MINISTERE DE LA SANTE PUBLIQUE MONOGRAPHIE DE L’INSTITUT NATIONAL D’HYGIENE N°6 LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES DE L'HOMME ET LES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS LE PRINCIPE DES ANATOXINES ET SES APPLICATIONS ET EN PATICULIER: LA VACCINATION ANTIDIPHTERQUE LA VACCINATION ANTITETANIQUE LES VACCINATIONS ASSOCIEES P A R I S 1 9 5 5 VIRTVTE DVCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEM Par G. RAMON Directeur de Recherches A l'institut national d'Hygiène MINISTERE DE LA SANTE PUBLIQUE MONOGRAPHIE DE L’INSTITUT NATIONAL D’HYGIENE N°6 LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES DE L'HOMME ET LES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS LE PRINCIPE DES ANATOXINES ET SES APPLICATIONS ET EN PATICULIER: LA VACCINATION ANTIDIPHTERQUE LA VACCINATION ANTITETANIQUE LES VACCINATIONS ASSOCIEES P A R I S 1 9 5 5 VIRTVTE DVCE CO MITE FORTITVDINE COLLEGIVM CIVILE AD SANITATEM Par G. RAMON Directeur de Recherches A l'institut national d'Hygiène En hommage. à la mémoire d’Emile ROUX (1853,1933) AVANT-PROPOS Louis Pasteur, le génial Fondateur de la Microbjologie et de l’Immu¬ nologie appliquée, arrivé presque au terme de sa vie scientifique, concluait de l’ensemble de ses recherches concernant la lutte contre les maladies infectieuses animales et humaines «Quand il s’agit d’une maladie infectieuse contagieuse, la bensée se borte tout de suite à l’idée d’un remêde., Au boint de vue de la suérison. il y a deux manières d’aborder les questions : essaver de guépir la mala¬ die quand elle est dévelobbée ou bien la brévenir quand elle n’existe bas encore. l’avoue que jamais je n’ai songé, en bensant une maladie, A lui trouver un remède mais toujours, au contraire, à trouver une méthode caable de la prévenir. » (T). Ainsi s’exprimait Pasteur en 1884. Sans doute, depuis lors, le traitement des maladies a-t-il fait de grands progrès grâce notamment à la sérothérapie, en premier lieu, à la chimio¬ thérapie et à l’antibiothérapie ensuite. Cependant, soit dit en bref, la chimiothérapie et l’antibiothérapie sont limitées dans leurs effets, en particulier par les phénomènes de défense, de « résistance » des germes microbiens pathogènes, comme dans le passé la sérothérapie elle-même avait été réduite, dans son efficacité, par l’agres¬ sivité, le pouvoir toxigène des bactéries en cause, par une intervention mé¬ dicale trop tardive etc.. De plus, la chimiothérapie et l’antibiothérapie n’ont pu être adaptées jusqu’ici, avec un succès indiscutable, au traitement des toxi-infections microbiennes en évolution telles que la diphtérie, le tétanos, etc., ou de la plupart des maladies dont les agents sont des ultravirus, qu’il s’agisse de variole, de rage, de poliomvélite, de fièvre aphteuse, etc... 6 LA LUTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INECTIEUSES Aussi les paroles de Pasteur restent-elles vraies, aujourd’hui comme hier, et le vieil aphorisme: « Mieux vault brevejuir ait’essayer de guérir » garde-t-il toute sa valeur de nos jours. Cette valeur s’est sans cesse affirmée, depuis trois quarts de siècle et surtout depuis ces trente dernières années, par l’emploi des méthodes de vaccination qui non seulement ont pu préserver d’infections redoutables et redoutées les individus et les collectivités, mais encore se sont montrées capables d’assurer la diminution progressive et même l’élimination de certaines maladies épidémiques. DE LTIOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEIN HES VACCINS 6% APPLICATION DE LA VACCINATION ANTITÉTANIQUE AUX POPULATIONS CIVILES A mesure que l’on prenait connaissance des résultats, dans les Armées, de la vaccination antitétanique, celle-ci pénétrait dans la 292% latiox civile où elle est effectuée le plus souvent selon la formule des vac¬ cinations associées. Cette pratique est partout encouragée, principale¬ ment chez l’enfant et chez les individus qui risquent le plus de contrac¬ ter le tétanos: il n’y a aucune raison qu’elle n’aboutisse pas aux mêmes résultats que dans les Armées. A diff́rentes reprises, au cours de ces dix dernières années l’Aca¬ démie Nationale de Médecine de Paris a émis des vœpux en faveur de la vaccination antitétanique de la population civile, notamment celui adopté en 1916 (298) sur la proposition du Pr Lemierre, qui réaffirme expressément l’innocuité et l’efficacité de notre méthode : « Après avoir entendu l’exposé fait par M. Bamon, des magnifiques résultats fournis par la vaccination antitétanique préventive dans les Armées Alliées, au cours de la récente guerre, et vivement préoccupée de la fréquence actuelle du tétanos en France, tétanos souvent consécu¬ tif à des lésions cutanées minimes ou à des traumatismes trop insignifiants pour paraitre justiciables de la sérothérapie antitétanique préventive. l’Académie de Médecine émet le vœu suivant. « Ou’une cambagne active et bersétpéranle soit poursuivie bar les médecins en faveur de la vaccination bréventive systémalique contre le tétanos ex utilisant soit le vaccin trible associé (antitétanique-antidiph¬ térique-antityphoparatypboidique) soit la seule anatoxine tétanique de Ramon, chez les personnes de tous ages, également exposées à contrac¬ ter cette terrible maladie. Que les pouvoirs publics appuient énergiontement les efforts des médecins au moyen d’une large propagande par articles dans la grande presse, tracts, affiches, instructions données dans les écoles, informant les Populations Au danger constant que leur fait courir le tétanos et du procédé certain qu’elles possédent de s’en garantir grâce à la grande découverte francaise due à M. Pamon et, doit l’action bienfaisante vient d’être une fois de plus coufirmée par la vaste et decisite exbénence rali¬ sde dans les Armées alliées. Bien que la loi française sur la vaccination antitétanique obliga¬ toire chez les enfants, en association avec la vaccination antidiphtérique (au moyen du mélange des deux anatoxines tétanique et diphtérique). n’ait guère commencé à être effective qu’à partir de 1946, déjà on cons¬ tate une diminution sensible de la mortalité par tétanos. Il y a peu d’an¬ nées, plus d’un millier de personnes mouraient de tétanos annuellement (200); le tétanos étant en TFrance, faisons-le remarquer, blus meurtrier (298) Bult. Acad, de Médecine, 1946, n° 29-30. (209) 945 en 1943, 1.031 en 1944, 938 en 1945, etc. pincipe actif de la sérosté vaccimale» LES METHODES FONDAMENTALES DE VACCINATION EN MÉDECINE HUMAINE ET EN MÉDECINE VéTÉRINALRE Il existe, à l’heure présente, deux méthodes fondamentales d’immu¬ nisation d’où dérivent la plupart sinon tous les procédés de vaccination actuellement en usage en médecine humaine et en médecine, vétérinaire. L’une, très ancienne, c’est la méthode iennerienne et pastorienne des virus-vaccins. L’autre, relativement récente, repose sur le principe des anatoxines et des vaccins anavirulents. On doit y ajouter une, troisième méthode, celle des « vaccinations associées » de date elle aussi récente dont l’intérêt pratique se révèle de plus en plus important. LA MéTHODE IENNERIENNE ET PASTORIENNE DES VIRUS-VACCINS La méthode jennerienne et pastorienne consiste essentiellement, selon une formule énoncée par Pasteur, « à oxogoquer au moyen d’un virus¬ vaccin, une maladie bénione qui bréseroe d’une maladie mortelle, 2a) abblication de cette loi générale que les maladies virulentes ne péciditent Pas » (2). Les virus-vaccins (3) de Pasteur ont avec le virus-vaccin jennerien ce caractère commun d’être virulents, mais d’une virulence plus ou moins affaiblie. (2) L. Pasteur. Comptes rendus Acad, des Sciences 1880, 91 p. 675. A dire vrai cette loi apparait aujourd’hui beaucoup moins générale et de nombreuses maladies virulentes sont récidivantes, souvent à prève chéanee, notamment, les infections staphylo cocique, streptoçocique, pneumococique, gonococique, les brucelloses, le tétanos l’herpès, la erippe, la fièvre aphteuse, etc (3) Contrairement à ce que l’on croit encore généralement, le terme virus-vaccin a été employé bien avant Pasteur pour caractériser la vaccine de Jenner. C'est ains que Chauveau se sert couramment de ce terme dans ses publications antérieures à 1870 en particulier dans une note à l’Académie des Sciences du 10 février 18, intitulé «Nature du vurus-vaccr. Détermination experimentale des élements qui consttuent le LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES C’était pour lenner la marque du génie d’avoir su appliquer à la vac¬ cination contre la variole, le virus de la vaccine qui est naturellement aténué pour l’homme. Ce fut le génial mérite de Pasteur de réussir à alténuer, cete fois ati¬ ficiellemext, certains microbes « de telle manière — déclarait Pasteur qu’il est possible de trouver parmi les germes atténués d’un même virus celui qui donne la maladie, sans donper la mort ». Et c’est, on doit le rappeler, afin d’honorer lenner, son illustre devan¬ cier que Pasteur emplova les termes vaccin, vacciner, vaccination: « l’ai donné au mot vaccix — a écrit Pasteur — une extension que la Science consacrera, je l’espère, comme un hommage au mérite et aux immenses services rendus par un des plus grands hommes de l’Angleterre; lenner Donc, et il faut insister sur cette notion capitale: pour créer l’état ré¬ fractaire, le virus vivant, plus ou moins atténué dans sa virulence, doit être capable de provoquer une atteinte bénigne de la maladie; il doit selon la doctrine pastorienne, « provoquer la fièvre en même temps que des désordres locaux, de même que le vaccin de lenner entraine le déve¬ loppement d’une pustule et une poussée de fièvre qui dure quelques jours » (Pasteur). L’atténuation artificielle des virus et l’immunité qui résulte de la vac¬ cination à l’aide des virus-vaccins furent obtenues par Pasteur pour la pre¬ mière fois en 1880, en utilisant le microbe du choléra des poules, à la suite d’expériences faites dans les conditions suivantes: une culture en bouil¬ lon de ce microbe, abandonnée à l’étuve à 3% au contact de l’air perd peu à peu son activité pathogène. Au bout d’un certain temps, inoculée à des poules, elle ne les tue plus mais les rend malades, ne leur donnant si la dose est faible qu’une fièvre passagère. Ces poules, une fois rétablies, pouront subir l’inoculation du virus (4) le plus virulent, mortel pour les animaux non vaccinés, elles ne périront pas. Elles ont l’immunité (5). Ces expériences réalisaient à la fois l’atténuation artificielle d’un ger¬ me microbien et la vaccination, bréventive par ce germe qui conserve sa vitalité, sa capacité de multiplication mais qui est atténué dans une mesure plus ou moins grande dans sa virulence et dans ses propriétés pathogènes; la cause de cette atténuation étant, toujours d’après Pasteur, l’action pro¬ longée de l’air, à température convenable, sur le microbe. On peut bien le dire aujourd’hui, alors que le procédé pastorien de vaccination contre le choléra des poules a donné des résultats les plus variables, trop souvent incertains; si Pasteur n’avait eu à son actif que ce procédé de vacination, sa notoriété n’eut jamais atteint en immunologie, au summum, car ce vac¬ cin est, en vérité, de bcaucoup le moins efficace des réalisations pastorien¬ nes en ce domaine. Cependant, l’année suivante, en 188r, une technique d’atténuation analogue mais plus précise et mieux étudiée fut emplovée par Pasteur et (4) A l’époque de Pasteur on utilisait le mot «yrus » pour designer le germe virulent. Le mot « microbe » avait été inventé par Sédillot qui l’emplova, pour la première tois, en 1848 dans une pote à l’Académie de Médecine intitulée « De l’influence des travaux de M. Pasteur sur les progrès de la Chirurie »: néanmoins, on continua pendant long temps encore à utiliser le mot « virus » qui, aujourd’hul, prête à confusion avec le même terme employé dans le sens d’ultravirus. (5) L. Pasteur. Comptes rendus Acad, des Sciences 1880, p1 p. 613. DE LHIOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 2 ses collaborateurs. Chamberland et Roux, pour l’obtention du vixs-vacin contre la fièore charbonneuse du mouton (6). Et ce fut la mémorable expé¬ rience de Pouilly-le-Fort qui apporta la preuve incontestable de l’effica¬ cité de la méthode: 2s moutons vaccinés à l’aide du virus-vaccin charbon¬ neux préparé par Pasteur et ses disciples résistèrent à l’inoculation viru¬ lente qui tua tous les témoins. On doit mentionner que ce virus-vaccin n’avait pas été obtenu à l’aide du procédé habituel d’atténuation mettant en jeu l’influence de la chaleur et de l’air, mais en utilisant des bactéridies développées dans un bouillon additionné de bichromate de potasse (T pour 2.000) et qui, de ce fait, avaient perdu après huit jours, le pouvoir de donner des spores et aussi une partie de leur virulence. La technique de ce nouveau procédé d’atténuation due à Chamberland et Roux, pe fut pu¬ bliée que deux années après l’exṕrience de Pouilly-le-Fort (7); elle avait été passée sous silence et encore maintenant, on ignore généralement ce fait intéressant à plus d’un point de vue. Vers le même temps, Pasteur et Thuillier (8) préparèrent un virus¬ vaccin contre la maladie du borc dénommée « routget » (O). Dans les années qui suivirent, Pasteur. Chamberland et Roux s’atta¬ quèrent au difficile problème de la rage et de son traitement préventif chez l’homme mordu par un animal enragé (T9). Le microbe de la rage était inçonnu. Il était impossible de le cultiver i aitro dans les bouillons nutri¬ tifs alors utilisés pour la culture des germes microbiens. Pasteur et Emile Roux le cultivèrent in vivo, dans le cerveau, dans la moelle épinière du chien, du lapin, auxquels ils inoculaient un peu de matière virulente pro¬ venant d’un animal mort de rage. Ces « cultures » dans la substance ner¬ veuse peuvent être modifiées comme les cultures en bouillon du microbe du choléra des poules ou de la bactéridie charbonneuse En effet, d’après Pasteur, la substance nerveuse rabique, qu’ils’agisse de celle du cerveau ou de la moelle, exposée à l’action de l’oxygène de l’air dans une atmosphère privée d’humidité, se déssèche et perd progres sivement son pouvoir pathogène. Après quatorze jours, les moelles rabi¬ ques sont devenues inoffensives aux doses les plus fortes. Un chien qui reçoit de la moelle de quatorze jours puis, le lendemain, de la moelle de treize jours, et ainsi de suite jusqu’à la moelle d’un jour, ne prend pas la rage, mais il est devenu réfractaire contre elle. Inoculé avec le virus le plus (6) L. Pasteur. Ch. Chamberland et E. Roux, Comptes rexdus 46ad, des Sciences. 21 mars 1881. (7) Ch. Chamberland et E. Roux, Comptes rendus Acad. des Sciences, 1883, 96p. 1088 et 1410. Dans un mémoire publié en 1890 (Ann. Inst. Pasteur, 1890, 4 p.26), E. Roux s’exprime lul-même ainsi : « Ce trapait (celui publié en 1883 dans les comptes rendu de l’Académie des Sciences) est peu connu. (8) L. Pasteur et L. Thuillier. Comptes rendus Acad. des Sciences 1883, 97 p. 1163. (9) Sait-on que le germe dont s’était initialement servi Pasteur pour préparer ce vaccin n’était pas celui du rouget 2 D’après la description qu’en donne Pasteur : « germe en 8 de chiffre, qui, se rapproche de celui du choléra des poules et qui provoque chez l pigeon des symptômes du choléra des poules », il est certain qu’il ne s’agissait pas du fin bacille du rouget mais du microbe que l’on rencontre dans la septicémie du pore et auquel on a donné précisément le nom de « pasteurella ». C’est le microbjologistt alemand Loeffler qul, un peu plus tard, identifia le véritable « bacille du rouget» et le diff́rencia de la bactérie ovoide ou « pasteurella » agent de la septicémie (10) L. Pasteur. Ch. Chamberland et E. Roux. Comptes rendus Acad, des sciences 1885, 68 p.457 et p. 1220; 1885, 101 p.705. 10 LA LUTTE PRÉVENTIVE CONIRE LES MALADIES INFECTIEUSES fort, dit Pasteur, il reste bien portant. Il est donc possible de donner en quinze jours l’immunité à un animal contre la rage. Or les individus mor¬ dus par des chiens enragés ne prennent d’ordinaire la rage que trois ou quatre semaines et même davantage après la morsure. Le temps de l’incu¬ bation pourrait donc être utilisé à rendre réfractaire la personne mordue. Telle est l’idée qui a guidé Pasteur vers sa méthode de tralitement de la rage après morsure. L’expérience faite sur des chiens mordus ou inoculés réus¬ sit au delà de toute espérance et après des hésitations bien compréhensi¬ bles, Pasteur, encouragé par les Maitres de la médecine d’alors. Vulpian. Grancher, etc, se décida à tenter l’essai, cette fois chez l’homme, chez le jeune écolier Meister cruellement mordu au retour de l’école par un chien atteint de rage furieuse. On connait le succès retentissant de cette tentative. Il faut faire remarquer ici qu’ainsi que Pasteur cu avait émis l’idée quelque temps après avoir réussi à obtenir le virus-vaccin de la rage, il n’y a pas, dans celui-ci, atténuation véritable de la virulepce intrinsèque du virus comme dans le virus-vaccin du charbon, il n’y a pas appauvrisse¬ ment en qualité du virus, mais appauvrissement en quantité. A la lumière de nos connaissances présentes, on peut dire que dans la technique de Pas¬ teur, une partie des éléments du virus rabiqué est transformée en éléments « inactivés » avirulents avant conservé leur pouvoir antigène et immuni¬ sant. On doit penser que ce sont ces éléments de virus, inactivés, consti¬ tuant en grande majorité sinon en totalité les premiètes doses de moelles très atténuées, qui dans le procédé de vaccination antirabique confèrent l’immunité, celle-ci étant accrue par les iniections successives de moelles de moins en moins atténuées. On conçoit combien ces considérations sont importantes des points de vue dogmatique et pratique, elles nous rappro¬ chent du vaccin phéniqué de Fermi, de l’anavirus rabique obtenu grâce au formol, etc.., actuellement utilisés dans la vaccination contre la rage des animaux domestiques (T1). La méthode d’immunisation de Pasteur basée sur l’emploi de micro¬ bes avant conservé leur vitalité plus ou moins entière et qui sont artificiel¬ lement atténués dans leur virulence ne fut guère utilisée du vivant de son inventeur que pour la prévention, chez les animaux du choléra des pou¬ les, de la maladie charbonneuse du mouton, du rouget du porc et pour le traitement de la rage après morsure chez l’homme, au moyen des virus¬ vaccins spécifiques que nous venons d’examiner. Dans la suite, mais au bout d’un temps parfois assez long, en partant des principes jennerien et pastorien d’immunisation à l’aide des virus-vac¬ cins, différents procédés de vaccination ont été institués pour préserver l’espèce humaine et les espèces animales des diverses maladies infectieuses et épidémiques. C’est ainsi que contre le typhus exanthématique, par exemple, et en conséquence des travaux de Charles Nicolle et de ses collaborateurs Blanc et Laigret, etc..., des formules variées de vaccin ont été établies, en utili¬ (11) On trouvera une étude complète de ces question dans deux mémoires récents: G. Ramon, Revue d'Immunolohie, 1954, 18 n° 5-6, p.305 et 1955, 19 n°1-2, p.1; Bull. Off. internat. des Epizooties, 1954, 41, n°11-12 p. 971 et 1011. 1 DE L’HIOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS sant le virus du typhus du rat naturellement atténué pour l’homme, mais dont l’atténuation à encore été accrue par des artifices divers. Contre la fièvre jaune, des vacins de plusieurs sortes ont été pré parés à l’aide du virus amaril vivant (Sayyer, Findlay, Pettit et Stefano¬ poulo. Sellards. Laigret etc...). Actuellement la vaccination contre la fièvre jaune est pratiquée en scarification, avec le virus-vaccin anti-amaril seul ou avec ce virus-vaccin associé au virus-vaccin antivariolique. — Grâce aux recherches d’Oten, d’une part, de Girard et Robic. d’autre part, on a pu employer aux Indes Néerlandaises et à Madagascar, pour protéger contre la beste les populations de ces contrées, un bacille pesteux naturellement atténué pour l’homme. Pour la prémunition de la tyberculose humaine, on met en œuvre le bacille-vacin de Calmette et Guérin (B.cC.), bacille tuberculeux vivant. d’origine bovine, dont la virulence originelle a été très affaiblie, du fait de très nombreux passages sur des milieux de culture additionnés de bile. — Contre la tuberculose encore, humaine et bovine, des essais ont été entrepris, au cours de ces dernières années en Angleterre notamment, à l’aide d’un bacille de Koch naturellement atf́nué, celui du campagnol; le «vole bacillus ». Pour la brobhylaxie de diverses mnaladies infectieuses des animaux on utilise également des virus-vaccins constitués par des germes vivants plus ou moins attenués dans leur virulence, par exemple. — Contre le charbon symAtomatiqute, des germes virulents ou podi fiés par des artifices variés: — Contre le rouget du porc, des bacilles atténués, selon la technique pastorienne, ou virulents employés simultanément avec le sérum anti-rouget (séro-vaccination). — Contre les brucelloses animales, des bacilles encore nettement pa¬ thogènes ou bien presque totalement avirulents (souche r9). Contre la béribneumonie des bouidés, le microbe spécifique prove¬ nant du poumon d’un animal infecté ou d’une cuture i7 vitro: — Contre la beste bovine, l’ultravirus responsable de cette maladie atténué par passages chez la chèvre (virus « caprinisé ») ou chez les lapins (virus « lapinisé ») ou par culture dans l’embrvon de poulet (virus « avianisé »): — Contre la peste borcine, l’ultravirus virulent inoculé sous le cou¬ vert du virus antisuipestique (séro-vaccination):. Contre les estes aviaires (peste proprement dite maladie de New¬ castle), les ultravirus spécifiques obtenus à partir des tissus d’ani¬ mal infecté, ou cultivés dans l’œuf « embryonné » Contre la clavelée, le « claveau » lui-même (la clavelisation était utilisée dès le XVIII" siècle, sans doute par analogie avec la vario lisation) ou bien de véritables virus-vaccins préparés à l’aide de virus «atténués"» par de nombreux passages sur le mouton ou sur la cacvre; 12 LA LUTTE PŔVENTNVE CONTRE LES MALADES INFECTIEUSES — Contre la rage du chien on a proposé dernièrement un nouveau virus-vaccin du type pastorien. Il s’agit d’un virus rabique (sou¬ che « Flury » du nom de la personne morte de rage, chez laquelle elle a été isolée) atténué dans sa virulence par des passages plus ou moins nombreux dans l’embrvon de poulet. Il est une autre catégorie de procédés de vaccination qui se ratta¬ chent, eux aussi, quoique indirectement, à la méthode pastorienne. Ainsi que cette dernière, de tels procédés comportent l’usage comme vaccins, de microbes, mais ceux-ci sont privés de leur vitalité, le plus souvent par l’ac¬ tion de la chaleur s’exercant à un degré plus ou moins élevé. Ils n’en con¬ servent pas moins certaines de leurs propriétés pathogènes dues principale¬ ment à des poisons microbiens (endotoxines) et capables, comme nous l’avons montré avec A. Boivin (12), de passer dans le liquide tenant en suspension les germes tués. Le type de ces vaccins est le vaccin antitypho¬ paratyphoidique. Rappelons dès maintenant, à ce propos, que Chamber¬ land et Roux (disciples de Pasteur) avaient réussi, pour la première fois en 1887, à immuniser des cobaves avec des germes microbiens tués par la chaleur. Il s’agissait du vibrion septique, mais, ainsi que le signalait Roux en r8or, lorsque les cultures chauffées sopt iniectées à doses trop fortes. elles provoquent chez les animaux des symptômes analogues à ceux obser¬ vés dans la maladie. Cependant les brocédés de vaccination basés sur la méthode jenne¬ rienxe ét bastorienne ne sont pas sans inconvénients. Pasteur, après avoir établi sa méthode des virus-vaccins, devait en constater lui-même les impertections. C’est ainsi qu’après avoir soutenu qu’il est impossible de faire revenir à sa virulence originelle, la bactéridie charbonneuse atténuée par son pro¬ cédé, il dut reconnaitre, sous la pression des faits, que les virus-vaccins dont la virulence a été non point abolie mais seulement réduite, ne sont point fixes dans leurs propriétés et que celles-ci peuvent se trouver modi¬ fiées dans certaines conditions. Dès l’entrée dans la pratique de la méthode pastorienne de vaccination charbonneuse, il était observé qu’un vaccin inoffensif pour le mouton peut amener de graves désordres chez le cheval. chez la chèvre, Il apparut bientôt que le même virus-vaccin charbonneux qui fait, preuve d’innocuité chez la plupart des animaux est susceptible de provoquer des troubles spécifiques chez quelques-uns d’entre eux qui sont en état de moindre résistance. Il fut également prouvé que le virus-vaccin du rouget, qui est inoffensif pour les jeunes porcs, peut causer une assez forte mortalité chez les adultes. Dans une note présentée devant la Société Centrale de Médecine Vété¬ rinaire de Paris (aujourd’hui l’Académie Vétérinaire), Pasteur déclarait dès 1882, c’est-à-dire un an à peine après la découverte du vaccin contre le charbon, que les virus, au lieu d’être comme on le subbosait autrefoN (2) G. Ramon, A. Boivin et Collab. BuI. Acad, de Médecine 1941, 125 p. 26. DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 13 quelque chose de fixe et d’immuable, des enfilés, sont au coniraire quet¬ que chose de variable se modifiant sous l’action du tembs, des circons¬ tances climatiques, etc.. (13). Et, tout le premier, il précisa que l’on peut obtenir le retour à la viru¬ lence originelle du virus-vaccin charbonneux, en l’inoculant successive¬ ment à des cobaves de plus en plus agés, en commencant par des nouveau¬ nés d’un jour. Il indiqua que le virus-vaccin du choléra des poules peut. lui aussi, faire retour à sa virulence première par des passages répétés sul des serins, des moineaux. Soit dit en passant, il y a là une contradic¬ tion tout au moins apparente avec les faits mis en évidence au cours de ces dernières années, c’est-à-dire l’atténuation de la virulence de certains virus, par exemple celui de la peste bovine, atténués par des passages chez les animaux, passages qui ont conduit à l’obtention des virus-vaccins caprinisés, lapinisés, etc... Nocard et Roux (14), après avoir rappelé qu’il est possible de rendre au virus-vaccin charbonneux sa virulence primitive en le faisant passer à travers des corps d’animaux de plus en plus résistants, montrèrent la pos¬ sibilité de faire récupérer au virus-vaccin du charbon symptomatique (Arloing. Cornevin et Thomas) toute sa virulence, en metant ce vaccin quelques heures au contact de l’acide lactique avant de l’inoculer. Enfin. Pasteur déclara, plus tard, que le vaccin du charbon reprend sa virulence lorsque, accidentellement, il amène la mort d’un mouton (T5). Rendu circonspect par les constatations faites à l’occasion de l’emploi comme vaccins, dans la pratique, des virus atténués du choléra des poules. du charbon, du rouget, etc... Pasteur redoubla de précaution lorsqu’il se décida à tenter l’application du virus-vaccin de la rage au traitement anti¬ rabique de l’homme, après morsure par un chien enragé. Il procéda avec une extrème prudence et fit pratiquer, chez les sujets mordus, une quin¬ zaine d’inoculations successives, parfois davantage, de moelles rabiques de moins en moins atténuées dans leur virulence. C’est à ce prix qu’abrès une alerte assez vive au début, des accidents graves purent être évités dans la suite, en France du moins, car dans d’autres pays, on a enregistré et on enregistre encore parfois, des troubles morbides provoqués par le virus¬ vaccin de la rage, depuis les paralysies, jusqu’à ces cas pour lesquels Rem¬ linger reprend les tetmes de « rage de laboratoire » (Peter), cès troubles étant moins exceptionnellement observés lors de la mise en œuvre de tech¬ niques qui s’écartent de la technique pastorienne primitive, notamment celle dite des « dilutions » d’Hoegyes. Ces modifications artificielles ou naturelles « spontanées » des virus¬ vaccins pastoriens qui se traduisent, dans certains cas, par un accroisse¬ ment de leur pouvoir pathogène, peuvent se manifester également par un affaiblissement exagéré de cette virulence, d’où une diminution concomi¬ tante de leur activité immunisante « si bien que, dans ce cas, le vaccin ne constitue plus — disait Pasteur en parlant de son virus-vaccin charbon¬ (13) L. Pasteur. BuIt, de la Soc. Centrule de Méd. Vétérinaire, 1882, 8 p. 197. (14) Ed. Nocard et E. Roux. Annales Inst. Pasteur, 1887, 1 p. 257. (15, L. Pasteur. « Lettre à Duclaux ». Annales Inst. Pasteur, 1887, 1 p. 1. 14 LA LUTTE PŔVENTIVE CONTRE LES MALADILS INFECTIEUSES neux — un préservatif suffisant et que l’on voit la maladie continuer à faire ses ravages comme si les animaux n’avaient pas été vaccinés ». Le vaccin de lenner, lui non plus n’est pas exempt d’un accroisse ment de sa virulence originelle. On ignore, en général, que lenner avait prévu cet accroissement. Il était, disait-il, « tourmenté à l’idée que son virus de la vaccine pouvait augmenter de force de vacciné en vacciné ». D’un autre côté, suivant les ipdividus, suivant les races, il peut exister des différences de sensibilité à la vaccine. Le renforcement de la virulence de la vaccine, les différences individuelles ou raciales de sensibilité à ce virus apparaissent sous des formes variables, tantôt des éruptions vaccinales excessives, parfois généralisées et, exceptionnellement, des encéphalites. Il y a, depuis quelques années, une recrudescence inquiétante des compli¬ cations de la vaccination iennerienne et tout spécialement de l’encéphalite post-vaccinale (16). En Europe, ce sont, en général, les populations nordi¬ ques qui paient à celle-ci un assez lourd tribut. En Hollande, notamment. on a énrégistré à certaines époques jusqu’à un cas d’encéphalite sur 700 vaccinés. Par contre, les pays latins, de même que l’Afriqué du Nord, sont à peu près épargnés. Des remarques ainsi présentées, il ressort en résuḿque les virus-vac¬ cins pastorien et jennerien sont susceptibles de subir des variations qui peu¬ vent en modifier profondément les effets. La limite, la marge de sécurité entre, d’une part, le virus-vaccin qui, selon Pasteur «donne la maladie bénigne et confère l’état réfractaire» et, d’autre part, celui qui est capable de déterminer des troubles sérieux, peuvent être vite franchies dans des conditions très diverses qui échappent le plus souvent à l’expérimentateur comme au praticien. Et il a fallu à Pasteur, comme jadis à Jenner, tout son génie pour vaincre toutes les difficultés qui se sont présentées dès la découverte des différents virus-vaccins et dès leurs premières applications à la lutte contre les maladies infectieuses correspondantes: il lui a fallu son étonnante pers¬ picacité pour discerner les conséquences possibles de ses audacieuses tenta¬ tives, sa force persuasive pour répondre avec l’aide précieuse d’éloquents adeptes de sa doctrine, tel le vétérinaire Henry Bouley, aux critiques et aux objections dont quelques-unes conservent leur valeur de nos jours en¬ core. Il lui a fallu toute sa volonté, toute sa ténacité pour imposer finale¬ ment sa méthode immunologique d’abord appliquée aux vaccinations con¬ tre le choléra des poules, la fièvre charbonneuse du mouton, le rouget du porc, puis, plus tard, au traitement préventif de la rage après morso Les divers procédés de vaccination- établis plus ou moins longtemps après Pasteur, qui reposent directement ou indirectement sur les mêmes principes que les méthodes jennerienne et pastorienne et qui mettent en jeu des microbes vivants naturellement ou artificiellement atténués, participent des mêmes avantages et des mêmnes défectuosités que les virus-vaccins pas¬ toriens proprement dits. S’ils offrent des qualités indéniables, s’ils permet¬ tent dans certains cas, la vaccination à dose unique et réduite, s’ils sont (16) G. Ramon. R. Richou et -P. Thery. La Prese Meicdle, 1948, 57 p. 245 13 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS capables de conférer une immunité de durée relativement longue, de tels vaccins peuvent également présenter de sérieux inconvénients inhérents à tous les vaccins constitués par des germes vivants. Par exemple, la souche naturellement atténuée par passages chez la chèvre du virus de la beste bouine et dont on se sert aux Indes, semble-t-il sans incidents notables et avec succès, pour protéger le bétail contre cette maladie, a provoqué en 1947 chez les bovidés d’Egypte, vierges de toute immunité basale, l’éclosion d’une véritable épizootie de peste boyine. Ur virus-vaccin du même genre utilisé au Kenva a entrainé en 1948-1040, une forte mortalité aussi bien chez les animaux vaccinés que chez ceux que ces derniers ont contaminés dans la suite. Des milliers d’animaux ont ainst péri, en conséquence de cet accident de vaccination. Les mêmes inconvénients resultent de la clavelisation ou de l’emplol contre la clavelée de virus plus ou moins atténués par des passages sur le mouton ou sur d’autres animaux. Le claveau ou les virus-vaccins claveleux rendent contagieux les moutons ainsi vaccinés au même titre que ceux qul sont atteints de la maladie naturelle. Les virus-vaccins vivants contre les bestes quiaires sont également susceptibles de provoquer la maladie qu’ils sont censés devoir combatre et peuvent ainsi la communiquer aux oiseaux réceptifs avec lesquels ils sont mis en contact. Il en est de même des virus-vacins contre la peste orcine, contre la maladie de Carré, lesquels ont, à diverses reprises, provoqué des accidents entrainant une mortalité plus ou moins forte. En 1953, on a vaciné en France contre la myxomatose du lapin au moyen d’un virus-vaccin préparé avec le virus de la fibromatose. Dans certains cas, ce virus-vaccin a entrainé, chez les lapins, des lésions de fibromatose au voisinage du point d’inoculation et même de fibro¬ matose généralisée sans, d’ailleurs, se montrer particulièrement actif à l’égard de la myxomatose (17). Bien d’autres exemples pourraient être cités des méfaits que sont sus¬ ceptibles de causer les virus-vaccins. Ceux que nous venons de donner suf fisent à montrer que ces virus-vaccips dont les germes qui les constituent atténués ou non dans leur virulence, sont vivants, risquent non seulement d’occasionner des troubles mais encore en créant des porteurs de germes peuvent faire éclater de nouveaux fovers et propager la maladie au lieu d’en assurer la prophylaxie. Et en confirmation de ce qui précède, n’va-t-il pas lieu de reproduire cette phrase de Pasteur qui, en l’occurrence, est significative : « Tous les vrirus aiténues, même lès plus faibles, beuuent très facilement, Par ui artifice bhysiologique, recouurer leur virulence maximum brimitive, ce qui, mieux combris, rendra combte un jour des exacerbations comme des éhutes des grandes ébidémies et de l’abparition de celles que l'’on crolt tort spontanées (18). (17) Voir à ce propos G. Ramon, Bull. Acad. de Médecine, 1954, 138, P.92 (18) L. Pasteur. "Des virus-vaccins". communication faite au Congrès International de Médecine de Londres: transactions of the international Medical Congress London, 1881, 1 p.85 et Revue Scientifique 1881, 8 P. 225 16 LA LUTTE PŔVENTIYE CONTRE LES MALADIES INEECTIEUSES A vrai dire, l’innocuité des pins-paccins « uiganis » est toute relalive et l’on doit se souvenir en médecine humaine surtout, mais également en médecine vétérinaire de ce qu’écrivait, il y a longtemps, le très éminent microbjologiste d’origine suisse. Alexandre Versin oui, après avoir été le collaborateur d’Emile Roux et son associé dans la découverte de la toxine diphtérique au laboratoire de Pasteur fut, durant cinquante années. le pionnier de la civilisation en Extrême-Orient et qui avabt mis en évi¬ dence l’agent microbien de la peste humaine, avait tenté puis abandonné la vaccination de l’homme contre cette maladie, à l’aide d’un bacille pesteux vivant. « Il est toujours grave, affirmait Versin, d’inoculer A l’homme un germe uipant qui, quelque atténué soit-il, pourrait beut-être causer des accidents Aussi l’abblcation de celfe miéthode ne deura être faite au’avec la blus grande brudence, en s’entourant de toutes les garanties bossibles p (19). Si cette prudence a été observée par la plupart sinon par l’unanimité des expérimentateurs qui ont cherché à établir de nouveaux procédés d’im¬ munisation applicables à l’homme, elle n’a pas toujours été de règle, en ce qui concerne en particulier les vaccinations chez les animaux et chez ceux¬ ci, les suites de telles « imprudences » ne sont négligeables ni du point de vue économique, ni d’autres points de vue. Il faut se rappeler, à ce sujet, les tentatives de « bovo-vaccination » ou « jennerisation » de Behring contre la tuberculose bovine, au moyen de bacilles tuberculeux humains vivants, de virulence réduite, celles aussi du même genre de Robert Koch et Schutz avec le « Tauruman ». Les dangers qu’offraient de tels procédés qui, heureusement, n’ont guère vu le jour dans la pratique bien qu’ils fussent préconisés par de grands savants, ces dangers, dis-ie, s’étendaient à l’homme lui-même, les animaux ainsi trai¬ tés pouvant êtré excréteurs, dans le lait notamment, de bacilles tubercu¬ leux humains. Comme l’a écrit Albert Calmette. . LA gxapité des incon¬ vénients de telles tentatives imbosaient les blus exbresses réserves ». En principe, pour conférer l’immunité, les vaccins préparés, dans la suite des temps, selon la méthode iennerieme et pastorienne doivent, comme les virus-vaccins pastoriens initiaux, posséder à l’origine et garder dans la suite un certain degré de virulence : ils doivent être capa¬ bles de provoquer une atteinte légère de la maladie correspondante ou d’une maladie voisine (vaccine-variole), atteinte qui, selon la conception de Pasteur, adoptée par les auteurs des procédés en question, est la condi¬ tion sixe a7a xou de l’apparition et du développement de l’état réfractaire. Or le degré de virulence de ces voccins pe doit pas être trop élevé, sous peine de voir le vaccin engendrer non pas seulement l’ébauche de la mala¬ die mais la maladie elle-même avec toutes ses conséquences, Il ne doit pas être trop faible non plus, car alors le vaccin devient moins apte, sinon inapte, à instaurer l’immunité. La détexmination de l’oblimum de virulence des virus-gaccius s’agrèra en fait difficile, elle est soumise à de pombreux aléas Elle ne peut être effectuée que chez l’animal d’expériences mais peut-on conclure de cet (19) EN 1907, String utilisa aux Philippines, un vaccin antipesteux vivant, soit-disant avirulent, mais ne put poursuivre ce travail à cause des inconvénients pratiques d'un tel vaccin (The Lancet, 1949, 6422, p. 462) DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 17 animal à l’homme ou à d’autres espèces animales qu’il s’agit de vacciner dans la pratique courante" Un exemple illustrera les difficultés que l’on peut rençontrer dans la détermination de l’optimnum de virulence. Nous avons indiqué qu’il avait été proposé récemment, par KODrOwski, une for¬ mule nouvelle de virus-vaccin destiné à la prévention de la rage chez le chien. Ce virus-vaccin est obtenu à partir d’une souche de virus rabique d origine humaine (souche Flury) qui a été atf́nué par des passages répétés sur des embrvons de poulet. D’après KOprowski, les souris adultes, de même que les lapins et les chiens, sont résistantes au virus-vaccin Flury (20)., Par contre, les singes Rhésus sont très sensibles. C’est sans doute en raison de cete variabilité dans son pouvoir pathogène et de son innocuité relative que le virus-vaccin Flury n’a pas été retenu jusqu’ici pour le trai¬ tement antirabique de l’homme après morsure et due son emploi a été réservé à la vaccination préventive du chien encore que dans certains pays, par exemple en Autriche, ce vaccin n’est pas utilisé même chez le chien. L’oblimam de virulence des virus-vaccins une fois obtenu, il faut le maintenir non seulement dans la « souche » qui servira ultérieurement à la production des lots de vaccin, mais également dans ces lots eux-mêmes pendant le temps de leur mise en circulation et avant leur emploi. Or on n’ignore pas que les vaccins « vivants » ont, en règle générale, une durée de conservation très courte qui n’excède guèreune ou deux semaines, plus courte encore lorsqu’ils doivent être emplovés dans les pays tropicaux et ils deviennent inopérants, dès que les germes qui les composent ont perdu leur capacité de reproduction (2r). D’un autre côté, il est dificile de bréserver les virus-vaccins vivants des souillures éventuelles par d’autres germes microbiens (virus ou bacté ries), en faisant usage, par exemple, d’antiseptiques, car ceux-ci risque¬ raient d’altérer les qualités vitales de ces vaccins et par conséquent com¬ prometraient gravement leur efficacité. A ces multiples problèmes en vérité peu commodes à résoudre que posent la préparation, la conservation et l’emploi de cette sorte de vaccins. s’ajoute la difficulté du contrôle de l’immunité qu’ils peuvent procurer c est-à-dire du contrôle de leur efficacité. Déterminer au laboratoire avant usage, le pouvoir immunisant des lots de virus-vaccins n’est guère possible puisque nous venons de le préciser, ces vaccins constitués par des éléments « vivants » n’ont qu’une durée éphémère de conservation qui ne laisse pas le temps d’une telle détermination. Devant la difficulté et même l’impossibilité de connaitre d’avance le degré d’immunité qui peut être conféré par les virus-vaccins, seule dans la majorité des cas, l’épidémiologie peut pous renseigner quant à l’efficacité de ces derniers, mais après un délai beaucoup trop long pour remédier au défaut d’activité des lots de vaccins depuis longtemps utilisés (20) Voir à ce sujet notre étude sur les moyens de lutte contre la rage : Bult OH1. internat, des Episooties 1954. 41 n° 1-12 p. 10i1. (21) Durant ces dernières années, des esais de conservation de ces vacins ont ett faits en mettant en œuvre la dessiccation par congélation dans le vide (lyophilisation) Cependant, pour certains vaccins, en particulier pour ceux destinés à l’usage vétérinaire. LA LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INECTEUSES 18 Nous dirons pour conclure que, lors de la Prébaration et de l’utilisa¬ dion des tirus-vaccins c’est-a-dire des uaccins constitués par des germes Uioants, interviennent sans cesse des Dhénomènes qui beuvent en faire varier les caractères et les effets, bhénomènes que l’homme de science. quelle que soit la buissance de son génie, ne beut brévoir et dont il ne saurait se rendre toujours et tolalement maitre. Bien que, dans la lutte contre diverses affections microbiennes, les procédés de vaccination dérivant des méthodes iennerienne et pastorienne aient en général rendu, dans le passé, des services inestimables pour certains d’entre eux, il a toujours semblé désirable de les perfectionner dans le double sens d’une réduction de leurs inconvénients et d’une aug mentation de leur efficacité, il a toujours paru non moins désiravle de les compléter par la création de pouveaux principes d’immunisation et de nouveaux vaccins. Les procédés de vaccination issus des méthodes jennerienne et pas¬ torienne he concernent, en effet, qu’un petit nombre de maladies parmi tant d’autres dont il importe de chercher à préserver l’homme et les ani¬ maux domestiques. Ils se sont révélés inapplicables à la prévention de¬ toxi-infections meurtrières telles que la diphtérie, le tétanos, le botulisme. les gangrènes gazeuses etc., ou d’affections épidémiques provoquées par des ultravirus, notamment la fièvre aphteuse dés bovidés, la méningo¬ encéphalomvélite des équidés, la grippe chez l’homme, etc. Si bien des tentatives avaient été faites dans le passé pour immupiser, par exemple. l’homme contre la diphtérie au moyen soit de bacilles diphtériques vivants. de faible virulence, soit des mélanges de toxine et d’antitoxine (de Bebring et de William Park), contre le tétanos à l’aide de la toxine modifiée par l’iode, ces tentatives n’avaient abouti qu’à des résultats d’un intérêt pra¬ tique très limité, sinon tout à fait nul. D’ailleurs, pas plus qu’aucune autre méthode biologique, la méthode pastorienne n’est immuable et définitive et la voie qu’elle a inaugurée demeure largement ouverte à la découverte et au progrès. Le progrès n’est¬ il pas, en vérité, le but essentiel de la recherche scientifique» Et Pasteur lui-même n’a-t-il pas constamment appelé de toutes ses forces, puis de tous ses vœeux, le progrès: Se rendant, en effet, parfaitement compte des défauts de ses virus¬ vaccins, Pasteur et, après lui, ses disciples, s’efforçaient d’obtenir ce qu’ils dénommaient les « vaccins chimiques » constitués par des « substances solubles ». C’est ainsi que E. Roux et Ch. Chamberland annonçaient, dans un mémoire publié en 1887 (22), qu’ils avaient réussi à immuniser des co¬ baves contre la septicémie causée par le vibrion septique, avec des subs¬ tances solubles, en l’espèce, indiquent-ils, des cultures chauffées à roo ou 1107 ou bien des cultures filtrées sur bougies de porcelaine. Dans ce mé moire. Roux et Chamberland s’exprimaient ainsi : « On conçoit quelle clarté serait jetée sur la cause de l’immunité, s’il était bossible de rendre (22) E. Bo et Ch Cchamperand, Amdles mt Psatr, 1, 1 p. c61. anatoxines et des vaccins anavirulents. DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 12 an animal réfractaire à une maladie virulente bay la simble introduction, dans son organisme, de substances chimiques, en l’absence de tout virus oivant». Cependant, le vaccin mis en évidence par les travaux de Boux et Chamberland ne pouvait guère être emplové dans la pratique, car il était susceptible de renfermer des produits toxiques (endo ou exotoxines). En 189T, Roux écrivait sur ce sulet : « Lorsade les culures chauffes ou fil trées sont iniectées à doses trob fortes, ellés brovoquent chez les animaux. des symbtômes tout à lait semblables à ceux que l’on observe dans la ma¬ ladie» (23). Pour rendre utilisables les « substances colubles » il fallait leur enle¬ ver entièrement leur pouvoir pathogène tout en leur conservant leurs pro¬ priétés immunisantes. Cela ne devait être pleinement réalisé que trente¬ cinq années après les expériences de Roux et Chamberland. En commentant avec sa flamme habituelle, devant l’Academie des Sciences (24), le travail de ses collaborateurs, Pasteur signalait que le pre¬ mier parmi les expérimentateurs qui se sont ocupés de cette question, il avait cherché à produire l’immunisation contre le choléra chez les poules au moyen de produits solubles formés dans le bouillon: i/ fit aP24¬ raître les signes de la maladie mais non l’immunité. Et Pasteur ajoutait, à son tour, que la d́couverte de ces substances chimiques solubles, dosables et vaccinales, constituerait un brogrés de bremier ordre et donnerait à la microbjologie les plus fécondes applications thérapeutiques. Ainsi devait-il en être de la découverte de l’anatoxine diphtérique. découverte qui allait introduire et instaurer en immunologie le Brincibe des (23) E. Roux,. Annales Inst, Pasteur, 1891, 5 p. 518. (24) L. Pesteur Compies rots 44 des Seiguce, la, 196 p 50 LA MÉTHODE BASEE SUR LE PRINCIPE DES ANATOXINES ET DES VACCINS ANAVIRULENTS J. — LE PRINCIPE DES ANATOXINES, SA DÉCOUYERTE Le ro décembre 1923, dans une note présentée en notre nom à l’Aca¬ démie des Sciences (25) par Emile Boux, le plus éminent des disciples de Pasteur, devenu directeur de l’Institut Pasteur, nous annoncions que la toxine diphtérique qui, sous l’influence, par exemple, du formol et de la chaleur, à perdu complêtement sa nocivité mais qui, par contre, a con¬ servé intégralement son abtitude à floculer en brésence de l’antitoxine sbé cifique, est capable de provoquer, chez l'animal d'expériences, l'appa- rition et le dévelobbement de l’immunité. C’est à cette toxine ainsi transformée et possédant des propriétés ca¬ ractéristiques : innocuité totale, Bouvoir floculant et Bouvoir immunisant qu’était donné le nom d’anatoxine, nom choisi d’accord avec Emile Roux lui-même. Dans cette même note, après avoir donné, à l'appui de nos affirma- tions, quelques résultats expérimentaux, nous précisions : « De frès nom¬ breux essais comparatifs de floculation in vitro et d’immunisation in vivo (chez le cobave en baxticuliex) nous ont Bermis de constater qu’une ana¬ foxine se montre d’autant blus immunisante qu’elle flocule en brésence d’une plus grande auaxtilé d’anfifoxine et Dhs rabidement: l’activité floculante beut donc servir a mesurer le bouvoir immunisant ». Nous concluions : l’anatoxine trouve naturellement son emblboi dans l’immunisation et l’hybeximmunisation des animiaux" de blus, grâce a son innocutité (vérifiée en premier lieu sur nous-même) et au degré très éleve d’immunité qu’elle est cabable de conférer, elle est également indiquée bour la vaccination antidibhtérique de l’entant. Toujours dans cette même communication du ro décembre 1923, nous mentionnions que: des expériences encore en cours nous permetent d’affirmer dès maintenant que ce que nous venons de dire de la toxine diphtérique est applicable avec quelques modifications de détail à d’autres toxines, la toxine tétanique notamment. Dans une autre note également présentée par Emile Boux à l’Acadé¬ mie des Sciences, le 22 avril 1924 (26), nous montrions qu’en dehors des toxines microbiennes telles que la toxine diphtérique, la toxine tétanique etc..., des toxines végétales comme l’abrine, la ricine, des boisons d’or¬ (*) On trouvera de plus amples renseignements et une documentation plus abon- dante dans notre ouvraage: le principe des anatoxines et ses applications. Massin et Cie. éditeurs, paris, 1950. (25) "Sur le pouvoir floculant et sur les propriétés immunisantes d'une toxine diphtérique rendue anatoxique (anatoxine)" note de Gaston Ramon, présentée par Emile Roux - Comptes rendus Acad. des Sciences, séance du 10 décembre 1923, 177 p. 1338. (26) G. Ramon " des anatoxines" Comptes rendus Acad. des Sciences, 1924 178, p. 1426. Voir également Annales Inst. Pasteur, 1925, 39 p.1 LA UTE PREVENIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES 22 gixe azimale comme les venins, peuvent être convertis en anatoxines, en auavenins, également grâce au formol et à la chaleur agissant dans des conditions bien déterminées et nous aboutissions aux conclusions sui vantes. Les toxines microbiennes, les toxalbumines uégétales, les uenins cons tituent le groube très imbortant des antigènes toxiques dont brécisément la toxicité est toujours un obstacle, lorsqu’il s’agit de s’en servir bour confé rer l’immunité. Les résultats concordants obtenus dans chacune de ces calégories, soit que la toxine dibhtérique, soit quec l’abrine, soit quec le denin de cobra, montrent la possibilité, de transformer les antigènes toxi¬ ques ex antigènes inoffensifs, en « anatoxines », ce qui facilite grande¬ ment l’immunisation des animaux et fournit aussi, dans nombre de cas, un moyen anodin de brésesver l’homme d’affections graves ». Ainsi était mis en évidence, en r923 et tout au début de r924, le brin¬ cibe des anatoxines et des vaccinations anatoxiques. C’est par une suite ininterrompue d’observations et d’expériences que l’anatoxine diphtérique tut mise au point et que le principe des anatoxines fut posé. En voici un bref apercu : En 1922, il avait été découvert un hénomène de floculation interve¬ nant dans les mélanges de filtrat de culture diphtérique et de sérum anti¬ diphtérique. Il avait été démontré qu’il est possible, en utilisant ce phéno¬ mène et grâce à une simple réaction in vitro: la réaction de floculation de doser, d’une part, l’antitoxine contenue dans le sérum et d’apprécier d’autre part, la valeur antigène et immunisante de la toxine que recèle le filtrat de culture diphtérique (2%). D’un autre côté, il avait été observé an¬ térieurement, en ror5 (28), que le formol ajouté aux sérums thérapeutiques est un excellent antiseptique capable de garantir ceux-ci contre les souil¬ lures microbiennes. Or, ainsi qu’il était constaté en 1922 et 1923, si le for¬ mol est également un excellent antiseptique pour la toxine et s’i n’ex altère nullement la fonction floculante et la valeur antigène et immunisante, il en fait disfaraitre peu peu et comblêtement la toxicité, surtout si on lui adioint l’action brolongée de la chaleur modérée (20). Ces quelques renseignements rendent compte de l’enchainement de aos recherches; ils montrent comment, en l’espace d’un an à peine, nous avons été amené à la conception et à la « réalisation » de l’anatoxine diph¬ térique et des autres anatoxines. En fait, dans cette conception et dans cette réalisation, à l’idée de la détoxication totale de la toxine, s’ajoute celle de la conservation de la brobriété floculante et de la brobriété immu¬ Misante, la première servant à apprécier, pratiquement, la valeur de la seconde. (27) G. Ramon Comptes rendus Soc. de Biologie, 1922, 86, p. 661 711 813: Annales Inst Pasteur, 1923, 27 p.1001 (28) Voir à cet égard: G. Ramon "Titres et Travaux scientifiquesé Ancienne Imprimerie de la Cour d'appel. Paris 1934 (29) G. Ramon, Comptes rendus Soc. de Biologie, 1923, 89, P.2 23 DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCNS Que l’on nous permette de le redire ici, il s’agissait bien là d’une découverte, car, ainsi que l’a écrit Claude Bernard : « La découverte, c’est l’idée qui se rattache au fait noveau, c’est l’idée neuve qui surgit à brobos d’un fait trouvé bar hasard ou autre¬ ment.» L’idée neuve, cétait cele du pouvoir immunisant ratachée au fai nouveau qui était le maintien du bouvoir floculant d’une toxine brivée en¬ tierement de sa uocivite. Et le titre même de la note présentée à l’Acadé¬ mie des Sciences, sous notre sigpature, en décembre ro23, et qui faisait connaitre l’anatoxine diphtérique, le principe des anatoxines et des immu¬ nisations anatoxiques, exprimait l’idée nouvelle et sa réalisation, en ces termes : Sur le bouvoir lloculant et sur les brobriétés immunisantes d’une toxine dibhtérique rendue anatoxique (anatoxine) (30). Cette même idée était également contenue implicitement dans le titre de notre premier mémoire sur la question, paru eh janvier 1924 dans les Annales de l’Institut Pasteur, intitulé: Sur la toxine et sur l’anatoxine dibhtériques, bouvoir floculant et brobriétés immunisantes. Cependant quelques auteurs, simplement mal informés, nous voulons le croire, ont mis en doute dans le passé, en France et ailleurs, soit ouver¬ tement, soit insidieusement, l’originalité de nos travaux (31), certains allant même jusqu’à nous contester la paternité de nos découvertes (32) Arrivé au soir de notre vie scientifique, nous voudrions en abpeer une fois encore, à des faits ainsi qu’aux témoignages anciens ou récents et aux jugements éclairés de ceux, parmi les savants, parmi les spécialistes les plus autorisés qui ont cultivé le même domaine que le nôtre. Sans doute, depuis la découverte du boison dibhtérique par Emile Roux et A. Versin (1888), savait-on atténuer dans une mesure plus ou moins grande, la toxicité des toxines microbiennes pour des fins expérimen¬ tales ou pour commencer l’immunisation des chevaux destinés à la produc¬ tion des sérums thérapeutiques antitoxiques (sérum antidiphtérique, sérum antitétanique). On avait utilisé pour procéder à cette atténuation, de nombreux agents, soit chimiques tels que l’iode et même dans quelques (30) En grec, ana indique un renversement et signifie aussi " contraire" d'où: anatoxine = qui n'est plus une toxine: anatoxique= qui n'est plus toxique. De même anavirulant qui n'est plus virulent après l'avoir été. (31) Ils usent ainsi d'un procédé qui a été employé contre bien des expérimen tateurs, contre Pasteur lui-même, procédé qu'Henri Bouley, l'ardent défenseur de Pasteur, a stigmatisé en ces termes " Dans le système de décriement adopté par certains, s'exclamait en 1883 Henri Bouley, devant l'académie de Médecine de Paris, il y a une tactique qui a servi de tout temps, contre tous les inventeurs, celle qui consiste à les dépouiller de leur invention dans la plus large mesure que l'on peut, au profit du passé Vous croyez avoir trouvé cela, leur dit-on; allons donc, c'était connu avant vous. Il n(y a rien de nouveau sous le soleil. Vous croyez être un inventeur, vous n'êtes qu'un conti nuateur. Votre idée, d'autres l'avaient eue avant vous. Voilà l'argument opposé toujours à ceux qui accomplissent un progrès." H. Bouley - Bull. Acad. de Medecine, 1883, p.662 (32) Voir, à ce propos, les discussions provoquées à l'Académie de Médecine par la note de E. Lemétayer, A Laflaille, L.Nicol, etc - Bull. acad. Medecine, juillet 1945, p.489, 501, 514 LA LUTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES 24 cas, le formol (Salkowski, 1808, et plus tard Glenny, 1904. Loewenstein, 1900) (33), soit physiques, en particulier la chaleur (Fraenkel, 1800). soit biologiques, notamment l’extrait de thymus, etc.. Mais jusqu’à la mise en évidence de l’anatoxine dibhtérique et des autres anatoxines, il n’avait bas été Bossible d’obtenir, une toxine rendue totalement inoffen¬ sive et suscebtible d’être embloyée imbunément et efficacement chez l’homme. C’est ainsi que Loewenstein, faisant agir le formol sur la toxine diphtérique, n’avait pu débarrasser entièrement celle-ci de sa grande novicité pour l’espèce humaine, c’est pourquoi, ne pouvant s’en servir, il s’adressa, dans ses tentatives d’immunisation contre la diphtérie, à des mé¬ langes de toxine et d’antitoxine (34). Il n’avait pu conff́rer, non plus, la moindre immunité à des sujets humains auxquels il iniecta, à fortes doses pourtant, une toxine tétanique traitée par le formol (35). II avait douc combletement échoue ou uous devions bleinement réussir. Ce sont là des faits indéniables que personne ne saurait contester aujourd’hui. Ce qui avait surtout manqué à nos prédécesseurs en ce domaine c’est. avant tout, un moyen commode pour mesurer l’activité antigène et immu¬ nisante des toxines ainsi « modifiées », « transformées ». Ce moyen, nous l’avions, fait connaitre peu de temps avant la découverte de l’anatoxine et c’est lui, d’ailleurs, qui, comme nous l’avons indiqué, nous avait con¬ duit directement à cette découverte; ce moyen c’est la méthode de Hoculation, méthode dont Glenny et ses collaborateurs disaient en 1924: « La réaction de floculation s’est révélée d’une imbortance inestimable dans notre travail et a donné une grande imbulsion l’étude des toxines modifiées.. Et ils ajoutaient : II n’était bas bossible iusau’a la bublica¬ tion de la méthode de lloculation, de donner une grande extensiox a cette étude des toxines modifiées » (36). En rO25. Glenny écrivait encore: Ce ne fut qu’apres l’introduction de la floculation par Ramon, qu’il fut possible d’entreprendre sur une grande échelle, des travaux en se servant des toxines modiffées. Le test de floculation établi par Ramon, fournit une méthode simple pour estimer la valeur des toxines modifiées qu’il est extrémement difficile d’apprécier chez l’animal (37). Glenny et Barbara Hopkins avaient pu se servir expérimentalement. en particulier en 1923, de la toxine dibhtérique modlifiée bar le formol (38 mais encore toxique bour le cobaye à la dose de 0 2 et dans certains cas de » centimêtres cubes; ils l’utilisaiept principalement pour la préraration de mélanges de toxine et d’antitoxine diphtériques (39). (33) voir à ce sujet l’étude très documentée de S. Schmidt — Acta Path, et Microb. Scand. XII, 1932. (34) Lœvenstein. Deutsch Mod. Woch, 1921 p. 833. (35) Fisler et Lœewenstein. Wien Klin Woch, 1915, p. 1224. (36) A. T. Glenuy. Barbara E. Hopkins et C.C. Pope, The Journ, 91 PAtR, and Bact. 1924, 27 n° 3 p. 261. (37) A. T. Glenny, The Journ, 91 Hua, 1925, 24 p. 301. (38) Celui-ci iptervenant dans la proportion de 0.1 p. 100. (39) Brr. 200, 9) ErD. PaLI, 193. 4 n° 5 p. 283: Jotrn, O1 Hu, 1921, 20 p. 176. DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 28 Ce n’est que dans le courant de l’année 1924 (49) et à la suite de nos publications fondamentales sur la floculation et sur l’anatoxine que Glenny et ses associés réussirent, comme ils le disent eux-mêmes dans les phrases ci-dessus reproduites, à mener à bien leurs propres recherches et à immu¬ niser des lapins et des cobaves à l’aide d’une toxine complêtement privée de sa toxicité par addition de 0.4 9% de tormol, proportion indiquée aupa¬ ravant par nous (41), et en faisant, d’ailleurs, largement usage de potre mé¬ thode de floculation pour, apprécier, i7 oitro, la valeur antigène de la toxine transformée. Cependant, à cete époque déjà, l’anatoxine était emplovée en France pour la vaccination préventive contre la diphtérie et les premiers résultats avaient été publiés (42); de leur côté, Park et Zingber à New York, Fitz¬ Gerald et Fraser, Moloney etc.., à Toronto, avaient commencé, comme nous le verrons plus loin, leurs essais d’immunisation antidiphtérique chez l’enfant, à l’aide d’échantillons d’anatoxine que nous leur avions envovés ou qu’ils préparaient eux-mêmes. Dans une remarquable étude sur les antigènes diphtériques, leur pré¬ paration et leurs propriétés, publiée en 1944, un savant anglais très com¬ pétent lui-aussi, Sir Percival Hartley, s’exprime ainsi, à propos de nos fravaux : La grande contribution de Ramon, en ce domaine, combrend deux réalisations auxquelles son nom demeurera toujours associé" il donna a la science l’abblication de la réaction de lloculation grâce à laquelle il est bos¬ sible de mesurer quantitativement la toxine et l’antitoxine bar des méthodes i7 vitro et il persuada les autorités françaises de vacciner des groupes im¬ portants de ses compatriotes, enfants et soldats, contre la diphtérie. Pour de nombreuses raisons, sa préparation facile, son incapacité de sensibili¬ ser aux protéines de cheval le sujet auquel on l’iniecte, sa propriété de flo¬ culer avec l’antitoxine, son innocuité et les résultats qu’elle a donnés dans la pratique, l’anatoxine jouit d’une grande popularité dans beaucoup de pays, outre la France et le Canada » (43). On doit mentionner que Sir Percival Hartley a mis lui-même au point. pour des essais de vaccination antidiphtérique, le floculat toxine-antitoxine (1925) (44): Glenny et Pope, le floculat anatoxine-antitoxine (1927) (45). Ces deux préparations n’ont été évidemment possibles qu’après la décou¬ (40) totr à ce sulet: The Journ, of PatR, aI Bact, 1924, 27 n° 2 p. 18 et ne : p. 261 (41) G. Ramon, Annales Inst, Pasteur, janvier 1924, 38 p. 1. (42) H. Darre. G. Loiseau, Roubinovitch. Chr. zoeller. BuIt. Acad, de Médecine avril 1924, BuIt, et Mém. Soc. Méd, des Hôpitaur, mai 1924: Henseval et Nélis (de Bel¬ gique). C. R. de la Soc, de Biotogie, octobre 1924 : Lereboullet et Joannon. Bull. Soc. Méd. des Hopitaux, juillet 1924. Nous esposions nous-même, en cette année 1924, les premiers résultats d’ensemble de la vaccination antidiphtérique par l’anatoxine : G. Ramon. Comptes rendus Acad. des Sciences, 18 aout 1924, 179 p. 422: Paris Médical, ne du 6 décembre 1924: Annales Inst Pasteur, janvier 1925, 40 p. 17. (43) sir Percival Bartley, Procecdinos 91 the Royal. Society 91 Medicine 194, 1946 38 p. 473. (44) Sir Percival Hartley, Brit. Journ. ErD. PaLR, 1925, 6 p. 112, 1926, 7 p. 55. (45) A. T. Glenny et C. C. Pope, Journ. PatR, and Bact, 1927, 30 p. 3837. 26 LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES verte du phénomène de floculation et l'étude primordiale que nous en avons faite, elles n'ont eu d'ailleurs qu'un usage limité et momentané. On sait que William Park qui fut pendant de longues années, l'émi- nent Directeur des Laboratoires des Services d'Hygiène de la Ville de New York et qui avait découvert avec Anna Williams le bacille diphtérique très toxigène utilisé dans de nombreux laboratoires pour la production de la toxine diphtérique, avait, à patir de 1914 commencé des essais de vacci- nation contre la diphtérrie au moyen des mélanges de toxine et d'antitoxine (T.A.) essais inaugurés en Allemagne par Behring en 1913. Or, dès 1924 William Park substituait aux mélanges T.A notre anatoxine et au début de 1925, son collaborateur Abraham Zingher pouvait écrire; "l'anatoxine diphtérique est une préparation idéale pour l'immunisa- tion active cnotre la diphtérie" (46) En 1937, après douze années consacrées à des campagnes de vaccina- tion au moyen de l'anatoxine, qu'il menait à New York, en étroite coopé ration avec Béla Schick; celalà même dont la réaction a été si précieuse pour apprécier l'immunité vhez le sujet vaccinés, William Park décla- rait: Dès 1924, Zingher et moi reconnaissions la supériorité de l'anatoxine de Ramon sur le mélange toxine-antitoxine. Nous basions cette supériorité sur la constatation que l'anatoxine est: 1. plus stable, 2. plus facile à pré parer, 3. inoffesive si incidemment congelée, 4. plus efficace, 5. non sensibilisante (47) Vers la même époque où William Park écrivait ces lignes, Fitz-Ge rald, alors Directeur des "Connaught Laboraties" de l'Université de Toronto et ses collaborateurs Fraser, McKinnon et Mary A. ross faisaient connaître (1938) "Il a fallu attendre 1925 pour l'accord général se fasse entre les hyhgiénistes au Canada; sur un agent convenable d'immunisation. En cette année, à la suite des travaux de Ramon, l'anatoxine diphtérique, préparée dans les laboratoires Connaught était répartie dans les Service provin- ciaux et locaux de la Santé, dans tout le Canada. Cela après que des éty des de laboratoire et cliniques très approfondies eurent démontré son mé rite, en ce qui concerne son innocuité et ses propriérés immunisantes en tant qu'agent spécifique de prévention de la diphtérie" (48) Plus récemment, Nelles Silverthorne dans l'ouvrage "Modern Prac tice in Infectious Fevers" de H. Stanley Banks qui fait autorité en Gran- de Bretagne et dans certains pays anglo-saxons, s'exprime ainsi en tête du chapitre consacré à la diphtérie: "L'humanité a une grande dette envers Ramon pour sa découverte de l'anatoxine diphtérique (49". Dans le même ouvrage, J.SK. Boyd qui à la veille et au début de la deuxième guerre mondiale, a été le grand organisateur de l'applicaation de (46à Abraham Zingher, Proc of the Soc for exp biol and med, 1925, P.162 (47) William Hallock Park, The Journ of the amer med association, 1937, 109 n°21, p1681 (48) J.G. Fitzgreald, DTFraser HBMcKinnon et Mary A.Ross, The Lancet, 1938, 1 p. 391 (49) Butterworth and Co edit, London, 1951, vol 1 p.81 22 DE THOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS la vaccination antitétanique dans l’Armée anglaise, déclare à propos de l’immunisation contre le tétanos: « la toxine exposée à l’action du formol pendant quelques semaines à la température de 37° perd ses propriétés toxiques tout en conservant son pouvoir antigène (Ramon, 1924. Descom¬ bey, 1024). Cette brébaration introduile en que de la brobhylaxie antité¬ tanique bour la bremière fois bar Ramon et zoeller (1927) est maintenant largement utilisée » (50). Tels sont les faits, tels sont les témoignages écrits, irrécusables d’une part de Glenpy et ses associés, de Sir Percival Hartley qui ont reçonnu des premiers, l’intérêt de nos travaux sur la réaction de floculation et qui, des premiers aussi, à notre suite, en ont fait usage dans leurs propres recher¬ ches, et d’autre part, de William Park et Zipgher, de Fitz-Gerald, Fraser et leurs collaborateurs qui ont saisi immédiatement la valeur de l’anatoxine diphtérique ainsi que celle de notre méthode d’immunisation antidiphtéri¬ que et qui ont largement contribué à l’essor de celle-ci dans le monde. Tels sont aussi les jugements portés par les auteurs les plus compétents sur l’importance de nos travaux et découvertes en ce qui concerne princi¬ palement les anatoxines diphtérique et tétanique et leur application respec¬ tive à la vaccination contre la diphtérie et contre le tétanos. Pour en terminer, nous'en appellerons encore à Emile Roux, l’in¬ venteur de la toxine diphtérique, et nous dirons, en évoquant sa noble figure, sa science et sa conscience : Comment ext-il batronné, cautionné detant le monde savant, nos fravaux s’il n’en avait, chaque insta3t mesuré la haute bortée2 II. — PROPRIÉTÉS ET MODE D’ACTIOM DES ANATOXINES Le principe des anatoxines une fois découvert, notre premier soin avait été d’étudier les propriétés de ces nouveaux antigènes. Un usage de trente années maintenant a entièrement confirmé, dans leurs propriétés, les anatoxines. Nous examinerons brièvement ces propriétés en prenant comme type l’anatoxine diphtérique. Innocuité En proposant les anatoxines pour l’immunisation de l’homme et des animaux contre diverses toxi-infections, nous avons posé en principe que. pour être dignes de l’appellation qu’elles portent, leur innocuité doit étre absolue et non bas seulement relative. Aussi avons-nous fixé tout de suite les règles rigoureuses du contrôle de cette innocuité (5I). Nous les rappellerons ici. (50) J.S.K. Boyd "modern Practice in Infectious Fevers" Ouvrage de Stanley Banks "Butterworth and Co Edit. London 1951 vol I. p.96 (51) Voir par exemple G. RAmon "Sur le contrôle et la mesure des propriétés de l'anatoxine diphtérique" Bull. Acad de Médecine 1925 93 n°6 28 LA LITTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES En pratique, dès que les flacons contenant par exemple, la toxine diphtérique qui a subi durant quatre semaines l'action du formol (4 à 5 cc de la solution commerciale d'aldéhyde fornique par litre de toxine) et de la chaleur (39° à 40°) sont sortis de l'étuve, on prélève dans chacun d'eux un échantillon de 10 centimetres cubes. Cet échantillon est injecté sous la peau de deux cobayes à raison de 5 centimètres cubes par cobaye. Ces animaux sont maintenus en observation prendant un mois au minimum. Durant ce laps de temps, l'injection massive qui leur a été faite ne doit provoquer chez eux aucun signe local ou général précoce ou tardif, d'intoxication diphétique alors que la toxine qui sert à préparer l'anatoxine peut avant sa transformation tuer le cobaye à la dose de 1/4.000 de centimètre cube (52) et est capable de faire apparaitre chez cet animal, des escarres et des paralysies à la dose de 1/10000 et même de 1/20.000 de centimètre cube. Avant d'être délivrée pour la vacci nation, l'anatoxine diphtérique subit encore trois autres epreuves du même genre. Des contrôles analogues, selon de stechniques appropriées, sont exer cés sur les autres anatoxines utilisées soit en médecine humaine, soit en médecine vétérinaire. Des dizaines de millions d'injections de différentes anatoxines con trôlées par nos propres soins pendant plus de vingts années ont été effec- tuées, aucun accident n'est survennu que l'on puisse sciemment rapporter à un reste de toxicité spécifique si minime soit-il, dans les anatoxines que nous prépérions et contrôlions ainsi nous-même En instuant à la production un contrôle de l'innocuité de l'ana toxine sévère et répété, nous n'avons fait que suivre les recommandations que nous adressaient par anticipation à trente-cinq ands de distance, E. roux et A. Yersin dans leur magistral travail sur la toxine diphtéri* que? Voici, en effet, ce qu'écrivaient en 1888 les deux disciples de Pas- teur; "L'injection aux animaux de doses variables de poison soluble de la diphtérie (c'est à dire de toxine diphtérique) reproduit les diverses for- mes de l'intoxication diphtérique, depuis celles qui amènent la mort en quelques heures jusqu('à celles qui, au bout d'un temps plus ou moins long, se traduisent par des paralysies mortelles ou susceptibles de guérison? Ces manifestations tardives sont très intéressantes - poursuivaient Roux et Yersin - et si quelque jour, on est conduit à un emploi prophylactique des matières solubles élaborées par les microbes il ne faudra pas perdre de vue cette possibilité d'une action dont les effets ne se verront que plus tard. Pour l'emploi de ces substances il ne sera pas suffisant d'établir quelle est la tolérance immédiate du sujet auquel on les adminiistre mais il faudra aussi songer aux effets à longue échéance. l'innocuité de la "vaccination chimique" devra être prouvée dans chaque cas"(53) (52à C'est à dire qu'un seul centimètre cube de cette toxine peut tuer 4.000 cobayes (53) E. roux et A. Yersin, Annales Inst Pasteur, 1888, 2 p.646 2 DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOVEN DES VACCINS ton de dire la satisfaction intime et même extériorisée de M. Roux lorsque nous lui apportâmes, le ro décembre 1923, la note que nous lui deman¬ dions de présenter à l’Académie des Sciences et qui transformait en réalité ses brévisions d’autrefois concernant le contrôle et l’embloi, dans un but brobhylactique, du vaccin issu de sa toxine. Cette innocuité foncière étant parfaitement établie, il n’est pas exclu que certaines anatoxines, par exemple l’anatoxine diphtérique (54), puis¬ sent comme toute substance antigène, et en même temps allergène, en¬ trainer chez les sujets prédisposes particulièrement sensibles, des réac¬ tions plus ou moins vives, locales ou générales, d’ordre allergique, sans rapport aucun avec la toxicité spécifique, apanage des toxines. L’anatoxine était à peine proposée pour la vaccination antidiphtérique que dans certains pays, en Allemagne notamment, où elle n’avait été emplovée que sur un très petit nombre de sujets ou même pas emplovée du tout, on faisait grand cas de quelques réactions observées là ou ailleurs et l’on se plaisait à déclarer que la méthode était pratiquement inutili¬ sable (55). D’autre part, sans aller aussi loin, on a prétendu que l’anatoxine diph¬ térique ne pouvait être injectée à des tuberculeux, en raison des réactions particulièrement vives qu’elle serait susceptible de provoquer chez ces sujets. Le temps, heureusement, s’est chargé de faire justice des critiques. pour le moins exagérées, qui étaient adressées à l’apatoxine en ce qu concerne les réactions qu’elle peut provoquer. Le faible pourcentage des réactions légères et sans lendemain, le nombre infime d’incidents plus sérieux, mais sans suites fâcheuses, constatés sur le nombre très considéra¬ ble d’iniections d’anatoxine effectuées depuis trente ans, ont fourni la meilleure des réponses aux allégations anciennes et ont démontré leur peu de fondement. D’ailleurs, certains perfectionnements apportés dans l’ob¬ tention de l’anatoxine tels que l’amélioration des milieux de culture pour la production de la toxine, la purification et la concentration de l’ana¬ toxine, etc., ont permis de réduire encore le pourcentage, déjà bien fai¬ ble, des réactions allergiques. La vaccination antidiphtérique a été systématiquement pratiquée dans nombre de sanatoriums; des dizaines de milliers d’iniections d’ana¬ toxine dipbtérique ont été faites à des sujets atteints de tuberculose sans que l’on ait constaté une aggravation, si minime fût-elle, de leur état ou le déclenchement de réactions sérieuses, Par contre, l’apparition de réac¬ tions sévères à la suite d’injections de vaccin antityphoidique avait fait renoncer autrefois à l’emploi de ce vaccin chez les tuberculeux. On a soutenu dernièrement que les vaccipations y compris la vacci¬ nation antidiphtérique, pouvaient favoriser l’échosion de la poliomvélite (54) Nous mentionnerons que l'anatoxine tétanique ne provoque pour ainsi dire jamais de réactions locales ni générales (55) C'est ainsi qu'en France même la méthode failli ne pas voir le jour, les premiers sujets auxquels fut ingectée l'anatoxine diphtérique et qui étaient des conva- lescents de diphtérie, donc allergiques, atant fait des réactions assez vives. Cependant, grâce à l'intervention de M. Roux, les essais de vaccination au moyen de l'anatoxine furent heureusement poursuivis. LA UTE PREVENTIYE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES 30 Nous avons montré dans une communication devant l’Académie de Mé¬ decine, en nous appuvant sur des documents irrécusables, qu’il n’en était rien (56). Comme a conclu une Commision américaine de quarante spécialistes, à la suite d’une enquête approfondie : les injections de vac¬ cin n’augmentent bas le nombre des cas de boliomvélite, les enfants risquent beaucoub blus de contracter la dibhténie que la boliomyélite et les bénéfices de l’immupisation contre la dihtérie, l’embortent sur les faibles risques de contracter la boliomyélite, (57). Pour en terminer avec l’innocuité de l’anatoxine, nous citerons cer¬ tins faits d’opervation A la suite d’une confusion (avec le sérum antidiphtérique), des malades atteints de diphtérie ont pu recevoir 20, 30 et jusqu’à r50 centimêtres cubes d’anatoxine diphtérique, sans rien présenter d’autre qu’une réaction plus ou moins vive d’ordre allergique (58). Des iniections intracérébrales d’anatoxine diphtérique et d’anatoxine tétanique ont été faites dans un but thérapeutique (chez des sujets atteints de démence précoce): elles n’ont provoqué, même à la dose de 2 centimêtres cubes, aucun incident pouvant être mis sur le compte d’une intoxication spécifique. Ces constatations apportent une preuve nouvelle de l’innocuité des anatoxines convenablement préparées et correctement contrôlées. Si, en effet, les anatoxines diphtérique et tétanique utilisées dans de tels essais, avaient contenu quelque trace de poison microbien. celui-ci, étant donné son affinité pour la substance cérébrale, n’aurait pas manqué d’entrainer des troubles manifestes et caractéristiques (50). Ainsi sont affirmées de mulibles facons, l’innocuidé de l'’anatoxine et la sureté du brocédé de contrôle de cette innocuité. Il faut souligner, dès maintenant, le contraste existant entre l’inno¬ cuité absolue des anatoxines et l’innocuité toule relative des virus-vac¬ cins du tybe jenneen cr pusore). stabilité, irréversibilide A l’innocuité sont liées, dans l’anatoxine, d’autres propriétés, telles. que la stabilité et l’irréversibilité. Nous avons examiné périodiquement des échantillons d’anatoxines diphtérique et tétanique maintenus depuis plusieurs années jusqu’à sept années et davantage, soit à la température du laboratoire (moyenne 18 à 22°), soit à celle de la chambre froide ( 1 1 4 s°). Nous nous sommes rendu compte que les anatoxines placées dans ces conditions conservaient intactes leurs différentes propriétés et tout spécialement l’innocuité et le pouvoir immunisant (690). (56) G. Ramon, Bul, Acad, de Médecine, 1953, n9s 28 et 29, p. 468. (57) The Journ, ot the Am. Med. AssOc, 1952, 149 p. 170. (58) E. Aubertin et P. Baudou — Paris Médical, 1932, 22 p. 393. (59) G. Ramon, M. pucoste. R. RIchou et ille M. Puison, Reote AInmitnologe 1940 6 p. 145. (60) G. Ramon, Annales Inst. Pasteur, 1928, 45 p. 959. 1, 1931, 46 p. 505, etc. DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 31 Ou conçoit comhren cette stabilité daus le fembs est recieuse bour l’utilisation des anatoxines dans la bratique courante des vaccinations. La stabilité de l’anatoxine s’affirme, en outre, à l’égard de la cha¬ leur. L’anatoxine, ceci est un fait intéressant, acquis depuis longtemps déjà (6r), se montre relativement blus résistante au chauffage que la toxine d’où elle dérive. En effet, la toxine diphtérique, par exemple. chauffée une heure à 65-70, a perdu presque toute sa nocivité, elle ne flocule plus en présence d’antitoxine;, injectée même à fortes doses répé¬ tées à l’animal d’expériences, elle ne provoque en lui qu’une immunité bien faible (Fraenkel) à peine décelable. Or, une anatoxine peut être chauffée à 65° et même à 70°, elle conserve quasi intégralement ses qualités floculante et immunisante. Dans des expériences, qu’il serait trop long de rapporter en détail. nous nous sommes servi de la différence de résistance à la chaleur de la toxine et de l’anatoxine pour chercher à nous rendre compte de la mar¬ che et du mécanisme de la transformation de la toxine en son dérivé ana¬ toxique (62). Nous avons constaté que c’est seulement lorsque toute trace de poison a disparu, sous l’influence du formol et de la chaleur (49). que la « toxine » ainsi traitée offre intégralement la résistapce au chauf¬ fage qui représente bien l’une des propriétés caractéristiques de l’ana¬ toxine. Du point de vue pratique, la-résistance au chauffage de l’anatovine est importante, car elle permet la tyndallisation de l’anatoxine. L’in¬ fluence de ce chauffage (ss° pendant une heure) s’ajoutant à l’action de la petite quantité résiduelle de formol qui persiste dans l’anatoxine, assure sa stérilité indéfinie, lorsqu’elle est répartie en ampoules (63). Nous avons vu, par contre, qu’il n’a guère été possible, jusqu’ici, de garantir la pureté bactériologique des virus-vacins de lenner et de Pasteur. Avant de proposer les anatoxines pour l’immunisation de l’homme contre diverses toxi-infections, pous nous somnmes assuré que le pro¬ cessus qui aboutit à la transformation de la toxine en son dérivé inoffen¬ sit est bien irréversible et que les anatoxines ne risquent pas de devenir toxiques, soit in vitro avant leur emploi, soit in vivo après leur pénétra¬ tion dans l’organisme humain ou animal. On savait que les mélanges de toxine et d’antitoxine analogues à ceux emplovés par Behring, par William Park, etc.., dans leurs essais de vaccination antidiphtérique (avant la découverte des anatoxines), sont 561) Voir notamment G. Ramon Comptes rendus Acad. des Scie,ces,; 1924 179 p.422 (62) G. Ramon, Annales Inst. Pasteur, 1931, p.507 (63) Le procédé consistant dans l'association de l'aldéhyde fornique et de la chaleur, apr_s avoir été mis en oeuvre en premier lieu pour préserver les sérums thérapeutiques (G. Ramon, 1917), a été appliqué dans la suite pour le même objet à de nombreux produits thérapeutiques d(origine biologique (G.ramon revue d'immunologie, 1946 10, P. 174) LA UTTE PRÉVENTIME CONTRE LES MALADIES NTECTIEUSES 32 dissociables (64) sous l’effet notamment de la congélation et de la décon¬ gélation, ce qui constituait à la fois un inconvénient et un danger. Nous avons nous-même montré tout au début de nos recherches que du floculat toxine-antitoxine diphtérique, on peut extraire une proportion plus ou moins forte d’antitoxine (65). D’autres expérimentateurs ont établi que. sous diverses influences : addition d’acides, de sels, d’antiseptiques, etc. le mélange neutre de toxine diphtérique et de sérum spécifique peut récupérer une certaine toxicité (Morgenroth, Madsen et Schmidt. Glenny. etc..). Or, malgré tous les agents physiques, chimiques ou biologiques mis en jeu, il a eté imbossible d’obtenir que l’anatoxine buisse brésenter la totalité ou une bartie infime seulement de la nocivité qui caractérise la toxine dont elle est le dérivé. Divers auteurs ont signalé qu’une toxine diphtérique filtrée depuis plus ou moins longtemps peut, dans différentes conditions, manifester un accroissement de sa toxicité, par son mélange avec du bouillon, avec de l’eau peptonée, etc.. (Walbum. Dernby, etc..). D’après les recherches de Schmidt et Scholz (66), cet accroissement de toxicité serait dù au fait que certaines substances contenues dans la toxine et qui sont assimilées par ces expérimentateurs aux toxoides de la théorie d’Ehrlich, peuvent récupérer la toxicité qu’elles ont perdue et se transformer en toxines. Selon H. Schmidt et W. Scholz (de Marburg) et aussi S. Schmidt (de Copenhague) (67) la réaction toxine-toxoide est réversible : toxine toxoide. En utilisant les moyens employés par Walbum. H. Schmidt, dans leurs expériences sur la toxine et les soi-disanttoxoides, nous avons cher¬ ché à faire recouvrer à l’anatoxine un peu de la toxicité du poison diphté¬ rique, nous n’y sommes jamais parvenu. De son cot, S. Schmidt, étudiant le mêmesujet, a écrit : « Il a été prouvé bar Bamon que la transformalion de la foxine en anatoxine est irrégersible. Malgré tous les essais que nous quons nous¬ même effectués en faisant agir sur l’anatoxine différents agents chimi¬ ques et bhysiques, nous n’avons jamais pu parvenir à faire récupérer à l’anatoxine la moindre toxicité. Cela cyeuse encore le sillon nettement tracé par Namon entre l’anatoxine et les toxoides. » En effet, nos expériences, tout en affirmant l’irréversibilité de l’ana¬ toxine prouvent encore, s’il en est besoin, que cet antigêne ne saurait être abbarenté, même de loin, aux hybothétiques toxoides qui, selon la conception ancienne d’Ehrlich, entreraient avec de nombreuses autres substances dans la composition du bouillon diphtérique frais ou vieilli (68). (64) Ce serait précisément grâce à leur réversibilité partielle ou totale, réalisée progressivement in vibo que, d’après certains auteurs, les mélanges « toxine-antitoxine pourraient jouer le rôle d’antigènes: l’organisme serait capable de dissocier les mélapges Piapprition et le de mettre graduellement en liberté la toxine qui provoquerait ainsi dévejoppement de lantitoxine dans les humeurs (65) G. Ramon. Comptes rendus Acad, des Sctences, 1923, 176, p. 267. (66) H. Schmidt et W. SchOlz, Archio. L. Hua, 19268, 96 p. 172. (67) S. Schmidt, Annates Inst, Pasteur, 1930, 45 p. 370. (68) Nous tenons, à ce propos, à faire ici une remarque qui s’impose. On sait qu’en Allemagne et dans le spays anglo-saxons on se sert le plus souvent pour désigner l'anatoxine du mot toxoide, jadis inventé par Ehrlich, de même que les termes proto- 33 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS En outre, ta stabilité et surtout l’irpéversibilité des anatoxines. s’ajoutant à leur innocuité totale, accroisent encore la différence qui existe entre elles et les virus-vaccins lesquels, en règle générale, sont instables et qui, dans certaines conditions, étant « réversibles » betvent. comme l’ont montré Pasteur et ses collaborateurs, recouvrer blus 04 moins comblétement la virulence qu’ils bossédaient avant l’atténuation. Valeur antiaène iptrinsêque et activité immunisante L’innocuité, la stabilité, l’irréversibilité, bien que propriétés essen¬ tielles de l’anatoxine, ne suffisent pas à la caractériser entièrement. L’apatoxine ne représenterait qu’un progrès relatif en matière de vaccins si elle n’éfait par exemple, qu’up bouillon dipbtérique quelcon¬ que dont la toxicité a été totalement et définitivement abolie par l’aldé¬ hyde formique et la chaleur. En réalité, l’anatoxine n’est pas seulement une toxine rendue, pour toujours, inoffensive, par l’action combinée du formol et de la chaleur, ou par tout autre moyen. Ainsi que nous l’avons fait connaitre, lors de sa découverte et à de nombreuses reprises depuis, l’anatoxine comporte dans son principe même, outre la notion de l’innocuité absolue, celle du bouvoir immunisant ou autrement dit, du bouvoir antigène intrin¬ sêque tel qu’il nous est révélé par la réaction, de floculation, laquelle nous permet, en outre, de Lévaluer (60). Dès la découverte de l’anatoxiné diphtérique, nous annoncions. en effet, qu’il y a un rapport étroit entre le pouvoir floculant que l’apa¬ toxine manifeste ix vitro, lorsqu’elle est mélangée dans certaines propor¬ tions avec le sérum antidiphtérique, et le pouvoir immunisant dont elle fait preuve ir vi0o. Dans la suite, les expériences chez l’apimal et les premiers essais de vaccination anatoxique chez l’enfant, nous amenè¬ rent très rapidement à la conclusion que la floculation pouvait être uti¬ lisée comme méthode de mesure pour estimer « le bouvoir antigène in¬ trinsêque », c’est-à-dire comme nous l’avons défini; le bouvoir que l’anatoxine tient de sa constitution et de ses qualités brobres d’engen¬ torine, deutérotorine, tritotorine, prototoroide, suntoroide, épitoxoide ou torone, etc. pour les besoins d’une explication théorique, concerant le composition, par lui supposée très complexe, du poison diphtérique, concernant égaiement le mode d’union de la toxine et de l’antitoxine. Ce faisant, on commet ine déplorabte erreur et on crée la plus illéoi¬ time des contusions. On a perdu de vue le caractère artificiet et spéculatit de cette division en «tranches muitiples » de la toxine et de ces denomiuations employees par le savent allemand pour traduire sa pensée et exposer ses conceptions O a oublié que le toxoide, la toxone, etc., n’ont jamais représenté d’entités véritables, malgré les efforts d’Ehrich pour transformer en « réalités » les fruits de son imagipaticn: Ehrlich ténta jadis d’obtenir un « toxcide » réalisant ses vues, en traitant. par exemple, la tcxine tétanique par le suifure de carbone, mais ses essais ne furent guère concluants (voir à ce sujet : S. Schmidt. Acta Path, et Microb. Scand, suppl. XIT 11932). Lœwenstein rapporte, en 1931, qu’il répéta les expériences d’Ehrlich en ce domaine mais il était incapable d’obtenir une détoxication cmplête (zentralblatt fur BaEt. Orio. 1931, 122 p. 294) Ainsi, tout en rendant hommage à l’ilustre savant, inventeur de la chimiothérapie. nous estimons tout à fait iniustifié l’emploi du mot « toxoide» pour désigner l’anatoxine substance nouvelle que nous avous mise en évidence en 1923, et qui n’était chez Ehrlich qu’une vue de l’esprit (69) Voir à cet égard G. Ramon, Annales Inst pasteur, 1924, 38 p. 1 Bull Acad de Médecine, 1925, 93; n°6, Annales Inst Pasteur, 1931, 46 p.483, etc... LA UTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES 31 drer l’inimunité antitoxique caractérisée elle-même bar la brésentn dans les himneurs du suaiet vacciné, de l’anlifoxine sbdcifique Pratique¬ ment, la « valeur antigêne intrinséque », déterminée au moyen de la méthode de floculation est exprimée en zxités aptigéniozes ou ayo¬ loxiayes, en fonction de l’unité antitoxique. Elle correspond à la quan¬ tité d’unités antitoxiques, en provenance d’un sérum étalon, capables de faire apparaitre la « floculation initiale », en mélange avec un centi¬ inêtre cube d’anatoxine. La floculation initiale, rappelons-le, désigne à l’observateur le mélange dans lequel il y a équivalence, saturation réciproque, des éléments antitoxiqués et des éléments anatoxiques, si bien que connaissant la valeur numérique des premiers, il est facile d’en déduire celle des seconds. Si, par exemple, la floculation initiale est pro¬ voquée dans un centimêtre cube d’anatoxine par une quantité d’anti¬ toxine spécifique correspondant à 30 uuités antitoxiques, cette anatoxine est dite avoir une valeur antigène égale à 3»0 unités Li de floculation. Le symbole L a été proposé par Glenny, et il est très généralement adopté et utilisé. Dans ces conditions, une anatoxine se montrera d’autant ohus im¬ munisante que son titre, en unités de floculation, est blus élévé. Cette dépendance du pouvoir immunisant à l’égard de la valeur antigène in¬ trinsèque a été démontrée spécialement pour l’anatoxine diphtérique. par les nombreuses expériencès comparatives faites chez l’animal et par les essais, plus nombreux encore, efféctués chez l’homme, à l’aide d’ana¬ toxines de titre différent. Les résultats contrôlés soit au moyen du do¬ sage de l’antitoxine dans le sérum des sujets immunisés, soit à l’aide de l’épreuve de Schict, pratiquée directement chez ces demniers, ont tou¬ jours montré la concordance satisfaisante qui existe entre le titre expri¬ mé en unités de floculation des divers échantillons d’anatoxine diphté¬ rique utilisés et la valeur moyenne de l’immunité conférée par chacun d’eux. Cette concordance a d’ailleurs été reconnue par la Conférence in¬ ternationale d’exberts en matière d’immunisation active contre la dibh¬ tévie (Londres 1931). Conférence à laquelle ont pris part un certain nom¬ bre d’immunologistes qualifiés. Afin de faciliter les comparaisons et les échanges, le Comité international d’étalonnage des produits biologiques (Copenhague) délivre un sérum étalon qui sert de commune mesure. Ainsi que l’ont fait remarquer Glenny et Okell, en 1924 (29), une toxine modifiée à tel point qu’elle ne peut tuer l’animal (anatoxine) ne peut être titrée chez l’animal en fonction du Lou du Lo puisqu’elle n’a plus aucun pouvoir toxique et Glenny et ses collaborateurs de montrer tout l’intérêt de la floculation pour évaluer les toxines modifiées du type anatoxine. Sans doute pouvait-on songer et il n’y fut pas manqué, à apprécier les qualités immunisantes des anatoxines chez les petits animaux de la¬ boratoire, cobaves pour l’anatoxine diphtérique, souris pour l’anatoxine tétanique, mais une telle opération réclame un grand nombre d’ani¬ maux choisis avec soin, elle exige un temps très long s’étendant sur (70) AT Glenny et CC Okell The Journ of Path and Bact, 1924, 27 p.187 Voir aussi AT Glenny The Journ of Hygiene, 1925, 24 p.301 DE L’TIOMME ET DES ANIMAUX DOMESHQUTS AL MGYEN DES VACCNS 35 plusieurs semaines, et.. Les résultats obtenus en ce qui concerne l’im¬ munité, sont très variables d’un animal à l’autre, ils sont relatifs à l’es¬ pèce, à l état de santé, à l’age des animaux, etc.., ils dépendent d’au¬ tres facteurs encore. Et ce que l’on peut tenter lorsqu’il s’agit d’une expérience isolée devient impossible matériellement lorsque l’on doit con¬ trôler, dans leur pouvoir immunisant, de nombreux lots d’anatoxine destinés à l’immunisation de milliers, de millions d’individus, comme c’est le cas pour les vaccinations antidiphtérique, antitétanique, etc... Or, pour chaque lot d’anatoxine délivré, la valeur antigène intrinsèque et, partant, l’activité immunisante, est déterminée et chiffrée en quel¬ qucs instants, sans difficulté aucune, par la floculation. Aipsi à la complexité, aux difficultés, à l’impossibilité même de réalisation pratique des techniques de dosage chez l’animal, aux causes d’erreur multiples qui interviennent pour en fausser les résultats, on doit prétérer sans conteste, la simplicité, la facilité de mise en œeuvre, l’écono¬ mie, la précision epfin de la floculation. Grâce à la méthode physique de floculation l’antigène anatoxique est titré in vitro par rapport à l’anticorps seul (antitoxine) comme celui¬ ci est dosé grâce à la même méthode, par rapport à l’antigène (toxine ou anatoxine) uniquement et dans les deux cas sans l’iptermédiaire de l’animal, ce qul exclut bien des erreurs et bien des inconvénients. La valeur d’une apatoxine dipbtérique ou d’une anatoxine tétanique est chiffrée en unités anatoxiques, de même façon et avec la même exactitude que la valeur d’un sérum antidiphtérique ou d’un sérum antitétanique est exprimée en unités antitoxiques. La notion de la valeur antigène intrinsêone et sa mise en pratiquc par le moyen de la floculation ont apporté dans l’utilisation des ana¬ toxines, une rigueur scientifique jusque là inconnue en matière de vac¬ cins et de vaccinations. Que sait-on, en effet, de l’activité immunisante de vaccins tels que les virus-vaccins du type pastorien avant de les employer 2 A la vérité bien peu de chose. L’anticorps agglutinant ou déviant le complément que l’on peut rechercher et doser dans le sérum des sujets vaccinés ou des animaux d’expériences soumis à l’iniection de vaccin antityphoidi¬ que, par exemple, n’est qu’un témoin, et guère plus, du passage de ce vaccin dans l’organisme; il n’est, en aucune façon, le test de l’immunité protectrice, au contraire des antitoxines que l’on peut doser dans le sérum des individus ou des animaux immunisés au moyen des anatoxines. Par contre, nous savons, et cela grâce à la notion de la valeur apti¬ gène intrinsèque, qu’une anatoxine diphtérique qui, d’après la flocula¬ tion, titre 30 unités anatoxiques (L), par centimêtre cube et qui est admi¬ nistrée suivant la posologie convenable, est capable de conférer à une brobortion de 05 à 100 p. 100 des sujets vaccinés, un degré d’immunité sufisant (correspondant, d’une part, à un taux d’antitoxine dans leur sérum égal ou supéricur à 1/30 d’unité antitoxique et, d’autre part, à unc eprcuyc de Schick négative) pour que ces sujets puissent être considérés comune étant à l’abri de la diphtéric. 36 LA UTE PRVENTIVE CONTRE LES MALADIES INECTIEUSES On conçoit quels services la notion de la valeur anfigène iptrinsè¬ que rend chaque jour dans l’application généralisée des vaccinations au moyen des anatoxines. A l’aide de la méthode de floculation on peut choisir, pour la pratique des vaccinations, des anatoxines avant une va¬ leur immunisante déterminée. En utilisant ces anatoxines, on n’opère plus à l’aveuglette, comme cela se passe le plus souvent avec d’autres vaccins et l’on peut obtenir, dans la pratique, des résultats plus réguliers. plus constants qu’avec aucune autre méthode d’immunisation. La notion de la valeur antigène intrinsêque devait également se ré¬ véler des plus utiles pour introduire certains perfectionnements dans les méthodes de vaccinafion anatoxique. Puisque, d’après cette notion soli¬ dement établie, une anatoxine se montre d’autant plus immunisante que son pouvoir antigène intrinsèque évalué d’après la méthode de flocula¬ tion est plus grand, la réalisation d’une immunité meilleure et d’une plus grande eficacité est liée à l’obtention et à l’emploi d’une anatoxine de valeur antigène aussi élevée que possible et, comme l’anatoxine est le dérivé de la toxine, la solution du problème posé consiste donc d’abord à préparer une toxine riche en unités antigènes Et, à cet égard également. la floculation est un guide précieux. Nous ferons remarquer que, s’il n’est guère possible d’augmenter au-delà d’une certaine limite, le pouvoir vaccinant des virus-vaccins sans risquer de les rendre plus virullents et pac conséquent, plus patho¬ gènes, on peut, par contre, accroitre sans réstriction la valeur antigène intrinsêque et bar conséquent l’activité immunisante des anatoxines: leur nature inanimée, chimique, leur innocuité et leur irréversibilité permettent cet accroissement. Ce n’est pas là l’un des moindres avan¬ tages des anatoxines et cet avantage vaut non seulement pour les vacci¬ nafions anatoxiques, mais aussi pour la préparation des sérums dont le titre antitoxique et l’activité thérapeutique peuvent être ainsi aug¬ mentés par l’emploi daps l’immunisation du cheval, d’anatoxines de haute valeur antigène intrinsêque. Il existe un autre moyen de venforcer l’activité immunisanle des auatoxines et de rendre ainsi plus grande l’efficacité des vaccinations anatoxiques. Il consiste à mettre sen œuvre le brincibe des substances adiuoantes et stimulantes de l’immunité que nous avons mis en évidence en 1025 (7T) peu après la découverte des anatoxines. Il n’est pas sans intérêt, crovons-nous, de rappeler comment nous avons été conduit à établir ce principe à la suite d’observations faites chez des chevaux producteurs de sérum antidiphtérique. Lorsqu’on hyperimmunise des chevaux à l’aide d’iniections sous¬ cutanées de doses croissantes d’antigène diphtérique (toxine ou ana¬ toxine), leur sérum s’enrichit, progressivement en antitoxine. Au bout d’un temps qui varie avec nombre de facteurs; valeur de l’antigène. aptitude individuelle des animaux, etc.., le pouvoir antitoxique du sé¬ (71) G. Ramon, Comptes rendus Acad. des Sciences, 1925, 181 p.157 Bull. Soc. Cent. Méd Vét. 1925 101 p. 227 et p.334 Annales Inst Pasteu 1926 40 p.1 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCIE 37 rum atteint un certain degré, lequel ne semble guère devoir être dépassé. quoi que l’on fasse. Malgré le soin que l’on prend de soumettre les ani¬ maux entre les saignées, à des réiniections massives d’antigène, la ri¬ chesse du sérum en antitoxine n’augmente plus, elle reste tout au plus stationnaire durant quelques semaines et baisse le plus souvent assez ra¬ pidement, pour ne plus remonter daps la suite. Tel est le rythme le plus habituel qu’offre la production de l’antitoxine diphtérique chez le che¬ val; nous disons le plus babituel, car nous devions nous apercevoir qu’il n’en est pas toujours ainsi. En effet, nous constations à l’occasion des dosages d’antitoxine diphtérique par la méthode de floculation, laquelle nouvellement établie donnait toutes facilités à cet égard, que parmi les 30 ou 40 sérums antidiphtériques que nous titrions chaque semaineset dont chacun provenait d’un cheval différent, quelques-uns d’entre eux. dont le titre avait jusque là baissé progressivement et plus ou moins for¬ tement, présentaient une augmentation souvent très importante de leur contenu en antitoxine. Quelle était donc la cause de cette augmentation? Procédant à l’exa¬ men attentif des chevaux producteurs de sérum antidiphtérique, nous remarquions bien vite que ceux chez qui nous avions pu décéler, par la floculation, une augmentation sensible du pouvoir antitoxique étaient porteurs, au niveau de l’une des dernières iniections d’antigène, d’un abcès de volume variable. La constatation fréquemment répétée de la coincidence de l’appa¬ rition des abcès et de la surproduction de l’antitoxine chez certains che¬ vaux nous permettait de considérer comme de plus en plus plausible l’hypothèse à laquelle nous nous étions arrêté, dès le début de nos inves¬ tigations, à savoir: l’augmentation de l’antitorine se Dvoduit la fa¬ veur de l’abcès se dévelobbant au boint d’iniection de l’antigêne. L’ex¬ périmentation entreprise confirmait, d’ailleurs bientôt, cette hypothèse. En ajoutant, en effet, à l’anatoxine ou à la toxine diphtérique soit du pus, soit des germes de la suppuration, et en iniectant l’antigène ainsi artificiellement contaminé à des chevaux fournisseurs de sérum anti¬ dipbtérique on détermine, chez ces animaux, la formation de collections purulentes avant comme conséquence ultime un accroissement plus ou moins sensible de la production d’antitoxine spécifique. Ainsi que nous devions rapidement nous en rendre compte, il n’est pas nécessaire, pour arriver au but visé, de provoquer un abcès septi¬ que. Il suffit de produire, à l’endroit d’iniection de l’antigène, un cedè¬ me inflammatoire. C’est ainsi qu’après de multiples essais au cours desquels nous avons utilisé des substances les plus variées, notre choix s’est arrêté sur le ta¬ pioca pulvérisé et stérilisé. Le tapioca mélangé à l’antigène (anatoxine diphtérique, anatoxine tétanique, etc..) détermine, au piveau de l’iniection sous-cutanée, une réaction inflammatoire plus ou moins vive qui s’accompagne d’une suc¬ cession de phénomènes de nature et d’intensité variables: afflux plas¬ matique et leucocytaire, etc... L’antigène se trouve ainsi exposé à l’in¬ fluence de ces phénomènes. Comme nous l’écrivions dès 1925, en rela¬ tant nos observations et nos expériences: LA LUTE PRÉVENIIVE CONTRE LES MALADLES INECTIEUSES 38 « L’axtigène ququel on a ainsi aiouté du tabjoca, introduit daus le fissut conjonetif souscutané du cheval, y rencontre, dans les conditions les blus lavorables, les éléments les blus variés : leucocytes et ferments cellulaires bar exemble, dont l’aflux est augmenté bar la brésence du fabioca, celludles conjonctiues que multibhie l’inflammation Arovoqud́e artificiellement. Ces éléments, en relenant l’antigène et en émbéchanl son élimination trob prombte, lui font subir sur blace, quant absoxbtion. des modifications bluts ou moias brofondes. L’oyganisme peut ainsi uti¬ liser au mieux et avec le minimun de berte, cet antigène, bour l’établis¬ sement et le dépelobbement de son immunité et Bour la broduction de l’antitoxine». Au tapioca qui, en premier lieu, avait été choisi après de nom¬ breuses expériences pour accroitre l’immunité antitoxique, chez l’ani¬ mal, est venue s’adioindre toute une série de substances capables de se comporter d’une manière analogue. C’est ainsi que Glenny, dans des fravaux poursuivis avec ses collaborateurs à partir de 1926, utilise dans différentés conditions, l’alun (72). Dans divers essais. S Schmidt (de Copenhague) et d’autres expérimentateurs se sont servis d’hydroxyde d’aluminjum (73); Holt emploie le phosphate d’alumine, etc.. Pour Glenny « l’accroissement de l’efficacité antigénique de l’anatoxine addi¬ tionnée d’alun est -dù à l’absorption et à l’élimination lentes qui résul¬ tent de cette addifion » (74). En réalité, comme nous l’avons montré en conclusion de plusieurs mémoires (7s), si l’absorption et l’élimination lentes de l’antigène addi¬ tionné de substances stimulantes, jouent un rôle daps l’accroissement de l’immunité, d’autres phénomènes interviennent, principalement ceux relevant de l’inflammation locale, ainsi que pous l’avons rappelé ci¬ dessus (76). Quoi qu’il en soit, le princibe des sabstances adiuvantes et stinu¬ lantes de l’immuuité que l’observation et l’expérimentation nous avaient permis d’établir est à la base d’un certain nombre de progrès réalisés dans le domaine de l’immunisation au cours de ces trente dernières années. Appliqué aux vaccinations anatoxiques, le principe des substances adiuvantes permet d’obtenir un renforcement de l’immunité due aux anatoxines, laquelle dépend essentiellement de leur valeur antigène intrinsque. Il en est ainsi encore, lorsque l’on a recours aux «oaccinations asso¬ ciées » qui, elles aussi, reposent directement sur le même principe des substances adiuvantes et stimulantes de l’immunité. (72) A. T. Glenny. C. C. Pope, H. Waddington et U. Wallace, Journ, o1 Path. ad Bact, 1926, 19, p. 31. (73) Voir S. Schmidt. Archiv. fur die Ges. Virusforch, 1939, 1, p. 215. (74) A. T. Glepny et Mollie Bar, Journ, 91 PatR, and Baet, 1931, 34, p. 148, id, p. 275. (75) G. Ramon,. Remue d’Immunologie, 1938, 4. p. J. Voir différents mémoires : G. Ramon et Collab, 1937, 3, p. 193, D. 202, p. 285, p. 389, p. 505. (76) C’est ainsi que dans le cas où la substance stimulante ajoutée à l’anatoxine est constituée par une suspension microbienne, par exemple le vaccin « figuré antitypho paratyphoidique (TA B.) », on ue saurait invoquer le phénomène physique purement mecanique de la resorption lente, mais plutot les phenomènes biologiques de l’inflammation jocaie 36 DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS spécificité des anatoxines On pouvait craindre que l’action du formol et de la chaleur qui fait disparaitre entièrement la nocivité des toxines, n’altérât les qualités antigènes des anatoxines. Il n’en est rien, on a pu le constater à l’occa¬ sion de l’analyse que nous venons de faire des propriétés de l’anatoxine. Celle-ci se révèle aussi spécifique dans son pouvoir floculant, dans son Douvoir saturant vis-à-vis de l’antitoxine que la toxine elle-même. Comme nous allons le préciser en étudiant le mécanisme de l’im¬ munité engendrée par l’anatoxine, l’antitoxine dont celle-ci provoque la formation i vivo neutralise spécifiquement la toxine la blus active, dans les mêmes conditiops que l’antitoxine provenant de l’hyperimmunisa¬ tion d’un animal au moyen de la toxine non transformée en anatoxine. Ainsi, bien que ne possédant plus la moindre trace de la nocivité si spéciale à la toxine, d'où elle émane, l'anatoxine est cependant rigou- reusement spécifique. Le mode d’action de l’anatoxipe et le mécanisme de l’immunité qu’elte provoque Si Pasteur a érigé en principe que les virus-vaccins tels que ceux du choléra des poules et de la fièvre charbonneuse du mouton agissent « en provoquant la maladie bénigne qui préserve de la maladie mor¬ telle », on a beaucoup discuté et on discute toujours sur le mécanisme intime de l’établissement de l’état réfractaire dans ces conditions. Pasteur, on le sait, dès sa géniale découverte des virus-vaccins, ex¬ pliqua leur action par la théorie dite de l’ébaisement. « Comment ne pas être porté à croire, écrivait-il, que par la culture, dans la poule, du vi¬ rus atténué (virus-vaccin du choléra des poules), on place le corps de celle-ci dans l’état de ce liquide (bouillon de culture) filtré qui ne peut cultiver le microbe (par suite de l’ébpuisement des matériaux nutritifs) » Cette théorie de l’épuisement de Pasteur devait être rapidement aban¬ donnée. Chauveau, dans le même temps, a soutenu, avec une prescience remarquable, l’hypothèse que les virus-vaccins, par exemple celui du charbon, agissent non pas en épuisant le terrain, mais bien en y laissant des matières nuisibles à la proliff́ration de la bactéridie charbonneuse. D’après Chauveau: « La bactéridie se comporte dans l’organisme des moutons algériens, non pas comme si elle était privée des principes né¬ cessaires à la vie bactéridienne, mais plutôt comme si c’était un milieu rendu impropre à cette dernière par la présence de substances nuisibles. En très petit nombre, les bactérilies sont arrêtées par l’influence inhibi¬ trice de ces substances. Très nombreuses, au contraire, elles peuvent surmonter bien plus facilement cet obstacle à leur prolifération ». Cette théorie était appelée à l’époque, théorie du contreboisou (72). C'était en somme la première idée des anticorbs. (77) Consulter :" le charbon des animaux et de l'homme' par J. Straus Publi cation du progrès Médical Paris 1887 40 LA LUITTE PRÉMENTVT CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES Depuis lors, deux grandes théories se sont affrontées, au cours des années, en ce qui concerne le mécanisme d’action des virus-vaccins et des vaccins dits bactériens en général. Selon l’une d’elles, la theorie hu¬ morale, l’orgapisme vacciné élabore des éléments, dénommés anticorbs (sensibilisatrices) qui, avec l’aide d’autres principes, ceux-là « nor¬ maux » (l’alexine), peuvent exercer leur pouvoir bactéricide directement sur les microbes (Jules Bordet). Selon l’autre, la théorie cellulaire, le rôle prépondérant, sinon unique, revient à certaines cellules de l’organisme : phagocytes de Metchnikoff, cellules réceptives de Besredka, ces dernìres sont immunisées par le vaccin, par exemple le virus-vaccin charbonneux immunise le revêtement cutané, le vaccin antityphoidique immunise les cellules de la muqueuse intestinale. A la faveur des barrières ainsi créées. l’organisme serait mis à l’abri de l’infection. Le débat reste donc ouvert au sujet de la façon précise dont les virus vaccins et les vaccins bactériens copfèrent l’état réfractaire. Il n’en va bas de même en ce qui concerne le mode d’aclion de l’anatoxine et le mécanisme de l’immunité au’elle crée. L’anatoxine, en effet, qu’il s’agisse de l’apatoxine diphtérique de l’anatoxine tétanique, d’une autre anatoxine encore, détezmixe la B2o¬ duction, danus l’organisme qui l’a recue, de l’anliloxine sbécifique, pro¬ duction plus ou moins importante, en rapport avec la valeur antigène intrinsèque plus ou moins grande de l’anatoxine utilisée. Cette antitoxine, substance de nature protéique qui est véhiculée par le sang et que l’on retrouve en solution daps le sérum sanguin, est capable de neutraliser le poison microbien correspondant, aussi bien dans l’organisme vacciné, qu’in vitro, dans le verre à expériences dans lcquel on mélange le séruin du sujet immunisé et la toxine microbienne obtenue artificiellement dans le milieu de culture. La toxine ainsi neu¬ tralisée par l’antitoxine se trouve mise hors d’état de nuire. Cette explication préalable permet de prévoir ce qui adviendra lors¬ que l’organisme vacciné par l’anatoxine entrera en lutte avec le germe ipfectieux. Prenons l’exemple de la diphtérie et vovons d’abord ce qut se passe ches un sujet nou vacciué frabbé bar cette maladie. Le bacille de la diphtérie infectant la gorge du malade se multiplie à la surface de la muqucuse, il y élaboré sa toxine qui, en vertu de ses propriétés nécro¬ santes, provoque localement une mortification des tissus, fournissant ainsi un terrain blus favorable encore à la culture des germes et à la pro¬ duction, en plus grande quantité, du poison microbien. Celui-ci pénêtre alors dans l’organisme, où il va accomplir son œuvre néfaste d’intoxica¬ tion, il y pénêtre seul, car le germe reste, lui, au seuil de l’organisme. « bour ainsi dire en dehors du corps », comme l’ont montré, pour la bremnière fois. E. Roux et A. Versin dans leur étude magistrale de la diphtérie (1888). Il en va tout autrement chez le sutiet immunisé au moyen de l’ana¬ tovine (78). Si le degré d’immunité est relativement faible, le bacille (78) G. Ramou. Robert Debré et P. Thiroloix. Comptes rendus soc, de Biologie 1930, 105, p. 745 et p. 748. Voir également notre étude expérimentale complête du mode d’action de l’immunité créée par l’anatoxine diphtérique : G. Ramon, Robert Debré et G. Sée. Repuc d’Inmnunologie, 1935, 1. D. 85. DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 41 diphtérique peut végéter sur la muqueuse infectée, mais la toxine pro¬ duite qui est peu à peu neutralisée i sitt par l’antitoxine en circula¬ tion au niveau des tissus sous-jacents, ne peut entrainer que des désor¬ dres locaux légers et non une mortification véritable de ces tissus. En tout cas, la toxine rencontrant la barrière antitoxique ne pénétrera pas plus avant dans l’organisme, l’intoxication de celui-ci sera évitée. Le germe ne pouvant s’implanter et pulluler davantage, les effets locaux de la toxi-infection disparaitront, certains moyens de défense naturelle (phagocytes, etc..) entrant d’ailleurs en jeu, sozs le couert de l’anti¬ loxine, pour effacer les dernières traces de l’infection toxique. Ces divers aspects de la lutte entre l’organisme, partiellement immunisé et l’infection, sont reproduits dans le tableau clinique que l’on observe partois chez des sujets vaccinés dont l’immunité est tout juste à la limite de l’efficacite. Ches le sutjet vacciné Bossédant un degré d’immunilé éleue, en cas de contamination par le bacille diphtérique; les tissus tout imprégnés d’antitoxine sont entièrement réfractaires à l’implantation et à la pullu¬ lation du germe de la maladie; aucun indice apparent ne vient signaler la réalité de la contamination et de l’infection, et seuls un prélèvement et un examen bactériologique pourront permetre de se rendre compte que l’on a affaire à un porteur « sain » de germes diphtériques, Tout se passe comme s’il s’agissait de bacilles saprophytes, ne possédant aucune propriété pathogène; la grotectiox 2ar l’anlitoxine résenle, un taux convenable, dans les humeurs de l’organisme vacciné est donc totale. Aipsi apparait, ici encore, l’intérêt qu’il y a à obtenir chez les su¬ jets vaccinés, un taux abondant d’antitoxine et, par conséquent, une immunité solide et une protection parfaitement efficace, en emplovant des anatoxines de valeur antigène élevée et en usant des substances ad¬ juvantes et stimulantes, et tout spécialement du procédé des vaccinatons associées. Le rôle primordial dans le mécanisme de l’immunité antidiphtéri¬ que revient, en fait à l’antitoxine spécifique dont la vaccination par l’ana¬ toxine diphtérique provoque l’élaboration dans l’organisme de l’individu vacciné. Il en est de même du mécanisme de l’immunité conférée par les autres anatoxines : tétanique, botulique, staphylococcique, etc.. Par anticipation, nous dirons qu’il en est encore de même du méca¬ nisme de l’immunité provoquée par des vaccins préparés à partir d’ul¬ travirus soumis à l’action du formol et de la chaleur et transformés ainsi en « axaoirus » tels, par exemple, l’anavirus de la vaccine, l’anavirus aphteux. De même que l’immupité antidiphtérique (ou antitétanique) confé¬ rée par l’apatoxine diphtérique (ou tétapique) est fonction de l’anti¬ toxine spécifique ainsi développée, de mêmé l’immunité obtenue contre le virus de la vaccine ou contre le virus aphteux, à l’aide de l’anavirus Correspondant est caractérisée par la présence, dans les humeurs des ani¬ maux vaccinés, d’antivirus capables de neutraliser i v47o comme 17 vitro, l’ultravirus homologue. LA LUTIL PREVENTIYE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES 42 Nous avons montré, en nous aidant de faits expérimentaux indiscu¬ tables (70), la similitude du mode d’action des apavirus et du mécanisme de l’immunité qu’ils procurent à l’égard des ultravirus d’une part et. d’autre part, du mode d’action des anatoxines et de l’immunité antitoxi¬ que qu’elles provoquent contre les toxi-infections diphtérique, tétanique II. — CONSEQUENCES D’ORDRE THÉORIQUE DE LA DÉCOUVERTE DU PRINCIPE DES ANATOXINES La découverte de l’anatoxine abbortait avec elle des notions nou¬ velles en immunologie. En effet l’idée, d’abord, la création ensuite, d’un dérivé anatoxique issu de la toxine diphtérique, doué d’une innocuité sbécifique absolue. capable de donner lieu, chez l’homme comme chez l’animal, au déve¬ loppement d’une immunité solide et à l’élaboration en quantité relative¬ ment grande de l’antitoxine, allaient à l’encontre des opinions et des théories qui, jusque la, avaient cours. Antérieurement à la mise en évi¬ dence de l’anatoxine, n’était-il pas très généralement admis que la pro¬ duction abondante d’antitoxine (sérum antidiphtérique) exige l’iniection aux animaux d’une toxine forte, comme l’on disait alors (80), c’est-à-dire d’une toxine riche en poison spécifique et l’activité immunisante d’une toxine n’était-elle pas exprimée, jusqu’à la mise au point, pour cet objet de la méthode de floculation (1923) en fonction de son pouvoir toxique : Fhrlich lui-même était d’avis que les toxines naturellement ou ar¬ tificiellement privées d’une partie de leur toxicité et qu’il supposait contenir, comme nous l’avons indiqué, des toxones, des toxoides, etc... entrainent seulement, chez les animaux auxquels on les iniecte en plus ou moins grande quantité, une « base d’immunité ». Pour une produc¬ tion abondante d’antitoxine, il fallait, d’après l’Ecole d’Ehrlich, iniec¬ ter un poison non altéré dans sa toxicité (8T). Carl Bruck s’inspirant, lui aussi, des conceptions d’Ehrlich, préten dait que la genèse de l’antitoxine exige une excitation de l’organisme que seuls peuvent déclencher les groubements toxobhores de la toxine. Il paraissait alors impossible et paradoxal à la fois qu’une toxine qui a perdu fout pouvoir toxique, puisse engendrer ix vivo, la formation d’antitoxine elle-même capable de neutraliser le poison spécifique. 11 en est cebendant bien ainsi en ce qui concerne l’anatoxine. Insistons encore sur le fait que la toxine renfermant les hypothé¬ tiques « toxoides » d’Ehrlich et que l’on n’avait pas réussi à débarrasser (79) G. Ramon, P. Boquet. R. Richou. Comptes rendus Acad, des sciences, 1942 214. D. 325; G. Ramon, H. Bénard. P. Boquet. R. Richou et Mlles Tissier et Ratner. Bull Acad, de Médecine, 1942, 126, p. 314 : G. Ramon et collab. Bull., Acad, de Médecine, 1942. 126, p. 480: G. Ramon. Bull. Acad., de Médecine, 1945, n° 14, p. 8 (80) Par exemplé, en France comine dans divers pays, on commençait, en général l’immunisation des chevaux producteurs de sérum antidiphtérique par des toxines « modi fiées» à l’aide du liquide de Gram ou par des mélanges composés extemporanément de toxine et d’antitoxine et l’on poursuivait l’hyperimmunisation par des toxines avant un pouvoir toxique aussi fort que possible (31) opitz, Jahrb. Jur Kinderhetlktunde, 1921, 96, p, 19. DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCNS 43 entièrement de sa nocivité sans en altérer profondément le pouvoir im¬ munisant (82) n’avait pu, en conséquence, être utilisée pour la vaccina¬ tion de l’espèce humaine, ainsi qu’en témoignent, par exemple, les échecs répétés de Loevenstein avec son « toxoide diphtérique» qu’il lul avait été impossible de rendre inoffensif, avec son « toxoide tétanique : qui ne possédait, même injecté à grosses doses répétées (5. 1o centimè¬ tres cubes) aucun pouvoir immunisant pour l’homme. Les toxines modifiées qu’emplovait Glenny (pour l’immunisation préalable des chevaux producteurs de sérum antidiphtérique ou dans ses expériences chez les petits animaux de laboratoire) avant la publication de nos recherches sur la floculation et les anatoxines, possédaient encore nous l’avons vu, une plus ou moins grande toxicité D’autre part, lors des premières tentatives de vaccination antidiph¬ térique effectuées à partir de ro1x par Behring en Allemagne et, un peu plus tard, par William Park aux Etats-Unis (83), à l’aide de mé¬ langes de toxine et d’antitoxine diphtériques (mélanges T.A.), il était également admis que, pour faire preuve de qualités immunisantes, ces mélanges doivent renfermer une « trace » de toxicité (84). Le procéde proposé par Behring consistait donc à pratiquer une série d’iniections de mélanges de toxine et d’antitoxine diphtériques de plus en plus toxiques. ce qui, disons-le en passant, n’était pas sans danger. Les mélanges utili¬ sés par William Park devaient coptenir un reste sufisant de toxicite pour entrainer des paralysies chez le cobave et, à dose plus forte, la mort des animaux. Certains aîteurs prétendaient même que c’est ce ré¬ sidu toxique qui, en provoquant une intoxication spécifique légère, est responsable de l’immunité, assez faible d’ailleurs, qui peut s’installer dans ces conditions. Dans les essais que l’on a faits, d’un autre côté, pour employer, en guise de vaccins antidiphtériques, des mélanges « neutres » de toxine et d’antitoxine ou renfermant un excès de cette dernière (mélanges « sur¬ neutralisés » de lules Renault et de P. LévY, de Loevenstein, etc.). on a soutenu que ces mélanges sont dissociés dans l’organisme: cest disait-on, la toxine ainsi libérée peu à peu du mélange qui, sous le couvert de l’antitoxine, elle aussi libérée, joue le rôle d’agent immunisant. Dans la théorie qui suppose la nécessité pour l’installation de l’im¬ munité antitoxique, d’une action toxique plus ou moins forte, on re¬ trouve l’influence de la doctnne bastoxenne, suivant laquelle l’état ré¬ fractaire dù aux virus-vaccins s’acquiert au prix d’une atteinte bénigne de la maladie provoquée par des germes vivants de virulence atténuée (82) D’après E.G.D. Murray (Mc Gil University. Montréal), la définition originale du « toxoide », par Ehrlich, est la suivante : une forme dégénérative de la toxine dans laquelle le groupe toxophore a été atteint: le pouvoir de se combiner à l’antitosine maintenu; le pouvoir immunisant, perdu. Par contre, indique Murray : l’anatorine de Ramon est tmmunisante (cité par Greenberg et ses associès. Jourr, 01 Immunolooy, 1948 54, p. 221). (83) E. Behring, Deutsct. Med. Voch, 1913, p. 813 — W. Park, The Journ, or the Am. Med. Assoc., 1922, p. 1584 (84) Voir à cet egard Bachmann et de La Barrera. Comptes rendus soc de Biotogie 1922, D. 1044: Rohmer et Lewy. Gorter et Ten Bokkel Hunnink. Conores des Pédidtres de lanque française, 1922. On trouvera la relation de ces faits et de ces citations dans notre premier mémoire sur la question : Annales Inst. Pasteur, 1924, 38, p. 1. 44 LA LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES NEECTIEUSES sans doute, mais qui sont encore doués d’un pouvoir pathogène plus ou moins élevé. Contrairement à cette doctrine, contrairement aux idées répandues jusqu’alors, en France comme à l’étranger, en matière d’immunisation antitoxique, l’anatoxine privée de germes microbiens et dépourvue de tout pouvoir pathogène se révélait cependapt capable, bien que le phé¬ nomène de transformation de la toxine en anatoxine soit irréversible 1% vito comme ix vivo, de conférer, sans risque aucun, une immunité solide et de déterminer une production d’antitoxine aussi abondante que celle engendrée par la toxine elle-même (Ss), sous la condition de possé¬ der une valeur antigène intrinsèque suffisante, facilement appréciable par la méthode de floculation. L’ensemble des Brobriétés bien définies de l’anatoxinz, son mode d’action lui conférant une existence brobre, en faisait en 1923 une subs¬ tance nouvelle. C’est ce qu’a confirmé S Schmidt savant spécialement qualifié qui s’est livré, depuis 1922, à des recherches des plus remarquables sur les toxines, les anatoxines, les antitoxines En 1920, il écrivait: « PO4r nous, l’anatoxine est un dérivé nouveau de la toxine qui bossède dessbro¬ briétés caractéristiques, différentes de celles de la toxine (86). Ainsi était pleinement justifié et mérité, le pom d’anatoxine qui lui était donné dès sa naissance, en accord avec Emile Roux. Etait-il ax bar¬ rainage blus qualifié que celui de l’auteur de la découverte de la toxine dibhtérique et de son étude exbérimentale, que celui du grand pastorien qui s’est consacré pendant de si longues années à la lutte, dans la prati¬ que, contre la diphtérie L’anatoxine diohtnioue, fybe des autres anatoxines, diff́rait donc dans son bvincibe, dans ses brobriétés, dans son mode d’action. dans le mécanismne dé l’immunilé au’élle confère, des antigènes jusque la utilisés en immunologie exbérimentale ou Aatique et notamment des virus-vaccins de lenner et Pasteur. Les anatoxines xebrésentaient, somme toudte, ex 1923, la « réalisa¬ lion » concrête de ces sabstances chimiques, solubles, dosables, brivées de vie, incabables de se rebrpduire et de varier dans leurs brobriétés que Pasteur, trente-cina années aubaravant, abbelait de tous ses uœux. que ses discibles recherchaient bour les substituer aux vtrus-vaccins vivants, instables, dont la virulence seulement atténuée bouxait ête exalée dans certaines conditions, d’ox leurs incongémients out boutvait être affaiblie outre mesure, d’oà leur manque d’efficacilé. (85) Ce sNe nous avions démontré dans notre mémoire fondamental sur l’anatoxine diphtérique, Annales Inst. Pasteur, 1924, 38. p. 1. (86) S. Schmidt, Annales Inst. Pasteur, 1930, 45, p. 354. DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 45 IV. — LES APPLICATIONS PRATIQUES DU PRINCIPE DES ANA¬ TOXINES ET DES VACCINS ANAVIRULENTS Important du point de vue des doctrines de l’immunité en général et de l’immunité antitoxique en particulier, le principe des anatoxines ne l’était pas moins du point de vue expérimental et du point de vue pra¬ tique. Dans le domaine exérimental, les anatoxines apportaient aux chercheurs les plus précieuses commodités pour les études immunologi¬ ques de toutes sortes. Elles furent à l’origine d’innombrables travaux qui, sans elles, n’auraient pu être entrepris; elles rendirent ainsi les plus grands services aux expérimentateurs. N’est-ce pas, pour les immuno¬ logistes, l’antigène idéal que celui qui confère l’immunité protectrice sans exercer aucune action pathogène2 Dans le domaine gratique, le principe des anatoxines allait recevoir de nombreuses applicâtions. Il conduisait, en effet, à la création, par d’autres ou par nous-même de nouveaux vaccins et de nouvelles mé¬ thodes d’immunisation utilisables chez l’homme et chez les animaux domestiques. En peu d’années, on a assisté à la rénovation des moyens spécifiques de prévention de certaines maladies infectieuses, ainsi qu’à l’emploi de plus en plus étendu de ces moyens. Dans notrescommunication princeps du ro décembre 1923 qui fai¬ sait connaitre l’anatoxine diphtérique, nous indiquions, rappelons-le, que le même processus de transformation qui permet de l’obtenir est appli¬ cable à d’autres ztoxines microbiennes, notamment à la toxine tétanique qui, traitée elle-même par le formol et la chaleur, donne naissance à l’anatoxine tétanique (87). Nous montrions, peu après, que des poisons d’origine animale, par exemple les venips, des toxalbumines végétales telles que la ricine ou l’abrine, peuvent comme les toxines microbiennes et par le même pro¬ cédé être rendus inoffensifs tout en conservant intégralement leurs pro¬ priétés antigènes (88), ils sont ainsi transformés resbectivement en ana¬ verun, en quaricine, ana-abpine, etc... Il était successivement obtenu, selon une technique analogue. — les anatoxines corresbondant aux toxines élaborces bar les germes de la gaugrène gazeuse (Weinberg). — l’anatoxine botulique (Weinberg. Legroux). — l’anatoxine dysentérique (89). — l’anatoxine sfabhylococcique (00). — l’anatoxine du strebtocoque scarlatineux (O1). (87) G. Ramon. Comptes rendus Acad, des Sciences, 1923, 171, p. 1338. (88) G. Ramon. Comptes rendus Acad. des Sciences, 1924, 178, p. 1436. (89) Avec J. Dumas et Said-Bilal Golem. Comptes rendus Acad, des Sciences, 1925. 181, p. 19 (90) Avec A. Bocage. R. Richou et P. Mercier. La Presse Médicale, n° 57, 17 juillet 1935 (91) Avec Robert Debré, Comptes rendus Acad. des Sctences, 1929, 189, p. 64. LA LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADITS INECHEUSES 46 A partir de ces anatoxines il était établi et utilisé des méthodes de vaccination et des brocédes thérabeutiques parmi lesquels: — la vaccination contre la dibhtérie. — la vaccination contre le tétanos. — la vaccination contre le botulisme. — les paccinations associées contre la dibhlérie, le létanos, les affections Aybloides, la coqueluche, etc. les séro-anatoxiacinations anfidibhtérique, anfilétanique, anfibotu¬ lique. — la séro-anatoxithérabie Shécifique bour le fraitement de la dibhlépie. du tétanos, du botadlisme en épolution. — les lechniques de broduclion des séruns antitoxiques. — etc.. Les recherches initiales et leurs premiers résultats qui montraient tout l’intérêt des anatoxines en Immunologie, donnaient immédiatement l’essor, en France et à l’étranger, à un très grand pombre d’investiga¬ tions portant sur l’influence combinée du formol et de la chaleur (et aussi d’autres agents chimiques ou physiques) sur les antigènes les plus variés. C’est ainsi que le bxincibe de la transformation des foxines ex anatoxines devait être appliqué à l’obtention de vaccins anatoxiques et anavirulents. d’anavaccins, etc.,, inoffensifs et doucs néanmoins du bouvoiz immu¬ aisant. Une telle extension de la méthode des anatoxines est de règle en Im¬ munologie. Lorsqu’une méthode est bonne, aimait à répéter Emile Roux, collaborateur, disciple et continuateur de Pasteur, elle s’impose d’elle¬ même (02) et elle prend progressivement un développement que son auteur ne saurait prévoir Ainsi furent préparés et recurent un usage plus ou moins impor¬ tant au cours des années, pour l’immunisation préventive contre diver¬ ses maladies de l’homme et des animaux domestiques. — les ana-endotoxines des bacilles tybhiques et baratybhiques, de Gras¬ set, utilisés par lui avec succès en Afrique du Sud notamment, pour la vaccination antityphoparatyphoidique de l’homme (93). — les anavaccins obtenus à l’aide de susbension des germes tybhiques et garatybhiques, simplement formolés et chauffés (94). l’ananacin et l’ana-endotoxine du bacille de la coqueluche (95). employés dans divers pays, notamment au Canada, aux Etats-Unis. en France. 92) Sans propagande exagérée, sans réclame tapageuse, sans « conférence de presse », comme c’est trop souvent le cas de nos jours. 193) E. Grasset. Résultats d’ensemble. « La Presse Médicale », 1939, n° 95-96, p. 1653. (94) Voir, par exemple: G. Ramon. A. Boivin et collab. Comptes rendus Soc, de Biologie, 1941, 135, p. 12, D. 184. Bul. Acad, de Medecine, 1941, 125, p. 28 (95) G. Ramon. Robert Debre. R. Sohier. R. Richou. La Presse Medicale, 1948, n° 16. 771 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOVEN DES VACCINS l’anatubherculine de. Petragpapi (constituée par des bacilles tibercu¬ leux « tués » par le formol). Ce vaccin contre la tuberculose est de¬ puis quelque temps déjà soumis à l’expérimentation en Italie, en particulier par Salvioli et ses collaborateurs, etc.. l’anavaccin contre le choléra, de Puntoni et de Suarez Peregrin. les oaccins ana'oxiques dirigés contre le charbon symbtomalioue des bouidés (Leclaipche et Vallée) et coptre certains germes de la gangrène gazeuse (anaciltures de W’einberg). Dans la note faisant connaitre, en 192s, leurs recherches à ce sujet. Leclainche et Vallée s’cxprimaient aipsi : « Les remarquables travaux de Ramon sur les anatoxines offrent des voies nouvelles en permettant d’immuni¬ ser, sans réaction fâcheuse aucune, l’homme et certaines espèces ani¬ males, contre les poisons microbiens susceptibles d’effets mortels et redoutables » (96). les anqvaccins contre les brucelloses animales (Van Saceghem. Da¬ vesne. Kress, etc..) additionnés ou non de substances adiuvantes et stimulantes de l’immunité, alun, hydroxyde d’alumine, corbs gras. etc..., qui ont au moins l’avantage sur les virus-vaccins vivants de ne créer ni infection, ni source de contagiop éventuelle par les porteurs de germes. le vaccin formolé contre le vouget du borc d’abord préconisé par Boyer, Placidi. Muromcey. Maidlan, et Plus récemment Traub (07) puis Hausmann en ont proposé une nouvelle formule constituée par des cultures de souches spéciales du bacille du rouget en milieu approprié; ces cultures sont formolées et adsorbées sur l’hydroxyde d’alumine. La brobhylavie sbécifique de différentes maladies ques des nltra¬ virus devait largement profiter, elle aussi, de l’application du brincipe des anatoxines. Ce principe fut, en effet, étendu successivement à l’obtention de vaccins parmi lesquels: — le vaccin qnapirulent contre le tyohus épidémique copstitué par des ricketsies formolées (Zinsser. Castaneda, Durand et Giroud. COx. etc...) qui en raison de son innocuité a été substitué aux virus-vac¬ cins « vivants » du type pastorien pour la vaccination des troupes alliées appelées à opérer en Afrique du Nord, durant la deuxième guerre mondiale, les virus-vacins de ce type avant antérieurement causé des accidents, notamment chez les Européens séjournant de¬ puis peu dans ces contrées¬ le vaccin auavirulent contre la gribbe (influenza) préparé à partir du virus de cette maladie cultivé sur membrape allantoide d’em¬ brvon de poulet puis inactivé par le formol. Des essais ont été eftfec¬ tués à la fin de la deuxième guerre mondiale daps l’Armée améri¬ (96) E. Leclainche et H. Vallée. Comptes rendus Soc, de Biotogie, 1925, 92. p. 1273. (97) Traub. Monatshette tir Vet. Med, 1947, n° 10. LA UTTE PRÉVENTIE CONTRE LES MALADES NECHEUSES 33 caine Ils sont poursuivis aux Etats-Unis en particulier, par Salk et ses collaborateurs (98) qui ajoutent à ce vaccin des substances adiu¬ vantes et stimulantes de l’immunité. le vaccin anaoivulent contre la boliomyélite préparé avec les trois types du virus poliomvélitique, cultivés sur un milieu à base de tissu rénal de singe et inactivés au moyen du formol. Ce vaccin est large¬ ment expérimenté actuellement aux Etats-Unis par Salk et ses associés (99). Ainsi que l’a rappele recemment Robert Debré (00 bis), le procédé de Salk « est inspiré des notions mises en évidence par G. Bamon, lors de ses travaux sur la vaccination contre la diphtérie et contre le tétanos. G. Ramon a proposé l’emploi du formol pour inactiver les virus sans leur enlever le pouvoir de vacciner. Il a fait connaitre que l’introduction avec le vaccin iniecté sous la peau de substances inertes qui provoquent une légère iritation locale constitue un adiuvant de l’immunité et enfin il a moptré qu’en renouvelant à une date bien choisie, l’injection de vaccin (iniection de rappel) on obtenait une élévation très rapide et très marquée de la teneur des humeurs en anticorps ». — le paccix anavirulent antioariolique, obtenu pour la première fois, en 1030, par Bussel et Mayzner en appliquant à l’ultravirus de la vac¬ cine, la méthode fondamentale de préparation des anatoxines et des vaccins anavirulents. « Nous avons procédé — écrivaient en 1030 Bussel et Mayzner — à une série d’expériences afin d’établir si le vac¬ cin obtenu par la méthode de Ramon conserve ses propriétés antigé¬ niques. Ce vaccin était préparé comme l’anatoxine diphtérique » (190). En 1942, nous avons nous-même utilisé cet anavaccin pour la production chez le cheval d’un sérum anti-vaccine (Tor). Actuelle¬ ment nous poursuivons nos recherches, notre but étant l’obtention d’un anavaccin ne contenant que du virus inactivé, bactériologiquement pur, pouvant être injecté impunément dans le tissu conjonctif sous¬ cutané et capable de conférer l’immunité à l’animal et à l’homme. Nous pensons éviter ainsi, chez ce dernier, certaines complications de la vaccination antivariolique telles que les infections surajoutées, la vaccine généralisée, l’encéphalite, etc, qui pour être exceptionnelles n’en sont pas moins préoccupantes. Déjà, en partant du virus de la vaccine cultivé sur des milieux à base de liquide amniotique et de lambeaux de peau de fœetus de bovidés (192), nous avons réussi à préparer un anavaccin, lequel s’est montré capable de provoquer, chez le lapin. l’immunité caractérisée, d’une part, par la présence dans le sérum de (96) JE Salk, HE Pearson PN Brown T Francis Jr Proc Soc expo Biol New York 1944 55 p.106 Am J. Hyg. 1945 42 p.307 JE Salk The Journ Amer med Assoc 1953 151 p;1169 (99) Voir JE Salk et collab The Journ Amer med Assoc 1953 151 p.1081 1098 JE Salk Troisi-me Conférence internationale de la Poliomyélite Rome 1954 (99 bis) Robert Debré, Revue de Paris, 1955, 63 p.136 (100) Bussel et Mayzner Comptes rendus Soc de Biologie 1930 100 p.411 (101) G. Ramon R. Richou et P. Boquet Comptes rendus acad des Sciences 1942 214 p.925 G; Ramon H; Bénard P./ Boquet R. Richou Bull Acad de Médecine 1942 126 p.314 (102) G. Ramon R. Richou JP Thiery L. et L Salomon Comptes rendus Acad des Sciences 1953 236 p.2023 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DE VACCINS 49 cet animal d'anticorps (antivirus) neutralisant le virus de la vaccine et d'autre part par l'absence de toute réaction à l'épreuve virulente chez les animaux ainsi vaccinés (103à Ainsi que nous en avons émis l'idée à cet anavaccin pourront être associés d'autres anavaccins préparés d'après la même méthode en par ticulier le vaccin antipoliomyélite et cela, avons nous dit avec toutes les commodités et tout le bénéfice que procurent depuis de nombreuses an nées et dans le monde entier l'association par exemple de l'anatoxine diphtérique et de l'anatoxine tétanique pour la prévention simultanée de la diphtérie et du tétanos - le vaccin antirabique anavirulent totalement inoffesibf mis au point dès 1926 par Plantureux (104à sur la base du principe des anatoxines et utilisés dans duifférents pays pour la prévention de la rage chez le chien et aussi pour le traitement de la rage après morsure chez l'hom- me au lieu du virus vaccin pastorien (Konieff et Ramsiune Van Stockum etc) En Algérie depuis 1929 la vaccination préventive du chien est pra- tiquée à l'aide de ce vaccin et au total 185. 300 chiens ont été ainsi vacci nés. Sur ce nombre relativement important de chiens vaccinés aucun accident paralytique n'a été constaté qce qui montre la parfaite innocuité du vaccin le virus qu'il contient ayant bien été inactivé par le formol et transformé ainsi en anavirus. quand à l'efficacité du vaccin, elle a été affir mée par le fait qu'il n'a été observé que 4 échecs et 3 insuccès apparents (104 bis) En Indochine, c'est le même vaccni qui a été utilisé auquel Jacotot ajoute des substances adjuvantes de l'immunité (hydroxyde d'aluminium latex d'Hévéa). il a donné toutes les preuves de son innocuité et de son efficacité pour procurer l'immunité antirabique préventive au chien (105) - le vaccin anti-aphteux anavirulent qui est constitué par le virus spé cifique activé par le formol a eu son point de départ dans les recher ches initiales de Vallée, Carré et Rinjard (1926-1929) recherches qui selon Waldmann "s'inspiraient manifestement des travaux de ra mon sur l'anatoxine diphtérique" (106) Mettant à profit d'une part les premières expériences de Vallée et ses associés et d'autre part les essais de Sven Schmidt sur l'adsorption des toxines des anatoxines et des virus de la peste aviaire et de la fièvre aphteuse sur l'hydroxyde d'aluminium. Waldmann lui-même réussit à mettre au point le vaccin anti-aphteux formolé et adsorbé tel qu'on l'utilise maintenant. (103à G; Ramon R. Richou R Kourilsky JP Thiery LL Salomon Comptes rendus Acad des Sciences séance du 3 janvier 1955 (104à E Plantureux Comptes rendus Acad des Sciences 1926 182 p.1578 (104 bis) Consulter les rapports annuels de Ed Sergent dans Archives Institut Pasteur d'Algérie (105) Pour tous renseignements complémentaires, voir notre mémoire récent: G. Ramon, Bull Off internat des Epizooties, 1954, 41, p. 1011 (106) O; Waldmann, IV Congrès de Path; comparée Rome 1939, Deutsch Tier Woch 1938 46 p.569 LA LUTTE PRVENTIYE CONTRE LES MALRDIE TUFETLOSE 39 le vaccin anaviruleut contre la beste bovine dù aux recherches pre¬ mières de Curasson et Delpy (ro2s) (197) puis amélioré par ces au¬ teurs et par d’autres (dont lacotot) est composé le plus souvent de pulpes d’organes (rate, ganglions, parenchyme pulmonaire..) pro¬ venant d’apimaux infectés (veaux). Le virus que renferment ces orga¬ nes est inactivé par l’action du formol. On ajoute souvent à la pulpe formolée, pour accroitre son pouvoir immunisant, une substance adiu¬ vante et stimulante de l’immunité: lanoline (Le Roux), saponine (Del¬ Dy), gel d’alumine. (Jacotot). Delpy a comparé l’anavirus pestique inactivé et les virus-vaccins de différentes sortes contre la peste bovi¬ ne, il résume ainsi son opinion: les vaccins inactivés préparés en tenant compte des progrès réalisés depuis leur découverte, ne sont pas plus couteux que les virus-vaccins. Ils présentent l’énorme avantage de pouvoir être préparés dès le début d’une épizootie et de permettre l’arrêt presque immédiat de la mortalité. En raison de leur innocuité. ils sont bien acceptés. De plus, la durée de l’immunité qu’ils procurent est relativement grande (108). Ajoutons que grâce à son anavaccin, Delpy a pu protéger l’Iran, pendant quinze ans, contre la peste bovine. les vaccins qnavirulents contre les bestes aviaires, mis au point après une succession de recherches auxquelles ont contribué Staub. Hal¬ lauer, Idnani. S. Schmidt. Lucam,. Mle Cordier. Lissot, etc... Le plus généralement, le virus cultivé dans l’embrvon de poulet est trans¬ formé en anavirus par le formol (190), on peut obtenir un résultat analbogue en faisant agir le cristal-violet. Les auteurs sont d’accord pour affirmer les avantages que, ces vaccins anavirulents contre les pestes aviaires offrent sur les virus-vaccins vivants. le vaccin anaoirulent contre la beste borcine, dù aux travaux d’Otsuka et Terakado, remontant à 1928, puis de Nakamura : ces expéri¬ mentateurs se sont, eux aussi, inspirés du principe des anatoxines Wynohradnyk a exposé les résultats pleinement satisfaisants atteints en Roumanie avec l’anavirus de la peste porcine préparé au moyen de pulpe de rate et de ganglions lymphatiques, contenant le virus et soumis à l’influence du formol (rr9). Dans toutes les applications directes ou indirectes du principe des anatoxines, il y a certaines règles à observer bour l’obtention de vaccins auatoxiques et auavirulents qui, tout en se montrant parfaitement inoffen¬ sifs, doivent être capables de faire preuve d’un pouvoir antigène suffisant. Dès le début de nos recherches, nous précisions qu’il ne suffit pas de soumettre un bouillon diphtérique quelconque à l’influence du formol et de la chaleur, pour obtenir une anatoxine utilisable dans la pratique de (107) G. Curasson et L. P. Delpy. Bult. Soc. Cent. Méd. Vét, 1926, p. 27. (108) L. P. Delpy, Bul. OI, internat, des Episooties, 1950, 33. p. 227. 19) HLY. Schœenins et 61, Thomson, Bull, OI, internut, des Episoties, 1949. 32. p. 112. (io) Wynohraduyk, Revue d’Immunotogie, 1949, 13, p. 235. DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 5 l’immunisation, avec des chances de succès. Il faut préparer, choisir au préalable une toxine douée d’un pouvoir antigène intrfinsèque aussi élevé que possible, ce choix est grandement facilité par l’emploi de la réaction de floculation. De même pour la production des anavaccins et des anavirus, il faut utiliser des bactéries et des virus avant à l’origine une grande virulence. D’autre part, nous avons insisté à de nombreuses reprises et nous in¬ sisterons à nouveau sur la nécessité de déterminer avec soin dans chaque cas particulier, la proportion de formol (ou de toute autre substance sus¬ ceptible d’agir comme ce dernier) à ajouter à l’antigène — toxine, bac¬ térie, ultravirus — pour le transformer en agent à la fois inoffensif et im¬ munisant; de même l’action de la chaleur, lorsqu’elle est mise en œeuvre simultanément avec celle du formol, doit être soigneusement réglée daps son intensité et dans sa durée. Si on ajoute, par exemple, une trop forte dose de formol à la toxine diphtérique ou à la toxine tétanique ou si on les expose à une température trop élevée, on risque d’affaiblir leur valeur antigèpe. Il en est de même pour l’obtention dés anavirus. Ainsi, si dans la préparation du vaccin antipoliomvélitique de Salk on dépasse la dose de formol à ajouter aux virus de la poliomvélite, les qualités immunisantcs du vaccin peuvent en être altérées; si la dose de formol est trop faible. alors le virus ne sera pas complètement inactivé dans sa virulence et le « vaccin » ne sera pas utilisable, il pourrait, en effet, contenir des éléments de virus avant gardé leur virulence originelle et entrainer aiusi des inci¬ dents lors de la vaccination (119 bis). C’est vraisemblablement ce qui vient de se produire à l’occasion de l’application généralisée, aux Etats-Unis. du vaccin de Salk. En tenant compte de ces observations, il sera possible, dans bien des cas, d’améliorer la valeur des résultats obtenus dans la pratique des immu¬ nisations au moyen de la méthode des anatoxines proprement dites ou à l’aide des procédés qui en dérivent directement ou indirectement. Telles sont, dans leur énumération et avec certaines remarques les concernant, les applications du principe des anatoxines et des vaccins. anavirulents. La liste déjà impressionnante de ces applications n’est saps doute pas close. Nous cherchons, pour notre part, à l’allonger encore. Quoi qu’il en soit du futur, les procédés de vaccination basés sur le principe des anatoxines et des vaccins anavirulents permettent de pré¬ server l’homme d’affections graves: diphtérie, tétanos, botulisme, typhus épidémique, etc, et de protéger les animaux domestiques contre des in¬ fections meurtrières et contre des épizooties qui sont de véritables fléaux (fièvre aphteuse, peste bovine, peste porcine, encéphalomyélite, etc..). Les espoirs étaient donc justifiés que nous mettions dans le principe des anatoxines, lorsque, un an après sa découverte (janvier 1925), nous écrivions en substance: (110 bis) Voir à ce propos G. Ramon Comptes rendus Acad des Sciences, 1955 240 p.1598 Le concours Médical 1955 77 p1333 82 LA LUTTE PRÉMENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES Nous sommes en bossession d’une méthode générale bermettant de transfoymer les antigènes les blus nocifs en antigènes inoffensifs qui beu¬ vent être utilisés soit dans le domaine exbérimental soit encore ef surfout dans la lutte bréventive contre certaines maladies infectieuses de l’homme et des animaux (IIT). Notre intention n’est pas dans cette monographie, forcément limitée. d’étudier dans tous leurs détails chacune des applications du principe des anatoxines et des vaccins anavirulents. Nous nous contenterons d’envisa¬ ger, d’un point de vue très général, les principales d’entre elles¬ la vacination antidiphtérique. la vaccination antitétanique. les vaccinations associées. qu, 6 papou Aondts r Pastetr, 19025 38 LA DIPHTÉRIE SA DISPARITION DANS LE MONDE PAR LA VACCINATION AU MOYEN DE L’ANATOXINE DIPUTÉRIQUE Depuis la plus haute antiquite, la diphtérie exerçait ses ravages parmi les enfahts sans épargner les grandes personnes. Au début du XIX siècle encore, aucun progrès n’avait été réalisé concernant la lutte contre cette maladie qui était connue alors sous le nom de « croup ». On ignorait pour ainsi dire tout de ses causes, des conditions de son éclosion et de son évolution. Aucun remède possédant quelque efficacité à son égard n’avait été trouvé. Aussi sa malignité demeurait-elle très grande, malgré les efforts faits de tous côtés contre elle. En 1807, par exemple. Napoléon en pleine campagne militaire est alarmé par les hécatombes d’enfants que provoque le croup : il est aussi profondément affecté par la fin tragique de son neveu (fils de la reine Hor¬ tense et de Louis Bonaparte, roi de Hollande), qui succombe au mal à La Have. Il s’ingénie à stimuler les recherches médicales concernant la ter¬ rible maladie. A cet effet, une note officielle datée du Quartier Général de Finckenstein ouvrait un Concours sur la maladie dénommée «croup ». Napoléon n’avait pas que des préoccupations guerrières. L’objet princi¬ pal du Concours était la découverte d’un taitement curatif et régentif du COu. Une récompense de douze mille francs, soit beaucoup plus de deux millions de notre monnaie actuelle, était attachée à ce concours. somme qui parait relativement élevée, si on la compare aux prix distribués de nos jours, en France, par l’Académie des Sciences ou l’Académie de Médecine pour de semblables objets (rr2) Quatre-vingt-trois auteurs pri¬ rent part à ce Concours. En réalité, les très nombreux mémoires remis n’apportèrent rien de nouveau. «Ce ne sont point là, concluaient les juges du Concours, dans leur rapport, de ces créations extraordinaires qui chan¬ gent la face de la Science et commandent l’admiration des siècles, » On continua à discuter sur la contagiosité ou la non-contagiosité du croup, on s’évertua à traiter cette maladie comme la plupart des maladies aigués, par les saignées, les sangsues, les vesicatoires, les lavements. les purgatifs, les vomitifs, les fumigations l. Et le croup continua, lui aussi, ses méfaits meurtriers dans les villes comme dans les campagnes, dans les casernes comme dans les écoles, dans les châteaux comme dans les chaumières. C’est alors que Bretonneau, professeur à l’Ecole de Médecine de Tours, se consacra, à dater de r8r5, à l’étude du croup qu’il dépom¬ (112) ces prix ne sont en général que de quelques milliers ou quelques dizaines de milliers de notre franc, n'atteignant ou ne dépassant que très exceptionnellement cent mille francs. 51 LA LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES ma pour la première fois « Diphtérite », appellation que son disciple Trousseau abandonna pour le mot « Dizhtérie », lequel a été, dans la suite, de plus en plus emplové et s’est substitué entièrement aujourd’hui à celui de «croup». Bretonneau parcourut la Touraine où régnait la diphtérie à l’état endémique. Il y multiplia les constatations et les observations au lit des malades et bientôt il montra les caractères qui différenciaient l’angine diphtérique de l’angine banale, de l’angine scarlatineuse et de l’angine couenneuse. Il précisa, un demi-siècle avant les découvertes pastoriennes et avec une géniale prescience, que la dibhtérie est une maladie spécifique et contagieuse que l’on doit rapporter à l’action d’un « virus » spécial. Bretonneau donna, en outre, l’essor à une série de travaux sur la diphtérie, parmi lesquels ceux de son élève Trousseau. Celui-ci fit notam¬ ment partie d’une Commission d’enquête qui opéra dans le département de l’Indre, dans lequel l’enfance était décimée par la diphtérie. Cette Com¬ mission donna des conseils aux médecins praticiens, rédigea des rapports aux préfets. Dans l’un de ces rapports, on peut lire cette conclusion pessi¬ miste : « C’est avec douleur qu’il faut anponcer que l’bidémie de dibh¬ téne n’a rien perdu de sa fureur. Il est peu de semaines que l’on n’ait à déplorer la perte de plusieurs malades, la médecine la plus active ne peut triompher du mal. » En fait, l’heure n’était pas encore arrivée des grandes découvertes qui allaient permettre de lutter avec une efficacité de plus en plus grande contre la diphtérie et, finalement, de triompher d’elle. Cette heure ne devait sonner qu’au début de l’ère pastorienne, lorsqu’à la clinique eut éte asso¬ ciée l’expérimentation, lorsque les observations au lit du malade eurent été complétées par les recherches de laboratoire, lesquelles devinrent vite des plus fructueuses. Alors que la microbiologie commençait à peine son essor, deux méde¬ cins allemands. Klebs et Loeffler, découvrent, en 1884, le véritable agent de la maladie: le bacille dibhtérique. C’était là le «virus spécial » de la diphtérie, maladie spécifique et contagieuse, tel que l’avaient pressenti, soixante ans auparavant, Bretonneau et Trousseau. Il était donné à un disciple de Pasteur Emile Boux, et à son colla¬ borateur Alexandre Versin, de découvrir, quelques années plus tard, en 1888, le mode d’action de ce microbe. Comme le démontrèrent Roux et Yersin, le bacille de la diphtérie n’envaht ni le sang ni les organes du malade; il végête seulement au niveau de la gorge et dans les premières voies respiratoires et, là, il produit, en s’y multipliant, un véritable poison la toxuné diphtérique, qui, elle, est absorbée et pénêtre jusque dans l’inti¬ mité de l’organisme de l’enfant atteint de diphtérie et l’empoisonpe plus ou moins rapidement et plus ou moins complètement. Si le petit malade échappe à la mort, il peut conserver, et parfois pendant très longtemps des séquelles de cette intoxication, par exemple des paralysies. La mise en évidence, par Roux et Versin, de la toxine diphtérique responsable de la maladie, était d’une importance capitale. Elle devait entrainer de nouveaux travaux de laboratoire, dont le but était de trouver un « antidote » au poison nouvellement identifié. KOFT (célèbre par ses travaux sur la phagocytose). DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 33 Les chercheurs se mirent, en effet, à l’œuvre et bientôt, en 1800, le savanr allemand Emil Behring, assisté du japonais Kitasato, découvrait dans le sang des animaux d’expériences chez lesquels il effectuait des essais d’immunisation, l’antitoxine dibhtérque qui, comme il le démontra. possède la propriété d’annihiler les effets toxiques du poison diphtérique en neutralisant celui-ci. La découverte de l’antitoxine diphtérique était grosse de conséquen¬ ces. Elle laissait entrevoir le traitement de la diphtérie au moyen de cette antitoxine. En France. Roux. Nocard (d’Alfort) établirent bientôt que le sérum du cheval immunisé et hyperimmunisé contre l’intoxication diphtérique renferme en abondapce l’antitoxine spécifique. C’était là le sérum anti¬ diphtérioue. Dès 1804, au Congrès d’Hygiène de Rudapest Roux et ses collabora¬ teurs Martin et Chaillou apportaient les resultats obtenus dans les hopitaux parisiens: 300 cas de diphtérie traités par le sérum antidiphtérique, avec 25 26 de mortalité au lieu de 50 2% chez les non-traités placés dans les mêmes conditions. Photographie prise en septembre 1894, lors du Congrès de Budapest C’est devant ce Congres qu’Emille ROUX fit la retentissante communication sur lei premiers resultats de la sérothérapie antidiphtérique Sur cette photographie figurent, de gauche à droite, debout : GABRIGRICHEWSKY (savant, russe), Emile BOUX. Edmond NOCARD (éminent vétérinaire français). NUTTAT (illustre savant apglais), et assis: L. A. LAVERAN (médecin militaire français qui a decouvert, l’hématozoaire du paludisme). PERTIG (savant hongrois) et Flie METCINI LA UTE PÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INECTIEUSES 3 Dans la suite, grâce aux perfectionnements réalisés dans la prépara¬ tion du sérum antidiphtérique (TI3), grâce à l’emploi de plus en plus judi¬ cieux de celui-ci (114), la mortalité s’abaissa graduellement à 15 2%, à 10 70 même des malades. Cependant, on devait rapidement s’apercevoir que le séram, auti¬ dibhtérique est limité daus son action bienfaisante. S’il permettait de gué¬ rir une proportion importante de malades, il ne les guérissait pas tous ou ne les guérissait qu’imparfaitement, tel le cas des malades qui demeuraient paralysés, parfois pendant des mois, des années. Trop souvent aussi, des germes diphtériques particulièrement agressifs accomplissaient leur œeuvre néfaste, avant que la sérothérapie ait pu leur être appliquée et ait pu agir. On devait bientôt faire une constatation qui diminua l’enthousiasme du début. C’est que, malgré le sérum antidiphtérique, les ébidémies de dibhtérie continuaient de sévir quec la même intensité. Le nombre des cas de diphtérie demeurait tout aussi élevé qu’auparavant. Le sérum anti¬ diphtérique ne procurait, à vrai dire, qu’une immunité trop éphémère quinze jours à peine — pour qu’il soit possible de l’utiliser avec une effi¬ cacité réelle dans la prévention individuelle et collective de la diphtérie. On dut l’avouer, l’emploi du sérum antidiphtérique ne pouvait avoir au¬ cune influence sur la morbidité diphtérique. Les risques d’extension, de propagation de la diphtérie persistaient. On se rendit compte que le vieil adage « mieux vault Arévenir au’essayer de guérir » s’appliquait à la dipb¬ térie davantage encore peut-être qu’aux autres maladies infectieuses. Aussi une méthtode de vaccination permettant de conférer une immunité solide et durable et de prévenir d’une façon permanente le mal, appa¬ raissait-elle comme seule capable d’avoir, raison de la morbidité et de l’épidémie diphtériques. Déjà en 1884. Cadet de Gassicourt, membre de l’Académie de Méde¬ cine, appelait de ses vœux une telle méthode, et il s’exprimait ainsi : « Nous nous trouvons aujourd’hui dans la situation où se trouvaient nos pères devant la variole. Ils connaissaient bien cette maladie terrible. Ils en avaient étudié les caractères, les modalités, les formes, les variétés. IIs en avaient tracé des descriptions admirables mais ils n’en restaient pas moins impuissants devant elle, sans pouvoir arrêter, ni même limiter, ses ravages. Et Duis, un jour, lenner est venu quf a décougert la vaccine. Peul-être nos descendants sexont-ils témoins d’une décotuerte analogue, » En s’inspirant de la même méthode jennerienne et pastorienne, on s’évertua à tenter l’immunisation contre la diphtérie à l’aide, par exemple, de bacilles de Loeffler vivants et atténués. Après un échec total, on avait essavé, à la suite des premières expériences de Behring en Allemagne (1913), de William Park aux Etats-Unis, de réaliser la vacination anti¬ diphtérique en emplovant des mélanges de toxine et de sérum antidiphté¬ (113) G Ramon Bull et Mem Soc Med Hop Paris Séance du 31 mars 1939 G Ramon et R richou Comptes rendus Soc de Biologie 1938 129 p. 1062 Revue d'Immunologie 1939 5 p417 (114) Voir à ce sujet nos publications avec Robert Debré, Comptes rendus Soc de Biologie 1931 p.282 Bull et Mem Soc Med Hop Paris 1931 n°13 Annales de Medecine 1931 29 n°5 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTLQUES AU MOYEN DES VACCINS 37 rique qui repfermaient un excès plus ou moins grand de poison diphté¬ rique. D’une innocuité toute relative et difficile à contrôler, exposant à des dangers qui se manifestèrent par des incidents parfois dramatiques. d une stabilité douteuse, d’une activité discutable et discutée, les mélanges de toxine et de sérum aptidiphtérique étaient loin de répondre à la formule idéale d’un vaccin antidiphtérique, aussi n’avaient-ils que peu de chances de s’imposer et de devenir d’un usage courant. Tel était, aux environs de 1922, l’état de la question de l’immunisa¬ tion contre la diphtérie chez l’homme. En fait, la méthode inoffensive et vraiment efficace de vaccination antidibhiénique restait, à celte éboque, trouver. C’est alors que fut mise en évidence et proposée pour cette vaccina¬ tIori, r amaovine dibhtérioue. LA VACCIMATION CONTRE LA DIPUTÉRIE AU MOVYEN DE L’ANA TOXINE DIPUTÉRIQUE, SON ESSOR Les expériences chez l’animal nous avaient permis de fixer la tech¬ nique de la vaccination par l’anatoxine diphtérique. Nous avions constaté, notamment, que, pour obtenir une immunité solide, il est nécessaire de faire deux ou, mieux, trois injections d’ana¬ toxine (par exemple : 0.5 1 et r.s cc.) possédant une valeur antigène intrinsèque suffisante (déterminée et évaluée en unités L, par la métbode de floculation), a deux ou plusieurs semaines d’intervalle (115). C’est cette technique, basée sur des constatations expérimentales que nous avons proposée, dès la fin de ro23, aux cliniciens qui voulurent bien se charger des premiers essais de vaccination chez l’enfant et chez l’adulte. Elle n’a pas subi, depuis lors, en France du moins, de profonds change¬ ments. Cependant, le vaccin et la vaccination devaient être l’objet, au cours des années, de certains perfectionnements a) Accroissement de l’activité immunisanle de l’analoxine, grâce à l’obtention de toxines de valeur antigène intrinsèque élevée au moven de milieux de culture améliorés dans leur composition (116). La valeur de la toxine et, partant, de l’anatoxine est ainsi passée de 19 unités en 1923 à 40, 50, 100 unités et davantage à l’heure actuelle; comme nous l’avons dit déjà, la réaction de floculation pour le dosage du pouvoir antigène rendit à cet égard de précieux services. (115) Cet espacement, dans le temns des injections avait êté établi d’après l’expé¬ rimentation chez les animaux. Jusque-la, l'’intervalle de temps entre les inlectiops de vaccin était en général moindre: 10 jours pour les vaccinations pastoriennes, 8 jours pour la vaccinetion typhoidique par exemble. (116) G. Ramon. Comptes rendus Acad, des Sciences, 1929, 189, p. 164 : Mlle E. M. Taylor, Annales Jast, Pasteur, 1935, 55, p. 474: Paul Bordet, Bul. Acad, ROy, de Médecine de Belqique, 1938, p. 370: Revue d’Immunotogie, 1942, 7, p. 1 : Pappennhelmer et Johnson. Brit, Journ. Erp. Path, 1936, 17, p. 335: Hoyard Mueller et P.A. Millet, Journ, ot Imnu¬ noloG, 1940, 40, p. 21, etc. 83 LA UTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES b) Usage de substances adiuvantes et simulanles de l’immunité (G. Ramon, ro2s) (Tr2) et notamment l’addition à l’anatoxine d’alun et l’emploi du précipité obtenu par ce sel (Glenny et ses associès, 1926) (T181 l’absorption de l’anatoxine par l’hydroxydé d’aluminium (S. Schmidt 1935) (TT0), la précipitation et la fixation par le phosphate d aiuri (Holt, 1947) (120), l’intervention d’un facteur adiuvant naturel (Lahiri, 1953, (T2r), etc. C) Thisobon de l melhode des , nacinations asociees. (G. Ramon et Chr. Zoeller, 1926) (122). d) Pugrificatiox de l’anatoxine ar différents rocédés (Faton Pap¬ pennheimer, Holt, Pllemer, etc..) (123). (G. Ramon et A. Boivin) (124). Enfin, l’immunité créée par une primo-vaccipation peut être consi¬ dérablement renforcée en valeur et en durée par l’imiection de rabbel (taite à dose unique d’anatoxine, un an ou davantage après la vaccination ini¬ tiale) que nous avons introduite dans la pratique, à dater de 1927 (125). Les essais initiaux de vaccination par l’anatoxine diphtérique effec¬ tués dès la fin de l’année 1923 et au début de 1924 à Paris d’abord, chez l’enfant et chez l’adulte, sélon la technique que nous venions d’établir expérimentalement, apportèrent la preuve que l’anatoxine est bien capa¬ ble de conférer à l’entapt comme à l’adulte de même qu’à l’animal d’ex¬ périences, l’immunité à l’égard de la maladie de Bretonneau. A ces essais initiaux sont attachés les noms de Louis Martin. Darré et Loiseau, de Chr Zoelier, de lules Renault et P. Lévy, de Boubinovitch, de Robert Debré, de Lesné, de Lereboullet, de Ribadeau-Dumas et Chabrun d’Ar. mand-Delille, de Mozer, de Parisot, etc., etc. (126). Nous tenons à rendre (117) G Ramon Bull Soc Centre Med Vet 1925 101 p227 et 348 Comptes rendus Acad des Sciences 1925 181 p 157 Voir notre exposé d'ensemble Congrès inter nat de Path Comparée, Rome 1939, etc.... (118) AT Glenny et ses associés, Joun Path and Bact 1926 29 p31 The Lancet 1941 p301, etc... (119) S Schmidt voir notamment Archiv fur die Ges virus forsh 1939 1 p 215 etc (120) Holt the Lancet 1947 p282 256 385 (121) DC Lahirl Brit med Journ 1953 p370 (122) G Ramon et Chr Zoeller Comptes rendus Soc de Biologie 1926 94 p 106 (123) Voir par exemple L. Pillemer et ses associés The Journ of Biol Chem 1947 170 p171 (124) G; Ramon et A Bivin Conhrès internat de Microbiologie Londres 1936 Comptes rendus Soc de Biologie 1943 137 p409 Grâce au procédé de précipitation par l'acide triachloracétique nous avons ainsi pu obtenir une anatoxine purifiée tr-s voisine de la pureté chimique titrant jusqu'à 20 000 unités Lf par centimètre cube avec un rendement en principe actif jusque là jamais atteint se situant régulièrement entre 90 et 100% (125) C'est à propos de la vaccination par l'anatoxine tétqaniue que nous avons établi le principe et l'usage pratique de l'injection de rappel: G. Ramon et Chr Zoeller Annales Inst Pasteur 1927 41 p803 (126) Voici quelques références bibliographiques qui montrent bien s'il en est besoin la priorité des clinicens et hygiénistes français dans l'application de l'anatoxine diphtérique à la vaccination contre la diphtérie: Louis Martin Darré Loiseau et Laf faille Roubinovitch (vaccination de l'enfant) Chr Zoeller (adultes), Bull Acad de DE LHIOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 22 hommage à ces initiateurs et propagateurs, dans la pratique, de la vac¬ cination par notre méthode dont certains sont aujourd’hui disparus. Bientôt les résultats acquis forcèrent l’attention et la méthode de vac¬ cination par l’anatoxine diphtérique entra, en France, dans la pratique. Dans sa séance du 6 décembre 192% (122), l’Académie ualionale de Médecine se prononçait en faveur de la méthode nouvelle, dans les termes suivants : « Considérant que la dibhlérie s’est manifestée l’an dernier quec une malignité spéciale entrainant une mortalité élevée. que l vaccination antidiohtérique au moyen de l’anafoxine a déi été utilisée quec succès en France et dans blusieurs nations. cacité, que cette vaccination a fait la breuve de son innocuité et de son elli¬ l’Académie demande aux Pouvoirs bublics que cette méthode soit instituée systématiquement, notamment barmi les enfants qui fréquentent les écoles, et que cette bratique soit mise en œuvre dans les débartements et les villes où l’insbection médicale est organisee. » Les interventions de l’Académie et des Pouvoirs publics furent le point de départ d’un mouvement d’extension de la vaccination. Rapidement, l’usage de la méthode progressa dans la population civile. En 1938, elle devenait obligatoire pour les enfants de un à quatorze ans (loi du 25 juir 1038). Cette loi a été complétée par celle du 24 noyembre ro40 qui a asso¬ cié dans l’obligation, la vaccination par l’anatoxine tétanique à la vaccina¬ tion antidiphtérique, seloncla formule des « vaccins associés », et par celle du 7 septembre 1948 qui a précisé certaines dispositions, en particulier celle-ci: « La vaccination antidibhtérique bay l’anatovine est obligatoire et doit être bratiquée entre le douzième et le dix-huitième mois de la oie. » Cebendant l’essor de la vaccination en dehors du temps d’arrêt qu’il dut subir durant la deuxième guerre mondiale et durant l’occupation fut entravé, en France, par l’action des adversaires systématiques de toute vaccination. Qui ne se souvient chez nous, des assauts menés, dans les années qui ont immédiatement précédé le deuxième conflit mondial, contre les méthodes de vaccinations anatoxiques et contre la méthode des «vac cinations associées », lesquelles étaient accusées de tous les méfaits et leur auteur traité de malfaiteur et de criminel dans une certaine presse. Comme nous le disions dans une communication faite récemment devant l’Académie de Médecine (128), nous avons quelque droit aujour¬ Medecine, avril 1924, 91. p. 474 : Chr. zoeiler. Bul. Acad, de Médecine, 1925, 92, p. 1290 Lereboulet, et Joannou. BuIL. Soc. Méd. Hop, Paris, juillet 1924, 48, p. 1123: Darre Loiseau et Lafaille. Bult. Soc. Hop. Paris, 1925, 49, p. 565: Chr, Zoeller. Bull. Soc. Méd HOD. Paris, 1925, 49. p. 1218. Nous même, à cette époque, avons donne quelques résuitat d’ensemble. 6 F8 amoh, Paris Medical, n du 6 décembre 1924: Anndles Jist. Pasicut 1925, 39. D. 1 (127) But. Acad, de Médccinc, 1927, 98, p. 513. (128) G. Ramo). BuIl. ACd, de Meaccinc, séance du 8 décembre 1953 DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 61 d’hui plus qu’hier encore, on nous le concédera, à demander où étaient les malfaiteurs, les criminels, sinon parmi ceux qui tentaient de discré¬ diter ainsi nos méthodes par tous les moyens y compris les plus diffama¬ toires, les plus calomnieux, et qui en semant le trouble dans les esprits et en retardant l’application de la vaccination antidiphtérique risquaient. ce faisant, de précipiter dans la tombe, des milliers d’enfants que la vac¬ cination pouvait préserver de la maladie et de la mort. Si nous évoquons ces souvenirs, c’est aux fins de rendre grâce à l’Académie de Médecine de Paris, A nombre de reprises, en effet, elle a proclamé l’innocuité et l’efficacité des méthodes anatoxiques, elle a émis des voeux en leur faveur, en faveur de leur application et de leur généra¬ lisation, tout en m’apportant un puissant réconfort et un précieux encou¬ ragement. C’est ainsi, par exemple, qu’en r938 au lendemain même d’odieuses et scandaleuses interpellations à la Chambre des Députés « sur les morts causées par la vaccination antidiphtérique », alors que pour répondre à ces interpellations nous venions de donner lecture à la tribune de l’Aca¬ démie, d’une communication sur « Quinze années d’abblicatox à la bro¬ bhylaxie de la dibhténe de la vaccination par l’anatoxine sbécifique » (120) (et après les interventions hautement autorisées de MM. Robert Debté. Ed. Lesné, lules Renault. E. Sergent, etc.), le Président. M. Fernand Bezançon, rappela que « l’Académie a toujours fait sien¬ nes les conclusions de M. Ramon et s’associe à lui pour demander que se généralise une méthode qui a donné déjà de si beaux résultats ». En T948, à la suite du déclenchement d’une nouvelle campagne con¬ tre la vaccination aptidiphtérique contre la vaccination antitétanique et contre les vaccinations associées, l’Académie sur la proposition de M. Lemierre (130) émetait à l’unanimité le vœeu suivant « L’Académie, avant entendu l’exbosé de M. Ramon, enregistre qvec satisfaction les très nombrex résulats maintenant acquis dans le monde entier qui affirment blus que jamais l’efficacité et l’innocuité de la vaccination anitétanique et des vaccinations associées, méthodes d’im¬ munisation d’ongine française qujourd’hui universellement rébandues. « Elle s’associe à M. Ramon bour mettre en garde le bublic contre certaines cambagnes tendant à brésenter ces vaccinations comme ineffi¬ caces et même dangereuses. « Elle émet le vœut qu’en débit de ces cambagnes. les vaccinalions autidibhtexique et antitétanique, que le législateur a rendues obligatoires abrès s’être entouré de toutes les garanties nécessaires, soient boursttivies sans défaillance ». L’Académie de Médecine manifestait oinsi sa confionce dans ces méthodes, de concebtion et de réalisation françaises. Cette confiance ne devait pas être trompée, nous allons le montrer en exposant les résultats obtenus en France et dans le monde, après trente années d’application de la vaccination par l’anatoxine diphtérique. (129) G. Ramon, Bull Acad de Medecine 120 1938 n 38 p 730 Suivent les textes des interventions de MM Robert Debré, Ed Lesne Emile Sergent JulesRenault. (130) Bull Acad de Medecine 1948 132 p206 62 LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES RÉSULTATS DE LA VACCINATION ANTIDIPHTÉRIQUE A. En France La vaccination par l’anatoxine diphtérique donna, en France, la mesure de sa valeur préventive contre la diphtérie, en premier lieu dans des collectivités plus ou moins grandes, écoles d’infirmières, pensioppats. sanatoriums, préventoriums, etc,, et surtout dans l’Armée. La vaccination au moyen de l’anatoxine fut, en effet, introduite à dater de 1930 dans l’Armée française. Depuis plusieurs années la diph¬ térie subissait, dans l’Armée, une recrudescehce manifeste. Dans un certain nombre de régiments, la maladie sévissait à l’état endémique et malgré l’application des mésures classiques: dépistage des atteintes même légères, recherche des porteurs de germes, isolement, etc..., l’in¬ fection s’étendait, ce qui prouvait, une fois de plus, l’insuffisance de ces mesures, insuffisance déjà constatée notamment au cours de la guerre 1014-1018, on se rappellera, à ce propos, les perturbations occasionnées durant cette guerre par la diphtérie, dans les effectifs militaires. Aussi. au début de ro3o, des essais de prophylaxie par la vaccination anatoxi¬ que complétant ceux entrepris primitivement par notre collaborateur et ami Chr. Zoeller, étaient-ils poursuivis, à l’instigation du médecin général inspecteur Dopter, directeur du Service de Santé, dans plusieurs régi¬ ments qui pavaient un lourd tribut à la diphtérie. A la suite de ces essais. Dopter concluait. « Il résulte des faits rapportés que, appliquée dans les conditions exposées, la vaccination, par l’anatoxine diphtérique a eu rai¬ son dans cinq corps de troupe d’un état endémique, voire même endémo¬ épidémique qui persistait d’une façon tepace malgré toute la rigueur des mesures classiques antérieurement prises. Il y a donc dans ces essais une belle démonstration de l’efficacité de la méthode anatoxique » (131). En conséquence des résultats obtenus, une loi fut promulguée le 2r décembre 1931, permettant de rendre la vaccination antidiphtérique obli¬ gatoire dans l’Armée, dans certaines circonstances. Cette loi fut modifiée. complétée par celle du rs août rox6, laquelle déclarait obligatoires les vaccinations associées à la fois coptre la diphtérie, le tétanos, les affec¬ tions typhoides, au moyen du mélange des anatoxines diphtérique et tétanique et du vaccin antityphoparatyphoidique. Cette obligation dans l’Armée française des « vaccinations associées » devait se traduire rapidement par la diminuton considérable de la mor¬ bidité dibhténique. Comme le faisait connaitre le médecin général Pilod en 1938 (132): « A partir du momept où la vaccination associée triple (dipbtérique-téta¬ pique-typhoidique) rendue obligatoire par la loi du rs avril 1936 a été étendue à tous les effectifs, on a assisté à une chute brutale de la morbi¬ dité par diphtérie ». 3l. Acad de Medeome, 1931, 104, p. 794, 14, 19032, p 105 (31) Ch, popter. H Annales Inst. Pasteur, 1933, p. 50. (132) M. Pilod. Revue Méd. francaise, 1938, n° 5, p. 377. tuberculeux que chez les sujets sains. 63 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS D̀s 1938. Sohier et Buvat (133) constataient la très forte diminution à l’Hôpital du Val-de-Grâce, à Paris, du nombre des malades ateints de diphtérie. D’après Meersseman et Hulin (T34), dans l’ensemble des garnisons de la région lvonnaise, la morbidité diphtérique est tombée de 205 cas. en 1920, à 3 cas en ro38, alors que dans la population civile qui n’était que peu ou pas vaccinée, elle n’était abaissée que dans une proportion infi¬ niment moindre (276 cas en 1938 contre 481 en 1920). Les médecins militaires ont été unanimes à déclarer que sous l’in¬ fluence de la vaccination antidiphtérique obligatoire, effectuée dans d’excellentes conditions, durant le temps de paix, la diphtérie avait en 1030, à la veille de la guerre, pratiquement disparu de l’Armée française où elle sévissait jusque-là à l’état endémo-épidémique dans un certain nombre de corps de troupe. Et le médecin général inspecteur Dopter écri¬ vait précisément, en 1930: « L’efficacité vemarouable de la vaccina¬ tion dnfidibhlérique bar l’anatoxrinle de Pamon réssort d’une facon éui¬ dente de l emblot oui en a éle fait dans l’Amée francoise (135). Il est intéressant, à plus d’un point de vue, de noter les résultats de la vaccination antidiphtérique dans certains sanatoziums. Après avoir mentionné que Mozer, dès 1928, Parisot. Melnote et Engel en 1938. Vandeuvre et M'e Nigoul en 1930 avaient réussi, grâce à la vaccination par l’anatoxine, à éliminer la diphtérie des sanatoriums dont ils avaient la charge médicale, Pratt-Flottes et Gaudin ont montré (136), par des statistiques établies de 1938 à ro46, que la diphtérie a dis¬ paru de la collectivité d’enfants tuberculeux confiés à leurs soins, grâce à l’emploi judicieux de l’anatoxine diphtérique laquelle d’après tous ceux qui en ont usé dans les sanatoriums se révèle aussi inoffensive chez les Nous examinerons, à la lumière des documents publiés au cours de ces dernières années, les résultats acquis dans plusieurs grandes villes de France. A STRASDPQURC et dans la région, Rohmer et Uhl ont comparé, lors d’une épidémie de diphtérie survenue en Alsace, la morbidité et la morta¬ lité chez les vaccinés, d’une part, et chez les non-vaccinés, d’autre part. Sur les 37,000 vaccinés, ils ont noté 16 diphtéries et sur 24,000 non¬ vaccinés, 130 cas. Sur 20 sujets décédés des suites de leur diphtérie, sur (13) R. Sohier et Y. F. Buvat, Soe. Mét milit, francaise, 13 octobre 1958. (134) Meerseman et Hulin. La Presse Médicale, 1940, p. 592. (136) Pratt-Flottes et Gaudin, Paris Medicat, 1947, 19, p. 217. LA UITE PRÉVENTIVE CONTSE LES MALADIES INFECTIEUSES 44 lesquels Rohmer et Uhl ont pu avoir des renseignements précis, aucun n’avait été vaccme (T) A LyON (grâce aux efforts initiaux du Dr. Poulain), la vaccination antidiphtérique a pu être entreprise systématiquement, à partir de 1943 seu¬ lement. Elle avait bien été commencée en 1937, mais elle ne s’adressait qu’à une faible partie des enfants agés de 2 à 14 ans, lamais le nombre des enfants complètement vaccinés n’avait dépassé avant 1943, 25 p. 100 du nombre total des enfants ce qui était insuffisant pour obtenir un résultat bien net. Depuis 1943 jusqu’en r94%7, en pleine poussée ébidémique très sévère. la vaccination au moyen de l’anatoxine diphtérique seule ou associée à l’anatoxine tétanique est étendue à 95 p. ro0 des enfants de 3 à 15 ans. Dans la suite, les rares cas observés chez des enfants vaccinés ont été en moyenne quinze fois moins nombreux que pour un nombre égal d’enfants non-vaccinés et étaient bénins. En cina ans, alors que 1o8 décès par diph¬ térie sont survenus chez des enfants ou chez des adultes non-vaccinés. il n’a été observé aucun décès chez les vaccinés (138). A MARSETLLE, d’après les renseignements apportés devant l’Académie de Médecine par les Drs Bestieu. Dusan et Taddei (130), on n’a eu à dé¬ plorer, durant ces dix dernières années aucune épidémie de diphtérie dans les crèches, écoles maternelles, colonies de vacances qui pavaient autrefois, avant la généralisation de da vaccination, un lourd tribut à la maladie. En bref, à Marseille comme dans nombre de villes et départe¬ ments français, grâce avant tout à la vaccination antidiphtérique, non seulement les poussées épidémiques ont été jugulées rapidement mais en¬ core l’état d’endémie a été profondément modifié. Il ne se traduit à Mar¬ seille, dans des conditions d’hygiène pourtant défectueuses, que par l’éclosion espacée de quelques atteintes clairsemées, restant isoléès, dont l’extrême rareté s’oppose à la densité des cas qui étaient enregistrés jour¬ nellement avant la mise en œeuvre de la vaccination. Quel chemin parcouru, disent les auteurs de la note en question. depuis Trousseau qui déclarait que « la dibhtérie était blus grave que le 1yPIuS, que le cholera et que la fièore jaune ». Comparant récemment les résultats de la vaccination à Marseille et dans le département du VAR, Bestieu montre (140) que la régression de la morbidité et de la mortalité dans ce département est encore plus accu¬ sée qu’à Marseille puisque l’indice de morbidité qui était de 248,45 pour 190,600 habitants en 1942 accusait seulement le taux de 8,00 en 1950 alors que l’indice de mortalité qui était de 0.7r en 1943 est tombé à 0 en 1950. Bestieu terpine son exposé en disant: «une nouvelle fois, 14 preuve est administrée de l’innocuité et de l’efficacité certaines de la mé¬ (137) Rohmer et Uhl. BuIt. Acad, de Médecine, séance du 21 janvier 1947. (138) voir notamment P. Poulain, Bull. Acad, de Medecine, 1948, n° 8-10. p. 142 Revue d’Immunologie, 1948, 12, p. 276. (139) R. Bestieu. Dusan et Taddei. Bull. Acad, de Médecine, 1951, 135, p. 536. (140) R. Bestieu. Fevue d’Inmunotogie, 1954, 18, p. 232. DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 68 thode de Pamon, seule cabable, sous réserve que 60 à 20 p. 100 d’en¬ lants aient été correctement vaccinés de crombre la chaine de l’infec¬ tion », selon, l’heureuse exbression de 4. Payne, même dans un débarte¬ ment lel que le Var exbosé au bénil dibhtépique » (14T). MORBIDITE ET MORTALITÉ PAR DIPHTÉRIE DANS LE DÉPARTEMENT A PARTS, grâce à l’activité du Dr Besson (Inspecteur Gépéral des Services d’Hygiène de la Ville et du Département de la Seine) et de ses Services, la diphtérie n’a cessé de reculer principalement au cours de ces dix dernières années, sous l’influence de la vaccination par l’ana¬ toxine diphtérique. D’après une communication de Besson devant l’Académie de Méde¬ cine (IOs1) (L12), on enregistrait en ro2s, un total de 2 836 cas de diph¬ térie dont 188 mortels bien que le sérum antidiphtérique fut emplové dans les mneilleures conditions Or, en ro52, grâce aux éfforts accomplis de¬ puis 1045 surtout, alors que la plupart des assujettis sont correctement vaccinés (blus de 02 7 en moyenne dans les écoles), 00 cas de diphtérie ont été signalés à Paris parmi lesquels A décès (tous chez des non-vacci¬ nés) et en 1953 aucun décès hon plus qu’en 1954. On peut dire avec Besson qu’il s’agit d’un véritable effondrement de la morbidité et de la mortalité par diphtérie. d14I), A. M. Payne, Division des maladies transmissibles, Ornisation Mordiale de la Sante. (42) A. bessou. Buill. Acad, de Médecine, 1951, 135, p. 262. LA UTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES 66 Nous rappellerons, pour montrer encore, davantage cet effondre¬ ment, quelques chiffres (d’après des renseignements communiqués par les Docteurs Besson et louffrault) concernapt la morbidité et la mortalité diphtériques annuelles, à Paris, au cours de ces cinquante dernières années. En copséquence de la dimipution considérable de la porbidité dipb¬ térique, la phubart des Seroices de la dibhérie des Hobitaux barisiens. ladis encombrés de malades, ont fermé successivement leurs bortes. Ces faits, car ce sont des faits, ne peuvent être contestés par personne. Dans sa communication devant l’Académie de Médecine, Besson mentionne encore cette constatation, on doit la souligner, que les opéra¬ tions vaccinales effectuées jusque là, par les Services d’Hygiène de la DE VHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOVYEN DES VACCINS 67 Seine (plus de 3,000,000 d’injections d’apatoxine), n’ont donué liet, sa connaissance, à aucun accident grave et notamment a aucux abcès bouvant être rabborté d la tuberculose (143). Nous devons à l’obligeance des Docteurs Besson et Caravon-Gentil. les renseignements complémentaires figurant en un tableau et qui con¬ cernent la morbidité et la mortalité par diphtérie, chez les enfants d’âge scolaire à Paris. Afin de ne pas tirer des déductions erronées de ce tableau, on doit faire remarquer qu’à Paris plus de 92 %% des enfants d’âge scolaire sont vaccinés. Les chiffres de morbidité signalés portent donc respectivement. pour les vaccinés sur plus des o'ro de la population enfantine d’âge sco¬ laire et pour les non-vaccinés sur moins de t/ro de cette population. Si l’application systématique d’une méthode de vaccination est rela¬ tivement facile dans une collectivité comme l’Armée où intervient une discipline imposée ou même dans une grande ville comme Paris, sous la condition toutefois d’un puissant et persévérant effort, cette application (143) Cela ifnirme totalement les allégations de ceux qui prétendaient que l'ana toxine et autres vaccins ainsi que diverses injections médicamenteuses étaient capables de provoquer certains accidents en particulier des abcès tuberculeux Ces accidents ont été mis sur le compte, dans la suite, de ce que l'on a appelé la "pathologie de la seringue". 1A LUITE PRÉVENTNVE CONTRE IES MALADIES INTECTIUSES 68 est beaucoup plus difficile et plus lente à réaliser dans l’ensemble d’un pays comme la France, dans les centres urbains et dans les communes rurales des départements. Aussi, et pour les raisons que nous avons don¬ nées plus haut, à savoir, d’une part, la guerre et l’occupation et, d’autre part, les entraves mises à l’exécution des lois et règlements édictés à dater de 1o38, la vaccination antidiphtérique ne devait atteindre un important développement dans l’ensemble de la France qu’au cours des années qui ont suivi la Libération. Ce développement s’est traduit par une dimi¬ nution de plus en plus forte de la morbidité et de la mortalité par diph¬ térie. C’est ainsi que, comme le montrent les statistiques établies par les soins de l’Institut National d’Hygiène (1A4), la morbidité diphtéri¬ due qui était depuis tor0 et avant ro45, de 20.000 cas en moyenne. chaque année, est tombée à 2,680 cas en rosr et la mortalité annuelle moyenne qui était, pendant le même laps de temps, de 2.200 décès, s’est trouvée réduite, pour la France entière, à 135 déces en rosr à 123 décès en 1953 et à 85 décès en 1954, d’où une décroissance de 20,3 % de 1953 à 1054 (144 bis). Nul doute que ces statistiques s’amélioreront encore dans l’avenir sous la réserve que les vacinations seront régulièrement pratiquées dans tout lé pays. B. — Dans le monde A peine avions-nous jeté, en 1923, les bases de l’immunisation active contre la diphtérie, au moyen de l’anatoxine, à peine les résultats des premiers essais pratiqués en France chez l’homme, à la fin de 1923 et au début de 1024, étaient-ils connus que, comme nous l’avons indiqué pré¬ cédemment (T45), la méthode pénétra à l’étranger, d’abord aux Etats¬ Uinis sur l’ipiti3tive de William Park et au Canada, à l’instigation de Fitz-Gerald, Fraser, etc.. Sous des auspices aussi favorables que ceux de nos éminents collè¬ gues de l’Amérique du Nord, la vaccination antidibhtérique ba7 l’ana¬ toyine s’était donc implantée et avait pris son essor aux Etats-Unis et au (44) On remarque, dans ces statistiques, pendaut la guerre à partir de 1941 jusqu'en 1946, une assez forte recrudescence de la diphtérie. Il n’y a rlen détonuant à cela, puisque, aux dificultés de réalisation de la vaccination antidiphtérique, s’ajou¬ taient les restrictious de toutes sortes, l’inobservance totale des règles d’hygiène, etc. rac-similé d’une affiche utilisée aux Etats Unis niqué obligeamment par le (Nex-York), à partir de 1932 (commu¬ (2) De 1925 à 1929, durant la période d’organisation de l'’application de la méthôde de vaccination par l'anatoxine diphtérique, environ 200,000 enfants avaient été vaccinés à New VOrk. A partir de 1929, les campagnes de vacci¬ nation antidiphtérique se succédèrent de plus en plus actives toujours sous l'énergique impulsion de William Parks. Bès 1933, dans une cérémonie offi¬ cielle, le millionième enfant de Ney York, était vacciné par William Park lui¬ même assisté de Béla Schick. En 1935, à l'occasion de la remise qui lui était faite par ses collaborateurs, d'une plaquette de bronze à son effigie. William Park annoncait qu'en l'espace de quinze ans, le nombre des cas de diphtérie était tombé de 15, 000 à 1. 400. Depuis lors, la chute de la morbidité n'a fait que s’accentuer très rapidement. LA UTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADES INTECHIEUSES 79 Canada et, dans la suite, à mesure que se développait l’application de la méthode, la diminution de la morbidité et de la mortalité par diphtère. allait se faire sentir dans ces pays. Par exemple, à NEWY YORK, (tableau r), avant r920, avant par con¬ séquent l’introduction de la vaccination anatoxique, on enregistrait en moyenne, chaque année, 14,000 cas de diphtérie et 1.300 morts du fait de cette maladie et malgré la sérothérapie bien appliquée. Or. en 1052, il n’y a plus, grâce à l’usage généralisé de la vaccination préven¬ 71 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS tive, que 15 cas de diphtérie et un décès, je dis bien un décès en 1952, au lieu de 1300 en 1919 (146) Le taux de mortalité par diphtérie pour 100 000 enfants au dessous de 15 ans est ainsi tombé de 86,4 avant 1920 à 0.06 en 1952 soit mille cinq cents fois mois La mortalité par diphtérie a fait une chute analogue dans la plupart des autres grandes villes des. Etats-Unis. Ainsi à CHIICAGO. CLEVELAND. PITTSBURG il n’Y a eu aucun décès par diphtérie, ni en 1940 ni en 1950. Cette disparition de la diphtérie en rapport avec l’application bien avant la guèrre, d’un vaste programme d’immunisation va si loin. d’après Poucher et Glaser (147) que les jeunes médecins des villes amé¬ ricaines n’ont bien souvent jamais vu un cas de diphtérie dans leur pra¬ tique ni même pendant leurs années d’études. Il en est ainsi également en France, notamment à Paris. tive, que rs cas de diphtérie et un décès, je dis bien un décès en 1952, au lieu de L. 300 en 1910 (146). Le taux de mortalité par diphtérie pour 100,000 enfants au-desous de r5 ans est ainsi tombé de 86,4 avant 1020 à 0,06 en 1952, soit mille cina cents fois moins. Au CANADA, où la lutte contre la diphtérie, au moyen de la vacci¬ nation par, l’anatoxine avait été entreprise par Fitz-Gerald et ses colla¬ borateurs Donald Fraser. Defries. Mckinnon. Ross. Moloney, etc (de Toronto) puis énergiquement poursuivie par eux-mêmes et aussi par les soins de Beaudoin, Frappier. Fredete, Morin, etc., (de Montréal et de Québec), les heureux effets de cette méthode de prophylaxie se sont bien vite fait sentir, comme aux Etats-Unis, par une réduction rapidement progressive de la morbidité et de la mortalité diphtériques (148). Comme le signalait dès r943. Carson, du Bureau d’Hygiène et des Maladies tropiçales à Londres: « Les résultats saisissants obtenus dans les villes de Toronto. Hamilton, Brantford. Montréal, etc.., sont à citer spécialement. Fitz-Gerald. Fraser. Mckinnon et Ross montrent en 1938 que la vaccination des enfants des écoles, au cours. des années 1027 à 1032, a réduit la morbidité dipbtérique d’environ 90 p. 100 chez les vaccinés par rapport aux non-vaccinés. Le bénéfice de la vaccination des enfants a eu sa répercussion dans la réduction de la morbidité et de la mortalité par diphtérie dans la population entière, en effet, le taux de mortalité diphtérique, par exemple, tombe de 6 p. 100,000 en 1930 à 0,6 en 1934. Dans certaines villes, la mortalité chez les vaccinés tend à devenir nulle » (rO40). Ces faits sont confirmés, en 1946, par Phair et McKinnon (150). Dans sun article consacré, en ro47, à l’immunisation contre la diph¬ térie (rsr) dans lequel sont cités les travaux de Mckinnon, est mise en évidencé la constante diminution à la fois de la morbidité, des porteurs de germes et de la mortalité par diphtérie, dans les grandes villes du (146) D'après les renseignements communiqués par les Services d'Hygiènes de la Ville de New York et par le Public Health Service (Dr CC Dauer et Halbert L Dunn) (147) HG Poucher et Kurt Glaser cités par Baize dans le Belltin Médical 21 mai 1948 (148) Voir à ce propos: JG FitzGerald Annales Inst Pasteur 1928 42 p1089 FitzGerald Fraser et McKinnon Bull of the new York Acad of medecine 1938 14 p 566 The Lancet 1938 p391 Dt Fraser Canad Publ Health 1939 30 p469 (149) JF Carson Bull of Hyg 1943 18 p 363 (150) JT Phair et NE McKinnon Canad Journ of Public Health 1946 p69 (151) The Lancet 1947 n6487 p 852 Article anonyme LA LUTTE PREVENTIME CONIRE LES MALADIES INTECTIEUSES 22 Canada et particulièrement à TORONro depuis 1926, époque à laquelle la vaccination a pris là-bas son essor: on estimait, dès cette époque, que les statistiques étaient assez concluantes pour convaincre les plus sceptiques. Vers la même date. Donald Fraser, de Toronto, exprimait une opinion identique, après avoir rappelé que « c’est à Bamon qu’est due l’intro¬ duction de l’anatoxine, antigène inoffensif facilement dosable et trés effi¬ cace, dans la pratique de l’immunisation active contre la diphtérie » (152). Au cours de la guerre, la vaccination au moyen de l’anatoxine diph¬ térique a été pratiquée dans l’Armée canadienne. Comme dans l’Armée française elle y a pour ainsi dire éliminé la diphtérie (153). Nous donnons, en un tableau, les statistiques récapitulatives de la morbidité et de la mortalité diphtériques à Toronto. Tableau II. — TORONTO Ainsi à Toronto, alors qu’en 1920, on comptait 2,256 cas de diph¬ térie et 224 décès, il n’y a plus en roso, que 2 cas de diphtérie et aucun déces. On doit noter qu’à partir de ro43, il a été institué dans tout le Canada une semaine nationale d’immunisation, ce qui explique la chute brutale de la morbidité et de la mortalité diphtériques entre 194I et 105T (154). Pour l’ensemble du Canada, on enregistrait. Une telle chute de la morbdité et de la mortalité, en l’espace de dix ans, dans un pays aussi étendu que le Canada, n’est-elle pas une belle démonstration de l’efficacité de la vaccination. (152) Donald T. Fraser, Buit, or the Neu Yort Acad, o1 Med, 1948, 24, n° 5, p. 332. (153) Voir sellers. Canad, Pub. Heatn Journ, 1942, 33, p. 515 (analysé dans Bul 01 Var Medicine, 1943, 3, p. 643. On ccnsultera également les articles de A. Plouffe (Montréal) dans UM. Mcd. Canada, 1941, 70, p. 625, qui montre le rôle capital de l’ana¬ toxine dans la prophylaxie de la diphtérie, de R. J. Gibbon (Ottawa). Canad. Touri. Piblie Healh, 1945, 36, p. 34. (154) D’après Gordon Bates, President de la Ligue de Santé (Toronto). 23 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS En AUSTRALIE, d’après des renseignements publiés en 1953 dans un article sous le titre : « La vaccination antidiphtérique est presque arrivée à saturation » (T5s), la mortalité par dipbtérie demeure actuellement exceptionnelle, alors qu’il y a quarante ans, cette maladie tuait un en¬ fant sur 4,000 chaque année. C’est que, au cours de ces dernières an¬ nées, la vaccination a été très généralement appliquée. Le Queensland arrive en tête de cette application,. Plus de 00 9% des enfants ont été vac¬ cinés dans les grandes villes et 85 0% dans les campagnes ce qui, est-il ajouté dans l’article en question, représente un record mondial (156). Dans le ROYAUME-UNI, le public, on le sait, est en général réfrac¬ taire à la pratique des vaccinations, y compris celle de lenner. Néan¬ moins, durant la deuxième guerre mondiale, pour faire face à une situa¬ tion alarmante du fait de l’extension de la diphtérie, la vaccination antidiphtérique a pris un grand développement daps les lles Britanni¬ ques, grace aux eforts deployvés par les Organisations médicales et les Services d’Hygiène fortement appuvés par les Pouvoirs Publics. C’est ainsi qu’une campagne très active d’immunisation fut entre¬ prise en EcossE à dater de novembre 1940, alors que régnait dans cette contrée une grave épidémie de diphtérie à caractère envahissant: 700,000 enfants furent vaccinés en 1941-1942, soit environ 79 p. 190 des enfants au-dessous de rs ans. lIl y eut, durant ces deux annes, 704 morts chez les non-vaccinés et 14 seulement chez les vaccinés (157). La vaccination fut poursuivie daps les années suivantes et ainsi que l’indi¬ que le tableau rrr établi par les soins du Département de l’Hygiène d’Ecosse et reproduit dans les publications de l’Organisation mondiale de la Santé, la situation épidémiologique en matière de diphtérie devint telle qu’alors qu’en ro40, il y avait eu rs.000 cas de diphtérie, il n’y avait plus, en 1940, que 333 cas de diphtérie (dont 2%2 cas chez les non¬ immunisés qui étaient en très faible proportion et 6r chez les vaccinés) et 14 morts, tous chez les non-vaccinés. Cette campagne de vaccination antidiphtérique poursuivie en Ecosse a toute la valeur d’une grande expérience, scientifiquement con¬ duite. Elle a été réalisée dans upe région très étendue et dans les condi¬ tions de la pratique, en, pleine guerre, c’est-à-dire dans une période peu favorable au succès d’une méthode d’immunisation et propice, par con¬ tre, au développement de la maladie et à sa gravité; elle a été entreprise alors que l’épidémie de diphtérie était envahissante et non à son décours. Rien ne manque donc à la rigueur de l’essai, pas même les « témoins » non-vaccinés chez lesquels la maladie a continué de sévir avec toute sa (155) Journ of the Americ med Assoc 1953 151 p935 (155) Ces renseignements nous ont été confirmés par des documents officiels que nous devons à l'obligeance du Dr Metcalfe Directeur général de la Santé d'Australie (157) Voir A. Russel Proc Roy Soc of medecine 1943 36 n10 p503 et The Lancet 1943 analysé dans le Bull of Hyg 1944 19 n4 74 A LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOVEN DES VACCINS 7 malignité (rs8) puisqu’en deux ans, répétons-le, elle a conduit au trépas (malgré la sérothérapie) 794 sujets non-vaccinés, alors que r4 seulement des vaccinés ont succombé. De tels résultats illustrent de façon particu¬ lièrement frappante l’efficacité de la vaccination antidiphtérique et doi¬ vent convaincre les plus incrédules, sous la seule réserve qu’ils soient de bonne foi. La mise en œuvre de la vacination n’a pas été limitée à l’Ecose. Elle a étéétendue à l’ANCLETERRE et au PAYS DE GALLES. Le Ministère anglais de la Sanité publique a, en cffet, engagé contre la diphtérie une véritable croisade, à partir de ro4T. De ro4r à fin 1951. environ ro millions d’enfants ont été vaccinés soit plus de 70 p. 100 de la population enfantine. Les statistiques officielles (rso) que nous reproduisons en un tableau (tableau IV) moptrent à l’évidence que la morbidité et la mortalité n’ont cessé de diminuer en Angleterre, à dater de 1942, à mesure que s’ac¬ croissait le pourcentage des enfants vaccinés. Ainsi, tandis que durant les quatre années 1938-1030-1040-1041 alors que l’effet de la vaccination n’avait pu se faire sentir, étant donné le nombre relativement faible de vaccinés, il y eut en moyenne, chaque année, 50.000 cas de diphtérie et 2,500 morts (en dépit de la sérothé¬ rapie); par contre, douze ans après, en tosr, année où le chiffre des vac¬ cinés atteignait, comme nous l’avons dit, un peu plus de 70 2% de la popu¬ lation enfantine, le nombre total des cas de diphtérie déclarés n’était plus que de 600 avec seulement 32 décès. Pour 80 enfants qui en 1o40 suc¬ combaient à la diphtérie, un seul est mort en Tos1, en Angleterre et dans le Pays de Galles. En 1953, on a enregistré 266 cas et 23 morts. En 1054. ont été signalés 107 cas et o décès (ces derniers chiffres sont provisoires mais ne peuvent guère varier). (158) L'auteur qui rapporte les résultats de cette campagne de vaccination signale, chez les malades, une forte proportion de C. Diphteriae gravis (159) Transmises par le Dr et T Conybeare du ministère anglais de la Santé Publique PCTTPITETZTSRTT MA IFI 2TCE DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOVEN DES VACCINS 77 Ces chiffres sont de beaucoup les plus bas qu’on n’ait jamais connus Qutre-Manche. De tels résultats font grand honneur aux Services de la Santé britannique et une telle réalisation pratique est à prendre comme modèle. Chaque année, le Ministre anglais de la Santé ouvre la campagne de vaccination antidiphtérique. Dans l’une de ses allocutions, il estimait que si au moins 75 22 des enfants d’Angleterre étaient vaccinés, la diph¬ térie disparaitrait comme maladie épidémique. Cette prédiction est bien près d’être totalement réalisée. Ailleurs, le Ministre anglais s’exprimait ainsi, «en dehors du fait que les jeunes vies qu’il est impossible d’évaluer en sommes d’argent ont été sauvées, la diminution du nombre des cas de diphtérie, au cours de ces dernières années, a entrainé une réduction de plusieurs millions de livres sur les frais de traitement à l’hôpital, frais qui doivent être pré¬ levés sur les fonds publics ». Et précisément, l’une des conséquences de la découverte de l’apa¬ toxine diphtérique et de son application à la prophylaxie de la diphtérie. c’est la diminution sans cesse croissante de l’emploi du sérum antidiph¬ térique puisque, en Io51, il y a eu en Grande-Bretagne approximative¬ ment 59,000 cas de dipbhtérie de moins à traiter qu’en ro4r et à New York en roso, seulement 72 cas de diphtérie ont été passibles de la séro¬ thérapie contre r5,000 cas annuellement avant r920. Un progrès chasse l’autre: Qui donc se plaindrait: 78 LA LUTE PRÉVENTME CONTRE (ES MALADIES INTECTIEUSES Dans un rapport présenté, en TOs1, au Parlement anglais par le Ministre de la Santé, il est proclamé : L’accélération rabide de la chute de la morbidité et de la mortalité diphtériques est due à la vigoureuse cambagne nationale d’immunisa¬ dion (160). et encore: Daxs la latte contre la dibhtérie, le friomole de l’immuuisation continue. Enfin, dans un article publié en juillet ros3, il est dit. La campagne nationale de vaccination antidiphtérique en Grande-Bretagne, n’a guère plus de dix ans mais on estime que le pays a déjà bénéficié de 19.000 vies d’enfants et de quelques dix millions de livres sterling d’économies représentant les frais du traitement hospitalier. Ainsi la campagne, bien que tardive (la France, le Canada et les Etats-Unis nous ont précédés dans la généralisation de la vaccination), semble avoir eu des résultats extrèmement satisfaisants. On pense que tant qu’une proportion élevée de la population continuera à être immunisée, les cas de diphtérie reste¬ ront rares » (16r). Compte tenu des conditions diverses d’application de la vaccination antidiphtérique, de sa généralisation plus ou moins rapide et complète. des résultats analogues à ceux que nous venons de faire connaitre ont été acquis en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en Esbagne, en Finlande, en Italie, en Suêde, en Suisse, dans l’Union des Rébubliques Socialistes Soujétiques (U. R S. S.), en Uruguay, en Yougoslavie et jus¬ qu’au lointain la2Ox. En ALLEMACNE, par exemple, si des essais avaient été pratiqués avant la deuxième guerre mondiale, la vaccination n’a vraiment pris son essor qu’en 1946. Des renseignements que nous avons pu recueillir (162) et qui sont groupés en un tableau (Tableau v), il ressort que, tandis qu’en 1940 on avait signalé 142,788 cas de diphtérie et 7.576 décès, en fo5T, alors que plus de 6,000,000 d’enfants ont été vaccinés en six ans, on enregistrait seulement 27,156 cas de diphtérie et 532 décès. En TOSA, on a signalé 11,466 cas et 60 décès. Bien que ces derniers résultats soient notés comme provisoires, ils ne peuvent subir que peu de modifi¬ cations. On peut dire en gros qu’en 1954 il y eut 120 fois moins de décès qu’en 1946. La comparaison de ces résultats avec ceux obtenus en Grande¬ Bretagne affirme davantage encore l’influence de la vaccination sur la diminution progressive de la morbidité et de la mortalité diphtériques. (160) Report of the Ministry of Health London aout 1951 (161) The Lancet 1953) 265 n6777 p.125 (162) Grâce à l'obligeance du DVon eschowicz attaché vulturel près la Léga tion à Paris de la République Fédérale Allemande) Berlin n'est pas compris dans la présente statistique. DE L’HOMME ET DLS ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 29 En BELCIQUE, après les essais préliminaires entrepris par Bessemans. Timbal. Nélis, etc., la vaccination au moyen de l’anatoxine diphtéri¬ que fut appliquée largement à partir de 1945 et depuis cette date comme la rapporté à diverses reprises. P. Nélis, le taux de mortalité par diph¬ térie n’a cessé de diminuer (162 bis). AU DANEMARK, à COPENHAGUE, grâce aux campagnes de vaccination menées à l’instigation première de Thorvald Madsen (ancien président de la Section d’Hygiène de la Société des Nations), il n’y a eu, en rosr. aucun cas de diphtérie (163). A ces campagnes ont pris une part active Knud Boilen. L. Ipsen. H. C.A. Lassen. E. Ammundsen, L. Bang, etc. En ESPACNE, d’après Blanco Otero, la vaccination antidiphtérique a été organisée sous l’autorité du Dr. Palança (Directeur Général des Ser vices de la Santé publique), au début de 1940, alors que régnait une épidé¬ mie de diphtérie en pleine progression: elle a été déclarée obligatoire en 1943 Selon Blanco Otero (r63 bis) la mortalité par diphtérie était devc¬ nuc, en 1916, quinze fois inoins élevéc qu’en 1930. En ITALIE, la loi rendant obligatoire la vaccination contre la diph¬ térie à l’aide de l’anatoxinc a commcncé à être appliquée à partir de juin r930. Des rapvorts publiés dans la suite ont confirmé les résultats satisfaisants déjà obtenus auparavant, du fait de la vaccination par l’anatoxine diphtérique réalisée sous l’influence agissante de d’Antona, de Belfanti, de Caronia, de Imbasciati, de zironi, etc., de A. Bosa ct ses collaboracee 69» (e)): (162 bis) Voir, par exemple. P. Nélis. Scatpct, 1949, n° 34. (163) Annual Report from the Commissioncr ot Hcalth iu Copephagen, pour l’année 1951. d63 bis; Blauco Otero, La Presse Médicale, 1948, n°. 1. p. 3. 6. Vol. « siritti Mcdici ixonore di Achile Sclaroy LIMo,A Rot 198 (0 Chirtico Pediatrica, 1954, 36, n.° 19. LA LUTE PŔVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES 80 A ROME, d’après un rapport publié dernìrement par Vitullo (164). la morbidité diphtérique a diminué fortement et graduellement depuis 1944, diminution due notamment, ajoute l’auteur. « à la vaccination par la méthode de Ramon ». En POLOCNE, à l’instigation de L. Hirszfeld, la vaccination par l’anatoxine diphtérique avait pris, avant le conflit mondial, une grande ampleur, notamment à Varsovie. Hirszfeld était venu lui-même, en 1030, en exposer les résultats à Paris, devant l’Académie de Médecine (164 bis). La guerre a malheureusement interrompu cet essor. Nous avons tout lieu de pepser qu’il a repris. En SUÈDE, on a constaté, au cours de ces dernières années, sous l’in¬ fluence de la vaccination, une diminution considérable de la morbidité diphtérique qui, par exemple, pendant la période 1940-1948 était de 7,237 cas (moyenne annuelle). Les déclarations en roso sont tombées à 65 cas, en 1os1 à 43 et en 1932 à 30. Sur ces 30 cas de diphtérie, 26 sont survenus dans le même comté (165). En SUISSE, le Canton de Cenève, grâce aux eforts du Dr. Audéoud et du Professeur Reh, a été l’un des premiers à rendre obligatoire, la vaccipation par l’anatoxine diphtérique et l’un des premiers à en constater les heureux effets (165 bis). En U. R. S.S nos collègues russes Barikihe. Netchadimenko, Isabo¬ linski, etc.., et surtout Zdrodowski et ses collaborateurs, avaient con tribué à organiser la lutte contre la diphtérie au nioyen de l’anatoxine diphtérique (165 ter). Sans avoir de renseignements précis, nous savons que cette lutte a été poursuivie avec succès. En YOUCOSTAVIE, sur l’initiative des Immunologistes et Hygiénistes tels que Simitch. Djourichitch, etc, (166), la vaccination par l’ana¬ toxine avait été introduite et s’y était développée avant la deuxième guerre mondiale; elle y avait été déclarée obligatoire en 1937. Ramsine en a apporté les premiers résultats en 1930, il montre ses heureux effets sur la porbidité et la mortalité par diphtérie notamment à Belgrade De nombreux auteurs ont, depuis lors, confirmé en Vougoslavie, la va¬ leur de la vaccination contre la diphtérie au moyen de l’anatoxine diph¬ térique. En AMÉRIQUE DU SUD, la vaccination antidiphtérique par l’anatoxine s’est implantée et développée, notamment en ARGENTINE, à l’instigation de Sordelli, en COLOMBIE grâce aux efforts de Béjarano, en URUcUay sur l’initiative principalement de Fabini et Panizza-Blanco. Bien appli¬ (164) D, Vitullo Nuovi Ann d'Igiene e microbiolohia 1953 4 n2 p77 (164 bis) L Hurszfield Bull Acad de Medecine 1939 121 p712 (165) The Journ of the Americ Med Assoc 1953 152 p264 (165bis) Th Reh revue Suisse Hygiène 1940 p 302 analysé in Bull off internat Hygiène publ 1942 34 p59 (165 ter) on consultera à cet égard la belle étude biologhique et immunologique de Zdrodowski et Halapina Revue d'Immunologie 1936 2 p221 (166) Voir les Rapports de Milutn Djourichitch de Milos B Bajsanski dans "Les travaux du premier Congrès des Médecins de Yougoslavie (1948à Belgrade 1949 81 DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS quée elle a fourni des résultats analogues à ceux obtenus dans les autres continents. AU JAPON, si quelques essais limités avaient été pratiques avant le II° conflit mondial, l’essor de la vaccination au moyen de l’anatoxine diphtérique ne commenca à prendre de l’ampleur qu’à l’issue de la guerre et surtout au cours de ces dernières années; les résultats n’ont pas tardé à apparaitre, comme le montre le Tableau VI (166 bis). (166 bis) Nous devons ces renseignements à l’obligeance du Dr Ozaki, dOsaka. 82 LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES CONCLUSIONS On peut, en résumé, mesurer les progrès accomplis au cours de trente années d’application de la vaccination antidiphtérique, en rappe¬ lant que la morbidité par diphtérie qui était, avant la généralisation de la vaccination par l’anatoxine diphtérique, de plus de 20,000 cas cha¬ que année pour la France entère, est tombée à 2,680 cas en 1951 et la mortalité qui était de 2.200 décès (moyenne annuelle) avant 1924 a été ramenée à 85 décès en 1o54, en rappelant aussi qu’en Angleterre et dans le PayS de Galles, il y eut en 1038, avant le début de la vaccination systéma¬ tique et alors que seul était utilisé le traitement par le sérum antidiphtéri¬ que, 65,000 cas de diphtérie et 2,860 morts tandis qu’en ros3, après douze ans de vaccination, le nombre des cas est tombé à 266 et le chiffre des décès à 23; et en 1954, on enregistre seulement 167 cas et o décès: en rap¬ pelant enfin que la mortalité diphtérique est devenue nulle ou prssque dans des villes comme New York (un décès en 1os2 contre 1. 300 avant 1920), comme Chicago. Cleveland. Pitsburg, comme Toronto. Coben¬ haguc, Paxis, etc., villes dans lesquelles la vaccination a été particulière¬ ment bien exécutée. Ainsi que l’a écrit dernièrement un auteur anglais des plus qualifiés, Gale. La rotection d’ux nombre considérable d’enfanis a été l’une des entrebrises les blus réussies de la médécine bréventiue en Angleterre et dans les autres bays (167). Quelle est donc, en effet, la méthode d’immunisation qui, en si peu de temps, a connu dans le monde entier une telle réussite? lamais aucun procédé de vaccination, jamais le « génie épidémique» n’ont permis de réduire ainsi, en quelques lustres, la morbidité et d’amener à zéro ou presque la mortalité d’une maladie contagieuse, épidémique et meur¬ trière, telle que la diphtérie, dans des villes aussi grandes et à population aussi dense que New YOrk. Chicago, Toronto, Paris. Copenhague, etc. et de diminuer dans des proportions considérables la morbidité et la mor¬ talité diphtériques dans des contrées aussi vastes que l’Ecosse, l’Angle¬ terre, la Suède, l’Australie, la Frence, etc.. Ainsi le Problème bose Par Naboléon T', lors du Concours institue par lui, en 180%, à savoir : la découverte des moyens grobres a apéter les progrCs du « croub » et a en brévenir l’invasion » peut être considéré comme résolu. De même sont entierement realisés les soulaits formulés ex 1884. bar Cadet de Gassicourt abbelant la découverte d’une méthode de vacci¬ nation contre la dibhtérié, combarable la vaccination antivariolioute de Ienner. Aujourd’hui, les résultats acquis montrent incontestablement que la dibhtćrie recule dans tous les bays du monde où la vaccination par lanatoxyine dibhterique est systématiotement et convenablement bra¬ tiauce. La dipbtérie est vaincue comme l’a été la variole, sous l’éffet dé la vaccination iennerienne. (167) AH Gale The Practitionner 1951 167 p228 83 DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS Cebendant, dans ce genre de lulte, il ne conxrient bas de s’endoy¬ mir sur des lauriers, sous beine d’assister ux jour ou l’autre a des retours offensifs du hau. L4 vaccinafion antidibhtérique doit étre Parlout boursdivie sans désembarer. Il y a une vingtaine d’années j’apportais à Emile Boux, quelques mois avant sa fin, les résultats obtenus à cette époque en France et ail¬ leurs (notamment aux Etats-Unis et au Canada), dans l’application, de l’anatoxine à la vaccination contre la diphtérie. A ma vive surprise, lui qui était d’ordinaire si réservé et si mesuré dans ses appréciations, me dit : « Vous devriez pousser un cri de triomphe. » Ce cri, je ne l’ai pas poussé alors, car je l’estimais prématuré Au¬ jourd’hui, je suis autorisé, par les faits à le faire entendre et à le faire en¬ tendre en hommage à la mémoire du grand pastorien dont le travail fon¬ damental, avec son disciple Versin, sur la diphtérie et plus spécialement sur la toxine dibhtérique (1888), à conduit, d’abord, à la découverte par Bebring et Kitasato, de l’antitoxinxe (1800) et un peu plus tard à la pra¬ tique de la sérothérabie antidibhtérque (E. Roux et ses collaborateurs. en France, 1804), puis, au. bout de trente-cina années, à la mise en évi¬ dence de l’anatoxine dibhtéxque et finalement à la réalisation de la vaccinatiox contre la dihtérie, grâce laoutelle cette maladie qui fut dais le Dassé la « terreur des mamans » et qui iusat’à il y a beu de tembs encore donnait bien des soucis aux braticiens, ne sera bientôt qu’un mau¬ vais souvenir dans l’esbrit des médecins et au cœur des mères. de la circulation, chez cet animal. LE TÉTANOS ET LA VACCINATION AU MOYEN DE L’ANATOXINE TÉTANIQUE RESULTATS Le tétanos a été considéré de tout temps comme une maladie redou¬ table ferrifiante, comparable dans ses suites à la rage, mais beaucoup plus fréquente et si la diphtérie était depuis toujours la « terreur des mères n, le tétanos, lui, était « l’épouvante des blessés » surtout pendant les guerres. Il est, en effet, capable d’entrainer la mort, dans des souffrances épouvantables, de 60 à 80 0%, parfois davantage, de ceux qu’il atteint. Dans le temps jadis, absolument aucune thérapeutique curative ou préventive avant une quelconque efficacité n’avait pu lui être opposée. Cependant un grand espoir était né lorsque Bebring et Kitasato firent connaitre, en 1800, là découverte de l’antitoxine tétanique en même temps que celle de l’antitoxine dipbtérique et lorsque les travaux mémorables de Roux et Vaillard, de Nocard, en France, etc., eurent annoncé l’effet préventif de l’injection de sérum antitétanique pratiquée chez le blessé, immédiatement àprès le traumatisme. Mais, on devait bien vite s’en apercevoir, l’action préventive du sérum antitétanique connait des limites (168). En effet, si l’immunité Passive que procure à un organisme humain le sérum antitétanique d’origine hétérologue, équine le plus souvent. s’installe presque immédiatement, elle est de très courte durée, tout à fait éphémère. L’antitoxine tétanique apportée par le sérum antitétanique s élimine rapidement au bout de quinze jours ou trois semaines au plus chez l’homme, plus rapidement encore si le sujet qui reçoit l’iniection de sérum a déjà été soumis plus ou moins longtemps auparavant à la sérothé¬ rapie quelle que soit la spécificité de celle-ci (Ramon et Falchetti) (160). Il arrive donc un moment, variable avec les sujets, où l’antitoxine d’ori¬ gine passive a totalement disparu, d’où les cas de tétanos dits « post¬ sériques » observés à de très nombreuses reprises, principalement pen¬ dant la première guerre mondiale (P. Bazy, P. Carnot. Claude et Lher¬ mitte. Mauclaire. Lenormant. Montais. Bérard et Lumière. Comité an¬ glais du tétanos, etc..) et que l’on signale encore de temps à autre. Ainsi () Pour plus amples détails, constulter G. Ramon,. Revue d’Immunologie, 1953. 17, n° 6. p. 281, Der Chirura, 1953. R. 23. H. 6, p. 241 (en langue allemande). Une biblio¬ graphie très complête est, en outre, donnée dans la remarquable étude de d’Aptona. Revue d’Immunologie, 1953 ne L. p. 1 voir également d’Antona, brochure de 131 pages en langue itallènne. L. salpjetra, éditeur, Fjorence. (168) Quant à l’effet «curatif» du sérum antitétanique chez le malade atteint de tétanos, on devait très rapidement se rendre compte qu’il était des plus incertains. (169) Voir à ce propos les données expérimentales que nous avons recueillies avec E. Falchett (Comptes rendus Soc. de Bioloole, 1935, 119, p. 6): chez un lapin qui a recu deux ou trois intéctions de sérum antitétanique à une semaine d’intervalie, l’antitoxine apportée par une nouvelle inlection disparait parfois en moins de vingt-quatre heures de la circulation chez cet animal 86 LA LUITTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTUEUSES par exemple, Fauquez a rapporté en 1937 un cas de tétanos survenu seize jours seulement après les blessures chez le sujet qui avait reçu tout de suite après ll'accident une injection de sérum antitétanique (170) Sorrel a relaté à la même époque un cas de tétanos à issue fatale qui dbuta dix huit jours après la sérothérapie préventive pratiquée immé diatement après l'accident (171) En 1951 Corcos et ses collaborateurs (de Tunis) ont mentionné le cas d'un malade qui a succombé au tétanos bien qu'il ait reçu une injection de sérum antitétanique tout de suite après la blessure, source de l'infection tétanique (172), etc... Sans doute, en présence d'une blessure qui tarde à se cicatriser, il reste la ressource de renouveler, et plusieurs fois s'il en est besoin, l'in jection de séryuml abrtiténique mais en outre que ces réinjections présen tent en dehors de l'élimination de plus en plus rapide de l'antitoxine des inconvénients souvent très sérieux (des accidnets sériques, des trou bles anaphylactiques par exemple), elles ne mettent pas toujours le blessé à l'abri du tétanos. c'est ainsi qu'il a été constaté des cas de tétanos après plusieurs injections successives de sérum (lumière, Sir David Bruce, etc...) et longtemps après la date de l'origine de la blessure, jusqu'à trois mois et demi dans certains cas (Comité anglais du tétanos 1917) Il existe de plus des individus particyulièrement exposés à la toxi infection tétanique par leur métier (agriculteurs, palefreniers, militaires etc???) par leur genre de vie (enfants au cours de leurs jeux, sportifs) par leur séjour dans les rgions tétanifères (173), etc... or la pratique des réinjections de sérum antitétanique à chaque nouvelle blessure offre des inconvénients plus ou moins graves et n'est pas sans entra$iner de nombreuses difficultés. Un dilemme se pose d'ailleurs souvent devant le clinicien en pré sence d'une blessure: ne pas pratiquer la sérothérapie préventive et faire courir au blessé le risque de l'éclosion du tétanos ou bien faire l'injection de sérum et dans certains cas, exposer le blessé à des accidents sériques par fois quoique très exceptionnellement dramariques, dans l'une ou l'au tre de ces alternatives, le praticien pouvant être selon la législation française l'objet de poursuites judiciaires. En fin, nombre de cas de tétanos se déclarant à la suite de plaies insoupçonnées de la peau ou de lésions profondes (tétanos puerpéralà demeurent également inconnus. pur la prévention de ces cas et, en géné ral de tous les cas de tétanos groupés jadis sous l'expression d'ailleurs impropre, de tétanos spontané ou médical, la sérothérapie ne peut rien, puisque la nécessité de sa mise en oeuvre n'apparait pas. dans un étude magistrale récente, d'Antona a bien montré les dé fauts les imperfections l'efficacité toute relative sujette à des échecs de la séroprévention au moyen du sérum antitétanique (174) (170) Fauquez Presse Médicale 1937 n71 p1263 (171) E Sorrel Mémoires de l'Acad de Chirurgie 1938 64 p632 (172) A Corcos et ses collaborateurs Bull de l'Acad de medecine 1951 (173) Tout dernièrement Chavannaz a décrit les régions tétanifères en France (mémoires de l'Académie de Chirurgie, 1953 79 P46) Il montre les risques accrus de tétanos dans ces régions et comme nous l'indiquerons plus loin, conseille, pour diminuer et éliminer les risques, la vaccination antitétanique. (174) d'antona, revue d'Immunologie, 1952, n1, p1 DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 87 Aussi, pour les motifs que donne d’Antona à l’appui de sa thèse. pour les raisons que nous avons nous-même fournies à différentes occa¬ sions et que nous venons d’évoquer à nouveau, une vaccination capable de conférer une immunité non pas passive et toute provisoire comme celle que procure le sérum antitétanique mais active, solide, permanente, était¬ elle considérée depuis longtemps comme très souhaitable et sa réalisa¬ tion avait-elle été tentée à plusieurs reprises dans le passé (175). Ces tentatives furent sans lendemain et les choses en étaient là lors¬ que, en 1923, nous fimes connaitre l’anatoxiue tétanique, antigène nou¬ veau dans son principe, dans l’ensemble de ges propriétés, comme dans son mode d’utilisation (176). Grâce à ses qualités, l’anatoxine tétanique allait permettre de réali¬ ser pratiquement, dans les meilleures conditions, chez l’homme comme chez les animaux domestiques, l’immunisation active contre le tétanos qui apparaissait si hautement désirable. L’ANATOXINE TÉTANIQUE ET SES PROPRÍTÉS L’anatoxine tétanique est obtenue selon la même technique que l’anatoxine diphtérique;: addition à la toxine d’une proportion de for¬ mol variant suivant le mode de préparation, la composition de celle-ci¬ (de 3 à s centimêtres cubes de la solution commerciale d’aldéhyde for¬ mique par litre de bouillon tétanique), puis exposition de la toxine ainsi formolée à l’étuve (38 à 40) durant un mois. De même que l’anatoxine diphtérique, l’anatoxipe tétanique ré¬ pond au principe général des anatoxines. Convenablement préparée et bien contrôlée, elle est inoffexside elle possède cette qualité sur laquelle nous avons, dès nos premiers essais, attiré l’attention: le bouvoir autigêne intrinsêque, pouvoir que l’anatoxine tient de sa constitution, d’engendrer l’immunité et qui peut être évalué in oitro grâce à upe méthode physique, la méthode de flocu¬ lation, que nous avions mise en évidence en 1922. (175) Cest ainsi, qu’en 1915, au cours de la première guerre mondiale. Fisler et Lœewenstein (Wien. Klin. Voch, 1915, p. 1224) tentèrent la vacciuation contre le tétanos à l’aide de toxine tétanioue qu’iis atténuaient dans ses propriétés tosigues en utilisant le tormol, comme nous l’avons indiqué au début de cet ouvrage. Malgré la répêti: tion des doses iniectées et leur volume considérable (5 ou même 10 centimêtres cubes), le sérum des sujets ainsi traités ne neutralisait même pas la quantité de poison tétanique représentant une dose mortelle pour la souris. Devant un échec aussi total constaté che deux douzaines d’individus. Eisier et Lœvenstein abandonnerent leurs recherches. Dix ans après que ces expérimentateurs eurent complêtement échoué, nous devions connaitre le succès avec l’anatoxine tetanique. En 1917. H. Vallée et L. Bazy (Bul. Soc, de Chirurgic. 27 juin 1917) avaient également tenté la vaccination contre le tétanos. fls iniectèrent : sept blessés, sous le couvert de la sérothérapie antitétanique préalable, des doses répétées (deux doses à cina jours d’intervalle), de toxine tétanique plus ou moins atténuée par son mélange extemporané avec le liquide jodo-joduré de Gram : ces mélanges, couram¬ ment utilisès depuis les expériences de Rehring et Kitasato de Roux et Vaillard, de Nocard (1890-1895), étaient exactement semblables (mêmes proportions de toxine et de liquide de Gram) à ceux dont nous-même nous nous servions à l’époque pour l’immu¬ nsation des chevaux producteus de sérum antitétanique. Dans le serum des sujets ains traités, de l’aptitoxine tétanique, en quantité variable, put être décelée par la technique alors en usage, sans que l’on puisse affirmer si cette antitoxine provenait de l’iniection de sérum antitétanique ou de l’immunisation active par la tosine jodée. LIan 6, Bamon, Connes tods 64, des Seitces, 1923 12, p, l'as, 1a 178 p. 1336 88 LA LUTTE PRVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES L’anatoxine tétanique possède d’autres qualités semblables à celles de l’anatoxine diphtérique cès qualités offrent, elles aussi, du point de vue pratique surtout, une réelle importance. L’anatoxine tétanique se montre relativement résistante à la chaleux, plus résistante que la toxine dont elle est le dérivé. Elle est « irréversible » c’est-à-dire qu’elle ne risque pas de récupérer la moindre toxicité de la toxine d’où elle est issue. Enfin, elle est stable dans sa valeur antigène comme dans son innocuité. Elle peut se conserver pendant plusieurs années (177). Telle est brièvement présentée, dans son mode d’obtention et dans ses propriétés, l’anatoxine tétanique que nous brobosions il y a mainte¬ nant trente années bour la vaccination de l’homme et des animaux contre le tetanos. RASES EXPÉRIMENTALES DE L’IMMUNISATION CONTRE LE TÉTA¬ NOS PAR L’ANATOXINE TÉTANIQUE C’est au cours d’une série de travaux entrepris dès ro24 qu’a été étudiée au laboratoire, en premier lieu, l’immunisation active au moyen de l’anatoxine tétanique. Tout d’abord, différentes expériences réalisées chez l’animal et cer¬ taines données résultant des essals de vaccination antidiphtérique effec¬ tués à la même époque apportèrent des indications précieuses pour les recherches qui devaient être entreprises ultérieurement, chez l’homme. dans le domaine de l’immunisation antitétanique. C’est aipsi qu’il était établi expérimentalement que l’immunité ca¬ ractérisée par la présence de l’antitoxine tétanique dans le sang des ani¬ maux, peut être obtenue facilement chez le cobave et le lapin (178). D’autres expériences encore, effectuées chez le cheval avec notre collaborateur P. Descombey permirent de se rendre compte que deux iniections d’anatoxine tétanique, de dix centimêtres cubes chacune, à un mois d’intervalle, entrainent l’apparition et le développement, chez cet animal, de l’antitoxine tétanique (179). Dès cette époque, il était démontré que le cheval de même que le cobave (180) vaccinés l’un et l’autre au moyen de l’anatoxine tétanique sont capables, de résister à la toxis-infection tétanique expérimentale. Descombey (T8r) précisait, sous nos veux, qu’un cheval dont le sang re¬ cèle dans son sérum, du fait de la vaccination, une quantité d’antitoxine aussi minime que celle correspondant à r/'soo d’unité antitoxique par (177) Voir pour plus de détails pour les références bibliographiques les chapitres concernant le principe des anatoxines les propriétés et le mode d'action des ana toxines, etc... (178) G. Ramon, Comptes rendus Acad des Sciences, 1924, 178 p.1436 Annales Inst Pasteur 1925 39 p. 1 G. Ramon et A Laffaille Comptes rendus Soc de Biologie 1925 93 p582 (179) G Ramon et P Descombey Comptes rendus Soc de Buiologie 1925 93 p 508 et p598 1926 p434 annales Inst Pasteur 1927 41 p 834 (180) G Ramon et E grasset Comptes rendus Soc de Biologie 1927 97 pp1133 Cette résistance des cobayes vaccinés par l'anatoxine téytanique à l'infection expérimen tale devait être confirmée dans la suite, en particulier par Jaulmes et Jude Revue d'Immunologie, 1939 5 p459 (181) P Descombey Annales Inst Pasteur 1925 39 p485 DE LTHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 92 centimêtre cube, subborte imhuxément sans résenter de sigues de tta¬ Mos, l’insertion dans ses muscles d’une écharde imprégnée de spores téta¬ niques et de germes microbiens divers, par exemple des staphylocoques. alors que, par contre, un cheval témoin auquel on n’a pas injecté d’ana¬ toxine et qui est soumis à l’épreuve de l’écharde fait un tétanos rapide¬ dement mortel. Il était, en outre, démontré, toujours à la même époque, que l’addi¬ tion à l’axatoxine tétanique de boudre de tabioca, selon le principe des substances adiuvantes et stimulantes de l’immunité (182), permet chez le cheval, de multiplier par dix et même par cinquante l’immunité pro¬ duite par l’anatoxine iniectée seule (183). De même, les mélanges d’anatoxine tétanique et d’atoxyl ou de try¬ pasamide.., et autres produits chimiothérapiques ne génent en aucune façon l’immunité antitétanique dans son développement mais, au con¬ traire, augmentent sa valeur (184), quoique dans de moindres propor¬ tions que le tapioca. C’était là, d’autre part, remarquons-le, le premier exemple de l’association de l’immunisation préventive et de la chimio¬ thérapie. Les essais préalables réalisés, chez l’homme, en étroite collaboration avec Chr. Zoeller (de l’Hopital militaire du Val-de-Grâce) conduisirent promptement à la détermination des conditions biologiques et techniques de la vaccination antitétanique dans l’espèce humaine (185). Ils permi¬ rent dès 1026. T° de bréciser le nombre, le vohtme, l’esbacement des doses d’ana¬ toxine fétanique:. 2° D’établir le rôle important, dans la pratique de la vaccination antitétanique, de l’injection dite de «aobel, qui renforce considéra¬ blement l’immunité dans sa valeur et dans sa durée. 3 De montrer l’influence des substances adiuvantes de l’immunité et l’intérêt des « vaccinations asociées » (186) spécialement en ce qui concerne l’immunisation antitétanique. Nous constations, dès l’abord, que l’iniection d’une première dose d’anatoxine de r centimêtre cube, par exemple, provoque chez l’homme, l’apparition d’une quantité d’antitoxine à la vérité relativement faible. sinon nulle. Une seconde iniection faite trois semaines ou mieux un mois après la première, est suivie d’une production très importante d’anti¬ toxine. Enfin, cette production devient encore plus importante et, par conséquent, l’immunité atteint un degré élevé, après une troisième iniec¬ (182) G Ramon Bull Soc Cent de Med Vet 1925 101 p 227 et 348 (183) G Ramon et P Descombey Comptes rendus Soc de Biologie 1925 93 p 898 Annales Inst Pasteur 1927 41 p834 (184) L Nattan Larrier G Ramon E Grasset Annales INst Pasteur 1927 41 p848 (185) G Ramon et Chr Zoeller Comptes rendus Acad des Sciences 1926 182 p 245 Bull Acad de Médecine 1926 95 n5 La Presse Médicale 1926 n31 Bull Soc Med des Hopitaux 1926 50 n34 Annales Inst Pasteur 1927 41 p803 (186) C'est précisement au cours de nos recherches sur l'immunisation à l'aide de l'anatoxine tétanique que nous avons été amené, avec Chr Zoeller à créer la méthode des vaccinations associées. Comptes rendus Soc de Biologie 1926 94 p106 Annales Inst Pasteur 1927 41 p803 90 LA LUTE PRÉVENTIVE CONIRE LES MALADIES INFECTIEUSES tion. La première injection d’anatoxine, qui ne fait apparaitre que des traces d’antitoxine, permet en réalité à une propriété de l’organisme qui jusque là n’avait pu se manifester, de se révéler. Cete propriété se tra¬ duit sous la forme d’une abtitude remazauable réagir "ne nouvelle iiectio, aptitude qui se développera d’autant mieux que l’intervalle de temps entre la première et la seconde injection sera plus grand et grâce à laquelle l’immunité résultant de cette nouvelle iniection sera fortement accrue. C’est pourquoi nous avions primitivement recom¬ mandé comme délai entre les injections surtout entre les deux premières. trois semaines ou mieux un mois (187). La répartition dans le temps disions-nous dans nos premières publications, a plus d’efficacité que la multiplication des iniections; ainsi deux iniections d’anatozine tétanique faites À trois semaines d’intervalle, conférent une immunité d’un taux blus élevé que trois iniections de la même anatoxine faites à cina jours d’intervalle dont l’effet imnutuisant est à beine mayqué. D’autre part, si un délai de plusieurs mois sépare une quatrième iniection d’anatoxine de la troisièmhe, le taux antitoxique du sérum du sujet ainsi traité fait un bond vraiment considérable, de telle sorte qu’il dépasse très largement, en quelques jours, celui atteint tout de suite après la troisième injection. Cette observation constitue la base sur laquelle s’appuie la pratique de l’injectiox de rabbel, dont les conséquences sur la solidité de l’immunité et sa durée sont des plus heureuses. Comme nous devions le faire remarquer dès le début de nos recher¬ ches, on observe, au cours de l’immunisation active au moyen de l’ana¬ toxine, des bhénomènes différents et des résultats inverses de ceux de l’immunisation bassive l’Aide du sérum antitétanique. Quand il s’agit de l’anatoxine, la répétition des doses, surtout à intervalles éloignés amplifie l’immunité active produite; quand il s’agit du sérum, la répé¬ tition des doses diminue de plus en plus la valeur et la durée de l’immu¬ nité passive conff́rée. A ce point de vue comme à d’autres, la supériorité de la vaccination au moyen de l’anatoxine tétanique sur la sérothérapie préventive à l’aide du sérum antitétanique apparait éclatante. D’autres essais entrepris en 1926-10%% avec Natan-Larrier et E. Grasset (188) avaient, en outre, montré que la vaccination antitéta¬ nique pratiquée chez la femme au cours de la grossesse ou même quelque temps auparavant, beut conférer , la mère et au nouveau-né, l’im¬ maunité capable de protéger la première contre E tétanos puerpéral, le second contre l’infection tétanique d’origine ombilicale. Nos essais nous avaient encore conduit à un certain nombre d’obser¬ vations dignes d’intérêt du point de vue pratique comme du point de vue théorique. (187) Nous avous, plus tard, ramené ce délai à quinze jours dans la pratique des vaccinations associées, en raison de l’accroissement de l’immunité qui résulte de le mise en œuvre de cette méthode des vaccinations associées, accroissement qut compens largement la diminution du taux de l’immupité oul peut résulter de la réduction de l’intervalle entre les injections. Cet intervalle de quinze jours est d’ailleurs plus faci¬ lement observe. (188) Comptes rendus Acad. des Sciences, 1926, 183, p.458. Annales Inst. Pasteur, 1927, 61, p. 848. DE L’HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 21 Nous devions constater, par exemple, que chez l’homme il n’existe bas d’immunité antitétanique uaturelle (189). Nous avions pu également nous rendre compte que des sujets ateints antérieurement de tétanos et qui avaient survécu ne possédaient aucune immunité antitétanique et pouvaient fort bien être à nouveau atteints de tétanos. L’ensemble des essais ainsi effectués nous abbortaient la breuve que l’anatoxine tétanique est donc bien cabable de faire naitre et dé déte¬ lobber, chez l’homme, l’immunité active bouvant assurer au suijet vac¬ ciné, une protection solide, durable contre le tétanos. ESOR DE LA VACCINATIOM AMTITÉTARIR Dès sa mise en évidence, nous avions proposé l’anatoxine tétanique pour la vaccination de l’homme et spécialement des effectifs militaires contre le tétanos. « L’anatoxine tétanique — écrivions-nous en 1924 — Dourra, Par exemble, être utilisée au début d’une cambagne militaire bour immuniser solidement et brobablement bour la durée de cette cambagne, les com¬ battants contre le tétanos » (100). Ces prévisions faites quelques mois après la découverte de l’ana¬ toxine tétanique devaient être réalisées pleinement dans la suite, nous allons le montrer. Après que nous enmes établi les conditions de son application, trois iniections sous cutanées d’anatoxine tétanique (rcc: 2 cc et 2 cc) à deux ou plusieurs semaines d’intervalle, la méthode de vaccination antitéta¬ nique, reposant sur des bases solides, entra dans la pratique et prit rapi¬ dement son esor, en France d’abord où elle avait vu le jour. Des TO3T, dans un rapport présenté devant l’Académie de Médecine à Paris, au nom d’une Commission chargée d’étudier la prévention du tétanos, le Professeur A. Gosset montrait qu’il est sage de recourir à l’immunisation active (191). L’Académie de Chirurgie, adoptait en 1935, les conclusions d’un rapport de M. Louis Bazy qui énumère les conditions de la mise en œuvre de la vaccination anatoxique et en préconise la diffusion (192). De son côté, la Société des Médecins Insbecteurs scolaires émettait, en 1036, le vœu « qu’il soit pratiqué, dans les écoles les vaccinations asso¬ ciées antidiphtérique-antitétaniqué au moyen du mélange des deux ana¬ toxines diphtérique et tétanique ». (189) Voir à ce propos: G. Ramon et Chr. Zoeller. Annales Inst. Pasteur, 1927 41, p. 810. Comptes rendus Soc, de Biologie, 1927, 96, p. 762 d90n) 6 Ramon. Paris Médtcat ne du 6 décemue 194, Anndles Inst, Posteir, 1933 39. P. 1. (191) But. Acad, de Médecine, 1931, 165, p. 598. (192) BuI, et Mem. Acad. de Chirurgie, 1935, 41, p. 902. 92 LA LUITTE PRÉMENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES En 1936 également, la Société de Médecine légale envisageait, avec intérêt, la pratique de l’immunisation active contre le tétanos au moyen de l’anatoxine tétanique. L’application, à la prophylaxie du tétanos de l’anatoxine tétanique. sans cesse préconisée par les organisations médicales les plus qualifiées et par de nombreux cliniciens, s’est donc de plus en plus développée en France jusqu’au moment où la vaccination antitétanique fut déclarée obligatoire d’abord dans l’Armée française (loi du rs aout 1936) selon la formule des vaccinations associées ,antitétanique-antidiphtérique¬ antityphoparatyphoidique », puis dans la population civile bour tous les enfants (loi du 24 noyembre ro40), chez lesquels elle doit être réalisée en association avec la vaccination antidiphtérique, par le mélange des deux anatoxines spécifiques. C’est surtout l’Armée française qui la première bépéficia de l’application de la vaccination antitétanique. Avant la mobilisation de 1030, près de 800,000 hommes avaient été soumis à cette vaccination. associée aux vaccinations antidiphtérique et antityphoparatyphoidique. Ainsi, une fois de plus, le bays de Pasteur auait ouvert la voie à une méthode nouvelle de vaccination abblicable à la maladie si meurtrière bour l homme qu’est le tétanos. Jusque vers 1034, soit par indifférence, soit par incrédulité ou pour tout autre motif, on n’avait prêté, à l’étranger, que peu d’attention, en général, à la vaccination antitétanique et aux travaux effectués en France. en ce domaine, depuis 1924. Cependant des publications de plus en plus nombreuses parues,hors de France, sur la question de la vaccination au moyen de l’anatoxine tétanique montraient que dans divers pays on pre¬ nait à cette question un intérêt progressif. Comme pour la vaccination antidiphtérique, c’est encore le CANADA qui, l’un des premiers, a saisi l’importance de l’anatoxine tétanique. Ainsi, Sneath et Kerslake (193) ont étudié à fond cette question à l’ins¬ tigation de Fitz-Gerald. Ils ont confirmé le dévelobpemcnt, chez l’homme, de l’antitoxine spécifique après la vaccination anatoxique et l’iniection de rappel, et ils concluent de leurs propres essais que l’immu¬ nisation active, selon la méthode mise au point en France, peut être très avantageusement adoptée pour certains groupes d’individus exposés aux dangers de l’infection tétanique, spécialement pour les militaires. De fait, la vaccipation antitétanique était appliquée à titre d’essai dans l’Armée canadienne, dans les années qui précédèrent immédiatement la deuxième guerre mondiale, et généralisée dans l’ensemble des Forces Canadiennes, dès le début de cete guere. (1993) PAT Sneath The JHourn of the Amer Medic Assoc 1034 102 p 1288 Canad Publ Health Journ avril 1934 Sneath Kerlake The Cand med Assoc Journ 1935 32 p132 DE LIOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 83 Aux ETATS-UNIS, Bergey et Etris. Linçoln et Greenvald, Bergey. Leslie Wilcox, Lones et Moss (194), etc, ont étudié à dater de 1933-1934 chez l’animal et chez l’homme, l’immunité produite par l’anatoxine et ont recommandé celle-ci pour la vaccination contre le fétanos, en insistant sur l’avantage qu’elle présente. En U. R S. S, nombre d’auteurs, parini lesquels Michailova et Weli¬ Kanoy, Rufanoy, Mikhailova et vatsevitch ainsi que Melnik et ses colla¬ borateuts, etc, avaient entrepris de nombreuses recherches sur la vacci¬ nation antitétanique et avaient confirmé toutes les données fournies par les essais poursuivis antérieurement en France (195). ED ITALIE, l’immunisation antitétanique active à l’aide de l’ana¬ toxine était étudiée par différents expérimentateurs, en particulier par d’Antona (196), par Pepeu, par Ottolenghi (197). Conformément à l’avis donné par le Comité des Inspecteurs du Centre général d’Hygiène militaire. il était décidé, en 1o38, que l’Armée italienne serait désormais soumise à la vaccination contre le tétanos, selon la formule des « vaccinations asso¬ ciées », en emplovant le mélange d’anatoxine tétanique et de vaccin anti¬ typhoparatyphoidique. Cette pratique est importante, soulignait-on dans l’Ordonnance officielle réglant l’application de la vaccination antitéta¬ nique dans l’Armée italienne, car elle protège les soldats pendant leur ser¬ vice et aussi plus tard lorsque ces derniers, après leur libération, sont exposés aux risques du tétanos à la suite des accidents pouvant survenir dans l’agriculture, principalement. Ainsi, aux approches de la deuxième guerre mondiale et dès son début, la méthode de vaccination antitétanique prenait dans le monde son plein essor. Et cette guerre allait permettre de vérifier pleinement. chez l’homme, la valeur de la méthode dans la brobhylaxie du tétanos. Sans doute, l’efficacité de la vaccination par l’anatoxine avait-elle été affirmée déjà, dans une certaine mesure, par les résultats des recher¬ ches immunologiques, que nous avions initialement poursuivies avec zoeller, résultats qui avaient été confirmés plus tard, en particulier par les médecins militaires français Sacquépée, Pilod et lude (T98), et par d’autres auteurs en France puis à l’étranger. Sans doute cette efficacité avait-elle été démontrée aussi en regard de la toxi-infection expérimen¬ tale ou naturelle, d’abord chez les chevaux de la Cavalerie de l’Armée française, vaccinés à partir de 1928 par les soins du Service vétérinaire. C’est ainsi qu’au cours de la période 1932-1938, sur un effectif moyen annuel de 22,000 chevaux avant recu les deux injections d’anatoxine téta¬ nique additionnée de tapioca que comporte la vaccination et, en outre. (194) OH Bergey et S Etris Journ of Inf Diseases 1933 53 p287 Lincoln et Greenwald Proc soc exp Biol Med 1934 30 p291 OH Bergey Journ of Inf Diseases 1934 55 p72 H Leslie Wilcox Journ of Immun 1934 27 p 195 FG Jones et James M Moss Journ of Immun 1935 29 p62 (195) Z Mikhailova et I Welikanov Revue d'Immunologie 1936 2 p 26 IG refa nov Z Mikailhova ert Yatsevitch chirugica 1937 n 4 p1 Melnik et Collaborateurs, Annales Inst Metchnikoff 1935 2 p285 (196) D'Antona, M Valensin et D Centini, Minerva Medica 1938 n36 (197) D Ottolenghi Giornale di medicina Militare 1938 fasc 12 (198) E Sacquepee M Pilod et A Jude Bull Acad de Medecine 1936 96 n5 Revue d'Immunologie 1938 4 p389 94 LA LUTE PŔVENTIVE CONTRE LES MALADIES NFECTIEUSES un an après celle-ci, une injection de rappel, un seul cas de tétanos, non mortel, a été observé en 1937 (100). Mais l’épreuve décisive manquait encore en médecine humaine. Cette épreuve, la méthode de vaccination par l’anatoxine tétanique devait la subir et, disons-le tout de suite, victorieusement, dans les conditions les plus rigoureuses, celles de la guerre, d’une guerre sans précédent par son ampleur, par la dispersion des opérations dans des contrées très variées et sur toutes espèces de terains plus ou’ moins tétanifères, enfin par les moyens de combat emploves. RÉSULTATS DE LA VACCINATION ANTITÉTANIQUE DURANT LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE. LE TÉTANOS EST ÉLIMIŃ DANS CERTAINES ARMÉES Déjà, durant la campagne rO30-T940, on avait pu se rendre compte qu’aucun cas de tétanos n’éfait survenu chez les soldats de l’Armée fran¬ caise, préalablement vaccinés. Mais, à vrai dire, pendant cette période le nombre des blessés avait été relativement faible et la guerre n’avait pas eu un caractère tel que l’on puisse formuler une appréciation sâre quant à l’efficacité de la vaccination antitétanique chez l’homme. Cette appré¬ ciation devait être portée d’une facon incontestable, grâce aux résultat acquis dans les Armées des Alliés. Dans l’ARMEE ANCLAISE, la vaccination antitétanique était pratiquée à dater de ro38, à l’aide de deux iniections d’anatoxine effectuées à six semaines d’intervalle. D’après le médecin général Boyd, il y eut 6 cas de tétanos parmi ro3, oo0 blessés. Sur un tout petit nombre de prisonniers allemands blessés dans la même région, et qui n’étaient pas vaccinés, il y eut 25 cas. Tenant compte des statistiques relevées sur ce même front de l’Quest durant la guerre ror4-ror8, alors que les blessés recevaient seulement l’iniection préventive de sérum antitétanique, le taux de mor¬ bidité tétanique est abaissé de L4 pour 1.000 blessés (première guerre mondiale), à 9,06 (deuxième guerre mondiale), c’est-à-dire que le tétanos était vingt-cina fois plus fréquent en 1914-1918 qu’en 1930-1045 (200). Et le médecip général Boyd de conclure : le nombre des cas de téta¬ nos bendant les cambagnes airicaines et eurobéennes a été bratiquement négligeable, ce qui, avant tout, est du l’immunisation au moyen d l’anatoxine tétanique. plus démonstratifs et plus parfaits peut-être encore apparaissent les résultats acquis dans l’ARMÉE AMÉRICAINE. (199) Voir à cet égard G Ramion, Bull Acad Vet 1942 15 n1 Monnier et Lebasque Bull Acad Vet 1938 n7 revue d'Immunologie 1938 4 p405 (200) JSK Boyd The Lancet janvier 1946 p113 DE L’HIOMME ET DES AMIMALIX DOMESTIQUES AUL MOYEN DES VACCNS 93 La vacination antitétanique a été déclarée obligatoire pour tous les soldats de cette Armée, peu après l’entrée en guerre des Etats-Unis. Elle a été réalisée selon notre procédé initial : 3 doses, de r cc chacune, d’ana¬ toxine tétanique (brute, non purifiée, non concentrée, non additionnée d’alun). Une injection de « rappel » était pratiquée au bout d’un an ou tout dé suite avant le départ pour la zone d’opérations. Mention de la vac cination était portée sur la médaille individuelle d’identité. En cas de bles¬ sure, il n’était pas fait d’injection de sérum antitétanique chez les combat¬ tants américaips qui recevaient seulement une injection d’anatoxine téta¬ nique de rappel. Dès la fin de la guerre, des résultats fragmentaires avaient été donnés et, en avril ro4z, a été publiée, par Arthur Long et Sartyell, une étude détaillée sur le tétanos pendant la guerre, dans l’ensemble des Armées américaines (avant compté près de ro millions de mobilisés), d’après les documents officiels et complets du Service de Santé militaire des Etats¬ Unis (2OT). De cette étude Il ressort qu’il a été constaté aussi bien sur le territoire métropolitain que sur les différents théâtres d’opérations, seule¬ ment 12 cas de tétanos : 3 cas en 1042, s cas en 1943, 3 cas en 1044, I cas en 1945: 6 sont apparus chez des sujets vaccinés qui constituaient l’im¬ mense majorité des effectifs puisque la vaccination était obligatoire, 6 éga lement chez les non-vaccinés qui représentaient l’infime minorité. Il es mentionné ailleurs que le tétanos sévissait dans l’Armée japonaise, dans laquelle l’immunisation active n’avait pas été pratiquée. Il est précisé, en outre, que plus de 80 cas de tétanos ont été constatés en Normandie chez les soldats allemands de l’Armée de terre où la vaccination n’avait pas été organisée alors qu’il n’y eut pas un seul cas parmi les Américains blessés dans les mêmes parages; à Manille, au cours des opérations militaires, i Y eut 400 cas de tétanos parmi la population civile, évidemment non-vac¬ cinée (292). De ces publications très documentées, la conclusion suivante est tirée par Arthur Long : « La combaraison avec la morbidité bar tétanos durant la bremière guerre mondale (où cependant il était largement fait usage de la séro-prévention passive) quec la morbidité tétanique dans les Armées ennemies et barmi les civils blessés au cours des obérations militaires, tout indioue oue la vaccination anfitétanique dans l’Armée américaine a éte hautement efficace. » Dans l’une de ces publications, un autre auteur américain (Perrin H. Long, de Baltimore) s’exprime ainsi: « Ramon et ses associés ont démontré la possibilité de l’immunisation contre le tétanos », et il ajoute: «rarement un brocédé d’immnunisation a été aussi efficace» (203). D’un autre côté, dans un article intitulé «Chimiothérapie dans le traitement des blessures », il est déclaré (par Champ Lyons) : « De toutes les mesures prises pour prévenir les infections pendant la deuxième guerre mondiale, seule l’immunisation actioe par l’anatoxine détanique a aiteint comblétement son but » (204). (201) P Arthur Long et PE Sartwell Bull of the Us army med Dept 1947 6 p371 (202à P Arthur Long Am Journ of public Health 1948 38 p345 (203) Perrin H Long Journ of the Amer med Assoc 1946 130 p984 (204) Champ Lyons Journ of the Amer Med Assoc 1947 133 p215 LA LUTTE DRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES NEECTIEUSES 96 D’après une information que nous devons au Major Cépéral. Direc¬ teur général des Services médicaux de l’ARMÉE AUSTRALIENNE, la totalité des effectifs de cette Armée (584,744 hommes) pendant la guerre 1930-r943 a été immunisée contre le tétanos. « I n’y a’ eu que 13 cas de tétanos, la plupart étant des cas de tétanos localisés, un seul fut mortel n (205). L’immunisation active par l’apatoxine a connu égalemsnt un plein succès dans l’ARMEE DU CANADA. En effet, d’après une communication personnelle du médecin général Coke. Directeur des Services médicaux de la Défense Nationale du Canada, et selon la publication d’un auteur canadien. Wishart, de Toronto. il n’y a eu dans les Forces Canadiennes, durant la dernière guerre mon¬ diale, que trois cas de tétanos, dont un seul mortel et deux bénins. « Ces faits, conclut Wishart, rebrésentent des records nouveaux et brillants dans les annales militaires de médecine Bréventive » (206). 3 On doit signaler que, d’après L. Furtado Rodrigues et losé F. Nato. il n’y a pas eu un seul cas de tétanos enregistré dans le Corbs exbédition¬ mate brésilien, au cours de la campagne d’Italie, parmi les nombreux blessés traités dans les sections brésiliennes des hôpitaux nord-américains. et cela, disent les auteurs, grâce à l’immunisation active (obligatoire) au moyen des vaccins associés composés d’anatoxine tétanique et de T. A B. (292). Nous avons indiqué plus haut que de nombreux travaux de savants russes, après avoir confirmé nos résultats expérimentaux, ont préparé avant la guerre l’application en U. R S. S. de la vaccination antitétanique à l’aide de l’anatoxine. Bien que nous manquions de détails, nous savons que notre méthode de prévention du tétanos a eu dans l’Armée soviétique un succès comparable à ceux enregistrés dans les Armées des autres pays alliés. Nous résumons ci-après les principaux résultats connus de la vaccl¬ nation au moyen de l’anatoxine tétanique dans les Armées des Alliés pendant la deuxième guerre mondiale; Armée britannique: Morbidité tétanique: re guerre mondiale : r s pour 1.000 blessés: 2° guerre mondiale : 0,06 pour r.000 blessés. Armée américaine: 12 cas de tétanos sur ro millions de mobilisés. Armée austrahenne: 13 cas de tétanos, la plupart localisés, un seul mortel. Armée canadienne.: 3 cas de tétanos, dont un seul mortel. Tel est le bilan de la vaccination par l’anatoxine tétanique, bilan qui affirme incontestablement l’efficacité de cette vaccination. (265) mforpation de M le pr Metcalte, pirecteur féperal de la sante d’Autratie (206) F.O. Wishart, Heath, septembre-octobre 1947, 9. (207) José Furtado Rodrigues et Jose F. Nato) Arquip, da Inst, de Btol, de Erercito. 1947, 8, n° 8, p. 95. DE L HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DE VACCINS 97 APPLICATION DE LA VACCINATION ANITETANIQUE AUX POPULATIONS CIVILES A mesure que l'on prenait connaissance des résultats, dans les Armées, de la vaccination antitétanique, celle ci pénétrait dans la popu- lation civile où elle est effectuée le plus souvent selon la formule des vac- cinations associées. Cette pratique est partout encouragée, principale- ment chez l'enfant et chez les individus qui risquent le plus de contrac- ter le tétanos, il n'y a aucune raison qu'elle n'aboutisse pas aux mêmes résultats que dans les Armées. A différentes reprises, au cours de ces dix dernières années, l'Aca- démie Nationale de Médecine de Paris a émis des voeux en faveur de la vaccination antitétanique de la population civile, notamment celui adopté en 1946 (208) sur la proposition du Pr Lemierre, qui réaffirme expressément l'innocuité et l'efficacité de notre méthode: "Après avoir entendu l'exposé fait par M. Ramon des magnifiques résultats fournis par la vaccination antitétanique préventive dans les Armées Alliées, au cours de la récente guerre et vivement préoccupée de la fréquence actuelle du tétanos en France, tétanos souvent consécu- tif à des lésions cutanées minimes ou à des traumatismes trop insignifiants pour paraître justiciables de la sérothérapie antitétanique préventive, l'Académie de Médecine émet le voeu suivant: "Qu'une campagne active et persévérante soit poursuivie par les médecins en faveur de la vaccination préventive systématique contre le tétanos en utilisant soit le vaccin triple associé (antitétanique-antidiph- térique-antityphoparatyphoidique) soit la seule anatoxine tétanique de Ramon chez les personnes de tous âges, également exposées à contrac ter cette terrible maladie. Que les pouvoirs publics appuient énergiquement les efforts des médecins au moyen d'une large propagande par articles dans la grande presse, tracts, affiches, instructions données dans les écoles informant les populations du danger constant que leur fait courir le tétanos et du procédé certain qu'elles possèdent de s'en garantir grâce à la grande découverte française due à M.Ramon et dont l'action bienfaisante vient d'être une fois de plus confirmée par la vaste et décisive expérience réali- sée dans les Armées alliées". Bien que la loi française sur la vaccination antitétanique obliga- toire chez les enfants en association avec la vaccination antidiphtérique (au moyen du mélange des deux anatoxines tétanique et diphtérique), n'ait guère commencé à être effective qu'à partir de 1946 déjà on cons- tate une diminution sensible de la mortalité par tétanos. Il y a peu d'an- n"es, plus d'un millier de personnes mouraient de tétanos annuellement (209) le tétanos étant en France, faisons-le remarquer, plus meurtrier (208) Bull. Acad. de Médecine, 1946, n°29-30 (209) 945 en 1943, 1.031 en 1944, 958 en 1945, etc... 98 LA LUTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INEECTIEUSE que la poliomyélite. En Iosr, on comptait 650 décès par tétanos (200 bis). 570 en 1052, 534 en 1054. Toutefois, si l’op veut obtenir rapidement des résultats plus satis¬ faisants encore, il importe que la vaccination antitétanique soit étendue aux adultes, non seulement à ceux qui sont particulièrement exposés; agriculteurs, jardiniers, cavaliers, sportifs, etc.., mais à tous les adultes du sexe masculin (2ro) et du sexe féminin, car tous peuvent être l’objet d’une atteinte de la, toxi-infection tétanique, laquelle est mortelle dans la majorité des cas. Seule la vaccination antitétanique eut garaniir d’une facon dura¬ ble, permqnente, contre les risques dé fétaxos bouvant résuller aussi bien d’une blessuxe légère, insignifiante, inabbarente même, que d’ux fraumatisme grave. Seule la vaccination antitétanique beut brotéger contre le tétanos buerbéral et contre le tétanos du nouueau-né comme. nous l’avons montyé des 1926 (211). Chavannaz qui est un spécialiste en France de l’étude du tétanos. après s’être livré à une enquête sur les zones tétapifères du territoire fran¬ cais (212) et après avoir rappelé la fréquence du tétanos et l’insuffisance de la sérothérapie préventive pour lutter contre lui, conclut, en 1953: la vaccination antitétanioue constitue donc, en définitive, notre meilleure arme (213). Depuis qu’a été constaté le succès éclatant de la vaccipation anti¬ tétanique dans les Armées au cours (de la deuxième guerre mondiale des voix s’élèvent de tous côtés pour réclamer la vaccination systémati¬ que, généralisée, des populations civiles. C’est ainsi qu’aux ErArs-UNIs. MGuinness recommande en ces termes la vaccination antitétanique: « L’anatoxine tétanique rebrésente l’un des agents immunisants les blus efficaces oui aient été révélés jusqu’à maintenant. Elle est bien tolérée et l’immunité conférée est excellente. Tout le monde doit être vac¬ ciné contre le tétanos » (214). Tout dernièrement, 1 Ipsen a observé que dans l’Etat de Massachu¬ setts la fréquence du tétanos a diminué pendant les dernières décennies. sauf chez les personnes de plus de 40 ans. L’immunisation par l’ana¬ toxine tétanique des enfants ainsi que celle des jeunes hommes pendant le Service militaire, correspond à l’incidence relativement faible de la (209 bis) La déclaration du tétanos n'est pas obligatoire que depuis 1950. Il est done probable qu’en 1951 le nombre des décès était en réalité plus nombreux que celui indiqué. (210) Déjà upe grande partie des adultes du sexe masculin sont vaccinés pendant leur service millitaire selon la formule des vaccinations associées: aptitétapidue-anti¬ diphtérique-antityphoparatyphoidique, en France, et antitétanique-antitypboparatyphoi¬ dique, en Italie. Mais les adultes du sexe féminin ne sont pas actuellement vaccinés. (211) G. Ramon. L. Nattan-Larrier et E. Grasset. Comptes renaus Acad, des scien¬ ces, 1926, 183. p. 458. (212) J. Chavannaz. Mémoires de l’Académie de Chirurgie, 1953, 79, p. 48. (213) J. Chavannaz. Mémoires de l’Académie de Chirurgie, 1953, 79, p. 32. (214) A C. McGuinness, The Journ, 91 the Am. Med, 45soc, 1952, 148, p 226. DE L’HOMME EL DES ANMALIX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINIS 89 maladie dans ces deux groupes Ipen a en outre, titré l’antitoxine téta nique dans le sérum de 340 adultes de plus de rs ans, il a trouvé que 48,5 2% des hommes et 87,1 % des femmes avaient moins de 9.0025 unité d’antitoxine ce qui correspond au seuil d’immunité. Les hommes de 30 à 40 ans montraient le pourcentage le plus élevé d’immunité tétani¬ que, ce qui reflète l’immunisation systématique des hommes pendant le Service militaire, Ipsen conclut en recommandant la vaccination des adultes au moyen de l’anatoxine tétanique associée à l’anatoxine dibh¬ terique (215). En URLCUAY, sous les auspices du Ministère de la Santé publique. une Commission a été nommée (216), placée sous la présidence du Dr Dewet-Barbato et dont font partie potamment les Drs Bernado Por¬ cekansky et losé Saralegui; elle a pour objet la lutte contre le tétanos Elle bréconise l’abblication générahsée de la vaccination au moyen de l’anatoxine tétanique. Après avoir exposé « l’imbortance des traumatismes légers dans le tétanos », un auteur turc. Timur, recommande l’extension, de la brati¬ que de la vaccinaton antitétanique dans la bobulation civile, ex TUR¬ QUIE (217). Donpant en exemple l’élimination quasi totale du tétanos dans les Armées américaine, britannique, canadiènne, du fait de la vaccination par l’anatoxine tétanique alors que le tétanos a continué de sévir dans les Armées allemande et japonaise, non-vaccinées. North et Patterson précisent les indications techniques bour la réalisation de la oaccination antitétanique dans la bratique cioile en AUSTRALIE (218). Dans un article très documenté du « British Medical Bailletix » de janvier 1954, Payling Wright s’exprime ainsi Le sucès de l’immunisation aptitétanique active des Forces Armées a naturellement attiré l’attention sur les avantages qu’on tirerait de son introduction dans la population civile « Bien que la maladie soit relative¬ ment rare en GRANDE-BRETAGNE — écrit-il — son évolution clinique atroce et le taux élevé de la mortalité encouragent les efforts accomplis pour sa prévention, surtout lorsque le but peut être atteint par un procédé prophylactique aussi simple. Comme pour la diphtérie, les Immunolo¬ gistes français dirigés par Ramon ont pris une place prépondérante dans l’élaboration des méthodes pratiques de protection active de l’homme contre le tétanos ». Et Payling Wright de bréconiser la réalisation bra¬ tique de la vaccination antitéfanique dans la Dobnlation ciille en isant de « la méthode des uaccinations associées, simble, beu cptteuse et in¬ contestablement efficace » (2T9). Déjà d’autres auteurs anglais, Boyd (215) Johannes Ipsen, Immunization of adultes against Diphteria and tetanus, The New England Journ. of medicine 16 novembre 1954 (216) Ordre spécial de service n°1998 de M. le Ministre de la Santé de l'Utuguay et circulaire du 11 février 1953 du Directeur général de la Santé (217) F. Timur, Rev. turque d'Hygiène et de Biologie expérimentale, 1951, 11 n°3 p.359 (218) North et Patterson, Medical Journ. of Australia, 6 juin 1953, d'après The Journ of the Am. Med. Assoc. 1953, n°10. (219) G. Payling Wright, British Med. Bulletin, 1954, 10 n°1, p. 59-64 100 LA UTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADES INEECTEUSES dans l’ouvrage de Stanley Banks qui fait autorité (220). Convbeare et Logan ailleurs (2r), avaient recommandé l’usage de la vaccination antitétanique dans la population civile. Hansen, de Dusseldorf, dans un article paru en mars dernier (222). signale le danger du tétanos en ALLEMAGNE. Il y a eu, en 1951, dans la République fédérale allemande, 433 cas de tétanos: 50 2% des cas se sont produits après des blessures bénignes ne semblant pas exiger l’iniec¬ tion de sérum antitétanique. Hansen signale que le XIy° Congrès de la Société allemande de la lutte contre les accidents a conseile l’aoplica¬ lion de la vaccination répentive surtout aux groubes de bersomnes exbosées, soit à cause de leur âge, soit à cause de leur profession. Après avoir rappelé, d’une part, que c’est grâce à Ramon et à son anatoxine tétanique que l’on peut immuniser l’homme et d’autre part que la vaccination antitétanique a fait ses preuves d’une manière bril¬ lante pendant la deuxième guerre mondiale. Hansex la recommande vivement sous la forme des vaccinations associées. Depuis longtemps, même avant la guerre, le chirurgien allemand Hibner s’est fait, en Allemagne (223), l’apêtre de la vaccination contre le tétanos. Selon Rospmansch et A. Latontaine, de Bruxelles (224), la dernìre guerre a démontré de façon péremptoire l’efficacité de la vaccination antit́tanique par l’anatoxine de Ramon, aussi écrivent-ils, connaissant d’une part l’innocuité, l’efficacité et la durée de l’immunité à la suite de la vaccination et, d’autre part, les échecs de la sérothérapie préventive et curative, le médecix, ex BELGIQUE, aura bour devoir de mener une cambagne bersuasive bour en arriver dans la bratique substituer la bro¬ Dhylaxte active a la probhylaxie passive. En ITALIE, à différentes reprises et dernièrement encore, d’Antona (225) a exalté la valeur de la vaccination par l’anatoxine tétanique. moptrant sa primauté sur la sérothérapie préventive et l’intérêt qu’il y a à la substituer à celle-ci (226). Dans une chronique toute récente de l’Organisation mondiale de la Santé (226 bis), il est rapporté des faits intéressants en ce qui concerne la fréquence du tétanos dans différents pays. Dansles pays où la vaccination antitétanique est entrée en application et plus ou moins largement prati¬ quée dans la population civile, la mortalité par tétanos est en baisse (220) TS.R. Boyd in « Modern practice in intectious levers » de Stanley Banks. p. 96. ed. Butterxorth, fondon (221) E T. Conybeare et WPD. Logan, British Med. Journ, 1951. 1. p. 504. (22) P. Hansen, Deutseh Med Woch, 1954, 79, n° 12. (223) voir à ce sujet A. Hubner et K. Freudenberg. Revue d’Immunologie, 1934. 18, u° 5-6, p. 344. (224) W. Koopmansch et A. Lafontaine, Bruxrelles Medical, 1954 (28 mars), n° 13. (225) D. d’Antona. « La vaccination contre le tétanos). Revue d’Immutnologie, 1952. 16. n° 1. p. 1 (226) Nous crovons savoir qu’une loi est actuellement en préparation en Italie pour rendre systématique la vaccination antitétanique, comme elle l'est déjà dans l’Armée de ce pays. Nous souhaitons que cette loi voit bientôt le jour pour assurer la sauvegarde des populations italiennes contre cette maladie si dangereuse et si redoutable. (226 bis) organisation mondiale de la Santé (Rapport épldémiologique et démogra¬ phique), 195. 8. p. DE LTIOMAMAE ET DES ANIMALX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 16i régilière: ainst, par exemple aux Etats Unis, elle est tombée de 1500 décès pour l’année 1923 à 560 pour l’année 1952 en France, elle est passée de 1031 décès pour l’année 1944 à 577 pour l’année 1953 et à 534 pour l’année 1054. Par contre, dans les pays où la vaccination n’est pas ou n’est que peu pratiquée, la mortalité due au tétanos croit régulière¬ ment par exemple en Egypte, elle est passée de 154 décès en 1926, à 402 en 1952, dans la République Dominicaine, de 540 décès en 1936 à 1363 en 1953. A noter que par comparaison avec la mortalité résultant de la polio¬ mvélite, il, meurt en France, deux fois et demi plus de malades atteints de tétanos, que de sujets succombant à la poliomyélite. Il ressort des avis particulièrement autorisés que nous venons de rapporter et de bien d’autres encore, qu’il y a nécessité imbérieuse généraliser la vaccination antitétanique dans la bobulation civile, si l’on peut y faire disbaraitre le tétanos comme il a disbaru dans certaines Armées Bendant la deuxième guerre mondiale, sous l’effet brécisément de la vaccination systématique bar l’anatoxine tétanique. CONCLUSIONS Les résultats acquis dans différentes Armees, durant la deuxiême guerre mondiale, tout en démontrant de la façon la plus évidente, la subérionité de l’immunité active engendrée bar l’anatoxine tétanique sur l’immunité passive brocurée Bar le sérum antitétanique, abbortent la breuve incontestable que le tétanos a été bratiquement éliminé de ces Armées, grâce à la vaccination au moyen de l’anatoxine tétanique. N’est-ce bas la un succès éclatant lorsque l’on songe la mortalité qu’entrainait dans les guerres du bassi, cette maladie affreusement dou¬ loureuse et meurtrière qui effravait les blessés et donnait bien des soucis aux médecins des Armées en cambagne, ceux-ci se sentant thérabeuti¬ quement désarmés vis--vis d’elle. L’application aux Boxlafions civiles de la vacination ar l’ana¬ toxine tétanique, réclamée par de nombreux auteurs aux fous les conti¬ nents et déjà en cours dans divers pays, doit être généralisée et beut l’être facilement en atilisant la méthode si bratique des «vaccinations asso¬ ciées » (227). (321) C'est en 19%6, rappelons-le, qu’avec Chr, zoeller nous avons établ la "mé thode des vaccinations associées". à l'occasion précisément de l'étude de l'immunisa- tion active par l’anatoxine tétanique (G. Ramon et Chr. Zoeller. Comptes rendus Soc de Biologie, 1926, 94, p. 108, Annales Inst. Pasteur, 1924, 41. p. 803). La méthode consiste on le sait, à associer dans le même mélange, soit des anatoxines, soit des anatoxines et des vaccins microbiens. Voir, pour plus de détails, notre récent mémoire. Revue d’Imnu¬ noloote, 1953, 17, p. 295, et le chapitre suivant de la présente monographie. LES VACCINATIONS ASSOCIEES La vaccination antidiphtérique, la vacination antitétanique et d’autres vaccinations que la mise en évidence, en 1923, des anatoxines a permis de réaliser, ont accru, depuis trente ans, nos moyens de lutte contre les maladies infectieuses Toutefois, les vaccinations anatoxiques s’ajoutant aux procédés de vaccination déjà existants, tels que la vaccination antityphoidique. risquaient de compliquer en médecine humaine, la tâche de l’hygiéniste et du clinicien. Chacun de ces procédés exigeait, en effet, pour se mon¬ trer vraiment efficace, plusieurs interventions. Ferons-nous remarquer. par exemple, que la pratique séparée des trois modes de vaccination: antidiphtérique, antitétanique, antityphoidique, pour ne citer que ceux¬ la, comporterait de sept à neuf injections (selon les procédés), à effectuer les unes après les autres, avec un intervalle d’une quinzaine de jours entre chacune d’elles, sans compter les iniections dites de rappel. pour entretenir et renforcer les différentes immunités conférées par les vaccinations initiales. Un tel programme d’immunisation préventive apparaissait, dès l’abord, sinon impossible à exécuter du moins très dif¬ ficile à faire accepter par le public. Dans tous les cas, il semblait d’une généralisation peu commode Il convenait donc, afin de faire œeuvre utile en matière de broAbu¬ laxie individuelle et collective des maladies infectieuses, de chercher à simplifier l’application des méthodes d’immunisation que le labora¬ toire avait mises dans le passé ou pouvait mettre dans l’avenir, à la dis¬ position de la clinique et de l’hygiène générale. Déjà longtemps auparavant, on était entré dans la voie de la sim¬ plification en réalisant la vaccination à l’aide du vaccin mixte antitypho¬ paratyphoidique T.A B. (A. Castellani) (228). Cependant, ce vaccin est composé d’antigènes microbiens du même groupe et voisins quant à leur nature et à leur mode de préparation. Or s’il était admis que l’orga¬ nisme peut s’immuniser à la fois contre les germes tels que les bacilles typhique et paratyphiques possédant un certain degré de parenté ou une similitude d’action, il semblait jusou’alors imoossible, et cela en vertu de la théorie dite de la concurrence des antigenes, soutenue princi¬ palement par les auteurs allemands (220) et généralement acceptée jadis. que le même organisme buisse faire les frais de blusieurs immunisations artifictelles entrebrises en même tembs, au moyen d’un mélange d’anti¬ gênes aussi différents dans leur combosition que les anatovines dibhté¬ vique, tétanique et le vaccin anfilybloidique et dirigés contre des mala¬ (228) A. Castellani et R.W.Mendelson, Brit. Med. journ. 1915, 2 p. 711; A. Castellani, Trans. Soc. Trop. Med. and Hyg. 1915 9, p.25 (229) Notamment Friedberger, Berl. Klin. Woch 1904 41, p.242, Michaelis Deutsch Med. Woch. 1940, n°34, p.1940, Benjamin et Witzingher, Zeitsch Kinderheik 1912 n°3 Mer. Zeitsch Immunitatforsch, 1926. 46, p.439 104 LA LUTTE PREVENTIYE CONTRE LES MALADIES NFECTIEUSES des aussi éloionées dans leurs monitestations chigiques ouc L fyohoide. la dibhtéme, le tétanos. La méthode des vaccinations asociées que pous avons créée avec la collaboration de Chr. Zoeller, au lendemain de l’application des ana¬ toxines aux vaccinations de l’homme contre diverses maladies (230), à permis, en premier lieu, de combattre et finalement de ruiner la theorie de la concurrence des antigènes, elle a donné, en outre, la preuve qu’une immunisation polyvalente réalisée au moyen d’un mélange de vaccins tels que le vaccin antityphoidique, l’anatoxine diphtérique, l’anatoxine tétanique, etc.., est possible et avantageuse. Cette immunisation combinée, polyvalente, apparaissait d’emblée beaucoup plus commode à mettre en pratique que plusieurs immunisa¬ tions faites successivement, à l’aide de chaque vaccin isolé; elle devait se montrer au moins aussi efficace et même plus efficace, dans certains cas, que ces dernières, effectuées séparément. Si nous tenons à rappeler ici, les bases et le développement de la méthode des vaccinations associées, c’est que pendant assez longtemps cette méthode et ses origines ont été méconnues. C’est ainsi que dans leur « Traité de Bactériologie et l’Immnunologie » (édition de 1936). deux auteurs anglais réputés Topley et Wilson, n’en font pas mention. alors qu’elle était déjà en plein essor en France. Dernièrement encore. H. J. Parish passe sous silence les tpvaux initiaux et ceux plus récents effectués en France, sur les vaccinations associées (231). BASE DE LA MÉTHODE DES VACCINATIONS ASSOCIÉES La méthode des vacins « combinés » et des vaccinations associées a pour base le brincibe des substances adiuvantes et stimulantes de l’immuuité, ou, autrement dit, des stimulines que nous avons établi expé¬ rimentalement dès 1025 (232). D’après ce principe, et ainsi que nous l'’avons montré dès le début de nos recherches en ce domaine, l’immunogène auquel on a ajouté l’une de ces substances, lorsqu’il est introduit dans lé tissu conionctif du sujet vacciné, y rencontre, dans des conditions favorables, les élé¬ ments les plus variés; leucocytes et ferments cellulaires, par exemple. dont l’afflux est ainsi augmenté par la substance adiuvante, cellules con¬ jonctives que multiplie l’inflammation provoquée artificiellement, etc... Ces éléments, tout en retenant l’antigène et en ralentissant son absorp¬ tion, lui font subir sur place des modifications plus ou moins profondes. nous l’avons démontré en utilisant expérimentalement des toxines. L’or¬ (230) G. Ramon et Chr. Zoeller, Comptes rendus Soc. de Biologie, 1926, 94, p.106 Annales Inst Pasteur, 1927, p.805 (231) H.J. Parish, Brit Medical Journal, 1952, 2,p.2010 (232) G. Ramon, Bull. Soc. Cent. de Medecine Veterinaire, 1925, 101, p.227 et p. 348: Comptes rendus Acad. des Sciences; 1925, 181, p.157; Annales Inst Pasteur, 1926, 40, p.1 DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 105 ganisme peut donc utiliser au mieux cet antigène pour l’établissemen et le développement de son immunité (233) C’est précisément en nous eforcant d’augmenter, à l’aide des subs¬ tances adiuvantes, l’immunité due à l’anatoxine tétanique que nous avons été conduit, en 1926, à l’établissement de la méthode des vaccina¬ tions associées. Cherchant à l’époque, avec Chr zoeller (de l’Ĥpital Militaire du Val-de-Grâce), à préciser les conditions optima de la vaccination anti¬ tétanique, nous nous préoccupions d’augmenter l’activité immunisante de l’anatoxine tétanique qui nous paraissait relativement faible, les échantillons d’anatoxine que nous utilisions avant une valeur antigène intrinsèque de quelques unités seulement, alors que, depuis, grâce aux perfectionnements introduits dans la préparation de la toxine tétanique. l’anatoxine peut titrer jusqu’à so unités Lf et davantage (234). D’autre part, nous avions remarqué, lors des premières iniections faites sous la peau de l’homme, que l’anatoxine tétanique, purement neurotrope, ne provoque pas de réaction appréciable, qu’elle est rapidement absorbée et sans doute assez promptement éliminée sans avoir pu jouer entière¬ ment son rôle générateur d’antitoxine. C’est pourquoi nous tentions de la retenir au lieu d’injection et de rendre graduel son passage dans l’or¬ ganisme pour la soumettre ainsi à l’influence des phénomènes d’inflam¬ mation locale et pour obtenir finalement un rendement meilleur dans le développement de l’immunité antitétanique Après quelques tentatives au cours desquelles nous utilisâmes des substances adiuvantes très variées: tabioca, amidon, lait, huile, léci¬ Lhine, etc., qui expérimentalement, chez l’animal, nous avaient donné de bons résultats (235), nous nous rendimes compte qu’il ne pouvait être question d’appliquer ce procédé d’une facon systématique dans la pra¬ tique de la vaccination antitétanique chez l’homme, soit à cause de l’effi¬ cacité réduite qu’il présentait dans ces conditions, soit surtout en raison des réactions par trop vives que les substances introduites, sous la peau en mélange avec l’anatoxine, risquaient de provoquer chez les sujets de l’espèce humaine (236). Soit dit en passant, ce même procédé que nous avons étudié et préconisé, dès r026, est actuellement employé aux Etats-Unis dans des essais d’immunisation contre la grippe, contre la poliomyélite au moyen des virus spécifiques formolés, émulsionnés, par exemple, dans des huiles minérales (237). (233) Consulter à ce propos des substances adjuvantes et stimulantes de l'immu- nité. G. Ramon et ses associés. Revue d'Immunologie, 1937. 3 pp. 193-202, 285, 505; 1938, pp.4,5. G. Ramon, IVe Congrès International de Pathologie Comparée. Rome, 1939 (Edit dall(Instituto Sieroterapico Milanese) etc... Voir également cette même monographie p.36 et suivantes. (234) Voir à cet égard: G. Ramon, Revue d'Immunologie, 1939, 5 p.385; 1942, 8, p.1 (235) G. Ramon et Chr Zoeller, Bull Soc Med des Hopitaux 1926, 50, n°28 (236) Ce procédé a pourtant été utilisé dans quelques essais par Ribadeau-Dumas et ses collaborateurs qui dès 1926, ont pu démontrer de cette façon que le nourrisson âgé de moins de six moins n'est pas totalement réfractaire à l'immunisation par l'ana- toxine diphtérique (Bull. Soc. Med des Hopitaux, 23 juillet 1926) (237) Voir, par exemple, en ce qui concerne l'immunisation contre la polyomyélite, l'article de Jonas E. Salk et de ses associés: The Journ of the American Med. Assoc. 1953 151, p.1081-1098 166 LA LUTE PREVENTNYE CONTRG LES MALADIES INECTetses Nous nous étions cependant demandé s’il n’était pas possible d’em¬ ployer, chez l’homme, une technique déduite de nos constatations expé¬ rimentales. C’est alors que nous emes l’idée de nous servir d’un mélapge d’anatoxine tétanique et d’un vaccin « microbien » tel que le vaccin antutyphobaratybhoidiaue T.AB. ; ce dernier, pensions-nous, devait jouer. dans une certaine mesure, le rôle de substance stimulante, grâce aux phé¬ nomènes réactionnels apparents ou inapparents qu’il entraine, lorsqu’il est injecté sous la peau. A ces mélanges composés soit de deux antigènes aussi dissemblables dans leur nature qu’une anatoxine et un vaccin microbien (T. A. B.), soit encore d’anatoxines aussi éloignées dans leur spécificité que l’anatoxine diphtérique et l’anatoxine tétanique, par exemple, nous avons donné avec Chr. Zoeller, le, nom de vaccins associés, désignapt la méthode selon laquelle ils sont emplovés sous la dénomination de vaccinations associées (238). Les résultats des premiers essais effectués au moyen des vaccins associés dans un même mélange devaient répondre, comme il va être montré, à notre attente, et affirmer dans le domaine pratique, chez l’homme, l’exactitude du principe préalablement vérifiée par l’expéri¬ mentation chez les animaux. Cette exactitude, nous devions d’ailleurs la confirmer à différentes reprises dans la suite (230). LES PREMIERS ESSALS DE VACCIMATIONS ASSOCIÉES CHET L’HOMME. CONSÉQUENCES C’est, en premier lieu les effets des vaccins associés « qugtpxine tétanique-vaccix antitybhobaratybhoidique » qu’avec Chr, Zoeller nous avons étudiés chez l’homme, à dater de 1926 (240). Ces essais moptraient, dès l’abord, que l’emploi de la méthode des vaccinations associées, non seulement n’est pas nuisible mais au con¬ traire se montre favorable à la production de l’anitoxine tétanique. En ce qui concerne l’immuxité antihy2hobaratybhoidique, il n’existait à l’époque et encore maintenant d’ailleurs, pour en apprécier la valeur. aucun procédé comparable à celui du dosage de l’antitoxine tétanique. Nous avions seulement à notre dispocition la recherche quantitative des agglutinines. Bien que ce genre d’apticorps ne représente pas, pour nous. up test d’immunité protectrice, mais simplement le témoin du passage d’un (238)"Les "vaccins associés" par union d'une anatoxine et d'un vaccin micro- bien (T.A.B.) ou par mélange d'anatoxines" (Comptes rendus Soc. de Biologie, 1926 94, p.106) (239) Voir notamment G. Ramon et M. Djourichitch Annales Inst Pasteur, 1933 51, p. 407, G. Ramon, Comptes rendus des Sciences, 1953, 197, p.1366: Revue d'Immu nologie, 1935, 1 p. 37, G. Ramon, R. Richou, JP. Thiéry et Cl. Gerbeaux, Comptes rendus Acad. des Sciences, 1949, 228 p. 1678 etc... (240) Voir en ce qui concerne nos premiers essais de vaccinations associées: G. Ramon et Chr Zoeller, Bull. Acad. de Med, 1926, 95, n°5: La Presse Médicale, 1926 n°31: Paris Médical, 1926, n°6; Bull. et Mem. de la Soc des Hopitax, 1926, 50; Annales Inst Pasteur, 1927, 41, p.83 DE L’HOMME ET DES ANIMAUIX DOMESTIQUIES AU MOYEN DES VACCINS 107 antigène daps un organieme, nous l’avons recherché et dosé et nous avons constaté que le pouvoir agglutinant, vis-à-vis des germes typhi¬ que, et paratyphiques, apparait et s’accroit au cours des vaccinations associées dans des proportions au moins égales à celui consécutif à la vaccination réalisée au moyen du vaccin T.A. B. seul. Il était ainsi prouvé que la production de l’antitoxine tétanique et, par conséquent, le développement de l’immunité antitétanique que provoquent les vaccins combinés, par mélange d’anatoxine tétanique et de T.A.B., n’ont aucunement souffert, bien au contraire, de l’élabora¬ tion, par l’organisme, des agglutinines typhique et paratyphiques. De même en ce qui concerpe l’immumitz antidihtépique conférée par les vaccins associés « anatoxine dibhtérique et vaccin antitybhoba¬ zatybhoidiaue », les résultats que nous avons enregistrés étaient nette¬ ment supérieurs à ceux acquis en utilisant, sous forme de vaccination simple, une anatoxine diphtérique de même valeur et aux mêmes doses que celle entrant dans la constitution du vaccin mixte. D’un autre côté. là production des agglutinines typhiques s’était révélée au moins aussi abondante que celle qui fait suite à l’iniection du vaccin antityphopa¬ ratyphoidique seul. Daps d’autres essais nous avions mis en oeuvre le vaccin mixte « bi-anatoxique » résultant de l’association de l’anatoxine dibhténique et de l’anatoxine tétanique. Comme nous devions le constater, l’addition à l’anatoxine tétanique, d’anatoxine diphtérique ne porte aucun préju¬ dice à la production d’antitoxine tétanique et au développement de l’immunité dont celle-ci est le témoin Il semble même, écrivions-nous avec Chr. Zoeller, en rapportant les résultats de ces essais, que la réaction allergique produite par l’anatoxine diphtérique, chez certains sujets à anatoxi-réaction positive, favorise, du fait de la réaction locale qu’elle déclenche, l’action immunisante de l’apatoxine tétanique: l’élaboratiop d’antitoxine diphtérique par les apatoxines associées étant d’ailleurs au moins égale à celle qui résulte de la vaccination antidiphtérique simple. Tout compte fait, il existe un bénéfice appréciable en faveur de la vacci¬ nation bi-anatoxique (24r). Enfin, dans une dernière série d’essais, poursuivis à la fois chez l’homme et, chez l’animal, il était démontré que l’immunité antidibhté¬ rique et l’immunité antitétanique consécatives aux vaccinations associées par le mélange d’anatoxine dibhtérique, d’anatoxine tétanique et de vaccin antityghobaratybhoidique, mélange auquel devait être donpé le non de vaecin trible associé, non seulement ne sont pas inférieures à celles des sujets qui ont recu l’une ou l’autre des deux anatoxines sépa¬ rément, mais encore se révèlent en général supercue (241) En 1945. R-H. Kegamex confrmait ces donnees (Sehupeis. Med. Voch, 1948. 78, D. 303). En 1944. LE. Scheibei (Acta Path, et Micro. Scan, 1944, 31, D. 130) avait constaté que le mélange d’anatoxines diphtérique et tétanique peut, chez le cobave, entrai¬ per une dminution de l’immunité prodiulte par l’un des deux antigènes. Cependent, chez l’homme, il en est tout autrement, comme l’ont démontré nos essais initiaux rappelés cl-dessus et ainsi que l’ont confirmé, dans la suite, de très nombreux auteurs. D’ailleurs Scheibel ne prétend pas que ses constatations puissent être un obstacle à l’emploi des anstoxines assoclées, dans l’espece humaine. 108 LA LUITE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES De l’ensemble de pos essais préliminaires effectués au moyen des vaccins associés, nous devions tirer, tout de suite, des déductions d’ordre théorique et des conséquences bratiques. Du Point de vue doctrinal, il ressortait, en effet, de ces essais et de leurs résultats que, contrairement à l’opinion généralement admise jus¬ que la, il n’y a pas, dans un organisme traité par des vaccins associés dans un même mélange, concurrence des antigènes, mais bien plutôt coobératox dans, les actions immunisantes respectives de ces antigènes. Les nombreux dosages effectués, particulièrement précis, remarquons-le. en ce qui concerne les antitoxines, démontraient que la production des antitoxines diphtérique et tétanique déterminée par l’iniection du vacin bi-anatoxique (anatoxine dibhtérique anatoxine tétanique) est égale et même supérieure, en ce qui concerne l’antitoxine tétanique, à celle provoquée par chacune des anatoxines iniectées seules. De même, les quantités d’agglutinines typhiques et d’antitoxines diphtérique et tétani¬ que, élaborées à la suite de l’administration des vaccins associés « T.A B. anatoxine dibhtérique t analoxine tétanique », par exemple, se sont révélées au moins de même ordre, sinon plus fortes, que celles des mêmes anticorps qui font suite aux vaccinations simples par chacun des anti¬ gènes iniectés séparément. Tous ces faits condamnaient donc la théore de la concurrence des antigènes. Du oint de vue bratique, d’autres conséquenses ressortaient des essais et des résultats qui viennent d’être rappelés. Réalisés pour la plupart dans les conditions de la pratique chez l’homme lui-même, ces essais apportaient, en premier lieu, la preuve que deux ou blusieurs vaccins, anatoxines et vaccins dits microbiens. peuvent être réunis dans la même injection sans au ’il en résudte de suites lâcheuses bour le sujet vacciné. Ils montraient, en outre, que deux ou bhusieurs vaccins associés dans un même mélange sont cabables de brouoquex chez le même indi¬ vidu et simullanément, l’immunité sbécifique, corresbondant a chacux d’eux. IIs démontraient enfin que, loin de se oyter bréjiudice dans bien des cas les immuntsations réalisées conjounlement se renforcent mutuel¬ lement. Ainsi était établie sur des bases solides par une expérimentation préalable chez l’animal et par des essais cliniques chez l’homme, la mnéthode des vaccinations associées. Celtte méthode donnait au groblême Bose bar la mulliolication des vaccinations, sa géritable solution. Elle allait recevoir bientêt la consé¬ cration de la pratique courante. DE L'HOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 109 LES VACCINATIONS ASSOCIEES DANS LA PRATIQUE ESSOR ET RESULTATS A. En France Il faudrait tout un volume pour faire connaître l'essor et les résultats des vaccinations associées depuis un quart de siècle. Nous nous bornerons ici à rappeler les données principales recueil- lies depuis la mise en application de la méthode et nous renvoyons pour plus amples renseignements aux publications que nous avons faites au fil des années (242) A la suite de nos essais préliminaires et des résultats qu'ils avaient fournis, la méthode des "vaccinations associées" est entrée dans la pratique en France. Des premiers à notre suite, Louis Martin, Loiseau et Laffaille ont utilisé en 1928 (243) les vaccins associés dans une Ecole d'infirmières à Paris. Celle des infirmières dont la réaction de Schick était positive et qui, d'autre part, n'avaient pas eu la fièvre typhoïdique ont été soumises aux injections du mélange: anatoxine diphtérique + vaccin antityphoï dique TAB chauffé (mélange à parties égales dont il était injecté res- pectivement à 15 jours d'intervalle, I 2 et 3 cc). Après ces injections, 100% des infirmières ont présenté une réaction de Schick négative. Dans un orphelinat, Chr. Zoeller a entrepris, 1928, également les vaccinations associées: antidiphtérique-antityphoïdique. Ont été ainsi vaccinations 207 sujets dont les âges s'échelonnaient entre 7 et 20 ans. Deux mois après la dernière injection, les épreuves de Schick pratiquées chez les sujets vaccinés étaient négatives. Les titrages que nous avons nous-même effectués à la demande de Chr. Zoeller, dans le sérum d'un certain nombre de ces sujets avaient révélé une forte teneur en anti- toxine (244). Ainsi confirmée dans son efficacité comme dans son innocuité, dès les premiers temps de son entrée dans la pratique, la méthode des vaccina- tions associées prenait rapidement son essor dans la population civile ainsi qu'en témoignent les nombreuses communications faites en France, en peu de temps et par divers auteurs, se rapportant à son emploi dans ses différentes modalités chez l'enfant comme chez l'adulte (245). (242) Consulter notamment G. Ramon: Comptes rendus Acad. des Sciences, 1933 197, p.1361: Revue d'Immunologie, 1935, 1p. 37, Congrès international de Microbiologie, Londres, 1936, Revue d'Immunologie 1936 2 p415 Annales de Médecine 1937 42 Pédiatrie 1946 n°1 et 2 Le Progrès Médical, 1948 3 p.51 Revue d'Immunologie, 1949, 13 p.41: Revue de Pathol. Comparée et d'Hyg. Générale, 1952, 52, p.73 (243) L. Martin, G. Loiseau et A.Laffaille, Annales Inst. Pasteur, 1928, 42, p.1010 (244) Chr. Zoeller, Bull. Acad. de Medecine, 1928, 100 p.1070 (245) Voir notamment Cathala, Bull. et Mem. de la Soc. Med. des Hop. 1931, n°47, p.1262: IV Conf. de l'Assoc. Internat. de Pediatrie Rome, 1937, M.P. Giraud, Soc. Med. de Marseille, mars et avril 1934, analysé dans la Presse Médicale, 1934, n032, Mlle AZ Rougier, Journ. de Med. de Lyon, 1934, Carle, Soc. Med. et Chir. de Bordeaux, 1934, etc... 10 LA LUTTE PŔVENTIVE CONTRE (ES MALADIES INECTIEUSES Dans une étude d’ensemble. Loiseau et Laffaille ont exposé, en 1036 (246), les résultats obtenus par eux, au cours de dix années de pra¬ tique des vaccinations associées antidibhtérique-antitybhobaratybhoidi¬ a4e. Ils ont montré, par exemple, que sur 466 sujets adultes, soumis à ces vaccinations au moyen de trois injections du mélange d’anatoxine et de vaccin T. A B. , 462 soit 00. I5 0%, présentaient six semaines après la der¬ nière injection, une réaction de Schick négative. Ils concluaient: L’ezbé¬ rienre de dix années de vaccinations associées abborte, tant bar les tests biologiques qu’ébidémiologiques, la breuve de l’eficacité et de l’inno¬ cuité de cette méthode d’immunisation. Une application très étendue des vaccinations associées a été faite. dans l’ARMEE ERANCAISE à dater du début de 1930. C’est d’abord la formule des paccins associes antidibhtérique-anfi¬ tybhobaratybhoidique qui était mise en œuvre. Elle était inscrite et re¬ commandée dans la loi du 2r décembre ro3r qui rendait obligatoires ces vaccinations associées dans les garnisons, forces navales, etc.., où la diphtérie existait à l’état endémique. Dans plusieurs mémoires très documentés le médecin général ins¬ pecteur Ch. Dopter fit connaitre, à dater de 1o3r, les heureux résultats obtenus grâce à notre méthode (247). Dans l’un de ses rapports, il s’ex¬ prime ainsi : « La vaccination préventive par l’anatoxine dibhténque associée au vaccin antitybhobaratyhhoidique a Hônné d’excellents résultats: par¬ tout où elle a déjà été mise en pratique, la dizhtée a pour ainsi dire dis¬ paru chez les vaccinés, alors du’elle a continué à se manifester chez les non-vaccinés et chez les sujets qui ont été vaccinés incomplètement ». Et Dopter de conclure; (L’Armée a déjà retiré et retirera encore de l’utilisation des «vac¬ cinations associées » un bénéfice impressionnant. Cette méthode cons¬ titue une arme puissante capable de s’opposer victorieusement au déve¬ loppement des ébidémies qui peuvent survénir. : De la même façon, et à partir de 1934, les vacinations associées « antitétanioue, antidibhtégique, antitybhobaratybhoidique » furent lar¬ gement emplovées dans l’Armée française où elles devinrent obligatoires en 1936, grâce aux efforts du médecin général inspecteur Rouvillois et du médecin commandant Hombourger. Cet emploi très étendu permit de confirmer en tous points les don¬ nées que nous avions recueillies avec Chr. Zoeller en établissant la mé¬ thode. C’est ainsi que les médecins militaires Sacquépée, Pilod et lude montrèrent que la valeur de l’immunité antidibhtérique acquise après la vaccination au moyen des vaccins associés « anafoxine dibhtérique DE L’HOYME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DEe VACCINS I1 L anatoxine tétaniaze - T.A R « est supérieure à celle qui fait suite à l’administration d’anatoxine diphtérique seule (248). De même, ils cons¬ tatèrent que l’immunilé antitélanique conférée par ces mêmes vaccins associés est, elle aussi, supérieure à celle due à l’anatoxine tétanique emplovée isolément (240). Ils précisèrent que, comme nous l’avions annoncé avec Chr. Zoeller, dès ro27, l’iniection de rabbel à l’aide du vac¬ cin combiné « antidibhtéxique-antitétanique-antitybhobaratybhoidiaute » provoque une augmentation rapide et souvent très élevée de l’immunité antidipbtérique et de l’immunité antitétanique. L’augmentation de la teneur en antitoxine tétanique débute, d’après Sacquépée, Pilod et lude. dès le 3° jour chez certains sujets: elle se manifeste chez tous, à partir du s° jour On conçoit l’importance de cette précocité de l’accroissement de l’immunité antitétanique eu égard à la période d’incubation du tétanos. L’utilisation des vaccips associés sur des effectifs militaires consi dérables apportait une éclatante confirmation de l’inxocuité et de la oa¬ leur immunisante des paccinations associées, confirmation qu’évoquaient récemment encore, devant l’Académie de Médecine, le médecin géné¬ ral Le Chuiton, et devant le Conseil d’Hygiène de la Seine, le médecin général inspecteur Hombourger. L’obligation, dans l’Armée française, des vaccinations assocíes « antidibhtérique - antitétanique - antitybhobaratybhoidique » devait se faire rapidement sentir en premier lieu par la diminutiox considérable de la morbidité dibhtérique, ainsi que nous l’avons indiqué dans le cha¬ pitre consacré, dans la présente monographie, à la diphtérie (250). Comme preuve de l’efficacité, à l’égard de la diphtérie, des vacci¬ nations associées pratiquées dans l’Armée française, il faut citer encore un simple fait rapporté par luret (2sr) en 194s: « Dans le courant du dernier trimestre 1940, ro Belges et 7 Français prisonniers en Allema¬ gne sont entrés à l’Hopital du Stalag n° 28, atteints d’angine diphtéri¬ que contrôlée bactériologiquement. Les prisonniers belges dépendant de ce camp se trouvaient sept ou huit fois moins nombreux que les pri¬ sonniers français avec lesquels ils étaient mélangés. On peut donc esti¬ mer que la morbidité a été parmi les Belges ro fois plus importante que parmi les nôtres. Quant à la mortalité, elle a atteint so 2%, chez les malades belges (25%) contre 12 0% chez les pôtres, encore convient-il de noter que le seul Français avant succombé n’était pas vacciné. Ces résultats ne peuvent être expliqués, dit Juret, qu’à la lumière des mesures différentes prises précedemment dans l’Armée française et dans l’Armée belge. celle-ci n’avant pas été soumise à la vaccination antidiphtérique, obli¬ gatoire dans la première, en association avec les « vaccinations antitéta¬ (248) E. sacquépée. M. Pilod et A, Jude, Revue d’Immunotogie, 1938, 2, p. 437. (249) E. Sacquépée. M. Pilod et A, Jude,. But, Acad, de Médecine, 1936, 116, p. 202. (250) voir page 62 (251) Juret, Thése, Paris, 1945. (252) Cete forte mortalité s’explique en partie par la pénurie de sérum antidiph térique dans les camps, par la sous-alimentation et les fatigues de toutes sortes aux quelies étaient soumis les prisonniers. Et cela ajoute encore à la vajeur des vaccinations associées qui ont pu, même dans ces conditions déplorables, protéger contre la diphtérie mortelle les sujets ainsi vaccinés. LA UTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES NTECTIEUSES 112 nique et aptityphoparatyphoidique (253) ». Et ce fait, a fait dire plus récemment à un auteur anglais. Staniey Banks : « On doit reconnaitre la prescience grâce à laquelle a été assurée l’immunisation active de l’Armée française contre la diphtérie dès r936 (254) ». Il est nécessaire d’évoquer, en opposition avec ce qui vient d’être exposé, la morbidité diphtérique relativement élevée durant la guerre roTA-TOT8, alors que la vaccination n’existait pas encore, morbidité qui¬ à certains moments, a causé bien des inquiétudes au Service de Santé militaire et au Commandement français. Toujours à ce même propos, il doit être rappelé aussi que les troupes américaines qui, si elles étaient vaccinées contre le tétanos lors de la deuxième guerre mondiale, ne l’étaient pas contre la diphtérie, ont eu maille à partir en ToAs (2ss), en Allemagne, avec cette maladie qui y sévit à l’état endémique, notamment dans la Rhénanie. En ce qui concerne le tétanos, nous avons fait connaitre (256) que bien que le nombre des blessés ait été relativement réduit au cours de la campagne 1030-1040, aucun cas dûment établi n’avait été signalé non plus d’ailleurs que durant le temps de paix — parmi les soldats correc¬ tement vaccinés au moyen des vaccinations associées « tétanique, dibh¬ térique, tybhobaratybhoidique ». Pour ce qui regarde les maladies tybhoidiques, une comparaison fort suggestive peut être faite. Lors de la première guerre mondiale, et avant que, sous l’énergique impulsion du médecin général inspecteur Vincent, la vaccination antityphoidique ait pu être mise en œuvre avec succès dans l’Armée française selon la technique initiale, il y eut du 2 septembre 1914 au premier mai IOr5, près de 70,000 cas d’infections typhoides avec plus de 11. 000 décès; par contre, durant la période correspondante de la deuxième guerre mondiale, de septembre 1930 à mai ro40, il n’a été observé, d’après Liégeois, Sohier et Aujaleu (257). que 144 cas de fièvres typhoides avec 5 décès connus. Les effectifs des quatre dernières classes de l’Armée active avant été vaccinés, à dater de 1936, au moyen du vaccin triple associé: « antidi2hlériqne-anitéta¬ niaue-antitybhobaratybhoidique », on peut déduire que les vaccinations associées ont porté, en matière de prévention des maladies typhoides. leurs fruits dans les Armées en campagne, tout comme les vaccinations effectuées à l’aide du T.A B. seul. L’application des vaccinations associées dans l’Armée française, à des centaines de milliers d’hommes, avec les résultats qu’elle a permis (253) Lors de notre exposé devant le XIIIe Congrès de Medecine et de Pharmacie Militaires, le 19 juin 1951, l'un des assistants, le Pharmacien de réserve Picard de Nice me rettait la note suivante: " Suite à votre exposé, j'ai l'honneur de vous signaler qu'en cinq années de captivité, je n'ai vu qu'un seul cas de diphtérie, d'ailleurs drama- tique: un prisonnier belge, replié au Stalag II-E en mars 1945, mort en 48 heures" (254) Stanley Banks. Proc of the Royal Soc of Med. Sect. Epid. 1947, 40, p.267 (255) Communication orale du medecin colonel Mueller de Boston 5256) Voir nos publications sur la vaccination antitétanique: voir également dans cette monographie le chapitre traitant du tétanos et des résultats de la vaccination anti tétanique. (257) Liégeois, Sohier et Aujaleu, Bull. Acad. de Med, 1942, p. 289 DE LHOMME ET DES ANIMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 113 d'obtenir en ce qui concerne la prophylaxie simultanée de la diphtérie, du tétanos, de la typhoide et des paratyphoides, devait servir d’exemple pour une pareille réalisation dans la Pogulatiox civile. Ainsi que nous l’écrivions en octobre 1940 (258), alors que notre pays était soumis à l’occupation par les armées allemandes et à ses conséquences : « Quel¬ ques années d’application obligatoire des vaccinations associées ont abouti à la disparition pratiquement complête, dans notre armée, de la diphtérie, du tétanos, des afections typhoides, à l’élimination quasi totale de la mortalité que ces maladies entrainent. De même, la généra¬ lisation des vaccinations associées dans l’ensemble de la population fran¬ caise, et notamment chez les jeunes, préviendra l’apparition et le déve¬ loppement de ces maladies qui trouvent chez les individus affaiblis par les privations et sous-alimentés, un terrain propice à leur éclosion et dont la propagation est facilitée par les déplacements de populations en dêtresse ». Conformément à ces recommandations répétées à diverses reprises, les vaccinations associées allaient s’étendre de plus en plus. C’est ainsi que la loi du 24 noyembre ro4o, complétant celle du 2s juin 1938, rendait oblisatoire en France, bour tous les entants debuis l’âge de un an, la vac¬ cination antitétanique associee la vacciaation antidibhténioue, au moyen du mélangé des deux anatoxines tétanique et diphtérique. La tendance actuelle en France est d’appliquer aux enfants, et aussi à plu¬ sieurs catégories de personnes particulièrement exposées, les vaccia¬ tions associées « antidibhtérique-antitétanique-antitybhoparatybhoidique ». selon la formule qui a donné les résultats si démonstratifs dans l’Armée française. Nous donnerons, ici, d’après une communication présentée en avril 1O05L, à l’Académie de Médecine, par A. Besson (inspecteur général des Services d’Hygiène de Paris et du département de la Seine), un exem¬ ple particulièrement probant des résultats obtenus dans l’emploi des oaccinations associées dans la population civile, à Paris (250). « En 1925 — écrit A. Besson — alors qu’aucune campagne collec¬ tive de vaccipation antidiphtérique n’avait été entreprise, on enregis¬ trait à Paris, du r janvier au 31 décembre 1025, 2,836 cas de diphtérie dont 188 mortels. « En 1950, pendant la même période, du r° janvier au 3r dé¬ cembre, alors que la plupart des assujettis sont correctement vaccinés au moycn des vaccinations associées antidibhtérique-antitétanique ou antidighterique-antitétanique-antityphobaratybhoidique (plus de 92 % en moyenne dans les écoles) 166 cas de diphtérie ont été signalés à Paris. parmi lesquels 5 décès; encore faut-il observer que 4 de ces décès sont survenus chez des personnes non-vaccinées et que le cinquième n’est pas imputable à la diphtérie, car le diagnostic posé par le médecin traitant a été infirmé par l’Hôpital Bretonneau où l’enfant, qui a succombé à un œedème sous-glottique d’origine grippale, avait été transporté. (258) G; Ramon, La Presse Medicale, 1940, n°37, P.803 (259) A. Besson, Bull Acad. Nat de Med. 1951, 135, p. 262. Voir aussi au chapitre de la diphtérie de la présente monographie, le passage consacré aux résultats de la vacci nation antidiphtérique à Paris. 14 LA UTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTEUSES Voilà donc, écrit Besson, des chiffres indiscutables: ex vungt-cina aus, le nombre des cas de dibhtérie enregistrés ex douxe mois à Paris. basse de 2,830 à 166 et le nombre des décés tombe de 188 a 4. On peut dire sans emphase et sans exagratfon qu’il sacit d’un véritable efopdrement de la morbidité et de la mortalité par diphtérie. » Ainsi" bleinement confirmée dans sa valeur pratique bar un usage maintenaut courant dans les collectvités les blus variées, dans l’armée comme dans la bobulatiou cioile, chez l’enfant comme ches l’adulte, la méthode des vaccinations associées connait en France, depuis un quart de siècle, un essor grandissant et des résultats de blus en blus démons¬ tratifs. B. — Dans les autres pays Cependant, l’essor de la méthode des vaccinations associées fut dans les autres pays, plus tardif et plus lent qu’en France où cette mé¬ thode avait vu le jour. Il est vrai que dans diverses contrées, notamment en Allemagnez et dans les pays anglo-saxons, régnait la théorie de la Cuncurrence dles autigênes, selon laquelle les antigènes ne peuvent que se gêner mu¬ tucllcment dans l’établissement simultané de l’immunité spécifique qu’ils sont capables de provoquer et de développer isolément. Pénétré de cette théorie que nos travaux et leurs résultats particulièrement probants avaient pourtant fortement battue en brèche, on semblait ignorer à l’étranger les vaccinations associées, leur efficacité et leur valeur prati¬ quc, révélées et largement démontrées en France. Ainsi, par exemple, comme nous l’avons déjà indiqué, dans leur « Traité de Bactériologie et d’Immunologie. (édition de 1936), deux autcurs anglais, Topley et Wilson, passaient sous silence la méthode des vaccinations associées. D’autre part, en 1934 up médecin des Etats¬ Unis, s’adressant au grand journal médical de ce pays (260), écrivait ce qui suit : Actuellement les médecins praticiens s’intéressent de plus en plus à l'oeuvre prophylactique, il paraît donc nécessaire de simplifier les mé- thodes suivies jusqu’à présent et de combiner plusieurs procédés d’immu¬ nisation en, un seul (administrer plusieurs vaccins en une seule vaccina¬ tion), 8i un tel procdé s’avéralt eficace, il serait extremement utile l’ai demand — boursuit le médecin américain — leur avis à quinze ou vingt personnalités éminentes des Erats-Unis (dont le Dr McCoy. Direc-¬ teur du Laboratoire Central d’Hygiène à Washington). Elles m’ont répondu qu’il n’y avait pas d’objection de principe à faire à l’emploi éventucl d’un tcl’procédé et ponr l’un de mes corfespondants, le Major Kitchen (Fort Shcridan), le problème présente une importance extra¬ ordinaire et il espèrc que des chercheurs y prendront intérêt et réali¬ scront des expériences précises à ce sujet. » revue américaine (266). (266) The Journ of the Am. Med. Ass., 1934, 102, n°22, p.1874. Cette lettre avait d'ailleurs été précédée de plusieurs autres lettres posant les mêmes questions (The Journ, of the Am. Med. Ass. 1934, p.125, et p.1326) DE L’HIOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AUL MOVEN DES VACCINS 113 Or ce Broblème était résolu en France debuis r926. Les expériences réclamées par le médecin américain étaient réalisées et déjà la méthode des vaccinations associées au moven des vaccins combinés était en usage dans la population civile et dans l’Armée française. Cependant, à partir de 1954 divers auteurs étrangers vont appor¬ ter leur contribution à l’étude, dans leur pays respectif, de l’application de la méthode des vaccinations associées. C’est ainsi qu’aux ETATs-UNIs, après avoir mis en œeuvre les vacci¬ nations associées « antitybhoidique-antidiohlérique » chez 3,000 enfants. Anson B. Ingels concluait que l’immunisation aptidiphtérique combinée de cette façon à l’immunisation antityphoidique aboutit à un effet plus marqué et plus durable que la vaccination simple (26r). Des esais pratiqués par lones et lames M. Moss, au moyen d’un mélange d’anatoxines diohtérique et tétanique (précipité par l’alun), il ressortait que les vaccins combinés immunisaient l’organisme aussi bien que l’administration de chaque antigène séparément (262). Un exposé de la question paru en ro3z aux Ftats Unis après avoir rappelé les travaux effectués en France dans le domaine des vaccina¬ tions associées, se termine ainsi: Assurément si une immunité solide. durable, peut être dépelobbée de cette façon, la méthode aura Par sa commodité et son économie, une grande imbortance en brobhylaxie (263). Après un certain nombre d’essais effectués à l’Hôpital des Enfants et à la Clinique Pédiatrique de l’Université Washington de la ville de Saint-Louis. Cookl recommandait chaleureusement, en rox8, l’emploi des vaccinations associées au moyen du mélapge d’anatoxines diphtérique et tétanique comme procédé de vaccination chez tous les enfants (264). De même en GRANDE-BRETAGNE, un article paru en 1o36, montrait tout l’intérêt qu’il y aurait à utiliser les vaccinations associées dans une collectivité surveillée telle que l’Armée (26s). D’ailleurs, en 1930, nous aviops pous-même atiré l’attention sur les avantages, des vaccinations associées dans un mémoire publié dans une Aux approches de la deuxième guerre mondiale, un certain nombre de nations vont se préoccuper de protéger leur Armée coptre les risques du tétanos, à l’aide de l’anatoxine tétanique. Plusieurs d’entre elles em¬ ploieront la méthode des vaccinations associées à l’image de ce qui était complètement réalisé depuis quelques années dans l’Armée française. En ITALIE, conformément à l’avis donné en 1938 par le Comité des Inspecteurs du Centre Général d’Hygiène militaire et à la suite de l’expe (281) Anson B. Ipgels, Am. Journ. Publ, Heaith, 1934, 24, p. 1055. (262) G G, Jones et James M. Mos, Journ, 91 gct, 1937 3, p. 53 (263) The Journ, o1 the Am. Med. Ass, 1937, 108, p 807. (264) LV. COORI, South Med, Journ, 1938, 31, p. 158. (265) Brit. Med, Journ, octobre 1936, p. 723. (266) G Ramon. Net Internat. Clinies, 1939. 1. série 2. LA LUTTE PRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INECHIEUSES 16 rimentation entreprise par divers auteurs, notamment d’Antona, l’Armée devait être désormais vaccinée contre le tétanos, selon la formule des vaccinations associées, à l’aide du mélange d’anatoxine tétanique et de vaccin antityphoparatyphoidique (267). Au CANADA, à l’instigation de Fitz-Gerald et de ses collaborateurs Fraser, Moloney, etc., et après avoir été étudiée par Sneath et Kerslake en particulier (268), l’immunisation active coptre le tétanos a été effec¬ tuée dans les Forces canadiennes, dès le début de la deuxième guerre mondiale, selon le procédé des vaccinations associées, au moyen du mé lange d’anatoxine tétanique et de vaccin antityphoparatyphoidique. Ains que l’a déclaré récemment Wishart : « Il semblait logique d’ajouter du vaccin antityphoidique aux anatoxines, ce qui fut fait par ce peuple logique, les Français. Ramon introduisit, en effet, l’usage du mélange des anatoxines tétanique, diphtérique et du vaccin T.A. B. (260). On con¬ nait le plein succès, à l’égard de la protection contre le tétanos, de l’im¬ munisation ainsi comprise puisque, rappelons-le, dans l’ensemble des armées canadiennes, il n’y eut que » cas de tétanos dont un seul mortel et deux bénins (270). D’autres Armées encore, notamment les Armées brésilienne, ortu¬ gaise, sovietique, suisse, etc.., ont utilisé et continuent à utiliser avec une égale réussite les vaccins combinés à base, par exemple, du mélange d’anatoxine tétanique et de vaccin antityphoparatyphoidique. Ainsi losé Furtado Rodrigues et Nato ont montré, d’après l’usage qui a été fait des vaccinations associées « antitétanique-anttybhobara¬ byoloidique » dans l’Armée brésiliennet tous les avantages de la mé¬ thode (271). En SUISSE, le colonel brigadier Meuli, Médecin en Chef de l’armée. a fait connaitre (272) que les soldats qui avaient été soumis, en 1930, aux vaccinations associées « antitétanique-antitybhobaratybhoidique », jouis saient encore, en ro47, d’une aussi forte immunité antitétanique que ceux vaccinés il y a deux ou trois ans avec l’anatoxine tétanique seule; ce qui confirme, d’une part, les principes que nous avions posés avec Chr. Zoeller en instaurant la méthode des vaccinations associées, et ce qui corrobore. d’autre part, les nombreuses données recueillies dans l’Armée française par Sacquébṕe, Pilod et fude, etc. En U. R S S., on s’est servi pendant la deuxième guerre mondiale et on continue à se servir d’un « olyvaccin » combiné contre le tétanos, les affections typhoides, la dysenterie, le choléra. (267) Voir The Journ of the Am Med Assoc. "Lettre d'Italie" 30 juillet 1938 p.468 (268) PAT Sneath Journ of the Am Med Assoc 1934 Sneath et Kerslake, The Journ of the RAMC, mai 1946 (269) FO Wishart Health septembre octobre 1947 9 (270) D'après Wishart et d'après une communication personnelle du Médecin Général WI Coke, Directeur général des Services Médicaux de la Défense Nationale du Canada. Voir également JM Mather et ses associés, Canad. Journ of Public Health, 1949, 40 p. 51 (271) Arquiv di Inst. de Biol de Exercito, 1947, 8 P. 95 (272) Medecin-Colonel-Brigadier Meuli, medecine et Hygiène, 15 octobre 1948 DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 117 Au JAPON, VYaoi à emplové avec succès, dès 104T, des vaccins asso¬ ciés « aifidysentérioute-anttyohobaratybhoidique » (225) Déjà aupara¬ vant il avait effectué des essais de vaccination combinée « antivariolique¬ antityphoidique » (274). En TO42, les vaccins associes combosés d’anatoxine dibhtérique. d’anatoxine fétanique, de vaccin antitybhobarabybhoidique r. A B. et d’anavaccin formolé antinickettsies (contre le typhus exanthématique) ont été appliqués de facon collective en Afrique du Nord. Reprenant récem¬ ment l’étude de cette question, le médecin colonel lude, du Val-de-Grâce. en a fait une étude immunologique complête (275). Tous ces faits, et ce sont la des faits indéniables, ont abbortés des breuves nouvelles de la valeur bratique des vaccinations associées. Au cours de ces quinze dernières années, un nouveau champ d’exploitation s’est ouvert principalement aux Etats-Unis, au Canada, en Grande-Bretagne, en France, etc.., à la méthode des vaccinations associées. C’est celui qui permet d’utiliser, chez l’enfant, le vaccin contre la coqueluche combiné à l’anatoxine dibhtérique ou au mélange d’ana¬ toxines tétanique et dibhtérique. Déjà, vers 1938, nous avions entrepris avec Robert Debré et en liaison avec M. Jules Bordet des tentatives de vaccinations associées « anticoquelucheuse-antidibhtérique » (276). La guerre devait interrompre nos tentatives. Nous devions les reprendre à dater de 1948 (277). A partir de 1040 vont se multiplier, en Amérique du Nord, les essais de ce genre auxquels sont attachés notamment les nome de Louis W Sauer "de Lapin de Kendrick, de Tucher, de Simon, et Craster, de Daughty Denmark, de fohn J. Miller, de A. de Saint Agnese, de L Greenberg et de Fleming, de Volk, de Foley, etc., (278). En règle très générale, tous ces auteurs et d’autres encore, confirment en matière de vaccinations associées « anticoquelucheuse-antidibhtérique¬ antitétanique » et notamment pour ce qui regarde les immunités antidiph¬ (213) H. Yaoi, The Japan. Journ, O1 ErD. Medicine, 1941, 19, p. 43. (274) The Japan, Journ, Of Exp. Medicine, 1939, 17, p. 215: Paris Médical, n° 34. D. 31, et n° 18, p. 79. (245) A. Jude. Revue d’Immunologie, 150, n° 4, D. 215 (276) Menton de nos tentatives a été faite par Louis W. Sauer et Winston H ructer dans Am Tourn oL PIplie Death 1943, 32 Ces recherches étaient effectuées avec les suspensions mères de vaccln anticoquelucheux que nous envovait M. J. Bordet et que nous mélangions avec l’anatoxine diphtérique de notre préparation. Quelque temps quparavant,. J. Bordet avait publié (Brurelles Médicat, 1936, 16, p. 503) ses premiers essais de vaccinations associées anticoquelucheuse-antidiphtérique (71) voir a ce sujet : G. Ramon. Robert Debré. M. Lelong. R. Sohier et R. Richou. La Presse Médicale, 1948, 56, p. 193. (278) Louis W. Sauer, The Med. Clinies ot North America, publié par Saunders Ce USA.: J-H. Lapin, Journ Ped, 1844, 24, p. 281: 1946, 29, p. 30. OL Kendrick, Am J. HUa, 1943, 38, D. 193. N.H. TucRer et E. Markley, J.4.M4, 1944, 125, p. 949. H. Simou et C.V. Craster, JM. SOc. Neu-Jerset, 1941, 38, p. 461. Daughty Denmark. An. Journ Dis. ChHIdT, 1942, 63, D. 453: J.. Miller, J. 91 Pediat, 1944, 24. p. 281. A, de Saint-Agnese. L. o1 Pediat, 1947, 31, p. 251 : L. Greenberg et DSF. Fleming. Canad, Journ. Pubt Heaith, 1947, 383. D. 279. WE. VOoIR, An,. J. H3G, 138, 17, p. 53. A R. Foley, rhe Canae JourT, 01 Public HedltR, 1940, p. 258. LA LUTTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES 18 térique et antitétanique, l’efficacité prouvée depuis longtemps en faisant usagc des vaccinations associées « antitybhobaratybhoidique-antidibhtéri¬ aute-antitétanioue ». D’autre part l’innocuite de la méthode, largement démontrée en France, sur des millions de sujets (enfants et adultes) vaccinés à l’aide des vaccins combinés de différentes sortes, est maintenant gehelan admise (270). Cependant, au cours de ces dernières années, on a signalé dans les pays apglo-saxons que les iniections de vaccins, et particulièrement celles des vaccins associés « antidibhtérique-anticoauelucheux », faites au cours d’une épidémie de bohomyéhte pourraient, dans de très rares cas, localiser les paralysies dans le membre siège de l’injection vaccinale (280). D’ail¬ leurs, ces manifestations paralytiques pourraient être également provo¬ quées par le vaccin anticoquelucheux seul, et plus exceptionnellement par le vaccin antidiphtérique (28r). A cet égard. Cockburn est partisan des vaccins qui ne contiennent pas d’alun, parce qu’ils sont moins irritants et causent moins de réactions locales (282). Une enquête a été faite sur ce sujet, à la demande du Service de la Santé Publique des Etats-tnis et de la Fondation nationale pour la para¬ lysie infantile (283). Les quarante experts de cette Commission d’enquête ont été d’avis que les injections de vaccins n’augmentaient pas le nombre des cas de poliomvélite; ils ont insisté sur ce fait que les enfants risquent beaucoup plus de contracter la diphtérie et la coqueluche que la polio¬ myvélite et que les bénéfices de l’immunisation contre les deux premières maladies l’emportaient sur les faibles risques de contracter la dernière. Du point de vue pratique, ces experts concluent que l’on peut vacciner les cnfants de moins de six mois et les adultes à tout moment, même en période de poliomvélite, mais qu’il est préférable de différer les vaccipa¬ tions associées ou les vaccinations simples des enfants de plus de six mois ct de les reporter après la fin de la période épidémique. Toutefois, Rhodes (284) trouve ces conclusions trop prudentes, en effet, sur 235 enfants attcints de poliomvélite à forme paralytique, en 1951, à Toronto, il en rclèyt 20 qui avaient recu une injection vaccinale dans les trois mois pré¬ cédents, dont 6 sculcment dans les quatre semaines antérieures : 2 de ces cnfants n’curent pas les bras paralysés et les 3 autres eurent des paralysies des bras ainsi que d’autres paralysies; les iniections de vaccins combinés (279) Voir à cet égard IH McLean et LB Holt, The Lancet, 1940, n°2, p. 581 WK Chen Proc Soc Exp Biol and Med 1933 31 p 344 JH Lapin Journ of Pediat 1943 22 p 439 (280) Voir pour la bibliographie de cette question les actricles de AJ Rhodes The Canad. med. Assoc. Journ. 1953 p. 68 3 CW Anderson, AE Skaar Pedia trics 1951 7 p. 741 HS Banks et AJ Beale Brit Med Journ 1950 251 DH Greffen Mc Closquey The Lancet 1950 p. 659 Med Journ Aust. 1951 p. 613 (281) D'autres facteurs ont été également incriminés dans l'apparition de ces manifestations poliomyélitiques par exemple les injections de substances médicamen teusesn les traumatismes le surmenage, etc (282) WC Cockburn, Patritioner, 1951 167 p.232 (283) Journ of the Amer Med Assoc 1952 149 p.170 (284) AJ. Rhodes, The Canad Med Assoc Journ 1953 68 p.3 DE L’HOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 116 tvaccin anticoquelucheux associé aux anatoxines diphtérique et tétanique) ou autres, n’ont donc pas, d’après lui, de rôle localisateur. Rhodes expose également que Foley (de Québec), sur 25,700 primo-vaccinations et 20,600 iniections de rappel faites chez des enfants en juillet, aout et septembre 1951, n’a eu connaissance d’aucun cas de paralysie intéressant le membre où l’injection avait été faite, et que Curtis, sur 20, 200 enfants vaccinés en 1951, n a noté que deux cas de poliomvélite limitée aux membres infé¬ rieurs. Dans ces conditions. Rhodes estime qu’il n’y a aucune raison, pour le moment, de recommander que les vaccinations de toutes sortes, et notamment les vaccinations associées, soient suspendues pendant les mois où la poliomvélite sévit. De son côté McLeod (285) montre que l’argument dont on s’est servi, à savoir la localisation brachiale de la poliomvélite après vaccina¬ tion au bras, ne tient pas. En effet, au cours d’une épidémie de poliomvé¬ lite à Belfast, on a continué à vacciner et il y a eu davantage de para¬ lysies brachiales (40 2%) chez les non-vaccinés que chez les vaccinés (22 20)chez les sujets de 0 à 2 ans. Dans un ordre d’idées voisin. Weichsel et Rhodes ont montré que les entants peuvent être vaccinés sans danger d’exacerbation de léur tuberculose, au moyen des vaccins associés « antidiphtérique-antitétani¬ que-anticoquelucheux » (286). Depuis longtemps d’ailleurs, les vaccina¬ tions associées sont pratiquées sans inconvénient en France dans les pré¬ ventoriums et les sanatoriums (287). Nous terminerons ce chapitre en citant des exemples de l’efficacité et de l’innocuité des vaccinations associées u antidibhtérique-anticoquelu¬ cheitse » et « antidibhterique-antitétanique-anticoquelucheuse ». Foley (288), au cours d’essais qui ont duré trois années, a vac¬ ciné 38,188 enfants de la province de Québec, au moyen de trois doses de 2 centimêtres cubes chacune, à un mois d’intervalle, d’un vaccin combiné composé d’anatoxine diphtérique brute (fluide) et de vaccin anticoquelucheux : 145,404 enfants de la même région non-vaccinés ser¬ vaient de témoins. La morbidité par diphtérie chez les vaccinés fut de 1,8 D. 190,000 contre 136 p, 100,000 chez les non-vaccinés: la morbidité par coqueluche de 55, 8, chez les vaccinés au lieu de 1.574 chez les non¬ vaccinés. Chez les vacinés, il n’y cut pas un seul mort, ni par diphtérie ni par coqueluche. Chez les non-vaccinés, le taux de mortalité était pour la diphtérie de 19,2 p. 100,000 et pour la coqueluche de 15, 8. (285) WJ Lead, Brit Med Journ 1951 vol 1 p.736 et The Ulster Med Journ mai 1951 (286) M. Weichsel et A. Rhodes Journ Pediat 1950 37 p. 201 (287) Analyse in Am Journ of Diseases of Children 1952 84 p. 653 Voir à ce même propos la publication récente de A. Breton J. Ratel et F. Roger: La Presse Medicale 1953 61 p.574 (288) AR. Foley The Canad Journ of Public Health 1940 p.259 120 LA LUTE PREVENTIVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES Tout dernièrement Feldman de Manchester (280) après de nombreux autres auteurs montrait les résultats très satisfaisants obtenus à l’aide des vaccinations associées contre le tétanos, la diphtérie, la coqueluche chez les enfants âgés de 3 mois, 4 mois, et o mois. L’auteur n’a noté aucun incident, les réactions ne sont pas plus marquées que celles provo¬ quées par un seul antigène. De leur côté. Fleming et ses associés avaient fourni (200) les conclu¬ sions suivantes de leurs études sur les vaccinations associées « anticoque¬ lucheuse-antidiphtérique-antitétanique »: L’immumité antidibhlérique est sensiblement augmenlée quand l’ana¬ foxine dibhtérique est iniectée en mélange qvec le vacin anficoquelu¬ cheux ou avec ce même vaccin et l’anatoxine tétanique. Il en est de même de l’immunidé antitétanique. Les véoctions oui beuxent faire suite l’iniection des vaccins combinés ne sont bas blus fortes que celles dues à l’iniection du vaccin anticoquelucheux seul. Le bublic accebte blus volon¬ tiers les diverses vaccinations lorsqu’ elles beuvent être effectutées simul¬ tanément à l’aide de vaccins combinés. Ces conclusions résument, après plus de vingt années d’usage les plus variés, les qualités des vaccinations associées : elles affirment, une fois de plus, leur grande importance pratique (201). LES DIVERSES FORMULES DE VACCINATIONS ASSOCIÉES EN MÉ DECINE HUMAINE Sous l’influence des résultats obtenus qui attestent chaque jour davantage la valeur des « vaccinations associées », les modes d’applica¬ tion de la méthode se sont multipliés. A l’heure présente, de nombreuses formules peuvent être mises en usage, leur emploi variant suivant les circonstances épidémiologiques et selon les catégories d’individus. Nous en énumérerons les principales, les dénominations indiquant leur composition a) les vaccinations associées antidiohtérique-antitétanique b) les vaccinations associées antidiohténique-antitybhobaratyohoidi¬ que. (291) On s’étonnera qu’après tant de preuves de l’innocuité et de l’efficacité des vaccinations associées, les participants à une Conférence placée sous l’égide de l’Orga nisation Mondiale de la Santé (Francfort sur-le-Main, 15 au 20 mars 1954) gient cru devoir faire à l’endroit de cette méthode certaines réserves du genre de celle-ci : Il semble qu’il ne faille pas multiplier de façon exagérée l’association des antigènes dans ur même vaccin, en particulier lorsque le vaccin comprend du T.A B., sous peine d’avoir des réactions trop vives et d’obtenir une immunité moins bonne A-t-on oublié ou ignore-t-on qu’en France notamment, des mlions d’individus, er particulier dans l’Armee française, ont été vaccinès depuis 1936 à l’aide des vaccinations associées. Les accidents qui ont été enregistrés dans cette Armée, à la fin de 1939 et au début de 1940, se sont produits à la suite d’injections de vaccin antityphoparatyphoidique seul, et non de vaccins associés antidiphtérique-antitétanique-antityphoparatyphoidique "voir Costedoat, Bull, et Mém. de la Soc. Méd, des Hop. Paris, mars 1947, p. 214). DE LHOMME ET DES ANMAUX DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCINS 121 c) les vaccinations associées antitetanique-anilybhobaratybhoidique. d) les vaccinations associées antidibhténque-antitétanique-antitybho¬ Parabybhoidique. e) les vaccinations associées antidibhlénique-anticoquelucheuse. f) les vaccinations associées antidibhtérique-antitétanique-anficoque¬ lucheuse. D’autres formules peuvent être également mises en œuvre, Par exemple, on peut ajouter aux vaccins combinés « antitétanique-antidi¬ phtérique-antibybhobaratybhoidique », du vaccin anticholérique, comme cela a été fait en U. R. S.S. On a préconisé au JAPON, nous l’avons indi¬ qué, les vaccinations associées « antitybhobaratybhoidique-antidysenté¬ riaute » et les vaccinations combinées « antivariolque-antitybhoidique » (Yaoi) (202). En HONGRIE, d’après Farago, on a utilisé les vaccinations associées « antidibhténque-antiscarlatineuxe ». Il est probable que dans un avenir plus ou moins rapproché, des « vaccins associés » seront préparés et utilisés dans la composition des¬ quels entreront des vaccins dirigés contre les maladies humaines dont les "gents sont des altvavirus, en l’espèce des vaccins anavirulents tels que le vaccin contre le typhus, contre la grippe (203), etc.. Nous avons rappelé plus haut les premiers essais réalisés, en 1932, en Afrique du Nord, d’application collective des vaccins associés constitués par l’ana¬ toxine dibhtérique, l’anatoxine tétanique, le vaccin antityphobaratyohoi¬ dique et l’anavaccin antirichettsies (contre le typhus exanthématique). Nous avons signalé aussi l’étude de cêtte question faite plus récemment par lude (204). Selon S. Bilal, le vacoin contre le typhus a été déjà em¬ ployé dans la pratique en Turquie, combiné au oaccin antitybhoidique et au vaccin antibesteux (205). Ajoutons enfin que, selon le même principe. Peltier et Durieux asso¬ cient le oaccin antivaniolique et le paccin anti-amarit contre la fièvre jaune. qu’ils inoculent par scarification (206). Ainsi la liste des formules de vaccinations associées est donc loin d’être close et les combinaisons de « vaccins associés » utilisables en médecine humaine apparaissent en nombre illimité. LES VACCIMATIONS ASSOCÍES DANS LA PROPHYLAXIE DES MALADIES INFECTIEUSES ANIMALES Au lendemain même de la mise en évidence du principe des vaccina¬ tions associées (1926), nous procédions à des expériences en vue d’appli¬ quer ce principe en médecine vétérinaire, dans la prophylaxie des mala¬ dies infectieuses animales. (293) H. vaoi, boe eit. (293) Voir à ce sujet : G. Ramon, Bull. Acad. Nat, de Méd, 1953, n° 11-12, p. 206. (294) A. Jude. Revue d’Immunologie, 1950, 14, p. 215. (295) S. Bilat, Rerue d’Immunologie, 1948, 12, p. 362. (298) Bull. Acad, de Méd, 1940, 123, p. 137. 122 LA LUTIE PRÉMENTIME CONTRE LES MALADIES INFECHIEUSES En relatant ces expériences, nous nous exprimions ainsi: « Des essais entrepris avec Chr. Zoeller ont montré que le mélange d’anatoxine tétanique et de substances adiuvantes et stimulantes de l’im¬ munité (tapioca, alun, etc..) peut être remplacé, chez l’homme, par le mélange d’anatoxine tétanique et d’une autre anatoxine, ou bien encore d’un vaccin microbien: le vaccin antityphoidique, par exemple. Ces vacci¬ zations associées, comme elles ont été dénommées, ont le grand avantage d’accroitre l’immunité (l’immunité antitoxique du moins) et de réaliser une double immunisation en une seule série de vaccinations. Dans le but de savoir si, éventuellement, ces vaccinations associées pourraient être mises en œuvre chez l’animal avec le même bénéfice, nous avons entrepris quel¬ ques expériences. En particulier nous avons iniecté à dix chevaux, deux doses à’trois semaines d’intervalle, de ro centimêtres cubes chacune d’ana¬ toxine tétanique additionnée d’une culture de streptocoques (souche d’ori¬ gine animale) chauffée quarante minutes à 54-s5 degrés. Huit jours après la deuxième iniection, le sérum des animaux ainsi traités neutralisait, par centimêtre cube, la quantité de toxine représentant de 50 à ro0 doses mor¬ telles, pour le cobave, en moyenne. Le sérum de chevaux qui avaient recu dans des conditions semblables l’anatoxine seule, neutralisait de s à 20 doses mortelles seulement. La comparaison de ces chiffres montre bien l’action favorisante exercée par la brésence, dans le mélange, des corps microbiens streptococciques, sur l’immunité antitoxique développée par l’anatoxine tétanique (297). » Nous tirions immédiatement la conséquence de cette expérimentation en précisant que « si une autre vaccination (avec un vaccin microbien, bar exemble) devait être mise en œuure ches, le même animal et dans le même moment, on bourrait associer les deux vaccinations en iniectant le mélange de vaccin microbien et d’anatoxine tétanique (208). Ainsi était posé, dès 192%, le brincibe de l’apolication des «zaccina¬ tions associées » en médecine véténinaire. Dans la suite, de nouvelles recherches expérimentales et les premiers essais dans la pratique confirmaient le résultat de nos recherches ini¬ tiales (200). Au cours de ces dernières années, nous avons longuement poursuivi. avec divers collaborateurs, Richou, Thiéry, etc.., nos investigations en ce domaine, étudiant plus spécialement l’association d’un vaccin anatoxi¬ que (anatoxine tétanique ou anatoxine staphylococcique) et de susbensions microbiennes formolées, soit de B, abortus, soit de B, coli, soit de streb¬ tocoques, soit de stabhylocoques (anavaccins), etc.. (300). (297) G. Ramon et P. Descombey, Annales Inst. Pasteur, 1927, 41, D. 841. (298) G. Ramon et P. Descombey, toc, cit, D. 845. (299) Voir par exemple: G. Ramon et D. Dijourichitch. Comptes rendus Soc, de Biologie, 1933, 113, p. 1420 : Annates Inst. Pasteur, 1933, 51, p. 407, etc. Voir également G. Ramon et A. Staub : Vaccinations associées « anticharbonneuse-anti Preisz-Nocard » Comptes rendus Acad, des Sciences, 1935, 201, p. 241. G. Holstein et R. Richou. « Vaccina tions, associées antitétanique-antistaphylococcique » au moyen du mélange des deux ana¬ toxines spécifiques. Recueil Méd. Vétérinaire, 1941, 17, p. 16. DE L’HOMME ET DES ANIMAUR DOMESTIQUES AU MOYEN DES VACCNS 123 De leur côté, divers expérimentateurs ont effectué des travaux en prenant comme base potre méthode des vaccinations associées. C’est ainsi, que Delpy et Mir Chamsy ont étudié la préparation de « vaccins assoties » contre la clavelée et ta fiêvre charbonnexse (301). contre la clavelée et ta fièvre abhteuse (avec Rafvi) (302), contre la huevra charbonneuse et le tétanos (363), contre la maladie de Netocasile et la variole (304). Katié a effectue des essais de vaccinations associées contre le tétanos et le rouget du borc (305). Geiger et Poppe, au cours de leur expérimentation sur le vaccin au cristal-violet contre la beste borcine ont incidemment fait quelques expé¬ riences avec le vaccin mixte antibestique et antirouget, et, à cette occa¬ sion, remettent en avant la question de la « concurrence des antigènes » néanmoins ils admetent que leurs expériences ont été faites sur un nom¬ bre trop restreint d’animaux pour pouvoir en tirer une conclusion ferme (306). Szelves, Flek et Koyes, de Budapest (30%), après avoir montré l’im¬ portance des vaccinations associées, rappellent les essais de Popescu sur les vaccins associés contre la vaniole et le choléra des poules (308). ceux de Komaroy, Goldsmith et Kahana (300), de Van Roekel et ses colla¬ borateurs (3T0), de Prier (3TT), sur les vacins associés dirigés à la fois contre la Maladie de Neocasdle et la variole quiaire. Szelves, Elet et Koves ont, à leur tour, expérimenté sur les vaccins associés contre le tétanos et le charbon baciéndien et contre ce dernier et la gangrène ga¬ zeuse. Ils ont notamment constaté que l’immunité antitétanique conférée par les vaccins associés est au moins aussi bonne que celle provoquée par l’anatoxine tétanique seule; il en est de même de l’immunité charbon¬ neuse. Toutefois, ils ont observé que les immunités obtenues avec trois antigènes associés sont moins fortes que celles obtenues avec deux vac¬ cins associés ou avec les composants emplovés isolément. Cependant, ils concluent que leurs résultats vont, dans l’ensemble, à l’ençontre de la théo¬ rie de la concurrence des antigènes et de l’obinion de ceux qui doutent encore de l grande eficacité des vaccinations associées, malgré les tes renqus Acad, des Sciences, 1949, 229. p. 278. R. Richou. CI. Gerbeaux et Mle Schlaepfer Comptes rendus Acad, des Sciences, 1949, 229, p. 858. G. Ramon. R. Richou. J.-P. Thiéry Cl. Gerbeaux et J. Leplatre. Comptes rendus Acad, des Sciences, 1950, 231, p. 563: Repue d’Immunologie, 1950, 14, p. 205. G. Ramon, R. Richou,. J.-P. Thiéry et Cl. Gerbeaux Comptes rendus Acad. des Sciences, 1952, 234, p. 2131: Bull. OIf, internat, des Episooties 1952, 37, p. 228: Revue d’Immunologie, 1949, 13, p.-301. G. Ramon. R. Richou. P. Julienne J. Jacquet, CI. Gerbeaux et G. Leneveu, O1f, internat, des Eptsooties, 1952, 37, p. 514. (301) L.-P. Delpy et H. Mir Chamsy, Comptes rendus Acad, des sciences, 1947, 225 (303) L.-P. Delpy, A. Rafvi et H. Mir Chamsy, BuIt. Acad. Vétérindire, 1951, 24, p. 50. (303) L.-P. Delpy et H. Mir Chamsy, Bul. Acad. Vétérinaire, 1951, 24, p. 62. (304) L.-P. Delpy et E. Hars, Bul. Acad. Vétérinaire, 1953, 26, p. 715 (365) Relia Katlé But, OIt, internat, des Epootes, 1951, 35, p. 232 (306) W. Geiger et HH. Poppe. Berliner u. Munchener Tieraerat, 1953, n° 1. (6301) L. Szelves. P. Elek et J. Koyes, Aeta Veterinaria, 1952, 2. p. 97. (308) Bertiner u. Minchener Tieraerstt. Woch, 1939, p. 314. (309) Analysé In Veterinary Bul, 1950, p. 144. (310) J. Am. Vet. Med. Assoc, 1948, p. 131. (311) veterinary Med, 1952, p. 103. LA LUTTE PREVENTVE CONTRE LES MALADIES INFECTIEUSES 124 succés indéniables obtenus en médecine humaine dans la blubart des Pays du monde. Ainsi, en Médecine V’étérinaire, diverses formules de vaccinations associées ont été préconisées, dont certaines sont déjà plus ou moins large¬ ment appliquées : a) les vaccinations associées antitétanique-antistabhylococcique : b) les vaccinations associées antitétanique-anticharbonneuse: c) les vaccinations associées anticharbonneuse-anticharbon symbto¬ mafioue : d) les vaccinafions associées anticharbonneuse-anti-Preiss-Nocard. e) les vaccinations associées anticharbonneuse-anticlaveleuse : f) les vaccinations associées contre la maladie de: Negcastle et la vaniole avjaire: g) les vaccinations associées contre la variole et le choléra des bou¬ les, etc... Comme en médecine humaine, la liste des formules de vaccins asso¬ ciés, utilisables en médecine vétérinaire, s’allonge chaque jour. CONCLUSIONS La méthode des vaccinations associées, inaugurée en France il y a an auart de siècle, a etendu considérablement le domaine des abblications de l’immunologie. Partout où elle a été embloyée, celte méthode, grâce à laquelle blut¬ sieurs immunisations beuvent étre effectuées conjointement, a été laygc¬ ment confirmée dans sa commodité, dans son innocuité, daus son effi¬ cacité. Les très nombreux résultats acquis dans différents domaines et notaut¬ ment sur un nombre considerable d’êtres humains, bermettent de la con¬ sidérer comme la méthode de choix venue à boint bour réaliser la brégen¬ tion et la brobhylaxie simultanées des maladies infectieuses parmi les blus redoutables, chez l’homme et ches les animaux domestiques. CONCLUSIONS GÉNÉRALES Les procédés de vaccination actuellement en usage chez l’homme et chez les animaux, découlent de deux systêmes fondamentaux d’immunisa¬ tiox qui s’opposent dans leur conception, dans leur principe, dans leur réalisation, dans le mécanisme selon lequel ils interviennent mais qui con¬ courent au même but; la prévention des maladies infectieuses. D’une part, le système reposant sur le brincibe des virus-vacins de lenner et de Pasteur. Les virus-vaccins sont à base de microbes « vivants » plus ou moias atténués naturellement (Jenner) ou artificiellement (Pas¬ teur): ils sont capables de conférer à l’organisme vacciné la résistance aux infections, en « provoquant la maladie bénigne qui préserve de la maladie mortelle p. Constitués par des germes vivants, les virus-vaccins sont ins¬ tables: leur virulence atf́nuée à l’origine, peut être exaltée dans cer¬ taines conditions (Pasteur), d’où leurs inconvénients: elle peut être, au contraire, affaiblie outre mesure, d’où leur manque d’efficacité. Leur durée de conservation est limitée, ce qui entraine des difficultés lors de leur emploi. Les virus-vaccins ne sont applicables qu’à la protection contre un nombre restreint de maladies infectieuses dont il convient de préserver l’homme et les animaux domestiques. D’autre part, le système fondé sur le brincioe des anatorines et des vaccins anavirulents, obtenus grâce à l’action du formol et de la cha¬ leur sur les toxines, les bactéries, les ultra-virus, ce sont des substances inanimées, « chimiques », foncièrement inoffensives stables se conser¬ vant longtemps dans leurs propriétés essentielles: les anatoxines et les vac¬ cins anavirulents sont aptes à créer l’état réfractaire, lequel peut être ren¬ forcé dans sa valeur et sa durée par l’utilisation des facteurs adiuvants et stimulants de l’immunité. Dans le domaine théorique et doctrinal, les études entreprises et pour¬ suivies en application de ce dernier système ont abouti à des notions nou¬ velles en immunologie. Elles ont contribué à ruiner certaines théories. comme celle des « chaines latérales » (Ehrlich), celle de « la formation locale » des antitoxines (Besredka) et à abolir des dogmes considérés jus¬ qu’alors comme intangibles, tels que celui de la soi-disant impossibilité d’obtenir artificiellement l’immunité contre le tétanos, sous le prétexte 126 LA LUTTE PRVENTNVE CONTRE IES MALADIES NECTIEUSES que la maladie naturelle est incapable de la conférer, tels que celui de la « concurrence des antigènes », tels que celui encore de l’incapacité pour les virus « ipactivés » à l’aide du formol de provoquer le développe¬ ment de l’immunité. Dans le domaine pratique, les procédés de vaccination reposant sur l’emploi des anatoxinés, dés vaccins anavirulents ont considérablement étendu le domaine de l’immunologie appliquée. En dehors de leur usage dans la protection des animaux domestiques contre des affections meurtrières et souvent dangereuses pour l’homme (tétanos, rage, charbon symptomatique, etc..) et contre les épizooties qui sont de véritables fléaux (fièvre aphteuse, peste bovine, etc..), les métho¬ des de vaccination basées sur le principe des anatoxines et des vaccins anavirulents sont venues à point pour compléter la méthode iennerienne et pastorienne, dans la lutte contre les maladies infectieuses humaines. Crâce en particulier aux procédés de vaccination antidiphtérique. antitétanique, etc., utilisés soit isolément soit conjointement selon la for¬ mule des « vaccinations associées », laquelle permet la prévention simulta¬ née contre plusieurs maladies microbiennes, des dizaines de millions de soldats, des centaines de millions d’enfants et d’êtres bumains répartis dans le monde sont protégés contre la diphtérie, le tétanos et autres infections jusqu’alors redoutables et redoutées. Dans tous les pays où ces procédés ont été emplovés systématique¬ ment et généralisés, des maladies comme la diphtérie, le tétanos, etc.. sont en régression et même en voie de disparition. Ainsi sont amplement confirmées, dans leur innocuité, dans leur effi¬ cacité, dans leur valeur, les méthodes d’immunisation basées sur le prin¬ cipe des anatoxines et créées à partir de r923. Ainsi s’affirme également la continuité du progrès scientifique qui ne vise qu’à la sauvegarde et au bien-être de l’humanité. TABLE DES MATIERES Pages Avant-propos LES MÉTHODES FONDAMENTALES DE VACCINATION EN MÉDECINE 7 HUMAINE ET EN MÉDECINE VÉTERINAIRE.................. LA MÉTHODE TENNERIENNE ET PASTORIENNE DES VIRUS-VACCINS. 1 LA MÉTHIODE BASÉE SUR LE PRINCIPE DES ANATOXINES ET DES VACCINS ANAVIRULENTS ................................... 21 Le principe des anatoxines - Sa découverte............... 21 Propriétés et mode d’action des anatoxines............... 27 Conséquences d’ordre théorique de la découverte du principe 421 des anatoxines.................. Les applications pratiques du principe des anatoxines.. 45 LA DIPHTÉRIE - SA DISPARITION DANS LE MONDE PAR LA VACCINATION AU MOYEN DE L’ANATOXINE DIPHTÉRIQUE.............. 53 La vaccination contre la diphtérie - Son essor.... 57 Résultats de la vaccination antidiphtérique : 4) En France..... 62 b) Dans le monde. 68 Conclusions...... 82 LE TÉTANOS ET LA VACCINATION AU MOYEN DE L’ANATOXINE TÉTA¬ 85 MIQUE.....................................: L’anatoxine tétanique et ses propriétés.................... 87 Bases expérimentales de l’immunisation contre le tétanos par l’anatoxine tétanique................................. 88 Essor de la vaccination antitétanique..................... 91 Résultats de la vaccination antitétanique durant la deuxième guerre mondiale.................................... 94 3 128 LA LUTE DRÉVENTIVE CONTRE LES MALADIES INTECTIEUSES Pages Application de la vaccination antitétanique aux populations 37 civiles.......... Conclusions............ 1or LES VACCINATIONS ASOCIEES.... 193 Base de la méthode des vaccinations associées............ 194 Les premiers essais de vaccinations associées chez l’homme .. 106 Les vaccinations associées dans la pratique- Essor et résultats a) En France......... 190 b) Dans les autres pays................ TI4 Les diverses formules de vaccinations assocíes : — En médecine humaine............ 120 — En médecine vétérinaire.... 121 Conclusions..... 124 CONCLUSIONS GÉNERALES 125 ACHEVE D’IMPRIMER LE ter AQUT 1953 SUR LES PRESSES DE J. 6 R. SEYNAC 34. Rz Montmartre, 34. PARIS (O5 N dImpriger : 6061.