalement, il sera d’autant plus disponible sur le plan affectif, d’autant plus participant qu'’il sera moins impliqué ou, plus exactement, qu’il se sen¬ tira moins impliqué à titre personnel, que ce soit dans les manifestations d’afection comme dans celles d’opposition, ou d’agressivité. Cette attitude se double et ge complête d’une certaine neutralité : on accepte l’enfant tel qu’il est, pour lui-même, sans le juger et avec la volonté de l’aider. Cela implique un certain degré de tolérance raisonnée, qu’il ne faut pae confondre avec la passivité. Cette tolérance risque d’ailleurs de conduire aux pires déboires si elle ne s’inscrit pas dans un engemble méthodo¬ a Elément gouvent important de ton atitude générale envers la acolarité. (2) Sauf précigion, nous entendrons par là l’éducateur et l'’éducatrice. (3) Ici, comme À un premier niveau deacriptif d’obgervation, il serait intéreasant d’étu¬ dier ce que pourrait apporter à notre travail la pergpective phénoménologique. ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 87 logique cohérent. Cette attitude compréhensive ou diagnostique 130l se base sur les connaissances disponibles concernant l’histoire de l’enfant, afin de dégager la résonnance qu’ont eus sur lui les événements qu’il a vécus. « Une connaissance intuitive porte en soi, inévitablement, la projéction des émotion gubjectives de l’éducateur » 1301. Précisons que les éducateurs ont le libre accès aux dossiers qui comprennent tout ce qui concerne l’enfant : examens et traitements antérieurs, renseignements généraux (histoire de l’enfant : milieux de vie, famlial, scolaire.) médecine énérale, paychiatrie, examens paycho¬ logiques, psychothérapie, rééducations diverses (scolaire, peycho-motrice. du langage), fiches mensuelles d’observation des classes et de groupes. dossier des synthèses mensuelles. Nous verrons plus loin les contacts des éducateurs et des autres techniciens s’occupant des enfants. Cela permet à l’éducateur de saisir la signifcation d’un comportement par delà certains de ses aspects symptomatiques. Manifestations qu’il pourra comprendre et d’autant mieux tolérer, voire contrôler. C’est cette même attitude qui permet aussi à l’éducateur d’accepter echecs et rechutes en les envisageant comme des moments, parfois nécessaires, d’une même évolu¬ tion. Souvent, quelque tempa après l’arrivée, ò l’enfant attend, tâte le terrain, après la levée de certaines inhibitions, de certains contrôles, une lutte de « forces » (au sens de la paychologie topologique de Lewin) va s’engager entre ce dernier et l’éducateur, lutte basée sur lefait que l’enfant va se défendre contre l’influence de l’adulte, quelque discrè̂te que soit celle-ci. Vont surgir des barrières, des régiatances aux changements. Encore que cette lutte de forces soit moins nette ici, gurtout au début, que chez des adolescents (Voir 1221 1681. Il s’agit donc, en définitive, d’accepter certaines manifestations pour mieux les leur faire dépasser par la suite. En d’autres termes, « de l’adaptation dynamique aux besoins des enfants à l’adaptation dynamique de leurs besoine, il y’a un pae à franchir qui est le projet de toute éducation ou réducation » 1A41. Nous verrons plus loin comment ces aspects se traduisent de façon plue précise, plus pratique, sur le plan technique. L’éducateur ge gardera de deux écueils : l’attitude de retrait et l’attitude de zèle (nous entendons par cette dernière, le fait d’intervenir ou d’investir de facon exagérée ses relations avec les enfants.) Mais on doit les considérer comme limites, car une attitude plus différenciée, selon les cas, pourra osciller entre ces deux pôles. Cette atitude générale n’implique absolument pas l’absence de rgles. d’exigences, de sanctions. Mais elle permet de les demander et de lea faire appliquer d’une certaine manière et dans un certain contexte. En partant toujours du niveau où se trouve l’enfant, elle aide à en ordonner une progres¬ sion et un rythme adaptés à son cas. Elle les dédramatise et en atténue les effets dans la mesure où ils pourraient être ressentis par lui comme négatifg. On lui apprend peu à peu à mieux les accepter, en n’oubliant jamaig qu’il a besoin de sentir auprès de lui une autorité rassurante. Cette conduite de l’éducateur est imprégnée d’un style « éducation activex; gouci d’explication, de logique et d’immédiateté de la sanction, l’accent étant mis sur les aspects les plus positifs, demande d’efforts, de participation au travail en commun. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 88 appel à l’initiative, au gens des resaponsabilités. Elle g’inscrit dana le cadre d’une méthode de conduite de groupe. Attitude de base centrée sur le groupe. autre envers le groupe. Elles se modèlent plutôt l'une l'autre. Ce que le social On ne peut distinguer radicalement une attitude envers l’enfant et une groupwork (1), dans l’esprit de la dynamique de groupe, appelle la méthode ou mieux l’attitude démocratique 1201, nous semble le mieux rendre compte d’un ensemble de conduites se dégageant peu à peu de notre expérience. Il ne e’agit pas ici d’un système démocratique qui relève de l’ingtitution ou de l’organisation. Le terme pouvant prêter à confusion, il nous paratt nécessaire de l’expliquer. En voici quelques traits principaux : — tenir toujours compte du niveau de développement oì se trouve le groupe 1201. Repecter son rythme propre (2). — souci d’assurer le maximum de communication dans le groupe entre les enfants, entre les éducateurs et eux : — SouCI (’IDfOTmALIOH SU COHL Ce HOE ICRAIHC EC SIUGDC» Propositions ouzcontribution du groupe pour l’établissement de pergpec¬ 63 tives pédagogiqueg (aorties, fêtes, etc.). Nous verrons plus loin comment il s’agit en fait, pour l’éducateur. d’apprendre au groupe comment coopérer, comment fonctionner en tant que groupe, ce qui implique pour chaque enfant, l’apprentissage d’un certain mode de relations sociales. L’enfant a begoin de sécurité, donc de points de repères, et ces enfants tout spécialement : ils ont eu des conditions de vie, matérielles, socio-cultu¬ relles et psychologiques souvent très particulières (changements dans la composition du couple parental, problèmes difficiles de fliation, nombreux placements antérieurs) 191. L’insécurité est génératrice d’anxiété. La plupart des enfants ne com¬ mencent à évoluer qu’à partir du moment où ils se sentent vraiment en séeurité. Dans quelques cas, certains ne manifestent pas de sentiments négatifs parce qu’ils se trouvent ici, davantage en sécurité que chez eux. Signalons la dificulté coulevée du fait, inévitable, qu’un grand nombre de personnes s’occupent du même enfant (éducateurs, instituteur, agsistante sociale, médecin, paychologue). Or beaucoup d’enfants ont déjà du mal à se situer socio-affectivement. Il importe donc de réduire, au moins au début. les pogsibilités de dispergion : ainsi maintenant, un enfant ne guit-il plu parallèlement une psychothérapie et une rééducation particulière (psycho¬ motrice, par ex.). De même, les convocations au bureau (examens divers, (1) « Processus visant à favoriser l'adaptation socio-psychologique ou la croissance de la personnalité de l’individu ainsi que le développement social du groupe en tant qu’en¬ tité, qu’élément ge déterminant luis-même» 1381. (2) Ce qui ne veut pas dire ne pas agir ni infuer aur lui. ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTUE 9 traitements) sont groupées, dans la mesure du possible à certains jours fxes de la semaine. Ces points d’ancrage coincident d’ailleurs, en partie, avec un certain nombre d’exigences fondamentales de la vie en collectivité : ce qu’il faut faire (se laver les dents, manger), là où il faut aller (au dortoir, par ex.), le rythme des moments (rentrée en classe, veillée). D’où aussi, l’importance de la stabi¬ lité des ducateurs et de leur roulement ou doublage (prévisible parles enfants. parce que toujours le même). Nous étudierons plus loin le système de valeurs et les normes du groupe comme points de repère. Comme nous l’avons vu, ces règles, bases indigpensables de toute action psychopédagogique, se situent dans une ligne d’éducation active, mais informée (au sens de modèle) par la méthode particulière que nous venons de déerire. A partir de cette méthode, peuvent être dégagées un ensemble de techni¬ ques que nous étudierons par rapport à l’enfant, par rapport au groupe et par rapport à l’enfant dans le groupe. I. LES TECHNIQUES PSYCHOPÉDAGOGIQUES Il apparait déjà qu’il a’agit bien d’une psychopédagogie, c’est-a-dire. pour l’enfant, d’un apprentissage de relations plus adaptées vis-à-vis de son entourage. Pour cela, l’éducateur se servira notamment de « techniques des échanges » IAAl, c’est-à-dire des relations qu’il établit avec lui, dans le cadre d’une vie en groupe et par l’intermédiaire des actes de la vie quotidienne et des activités possibles à l’enfant. a) Le maniement de la relation enfant-éducateur. A dessein, noua avons préféré éviter le mot de transfert dans ce titre, afn de montrer que la relation enfant-éducateur englobe un ensemble de rapports qu’on ne peut réduire aux seuls phénomènes transférentiels, pour fréquents et importants qu’ils soient. Il s’agit aussi d’échapper à toute ambi¬ guité avec le transfert en psychanalyse : situation, méthode, techniques sont différentes. Mais c’est bien entendu par référence (1) au transfert (1) D. LAcAcar rapple que « Freud, Ferencsi et de pombreux paychanalvates ont gouligné que lé transfert n’était pas un phénomène propre à la paychanalyse mais un phéno¬ mène général », in Le problème du transfert, Revue Francaise de Psychanahyse, Janvier¬ juin 1952; voir aussi 1211. De meme, H. SAUGUET gignale que «de nombreux auteurs, à la suite d’Abraham, de Gloyer l’ont congidéré comme une manifeatation générale, univergelle que l’on retouve toujours, plus ou moins décelable, lorsqu’on étudie la relation interhumaine. »in Notes pour une introduction à un colloque sur le contre-transfert, Revue Francaise de Pochanabyse. mai-juin, 1959: Et en ce qui concemne plua gpécialement les ducateure: I1 121 131 TA1 ISI HI H9) 1291 1241 1281 1331 1341 1411 1441 1681. Il serait intéresant d’étudier comparativement le trangfert en paychanaiyse et ce qu’on a appelé ailleura le transfert gimple, 1241. F. REDL, parle de trang¬ ference-like behavior, 181, p. 212. (f, les analynes de B. BETELHED 1491, p. 28, 67. et les instincts. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 9 psychanalytique que nous emploierons cette notion pour rendre compte d’un ensemble de faits déjà décrits : le report, sur les éducateurs, du compor¬ tement de l’enfant envers les parents. Cette donnée de base, assez générale, constitue par eon importance un pivot pour le travail de l’éducateur. A partir d’elle, ont pu s’ordonner, par tâtonnements successifs, les grands élémente d’une technique particulière. Kate Friedlander est un des rares, auteurs, à notre connaissance, à avoir parlé, d’une façon explicite, du transfert et de son maniement par l’éducateur. (Avec de nombreuses références à A. Aichorn. « Ce report des attitudes affectives rond à la longue le traitement pogaible. Le role de l’éducateur est des plus importants. C’est de son habileté, de la forme même de sa peronna¬ lité, que dépend l’tablisement plus ou moins rapide du trangfert. Ce dernier une foia tabli. la rédueation peut commencer. Grâce À ces relations nous avone une arme qui, manie de façon rationnelle, peut augmenter le nombre des réussites et diminuer celui des échec (1)p. Fritz Redl parle, lui aussi, du maniement du transfert par le personnel de Pioneer House, l’internat thérapeutique qu’il dirigeait près de Detroit (2). En France, nous ne connaissons qu’une expérience, dont une étude évoque brièvement le maniement de transferts simples par l’éducateur, « mais au fur et à mesure des nécessités du traitement » (psychothérapie) 1241. 1. Le transfert dans la relation enfant-éducateur. Il ne peut entrer dans notre propos d’étudier de façon approfondie la question du transfert en psychopédagogie. Nous ne ferons que quelques remarques de base, venant justifier l’emploi de ce terme et les positions doctrinales et pratiques qu’il implique. La définition du transfert psychanalytique par Warren fl englobe la plu¬ part des définitions courante : "Le développement d'une attitude émotionnelle de la part du patient envers l'analyste « Le développement d’une attitude émotionnelle de la part du patient envers l’analyste, l'attitude dérivant dans l'un et l'autre cas, des relations antérieures du patient avec l'un de ges parents ou avec les deux et non de la eituation analytique actuelle. » On peut cependant ajouter que l’attitude transférentielle est généralement ambivalente. D’autre part, ce qui est transféré, c’est toute une forme de compor¬ tement (M. Klein 1661). Ces comportements, ces émotions, ces fantasmes. se reproduisent sous l’infuence de l’automatisme de répétition. Remarquons par ailleurs, suivant en cela Anna Freud f65l, que l’auto¬ matisme de répétition intéresse non seulement les anciennes pulsions, mais aussi les anciennes mesures de défense contre celles-ci. Si bien que dans les conduites de transfert apparaissent, à la fois ou successivement, les défenses (1) C. 1831, p. 198-201 et 259242. (2) C. 1341 et surtout 1681, p. 212 ̀ 219. ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 91 La situation peychopédagogique est évidemment très éloignée de la situation psychanalytique. Nous n’y insisterons pas. Il n’empêche que l’enfant tend à faire un véritable transfert sur ses éducateurs. La prise de conscience de ce fait par les éducateurs, et son acceptation, constituent désormais des outils puissants pour faire évoluer ces personnalités immatures, par l’utili¬ sation et le maniement du transrere Bien entendu les conduites des enfants se situent dans une réalité quoti¬ dienne très concrête : ils vivent des situations tout à fait courantes et peut¬ être à beaucoup d’égards peu différentes de celles qu’ils ont connues dans leur milieu antérieur. Toute une partie de leur comportement n’est done pas un comportement de transfert, mais est purement régie par la réalité immé¬ diate, dans tel contexte actuel. Il est vrai aussi qu’on observe habituellement, au moins dane le premiera temps, des conduites de résistance au transfert. Comme nous venons de le dire, celles-ci peuvent être à la fois résistances actuelles au transfert et répé¬ titions transférentielles de mécanismes de défense anciens : les premières sont conscientes, les secondes inconscientes. Enfn, on pourra considérer, à un atade ultérieur, comme résistances de transfert, la dificulté à dépaser, dans les relations paychopédagogiques. les comportements anciens reproduits alors indéfiniment et sans bénéfice. Cela dit, il faut insister sur ce que les relations entre l’éducateur et l’enfant ne doivent pas être psychothérapiques, mais bien psychopédagogiques, Il n’y a lieu de laiser se reproduire les conduites anciennes de l’enfant que dane la mesure où les structures éducatives de l’établissement ne suffisent bas à lui faire dépasser ses troubles et à épanouir sa personnalité. Ce n’est que dans la mesure, nécessaire que l’éducateur permettra l’établisgement d’un certain transfert. Il peut arriver, en effet, que les relations goient d’emblée excel¬ lentes, et les conduites rapidement progressives : il s’agit alors de troubles purement ractionnels à l’environnement antérieur, n’avant pas pénétré dans la personnalité. A l’opposé, l’éducateur aura parfois à lutter contre l’établissement d’un trangfert trop intense et les attitudes régressives qu’il comporte, dans le cas d’un enfant couvé cherchant avant tout à utiliser les adultes : ou bien dans les cas de manifestations instinctives trèe violentes qu’il s’agira d’endiguer dès le début en tentant de créer des contrôles et en recherchant une identifi¬ cation directe à un adulte solidement quilibré, diffrent des modèles anciens. Dans l’ensemble, c’est à propos des troubles affectif de tous les degrée. que l’utilisation du transfert sera précieuse. A vrai dire, les troubles affectifs coexistent, presque toujours, avec toutes sortes de perturbations. Et aussi l’attitude que l’éducateur sera désormais à même de prendre lui gervira dans l’ensemble de son action psychopédagogique, en dehors même de relations vraiment transférentielles. Il'appartient donc à l’éducateur, dans un grand nombre decas, de créer un climat social convenable pour laisser exprimer aux enfants leurs, véritables problèmes de relations. Si l’on se réfère à la classification de Levin 1511 des trois sortes de leaderships (autoritaire, laise-faire, démocratique) on met en 92 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES PÉDAGOGIQUES évidence le fait qu’il ne peut s’inspirer d’une seule de ces méthodes, mais bien successivement des trois. Il lui- faut parfois être autoritaire pour limiter un taux d’agressivité trop élevé : laisser-faire pour permettre l’expression libre et la régression : démocratique pour aider à la construction de la person¬ nalité par le dépassement direct des conflits. Dans la pratique, l’attitude compréhensive et suffisamment permissive de l’éducateur amène régulièrement, dans un temps moyen de deux à quatre mois, la phase que nous avons coutume d’appeler déblocage. A l’état pur. ce serait l’expression libre dés pulsions sexuelles et agressives libérées de tout mécanisme de défense. Ce n’est évidemment jamais le cas. Il s’agit de libéra¬ tion, plus ou moins intense, dans un certain nombre de situations et, dans une certaine mesure, contrôlable. Il faut se souvenir en effet, de ce que cette sorte de libération entraine une forte anxiété chez l’enfant et qu’il faut toujours vérifer qu’il est en mesure de la supporter. La dédramatisation, l’attitude juste de l’éducateur, dimi¬ nueront fortement la culpabilité : « ie t’aime, mais je n’aime pas ce que tu fais ». Le maniement du transfert consistera à doser de façon appropriée les frustrations comme les gratifications. C’est ainsi que sous l’influence d’une attitude détendue, d’une autorité dosée, de permissions mesurées, l’enfant va développer des relations intenses avec l’adulte, de plus en plus sincères et profondes, mais aussi franchement régressives. Teintées d’abord surtout d’agressivité, elles prendront à la longue. devant la tenue solide et positive de l’adulte, une tonalité de plus en plus affectueuse. A mesure que se liquidera la rancœur accumulée, la bonne volonté apparaitra davantage et l’éducation véritable pourra reprendre un à un tous ges droits. La liquidation du transfert n’est pas un problème aussi grave qu’on pourrait le croire étant donné la profondeur de l’attachement de l’enfant à l’éducateur, à l’issue de cette évolution. Du côté de l'éducateur il peut paraitre évidemment très dur, très frus¬ trant de favoriser le détachement d’un enfant qui est devenu si proche. C’est assurément une des épreuves de sa solidité. Il est nécessaire que les relations qu’il a avec les enfants, tout en étant profondes et ne devant pas être entravées par des réticences de sa part, gardent un caractère professionnel et n’entrainent pas la remise en question perpétuelle de son mode de vie. de ses investissements affectifs et familiaux, de son équilibre. Il est de fait que les relations de l’enfant avec les autres adultes se sont modifiées à peu près dans le même temps et que, le plus souvent, il est prêt à nouer des liens affectifs avec d’autres et, particulièrement, quand cela est possible de leur part, avec ses parents. Il n’est pas habituel que le départ revête un caractère déchirant et entraine des conséquences graves. Cependant, ce qu’on peut appeler le gevrage a toujours besoin d’être réalisé progressive¬ ment et contrôlé de très près. Ce schéma ne se déroule pas forcément de façon aussi linéaire. L’évolution du transfert peut-être très différente selon les cas : paliers plus ou moins longs. arrêts brusques ou impasses, retours en arrière, progression lente ou par bonds. ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INTANTILE 93 Il n’est pas simple non plus : les relations avec les parents persistenf. l’enfant peut être en paychothérapie et faire un transfert latéral eur un édu¬ cateur. On rencontre parfois un accrochage parallèle, sur un instituteur. par exemple. De facon plus générale, il peut y avoir diffusion sur plusieurs adultes ou gur des enfants du groupe. Rappelons que les relatione éducateur-enfant ne sont pas réductibles aux seules conduites transférentielles. Nous avons insisté sur le maniement du transfert parce qu’il s’agit d’une technique efficace dans le cas des enfants perturbés affectivement. Par ailleurs son utilisation par des éducateurs ́tant une chose relativement (cf, 1331 par ex.) nouvelle, des explications un peu détaillées s’imposaient. La fréquence et l’importance de ces conduites, ici, s’explique par le contexte et la perspective thérapeutiques dans lesquels se situe l’emploi de cette technique : les conditions les plus favorables sont créées pour per¬ mettre, gi nécessaire, l’établiggement et l’évolution du transfert. Nous ne nous attarderons pas sur les autres types ou formes possibles de relations enfant-éducateur. Rappelons qu’en pratique, relations transféren¬ tielles et relatione de réalité sont souvent liées. Des phénomènes transf́ren¬ tiels peuvent plus ou moing colorer toute une gamme variée de sentiments (confiance, estime, sympathie, affection, méfance, hostilité...). Nous avons vu aussi que des relations d’emblée très positives permet¬ taient d’obtenir des progrès directs. Selon la distance ou les procédés, les relations peuvent être, de dépen¬ dance, d’indépendance, d’indifférence, de recherche ou de fuite, franches ou de détour. On rencontre parfois des relations de type fonctionnel ou utilitaire. Nous étudierons plus loin les relations d’autorité, qu’elles soient basées sur la confiance ou qu’elles dérivent directement de la fonction d’auto¬ rité. On ne doit pas sous-estimer l’importance du rôle de l’éducateur au point de vue de l’exemple et de l’imitation. De façon plus générale « seuls les modèles incarnés par les individus qui constituent l’environnement social du jeune y sont valorisés ». 130) Nous aborderong aussi le problème des relations névrotiques. Soulignons que nous manquons de recherches préciges sur cette question. Il faudrait étudier les modalités des phénomènes transférentiels dans le groupe : — selon les types et les niveaux des troubles. — selon que l’enfant est ou non en psychothérapie. — en fonction de son éducateur, de son éducatrice, de son groupe, de sa place dans le groupe, et en examiner les variations possibles selon la méthode différentielle (comparaison entre garçons et filles) et selon la méthode génétique (comparaison par ages). Nous ne donnerons donc que quelques exemples destinés à illuetrer la complexité de ce genre de conduites : Belations positives mais sans transfrt gra" : On pourrait y voir une iden. tification à de bonnes images maternelles présentées par les éducatrices guccessives du groupe et la rééducatrice scolaire. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 9% « Francoise, Il ans, ne ait pas lire, et nurtitque, a des « cricet cardiaquea » provo¬ quéos par l’anxiété. Parents alcooliques, vivant dans un taudie. De l’arrive, adopte une attitude discr̂te, sans manifestation excegaive, maie plutot de l’apathie, ne ge lie avec pergonne, n’établit paa d’échangxe affectiff. Le gimple contact quoti¬ dien lui permet, petit à petit, de c’épanouir, de ge gentir à l’aige, de ge montrer plus vivante : elle se gent en cécurité, devient confante, ne mouille plus son lit, apprend à lire, aidée par la rééducation acolaire individuelle. Elle est devenue la ille raigonnable du groupe, et admire digr̂tement par ges camarades. De retour che elle, elle a de nouveau deux crises cardiaques puis gurmonte l’angiêté éprouvée en retrouvant la situation familiale, n’a plug de erige, ne mouille pas son lit et tra¬ vaille beaucoup en clagge pour rattraper ce qui lui reste de retard. Sa mère, qui ne saitpa tenir von ḿnagos l’admire beaucoup pour ton sérieux, ses qualités de petite ménaggre c’est dlle qui lave cex fret et copure, installe des dgure dans des caisses aux fenêtrea, etc. — Absence du pre, projection sur P’ducoteur de sentiments pvécus jiusque la sur un objet imaginaire : Chrintiane, 8 ans, parente géparés avant sa naiagance, p̀renoir, petite fille agex colorée. Malheureuge, ne se trouve paa belle. Tr̀s rapidement accrochée À l'éducateur, exprime le dégir de l’avoir pour père. Ea placement farilial, malgré de bonnea relationa avee les parenta nouriciers et, en particulior le père, repte tr attachée à l’éducatour. — Relations d’emblée positites qvec l’éducateur, transfert d’abord négatit qvec l’éducatrice : « Bernard, 10 ana 5 moig. Enfant prégentant une structure pré-peychotique, Pre dégi¬ quilibré, indifférent à la vie familiale, rigide, guprficiel, inaccesaible. Mre compréhensive mais fible. Relationa positives avoe l’éducateur, d’emblee. Atitude naturelle teintée d’admiration. Bon contaet afectif. Bon contrôle de l’instabilité. Réponse de l’éducateur : Easai de subas¬ titution d’une image gaine d’homme calme et solide à celle du père. Présence rasgurante et continuité d’exigences raisonnables, toujoure motivées. Contacta individuele dang le cadre de l’atelier de travaux manuela, afn d’éviter le verbaligme et de valoriger l’enfant gur le plan des réaligaRiong. Trangfert négatif aur l’éducatrice. Très oppogant et méprisant. Ne qupporte aucune intervention, comédien, groagier, recherche la punition, nombreuse réactiong de prestance. Minimiser les interventions personnelles mais intervenir sur un mode général. Indifférence Réponge de l’éducatrice : Eviter d’entrer dans son jeu. Attitude patiente et calme. aux comédies maia recherche de contact natureldanales jeux ou leg travaux manuels. Prégence raggurante sur le plan afectif en évitant les gituationa de rejet ou d’abandon. Favoriser l’oxpregaion dea ranceura et dea crainte eane manifester de resgentiment. Fermeté gécuri¬ sante. Evolution gpectaculaire. Comportement modifé trea rapidement. Contacta plua nor¬ maux avec les autrea enfants. Tranafert pogitif sur l’éducatrice au 4e mois. Recherche les contacts. Attitude normaliée. Momenta d’oxeitation contrlables aur eimple remarque p — Transfert maternel : « Madeleine, 9 ans, petite fille avant de groases difficultée en famille : m̀re morte. pre remarie. Les dificultéa interviennent entre la belle-mère et elle. A l’arrivée, acgrochage trèg pogitif avec l’éducatrice qui, dit-elle, reasemble à ga mre morto, m̀re qu’elle a ts peu connue et qu’elle idéalige ». comme une ille dans un milieu familial perturbé ». ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE NFANTLE 95 Transfert maternel qvec l’éducatrice, chex un enfant en psychothérapie qvec un thérapeute homme : « Paul, 12 anes 7 mois de d́jour- Grogce oppoaition a la mre. Enurégie, Mre célibataire. intelligente maie faible, importantes difficultés afectives, anxieuse. Enfant anxieux, avec d’importantes difficultés de contact. Psychothérapie entreprige quinze jours après son entrée. Après un mois de géjour, commence à reproduire avec l’édu¬ catrice le comportement oppoaant, exigeant, qu’il avait avec sa mère. Par contre, eux visites. les relationa âvec celle-ci e’améliorent pour devenir presque pormales. Les relations avec l’éducatrice guivent l’évolution de la paychothérapie. Il devient très provocateur, sur un mode masochique. La psychothérapie doit être interrompue en raison de phénomènes de conta¬ gion incoercible. Les contacte avec l’éducatrice resteront jusqu’à la fin du aéjour très difi¬ ciles, accompagnés de manifestations pogitives très pueriles. Les repports avec le groupe ge sont eméliorés, il a pu s’intégrer dane un soux-groupe. Est passé par une phase d’admiration oxcessive de l’éducateur pour c’arrêter à une identifcation pasgsive (très nettes tendancen homogexuelles). L’énurégie est restée permanente pendant eon séjour. Placement en institut médico-pédagogique, l’énurégsie a disparu lors de son arrivée dans le nouvel établiggement. Son intégration dana un nouveau groupe a été rapide, son comportement avec les adultes plus normal. On peut penser que les relations vécues au centre d’obgervation ont pemis la liquidation de certaines fxations ». Absence de p̀re, retalborisation, grd̂ce à l'’́ducateur, de l'’image paternelle justue la représentée par un grand-père faible : « Colette, 7 ans 5 mois, n’a pas de p̀re, vit avec ea m̀re et son grand-père, geule peraonne qui aggume le rôle d’homme et de père auprè d’elle. A l’arrivée, adopte avec l’éducateur le même comportemont que celui qu’elle avait avec con grand-père (agresgive, exigeante, très autoritaire), ge croit plus forte que l’éducateur, est étonnée qu’il ne tombe pas quand elle le pouage. Par ailleurg, très egresive parce qu’il reprégente le père fort qu’elle désire mais redoute, car plus fort qu’elle. Un tel p̀re gerait une menace dans le gvatème qu’elle s’est formé. Au départ, tr̀s attachées congerve l’éducateur comme image paternelle, lui écrie aprè gon départ. Avec l’éducatrice, pas de difficultés, gentimente d’emblée pogitife, reproduit avec elle le môme comportoment qu’avec ga mère p. — Epolution rapide du transfert qvec realorisation des images parentales : « Daniel, 12 ang, enfant paagifet délinquant, agresgifavec ee mère, quatre mois de géjour. More attachée à eos enfinte, cherchant sane cegsge à rétablir l’quilibre du milieu familial. a élevé son file comme une fille (geul fils après quatre flles). Père éthylique et faible, plusieurs cures de dégintoxication eans guccèt, violent, bat sa femme. A l’arrivée, fortes réactions de prestance : hableur, critique les camaradet, cherche par tous le moyens à attirer l’attention des filles. Conformiste dans ses repporte avec l’édu¬ cateur, oppogant avec l’éducatrice avec qui il refuse les consignes du groupe. Les contacte avec l’éducateur deviennent bientot plus directs, avec, lui il devient gerviable et coopérant. Il reste bruvant ot disperaé avec l’éducatrice. Eet toujours très atiré par les illes ave qui il ne peut être naturel. Le dernier mois du géjour il recherche de plua en plua les activités et travaux entrepris par l’éducateur avec qui il a de bone contacts. Ne fait plue d’oppogition à l’éducatrice, a de bons rapporta avec elle, mais ne recherche pas sa prégence. Il dlaiage les filles pour mener les jeux libres. Au départ du meneur donne le ton au groupe mais ne cherche plus à être cand. Dans ses jeux avec les filles n’est plus le fiancé qui acceptait friandises et bijoux, mais le mari responaable d’une femme et d’un enfant (un autre garçon du groupe). La prence stable de l’éducateur, exrigeant dans les conaignes de groupe mais diaponible dans les activités, favorige le changement complet d’attitude de ce garçon élevé juxqru’à prégent changée de lit à la suite de quextionnaires sociométriques, le couple fut disloqué ». MÉTRODES PSYCLOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES 86 — Transfert parental sur les deux éducateurs : « Geneviève, 8 ans 2 mois, abandonnée par sa mère, recueillie par ges grande-parents drèa Agéa. Fait avec lea deux éducateure un acrochage poaitif, ces derniers représentant pour elle le père et la mère qu’elle dégire ». « Nicole, 6 ana 6 mois, nombreusea dificultés en famille, tree diffcile avec ea mre. redoute beaucoup son père. Dans le groupe, même comportement, craint l’éducateur, aagex peu de contacta avec l’éducatrice, d’emblée trs diffcile et agresive. Puis, après deux moi de éjour, bon contact ave l’ducatrice, devient agreaive avec l'éducateur ». — Evolution complête du transfert sur chacun des deux éducateurs : « Gilles, 9 ans, parents divorces. Vit avec sa mère et ea grand-mère maternelle. Penge que ga mère est responsable du départ de son père. Devant sa passivité trèe ancrée, une pay¬ chothérapie est engagée. Avec l'’éducatrice, peu affectueux, fait conatamment de l’opposition pasive et recherche son attention. lre période : avec l’éducateur, affectueux avec démons¬ trations, recherche son approbation. 2° période : oppogition active, recherche l’attention de l’éducatrice avec ambivalence : tantôt affectueux, collant, adhésif, ou tantôt la menace de mort. Il lui reproche de ne pas entrer dans son jeu loraqu’il vient se plaindre. Avec l’édu¬ cateur, il est par cntre toujours affectueux, recherche son approbation. Mais il devient petit à petit opposant, jusqu’à faire de l’opposition ouverte, soit sur le plan verbal avec grossìretées et menaces, goit par une attitude de chantage. La possibilité de pouvoir trangférer sur l’édu¬ catrice l’agresivité qu’il avait envers sa mère lui a permis ensuite de devenir agregaifenvers l’ducateur du groupe. Cette période va lui permettre de s’imposer et de s’afirmer devant le groupe où il est reconnu, comme leader démocratique, organisateur et conciliateur. 3e priode : il devient, ave les deux fducateura, très affectueux, sans oppogition, ce qui va lui permettre de c’identifer à un homme. Il commence alors, à faire des progrèg ». — Transfert sur les ducateurs. — Transfert latéral sur une camarade, comme résistance temporaire. « Nadine, 19 ans, ińduquée, ingtinctive, craignant l’abandon, le rejet, opposante à la mère, pasge par des périodes d’excitation et d’abattement, mal à l’aige, se plaint congtam¬ ment d’avoir mal ici ou la. Parents géparés. Mère faible et dépassée, fruste. Des l’arrivée s’oppose à l’éducatrice, loraqne celle-ci lui demande quelque choge avec fermeté : l’ignore le reste du temps. Bientt devient opposante de façon permanente, tient tête systématiquement, ne cède jamais, exige, tyrannise. Même attitude avec l’éducteur. avec toutefois moins d’excès. Brusquement cette attitude disparait envers l’éducateur. Elle devient accesible et affectueuse. L’attitude envers l’éducatrice ge normalige brusquement quelque temps plus tard. Il est à noter que le changement soudain de gon attitude est contem¬ porain d’événements dans le groupe : avait jusque là formé un couple mère-ille avec N.B. correspondant à une résistance au transfert positif gur l’éducatrice. La camarade avant été Transfert sur une enfant plus âgée s’opposont au transfert sur l'éducatrice; « Jean, II ans, père rigide et moralisateur. Mère beaucoup plus jeune, couveuse, crie. débordée par les vola de son fla, absente du foyer de 15 R. à 24 h. La mère reporte sur Jean toute son affection, le père sur un second fils. Bien accepté à son arrivée par le groupe où il prend la place de « bébé » du groupe. Tout de suite à l’aise avec les adultes. Il a avec les éducateurs des besoina et démonstrations afectives très puérils. Il joue souvent geul les premiers mois avec les intérêta d’un enfant de sept ans, fait une fugue pour aller chercher des friandiges. Devient de plue en plus exigeant ET SOCLALES EN PSYCHIATRIE INFANTLE 87 avec l’ducatice. Il a alors quelques entretiens individuels avec l’éducatrice, à la guite deg¬ quels on note une nette smélioration du comportement. Il devient actif et dynamique dans un sous-groupe, plus viril avec l’éducateur maig regte puéril avec l’éducatrice et exigeant. A l’approche des vacances de Pâques qu’il doit pasger en famille, on asiate à un chapgement complet de comportement : une oppogition svetématique et masgive à tous lea adultes : grosìretés, insolence, autoritarisme, cris, vols de deux portefeuilles, de friandises, très mande angiété. Au retour des vacances, reprise du comportement précédent avec bon contact avec les adultes, bonne participation à la vie de groupe et un travail scolaire très améliore. C’est elle le couvre, le bourre de friandises, lui donne de l'argent. Il redevient très puéril, s'isole du alors qu’il rencontre une fille de 13 ane sur qui il fait un transfert maternel immédiat car groupe et des éducateurs, avec qui il n’a presque plus de contacts, fait de nombreuges petites fugues dans les jardins voisins ou chez les épiciers pour achat de bonbona avec l’argent donné par cette ille, ou volé. Régression spectaculaire. Le transfert positif qui g’était fait gur l’édu¬ catrice n’a pas régisté à l’emprige de cette enfant qui répondait à ge begoina actuels p. — Refits du fransfert maternel : « Michèle, 6 ana 8 mois, placée à l’Asgistance à l’enfance, est d’abord adoptée puis retirée à ga mère adoptive pour mauvais traitementa. Placée à l’hopital, régresge énormément. Arrive au centre avec un comportement très perturbé et un niveau global très bas : malgré les mauvais traitementa, conserve un souvenir aigu et très bon de aa mère adoptive laréclame. Malgré une absence de celle-ci très prolongée ne peut croire qu’elle est à nouveau abandonne et ne congidère jamais l’image de l’éducatrice comme celle d’une nouvelle mère, mais unique¬ ment comme celle d’une personne intermédigire, eans comparaison avec la mère ». Cet ensemble de relations, enfant-éducateurs, est compliqué mais auggi facilité par trois données fopdamentales : — La pergonnalité de l’éducateur : — Le couple-éducateur : — La dynamique du groupe; 2. Le contre-transfrt (1) et l’hygiène mentale de l’ducateur. Le contre-transfert, ce dont les sentiments ou réactions plus ou moins conscients de l’éducateur, qui vont soug-tendre ges attitudes envers l’enfant. réponse aux stimulations dont il est l'objet. Symétrique du transfert, celui-ci On peut dire qu’il exprime la structure de la personnalité de l’éducateur en en dépend. Il a été rarement gignalé comme tel à propos du travail de l’éduca¬ teur 1191. On trouve souvent deux sortes de défenses chez ce dernier : 124 — Il peut maintenir une trop grande distance par anxiété et peur du trang¬ fert. Donc il l’évite. (1) Phenomène aussi général que le tranatert, emble-t-il, cette notion eat emplovde jei par référence au gens paychanalytique : « Tout ce que penge, gent et parfois agit le paycha¬ nalvate envers son patient, dans le champ nettement défini de la gituation paychanalytique p. (H. SAUGUET, D. 89, note 1) et de façon plus précige, projection de ges propres attitudes incongcientes dépendant de son pasé infantile et de es structure paychologiqne profonde. 98 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES PÉDAGOGIQUES Il peut avoir une trop grande participation impliqué constamment dans leur vie, investissant beaucoup ses relations avec eux, il s’attache trop aux enfants. « II faut éviter certaines fixations positives ou néga¬ tives trop ardentes et qui aboutiralent fatalement à des déceptions 1191 ». Dane cea deux cae, il s’agit d’une pewr et donc d’une fuite de la réalité. Ces réactions peuvent ge rattacher à une peur générale et profande des enfants qui sont perçus plus ou moins confusement comme une menace. Peur pouvant aller, si l’éducateur est débordé (cas du chahute) 1521, usqu’à la panique, avec tout ce que cela pout comporter pour l’adulte et les enfants. (relations sado-masochiques notamment) 1531 Normale au début de ce métier, elle peut devenir pathologique si elle n’est pas gurmontée, maitriséo et dépagsée. L’éducateur, par réaction à cette peur de la réalité ou par le jeu d’autres motivations, peut aussi réagir par l’autoritarisme (attitude parentale) ou par la passivité (attitude infantile). Ces défenaea peuvent ausgi ge différencier gelon deux grands secteurs d’activite : — Une trop grande centration sur les cas, pour éviter les problèmes de conduite de groupe Une trop grande centration sur le groupe dans son ensemble peut être une prise de distance pour éviter les problèmes individuels. Ce dernier aspect semble le plus fréquent : — il permet plus facilement de faire passer à l’arrière-plan les problèmes personnels de l’éducateur : — il conatitue la conduite la plus économique, d’effort et qui répond le mieux aux noimes habituelles : il permet de satisfaire à bon compte certains besoins de compensation. domination, valorisation, etc.. Ce dernier trait, sous des formes plus sub¬ tleg, peut, d’ailleurs, ge retrouver dane la première conduite centrée eur les cag. Le contre-transfert doit être contrôlé et nuancé, l’éducateur prenant conscience de ses propres sentiments. « L’éducateur doit pouvoir s’apalyger. S’it se gent frustré, il ne feudra paaqu’il recherche une affection égotte des enfante. Il devra toujoure eonger que, chez lui ausei, jouent des phé¬ nomènes de tranafert et d’identification. Il devra avoir prégent à l’eaprit que sea réactiona et celles dea enfanta sont asgez souvent rédées par les mécanismea de défense du moi décou¬ verts par la paychanalvge : projection, rationalisation, etc.. Il ne g’agit pas d’être tqujoura contracté ou sur gea gardeg, de toujours craindre de déclencher chez les enfante des réac¬ tions incongcientes défavorable, d’avoir peur de manifester d’une manìre plua ou moina pathologique gea propres mécanismes de défenge. Au contraire, il faudra se sentir libre, avoir confiance et faire confance, tout en sachant que les réactiona inter-individuelles et en parti¬ culier les relatiom entre adultes et enfante inadgptée son complexes et délicates. ») 191 On a ausgi établi l’importance de connaître ces propres xones ou seuils de tolérance et d’intolérance 1191. Dans le même gens, certnins auteurs se 99 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INEANTI E sont attachés à montrer comment a les sentiments de l’enfant pouvaient réveiller ohez le travailleur social des tendances pourtant contrôlées p (1). mentale de l'éducateur, elle-même fonction de sa personnalité aux prises Le contre-transfert est étroitement lié à ce qu’on a pu appeler l’hygiene avec ses conditions de vie et de travail. Il importe qu’il prenne congcience des motivations qui sous-tendent le choix de son métier et qu’il surveille les séquelles possibles, afin de ne pas ge fxer dang des attitudes plus ou moms pathologiques, mais, au contraire, de chercher à les d́pasger. Il doit done copnâtre suffisamment le fonctionnement de son moi, ses mécanigmes de défense, afin de contrbler ges conduites. On a insisté sur le fait que l’éducateur devait manifester ce « maximum d’objectivité et de respect envers la personnalité de l’enfant » que réclame Mme Montessori. Car, parfois, «l’enfant n’est pas un objet obtectif pour l’éducateur parce qu’il en est devenu l’objet phantasmatiquex fA4l. M. Lemay 1221 a analvse les dangors de ce qu’il a appelé l’état contageux nevrotique : les difficultés vecues par l’enfant rsquent de provoquer une charge emo¬ tionnelle difficile à gupporte pour l’éducateur. Il nsque d’entrer dans la patho¬ logie de l’enfant, dans son jeu. Par exemple : — Face à une situation d’abandon, on ne doit ni retenr, ni rejeter l’enfant. mais être capable de supporter l’éloignement, la géparation. — Fage à l’agressivité. l’éducateur peut, soit mater l’enfant, soit congtituer avec lui une relation sado-masochique. Qu bien l’éducateur pont rejeter le demandes de l’enfant en utiligane 2 le groupe. On remarque alors souvent deux étapea : le gtagiaire qui entre dang le jeu de l’enfant, par exemple, l’éducateur qui a réagi à cela mais qui ge réfugie dans une attitude soit laisser-faire, soit, autoritaire. Il arrive que l’éducateur fuit la difficulté en coupant les ponte affecti¬ vement avec tel enfant, tout en continuant par ailleurs à s’occuper de lui matériellement. L'éducateur peut refuser d’admettre l’échec : on grrive alors au danger du progrès à tout prix, ou alors il rejette la respongabilité de cet échec sur une autre personne (le psychothérapeute, par exemple). On pourrait multiplior les exempleg en ce sens. Noue renvovons aux actes du Congrès de Rome (A. L.E. L.1.(2) 1960) sur le même cujet et en pay¬ ticulier au rapport de M. Lemay 1221. Il n’est pas sans intérêt de rappeler quelques analyees faites durant ce congrès, mais sur d’autres aspects du même problème. On a souligné l’importance de la maturité de l’éducateur qui se traduit souvent, aux veux des enfants, par la fondation d’une famille. Souvent, l’éducateur est vu par les enfants comme une personne n’avant pas de métier. C’est que, d’une part, l’éducateur n’est pas en possession de (1) Ner Liang, eité par M. LEMAY 1221. (2) Association Internationale des Educateurs de Jeunea Inedoptés, qui gpoupe leg asociations nationales d’éducateurs de pays diff́rents. 100 MÉTUODES PSYCLOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES techniques tranemisibles défnissant un métier, d’autre part, et les deux sont liés, il ne se sent pas ezister comme une personne avant réellement un métier. Avec, comme congéquence (et cause en même temps), un statut social marginal, mal défini par rapport à l’extérieur, par rapport aux autres techni¬ cieng du centre et aussi aux veux des parents. Il éprouve donc le besoin de se justifier (en tant que personne voulant posséder un métier) à ses propres veux et aux veux des autres, en faisant autre chose qui soit socialement reconnu : d'abord participation à des activites d’ordre manuel et matériel dans le centre, puis dans un deuxième stade, préparation d’une spécialisation latérale (rééducation psychomotrice, rééducation du langage, par exemple). Ceci répond aussi à des conditions de travail souvent encore très pénibles. On peut arriver ainsi à un état de saturation inquiétant pour l’avenir. « On ne peut être éducateur plus de quatre, cinq ans » : cette opinion, encore assez courante, semble à première vue, vouer à l’échec l’obligation de faire plusieurs années d’études et d’acquérir une formation plus poussée, avec tous les inconvépients, bien connug, de l’instabilité des titulaires de postes. Il parait certain, pourtant, que le travail de l’éducateur de groupe puigge devenir un véritable métier. Mais cela ne peut être envisagé que sur la base de conditions de vie et de travail permettant une vie personnelle et familiale la plus normalieée possible : — galaire, vacances, logement, horaire. — travail d’équipe, ge traduisant réellement dans les faits : relations de tra¬ vail horizontales et non plus verticales seulement. perfectionnement continu (supervision, stages). — recherches, à l’échelle de l’établissement et à l’échelon du groupe. — efectif de groupe réduit : de 8 à 10 enfants au maximum. Tout cela doit se situer dans une perspective thérapeutique oì l’essentiel du travail de l’édudateur consiste à modifier des comportements, en utilisant comme principales techniques, le maniement de la relation individuelle et le maniement du groupe. On peut aussi rappeler l’importance de l’engagement personnel de l’édu¬ cateur (qu’il soit culturel, social, politique ou religieux), signe de son ouver¬ ture gur le monde extérieur et facteur non négligeable d’une vie normalisée. Il a été indiqué que « l’hygiène mentale de l’éducateur et les conditions techniques valables et efficaces de sa profession, se rejoignaient comme les deux faces d’une même médaille ». 1441 Si ces conditions deviennent dange¬ reuses pour lui, elles le deviennent également pour les enfants. M. Lemay 1221 a montré l’importance de tous ces problèmes au triple niveau de la sélection, de la formation et du travail quotidien. On ne saurait trop souligner qu’au delà de l’apprentissage (1) d’un ensemble, d’attitudes de base, l’éducateur doit faire un effort constant d’analyse de ses propres (1) Cet apprentigage, long et dificile, suppoge une saolide formation théorique, comple¬ tée et vivifiée dans la pratique par une « connaissance conaciente, acquise sur le vif, de gea principales réactions dêns lea relatiops bumaines, individuelles et de groupe, au milieu des¬ quelles il travaille p f21. De façon générale, nous envisaxeons l’apport de la théorie et de l'expérience vécue, comme un double mouvement, en interraction conetante et, surtout, en développement continu. normalisée possible. tant̂t à tour de role, tantot en meme temps. 191 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE réactions permettant une conduite non défensive et donc de plus en plus adaptée à son objet, enfant ou groupe, au fur et à mesure de leur évolution. Cette auto-régulation sera facilitée par les contrôles successife dont noue parlerons plus loin. Un certain nombre de qualitée apparaissent indispensables, Ellea ne gont pas fondamentalement différentes de celles que l’on peut demander à d’autres travailleurs sociaux : « Possibilité d’identification à l’autre, absence ou réduc¬ tion a minima de projections et de réactions de prestance et de narcisgisme. gouplese de la struéture personnelle, « présence ».1291 Ainsi donc, si une des difficultés du travail de l’éducateur vient du faie que sa personnalité est directement impliquée dans sa relation avec l’enfant. (sans écran ni intermédiaire comme l’enseignant qui enseignevune matière donnée, par exemple), cette personnalité, dans notre perspective et dans les conditions énoncées plus haut, devient alors un véritable outil chérapeutique. 3. Le couple-éducateur (1). Il serait intéressant de préciser ce qui a amené à créer ce couple profes¬ sionnel, concu lui aussi comme outil thérapeutique. Si, actuellement, la plupart des éducateurs sont mariés, les ménages ne travaillent jamais sur le même groupe, pour certaines raisons examinées plus bas, et aussi parce que toute vie familiale deviendrait impossible (cf : moments de travail alternés). Raisons pratiques : la continuité de l’action psychopédacogique, car on n’introduit pas de troisième personne (un roulant) sur le groupe lors des congés des éducateurs. A une époque où certains groupes étaient encadrés par trois personnes, on à pu mettre en évidence qu’il s’agissait d’une struc¬ ture déséquilibrée et perturbatrice pour les enfants et les éducateurs. Raisons psychologiques : image parentale indépendante favorisant le transfert. Chacun est disponible pour les enfants du groupe et libre de toute autre relation perceptible dans le groupe, alors qu’un vrai couple a des rela¬ tions qui risquent de rivaliser avec celles établies avec les enfants, et donc. n’est pas aussi disponible. Les possibilités d’interférences sont trop grandeg : danger de jalousie des enfants du groupe, et de sentiment de frustration par rapport à l’un ou à l’autre ou par rapport à leurs vrais enfants. Risques aussi pour les éducateurs : tensions créées, en revivant certaines situations rappelant celles de leur foyer, liberté et objectivité peut-être moindres. contre-coups de l’effort inconscient que les enfants du groupe pourraient faire pour les séparer. Risques pour leurs vrais enfants : jalousie accrue, par exemple (l’éducateur s’occupé des enfants des autres, aux moments oì, en dehors de l’école, ses propres enfants sont à la maison). Ce fait pose sous un autre angle le problème très important des horaires et du logement, dans le cadre de l’hygiène mentale de l’éducateur, pour qu’il puisse mener la vie la plus (1) Il s’agit de l'’́ducateur et de l’éducatrice, coresponsables d’un groupe et travaillant 102 MÉTHODES DSYCHOLOGQUES, PÉDAGOGIQUES. Il est intéressant de voir que certains enfants, surtout parmi le plug jeunes, appellent parfois l’éducateur papa ou, plus rarement, l’ducatrice maman, ou leur donne les prénoms de leurs parents (en règle, les édugateurg sont appelés par leur prénom et tutovés). On a pu noter le même fait ebez des filles de II ans prégentant un gros retard affectif, Par ailleurs, chez les plus petits, quelques enfants percoivent, contre toute évidence, l’éducateur et l’éducatrice de leur groupe comme mariés entre eux. Ce couple-éducateur ne peut être congidéré aomume viaant à recréer artificiellement une situation familiale f21, lAl mais plutôt comme une image du couple parental, offrant à l’enfant une figure masculine et une Bgure féminine (1). Son but essentiel egt donc : — de favorser la mige en évidence de certains problèmea de l’enfant va. à-vis de la mère ou du père, tout en facilitant une attitude transféren¬ tielle:. de permettre des poasibilités d’identification à une bonne mère ou à un père viril. La façon dont l’enfant évolue dépend augsi des atftudes de l’édurateur et de l’éducatrce : celles-ci doivent être à la fois équilibrées et complémentaires. UIn minimum d’exigences communeg, concernant les rêgea indigpen¬ gables à toute vie collective est néceggaire. Il faut, avant tout, travaillar en complet accord, de telle sorte que l’enfant, sensible aux moindres décalages. le percoive comme une continuité qui le gécurise, et augsi afn qu’il ne puisge jouer sur les deux tableaux. Nous ne nous étendrons paa aur la surenchère, la démagogie, la valori¬ sation au détriment de l’autre, le narcissisme, les réactions de prestance. toujours possibles, mais que nous considérons comme suffisamment éliminés à partir d’un certain niveau de travail en commun. Toute accentuation trop autoritare ou trop laigser-faire, unilatérale. dans la conduite du groupe, est automatiquement ressentie par l’autre (phé¬ nomènès : soupape de sureté ou, mais avec un tel on fait ca..). L’importance du doublage, est ici capitale, autant que l’attitude de l’un en l’absence de l’autre (et par rapport à lui). Loraque tous les deux sont pré¬ sents, il eet souhaitable de montrer aux enfants par des attitudes précises que, sous des formes d’expression différentes, plus douces, parfois moins spectaculaires chez l’éducatrice, l’importance de chacun est égale pour la conduite du groupe et l’autorité, celle-ci tendant à être prêtée par l’enfant à celui qui parle le plus fort, qui est le plus gévère. Par exemple, dans le cag de veillées ou d’activités en commun, l’éducateur demandera à l’éducatrice. devant les enfants, ce qu’il doit faire dans tel cas pour renforcer le prestige et l’autorité de celle-ci. L'’́ducateur, en particulier, doit faire très attention à ses attitudes en (1) Il faudreit oraminer l’importance de l’âge de éducateurs et de leur aituation fami¬ liale, éléments peut-être gécurigants pour l’enfant. 193 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES « le déroulement d’une paychothérapie, n'est pas, dans ses grandes lignes, différent de ce que les éducateurs observent dans les évolutions au sein de leur groupe 121 » (1). A propos de la pasychothérapie individuelle il s’agit, en général, de psycho¬ thérapie analytique. Elle est caractérisée surtout par des relations individuel¬ les, au cours de séances régulières et espacées, où est analvsé le comportement de l’enfant en se servant plus ou moins du transfert. Et cela grâce à la parole. au dessin, au jeu, c’est-à-dire en faisant appel au fantasme, à l’imaginaire. révélateur du vécu profond. La situation psychothérapique est relativement fermée : elle trapsperce au minimum à l’extérieur. C’est une partie qui se joue entre l’enfant et son thérapeute, Par contre, l’enfant, avec son éducateur et son éducatrice, vit dans un réseau de relations au sein d’un groupe en mouvement. La situation dans le groupe débouche et se trouve en interférence constante avec toutes les autres situationg du centre. La situation thérapique ge gitue sur un plan plus imaginaire que la vie dans le groupe. Cette dernière offre à l’enfant de plus grandes possibilités de diffusion et de déplacement. Les passages à l’acte y sont plus réels et plus nombreux, sinon plus intenses. Là première est beaucoup plus discontinue dans le temps. Dans le groupe, il s’agit d’une action menée quotidiennement et à travers toutes les circonstances de la vie (repas, coucher). L’attitude de l’éducateur sera donc didactique, pédagogique. normative, bien qu’informée (au sens de modèle) au maximum, par toutes les autres données et bien que se situant avant tout dans le cadre de relations vécues. Dans un cas on met surtout l’accent sur des élémente sains, dana l’autre on fait ressortir de8 aspects plus nettement pathologiques. Si l’éducateur, lorsque c’est nécessaire, peut manifester une tolérance accrue, il ne recherche pas la régression comme le thérapeute. S’il peut aussi, avec infiniment de prudence et travaillant sous contrôle utiliser dans une certaine mesure le transfert, il ne doit pas, à la différence du thérapeute, faire d’interprétation, sauf dans certains cas précis (2). Il ne s’agit là que de grande délimitations, qui nécesiteraient une étude comparative plus particulière (3). Nous envisagerons plus loin les relationg éducateurs-psychothérapeutes. De même, l’étude des rapports entre les éduca¬ teurs et les autres techniciens nous permettra de mieux cerner le champ d’ac¬ tion des premiers. Nous allons voir maintenant comment la dynamique de la situation triangulaire enfant-éducateur-éducatrice, s’inscrit dans le cadre de la dyna¬ mique du groupe. (1) C. F. REDL, IG8I, p. 213. (2) Voir le cae de Serge M. 121 (3) Il faudrait, par exemple, examiner en détail les congéquences paychopédagogiques d’un transfert latéral sur un éducateur, fait par un enfant en psychothérapie. a couple-éducateur ». 165 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INTANTILE b) Le maniement du groupe. 1. L'enfant, l'éducateur et le groupe. Le But du groupe. Avec un certain retard, l’évolution de la conception du groupe, dans les internats de rééducation, rappelle celle des grandes tendances de la sociologie en France 1211. Mal nécesaire pour G. Tarde, puis moyen de socialisation (la contrainte pour E. Durkheim, le groupe est envisagé par G. Gurvitch 1591 comme favo¬ rable à l’épanouissement de l’individu sous certaines conditions. Avant ce dernier, Kurt Lewin, aux U.S.A., s’était moqué des prétentions des sociologues à vouloir rendre compte de la vie des groupes (1). Pour Gurviteh, les termes même réalité, devant s'éclairer et s'enrichir réciproquement. groupe-individu apparaissent comme les deux aspects inséparables d’une Les conceptions socio-pédagogiques des villages et républiques d’enfants. ont succédé à celles, disciplinaires, des maisons de correction. Nous avons vu plus haut les réserves que l’on peut émettre à propos des premières, tout au moins pour le genre d’enfants qui nous intéresse ici. Après la période maison d’enfants, le groupe est apparu comme une gène et un frein à l’action sur l’enfant. « La structure des groupes constitués dans les internats est souvent un facteur aggravant. Entre chaque enfant et l’adulte, s’interposent toujours tous les autres enfants du groupe 1321.» On a essavé d’abord, de façon purement négative, de limiter cette infuence perturbatrice du groupe surl’enfant. Puis, peu à peu, est apparue la possibilité. non seulement de faire coexister vie du groupe et évolution dé l’enfant. mais aussi de faire concourir la première à la seconde. Le groupe, manié correctement par l’éducateur, peut et doit, non seulement permettre mais aussi favoriser 1781 les progrès individuele en satisfaisant les besoins de chacun de se membres, « Il n'’est pas possible de juger de la ré́ducation en profon¬ deur d’un groupe par la manière dont il fonctionne. On ne peut l’apprécier que par la façon dont ses membres évoluent 1221. » Dans cette optique, le travail de l’éducateur peut se définir comme group¬ vork : à travers les aspects éducatife (enseigner des travaux manuels, diriger des programmes), l’éducateur comme le groupvorker, « favorise l’adaptation socio-psychologique ou (et) la croissance de la personnalité de l’individu ainsi que le développement social du groupe en tant qu’entité, qu’élément se déterminant lui-même » 1361. Cf. Bettelheim surtout 1781, qui parle de groupwork permanent. De facon plus précise encore, non geulement milieu de vie et moyen de socialisation, aspects nécessaires mais non suffisants, le groupe est devenu (2). (1) A cet endroit, on ne saurait trop souligner l’importance de l’apport de la paychologie sociale américaine et du travail gocial qui lui est intimement lié : anthropologie culturelle dynamique de groupe, casework, groupwork, etc. (9) Copne cen ce, poi coneme, pous laeyone p, le peronnelit de l'dvcstons et le 198 MÉTHODES PSYCHOLOCIQUES, PÉDAGOGIQUES, pour l’éducateur, un véritable outil thérapeutique. Compte tenu des particu¬ larités propres à certains centres (séjour court, intensité du traitement, nature des cas, équipement, par ex..) on peut admettre que cette conception soit un peu différente selon les étâblissements, bien que, sur le plan des idées. une évolution nette commence à se faire sentir en ce gens 1631. L’éducateur et le groupe. Nous avons montré plus haut qu’une attitude plut̂t démocratique comme méthode de conduite de groupe n’était que le prolongement d’une attitude tolérante envers chaque enfant. Pour préciser cette notion, nous avona cité quelques procédés concernant les communications, l’information, les perepectives. Certains auteurs pensent que l’éducateur doit tendre à devenir le vrai leader du groupe (de l'’in-group (1). On a même emplové le terme de meneur Ceci peut être valable dans des situations bien détermunées, certaines expé¬ riences de prévention, par exemple, où l’éducateur doit d’abord faire gtens le cadre et les normes du groupe pour ensuite, de l’intérieur, essaver de réorienter l’activité de la bande vers des burs plus positifs 1571 181. On peut diffcilement l’envisager ici, étant donnés les âges, les intérêts, les buts, le couple-éducateur. et même penser que cette position serait contre-indiquée (2). L’éducateur doit etre plutêt un animateur, ce qui lui premet de parti¬ ciper activement tout en n’étant pas trop impliqué dans l’action. Il doit faire montre de la même souplesse adaptative qu’envers chaque enfant congidére individuellement (attitude diagnostique). Suivant les moments, les activites climat et les besoins du groupe, l’éducateur doit se montrer davantage laisser¬ faire et non-directif ou, plutôt, autoritaire et directif (3). Il peut être tour à tour actif ou réservé, meneur ou conseiller... Les éducateurs et leur groupe, bien que formant un ensemble, se situent à deux niveaux diff́rents de réalité : enfants et adultes. En outre, les aspects formels ne recouvrent jamais exactement la ye informelle du groupe et vice-versa. Un des rôles de l’éducateur est d’en évaluer constamment le jeu complexe pour agir en conséquence : par exemple, modifier la distance entre la vie spontanée et la vie organisée du groupe 131. Il doit arriver à sentir à prévoir de quoi le groupe a besoin, à un moment donné, et les movons nécessaires pour y arriver : c’est en ce sens qu’on peut parler de, l’éducateur comme leader de son groupe. Ce mode de conduite de groupe suppose une analyse constante de cet aspect du travail, pour opérer une auto-régulation du comportement. Il s’agit aussi en quelque sorte d’une régulation par le groupe, qui peut, à la (1) Structure informelle, apontanée, du groupe. (2) Il faut quesi tenir comnbte du contre-tranifert : le déeir de dominer aemble plus fré¬ quent et plus dangereux dans cette perspective. (3) Nons ne pouvona analyger ici les motivationa qui peuvent soug-tendre une atti¬ tude autoritaire ou laisger-faire comme méthode aygtématique de conduite de groupe ET SOCIALES EN PSYCHATRIE INFANTIE 197 limite devenir automatiaée, intuitive En termes de evbemnétique on pourrait parler de fed-back (1) Ce résijustement constant exige : — une golide formation en pyctolbogie sociale. — un entrainement aux techniques de groupe (paychodrame, groupe de diagnostic) : — une longue experience gur le tas toujours remise en question. Ces trois apports ne peuvent jamais être considérés comme terminés et s’informent réciproquement. Le couple-éducateur. Noug ne reprendrons paa ce qui a été développé précédemment : nque voudrions geulement souligner le danger d’une trop forte complémentarité et d’une trop grande fxatipn dans des rôles bien déterminég. On a parfoie obgervé la tendance plus ou moins implicite à la division suivante du travail : l’éducateur centre gon attention sur le groupe, l’éducatrice plutêt gur les cag individuels. En caricaturant un peu, on pourrait dire que le premier tend à ge charger de la discipline, l’autre de l’affectivité. Mis à part le problème des motivations gous-jacentes, on peut considérer ces comportemente comme une fuite devant la complexité du travail. L’éducateur -n’appréhende plus l’enfant dans sa totalité, mais mutilé d’une part de lui-même. Le jeu du trang¬ fert est faussé. Sans parler des multiples problèmes posés par la différence brusque de situation ou plutôt de climat, au moment du relai entre les deux éducateurs, des exigences contradictoires peuvent faire naitre chez les enfants, désorientation, insécurité et anxiété. Ici encore, le couple-éducateur joue un rôle très important dans le contrôle réciproque de ses deux membres Chacun doit être pour l’autre un miroir. mais un miroir critique, lui permettant de mieux connaître son groupe et d’améliorer son propre comportement. les moments où les deux éducateurs travaillent en même temps. Rappelons De ces divers points de vue on peut mesurer la richesse que représentent que l’entente, la communauté de vues et d’attitudes, perceptibles par l’enfant dans ces moments de doublage doit pouvoir se faire gentir, même en f’âbact de l’un des deux. Le groupe teu por l’enfant. Il faudrait faire toute une étude phénomenologique esur la façon dont le groupe est vécu par l’enfant. Le groupe, pour l’enfant, est éprouvé à la fois, comme protection et comme danger. Par ses normes, son code, son climat, sa cohésion, son organisation de statuts et de rôles, il foumit les cadres qui permettront à l’enfant de se (1) En formalisant beaucoup, le travafl de l’éducateur pourrait être décrit comme un modèle cybernétique (avee entrée, gortie, contrôle, perturbation, circuit fermé, fed¬ back, etc.). Cf lea tentatives dea socianalvates 1S6l qui définissent le groupe comme un syatème de fonctions sociales interdépendantes (fonctions : motrice, d’intégration des écarta, de com¬ penstion du retard, d’anticipation on de prévigion). 198 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES sentir membre d’un ensemble structuré, à sa place. En institutionnalisant son comportement, en reconnaissant l’enfant dans un statut et un rôle donnés. le gtoupe va contribuer à définir et à assurer son identité sociale. Le groupe le défendra contre les entreprises possibles d’un groupe étranger, Par là le groupe est sécurité. Mais il peut être aussi menace. Sa vie, dans ses aspects informels, ge déroule facilement sur le mode de la compétition : le premier aplus ancien, le premier plus fort, la plus belle, 1111 1131. Et, surtout, la vie avec d’autres enfants peut réactiver des rivalités, des conflits fraternels 121 1191. De facon générale, pour beaucoup de ces enfants, très sensibles à la frustration, il est diffcile de tolérer l’attention que l’éducateur ou l’éducatrice portent à d’autres qu’eux-mêmes. C’est pour cela qu’ilestillusoire, pour eux particulièrement, de se contenter d’une gimple adaptation sociale qui ne serait pas liée à la normalisation de l’ensemble de leurs relations. L’un ou l’autre de ces deux aspects (protection et danger) peut varier en fonction de la personnalité de l’enfant, de son histoire, du climêt du groupe, de l’éducateur. Il peut varier aussi dans le temps, A l’entrée de l’enfant, le groupe est souvent percu comme redoutable parce qu’il représente punition et monde inconnu. Inhibition, excitation, agressivité, réactions de prestance, traduisent alors une forte anxiété. Le groupe et l’éducateur sont aussi rendus plus ou moins responsables de l’abandon, réel ou vécu comme tel, des parents. La séparation est souvent très pénible pour des enfants n’avant jiamais quitté leur famille, Puis, peu à peu, l’enfant apprend à réduire le danger que repré¬ sente le groupe et arrive à une bonne intégration qui correspond à la recon¬ naissance de son identité sociale par lui-même et par les autres. Le groupe, pour l’enfant, a une réalité fictive parce que temporaire, hors de la vie de tous les jours. C’est une gorte de jeu. Celui qui reste long¬ temps ne peut plus jouer le jeu parce que la réalité a trop d’emprise sur lii. Mais le groupe, comme tout jeu, possède aussi une existence réelle parce que vécue. Chaque enfant, avec ses interrelations dans le groupe, le groupe en tant que tel et les éducateurs, forment un ensemble mouvant, complexe, dyna¬ mique, se déroulant sur plusieurs plans à la fois et dont les éléments sont dificlement dissociables. On ne peut qu’essaver d’en isoler les principaux aapects, pour la commodité de l’ahalyse, analyse qui n’a de sens qu’à la lu¬ mière des données de la dynamique de groupe (1) (1) Pour KRETCH et CRUTCHPIELD. LACACRE, ANAIEU, 1251, la dynamique de groupe est l’étude du fonctionnement interne des groupes. Certains auteurs la considèrent comme la théorie générale des groupes. FAUCHEUX, par exemple 1371. Pour CARTVRIcnTet ZANDER170 « La dynamique de groupe doit être définie comme le champ d’investigation destiné à faire progresser la connaissance de la nature des groupeg, des lois de leur développement, et de leure interrelations avec les individus, les autres groupes, et les institutione plue larges ». En vue d’un but donné, au Congrès sur le groupworls et la psychothérapie degroupe 136). la considérant comme l’lément gous-jacent de tout travail de groupe, on en e donné la définition suivante : « La dynamique de groupe est l’interaction des forces qu’apporte chaque individu dans une situation de groupe et per laquelle s’effectuent la croissance et le déve¬ loppement de chacun sous la direction du chef de groupe ». Il convient enfin de la distinguer de la dynamique du groupe, expression qui désignera ici, la vie et l'évolution dans le temps d’un groupe donné. 10 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE L’admission du nouvequ et la composition du groupe. (1). L’éducateur doit faciliter au maximum l’accueil du nouveau, y préparer le groupe. Le premier jour est capital. On doit recevoir le nouveau avec sym¬ pathie, essaver de le mettre à l’aise, mais sans avances exagérées. Une petite réception n’est pas souhaitable. Il vaut mieux qu'’il entre dans le groupe le plus normalement possible. La visite, avec ses parents, des locaux où il vivra. de même que quelques explications globales sur certaines activités du groupe sont une bonne introduction. Il faut lui faire comprendre qu’on essaiera de le rendre heureux, davantage par des actes que par des paroles. « Avant d’être une parole, l’éducateur est une présence concrè̂te et un engagement à tous les niveaux 1441 ». L’enfant est alors, soit méfiant, soit plein d’espoir. On doit tenir compte de la réaction au placement : il ressent sa situation comme un abandon, même s’il vient d’un milieu apparemment hostile. Il peut accuser l’éducateur d’être l’agent de sa frustration. « Ils nous viennent — c’est en tout cas leur situation subiective — rejetés, trabis, forcés, mal aimés, coupables, vicieux., l’internat. c’est l’inconnu, donc la menace ». TAIl Le nouveau peut se révéler d’emblée ou se controler totalement. La mise au courant et la prise en charge, le premier jour, par un garçon du groupe. faciliteront son admiseion. L’éducateur doit faire attention aux phénomènes de groupe déclanchés par cette arrivée. Les brimades classiques sont évidemment impensables ici. Mais existent un certain nombre de rites. Tout nouveau perturbe l’ordre du groupe, celui-ci a donc tendance à l’intégrer par nécessité interne. Les rites visent à situer socialement chaque membre du groupe aux veux du nouveau et vice-versa. Questionnaire en règle d’abord, qui a, en fait, une fonction d’informa¬ tion, d’identité, mais ausei de défi et d’épreuve : nom, age, adresse, métier du père, etc.. Puis problèmes de groupe: «As-tu connu un tel, un ancien 2», «Es¬ tu allé au camp l’an dernier 2 », « Connais-tu telle histoire 2 ». « Sais-tu qui est le premier plus ancien 2 ». « le premier plus fort 2 ». « la première plus belle du groupe » 2 etc.. On pourrait presque parler de rites d’initiation : on cherche à introduire le nouveau mais tout en lui faisant sentir qu’il n’est qu’un entrant. Chaque membre du groupe revit en lui sa propre histoire 1411. Une intervention active est parfois nécessaire de la part de l’éducateur pour les questions trop délicates sur les parents, les problèmes d’infrmité, de coloration de peau, un déf trop poussé. « Le groupe peut ŕpondre à des besoins eagentiels de l'enfant : besoin de faire partie d’un novau gocial, besoin d’être accepté, estimé à sa valeur, admiré peut-être, besoin d’être protégé, besoin de communiquer, de s’extérioriser en présence d’autres, de participer à des activités et à des émotions communes. Autant de possibilités d’accrochage offertes, gi elles sont bien utilisées. Une première condition pour l’intégration de l’enfant est de lui démontrer d’abord combien cela vaut la peine de faire partie de ce groupe ». IAIl (1) Diff́rents points de cette partie et de la suivante ont déià été développée dans Leaders et cohésion de groupe en Centre d’Obsertation et dans Leaders et structures de groupe: observation prolongée d’un groupe de flles en Centre d’Observation UIil et 1131. 310 MÉTUODES PSYCLOLOGIQUES, DÉDACOGIQUES. Le deuxième, et surtout le trisième jour gont parfois délicate. Aprèg une séparation relativement peu dramatique, après le dépaygement du début. des enfants réalisent leur abandon : les éducateurs devront alors les entourer et les eoutenir, avec l’aide du groupe, pour leur faire passer ce cap difficile. Un groupe à structure souple facilitera l’intégration. Pour B. Bettelheim 1491. la régeption du nouveau eat un test de la cohéaon du groupe. Les admissions au Centre d'observation se feront avec d'autant moins d’a-coups qu’elles geront plus individuelles et plua espacées. Un par un, les enfante geront abeorbée blus facilement. A noter l’importance du premier jour pour certaine, qui gerdent des relations d’amitié très longtempa avec celui arrivé le même jour dans le même groupe, ou même duns un autre groupe. malgré parfois une grande digférence d’Âge et de personnalité. Le problême du recrutement des nouveaux est tr̀s délicat. Il c’effectue. en fait, en fonction des places disponibles et de l’âge chronologique des entrante, gauf exceptions pour quelques cas trop marqués de retard affectif ou social. En vertu de la raison sociale et du type de fonctionnement d’un centre. on eat tenu de regevoir tous les enfants acceptés à une contre-visite d’admis¬ gion. Or, il s’avère que dans certaine cas, l’état d’un groupe est tel, qu’y placer certains enfants est contre-indiqué pour eux : (effet de choc possible. par exemple), Inversement, si le groupe est fortement saturé en enfanta agressifs, par exemple, y faire entrer un nouvel enfant agressif peut le ner¬ turber dangereusemont. Par ailleurs, un dogage à l’entrée paraît assez illu¬ soire, compte tenu des pogsibilités d’évolution au cours du séjour. Mais cela pose un sérieux problême ei l’on désire quo le groupe demeure thérapentique au maximum pour cbacun de ses membres. 2. Le groupe (1) comme ensemble. Les cadres sociauz du groupe. Les cadres gocuaux dang lesquels vit le groupe (horatres, particlpaton à la vie du centre), son fonctionnement comme collectivité organisée, exigent, nous l’arvone vu, un minimum de règles qui favorisent le besoin de gécnrité des enfants, en leur fournigsant des cadres de référence et des points de repères. Ces cadres sont une nécessité, conetituant d’ailleurs la base indispensable à partir de laguelle l’éducateur, avant son groupe en main peut individualiser certaines de ges attitudes, augmenter sa marge de tolérance. Ingigtone gur le fait qu’il ne s’agit pas d’une apphcation rigide de ces règles : le style, le contexte et la perspective en faciliteront l’acceptation par l’enfant. Nous rappellerons ici l’important apport des méthodes d’éducation active : gene (1) De facon genfrale, ale groupe peut être défini comme un système d'interactions, maia à l’intérieur d’une atructure qui règle l’interaction et même la guacite » 1721. Ce terme dégignera tet le grouvpe de vie, organigé. Celui de soug-groupe dénignera les forgations gpon¬ tanéeg. Sant oublier que les aapectu formels et infommuela, étroitement méles, y sont en intor¬ action conatante. 4 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE de la collectivité dans le respect de chacun, appel à l'ipitiative, demande progressive d’efforts, travail en équipe, participation de tous à une œuvre commune. Quelques aspecis de la siructure (1) et de la dynamique du groupe. sont solidaires. L'étude statique des propriétés structurales [70] des groupes Il s’agit ici d’une diatinction aux ns d’analyse car les deux aapecte et des motivations, attitudes et perceptions de leurs membres « fournit les concepts de base, souligne l’importance des facteurs socio-culturels et permet de clasger les groupes » 1721. Mais l’étude évolutive est indispensable pour aigir la vie d’un groupe dans son fonctionnement et son développement. Nous évoquerons un enemble de faits qui se cont dégages peu à peu de notre expérience 11I1 1131. Mais nous ne pourrons donner que quelques apercus généraux laissant dans l’ombre des nuances que geule, uno recherche syaté matique permettrait de mettre en évidence. Ici encore, il faudrait étudier la paychologie de groupe au centre avec observation directe et systématisée tests sociométriques, gelon la méthode différentielle (comparaisons entre sexes), et selon la méthode génétique (évolution avec l’âge), en tenant compte de certaines situations (groupe ou inter-groupe, classe, éducateurs titulaires ou stagiaires, centre ou camp d’été, période de classe ou vacanceg), et des cadres sociaux dans lesquels les groupes fonctionnent. Dans l’esprit de la méthode pathologique on pourrait enguite comparer, toutes proportions gardées, certains résultats avec ceux obgervés sur une population tout venant dans des internats primaires et dane des classes normales de la Seine, par exemple dans les travaux de P. H. Mauçorps 1131. Signalons, À titre d’exemple, la très grande différence des réscaux socio¬ métriques, de plus en plus structurés avec l’âge, illustrant le processus de socialisation. D’autre part, le phénomène de couplage, avec sa fréquence et son intensité, caractérise une structure particulière aux grandes filles (couple mère-fille) chez lesquelles le modèle culturel de la mère joue un très grand rôle 1111. Qu’il s’agisse de son travail avoc chaque enfant pris dans sa gingulanité ou avec le groupe en tant que tel, l’éducateur tient compte du grand principe du travail social, casework et groupvork : toujourg se référer au niveau actuel de développement du sulet. L’éducateur doit connaitre, pour exercer son infuence (contrer, dériver. canaliser, valoriger, etc..) la gtructure du groupe : — les soucgroupes (2) dimension, composition, durée). — lea statute (3) (igolés, rejeté, etc.). (1) De façon géntrale, nous entendrons par gtructure, un engemble, une certaine orga¬ nisation d’́léments interdépendants dont la totalité n’est pas péductible à la gomme de gea partieg. (2) Ou groupes pgychologiques, informels, gpontanés, face à face, où tous les membres interaMagent et ge porcoivent directement. (3) CE note I. p. 112. 112 MÉTHODES PSYCHOLIOGIQUES PÉDAGOGIQUES — les rôles (1) (leaders, conseillers, etc.), — les relations et les confits des gous-groupes et des enfants, des sous-groupes entre eux, des enfants entre eux. Mais si l’éducateur agit dans le groupe à un moment donné (ce qu’on pourrait appeler la dynamique dans l’espace), il doit tenir compte de sop passé et essaver de prévoir son évolution puisqu’il est un organisme dyna¬ mique qui se développe dans le temps. Toujours dans le but de permettre les progrès individuels, l'éducateur doit favoriser une bonne cohésion du groupe (2). Cette remarque applle des régerves extrémement importantes. La cohésion est un concept central en psychologie de groupe. La paychologie sociale a montré (les expériences de Deutsch et de French notamment) que, de façon générale, les groupes de haute cohésion « sont beaucoup plus gengibles, moina tolérants aux dégac¬ cords que les groupes de plus basse cohésion et qu’il s’y déploie beaucoup plus d’efforts pour réduire les désaccords » 1541. On y constate plus de sengi¬ bilité aux frustrations et donc, davantage d’agressivité, Mais ces régultats doivent être nuancés. Gross 1551 a établi que la cohésion ne saurait être un concept unitaire : on ne peut la réduire à l’un de ses aspects. Les différents types de cohéson « n’aboutissent pas toujours à des effets analogues en ce qui concerne l’aptitude du groupe à modifier la position de ses membres » 1541. De plus, les questions de but, de structure et de climat ont leur impor¬ tance. Dane l’expérience de Deutsch, les deux groupes étaient de structure. coopérative pour l’un, compétitive pour l’autre. Dans l’expérience de French, la moitié des groupes étaient organisés, le reste inorganigé, et dans une gitua¬ tion de frustration (ils devaient résoudre des problèmes insolubles). On pourrait tirer quelques indications psychopédagogiques à partir des résultats d’une recherche 1131 sur quelques types de leaders et sur la cohésion de groupe, dans un groupe de quatorze garcons de 8 à 10 ans. Ces remarques recoupent, avec quelques nuances, les observations de M. P.A. Drillich 1A11 : « Avec Gux, leader de genre plutôt autoritaire, le groupe apparait comme hautement cohéaif, dana son aspect pragmatique (activité, but, etc.), fonctionnel et quant au prestige. mais on observe une grande rigidité de structure avec relations verticales, forte régigtance aux changements, des phénomènes de « bouc-emigsaires », agregsivité, blocage de certains garcone gènés ou même freinés dans leur évolution. CE TII1 » « Avec Joel, leader plutôt laisser-faire le groupe prégente une forte cohégion, mais uni¬ quement dans son aapect interpersonnel. Les relations cont très libres, borizontales, main le groupe est trop pasif, réalise peu et fait montre parfois d’une grande agressivité, » « Avec Jacques, leader plutôt démocratique, la cohésion apparait peut-être un peu moins élevée dans l’ordre pragmatique et interpergonnel qu’avec Guy et Joel, maie elle est plus (1) Voir définition, page 121. Leur organisation correspond à la distribution de l’in¬ fuence dans le groupe (rang, pouvoir, prestige) et ge caractérise comme une structure hié¬ rarchique. (2) La cohésion de groupe et ce qui fait que le groupe est groupe : la groupalité. On poureit la efni conme le rinltante de forces qui maintioanoent les penbres 42s le goype, 1371 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE 13 homog̀ne. Le groupe est plue actif, les relations sont nombreuges et gouples. D’autre part. on observe peu de phénomènes négatifis, » L'éducateur doit donc tendre à favoriser la cohésion, mais dans une certaine mesure, celle qui permettra au mieux à chaque enfant de s’épanouir et de s’adapter dans le groupe, et en tenant toujours compte des dUrre aspects de la cohésion en liaison avec la structure et la dynamique du groupe. Une bonne cohésion renforce le sentiment de sécurité. « Un groupe cohésif n’est pas seulement réglementé par les lois de l’institution, maie connait son propre code, ges rites et ges traditions » 131. « Un contrôle gocial s’y développe; qui constitue un élément précieux dana les progrès de réadaptation des enfants. C’est au gein du groupe cohésif que l’enfant peut se rapprocher de l’éducateur à sa propre cadence ». 1411 Pour cela il lui faut etre attentif : — à l’activité du groupe (spontanée et organisée). — À l’attraction interpersonnelle des enfants. — à leurs sentiments d’appartenance au groupe, — au moral et au climat du groupe (participation émotionnelle). — aux admissions et aux départs. La cohésion peut s’apprécier par la valeur que les enfants attachent à leur appartenance au groupe. Un groupe est soumis à des forces de cohésion et à des forces de rupture. L’éducateur doit être particulièrement sensible à certains phénomènes de groupe : contagion et effet de choc 1381, bouc-émissaire, réjection d’un déviant. ainsi qu’aux tensions et conflits engendrés. Il évitera aussi de créer entre les membres du groupe, de façon explicite ou implicite, une atmosphère compé¬ titive, mais développera la coopération en montrant que l’on peut discuter gans ge disputer et travailler ensemble sans se battre. L’éducateur ne doit jamais rendre un groupe plus cohésif au détriment des autres groupes d’un centre, en sur-valorisant son propre groupe ou en dénigrant systématiquement les autres. Il importe au plus haut point de développer un esprit de la maison qui dépasse et englobe les groupes. L’édu¬ cateur ne considère pas son groupe comme une propriété mais comme une délégation, partie intégrante d’un tout. Ce qui touche un groupe intéresse chacun. Un gignal d’alarme est constitué par cette réaction d’un enfant à une sanction donnée par un éducateur autre que le sien : « tu n’es pas notre éducateur 1 ». Les activités inter-groupes gagnent à être développées (jeux, sorties), d’ou l’importance, entre autres, des classes et des clubs, qui constituent des situa¬ tions inter-groupes régulières. Dans un centre, le groupe de vie constitue la structure, la cellule sociale fondamentale, primaire, comparable à la famille. Dans des tests sociomé¬ triques donnés dans six classes, constituées en général en fonction du niveau det filles : « c’est une vicienge p 1 ». 14 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PEDAGOGIQUES scolaire, les garcons d’un groupe de 8 à 10 ans choisigsent ceux de leur propre groupe dans une proportion qui varie de 55 2% à 85 2% du total des choix. Les relations garçons-filles : Elles mériteraient une étude spéciale. Les claages, les cluba, les récréationa sont entièrement mixtes. Le réfectoire et certaines activités (cinéma, jeux inter-groupes) gont mixtes, maispar groupe. Chacun des deux groupes de flles, comme les quatre de garcons, ont leur pavillon avec chambres, ateliers. Les locaux des uns et des autres servent. indifféremment de salles de clubs. Les relations garçons-filles dépendent en partie des normes des groupes de vie. Chaque groupe a tendance à fixer un modèle de relation (la fiancée. le copain, la mère, la ille) variable selon les âges. Une fille ne respectant pag ce modèle ou lui apportant deg modifications trop importantes, est mal jugée par le groupe, voire condamnée et rejetée. "Pierrette, 11 ans et Georges, 12 ans se séparent trop des autres. Réaction du groupe Signalone à ce gujet qu’une pédagogie adaptée, le climat des groupes. l’attitude des éducateurg quant aux problèmes gexuels, constituent la meilleure facon de garder à ces relations un caractère acceptable. Si les éducateurs sont amenés à intervenir directement, les interdits sont souvent inopérants. Ila riaquent d’augmenter le caractère tabou de ces problèmes et l’attrait du fruit défendu. La méthode la plus efficace consiste en-discussions au niveau du groupe, à table, A la veillée, par exemple, et en entretiens individuels. En général, les problèmes de co-éducation ne posent pas de problèmes trop graves. les enfants les plus âgés n’avant que 13 ang. La perception des statuts et des roles dans un groupe de gexe oppose est marquée de curieuges distorsione. « Jeannine est tout juste acceptée dans gon groupe. En dehors du groupe, gee attitudes de prestance font qu’elle a une tre grande importance aux veux des garçons qui la considèrent comme le chef des illes, Par un effet en retour le prestige de leannine augmentera dans son propre groupe.» Il gemble que le niveau et le style gocio-affectif conditionnent les rela¬ tions entre tel garçon et telle fille, bien plus que l’âge. Dans les clagges, au cours de tests sociométriques, on a trouvé un geuil un peu plus élevé que celui mis en évidence par Moreno 148l quant au chan¬ gement de direction des choix. Jusqu’à II ans, les enfants choisissent, plus ou moing, gelon les situations, des enfants du même sexe ou de l’autre sexe. alors qu’après II ans et surtout 12 ans, les choix sont de plus en plus avec le même sexe. Dérogation importante, pour une situation (question) de leader- ghip, les enfante de II et surtout de 12 à 13 ans, garçons comme filles choi¬ sisgent comme chef de classe, un garcon. Il s’agit la, gans doute, d’un modèle socio-eulturel : un chef ne peut être que du sexe masculin. Mais, en fait. depuis plugieurs années et de façon fréquente, ce sont les filles qui dominent 45 ET SOCIALES EN PSYCHIATRE INFANTILE dana les grandes clases. Comme dans le premier cas, il e’agit de structure percue et dans l’autre de structure réelle, on peut émettre l’hypothèse d’un certain décalage du modèle socio-culturel par rapport à la réalité, comme pour certaines structures familiales 1161. On doit noter la remarquable cohésion des groupes, quand, à l’extérieur. ils sont mêlés à d’autres enfants (patronage, cinéma de ville, par exemple) : les enfants restent souvent groupés, se tenant au moins augsi bien, ginon mieux que les autres 1341. Cela pourrait d’ailleurs s’interpréter en terme de peur. de mécanisme de défense du groupe (ségrégation). Il faut connaitre et percevoir rapidement les mécanisme de défenge du groupe. Deux de ceux décrits par Fritz Redl 1391 se retrouvent ici fréquem¬ ment 1131 : la ségrégation (séparation du groupe, fermeture isolationniste. Par exemple, le groupe érige des barricades autour de son territoire), et la symbolisation dépersonnalisante (à partir du moment où un enfant appartient à un autre groupe, il peut n’être plus considéré comme une personne concrè̂te mais comme un symbole du groupe étranger.). « Christian, du groupe des Grands, fort bien conpu de tous les enfanta, vient sur le territoire d’un eutre groupe. Yves alerte ce demier en griant : Attontion, il y a un Grand gur notre tertitoire 1 ». Il convient donc de s’eforcer de développer au maximum la coopéra¬ tion entre les groupes, 1131 L’éducateur tiendra toujoure compte des normes implicites et du code informel du groupe 1681, comme son action d’ensemble doit aussi tenir compte d’une certaine marge, variable mais néoessaire et inévitable, entre les agpects organigés et les aspects spontanés de la vie du groupe. Il doit apprendre au groupe à fonctionner en tant que tel. Et, de cette façon, avec l’appui d’autres techniques, se fait l’apprentissage, pour chaque enfant, d’un certain mode de relations sociales. En d’autres termes (1): « La gociablité globale du groupe est un équilibre entre la presgion socile et le désir de fugion. Selon la prédominance de l’un de ces élémenta, un groupe peut être, à un moment donné, goit une masse, goit une communauté, soit une communion. En pratique, dans une m̂me joumée, un même groupe peut passer par ces trois formee de gociabilité. Il est évident que l’éducateur devra éviter de la laisgser se trangfomer en une maage (trop d’inaction par exemple). Il devra parfois remonter le moral en créant une communion, mais gachant bien qu’il s’agit d’un état exceptionnel, ne pouvant se maintenir longtempe, sans chute de moral parfois désagtreuge. Il devra être satisfiait, si dans la plupart des cas, son groupe fonctionne comme une communauté. » 191. Quelles que soient les nécesités de la collectivité, l'’́ducateur ne doit jamais oublier qu’il s’agit d’enfants avant leur propre passé, aux prises (1) G. C. GUEVITCR 1SL, a propos de la microsociologie ou tude des groipea reatreints. 116 MÉTLIODES PSYCHOLOGIQUES PEDAGOGIQUES. avec une réalité sociale qui pourra, selon les circonstances, favoriser ou entraver leurs possibilités d’évolution. 3. Dynamique individuelle et dynamique du groupe. Le groupe comme cadre et point d’appui d’une individualisation des attitudes. La psychologie sociale a montré que, d’une façon générale, il était plus facile de changer les comportements individuels en groupe que séparément. D’autre part, l’étude du phénomène de la normalisation par le groupe, a mis en évidence qu’un groupe a tendance à se donner une opinion propre, à laquelle ses membres se conforment, même si, individuellement, ils avaient au départ une autre opinion 1251. Tout enfant arrive dans un groupe qui fonctionne déjà, avec ses propres normes. En général, pour pouvoir se faire reconnaître comme membre du groupe, ou pour pouvoir tout simplement coexister dans le groupe, il doit d’abord faire siennes ces normes. Le concept de reconnaissance est fondamen¬ tal : être admis comme membre du groupe avec son statut, son rôle, ses traits particuliers, n’appartenant qu’à lui, est la première étape condui¬ gant à un meilleur ajustement de son identité sociale. « Si l’identité ne se fait pas, si l’on ne phrvient pas à la probre découvèrte de son rôle social, il a grand risque d’aboutir à une diffusion de soi-même 1421. » Mais le groupe formant un tout, les normes formelles moins opposées que diffé rentes des autres ont été intégrées par lui parce qu’assurant sa marche. L’enfant sera amené, de plus en plus, à respecter de lui-même toutes les normes et donc à mieux les accepter. Il pourra se permettre moins d’écarts car trop d’insécurité et de culpabilité envers le groupe s’ensuivraient 1201. L’éducateur devra d’ailleurs veiller à maintenir dans des limites raisonna¬ bles et surtout souples ce poids du groupe. Le groupe va donc avoir un rêle régulateur, d’un appui très important. « La relation éducative se caractérise par l’autorité morale de l’adulte. Sur l’enfant, cette autorité constitue l’aspect pédagogique de l’identification décrite par la psychologie dynamique 1301. » Nous avons vu que cela n’était possible d’emblée que pour certains enfants. Pour les autres, un jeu plus complexe de relations de transfert et de relations de réalité exige des attitudes psychopédagogiques plus différenciées. La confiance en l’adulte, condition première de son autorité 1301, s’établira en fonction de l’évolution de l’enfant. Mais il est bien évident que l’éducateur a une fonction d’autorité, per¬ mettant la vie d’un groupe d’enfants, d’âge scolaire surtout. L’éducateur participe de l’Autorité 1301, déléguée par le centre, mais, personnellement, il reste disponible pour des relations interindividuelles d’un autre ordre. Ceci ge traduit souvent, en pratique, par l’exercice de cette autorité essentiellement gur le plan collectif. On donne alors à certaines exigences, interdits, sanctions. ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INTANTILE 7117 un caractère impersonnel qui permet une meilleure acceptation. Parallèlement. une attitude plus souple sur le plan individuel est alora poseible. Les règles de la vie collective permettent d’acquérir un certain nombre de points d’ancrage par rapport auxquels la liberté de manœuvre de l’édu¬ cateur peut être grande. Par exemple, le groupe avant l’habitude, dans son ensemble, d’arriver à l’heure aux repas, l’éducateur gera d’autant plus à l’aise pour tolérer le retard d’un enfant, s’il le juge souhaitable. Si la marge entre aspects formels et aspects informels est trop grande, le degré de liberté de l’éducateur est réduit (par exemple avec certains sta¬ giaires en remplacement). Les points de repère se trouvent être alors deg points névralgiques. Le ou les leaders, alors opposantes, souvent en rivalité. trouvent là l’occasion de faire preuve de puigsance. On a pu observer 113l qu’un groupe cohésif mais de façon souple, ans trop de rigidité, tolèrera mieux certains comportements perturbants et sera moins soumis au risque de contagion. « Daniel, 8 ans, ariére afectif et implleif, fait une colre en pleine aieste, parce qu’on lui refugse la permission de se coucher cous le lit. Il burle, gaute aur le lit, en regardant du coin de l’œeil l’efet produit. Il s’arrête aussitôt : le calme, l’indiff́rence des autres a fait tomber à plat sa tentative, en lui faisant gentir confusément le ridicule de son comportement. » « Piere, 9 ans, atteint d’une névroge tra atructurée, lort d’un lever pouse des « Ch’tomb" » 1 retentissants (rites conjuratoires pour : « ie tombe à l’eau 1 »). Personne n’Y fait attention. Après quelques instante, son ton baisgse, puis il s’arrête tout à fait et continue de faire son lit. » C’est aussi ce qui permet la relative acceptation par le groupe de certaines manifestations psychotiques : le phénomène de résonnance est amorti. « Notre but devrait être plutôt d’apprendre aux enfants à ne pas avoir peur des symptômes des autres. » 41l Il apparait, en effet, que les enfants ont peur des comportements qu’ils perçoivent comme dangereux. Cela se traduit dans les réponses aux, tests sociométriques : les enfants présentant un comportement agressif semblent, à partir d’un certain degré, polariser (sur eux-mêmes) les rejets. Le groupe permet cette latitude, parce que, grâce à la tendance à la conformité et à la dédramatisation que donne la vue des autres dans la même situation, l’éducateur peut obtenir ce qu’il n’aurait pu obtenir individuel¬ lement. En dehors des réserves émises plus haut, concernant l’individualisation des attitudes de l’éducateur, se pose, malgré tout, un problème de limitation ou, plus exactement, de quantité: ce qui est tolérable d’un ou de deux enfants ne peut plus l’être de plusieurs (1). Il existe un seuil, fonction de multiples (1) Une des grandes difficultés du travail de l’éducateur conaiste dons le fait qu’il doit s’occuper en même temps de 14 enfants, présentant de très grands besoins affectif. Beaucoup se caractérisent notamment par un seuil très bas de résistance aux frustrations, àvec toutes les manifestations (individuelles, inter-individuelles, de groupe) asociales ou antisociales que cela comporte. à prendre que de membres, » 121 118 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES facteurs à partir duquel l’éducateur ne doit pas accepter certains comporte¬ ments qui, parce que collectifs, risquent d’avoir des effets massifs, dangereux pour le groupe et pour certains enfants. Nous ne pouvons aborder ici tous les problèmes soulevés par les phénomènes de résonance, de contagion et notam¬ ment les réactions agressives en chaine, la perte des contrôles engendrant de l’anxiété. Le groupe dea grandes filles est, ce jour là dans un état hystérique. Une tolérance pour telle ille bien précise, est automatiquement ressentie comme une règle générale : l’individualisation, à ce moment, est dévenue impocsible. Certaines restrictions seront d’autant moins ressenties en profondeur par chacun, qu’il s’agira d’une mesure de groupe. « En pratique, tous les enfants n’ont pas besoin de suivre le même processus : certaine peuvent être menés plus facllement et plus directement que d’autres. Par ailleurg, les évolu¬ tions s’échelonnent dans le temps et l’attention des éducateurs peut se porter gucceasivement sur des individus différenta. Il faut tenir compte aussi de ce que les relations à l’intérieur du groupe ge nouent et se dénouent de façon qu’il n’y ait pas autant de mesures partieulìres D’une façon générale, « seul un travail adéquat avec le groupe permet de réaliser l’individualisation de la méthode éducative 1301. » Transfert et dynamique du groupe. Facilitation du trangfert sur l’éducateur. Le groupe peut dédramatiser dea comportements envers l’éducateur. ressentis par l’enfant comme angoissants (« ils sont comme moi »). Il peut aussi déculpabiliser en levant certaines inhibitions (la « déculpabilisation magique de l’acte initiateur » décrite par Redl 1341; «ils font ceci, je peux le faire »). Si le groupe n’est pas trop centré sur l’éducateur et si celui-ci est éga¬ lement disponible pour tous, l’enfant pourra plus facilement établir des liens Transferts d'enfants les uns sur les autres avec lui (1). Avec ses camarades, chaque enfant tend à reproduire les relations qu'il a avec ses frères et sœurs 121 1191 (2). Mais chez les plus grands, de 10 à 13 ans. on en voit parfois qui reportent vis-à-vis d’un ou de plusieurs camarades des relations qu’ils avaient avec leurs parents. Cela prend souvent la forme (1) Il ne faut paa perdre de vue que le transfert individuel, dans certainea conditions (intensité, accumulation), peut devenir une force de rupture pour la cohésion du groupe. (2) Pour MoRENO, c’eat un des facteure qui préside à la formation d’un groupe : le trang¬ fert cimente les membres du groupe entre eux en faisant revivre inconsciemment des relations anciennes telles que celles des membres d’une fratrie (ou des enfants ̀ l’gard de leurs parents). ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTHE 19 de paire, avee un plus grand, un leader, etc., chez les grandes illes surtout 1111 : « Josiane, 10 ans 6 mois, reproduit avec José, 13 ans, le même comportement qu’elle avait avec sa mère. Très dépendante, elle lui gert de bonne. Elles forment un couple aado-magochique. Elle n’arrive à établir de transfert avec l’éducatrice qu’au départ de Joge. ». Il peut donc y avoir division du transfert en dehors de l'adulte. Ces trans- ferts sur le groupe sont souvent des transferts de défense. Ils ne sont pas inu¬ tiles : ils permettent par exemple, un déplacement qui peut diminuer l’anxiété de ce que l’enfant projette aur l’éducateur. lle permettent davantage le pasage à l’acte. Mais ils peuvent freiner ou empécher l’évolution, car l’édu¬ cateur, au moig difeetement, n’a plus de prige. Le transfert de groupe n’a été observé que plua rarement. Il eat le fait d’un sous-groupe dont les membres ont un véritable dénominateur com¬ mun 1601 : problèmes de même ordre, stades d’évolution sensiblement équi¬ valents par exemple. Il g’est créé des tensions communes de groupe (1) : « Jeanine, 12 ane 5 mois, autoritaire et brutale, est le leader d’un sous-groupe de filles. Elle et Pierrette, II ans 6 mois, forment un couple ò la première, trèa intelligente, joue le rôle d’inducteur. Elles ont le même genre de mère, rigide, anxieuge, rejetante, et réagiggent de la même façon qu’avec lle par delinbibition puia de l’agreaaivité avecl’éducatrice, leanine devient le leader et Pierrette son « lieutenant p. Comme plugieurs filles du groupe ont à ce moment là des problèmes identiques avec leur mère, le groupe commence à réagir négati¬ vement, de façon plus ou moins collective, envers l’éducatrice. L’action de celle-ci, trè for¬ tement aidée par l’éducateur, va se centrer gur les leaders. Grâce à des entretiens, à det déri¬ vationg, dans le cadre d’une action aur le groupe, des activités choisies à des momenta dange¬ reux, on va tendre à céparer les deux leadere qui, à la tête de deux sous-groupes, deviennent plus ou moins rivaux, puis liquident leurs sentimente négatifs envers l’adulte. » L’éducateur, pendant un certain temps, pourra traiter ce sous-groupe comme une unité et avoir envers chacun de ses participants une attitude assez proche, compte tenu de sa dimension, de ges activités, de l’intensité et de la durée de certaines réactions perturbantes, en étant toujours très attentif aux possibilités de diffusion, de contagion. Rapidement, le sous-groupe peut se morceler, des décalages se manifester et l’éducateur devra différencier ses attitudes. La structure du groupe peut avoir un rôle déterminant. On a montré. par ailleurs 131 fIIl, au niveau des relations spontanées entre les enfante. l’influence négative exercée par une structure de groupe rigide et en particu¬ lier par un leader de type très autoritaire (2). Par un ensemble de petits faits. parfois difficilement discernables aux veux de l’adulte, le groupe arrive à (1) Décrites par H. EARIEL et S. LEROMCI. (2) Le cas de Guy, cf. p. 112, tres particulier et agez rare avait été étudié pour montrer les dan,gers de certaines conduites autoritaires. mais ce danger, bien que le plus souvant ettènue, doit demeurer un des soucig maleurs de l cducatcur, cour grore Prc certaine structure hiérarchique. groupe des plus petits. » 190 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES, une répression plus ou moins générale de l’agression. L’agressivité, augmentée. au lieu de diffuser normalement dans le groupe, est bloquée sur le plan hori¬ zontal. Elle est donc polarisée entièrement, sur un mode individuel ou collectif. gelon les cas, sur les éducateurs ou sur un bouc émissaire, et fausse le jeu du transfert : ou bien, elle ne peut non plus ge manifester envers les éducateurs. Les chances d’évolution peuvent donc être mises en cause. Avant d’en arriver à la solution ultime de contrer un leader de ce type, l’éducateur devra peser ue tour son porus gur ie moue de relations du groupe : rendre les autres enfants moins dépendante vis-à-vis du leader, essaver de modifier son style de comman¬ dement, empêcher ses réactions brutales, lui montrer ce que son apport peut avoir de valable pour lui et pour les autres en investissant son besoin de diriger dans des activités positives pour le groupe. En général, l’éducateur peut avoir une action structurante ou dissolvante sur le groupe dans son ensemble, en tenant toujours compte de ce qu’infuer sur une partie du groupe, c’est aussi modifer l’ensemble, soit directement devant certaines urgences, soit de fa con détournée, en modifiant l’environne¬ ment gocial d’une -paire, par exemple. Dans l’un et l’autre cas, cette action sera, par la suite, stoppée, suivie ou accentuée. « Paul, rejeté et déviant, est accusé d’avoir démoli la cabane du groupe, ce qui provoque une forte agressivité. Le groupe formant bloc se précipite sur lui, le fait prisonnier et l’attache à un poteau de torture. Cela rigque de tourner mal. L’éducateur intervient, réusit à faire discuter et à disperger les principaux éléments du groupe en leur proposant une autre activité. » « Après une journée de pluie où les garçons se sont un peu ennuvés, de petits sous-groupes se forment et se déforment, n’avant goût à rien de précis. Proftant d’une accalmie, l’éducateur propoge un feu de camp pour le soir : l’idée est acceptée. Les garçons le préparent, le groupe. ge ressoude en vue du But commun. Le feu de camp accentuera cet élan. » Cette action peut se manifester aussi à l’échelle des sous-groupes et des couples (paires). « Patrick, Pierre et Norbert, tous trois nouveaux, ne savent que faire, chacun dans son coin, tenus un peu à l’écart par les autres pendant un temps libre. L’éducateur leur propose de jouer aux boules avec lui. Après une premìre bonne partie, il quitte le jeu sous un prétexte quelconque. Ils sont pris par le jeu et la deuxième partie continue. Un lien est créé entre les enfants. » « Guy, aidé de Joel et de Ceorges, garçons à la personnalité assez faible, pratique le racket auprès des nouveaux ou des plus petits : « Donne moi tes friandises, ginon.. » L’édu¬ cateur les prend sur le fait, leur fait rendre le butin, en profite pour discuter avec eux de leur conduite, puis les oriente, de façon plutot directive vers d’autres activités. L’éfet ne peut être que guperfciel. La diacugsion gur ce thème est reprise en groupe, mais sans s’appesantir et sans créer de culpabilité inutile, en montrant notamment qu’eux-mêmes sont des plus petita pour les plus grands. Puis, discussion mieux adaptée avec chacun pris en particulier. Parallé¬ lement, par des activités dosées et soigneusement réparties, l’éducateur s’efforce de favoriser des liena nouveaux entre le leader. Guy, et le sous-groupe des plus grands et cherche à faire intégrer chacun des deux autres à un autre soug-groupe aux activitée plus positiveg, » « Paul et Raymond, inhibés, avant peur des autres, sont en général, igolés. L’éducateur favorise leur rapprochement et ils finissent par former un couple, où n’étant plus seul et s’appuvant sur l’autre, chacun reprend confiance en lui. Ils s’intègrent par la suite au soug¬ ET SOCIALES EN PSTCHIATRE INEANTILE 121 « Arlette et Eliane forment un couple pathologique à tendance sado-masochique. Arlette s’appuie sur Eliane pour e’opposer à l’éducatrice. Eliane est leader du groupe du type mère possessive. A l’occasion du détachement d’une partie du groupe de l’emprise d’Eliane les éducateurs easaient, mais en vain, de les séparer, Ingensiblement on essaie de ne plus les mettre à côté l’une de l’autre (table, chambre, activité, clubs, etc.). L’éducateur a un entre¬ tien avec Arlette, il lui montre qu’elle est assez ancienne pour se pasger d’une autre et que. maintenant, elle fait la différence entre ga mère et l’éducatrice. Très rapidement, elle se sépare d’Eliane et s’intégre à un sous-groupe. » De facon générale, on peut dire que plus le fonctionnement du groupe est formel et rigide, dans ses aspects organisés ou non organisés, plus la conduite de l’enfant est déterminée par son rôle (1) et non par sa personnalité. et vice-versa. L’évolution des rôles. L’enfant dans le groupe a une conduite concrête observable qui dépend de sa personnalité et de la pression du groupe. Ce rôle et la facon dont il l'’asume est ausi la résultante d’un aiustement réciproque, car les rôles sont interdépendants et se définissent les uns par rapport aux autres. Signalons l’importance de l’atente de rôle : sorte d’anti¬ cipation du rôle des autres en fonction de leur statut social. Ce phénomène peut fausser au départ l’ajustement des relations. Ce qui peut être dangereux, c’est la fixation dans des rôles et en particu¬ lier de certains : bouc-émissaire, clowyn, protégé, mouton noir, déviant, bébé du groupe, domestique, hommic de main, et aussi leader [11] [13]. On pourrait parler de fxation, dans la façon de tenir un rêle ou d’évolu¬ tion d’attitude dans le cadre de ce rôle. « Marie-José, 13 ans, vit au début en retrait du groupe et cherche à avoir pour elle geule. l’éducatrice et l’éducateur. Ny parvenant pas, elle devient leader possessif et s’appuie sur ce rle pour s’opposer à l’éducatrice. Puis, celle-ci ne répondant pas à son opposition, son rôle devient moins accaparant et moins autoritaire. Arrive une rivale, de son ̂ge, de sa taille. Pressée par la gituation, elle devient alors leader organisatrice, très dynamique et positive pour le groupe. ». Si un rôle peut être, à un certain moment, la conduite la plus adaptée. la plus économique pour tel enfant, l’éducateur doit en général fournir les occasions d’en changer, en ouvrant au maximum l’éventail des rôles possibles. mais en tenant toujours compte du niveau de développement de l’enfant (1) Le statut est la place qu’une personne ocupe, à un moment domné, dans le groupes le rôle, l’ensemble des conduites asociées à ce statut. Aspect actif et dynamique du statut. c’est ce qui doit être fait pour valider celui-ci. Chaque personne a un ou plusieurs statuts et un ou plusieurs rôles. En fait, tout individu a un statut d’ensemble et des statuts particuliers. Sa pogition dans le groupe ne peut être expliquée qu’en termes de structure d’influence du groupe pris dans son ensemble. La personnalité s’exprime à travers une pluralité de rôles et est ainsi par elle-même un système de rôles plas ou moins intégrés, harmonisés et equilibrés. L’exercice des rôles dépend non geulement de modèles gocio-culturels mais des attitudes pergonnelles en fonction desquelles l’individu percoit, subit ou gélectionne ses modèles. 122 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES dans le groupe, et du groupe lui-même. Il ne s’agit pas de forcer, sous peine d’échec, mais de mettre l’enfant dans des situations de plus en plus proches de la vie réelle du groupe, où il pourra jouer d’autres râles plus afirmé et moins dépendants : jeux dramatiques, jenx à thèmes, travaux manuels. activités diverses. Certains jeunes éducateurs ont parfois tendance à oficialiger plus ou moina consciemment certains rêles (clown, bébé de groupe, par exemple) goit pour créer une forme de relations avec l'enfant, soit pour paraître "dans le coup » avec le groupe en développant une sorte de complicité groupe-éduca¬ teur vis-à-vis du rôle joué. Il s’agit de lui montrer qu’on peut devenir autre que ce qu’on eat actuelle¬ ment, en donnant l’occagion de se valoriser à ges propres veux, aux veux des autres et de l’adulte. L’éducateur tend à modifer l’image que l’enfant se fait de lui-même comme membre du groupe et celle que les autres se font de lui. Cela peut être l’amorce d’une évolution de sa situation réelle. Le rythme propre à un centre d’observation est une aide certaine : les départs d’enfants, s’ils ont un effet global destructurant 1131 sur le groupe en tant que tel, constituent un facteur très favorable à ce point de vue. Ils permettent toutes les possibilités de promotion à l’intérieur du groupe. en élargissant constamment l’espace social de chaque enfant III 141). On a montré ailleurs fIl combien le mouvement d’intégration dans le groupe était centripête, en général, et non centrifuge. La participation à d’autres activitée et à d’autres groupes (clubs, classes) le contact avec deux éducateurs et d’autres adultes ne feront que faciliter ces pogsibilités. De façon générale. par les activités qu’il propose, l’éducateur favorise d’autres genres de rela¬ tione 1781, davantage fonctionnelles et rappelant les socio-groupes décrits par Moreno 1481. Les relations habituelles, informelles sont, en effet, forte¬ ment marquées par leur aspect affectif et font penger aux psycho-groupes de Moreno. Dans tel institut médico-pédagogique, des groupes tron stables ont semblé bloquer les évolutione à un point tel que les éducateurs avaient envisagé l’éclatement des groupes et de ne plus en former qu’un seul, l'’effectif global étant assez limité.- Ce genre de solution présente de graves inconvénients sur le plan des relations interindividuelles et sur le plan des mouvements d’un si grand groupe, mais elle souligne l’acuité du problème. L’analyse des variations des statuts et des rôles, précisant l’intégration et l’adaptation sociale, constitue un des éléments importants pour apprécier l’évolution d’un enfant dans le groupe. L’étude de la dynamique individuelle et de la dynamique du groupe soulève beaucoup de questions, entre autres les suivantes : — Posgibilités, pour l’éducateur, de répondre à autant de gtimulations souvent opposées : Rapports entre l’amélioration des relations d’un enfant avec les autres et avec les éducateurs : Liene entre la personnalité, le statut et le rôle : Rapports entre certains traits de personnalité et certains troubles d’une part, et les choix sociométriques et les interrelations vécues, d’autre part. 123 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INTANTILE Le vieil adage « qui se ressemble, s’asemble » ge confrme-t-il ici 2 140 ou bien est-ce la complémentarité qui joue (1) 2 (par exemple, pour certaines paires névrotiques). Il semble que certaines de nos observations aillent dans le sene d’un rapport 1361 à un congrès sur le groupvork, signalant que des garcons laissés libres de se constituer en groupe, se choisissaient de façon telle que chacun renforçait la pathologie de l’autre. « Des caractères semblableg se rapprochent-ils spontanément » se demande Drillich fAIl, alors que Redl 134l remarque de son côté que les enfants dont il s’occupait à Détroit avaient une faculté étonnante à reconnaitre chez l’autre des traits patholo¬ giques gemblables. Adaptaion sociale dans le groupe et épolution en cours de séjour¬ Le rapport entre l’adaptation sociale dans le groupe et la réduction des troubles est-il aussi évident qu’on l’a pensé 2 Nous avone déjà vu comment dane la période maison d’enfants, le système socio-pédagogique mettait l’accent eur l’insertion dans le groupe, comme moyen de gocialisation et de réadaptation sur un plan général. Par la suite, les efforts ont été davantage centrés sur la personnalité de chaque enfant, son histoire, l’aspect singulier de son inadaptation. Les relations enfants-parents, enfants-éducateurs enfants-groupe, etc., ont été envisagées dans leur évolution. Mais on pensait encore, plus ou moins, qu’il y avait identité (on parlait aussi de concordance. complémentarité, parallélisme), entre l’adaptation sociale dans le groupe et la réduction des troubles. Des observations récentes donnent à penser que le problème n’est pas aussi simple. Il faudrait d’abord préciser le concept d’adaptation sociale, concept éminemment variable selon les normes socio¬ culturelles et les situations (2). Parler, comme on l’a fait longtemps, de tolé¬ rance ou d’acceptation réciproque ne sufit pas. Cela peut impliquer des conduites trop passives. L’enfant doit adhérer à son rôle dans le groupe. qui suppose des possibilités d’ajustement, son apprentissage social s’effectuant à travers l’acquisition de conduites de rôles. Cela suppose qu’il soit gatisfait de sa position sociale. Mais il doit être en même temps un membre utile pour son groupe (3). « Socialiser un être c’est faire en sorte que son statut et son rôle non seulement répondent à ses besoins personnels, mais également satis¬ fassent aux besoins des autres 1301. » (1) Cf. Les repports entre sinlarité et complémentarité étudifs par J. MARONNEUVE. à propos de ce probleme : «Ainités et processus inter-personnels, Billetir de Pschologie. XII, 15-16-17. (2) On devrait soumettre à une critique épigtémologique gerrée un certain nombre de concepta-clefs couramment employés et recouvrant des réalités très diff́rentes : dyna mique, intégration, adaptation, structure, évolution, réalité, milieu, diaociation, intelligence débilité : cette critique s’opérerait dans le cadre d’une remise en question des fondements et des applicationa deas sciences humaines en général, et de la psychologie en particulier CE. 174 (3) Il est intérestant de repprocher ces congidérations de la définition de l’adaptation donnée par PIACEr : « Equilibre entre l’assimilation et l’accommodation, ce qui revient donc à dire un équilibre des échanges entre le gujet et les objets. L’adaptation doit être carac¬ térisée comme un équilibre entre les actions de l’organisme sur le milieu et les actiona inverses.» in La payclologie de l’Intelligence, A. Colin, 1949. évolution favorable : 124 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES. En l’état actuel des recherches on né peut qu’émettre des hypothèses : 19 En général, les enfants avant évolué favorablement au cours de leur séjour ont présenté une bonne adaptation sociale dans leur groupe. Citons (1) le total des choix et des rejiets recus à deux tests sociométri¬ ques : l’un au début du séjour, l’autre à la fn du séjour : Michel, 8 ans Il mois. 20 En général, les enfants mal adaptés socialement n’ont pas eu une Joel, 9 ans. 30 Mais parmi les enfants bien adaptés dans leur groupe, tous n’ont pas évolué de façon positive, pendant, ou après leur séjour. « Guv, 9 ans 19 moig, dont l’évolution quant à ses troubles au courg du géjour a été nuille s’est tout de suite très bien adapté dans le groupe. Les derniers mois il eat devenu: leader » (2). Dans de premières recherches sur les enfants passés au centre d’observa¬ tion de Vitry il y a 10 ans, on retrouve, parmi ceux qui ont été ou sont à l’heure actuelle délinquants, 80 0% d’anciens leaders de leur groupe (du type « caid » il est vrai). 40 Des enfants qui se sont mal adaptés socialement ou dont l’évolution au centre a été moyenne, se sont bien adaptés dans le groupe dont ils ont fait partie après leur sortie. « Bernard, 8 ans 9 mois, après avoir été leader, finit comme isolé, voire rejeté. Son adaptation ultérieure est tr̀s satisfaisante à tous pointe de vue. » (1) Dana l’ensemble le statut sociométrique recouvre assez exactement le statut réel. Voir 161 et HIII, 1131. Nous ne donnons ces chiffres qu’à titre indicatif. (2) En réalité, pour évaluer l’adaptation dans le groupe, la façon d’assumer le rôle de leader, importe bicn davantuce que le sipple fait dâtre leder onme d’elleure ponr le autres rôles. 165 ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE 3° Certains cas, parmi les plus graves (pré-psychotiques, psychotiques). arrivent à avoir une adaptation relative dans le groupe, contrairement à ce qui a pu être observé ailleurs 1431. En général bien tolerés, puis aceptés par les autres, ils arrivent à avoir un statut et un rôle parfois étonnants. « Bernard, 8 ans, malgré de nombreuges bizarreries du comportement, après une période où il a eu un rêle de pitre puis d’innocent du village, a vu son comportement institutionnalisé ce qui lui a permis d’arriver à une adaptation beaucoup plus réelle. Sa place dans le groupe était importante et il était très aimé des autres, » Le enfants qui, en général, s’adaptent le moins bien sont très égocen¬ triques, avec un moi très faible, ne résistent pas à la moindre tentation. emploient tous les moyens pour arriver à leurs fins : violence, achat des autres. chantage, racket. « Gérard, 9 ans, très intelligent, manipule le groupe, attige les condits pour obtenir ce qu’il désire. Après une période où il a failli devenir leader, il redevient isolé et même rejeté. » D’autres ne supportent pas leur placement qui réactive des confits fraternels, en liaison avec une grande fixation à la mère. Les autres enfants du groupe sont pour eux des agents perpétuellement frustrateurs. « Norbert, 8 ans 6 mois, ne supporte pas les autres qui lui prennent tout ce qu’il a et tout ce qu’il veut. Comme il et très mal toleré, il a un rôle de déviant où il secomplait. cherchant aide et refuge soit auprès des adultes, coit auprès de tout-petits, soit auprès des plus grands. ». On peut se poser la question de l’utilité ou non de la vie en groupe, pour ces derniers cas : plus particulièrement, on peut se demander si ces groupes sont bien adaptés à ce genre d’enfants. Une réflexion de l’un d’eux à l’éduca¬ trice, pourtant très permissive, l’illustre bien : « Oh, avec toi, on ne peut pas être un bébé 1». La complexité du travail avec quatorze enfants impose des limites et des frustrations inévitables, mais trop fortes et trop nombreuses pour pouvoir être bénéfiques pour ceftains. 4. Les techniques de jeu dramatique. Elles ont pour but de créer des situations favorables à la prige de cons¬ cience des attitudes et des rôles. Il s’agit de situations imaginaires, imitant la réalité, mais permettant du fait même de leur caractère ludique une apon¬ tanéité et une disponibilité plus grandes. Quels qu’en soient les supports. il s’agit toujours de jouer librement des rôles et des thèmes extraits de la vie réelle 1501. Au sociodrame. Moreno f481 assigne une portée sociothérapeutique largement collective. Plug modestement, il peut permettre de circonscrire des tensions, d’élucider des conffits et éventuellement d’amorcer certaines évolutions d’attitudes. Trois essais de sociodrame ont été tentés dans un groupe de filles (10¬ 13 ang). 126 MÉTHODES PSYCHOLOGLQUES, PÉDAGOGIQUES 19 Le groupe refusait collectivement le café au lait au petit déjeuner et bon nombre de plats. Les éducateurs ont décidé de tenter un gociodrame. Il g’agiasait d’une expérience pour évaluer une technique tout en essavant d’agir collectivement sur le comportement du groupe. Coneigne : « Nous allons faire un jeu : nous prendrons chacun le r̂le d’une autre : pensez dès maintenant qui vous voudrez être : par exemple, Jacqueline pourrait être Monique, Monique pourrait être moi (l’éducateur) etc. Le sujet sera : la nourriture est mauvaise. » On put en tirer les constatations suivantes : Le groupe, bien que préparé, ne pouvait reepecter le gujet choisi pendant plus de vingt minutes et abordait un thème qui le préoccupait bien davantage : le contact avec les adultes de la maison. Certaines filles se trouvaient dans l’impogsihilité d’assumer un autre rôle que leur rôle habituel (alors qu’elles prenaient en d’autres circongtances des r̂les plus imaginaires : par exemple, une fée) : d’autres devaient être protégées : elles de gupportaient pas les remarques sans répondre par de l’agreggivité, qu’elles ne pouvaient controler sans aide, ou par un blocage complet. Le problème de la nourriture ne s’en trouva pag modifié. 29 Quelque temps après, diverses circonstances de la vie du groupe. amenèrent les éducateurs à essaver un autre sociodrame sur le thème : les éducateurs punissent trop. Ce sujet provoqua des décharges d’agrexgivité. ce qui soulagea certaines filles et leur permit une attitude plus libre. Maia chez des nouvelles, la vue de cette forte agressivité provoqua des blocages. et nécessita un contrôle et un frein assez important de la part des éducateurs. 39 Un an après, les éducateurs furent amenés à recommencer un socio¬ drame sur le thème les « chouchoutes p. Cette troisième expérience gembla montrer : — qu’il est possible de contrôler guffisamment cette technique, — que les bloçages peuvent être évitég. — que l’agressivité exprimée, si elle est acceptée par les éducateurg et déviée sur eux, provoque une modifcation du climat et de la structure du groupe. Malgré, ces aspects positifa il n’en reste nas moins qu’il s’agit lA d’une technique très délicate à manier, ne pouvant être utilisée que dans des cir¬ constances très particulières, avec les plus grands, et uniquement par des éducateurs hautement qualifés, car les enfants peuvent être amenés à des positions dangereuses qu’il faudrait interpréter. De plus le risque existe que des enfants continuent à prendre des positions en fèche, agresgives. en dehors du groupe de jeu. qi se joue entre l’enfant, le groupe et les éducateurs. 12 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE La manipulation du comportement dane les aituations (I) peycho¬ e) pédagogiques particulière Le terme de situation psycho-pédagogique recouvre : — toug les actes de la vie quotidienne. (lever, repas, etc.). — toutes les activités du groupe, organisées ou spontanées. — les entretieng. qui doivent être envisagés, avec les apprentiasages spécifques qu’ils impli¬ quent et leurs buts propres, comme les médiations à travers lesquelles peut r exercer l’hction peychopédagogique. 1) Techniques de manipulation du comportement. Cette action se traduit de façon concrête par différentes formes d’inter¬ vention de l’adulte, vis-à-vis des cas individuels ou du groupe, ces deux aspects étant étroitement liée. En d’autres termes, l'’éducateur, support du Moi de l'enfant devient la force de contrle du groupe et de l’individu 1221. Redl. à ce gujet, parle de la nécessité pour l’éducateur de mettre sur pied une métho¬ dologie du contrôle des conduites 1341, et a lui-même étudié cette manipula¬ tion du comportement extérieur. Il ne s’agit pas ici de tenter la tâche impos¬ sible d’énumérer toutes ces techniques, encore moins de les donner comme des recettes à appliquer mécaniquement. Nous ne citerons que les plus fré¬ quentes ou les plus importantes en reprenant les grandes catégories de Redl. — L’ignorance intentionnelle : l’éducateur intervient directement si des comportements riaquent de dégénérer, il ignore volontairement ceux qui cegent d’eux-mêmég asgez vite. (ef : observation sur une colère faite pendant une sieste). — Intervention par un signe quelconque : rappelant à l'’enfant que dans des circonetances de ce type, il vaut mieux faire, ou ne pas faire cela. « Gérard, 2 ana, qui adore grimper en haut des arbre, acepte dificilement d’en redet¬ cendre. Sur un gigne de l’éducateur, il peut renoncer à grimper au moment où il d’apprétait à le faire, ». — Proximité et controle par le toucher : « Pierre, 10 ans, va « piquer » une colère parce qu’un autre l’a bouscule. L’éducateur lui mot la main sur l’epaule, tout en lui parlant, ce qui l’aide à ge matriser. » — Participation émotive de l’éducateur qui manifeste son intérêt aux activités de l’enfant : nous montrons plus loin l’utilité de cette technique. pour le travail scolaire de l’enfant. — Marque d’affection dans des moments dificiles : ennui, sentiment d’aban don aprèg les vigites, anxiété. (1) Le terme de situation est employé ici dans un gens un peu restrictif. Il met l’accent eur certaines caractéristiques dea différentea formes que peut prendre la aituation paycho¬ pédagogique en général, celle-ci étant comprise comme l’ensemble des éléments de la partie 128 MéTUIODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES, — Réduction de tension par l’humour : « Deux garcons vont se battre et, compte tenu du rapport de forces. risquent de se faire mal. Ile sont très en colère. L’éducateur leur dit : Et si voug régliez ca à la bataille, ce jeu de cartes est en faveur dans le groupe. Ils rient et leur colère tombe brusquement. » — Aide opportune en évitant des points de friction. — L’interprétation, à manier très prudemment : « Joel frappe Bernard, celui-ci va se venger sur un plus faible. L’éducateur lui explique que c’est parce qu’il n’ose pas affronter Joel, qu’il n’a donc pas de raison d’en vouloir à un petit. » - Le regroupement : l'éducateur agit sur un ou plusieurs enfants, modifiant l’entourage social. (Voir les exemples d’action de l'éducateur sur la struc¬ ture du groupe et des sous-groupes.). — Le changement brusque d’activités permet parfois de libérer certains besoins et de dénouer certaines crises. — L’appel ou l’intervention directe. — L’utilisation rationmelle de l’espace : Un sous-groupe perturbe une activité d’ensemble du groupe. L’éducateur l’envoie continuer dans une autre pièce. — La mise à l’écart: « Paul, très excité, lance dea objets gane vouloir s’arrêter, plus ou moina encouragé par le regard des autres. L’éducateur l’envoie dehora, lui digant de rentrer de lui-même quand il gera plus calme, » Il importe, ́videmment, qu’une intervention de ce genre ne prenne pas l’allure d’une ségrégation, d’un rejet. — Contrainte physique : L’éducateur maintient l’enfant dont le comportement peut devenir dangereux pour lui-même ou pour les autres. Quand il sera calmé il discutera avec lui au sujet de ce qui s’est passé. Cette intervention exclut, évidem¬ ment, tout châtiment corporel. — La permission ou l’interdiction formelle, cette dernière surtout en cas de force majeure. — Les récompenses : elles ne doivent jamais être sygtématisées, sinon c’est la porte ouverte au chantage, aux compétitions, rivalités, frustrations. Les promeases doivent être toujours tenues. Mieux vaut ne rien promettre si l’on n’est pas sur de pouvoir tenir, ou, par exemple pour une sortie, alors que le temps ménace, utiliser un procédé de remplacement de valeur égale ou supérieure. Les punitions : elles e’inscrivent dans une psychopédagogie qui, répétons¬ le, n’excut absolument pas les sanctions, punitions et récompenses, mais qui les adapte au cas de chaque enfant. Nous avons déjà parlé du dosage des frustrations et des gratifications. En termes plus pédagogiques, on dose ET SOCIALES EN PSYCHLATRE INFANTIe 129 progresivement punitions et récompenses. Indiquons en passant que, s’il existe des contre-indications relatives, on trouve aussi des contre-indications absolues. Ceci est d’ailleurs valable pour l’engemble des techniques et acti¬ vitéa : nous rejoignona ici ce qu’on a appelé le plan et la stratégie thérapeu¬ tiques 1341. Par exemple, les privations de nourriture, de dessert, de friandiges sont à exclure (1), de même que les châtiments corporels, les rejets brusques. les retraits d’afféction, certaines moqueries. Avec des anorexiques, on n’em¬ ploiera pas tel type de sanctions qui pourrait convenir à d’autres. Cela exige beaucoup de souplesse : il faut gavoir céder, arréter une punition. Une atti¬ de brandir trop souvent des punitions comme menace les rend inopérantes. tude trop punitive peut favoriser culpabilité et anxiété. D’autre part, le fait L’éducateur doit savoir passer sur des questions de détail pour être plus ferme gur des points importants. Noue avons déjà indiqué certaines particularitée que les sanctions doivent comporter pour être positives : logique, immédiateté, explication surtout. E. H. Erikson a montré comment « les enfants deviennent névrotiques. non pas à cauge des frustrations, mais à cause d’une absence ou d’une perte de la signification sociale de ces frustrations » 1421. Toute éducation peut être décrite en termes d’apprentissage des frustrations et des gratifications, de punitions et de récompenses, d’interdits et de permissions ce qui, dans notre contexte socio-culturel est largement fonction de ce que certains auteurg. comme Lebovici 1311, ont souligné : « la société actuelle exige des frustrations incesgantes, liées à sa gtructure concurrentielle ». Répétone qu’il s’agit d’une énumération non limitative. Dans la pra¬ tique, ces techniques sont emplovées avec toutes les combinaisons et varia¬ tiona possibles, Insistons, enfin, sur le fait que l’ensemble de l’action psycho¬ pédagogique de l’éducateur est loin d’être réductible à elles geules, mais qu’elles s’articulent dang une stratégie thérapeutique qui les englobe et les dépasse. L’établisement d’une méthodologie adaptée gagnerait à e’inspirer de certains schémas de travail, comme ceux, par exemple, mis au point par F. Redl 1341 pour les enfants agreggifs, et repris par J. Guindon 1451 1621 pour d’autres genrea d’enfants : action aystématique de l’éducateur bagée gur l’étude des fonctions d’adaptation du moi, dans des situations déterminées. 2. Importance des actes de la vie quotidienne. lle comportent l’apprentissage ou le ré-aprentigaage d’un minimum de rgles indispensables à toute vie en commun : se lever à l’heure, manger proprement, se laver. C’est surtout à travers eux que se noueront et dénoue¬ ront les milles liens interpersonnels. Ils deviendront la matière à partir de laquelle l’éducateur pourra montrer, aider, tolérer, exiger. Nous avons déjà souligné que l’éducateur n'’est pas un substitut parental, mais qu’il assume un certain nombre de fonctions parentales : alimen¬ (1) Ct la peur d’avoir faimn, équdiee par B. BETELIUBL, (9l. MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 130 tation, hygiène, protection, soins. Il existe plusieurs façons de s’occuper d’un enfant. Par exemple, laver un petit peut être fait comme une simple mesure de propreté, mais peut être aussi accompli d’une certaine facon. dans une optique de maternage. On peut dire que « l’éducateur est thérapeute dans et par l’événement quotidien 1451 ». Ce travail se situe dans la perspec¬ tive même des expériences de J. Guindon JA5l et de F. Bedl 1341, où l’édu¬ cateur a une action en profondeur. Il n’exclut nullement, comme chez B. Bettelheim 149l, des traitements différenciés. L’éducateur doit arriver à permettre à l’enfant de vivre avec les autres de favon acceptable pour tous : qu’il supporte de passer parfois après les autres. qu’il partage ou respecte certaines choses, qu’il discute au lieu de se disputer qu’il apprenne à coopérer. L’attitude de l’éducateur sera particulìrement élaborée devant certains faits, sujets quotidiens de confite familiaux : répu¬ gnances alimentaires, énurésie, onychophagie, vols, mensonges. C’est ici que prend tout son sens, l’attitude diagnostique : on ne se fixera pas sur l’aspect purement symptomatique du comportement, mais on essaiera d’en comprendre la signifcation profonde. « Jean, 8 ans, so ronge les ongles sans arrêt. L’éducateur ne lui fait pas de remarques. mais envisage en tréunion de synthèse des entretiens qui pourrient calmer son anxiété. » « Pierre, 7 ang, refase de manger pour que l’éducatrice s’occupe de lui, comme il faigait avec ga m̀re qui, très inquiete, passait des heures à lui faire ingurgiter quelque nourriture. Si l’éducatrice acepte, elle entre dans son jeu et Pierre reproduit le mme cycle de comporte¬ ment. Parallèlement à une psychothérapie, elle s’occupe de lui à table normalement tout en lui expliguant qu’elle l’aime bien et que ce n’est pas e’il refuge de manger qu’elle s’occupera davantage de lui. ». « Georgeg, 10 ans, vole les friandiges de ges camarades aprèa les visites des parents. Les giena ne sont paavenus. L’éducateur ne le gronde pag, mais lui explique que les autres ont le droit de garder leurs friandises et les lui fait restituer. On le fait écrire à ses parents : on lui fait comprendre pourquoi ses parents ne sont pas venus cette fois-ci., ce fait a mis l’accent gur a genaibilité aux frustrations : il a resenti le placement comme un abandon. Cela gera approfondi par la euite et fera l’objet d’une attention particulière. » C’est dans la vie quotidienne que se manifegte l’action la plus suivie, la plus naturelle de l’éducateur, parce qu’elle rappelle certains actes de la vie familiale. Evoquons ici l’importancé de l’atmosphère psychopédagogique générale, de l’attitude semblable de tous les adultes sur certaines exigences fondamentales, de la participation des enfante, à leur mesure, à la vie de la maison. Le prolblème des horaires mériterait à lui geul une tude particulière. Dans un centre, l’horaire est un des liens majeurs avec la réalité extérieure : le découpage du temps se fait de facon à peu près semblable (lever, repas. classes, coucher). Mais il faut faire attention à ce que certains auteurs ont appelé la dictature de l’horloge. Le rythme des activités de la journée n’est-il pas trop rapide 2 Correspond-il au rythme propre des enfants, de chaque enfant 2 A l'intérieur de certaines limites, la plus grande souplesse doit régner. Chaque groupe a des heures de lever et de coucher différentes en fonction des besoins des enfants (par exemple, les petits se couchent plus 100). Ces heures peuvent elles-mêmes varier selon les jours et les activités, ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTIE 131 (par exemple : veillées plus longues du mercredi et du samedi). Au gein des groupes, il faut prendre garde à ne pas trop précipiter les enfants : les lever en douceur, ne pas exiger une trop grande rapidité à table pour certains. et, à plus forte raison, pendant les activités dirigées et les travaux manuels. Ils doivent pouvoir souifler de temps en temps, d’où l’absolue nécessité de ménager des temps de transition, des temps libres. Ceux-ci appelés à tort par certains temps creux ou temps morts, sont, compte tenu des difficultés de ces enfants, ceux où l’éducateur à le rôle le plus délicat : éviter une trop grande coupure d’avec la vie formelle du groupe, favoriser, mais contrôler aussi et d’autant plus étroitement mais discrè̂tement leurs activités et leurs relations spontanées IIII 1131. Ces temps libres nous apparaisent extre¬ mement liés à une conception plus normalisée de la vie en internat. On s’éloi¬ gne, là aussi, du type maison d’enfants, colonie de vacances ou camp scout. où le groupe participe dans son ensemble à des activités organisées, l’une guccédant, d’assez près à l’autre. Entre cet aspect activiste et l’internat classique, nous parait possible un moyen terme où le programme d’activités est élaboré en tenant compte des besoins réels des enfants. Par exemple : la veillée organisée (histoire, jeu dramatique) ne sera plus la règle. Les enfants auront un moment de détente libre avent de se coucher. Chacun choisira le genre de détente à son goût : lecture, découpage, rangement de ses affaires. jeux de société, par exemple. Ce sera un moment de choix où l’éducateur sera plus disponible envers tel ou tel, pourra mieux répondre aux diverges sollicitations, grâce à la dispersion des intérêts et des activités de chacun. Les contacte interpersonnels en seront facilités. Nous ne pouvons qu’indiquer ici l’importance de la disposition des locaux (distances brutes et distances fonctionnelles) et des conséquences des positions géographiques de l’éduca¬ teur et des enfants. Ces remarques rappellent celles de Dillich fAIl sur le danger qu’il y a à organiser la vie du groupe en grand jeu permanent. De même, par exemple. la promenade en forêt ne se fera plus forcément, dans tous les cas, sous forme d’un grand jeu mais pourra être coupée ou non par des jeux divers. IlIne s’agit pas de faire tomber le groupe dans l’ennui et le désœuvrement: cela suppose de doser, au fur et à mesure, temps libres et activités organisées. Par ailleurs, ces moments de détente supposeront des espaces sufisants : cour pour l’ensemble du centre, terrain de jeu pour le groupe, dans les dor¬ toirs ou chambres, coin particulier pour chacun avec mobilier pour ses affaires personnelles. En collectivité, il est important au plus haut point de sauvegarder une certaine intimité. Il est aussi nécessaire de donner un mini¬ mum de matériel ( planches, outils, cravons, ciseaux, papier, places de ran¬ gement, jeux divers). 3. Les activités. Les activités, la façon de les prégenter, de les mener, de les controler. seront autant d’éléments thérapeutiques, et ce, d’autant plus qu’elles seront concues et différenciées selon les besoins réels des enfants. L’éducateur doit posséder une gamme variée de techniques éducatives simples lui permettant niveau. MÉTHODES PSYCHQLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 132 d’établir un programme adapté. Cela sera évidemment plus facile dana le groupe que sur le plan de la maison, où les activités se situent à un autre « Des enfants, au moig d’avril, commençaient à essaver de sortir plus tot des clubs pour s’amuser dans la cour. Un club de jeux libres a été organisé alors. Ce qui a arrêté ces fuiteg. » « Plugieurs conflite avec bataille entre garçons : on organige le soir même un club de gports de combat (lutte) qui permet de les canaliser. » C’est pour ces raisons que l’on s’oriente de plus en plus, à l’échelle du groupe, vers le formule d’atelier polyvalent permettant a qucndes de faire de la poterie ou du modelage, de la peinture libre, ou du découpage. à d’autres de bricoler en menuiserie, pendant que certains jouent sur un territoire. Ces activités simultanées ne doivent pas être trop nombreuse pour pouvoir être suffisamment contrôlées par l'éducateur. Il faut d'autre part, limiter la dispergion possible car beaucoup de ces enfants sont instables : choix d’une activité déterminée par tranche de temps, finition d’un certain travail avant d’en changer. Il s’agit auesi d’offrir des possibilitée de gradation. Ne faire que des modles réduits serait de la pédagogie idéaliste. A côté de cette activité pour certaine, il est indispenable de permettre des activités régressives. eau, terre, barbouillage. La stratégie psychopédagogique vigera à faire passer l’enfant d’un stade à un autre, en passant par tous les intermédiaires possibles. Noug avons déjà parlé des perapectives pédagogiques. Elles s’intègrent dans un ensemble que certains auteurs 1341 1451 ont appelé le programme des activitég, c’est-à-dire presque tout ce que peuvent faire les enfants pendant une période donnée. Pour Redl 134l le programme peut être un antidote aux tendances agressives et sexuelles, un moyen de discipline, une concession aux droits bumains, un outil éducatif, un moyen de socialisation, une béquille pour le sujet inadapté, un moyen d’éviter les situations de vie dangereuses. un moyen de diagnostie et de catharsis. C’est donc un outil thérapeutique complet. Dans la perspective d’un soutien au moi de l’enfant. Redl montre que, dans le programme, il faut essaver : de drainer les impulsions, d’éviter et de limiter les frustrations, de faire des concessions aux anciens modes de vie, de voir des contre-indications possibles pour un enfant et pour l’hygiène psychologique du groupe, de doser les sublimations, de favoriger les contrôles dépersonnalisés venant du groupe, de régler soigneusement la durée des activités, d’être soucieux des effets qui pergistent et des confusions dues aux transitions, d’intervenir parfois de façon protectrice et préventive, d’édifier des images procurant des satisfactions, de favoriser la contagion des intérêts et la participation accrue au programme, d’élargir enfin les cadres de l’expé¬ rience. Son emploi reste toujours lié à tous les autres aspects de l’action psychopédagogique. Dans le groupe, les activités peuvent être suggérées, proposées, lancées. menées, de facon souple ou stricte. La liberté de participation dépend des âges, des sexes, des climats de groupe. Parfois l’éducateur fournit à un enfant. pris en particulier, une activité qui lui convient spécialement. Les activités ET SOCALES EN PSYCHATRE INFANTLE 13 la laine, planeurs en cartons., lee plue grande réaligeront des tissages, de vraies maquettes à l’échelle. constituent des buts plus ou moins immédiats pour le groupe. Il faut ici souligner l’importance des perspectives pédagogiques, mises en évidence par Makarenko 1471. « Ce soir, à la veillée nous allons faire ceci, dimanche nous sortons en forêt, la semaine prochaine nous commencerons à préparer la fête de Noel.. ». Le groupe a un but et cette prévision est un élément qui sécurise l’enfant (1). Cela n’exclut évidemment pas la aouplege des programmes. On pourrait d’ailleurs utiliser cette sécurisation pour d’autres aspects de la vie personnelle de l’enfant, ses travaux, ses réalisations, ges progrès, sa sortie. En dehors du groupe, diff́rents chubs fournissent chaque jour à chaque enfant la possibilité de choisir l’activité qu’il désire, sous la geule réserve de terminer un travail commencé. Ils fonctionnent après la classe, de 17 heures 15 à 18 heures 30. En plus des clubs quotidiens, certaines activités favorisont le contact inter-groupes : jeux, cinéma, radio-crochet, fêtes. Certaines reviennent tout au long de l’année, mais les gaisons, les modes. les fêtes apportent des centres d’intérêts épisodiques. On peut citer : peinture libre, céramique, rotin, tissage, marionnettes, plâtre, papiétage, cartonnage. animaux de feutrine, fabrication de masques, d’animaux en corde, en fil de fer, en raphia, en carton, menuiserie, tricot, piquage, broderie, lino¬ gravure, photo, peinture sur verre, bruine, chant, danse, promenade, sports de combat, jeu dramatique, jeux sportifs, de ballon, de société, histoires. bibliothèque. Nous soulignerons l’intérêt du club dit d’entretien, qui est utilisé en vue de faire participer les enfants à certains soucis matériels et esthétiques du centre et leur donne le sens du respect minimum des lieux (massifs de feurs. par exemple). Ce club consiste en bricolage, tel que peinture de bancs ou de barrières, petite maçonnerie, jardinage. Aux beaux jours, un club de jeux libres, permet à ceux qui n’ont pu fxer leur choix, d’organiser eux-mêmes dans la cour des jeux à leur goût (par exemple, jeux de billes, de patins à roulettes). Types d’activites de groupe : Chaque groupe reprend certaines de ces activités en les adaptant à chaque enfant. Les travaux ou les activités seront davantage fonction de l’âge et du sexe et aussi des saisons (jardinage, décoration avec marrons), Par exemple, pour les filles : couture, repassage, cuisine, fabrication de poupées.. pour les garcons : construction de bateaux, de modèles réduits d’avion.. Les plus petits réaliseront des formes simples : pompons, piquages, avec de (1) Beaucoup de nos enfants, à des degrés diff́rents, ont des dificultés à s’orienter. aussi bien afectivement que dans l’espace et dans le temps. Sur ce dernier point, il est très utile que le groupe permette à l’enfant de se rendre compte, à tous moments, de l’heure, du jour, de la gemaine et du mois, avec des pointe de repères : jeudi, dimanche, vigites, par exemple. activités spontanées du groupe. MÉTHIODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 134 Les veillées, par leur caractère plus intime, plus familial, ont une grande importance aux veux des enfants : en dehors des veillées libres, elles peuvent comporter lecture, audition de disques, histoires, discussions, chants et danses, jeux dramatiques. La plupart de ces activités ont lieu le jeudi et le dimanche. Les sorties constituent aussi un enrichissement par le contact avec l’ex¬ térieur (pique-nique en, forêt, piscine, parc à jeux municipal, musée, 200. pêche, visite d’usines ou de grands magasins, achats en ville, cinéma de quar¬ tier ou de patronage, Kermesse ou fêtes foraines). Il n’existe pas de diffrence profonde dans l’action, de l’éducateur A propos des activités spontanées et des activités dirigées (1). Il s’intègre plus ou moins à l’activité spontanée, chaque fois que cela lui est possible et lui parait souhaitable. Il en exerce ainsi très discrètement le contrôle et ne cherche ni à en prendre possession, ni à la mener, mais à agir à travers elle. Le groupe des moyens, de 8 à 10 ans, se signale depuis un certain temps par aa salet́. Proftant de la moindre présence d’eau (pluie, transvasement avec boites de conserve), il organise des lacs, avec barrages, digues en terre, et y fait fotter des morceaux de bois. Les éducateurs proposent la construction d’un bassin en ciment dans le terrain du groupe. Tout le monde se met au travail et le bassin est achevé rapidement. On organise alors la fabrication de petits bateaux, activité qui est reprise avec autant de auccès chaque année. Cela n’a pas éliminé complêtement la saleté de tout le groupe, ce qui n’aurait d’ailleurs pas été souhaitable pour certains, mais a permis de mieux doser la permissivité en ce domaine. Il n’en reste pas moins que l’éducateur doit marquer plus ou moins nettement, selon les âges, la différence entre les deux genres d’activités. Il faut amener l’enfant à participer, mais d’autre part, la réalisation d’un travail demande un cadre plus strict. L’éducateur se montrera davantage directif, ce qui permettra, à partir de tâches individualisées, des apprentis. sages : exercice de la patience, discipline de l’attention, développement de l’adresse gestuelle. L’enfant doit être informé de l’utilisation de l’objet fabriqué : poterie pour ses parents, décoration pour sa chambre, par exemple. La réalisation ne doit pas en être trop lointaine. La façon dont il travaille et la valeur qu’il accorde au résultat seront très importantes. Il s’agit, d’abord, de lui montrer qu’il est capable de faire quelque chose qui est apprécié par lui-même, par ses camarades, par ses éducateurs, par ses parents. A partir de la, on ne doit pas hésiter à lui demander des eforts de plus en plus dificiles mais toujours à partir de ses possibilités réelles. « Il apprend maintenant à acquérir du prestige en produisant des choses., il s’ajuste. aux lois inorganiques du monde des outils. (Mais) on ne peut pas tromper les enfants par des louanges creuses ou des encouragements condescendants., l’identité de leur moi ne gagne de force réelle que par la reconnaissance sincère et stable d’une réussite véritable, qui ait un sens dans leur culture 1341 1421. ». (1) Nous avons montré ailleurs. IIl. HI31, quel doit être le role de l’éducateur dans lex le sociodrame. ET SOCIALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE 135 Les activités spontanées sont extrémement variées, Par leur caractère même, beaucoup ont un aspect plus ou moins projectif: mimes, sketches improvisés, jeux à caractère familial (1), dinette 1111, marionnettes, jeux de cabanes 131. Certaines activités inhabitulles créent des situations où l’attitude des enfants envers les adultes se modife, Ainsi à l’approche de Nogl le désir d’extraordinaire, l’atmosphère nouvelle rapproche les individus des liens s’établissent ou se resserrent : le groupe tend vers la communion. Le carnaval, les Kermesses, les camps de vacances, sont aussi l’occasion de modifcations d’attitudes et de relations nouvelles. 4. Les entretiens. L’éducateur prend l’initiative d’un entretien pour deux sortes de raisons : au sujet d’événements quotidiens dans le groupe (par exemple confits avec un sous-groupe), ou bien lorsque des événements extérieurs à la vie du groupe doivent être explicités ou portés à la connaissance de l’enfant (par exemple, question de fliation). Dans le premier cas, il aura lieu le plus près possible de l'’événement dont il s’agit de parler, mais quelquefois après un laps de temps permettant le recul, la détente, la dédramatisation. Pour les événements extérieurs, on attendra le moment favorable ò l’enfant sera le plus réceptif, le moins anxieux. Dans le premier cas, il semble évident que les éducateurs doivent en assumer la responsabilité. Ils en connaissent le contexte et les nuances. Parce qu’ils ont vécu ces événements avec les enfants, ils peuvent en parler avec plus de poids. Mais parfois quelqu’un d’extérieur peut être davantage entendu. Pour l’autre type d’entretiens, on peut aonger à l’assistante sociale, au médecin, au psychologue, sans qu’on puisse établir de frontières rigides. Par exemple : groupe de plus grands. Il s'est affirmé, a acquis une bonne position sociale, mais le décalage « On a décidé en réunion de synthège que Jacques, 12 ans 6 mois va passer dans un est trop grand entre lui et les autres : il a 5 ans de plus que certains garçons du groupe. Etre avec des enfants de son ̂ge contribuera maintenant à assurer ges progrès. Il est très attache aux éducateurs. Venant d’eux, l’annonce de ce changement rigque d’être ressenti par lui comme un rejet ou un abandon. Le médecin le prend donc en entretien, ce qui permet une accepta¬ tion active de la part de Jacques ». Grâce à une utilisation adéquate de la relation avec l’enfant, en créant un climat dédramatisant, l’éducateur pourra le mettre à l’aise, en état de récep¬ (1). Ce jeux, dans leur contenu et leur ntiliation, ne aont pas ana rapcler parfois 136 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES tivité, de coopération, mieux lui faire comprendre, ginon admettre certaines choses. L’opportunité d’un entretien sera toujours fonction de la qualité de cette relation. Les deux éducateurs décident ensemble qui des deux, compte tenu de tous les éléments qu’ils connaissent, doit assumer la conduite de l’entretien. Obiet des enretiens. Nous citerons les principaux : A leur arrivée, les enfants ont affaire à un certain nombre de personnes nouvelles. Il appartient à l’éducateur de leur permetre d’abord de se situer. en leur fourniggant, à partir de points de repères simples, des explicationg sur ces personnes et leur rôle. Beaucoup d’enfants, à la situation familiale compliquée, sont dégorientée affectivement. L’éducateur, lorsqu’il estime un enfant auffisamment réceptif doit, avec toutes les précautions voulues, discuter avec lui de sa situation familiale réelle pour connaitre ce qu’il en sait, ce qu’il en penge. De même, pour son passé, son présent ou son avenir. Ir pourra r’inrormer, sr necessaire, de certains détails utiles le concernant, si l’enfant ne pose pas de question à ce sujet. Les problèmes de nom et de filiation ne peuvent être abprdés qu'^après discussion en réunion de eynthèse. L’éducateur peut enguite en parler geul ou en coopération avec l’assistante sociale, Parfois il vaut mieux que ce goit une personne hors-groupe, médecin, assistante sociale ou paychologue, gi l’éducateur craint d’être trop impliqué dans sa relation avec l’enfant, ou quand une brusque information risque de déclencher de trop fortes réactions dans le groupe. D’autres questions : scolarité, problèmes ethniques, information sexuelle. vol, fugue, mensonge, peuvent être abordés en entretien, avec ou sans réfé¬ rence au groupe. Des problèmes de relations : éducateur-enfant ou enfant-dans-le-groupe. peuvent y être évoqués ainsi que certaines explications simples de comporte¬ ment. Ces entretiens, individuels ou en groupe, sont fréquemment utiligéa pour des problèmes de dynamique du groupe. Les informations sur la vie familiale : naisance, maladie, décès, départs. absences de visites, doivent être données plutôt par l’assistante sociale. Nous parlerons plus loin des problèmes de placement et de sortie. Le dessein de ces entretiens est de clarifer, d’expliquer et en même tempa de favoriser l’expression, puisqu’il s’agit d’abord de savoir ce que penge et ce que ressent l’enfant pour mieux l’aider ensuite. A un niveau plus élé¬ mentaire, ce peuvent être des entretiens de dédramatigation et de soutien servant à se rapprocher d’un enfant distant qu’on connaît peu ou qui ge trouve en mauvaise pasge. On lui montre alors qu’on l’accepte tel qu’il est. on le rassure, on s’efforce de le mettre en confiance. Pour Redl, l’entretien constitue une « technique en vue de l’exploitation clinique de certains événe¬ ments quotidiens ». Cet auteur montre comment il est destiné à souligner les expériences vécues : il précise la réalité, il tente de libérer les gentiments 137 ET SOCLALES EN PSYCHIATRIE INFANTUE de culpabilité, il permet d’exprimer les affecte, il aide à redresser la réalité déformée, il peut être interprétatif (interprétation de conduites récentes. interprétation après avoir protégé le moi, en l’isolant de la scène où les réac¬ tions caractérielles se sont produites, interprétation anticipée des manques de contrôle afin de renforcer les défenses contre la montée subite des symp¬ tômes), il peut être constructif, il peut, enfn, avoir lieu en groupe 1341. Cf. aussi 1811. Forme des entretiens. De façon générale, seul avec l’éducateur, l’enfant a tendance à ge montrer différent de ce qu’il est dans le groupe. Le plus souvent, cela se traduit par une importante inbibition : coupé de ses cadres de références ordinaires, il n’existe plus de médiation entre l’éducateur et lui. L’enfant percoit alors l’éducateur davantage comme un adulte investi de l’autorité que comme up membre du groupe. Cette situation est souvent anxiogène, parce que fortement ressentie comme inhabituelle, et cela d’autant plus que, davantage encore qu’en groupe, l’éducateur doit exclure toute attitude moralisatrice. L’entretien seul à geul ne doit être utilisé que si l'’enfant est suffgsamment à l’aise avec l'’́ducateur. Mais, d’autre part, le simple fait de participer à une activité commune, quelle qu’elle goit, même s’il n’y a que peu ou pas d’échanges sur le plan verbal, peut avoir une grande importance. On est gurpris de voir l’enfant raconter aux autres comment il a vécu cette situation. On constate également parfois des modifcations dans son comportement vis à vis de l’éducateur. Il est alors très utile de faire quelque choge avec l’enfant : visite, travail manuel. La situation est moins artifcielle, il peut dépasger son inhibition et réduire son anxiété. Cette activité sert de support à l’examen de certaines questions. Souvent, aussi, l’éducateur utilise l’entre¬ tien individuel dans le cadre quotidien de la vie du groupe : repas, coucher. récréation, activités diverses. La situation pour l’enfant est davantage normale et, surtout, l’éducateur peut saisir au vol les occasions à mesure qu’elles ge présentent. On peut aborder certains problemes délicats même dans une situation de groupe, à table ou à la veillée. Par la dédramatisation ainsi obtenue. l’éducateur peut expliquer, rassurer, apaiser, en même temps qu’il comprend. « Un jour, à table, Bernard commence à raconter les brutalités de gon père : trois gar¬ cons, dans un gilence total et à tour de rôle, en font autant. » Pour Bettelheim, 1781: « Ce courage de parler de gon passé traumatique, cette valorisation est largement eutistique et a geulement une signification individuelle. Mais le courage de lever les réprez¬ giong est dérivé de l’existence du groupe. » Si l’entretien ge situe sur un plan relativement rationnel d’explication. il ne prendra toute sa valeur qu’en tenant compte du niveau de développe¬ ment de l’enfant et des interrelations éducateur-enfant. Nous aurions pu placer l’entretien, comme les activités et les actes de routine, parmi les techniques proprement dites. Nous avons simplement par l’action de l’observateur. 138 MÉTUIODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES voulu montrer que, en général, il était surtout une des formes d’intervention habituelle de l’éducateur dans le processus paychopédagogique. Soug leg aspects les plus divers, il s’agit avant tout de créer des situations permettant échanges et communications, multiples, sur tous les plans, à l’occasion des¬ quelles il pourra agir efficacement sur l’enfant. Cette action globale est, en même temps, un objet d’observation afin de pouvoir en rendre compte et de la contrôler pour l’améliorer. LIL. L’OBSERVATION a) Méthode d’observation et statut méthodlogique de l’éducateur. Il s’agit pour l’éducateur d’apprécier les possibilités d’évolution d’un enfant, placé dans des situations elles-mêmes en mouvement. Nous retrouvons ici l’ambiguité P131 de sa position : membre du groupe mais adulte participant de l’Autorité, parmi des enfants d’âge scolaire. A la fois au dedans et au dehors. avec et à part, il participe, tout en observant. Son statut se rapproche (1) de celui de l’observateur-participant, ce qui n’est pas sans évoquer l’action¬ research, recherche sur l’action et par l’action 1751. Champ d’obseration. Il recouvre son champ d’action qu’on pourrait qualifer d’espace à plu¬ sieurs dimensions mais qui évolue aussi dans le temps. Il comprend : — l’enfant comme cas individuel, avec sa propre histoire, la structure de sa personnalité. — l’enfant dans ses relations avec les autres membres du groupe, — le groupe en tant que tel. — les éducateurs aux prises avec ces éléments. Les éducateurs ont à rendre compte de la conduite de l’enfant en situation. considéré dans sa totalité, dans une perspective dynamique. Rappelons à cet endroit l’intérêt de l’apport phénoménologique. Leur méthode consiste en une approche descriptive et directe de compor¬ tements provoqués ou spontanés. Sous un certain angle, cette approche s’apparente à la méthode clinique et, de moins près, à la méthode expérimen¬ tale : établissement et vérifcation d’hypothèses (concernant par exemple la signification, la nature des troubles), rigueur du contrôle de l’observation et de l’action, variations systématiques de certains comportements sous l’infuence du style de conduite de l’éducateur. On tend « à modiffer une situa¬ tion réelle de façon à ce qu’elle réponde à des conditions définies. Dans tous (1) A la diff́rence d’autres procédés, dont le plus opponé eat l'’obaervation derrìre une glace sans tain permettant de voir eans être vu (procédé employé par A. GESELL, par exemple). L’observation ici, est principalement centrée sur la modifcation du fait obgervé 139 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE NEANTIE les cas, on y (dans l’expérimentation) étudie l’efet d’une intervention spé¬ cifiée dans un cadre de données spécifées 1671. » La compréhension immédiqte (1). L’éducateur doit saisir l’émotion vécue qui se traduit par un comporte¬ ment objectif (gestes, mimiques, mots) et, aussitôt répondre par la conduite psychoṕdagogique la plus ad́quate. Cette compréhension immédiat correspond à l’observation, à la perception d’éléments qui pourraient pagser inapercus pour d’autres et à l’interprétation de ces éléments. Leur compréhen¬ sion et leur explication étant fondées sur la connaissance de l’engemble de la situation : — ce qu’elle est ici et maintenant. — les interrelations éducateur-enfant-groupe. — le rapport entre l’actuel et le passé. — la connaissance de ses propres expériences personnelles et professionnelles. qui constituent un système de références. L’éducateur s’appuie sur cette connaissance globale pour afiner son intuition, la rendre claire pour lui-même, pouvoir en transmettre la substance et agir selon ses données. Cet ensemble doit être suffisamment intégré pour permettre des réactions rapides. Immergé dans l’action, l’éducateur ne peut avoir une conscience claire de tous les instants, mais il doit s’eforcer de réduire au minimum la distance entre ses réactions, parfois immédiates, et la conscience qu’il en prend. D’une façon générale, tout dans la conduite n’est pas observable et on ne peut tout observer en même temps. Etant donné la complexité de son travail et bien qu’il doive tendre à appréhender le plus grand champ possible, l’éducateur ne peut que filtrer ses informations et n’en retenir que les éléments les plus signifants en fonction de tout ce qu’il connait. Limies. La dynamique de groupe a montré qu’au delà de 12 personnes les mem bres d’un groupe se percevaient de plus en plus mal. Avec l’âge et le type de certains enfants, les chiffres actuels par groupe nous paraissent trop élevés dans cette perspective de travail. Si l’on tient compte de tous ces éléments. on peut déterminer un moment, ou un seuil, à partir duquel, face à des signaux multiples, différents et simultanés, l’éducateur court de plus en plus le risque. ou de répondre de façon inadaptée, ou même de ne plus pouvoir répondre du tout 1221. Un groupe variant de 8 à 10 enfants, selon les cas et la gravité des troubles, pourrait constituer un outil thérapeutique plus afiné et per¬ mettre une action de l’éducateur plus différenciée et plus effcace. (1) Terme peut-être préférable à celui d’intuition (ou inaight) qui ne met pas aagez l’accent sur l’apbrentigsagé nécesaire pour acquérir cette vision. MéTLODES PSYCHIOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES 120 b) Les techniques d’obgervation. L'observation continue. Elle constitue la technique la plus courante. L’éducateur ne peut noter par écrit que des séquences de comportement, individuel, interindividuel et de groupe, plus ou moins longues, en fin d’activité ou de journée. Il peut prendre entre temps quelques brèves notes qui lui serviront de point de repè¬ re : par exemple, composition et durée d’un sous-groupe. Ces différentes notations sont nécessaires en raison des oublis et des distorsions que subissent les gouvenirs. On ne peut tout noter : bien qu’il ne s’agise que d’un premier stade descriptif, on ne doit s’attacher qu’aux éléments significatifs par rapport à l’ensemble 1751. L’observation systématisée. Emplovée de temps à autre, elle eat surtout centrée sur l’étude du groupe et des relations interindividuelles (1). Elle s’inspire des techniques d’échantil¬ lonnage de temps ou de comportement de Ch. Bihler et de Gesell, ou du système catégoriel de Bales. Elle peut être extensive ou intensive. On prend, par exemple, le maximum de notes sur tout ce qui se passe pendant un certain laps de temps très court, toujours à la même heure : ou bien on enregistre combien de fois, dans telle activité, ou tel laps de temps, revient telle unité de comportement, ces segments pouvant être considérés comme représentatifs du comportement total 1761. Les questionnaires sodométriques (2). Ils permettent d’obtenir une radiographie des interrelations dans le groupe, à un moment donné. Ils se composent à la fois de questions d’ordre plutêt fonctionnel et d’ordre plutôt affectif, établies en tenant compte des situations réelles : « Quels sont à ton avis, les garcons qui doivent faire partie de la cabane 2 ». « Si on changeait de place au dortoir, à côté de qui aimerais¬ tu être 2 », par exemple. A chaque question posée, demandant un choix, correspond la même ques¬ tion négative, exprimant un non-choix ou un rejet. Pour être suffisamment motivés, ces questionnaires (3) doivent être, avec beaucoup de précautions, présentés aux enfants dans un but pratique et suivis d’effets, par exemple changement de place au réfectoire. Ils ne doivent pas être trop fréquents et seront parfois modifiés selon les circonstances (par exemple : suppression des questions négatives). Il peuvent, en effet, contribuer à une certaine pri de conscience des relations à l’intérieur du groupe et surtout à la fxation d’attitudes rejetantes, notamment chez les plus grands. (1) Il y aurait intérêt à appliquer cette technique, à certains moments, pour certaina cas individuels apparaissant comme peu nets et difficilement compréhensibles. (2) Dérivés des teste sociométriques de configuration sociale de Moreno. Nous ne par¬ lerone paaici du traitement des résultats (sociogrammes, calculs). Voir à ce sujet 1131 14811711. (3) Leur application, de même que celle des techniques d’observation systématisée. est effectuée par les deux éducateurs du groupe, réunis 161. le groupe 131. » 143 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE NFANTILE Cette technique permet de préciser ou de mettre en lumìre certains faits (popularité croissante, rejet). « Elle donne en particulier une dimension que ne saurait apporter l’observation : la structure perque du groupe (1). Mais elle ne fournit que de symptômes. Seule l’observation permet de saisir la structure réelle et la dynamique du groupe (2), de connaitre les eituatione intergroupales aasumées par le groupe et enfin les cadres sociaux dans lesquels fonctionne c) L’observation comme compte-rendu. Le pocabulaire fechnique. L’ohesans oplioue l'utiamtion dt ctocc, oi de radhtces e l’emploi de mots, c’est-à-dire de concepts, ou de variables présentant des degrés (fréquence d’apparition d’un trait), Pour exprimer le degré de présence de chaque trait, on se sert d’adiectifs, d’adverbes ou de nombres. Le but de l’emploi de certains verbes est d’en montrer l’agpect évolutif. Le comportement observé, à l’aide de ce cadre, implicite ou explicite a une structure et une signification. Le comportement d’un sujet dépend de sa personnalité. L’observer n'’est pas seulement le découper en traits, puis en faire la synthèse, mais c’est le saisir d’emblée dans son rapport avec la personnalité totale. Ce qui importe, c’est la signification humaine du comportement (3). « Partant du phénomène observable, nous atteignons les processus et structures sous-jacents », écrit J. Guindon f48l, qui cite alors Spitz « (car) pour nous les phénomènes forment un aspect seulement d’un processus dynamique, dont nous suivons la genèse. Nous les consi¬ dérons dans le sens de leur histoire, des forces qui y participent, de leur rôle dans le présent et de leur destin futur » I6Il. Validité et nipeaux d’observation. En général, la corrélation est plus forte entre l’observation de plusieura traits par le même observateur qu’entre l’observation du même trait par plusieurs observateurs : c’est l’efet de halo. Ici, un des buts de l’obgervation est d’analyser au maximum cet effet de halo. D’où l’importance de la prige (1) Et en particulier le niveau d’aspiration de chacun sur le plan des relations dana le groupe. Une technique plus poussée, mais rarement employée, consiste à demander à l’en¬ fant par qui il pense avoir été choisi. (2) On ne peut concevoir la formation des groupes en termes d’affinités. M. SHÉRR a montré que les afinités immédiates relevées dans un groupe en formation (colonie de vacances) ne régistent pan à la répartition svatématique des membres des paires (choix réci¬ proques) dans deux groupes séparés. Les afinités individuelles jouent un rôle à petite échelle : leur champ d’action dépend de gtructures gociales préétablies. (3) Soulignons l’importante expérience professionnelle que cela implique. On peut noter plusieurs problèmes, toujoure plus ou moins latents : l’accord dans la deecription des mêmes faits (mais souvent les situations diffèrent) : — l’accord gur le contenu de chaque terme : — le danger d’une cristallisation du vocabulaire technique. séjour et de ses possibilités. 142 MÉTLODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES de conscience et de la maitrise des phénomènes de contre-transfert. En plus des mêmes faits rapportés par plusieurs personnes, la multiplicité des per¬ sonnes et des situations va permettre des recoupements de plus en plus variés selon les niveaux d’observation. La confrontation de ces données diminue les risques d’erreur, quant à la description et surtout quant à l’inter¬ prétation. Au centre d’observation de Vitry, chaque éducateur consigne le résultat de ses observations quotidiennes sur un cahier, en se servant de grandes rubriques qui constituent plutôt un cadre et un guide qu’un plan précis : — groupe : structure du groupe (sous-groupe, leaders, isolés, rejetés).. — phénomènes de groupe (contagion, bouc émissaire).. — activités spontanées (jeux divers, construction de cabane). — enfant : conduite avec les adultes : conduite avec les autres enfants : divers (énurésie, vol, anorexie, masturbation, fugue). Au niveau du groupe a lieu une première synthèse : les deux éducateurs préparent ensemble la feuille d’observation pour la réunion de synthèse générale. Ils confrontent leurs observations, en dégagent les structures en mettant en évidence leur signification dans une perspective dynamique. Le cas de chaque enfant est examiné une fois par mois en réunion de synthège plénière en vue de laquelle les éducateurs, à partir des faits observés. établissent leur rapport d’observation en se servant de trois imprimés compor¬ tant des rubriques générales. Il s’agit d’un cadre et d’un guide davantage que d’un plan précis (1). Rappelons qu’il s’agit non seulement de rapporter des faits bruts, mais de les ordonner, et d’en dégager le signifcation en les commentant et en les interprétant. Le même processus se déroule au cours de la réunion de synthèse mais de façon plus globale et plus approfondie, puisque toutes les personnes qui s’occupent de l’enfant y participent. C’est donc à ce niveau seul que peuvent être prises, en connaissance de cause, des décisions importantes concernant l’enfant. d) L’observation comme contrôle. L’observation, visant à rendre compte de la conduite de l’enfant pris dans sa totalité, comporte notamment les interrelations enfant-éducateur. On pourrait les schématiser ainsi : L’enfant a réagi de telle façon envers tel éducateur, et inversement. Pourquoi 2 Comment ce dernier doit-il maintenant se comporter à son égard 2 (1) Pour le détail de rubriques, voir annexes 1. 2 et 3, pour la première synthèse. feuille de premìre décision, pour les autres aynthèses, feuilles de suite, pour la dernière synthèse, feuille de sortie, visant à établir un bilan de l’évolution de l’enfant au cours du narcisgiques ou de prestance. 143 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTILE Le terme de contrêle est employé au centre à propos des réunions de contrôle, animées par le médecin, où psychothérabeutes puis assistantes sociales exposent et discutent des cas, enfants ou parents, dont elles s’occupent. Ce terme ou celui de supervigion (1) nous parait recouvrir un ensemble de procédés (2) se situant aux trois niveaux précédemment définis: individuel. du couple-éducateur, et de la synthèse. Il ne s’agit pas d’obtenir des conseils d’ordre éducatif ni de faire de l’introspection, mais l’éducateur doit expliciter et objectiver ses sentiments et ses attitudes vig-à-vis de l’enfant et du groupe. pour parvenir à une meilleure connaissance de leurs interrelations vécues. Cette prise de conscience pourra permettre une meilleure adéquation de son comportement au stade du développement actuel de l’enfant. Ce but nous semble pouvoir être dificilement atteint sans une aide psychopédagogique extérieure : c’est-à-dire une supervision individuelle ou collective, Indivi¬ duelle, « elle est plus facile à doser, elle fournit un enseignement plus adapté» 1221. La technique de discussion de groupe, non-directive ou semi-directive. avec étude de cas, a, de son côté, ses avantages : — moins d’implication personnelle que dans une cituation à deux: — la situation de groupe est dédramatisante et permet plus facilement la difusion des tensions : — plusieurs angles de vues diff́rents permettent de bien cerner les problemes: — la situation de groupe a un aspect formateur en tant que technique de groupe. Ces deux formules de supervision doivent se compléter en se combinant selon la personnalité, le genre de travail et le degré d’expérience profession¬ nelle 148l des éducateurg. La supervision risque de devenir pesante, trauma¬ tisante, rigide, infantilisante et exige donc de la part du superviseur une pru¬ dence et une compétence très grandes. Il ne s’agit en aucune façon de porter une appréciation normative sur le travail de l’éducateur. Il est de la plus haute importance que le guperviseur : — ne supervise que des volontaires : — ne soit pas investi dans le centre de fonctions d’autorité: — ait été lui-même éducateur de groupe longtemps et lui-même supervisé : — connaisse le contexte du travail de l’éducateur qu’il supervise — soit hautement qualifié pour toug les problèmes de psychologie des rela¬ tions et de psychologie de groupe: — respecte rigoureusement le secfet professionnel. La supervision n’est pas d’ordre psychothérapique. Elle eet ouverte sur l’adaptation à la réalité. Le temps concacré à chaque cag, lors des réunions de aynthèse étant trop bref, des réunions au niveau du groupe les complètent: elles rassemblent (1) Technique de contrôle propre au travail social dans les pave anglo-axons, introduit en France pour la formation et le perfectionnement d’assistantes sociales, cagevorkers, et. depuis peu, pour les éducateurs, 1201, 122). (2) Ce contrôle ne peut s’effectuer, individuellement ou en groupe, de façon écrite. orale ou réfexive, que sur la base d’un certain matériel : maximum d’information apporté sur son propre travail. Il nécessite une forte atténuation sinon une élimination de ses réactions 144 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES lea deux éducateura du groupe et certains techniciens du centre. Ces réuniona permettent, en outre, par la connaissance plus complête qu’elles donnent de l’enfant et du groupe, une meilleure coordination de tous les efforts. Nous avons déià montré la nécessité d’une analyse constante de son propre comportement par l’éducateur lui-même. La discussion entre les deux éducateurs du groupe favorise : — une régulation quagi permanente de leurs attitudes par l’analyse critique du travail de chacun par son collègue : — la connaisance et l’harmonisation d’attitudes diff́renciées : élucidetion des interrelations des deux par rapport à un enfant, par exemple : la traduction en termes plus pédagogiques de discussions lors des réunions, 2 ou de lignes générales qui ont pu y être proposées : un souci plus poussé d’analyser la conduite du groupe dans son ensemble 2 et les phénomènes de groupe ou inter-groupes : — un ajustement réciproque de leur conduite. Nous verrons plus loin comment ces aspects de l’observation peuvent être considéré aussi en tant qu’éléments du perfectionnement des éducateurs. On peut donc dire, en résumé, que le travail de l’éducateur congiste, en partie, à rendre compte d’une psychopédagogie et de ses résultats, lesquels, par un efet en retour, feront rectifer les modalités de son action éducative. IV. LES AUTRES ASPECTS DU TRAVAIL DE L’EDUCATEUR L’enfant et l’édcateur, dans leur groupe, constituent un engeimble. mais un ensemble ouvert : l’enfant se situe à l’intersection de plusieurs groupes. De plus, il peut être en rééducation scolaire ou psycho-motrice, en psycho¬ thérapie; et il a presque toujours une famille. a) L’éducgteur et le parente. L’éducateur voit les parents durant lea visitea. Le placement n’est, la plupart du tempe, que l’aboutiegement d’un confit enfant-famille, ge doublant souvent d’un problème scolaire. Les parents. en général, se gentent coupables de leur échec auprès de leurs enfants et de leur abandon consécutif. Leur attitude va du dépit et du remord à la dépres¬ gion. Devant l’éducateur, ils craignent d’être jugés pour leur échec et leur rejet. Ils ont peur de se trouver comme de mauvais parents devant de bons parents, qui peuvent leur voler l’affection de leur enfant et prétendent réussir là où ils ont échoué. Ils se défendent de deux manières, soit par un compor¬ tement passif, soumie, abandonnant toute personnalité 117 terl soit par des réactions de prestance. Certains vont essaver d’annuler leur acte en expli¬ quant aux enfante qu’il pensent toujours à eux et « pour le leur montrer ils vont essaver de démolir systématiquement toute l’infuence des éduca¬ teurs 1321 ». Pour cela, ils mettent en évidence tous les sujets possibles de ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE, INFANTILE 148 plainte et se montrent agressif et revendiquants. Cette attitude peut prendre une acuité particulière entre la mère et l’éducatrice. L’éducateur gera tenté de rejeter les torts sur les parents, de les accuser de nuire ou de freiner son action. Au fond de lui pourra se cacher un refus du partage de l’affection de l’enfant. Il doit donc connaitre ces réactions possibles pour les élucider et finalement les dépasser. Il ne doit ni prendre le parti des parents contre l’enfant, ni, réaction plus fréquente, celui de l’enfant contre les parents. Se sentant compris et acceptés, les parents peuvent abandonner leurg défenses. Il doit partir de cette rivalite réciproque plus ou moins implicite pour après l’avoir peutêtre explicitée, montrer aux parents combien leurs rôles respectifs sont complémentaires. Il les persuade qu’il se base sur leurs infor¬ mations, à propos du comportement de l’enfant à la maison, sur leur compré¬ hension, eur leur appui, pour finalement leur rendre un enfant amélioré. Il doit expliquer qu’il n’est là que pour apporter une aide limitée, le temps de le remettre dans son milieu habituel. Il doit savoir s’effacer, tempérer avec discrétion les élans d’un enfant envers lui devant des parents ombra¬ geux, pousser un enfant un peu tendu vers des parents anxieux. Bref il doit s’efforcer de montrer aux parents qu’ils participent à l’évolution de leur enfant. Les visites constituent déjà une gituation dédramatisante, parce qu’elles sont collectives. Les parents sont invités à diverses activités, qui seront un lien avec leurs enfants : expositions de travaux manuels, cinéma, gpectacle sportif, jeux. Parfois sont organisées des réunions sur certains problèmes. avec flms, illustrés, livres pour enfants, réunions accompagnées de pro¬ jections et d’expositions. L’importance des contacts de l’éducateur avec les parents vient de ce qu’il vit avec leur enfant. Illeur montre et leur explique son cadre de vie et ges activités. Enfin, il doit les rassurer et répondre à leurg questions. « Comment est-il avec vous 2 ». Ceci va être le début d’une tentative de revalorisation de l’enfant. Il a été placé parce qu’il n’était plus toléré par son milieu. Il s’agit d’aider à la réconciliation. L’éducateur pourra y contribuer : — en montrant que l’enfant peut devenir différent, en mettant l’accent gur les côtés les plus positifs de son comportement et en soulignant ses progrès : — en montrant qu’il peut réussir quelque chose : les travaux manuels sont alors d’une aide précieuge, autant pour l’enfant que pour ses parents. Mais c’est aux cahiers de clasge que les parents attachent souvent une plus grande importance. C’est un sujet de confit ancien, et pour eux, la réussite scolaire présente une grande valeur sociale. Inversement, cela peut stimuler l’efort de l’enfant. Il faut dédramatiser, sans minimiser à l’extrême les dificultés, pour ne pas donper l’llusion factice de la réuegite. Il e’agit en définitive, de modifier l’image défavorable que les parents ont de leur enfant, processus étroitement lié au développement, ou plutôt au réajustement de son sentiment d’identité, qui pourra alors se combiner « avec le sentiment d’être bien, d’être lui-même, et de devenir ce que les autres personnes attendent de lui qu’il devienne » 1421. De facon générale. 19 souhaits de fête, courrier. 146 MÉTLIODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGQUES et non pas seulement aux veux des parents, « le sentiment de l’identité du moi est accru par la confance que l’on acquiert, qu’à son identité et à sa continuité intérieure correspond, dans l’esprit des autres, la même identité et la même continuité » 1421. Ces contacts demandent de la part de l’éducateur, une attitude compré. hengive et de non-jugement. D’autre part, malgré le caractère artifciel de la situation, par ce qu’il en verra, par ce qu’on lui dira, l’éducateur pourra se faire une idée des rôles respectifs des parents et des interrelations parents¬ enfants. Répétons qu’il ne doit agir qu’avec une grande prudence : pour rassurer et valoriger, il faut s’appuver sur des faits réels. Or il y a des périodes de sta¬ gnation ou de régression. Il est donc nécessaire de ne rien forcer et de tenir compte du niveau des uns comme des autres. Et, surtout, l’éducateur doit travailler en étroite synchronigation avec l’asistante sociale. Une tâche qui n’est pas plus simple consiste à répondre, surtout avant la sortie, aux demandes de conseils éducatife : « Comment faut-il le prendre 2». « Que faut-il’faire quand il fait cela 2 ». Cette actiott eat menée à travers mille détails pratiques : soins, illustrés. argent de poche, friandises. Entre les visites, l’éducateur donne toujours à l’enfant la pogsibilité de faire quelque chose pour ses parents: travaux manuels. b) L’éducateur et les autres techniciens. Le travail de l’éducateur est un moment et une partie d’un tout cohérent. Il doit donc maintenir des contacts très fréquenta, avec les autres techniciens. en dehors des réunions de synthèse. Le dessein en sera, entre autres, d’obtenir le maximum de rengeignements sur l’enfant dans les cituations les plus variées. au jour le jour, d’informer ses collègues sur sa conduite dans le groupe, de toujours mieux coordonner les actions. On eait l’importance du rêle du méde¬ cin, de la psychologue, de la rééducatrice scolaire, du rééducateur de la psycho-motricité, de l’infirmière. Nous allone donner trois exempleg, intéregsants pour le interférences qu’ile prégentent avec la vie dans le groupe. Croupe et classe. Ils sont agsez complémentaires malgré des gituations et des buts spéciff¬ ques. La classe, au cadre plus strict, demande un effort soutenu, tendu vers des acquisitions précises. Le groupe permet à l’enfant de se détendre en lui offrant une gamme plus étendue d’activités, des possibilités plus grandes de e’exprimer, dans un cadre plus eouple. Les évolutions gont couvent paralles, mais parfois décalées dane le temps. Rarement est observée une évolution se limitant à un seul de ces 147 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE IRFANTILE deux domaines, malgré, parfois, des effets compensateurg. A partir d’un certain degré d’épanouissement général et de réconciliation avec la scolarité. les progrès en classe et dans le groupe se renforcent l’un l’autre 1781. Ne peut-on d’ailleurs pas parler d’une rééducation du fonctionnement intellectuel comme on parle de la rééducation affective 2 1451 L’enfant doit sentir que l’éducateur s’intéresse de très près à son travail et surtout à ses efforts. L’éducateur en témoigne en parlant avec lui et avec son instituteur, ensemble et séparément, de son travail en classe, en commen¬ tant et en signant son cahier de classe à chaque fin de gemaine avant de le montrer aux parents. L’éducateur doit le rassurer, lui donner confance en lui, l’encourager, le stimuler, montrer approbation ou désapprobation. demander des efforts, de façon d’autant plus accentuée qu’il évoluera posi¬ tivement dans le groupe. L’enfant doit être persuadé que classe et groupe ne sont pas deux mondes coupés l’un de l’autre. D’autre part, l’éducateur et l’instituteur envigagent des actions concer¬ tées dans certains cas, comme l’école buissonnière, le travail non terminé. ou pour demander un effort particulier. Cette revalorisation sur le plan scolaire rejoint lea eforts faits dans le groupe, en rééducation psycho-motrice ou en psychothérapie, pour recons¬ tituer ou constituer son image de soi, ce qui lui permettra, sur le plan des relations, de mieux situer les autres et lui-même, donc de réajuster finalement son identité sociale 1421 1441 1451. Croupe et psychotlérapie. Nous avons vu plus haut quelques différences entre les deux situations. ce qui a permis de délimiter, sur un certain plan, le champ d’action de l’édu¬ cateur. Celui-ci doit établir avec la ou le psychothérapeute des contacts (1) d’autant plus nombreux que le cas est plus grave. Ces contacts peuvent prendre deux formes : assistance aux séances de contrôle des psychothérapeus tes, où est exposé le cas d’un enfant dont l’éducateur s’occupe. Et surtout. entretiens avec la psychothérapeute afin de la renseigner sur le comportement quotidien de l’enfant dans le groupe, de comprendre le déroulement de la psy¬ chothérapie : donc, de mieux appréhender l’ensemble de la conduite de l’enfant. ce qui permettra d’adopter des attitudes appropriées. Cependant, de façon générale, la psychothérapie se situe sur un autre plan de relations, et l’éduca¬ teur n’a pas à en tenir compte, dans son attitude habituelle. Ces attitudes peuvent être de facilitation ou de soutien. « Chrigtian : le groupe peut favoriser l’expresgion d’une agregsivité qui n’arrive pas à à émertrer nettement, ce qui l’empêche d’evoluer, » « Pierre a, en paychothérapie, un comportement général très régresif avec des angoiges de mort. Il doit être, pour le aécuriser, très encadré dans le groupe. p (1) Il gortirait du cadre de cet expoaé d’examiner les incidences de la paychothérapie sur le conduite de l’enfant dans le groupe et invergement, 117) 148 MÉTUODES PSYCHOLOGLQUES, PÉDAGOGQUES Sous un certain angle, on pourrait analyger les trois situations, peycho¬ thérapie, groupe et classe, en termes de niveau de réalité. Le groupe permet. en son sein, la coexistence et, éventuellement, le passage de formes imagi¬ naires à des formes plus réelles de relationg. Mais on peut le considérer aussi comme un monde intermédiaire entre l’agpect phantasmatique qui domine en pgychothérapie, et la classe, situation la plus proche de la réalité extérieure. Groupe et travail social. L’aasiatante sociale est particulièrement en contact avec cette réalité extérieure de l’enfant : famille, école, loisirs, quartier. Les contacts de l’édu¬ cateur avec elle peuvent avoir plusieurs objets : — informer l’assistante du comportement de l’enfant pour qu’elle puisae en tenir compte dans ses relations avec les parents, ou simplement pour leur en donner des nouvelles. Ces données pourront contribuer à déterminer le type de placement le plus approprié : mettre l’assistante au courant des relations parents-enfants durant les vigites. Parfois, en effet, le comportement des parents varie selon qu’ils ont affaire à l’assistante, à l’éducateur, à la lingère. En retour, l’agsistanteinformera l’éducateur de ce qu’elle sait des parents. de l’aide qu’elle leur apporte et des démarches de placement ou de réinsertion familiale qu’elle tente. Pour certains cas, ils pourront déterminer une attitude plus précise à tenir, vis-a-vis de la famille, par exemple, valoriser un enfant devant une mère rejetante, rasgurer une mère anxieuse. Phacement et sorg : L'éducateur participe à la décision de sortie et placement éventuel de l’enfant, en réunion de synthège. Les détaile de la sortie sont ensuite fxés par l’assistante et l’éducateur. Celui-ci, en s’attachant à dégager les aspects les plus positifs du comportement de l’enfant, à mettre en évidence ses possi¬ bilités, peut donner des conseile éducatife ou conseiller des activités extra¬ scolaires : travaux manuels, sports, patronage, club de loisirs, mouvement de jeunesse. La plupart du temps c’est lui qui met l’enfant au courant de gon avenir, aprèg l’avoir préparé et en opérant parfoig un véritable sevrage. Parfois, maia trop rarement, c’est lui qui peut faire l’accompagnement de l’enfant là où il doit être placé. Un cas particulier est celui du placement familial psychothérapique du centre de Vitry. Quelque temps avant la sortie, l’éducateur et l’assistante vont visiter la famille d’accueil avec l’enfant. Ceci permet de diminuer son anxiété, de le mettre en confance, de lui faire sentir la continuité entre sa vie au centre et sa nouvelle existence. L’éducateur participe auesi à son instal. lation dane la famille d’accueil. De facon générale, la collaboration entre éducateurs et assistantes permet de mieux connaître parents et enfants, d’agir avec eux de la façon la plus appropriée en coordonnant les efforts. 149 ET SOCIALES EN PSYCHIATRIE INFANTLE Le nombre d’enfants dans un groupe, le nombre de personnes e’occupant de chaque enfant, la quantité de problèmes soulevés, les horaires échelonnés différemment et le temps disponible, limitent les contacte qui geraient idéale¬ ment nécessaires. La réunion de synthèse, par la présence de tous les techni¬ ciens, à intervalles réguliers, fournit heureusement une bage stable permettant un travail efficace. c) L’éducateur et les anciena. Un échange de correspondance s’établit parfois avec tel ou tel enfant. Il arrive augsi que des éducateurs aillent visiter des établissements où se trouvent, certains de leurs ancieng. Mais, le plus gouvent, ces derniers revien¬ nent soit pour passer la journée, après accord avec l’assistante ou l’éducateur soit à l’improviste (ils s’ennuient, ils ont envie de revoir tel ou tel ou bien il8 ont besoin d’aide). Pour certains, depuis de longues années, le centre constitue un point d’attache quand ils reviennent en vacances. Pour d’autres, c’est un refuge en cas de difficultés. Les anciens reviennent le jeudi ou le dimanche mais surtout pendaut petites congés. Jouissant d’un gros prestige auprès des enfants, ils jouent avec eux et font les importants. Les plus àgés gardent leurs distances et préfèrent discuter avec l’éducateur. Ils reviennent de facon irrégulière, quelquefois peu de temps après leur sortie mais, le plus souvent, après quelques années. alors qu’ils sortent de l’institut médico-pédagogique ou d’un centre d’appren¬ tissage et qu’ils prennent une certaine autonomie. Ils viennent, pour la plupart. se montrer grandis, maris, capables de juger leur séjour et le centre lui-même son personnel, d’en parler avec les éducateurs pour une sorte de mise au point mais aussi pour prendre un nouveau départ, après un appui demandé à l’édu¬ cateur ou l’assistante. Il n’est pas rare qu’ils cherchent, par exemple, une adresse de pension, de chambre, plus rarement d’un emploveur. Ils passent là une partie de la journée, mangent au réfectoire à côté de l’éducateur ou de l’éducatrice, offrent une cigarette, évoquent des souvenirs. Ils jouent à l’édu¬ cateur avec les enfants, revanche de celui qui est de l’autre côté de la barrière et peut parler d’égal à égal, d’adulte à adulte. Il est important que l’́ducateur sache, ce qui n’est pas toujours possible ce qu’ils deviennent, où ils vivent, ce qu’ils font. Il importe, en effet, de ne pas commettre d’impair, de les mettre en confiance et de savoir les écouter sans chercher à provoquer leurs confidences. L’éducateur doit ge montrer compré¬ hensif, disponible, mais ne pas hésiter à dire ce qu’il penge. Il peut donner aide et conseil g’il le juge utile. Avant ces démarches, se place l’invitation. chaque fois répétée, d’écrire et de revenir quand on en a envie. L’expérience montre que, seuls ou à peu près, reviennent ceux qui ont vraiment besoin d’aide. Une enquête sur des anciens a montré l’importance que pouvait avoir un point d’appui dans la vie de certains jeunes : assistante sociale, voisin, ami, médecin, éducateur. Nous ne gaurions trop souligner encore à cette occasion, l’importance de la stabilité d’emploi des éducateurs. Savoir qu’il existe au moins une personne en qui on a confiance, pour qui MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDAGOGIQUES 180 on éprouve sympathie ou affection, et qui pourra vous comprendre, sans juger, vous aider quelles que soient les circonstances. « Claude, 9 ans, lors de son séjour 1949-50, revient plusieurs fois les années suivantes voir ses anciens éducateurs, aurgiggant à l’improviste en haut du mur bordant le parc. A la queation de l’éducateur : « Pourquoi ne paages-tu pas par la porte 2 » il répond : « Aux portes il y a toujoura des vache 1 ». Revient eprs un long gilence voir son agsistante sociale apr̀s avoir commis quelques délite, lui écrit plua tard, en gecret, de prison et, à ea sortie, vient retrouver l’agsistante, ges éducateurs, le centre, pour raconter peu à peu aes aventures, essaver de les digérer et prendre un appui après ceg expériences difficiles ». d) La réunion pédagogique et le personnel en tant que groupe. Les réunione pédagogiques hebdomadaires peuvent prendre deux formes : Exposée, avec discussion, de problèmea techniques les plus divers, par des personnes du centre ou de l’extérieur : réunion de travail entre éducateurs, animée par le respongable pédagogique, avant pour but : — l’analyse et l’évaluation du travail, écoulé (par exemple, comment se sont dérouléea lea vacances de Noel) : — la discussion d’attitudes communes à adopter devant un problème précis (par exemple, doit-on supprimer les arcs 2) : — la préparation d’activités, communes (la fête de Carnaval) : — la discussionet les décisions concernant les problèmes d’ordre matériel. d’organisation : les informations générales (stages par exemple) : l’exposé de questions plus diverses préoccupant les participants : ordre du jour, décisions, demandes et propositions consignées dans un cahier pédagogique. Cette réunion constitue, elle auggi, une situation de groupe, avec 8a structure, son climat. Elle présente de gros avantages : dédramatisation. détente travail en équipe clatrifcation des problèmes discutés en même temps par tous, devant tous, les décisions collectives engageant plus fortement et réduisant les risques d’erreurs. Mais il existe quelques inconvénients : produc¬ tivité parfois réduite et temps perdu en parlottes, eu égard au grand nombre de participants. De façon générale, il est souhaitable d’organiser de plus en plus fonction¬ nellement la communication dans un établissement : « la communauté de travail, comme la démocratie, doit se recréer chaque jour, non seulement sur la bonne volonté de ses membres, mais encore sur la connaissance de sa propre dynamique » 1301. D’où la nécessité, avec un minimum d’interférences de certains problèmes personnels, d’étudier le fonctionnement d’un centre en termes de psychologie de groupe : quantité d’information émise et recue à tous les niveaux, avec les incomplétudes et les distorsions, réseaux et canaux de communication, climat, rumeurs, paniques, enthousiagmes, rapport des relations formelles et informelles. Dans le même esprit, il serait intéressant d’étudier les tentatives de Lebovici 131l et Diatkine 1321 1581. 1g1 ET SOCLALES EN PSYCHLATRIE INFANTILE pour traiter, comme ils l’ont fait pour un groupe, les problèmes posés par des éducateurs d’internat et d’externat médico-pédagogiques. Sans aller jusque¬ la, les éducateurs doivent être capables d’analyser le fonctionnement du groupe qu’ils constituent eux-mêmes. Cela demande une certaine formation et une certaine maturité. Comme pour la réunion pédagogique, qui n’en est qu’un aspect particulier, ce groupe pourrait arriver à une plus grande efica¬ cité de travail. Il s’y ajoute un élément formateur supplémentaire, quant à l’entrainement à l’analyse des processus de groupe. e) L’éducateur et les éducateurs stagiaires. L'éducateur a un r̂le particulièrement important dans la formation des stagiaires suivant trois degrés : Le stagiaire cherche à avoir une vue d’ensemble du travail : il s’informe. Il est plutêt spectateur. L’éducateur le met au courant. Le gtagiaire, en possession d’éléments de base, commence à participer. Peu à peu, il est amené à prendre en main des activités fragmentaires du groupe (par exemple : jeux, travaux manuels), sous le contrôle direct de l’éducateur, tout en doublant celui-ci pour l’ensemble de la vie du groupe. Le stagiaire enfin se jette à l’eau : il travaille en couple avec un éducateur dont il remplace effectivement la, ou le collègue (malade ou en congé. par exemple). L’idéal serait de doubler un certain temps la personne qu’on remplacera (1). A ce niveau commence une véritable formation du stagiaire au métier d’éducateur. En pratique, cette progression est parfois limitée aux deux premiers stades si aucun éducateur n’est à remplacer. Parfois aussi, elle n’est pas respectée : par exemple si plusieurs éducateurs tombent malades en même temps, le stagiaire doit bruler les deux premières étapes. L’éducateur sert de lien, entre ce que connait déjà le stagiaire et ce qu’il est appelé à faire. Il est aussi, au début, un lien entre le stagiaire et le groupe. De son attitude dépendra, en partie, la réussite du stagiaire. Aussi doit-il soigneusement adapter son comportement à celui de son nouveau collègue. Tout en maintenant les règles de groupe, il ne doit ni jouer au redresseur de situation, ni prendre une attitude laisser-faire. Toute accentuation trop brusque ou injustifée de son attitude aura des répercussions immédiates sur le comportement du groupe vis-à-vis du stagiaire. Ce processus d’équili¬ bration sera bien plus délicat et sensible que lorsqu’il s’agit de deux éducateurs titulaires. (1) Ce doublage nous semble de plue en plus devoir consister avant tont, à accrocher les enfants autour d’un centre d’intérêt, en conduisant jugqu’à son terme, de facon auto nome, une activité donnée. Le stagiaire, bénéficiant pendant cette période d’un statut défini (moniteur d’activités) à ses propres veux et gurtout aux veux du groupe, prendra plus faci¬ lement la direction de ce dernier car il qura, d’abord, établi de relations positives avec le enfants. 152 MÉTHODES PSYCHOLOGIQUES, PÉDACOCIQUES Si certaines limitations doivent s’imposer au stagiaire (éviter une atti¬ tude trop particulière envers tel enfant, nuancer les contacts avec les parents), l’éducateur doit le traiter comme un éducateur à part entière et surtout aux veux des enfants. Il doit d’abord lui enseigner à conduire le groupe dane son ensemble. Il ne lui demandera que par la suite, et très progressivement, de tenir compte des cas individuels les plus importants, puis de chaque (1) enfant pris isolément. La profondeur de cette initiation dépend, bien entendu. des possibilités du stagiaire face à son travail et de la durée du remplacement effectué. Il est fondamental de mettre le stagiaire en confiance, de ne pas l'infan- tiliser par un interventionnisme excessif, de ne pas le culpabiliser lors des discussions sur son travail. Là aussi, il importe d’abord de détendre la gitua¬ tion dont certains aspects inhabituels (2) peuvent faire naitre de l’anxiété chez lui. Il faut comprendre l’agressivité, latente ou ouverte, qui peut être une façon de réagir à cette anxiété, comme c’est souvent le cas chez la plupart des adultes dans les premiera temps de leur travail dans un centre. L’intengité de ces réactions est proportionnelle à la méconnaissance de la totalité de la situation du Tentre. Il ne faut pas heurter de front les à-priori possibles mais essaver de faire admettre qu’il est d’abord nécessaire de connaitre pour juger. Seule l’expé¬ rience vécue pourra amener à comprendre, sinon à accepter, certains côtés de ce travail. Mais cette expérience ne sera proftable que si elle s’inserit dans le cadre de contrôles auccésifs, A l’échelle du groupe cela ne diffère pas beaucoup de ce qui a été décrit pour l’éducateur et pour le couple-éducateur. La réunion de synthèse doit être complétée par des séances de contrôle pouvant prendre la forme de discussions de groupe de stagiaires, de style plus ou moins directif. et animées par des éducateurs ou par le responsable pédagogique. Chaque stagiaire, à tour de rôle, rend compte de certaines tranches de comportement et de ses réactions avec tel enfant, dans tel groupe (le cas, individuel ou de groupe, le plus dificile auquel il ait eu affaire la semaine précédente, par exemple). Le groupe des stagiaires discute ce matériel (3). Les huts sont gemblables à ceux des éducateurs titulaires, bien que les problèmes ne ge situent pas toujours au même niveau. On parlera plus souvent de conseils éducatifs par exemple. Cette technique de groupe n’exclut nullement la possibilité d’une supervision individuelle 1221 1451. Sans négliger l’apport de conff́rences, exposés, cet aspect de la formation des stagiaires nous paraît le plus important. Il leur permet d’établir un lien plus étroit entre ce qu’on leur a enseigné et ce qu’ils vivent actuellement, d’analyser sur le vif leur travail et leur mode d’action (4) et, par suite. (1) Dans le caa geulement d’une abgence prolongée de l’éducateur remplacé. (2) Et surtout, eortant des cadres et des normes couramment admis en pédagogie. (3) Procédé voigin de la technique « Clinic on the job », employée par A. BAVELAS, et K. LEwIN (puie LmPrr) pour l’entrainement à un leadership démocratique de moniteurs et monitrices de camps d’été, aux Etats-Unis. (9) Nouns avon, 6 maonté conment ce donarches ront croitcmnent lises l pra tique de l’observation. 183 ET SOCLALES EN PSYCHLATRIE INEANTILE d’apprendre de la façon la plus cohérente et la plus économique à conduire un groupe, en profitant pleinement de ce véritable test de gituation que devrait constituer leur stage. Des études de paychologie de groupe ont établi que l’on ne naisgait pas chef, mais qu’on pouvait s’exercer à le devenir dans certaines situations. La démonstration qu’il était possible de modifier ou d’apprendre des attitudes a permis l'’entrainement à l’analyse et au maniement des relations (1), à l’échelle interindividuelle et à celle du groupe. Ces données, parmi bien d’autres, militent en faveur de certaines initiatives en ce qui concerne le perfectionnement et la formation des éducateurs. f) Le perfectionnement des éducateurs. Il n’est pas question de sous-estimer l’apport de formationa parallèles ou complémentaires : services sociaux, établissements divers, prévention, Finésithérapie, rééducation motrice et rééducation scolaire, à plue forte raison tout ce qui concerne la conduite d’activités : poterie, cinéma. Mais le perfectionnement de l’éducateur en tant qu’animateur de groupe nous semble devoir consister avant tout, en un approfondissement continu de la connaissance et du maniement des relations. Sur le plan de P’information. L’éducateur doit tendre à élargir au maximum sa culture technique sur le plan sociologique, psychologique et pédagogique : revues, livres, confé¬ rences, discussions, cours, visites, stages. Sur le plan de la farnation. Le travail quotidien peut être considéré comme formateur dans la mesure où il est soumis, pour l’améliorer, à une constante réfexion critique. Nous pengons qu’il est encore davantage formateur à tous les niveaux où inter¬ viennent les contrôles successifs : individuel, du couple-éducateur, des réunions de synthèse, des réunions de groupe, des réunions pédagogiques. Sans oublier une activité à plus long terme : la recherche sur les aspects divers du travail. Cette formation est complétée, par certains éducateurs, par une participa¬ tion à des stages de techniques de formation proprement dites (2) : — Le paychodrame et le sociodrame sont des techniques de jeu drama¬ (1) En dehore de l’apport propre de la paychanalve, rappelons que la dymnamique de groupe en a intégré certains aapecta. (2) Il serait utile, pour les éducateurs, d’envisager, à l’extérieur, des groupea de diacua¬ sion de cas d’enfants et de groupe d’enfants, comme l’ont déjà organigé, par exemple, des assistantes sociales.