Prévention et prise en charge

2007


ANALYSE

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Traitements et méthodes de rééducation de la dyslexie

Le marché de la rééducation de la dyslexie est immense et occupé par une grande diversité de méthodes de rééducation et d'entraînement. Une partie de ces méthodes découlent directement des différentes théories de la dyslexie. Elles ont généralement été proposées par des scientifiques travaillant sur les théories correspondantes, et ont souvent été évaluées scientifiquement. Cependant, un très grand nombre de traitements préconisés pour la dyslexie n'ont fait l'objet d'aucune étude scientifique, ni d'un point de vue théorique, ni du point de vue de l'évaluation de l'efficacité du traitement.
Dans la mesure où le présent rapport a pour ambition de présenter l'état de l'art des connaissances scientifiques sur les troubles des apprentissages, il s'appuie sur des travaux publiés dans les revues scientifiques internationales. Tous les traitements dont l'efficacité a été évaluée et discutée dans la littérature scientifique sont donc analysés. Néanmoins, du fait de leur notoriété ou de leur popularité auprès du public ou de certains professionnels, il paraît nécessaire de mentionner également certains traitements non scientifiquement évalués. Par ailleurs, d'autres traitements présumés existent sur le marché sans être pour autant évoqués ici. Leur absence de ce rapport implique qu'ils n'ont pas été abordés dans la littérature scientifique, et donc que leur efficacité n'a pas été validée scientifiquement. Tous ces traitements non évalués sont à considérer avec la plus grande prudence.
Pour commencer, il est important de rappeler les critères scientifiques qui permettent d'évaluer l'efficacité d'un traitement. En premier lieu, rappelons que les comptes-rendus de cas individuels, qu'ils émanent de professionnels ou des patients eux-mêmes (ou de leurs parents), aussi spectaculaires semblent-ils, n'ont pas valeur de preuve. En effet, ils ne constituent pas une évaluation objective, et quelques cas isolés ne permettent pas de contrôler les nombreux facteurs qui pourraient induire une amélioration. Seules des études de groupes, fondées sur des observations objectives et quantifiées, et appuyées par des statistiques rigoureuses, peuvent éventuellement apporter une preuve d'efficacité. Deuxièmement, l'amélioration d'un groupe subissant un traitement expérimental ne peut s'évaluer dans l'absolu, mais par référence à un groupe témoin. En effet, la plupart des enfants, même dyslexiques, s'améliorent avec le temps. Enfin, le traitement reçu par ce groupe témoin est crucial pour interpréter l'évolution du groupe expérimental. Il est bien connu que les effets placebo1 et Hawthorne2 peuvent produire des résultats positifs sans aucun lien avec le traitement présumé. Ceci impose que le groupe témoin reçoive un traitement placebo de durée et d'intensité comparable. De plus, il est recommandé que la répartition entre les groupes, expérimental et témoin soit aléatoire, et que les sujets et expérimentateurs ne soient pas informés de leur groupe d'appartenance. C'est la procédure classique de l'essai clinique contrôlé randomisé en double aveugle. Beaucoup d'essais cliniques de traitements présumés de la dyslexie ne respectent pas (ou pas totalement) ce standard incontournable de la recherche médicale. Enfin, comme un essai contrôlé randomisé en double aveugle peut démontrer un effet positif par le simple fait du hasard, la confiance que l'on peut avoir dans l'efficacité d'un traitement est d'autant plus grande que celle-ci aura été démontrée par plusieurs études indépendantes réalisées sur un grand nombre de personnes, plutôt que par une seule étude réalisée sur un petit nombre de personnes (a fortiori si elle est financée par la société qui vend le traitement).

Rééducations de type orthophonique

Les caractéristiques principales de la rééducation orthophonique de la dyslexie sont :
• l'entraînement des capacités phonologiques de l'enfant ;
• la rééducation de la lecture avec des méthodes souvent différentes de celles possibles en classe ;
• la mise en place de stratégies de compensation pour permettre à l'enfant de contourner les déficits identifiés.
La rééducation orthophonique repose sur des principes généraux issus des connaissances scientifiques acquises et validées au cours des dernières années (Shankweiler et coll., 1979renvoi vers ; Snowling, 1981renvoi vers ; Frith, 1986renvoi vers ; Vellutino, et coll., 2004renvoi vers). Ces mêmes principes ont inspiré des programmes d'entraînement en langue anglaise qui ont été évalués chez les enfants dyslexiques (Vellutino et coll., 1996renvoi vers ; McCandliss et coll., 2003renvoi vers).
De ce fait, il y a de manière générale de fortes présomptions d'efficacité des types les plus courants de rééducation orthophonique pratiquées en France. Néanmoins, la rééducation orthophonique telle que pratiquée en France, c'est-à-dire le plus souvent en cabinet, n'a pas encore fait l'objet d'évaluation scientifique dans le traitement de la dyslexie. Il y a là une lacune importante des recherches qui devrait impérativement être comblée.
Le fait que la rééducation orthophonique se déroule individuellement, avec un(e) orthophoniste ayant bénéficié d'une formation spécifique, permet, au-delà des programmes génériques d'entraînement de la phonologie et de la lecture, de développer un programme de rééducation sur mesure, fondé sur un bilan précis des compétences et des faiblesses de l'enfant, et d'exécuter ce programme dans des conditions optimales d'interactivité permettant une adaptation en temps réel aux besoins de l'enfant. Cette particularité essentielle de la prise en charge orthophonique ne peut a priori qu'augmenter son efficacité, par rapport aux programmes d'entraînement administrés en classes ou en groupes, qui sont évalués dans la littérature scientifique. Néanmoins, il existe une grande diversité de pratiques orthophoniques qui devraient donc être évaluées et comparées entre elles, en prenant en compte les modalités de leur mise en œuvre, afin de mieux cerner les bonnes pratiques, et être en mesure de mieux guider la pratique orthophonique.
Dans le cadre des évaluations nécessaires de la rééducation orthophonique, il serait également important d'évaluer l'intensité optimale de cette rééducation. Les travaux issus de la littérature internationale portant sur des programmes d'entraînement pédagogiques (informatisés ou non) appliqués à des enfants « mauvais lecteurs » montrent qu'une certaine intensité est requise pour atteindre une efficacité raisonnable (typiquement, 4 à 5 séances par semaine) et que, moyennant cette intensité, de bons résultats peuvent être obtenus sur des durées de rééducation relativement courtes (de l'ordre de 6 semaines). La question de la fréquence des séances et de la durée du programme de la rééducation orthophonique pour les enfants dyslexiques mériterait donc d'être évaluée très rigoureusement.
À défaut de véritables évaluations scientifiques de la pratique orthophonique, on peut s'appuyer sur les études qui s'apparentent le plus à de la rééducation orthophonique d'enfants dyslexiques, à savoir les entraînements intensifs de la phonologie et de la lecture. Cela inclut les études décrites dans le chapitre précédent, qui portaient sur des enfants « mauvais lecteurs ». Ces études ne s'adressaient pas spécifiquement à des enfants dyslexiques, mais en incluaient inévitablement. Par ailleurs, nous rapportons ci-dessous quelques études contrôlées d'entraînement d'enfants dyslexiques.

Entraînement audiovisuel à l'identification des syllabes orales et écrites

Cet entraînement informatisé, administré en classe, utilise un logiciel « Play On » (Danon-Boileau et Barbier, 2002renvoi vers) de discrimination auditive et visuelle de paires minimales comme « ba » et « pa » (Magnan et coll., 2004renvoi vers). Il dure 10 heures réparties sur 5 semaines, deux fois 15 minutes par jour, 4 jours par semaine. Son évaluation a été réalisée chez 14 enfants dyslexiques âgés de 100 et 145 mois avec un niveau de lecture à « La pipe et le rat »3 entre 77 et 94 mois.
Les enfants ont été randomisés en 2 groupes : un groupe entraîné les 5 premières semaines et l'autre non entraîné, puis les groupes ont été permutés afin que chacun bénéficie de l'entraînement. Le travail montre un effet clair de l'entraînement (figure 23.1Renvoi vers).
Figure 23.1 Courbe d'évolution des scores des enfants au Timé 2 (d'après Magnan et Ecalle, 2004renvoi vers)
Cette étude a été répliquée dans deux nouveaux groupes de 7 enfants dyslexiques en école spécialisée dans laquelle les enfants bénéficiaient d'une prise en charge orthophonique en plus de l'entraînement informatisé (Magnan et Ecalle, 2006renvoi vers). Les améliorations observées restent du même ordre, à ceci près que les enfants s'améliorent également dans la période sans entraînement, du fait certainement de la rééducation orthophonique. Il semble que dans cette étude les bénéfices de la rééducation orthophonique et de l'entraînement informatisé aient été additifs.
Enfin, les mêmes auteurs ont effectué une étude complémentaire comparant deux nouveaux groupes d'enfants dyslexiques, l'un suivant toujours le même entraînement informatisé à l'école, au rythme de 30 minutes par jour, 4 jours par semaine pendant 5 semaines, l'autre suivant le même entraînement à la maison, à leur propre rythme, pendant la même durée (Magnan et Ecalle, 2006renvoi vers). Les résultats donnent un avantage au groupe entraîné à la maison. Ceci semble dû au fait que le groupe entraîné à la maison a bénéficié d'un entraînement plus intensif que celui entraîné à l'école (spontanément ou sous le contrôle des parents). Ce résultat suggère à la fois qu'une plus grande intensité des entraînements pourrait être encore plus profitable à l'enfant, et que cette plus grande intensité peut être obtenue justement grâce à la souplesse des outils informatiques, qui peuvent être utilisés aussi bien à l'école qu'à la maison, aux horaires et au rythme qui conviennent le mieux à l'enfant.
Si ces études sont très encourageantes, il faut néanmoins rester prudent : les améliorations sont statistiquement significatives mais elles restent faibles en valeur absolue. Dans l'étude de Magnan et Ecalle (2004renvoi vers) par exemple, les améliorations sont constatées sur un test facile (Timé 2), consistant à reconnaître un mot parmi des intrus phonologiques ou visuels ou sans rapport, en incluant les réponses phonologiquement plausibles. Ce test ne permet pas bien de voir les effets sur la fonctionnalité de la lecture : les enfants améliorent leurs scores d'environ 5 réponses et arrivent à un score en moyenne de 31 pour un score maximum de 36, alors qu'ils sont sévèrement dyslexiques. Par ailleurs, les auteurs évoquent une grande variation individuelle mais ne la décrivent pas dans leur étude.
On est donc loin d'un véritable « traitement » complet de la dyslexie. Il faut plus voir ce type d'entraînement informatique comme un outil complémentaire de la rééducation orthophonique qui peut en renforcer utilement les effets.

Entraînement de la morphologie

L'utilisation de la morphologie pour aider l'enfant dyslexique en fin de primaire à compenser ses difficultés phonologiques semble très prometteuse, comme le suggère le travail d'Arnbak et Elbro (2000renvoi vers). En effet, l'extrême difficulté pour le dyslexique à utiliser le code grapho-phonologique en lecture (compétences phonologiques déficitaires) invite à l'aider à utiliser le code grapho-sémantique, c'est-à-dire les unités de sens que sont les morphèmes qu'il a encodés (par exemple, il a encodé le digraphe « en » dans « dent », il peut en déduire « dentiste, dentier... »). Or, la majorité des mots que nous utilisons est plurimorphémique (« re » dans reprendre, relire, revendre, redire... ou bien « lait » dans laitage, laitier, laiterie, allaitement...). L'apprenti-lecteur, dès les débuts de la lecture, utilise des unités morphémiques pour lire (Casalis et coll., 2004renvoi vers). Une maîtrise parfaite du décodage n'est donc pas nécessaire pour recourir aux unités morphémiques. Un entraînement par groupe de 12 heures de 60 collégiens dyslexiques sur l'extraction des unités morphémiques, bases, préfixes, suffixes, à l'oral et écrit, améliore le déchiffrage (test de l'Alouette) et la compréhension (test de Lobrot), de façon hétérogène, indépendamment du niveau intellectuel et des compétences phonologiques, en corrélation avec le niveau de vocabulaire (Colé et coll., 2005renvoi vers).

Rééducations auditives

Les différentes théories explicatives de la dyslexie fondées sur le rôle de l'audition ont donné lieu à des méthodes de rééducation mettant en jeu la discrimination des sons.

Rééducation du traitement auditif temporel

La théorie selon laquelle les dyslexiques (et les dysphasiques) souffrent d'un déficit du traitement auditif temporel (Tallal et Piercy, 1973renvoi vers ; Tallal, 1980renvoi vers) a naturellement engendré des entraînements visant à rééduquer leur perception auditive. La plus célèbre de ces méthodes est le programme américain Fast ForWord (Scientific Learning Corporation, 1997renvoi vers). Il s'agit d'un programme informatique comportant plusieurs types de jeux. L'un d'eux est un entraînement à la discrimination de séquences auditives temporelles, les autres sont des jeux fondés sur le langage et entraînant les capacités phonologiques (comme bien d'autres programmes de type « orthophonique »). La particularité de ces derniers est d'utiliser la parole modifiée pour la rendre plus intelligible aux enfants qui auraient un déficit de traitement auditif temporel. Dans cette parole modifiée, les sons brefs et les transitions rapides (essentiellement dans les plosives) sont amplifiés et allongés. Le degré d'amplification et d'allongement, comme la difficulté des jeux, est varié de manière adaptative, sur la base de la performance de chaque enfant. Une première évaluation de Fast ForWord conduite par ses propres auteurs sur des petits groupes d'enfants dysphasiques a suggéré que l'entraînement purement auditif en combinaison avec l'entraînement phonologique avec la parole modifiée amélioraient significativement les performances auditives d'une majorité de ces enfants (Merzenich et coll., 1996renvoi vers), ainsi que leurs capacités de langage oral (Tallal et coll., 1996renvoi vers).
Néanmoins, l'essentiel de Fast ForWord est constitué de jeux de parole visant à renforcer les capacités de discrimination phonétique et de conscience phonologique, comme dans l'orthophonie traditionnelle. Un effet positif du programme pourrait donc être attribué à sa composante phonologique plus que strictement auditive. Pour tester cette hypothèse, ces auteurs ont comparé les performances de deux groupes de 11 enfants, l'un suivant l'entraînement avec la parole modifiée, l'autre avec la parole normale. Les résultats suggèrent des progrès significativement supérieurs pour le groupe suivant l'entraînement avec la parole modifiée (Tallal et coll., 1996renvoi vers), ce qui renforce l'hypothèse selon laquelle la rééducation du traitement auditif temporel est cruciale. Ces résultats encourageants doivent toutefois être modérés par un certain nombre de limitations méthodologiques (Gillam, 1999renvoi vers), notamment :
• les petits effectifs des groupes étudiés ;
• l'absence d'expérimentation en double aveugle (pour l'étude contrôle avec/sans parole modifiée) ;
• le fait que les chercheurs ayant réalisé les études de validation scientifique sont les principaux actionnaires de l'entreprise (Scientific Learning) commercialisant le programme.
Des études complémentaires, à plus grande échelle, mieux contrôlées, et éventuellement indépendantes, apparaissent nécessaires pour valider de manière définitive ce traitement.
Suite aux premiers résultats, le programme a été commercialisé à grande échelle aux États-Unis et au Canada. Les données recueillies sur plus de 15 000 enfants ont été centralisées par les chercheurs de Scientific Learning, et des résultats spectaculaires sont régulièrement annoncés dans les conférences scientifiques, sur le site Internet de Scientific Learning, ainsi que dans des articles de revue de la littérature (Tallal et coll., 1998renvoi vers ; Tallal, 2004renvoi vers). Pourtant, ces données qui, par leur poids quantitatif, permettraient d'asseoir (ou de rejeter) définitivement cet entraînement, n'ont à ce jour pas été soumises à la littérature scientifique expertisée par des pairs.
En parallèle, un certain nombre de groupes indépendants ont effectué des études visant à tester l'efficacité de Fast ForWord ou de programmes comparables s'en inspirant, la plupart sur des enfants dysphasiques, parfois sur des enfants dyslexiques. La majorité de ces études notent une amélioration des performances langagières absolues de ces enfants, mais qui n'est pas significativement supérieure à celle obtenue par des rééducations plus standards (type orthophonie) (Friel-Patti et coll., 2001renvoi vers ; Gillam et coll., 2001renvoi vers) ou à celle d'un groupe témoin suivant l'entraînement sans parole modifiée (Habib et coll., 2002renvoi vers ; Bishop et coll., 2005renvoi vers), voire même à celle d'un groupe témoin ne subissant aucun traitement expérimental (Hook et coll., 2001renvoi vers ; Troia et Whitney, 2003renvoi vers ; Cohen et coll., 2005renvoi vers ; Bishop et coll., 2006renvoi vers ; Strehlow et coll., 2006renvoi vers). Certaines études n'ont même observé aucune amélioration des performances en lecture chez des enfants dyslexiques (Agnew et coll., 2004renvoi vers ; Pokorni et coll., 2004renvoi vers). Ainsi, les résultats des études indépendantes sont loin des résultats spectaculaires annoncés par Scientific Learning : au mieux, ils sont équivalents à ceux d'une rééducation traditionnelle, au pire ils sont nuls.
Bien sûr, beaucoup de ces études indépendantes souffrent, comme les études originales de Scientific Learning, d'un certain nombre de limitations, notamment au niveau des effectifs. Il est donc probable que la puissance statistique de ces études soit insuffisante pour répondre clairement à la question posée. À ce titre, l'étude qui est de loin la plus importante en nombre et également l'une des mieux contrôlées est celle du groupe d'Edimbourg (Cohen et coll., 2005renvoi vers), qui a porté sur 77 enfants avec des troubles spécifiques du langage sévères : 23 enfants suivant le programme Fast ForWord, 27 enfants suivant un autre programme informatique d'entraînement du langage, et 27 enfants ne recevant aucun traitement expérimental (les enfants des 3 groupes continuant à suivre leur scolarité et leur rééducation orthophonique habituelle). Cette étude n'a observé aucun effet significatif de Fast ForWord ni de l'autre programme informatisé par rapport au groupe témoin.
À l'issue de ces différentes études, la question de l'efficacité du programme Fast ForWord reste toujours en suspens. Si tant est que des effets positifs puissent être constatés, il est probable qu'ils soient dus largement à la composante linguistique du programme, plutôt qu'à sa composante auditive. A fortiori, lorsque l'on considère les controverses actuelles sur la présence ou non de déficits auditifs chez les enfants dyslexiques et sur la nature de leurs déficits auditifs lorsqu'ils en ont, l'intérêt d'un entraînement spécifique du traitement auditif temporel paraît discutable.

Méthode Tomatis

La méthode Tomatis est une méthode de stimulation auditive qui a été préconisée pour beaucoup de troubles d'apprentissages et notamment la dyslexie. Cette méthode repose sur une conception de l'audition (Tomatis, 1963renvoi vers) qui n'a aucun fondement scientifique. Un petit nombre d'études indépendantes faiblement contrôlées ont été conduites sur divers groupes d'enfants avec des troubles d'apprentissage, mais elles présentaient d'importants problèmes méthodologiques. Une seule étude a été normalement évaluée et publiée dans la littérature scientifique, et n'a observé aucun progrès sur les mesures de langage (Kershner et coll., 1990renvoi vers). Une méta-analyse de toutes les études ne permet pas de conclure à un effet positif de la méthode (Gilmor, 1999renvoi vers).

Sémiophonie (ou méthode Lexiphone)

La sémiophonie (Beller, 1974renvoi vers) est une méthode de rééducation intensive dont le principe fondamental est une stimulation auditive (le « son paramétrique ») qui ne repose sur aucun principe scientifique connu. Elle utilise un appareil nommé Lexiphone pour produire cette stimulation auditive. De plus, la rééducation incorpore aussi une exposition structurée à de la parole (syllabes, mots et pseudo-mots), de la musique, ainsi qu'à des textes lus, de la lecture guidée et de l'écriture. À ce jour, aucun essai clinique contrôlé n'a été publié dans la littérature scientifique (un essai clinique est en cours en France). Une étude a été publiée dans une revue associative, rapportant des progrès significatifs pour le groupe expérimental (Lloyd et Nicholson, 2003renvoi vers). Néanmoins, le groupe témoin ne bénéficiant d'aucun traitement contrôlé, on ne sait pas si les effets observés peuvent être dus à l'effet placebo ou pas. Enfin, comme pour Fast ForWord, s'il s'avérait que le traitement a une certaine efficacité, il faudrait encore tenter de départager les contributions respectives du « son paramétrique » et de la partie plus traditionnelle portant sur la parole et la lecture.

Rééducations visuelles

Plusieurs méthodes de rééducation de la dyslexie portent sur les capacités visuelles et visuo-attentionnelles.

Occlusion d'un œil

Deux essais cliniques contrôlés randomisés en double aveugle ont été conduits par Stein et ses collaborateurs (Stein et Fowler, 1985renvoi vers ; Stein et coll., 2000renvoi vers) sur des enfants à la fois dyslexiques et présentant une instabilité binoculaire (mesurée par le test de Dunlop, 1972renvoi vers). Dans la seconde étude, les enfants du groupe expérimental devaient porter des lunettes teintées jaune pâle dont l'œil gauche avait été occulté, alors que les enfants du groupe témoin devaient porter les mêmes lunettes teintées jaune pâle, sans œil occulté. Les résultats indiquent une amélioration significativement plus grande des performances en lecture du groupe expérimental par rapport au groupe témoin, et que ces effets positifs persistent pendant au moins 9 mois après le traitement (Stein et coll., 2000renvoi vers). Ces résultats, qui gagneraient à être répliqués indépendamment, suggèrent que l'occlusion d'un œil peut être un traitement efficace pour les enfants dyslexiques qui souffrent d'un problème d'instabilité binoculaire avéré (et seulement pour ceux-là).

Lentilles, lunettes et transparents teintés

Il a été suggéré depuis longtemps que le port de lunettes ou lentilles teintées peut améliorer la lecture de personnes dyslexiques qui auraient des symptômes visuels (Irlen, 1991renvoi vers), mais sans preuve scientifique. L'élaboration de la théorie du stress visuel (Wilkins, 1995renvoi vers ; Wilkins et coll., 2004renvoi vers) a conduit à un essai clinique sur un petit échantillon de personnes présentant à la fois des troubles d'apprentissage et un stress visuel (Bouldoukian et coll., 2002renvoi vers). Cet essai visait à mesurer l'efficacité de transparents de couleur appliqués sur une page de texte pour la réduction des symptômes de stress visuel et l'amélioration de la vitesse de lecture. Chaque sujet de cet essai a testé les effets d'une part d'un transparent témoin filtrant les ultraviolets (administré comme placebo), et d'autre part d'un transparent de couleur choisi individuellement de manière à minimiser les symptômes de stress visuel. Les résultats montrent que les sujets lisent significativement plus vite (d'environ 4 %) avec le transparent de couleur qu'avec le transparent placebo (Bouldoukian et coll., 2002renvoi vers). Ces effets, modestes et qui demandent à être répliqués indépendamment, suggèrent que l'utilisation d'un transparent dont la couleur a été optimisée individuellement peut avoir des effets bénéfiques sur la lecture, pour les personnes qui souffrent d'un stress visuel. À ce propos, il est bon de rappeler que le stress visuel n'est pas la dyslexie, certaines personnes en étant affectées sans être dyslexiques, et vice-versa. Un tel traitement ne peut donc être préconisé au mieux que pour les personnes souffrant effectivement de stress visuel.

Stimulation hémisphérique spécifique

Bakker (1992renvoi vers) a proposé qu'il existe deux types de dyslexie, un type « linguistique » (L) caractérisé par un usage déficient de l'hémisphère gauche, et un type « perceptif » (P) caractérisé par un usage déficient de l'hémisphère droit. Bien que cette théorie reste totalement isolée au sein de la littérature scientifique, Bakker s'est appuyé sur cette théorie pour proposer un traitement de la dyslexie, appelé « stimulation hémisphérique spécifique », qui consiste à stimuler spécifiquement celui des deux hémisphères cérébraux qui est présumé déficient chez un enfant donné, en présentant de manière brève (tachistoscopique) et répétée des mots dans le champ visuel opposé. Des données expérimentales faiblement contrôlées sont venues à l'appui de l'efficacité de ce traitement (Bakker et coll., 1990renvoi vers ; Bakker, 1992renvoi vers). Une étude indépendante sans groupe témoin a également rapporté des effets positifs du traitement, et ce quel que soit l'hémisphère stimulé (celui présumé déficient ou l'autre), ce qui va à l'encontre de la théorie de Bakker et suggère que les effets seraient non spécifiques (par exemple attentionnels) (Dryer et coll., 1999renvoi vers).
Récemment, de nouvelles études ont suggéré une efficacité significative de ce traitement chez un groupe de 12 enfants dyslexiques italiens présentant une mini-héminégligence gauche, comparé à une rééducation orthophonique traditionnelle (au contenu et à l'intensité non précisés toutefois) (Facoetti et coll., 2003renvoi vers). Encore une fois, il a été montré que le côté de la stimulation, s'il avait un impact sur les capacités visuo-attentionnelles, n'en avait pas sur les scores en lecture (Lorusso et coll., 2005renvoi vers). Une autre étude sans groupe témoin a de plus suggéré que la présentation centrale des stimuli entraînait au moins autant de progrès que la présentation latérale (Lorusso et coll., 2004renvoi vers). Ainsi, si un tel traitement a un effet sur la lecture, cela ne peut être en raison de la stimulation spécifique d'un hémisphère cérébral. L'effet pourrait être dû à une amélioration générale des capacités visuo-attentionnelles, chez des enfants qui au départ présentent une mini-héminégligence gauche, ou bien une amélioration générale des capacités attentionnelles. Peut-être que les effets d'un tel traitement sont, bien que dans une modalité différente, comparables à ceux obtenus par l'entraînement (perceptivement inefficace) de la discrimination phonémique (Moore et coll., 2005renvoi vers). Néanmoins, la réalité des progrès observés en lecture demande à être confirmée sur des études à plus grande échelle comportant un groupe témoin recevant un autre traitement (placebo ou orthophonique) d'intensité comparable.

Rééducation audiovisuelle non linguistique

Inspirés par les théories sensorielles de la dyslexie et par le programme Fast ForWord impliquant notamment un entraînement purement auditif, Kujala et coll. (2001renvoi vers) ont mis au point un programme d'entraînement sensoriel plus radical car ne comportant aucun son de parole. En revanche, l'un des principes de leur programme était de renforcer les connexions entre représentations auditives et visuelles en effectuant un entraînement à l'appariement inter-modal. L'entraînement consistait à apparier des séquences de tons variant en fréquence et en durée, et des séquences de rectangles variant en hauteur et en épaisseur (la hauteur symbolisant la fréquence et l'épaisseur la durée). À l'issue de 7 semaines de traitement, une amélioration de la lecture plus importante a été observée dans le groupe entraîné par rapport au groupe témoin. Des corrélats neurophysiologiques de cette amélioration ont été mis en évidence. Néanmoins, dans cette étude le groupe témoin ne subissait aucun traitement particulier, donc on ne peut conclure si l'effet de ce traitement audiovisuel est différent de l'effet placebo.

Rééducations motrices ou proprioceptives

Les systèmes moteurs et propriocepteurs ont aussi fait l'objet de méthodes de rééducation.

Rééducation de la motricité et de l'équilibre

La clinique DDAT, basée à Kenilworth en Grande-Bretagne, déclare avoir mis au point une rééducation du cervelet et du système vestibulaire inspirée de la théorie cérébelleuse de la dyslexie (Nicolson et coll., 2001renvoi vers). Le contenu de cette rééducation n'est pas disponible en détail pour cause de secret commercial, mais elle comporte notamment des exercices d'équilibre sur une planche, des exercices de lancer et de récupération d'objets, des exercices de coordination et de doubles tâches, ainsi que des étirements. Une évaluation de cette rééducation a été rapportée dans la littérature scientifique (Reynolds et coll., 2003renvoi vers). Des progrès ont été observés dans le groupe expérimental particulièrement sur des mesures d'équilibre et de motricité, et beaucoup plus faiblement sur des mesures de lecture. Néanmoins, cette étude est très problématique d'un point de vue méthodologique car le groupe témoin n'a subi aucun traitement. De plus, les troubles de lecture des enfants témoins étaient beaucoup plus modérés, la plupart n'étant pas dyslexiques. On ne peut rien conclure de cette étude quant aux effets potentiels d'une rééducation de ce type.

Rééducation des réflexes archaïques

Il a été suggéré qu'il y aurait un lien causal entre la persistance des réflexes archaïques et les troubles d'apprentissage (Morrison, 1985renvoi vers). Les réflexes archaïques sont des réflexes présents à la naissance qui peuvent être essentiels à la survie du nourrisson (par exemple la succion), mais qui disparaissent ou évoluent avec le développement cérébral au cours de la première année de vie. Plusieurs dizaines de réflexes archaïques ont été décrits. La persistance de tels réflexes au-delà de 12 mois peut indiquer une atteinte neurologique et des troubles moteurs (Holt, 1991renvoi vers). McPhillips et Sheehy (2004renvoi vers) ont évalué la persistance d'un réflexe archaïque particulier (le réflexe tonique asymétrique du cou) au sein d'un échantillon représentatif de 409 enfants âgés de 9 à 10 ans, en comparant en particulier les enfants se situant au-dessous du 10e centile en lecture (mauvais lecteurs), à ceux des 10 % médians et à ceux situés au-dessus du 90e centile. Ils ont observé que la persistance maximale du réflexe était observée chez 17 % des enfants mauvais lecteurs, et chez aucun des enfants des deux autres groupes. Au sein du groupe de mauvais lecteurs, ceux qui répondaient à un critère diagnostique de la dyslexie présentaient une fréquence plus élevée (60 %) de persistance du réflexe tonique asymétrique du cou, mais ce n'était pas le cas pour les quelques dyslexiques présents dans le groupe médian. Ainsi, les auteurs suggèrent que la persistance de réflexes archaïques pourrait être associée à la dyslexie (McPhillips et Sheehy, 2004renvoi vers).
Sur la base de cette observation, McPhillips et coll. (2000renvoi vers) ont effectué un essai clinique contrôlé randomisé en double aveugle d'un traitement consistant à répéter régulièrement des mouvements liés à quatre réflexes archaïques, de manière à faire disparaître ces réflexes. Le groupe placebo répétait des mouvements similaires mais ne présentant aucun lien avec des réflexes archaïques, et il y avait également un groupe témoin ne subissant aucun traitement. Le critère d'inclusion des enfants dans cet essai était à la fois d'être dyslexique (selon un critère pré-établi) et de présenter une persistance du réflexe tonique asymétrique du cou. Les auteurs ont observé une réduction du réflexe tonique asymétrique du cou et des progrès significatifs en lecture chez le groupe expérimental par rapport au groupe placebo.
Bien entendu, la focalisation de l'étude sur des enfants dyslexiques présentant une persistance de réflexes archaïques n'autorise pas de généralisation à l'ensemble des enfants dyslexiques, et la prévalence de la persistance de réflexes archaïques demanderait à être confirmée. On peut également s'interroger sur la nature de l'effet observé. En l'absence d'hypothèse précise sur le lien entre réflexes archaïques et lecture, il semble plausible qu'il s'agisse d'un effet indirect. Par exemple, si les enfants présentant une persistance de réflexes archaïques souffrent de troubles moteurs, et que le traitement proposé améliore la motricité, il peut s'ensuivre un gain de confiance et d'estime de soi qui change l'attitude et les performances de l'enfant dans de multiples domaines scolaires et extra-scolaires, entre autres la lecture. Dans ce cas, on en conclura que le traitement des réflexes archaïques n'est pas un traitement des troubles de lecture en tant que tels, mais des troubles moteurs ou d'autres symptômes associés à la dyslexie. Dans l'état actuel de l'art, les données disponibles sont insuffisantes pour répondre à ces questions.

Rééducation de la proprioception

Il existe une théorie proprioceptive de la dyslexie selon laquelle un syndrome de déficience posturale est la cause des troubles de lecture dans la dyslexie (Martins da Cunha, 1979renvoi vers). Cette théorie n'a à ce jour pas été exposée ni évaluée dans la littérature scientifique. Sans que l'on puisse l'affirmer faute de données, il est possible que les symptômes décrits par cette théorie soient les mêmes, ou soient liés aux troubles posturaux et d'équilibre évoqués dans la théorie cérébelleuse (Nicolson et coll., 2001renvoi vers), et/ou à la persistance de réflexes archaïques évoquée par McPhillips et coll. (2004renvoi vers). Une étude publiée dans une revue professionnelle française rapporte que 100 % des enfants dyslexiques examinés présentent un syndrome de déficience posturale (Quercia et coll., 2005renvoi vers), mais sans aucune référence à un groupe témoin. Une nouvelle étude incluant un groupe témoin rapporte des troubles de l'équilibre statique chez environ 50 à 60 % des enfants dyslexiques testés (Pozzo et coll., 2006renvoi vers). Il s'agit là de résultats relativement comparables à ceux rapportés dans le cadre de la théorie cérébelleuse (Nicolson et coll., 2001renvoi vers). En revanche, le lien entre les troubles d'équilibre observés par Pozzo et coll. (2006renvoi vers) et le syndrome de déficience posturale évalué par Quercia et coll. (2005renvoi vers) n'est pas clair, les deux études employant des protocoles très différents.
Une méthode de rééducation issue de la théorie proprioceptive a été publiée en France à destination des ophtalmologistes (Quercia et coll., 2004renvoi vers). Elle implique le port de lunettes à prismes, le port de semelles compensées et la répétition de certains mouvements. Les motivations théoriques conduisant à associer ces trois types d'intervention restent relativement obscures. On ne sait pour l'instant rien de l'efficacité de cette méthode. Un essai clinique est en cours.
Sur la base des données disponibles sur les rééducations motrices et des réflexes archaïques qui semblent relativement voisines, on peut se hasarder à faire l'hypothèse que le syndrome de déficience posturale est une autre manière de définir les troubles moteurs et d'équilibre évoqués précédemment, que ce syndrome est associé à la dyslexie (ainsi qu'à tous les troubles développementaux), quoique certainement pas avec une comorbidité de 100 %. Et si le traitement préconisé a réellement un effet sur le syndrome de déficience posturale, alors il peut éventuellement produire des effets indirects bénéfiques chez les enfants qui en souffrent. Néanmoins, on voit mal ce traitement être en mesure de guérir tous les enfants dyslexiques comme il en est fait la publicité.

Traitements médicamenteux ou nutritifs

Plusieurs médicaments et compléments nutritifs ont fait l'objet d'essais cliniques sur des enfants dyslexiques.

Méthylphénidate

Le méthylphénidate, actuellement indiqué pour les troubles attentionnels et hyperactifs, a également fait l'objet de plusieurs essais cliniques sur des enfants dyslexiques. Il n'a pas montré d'effet positif sur les enfants dyslexiques « purs », sans trouble d'attention ou hyperactivité (Gittelman et coll., 1983renvoi vers).

Antihistaminiques

Se basant sur une théorie cérébelleuse-vestibulaire de la dyslexie (Levinson, 1988renvoi vers), il a été suggéré que les médicaments pour le mal des transports (les antihistaminiques) pourraient soigner la dyslexie (Levinson, 1991renvoi vers). Un essai clinique testant l'effet de la méclozine n'a pas confirmé cette hypothèse (Fagan et coll., 1988renvoi vers).

Piracétam

Le piracétam est une molécule qui est réputée stimuler certaines capacités cognitives. Des effets positifs du piracétam sur la lecture de texte et sur la mémoire verbale des enfants dyslexiques ont été démontrés dans plusieurs essais cliniques avec contrôle placebo (Helfgott et coll., 1986renvoi vers ; Tallal et coll., 1986renvoi vers ; Wilsher et coll., 1987renvoi vers), quoique pas dans tous (Ackerman et coll., 1991renvoi vers). Diverses préparations de piracétam ont reçu des autorisations de mise sur le marché en France (pas aux États-Unis), l'indication principale étant pour les troubles neurosensoriels liés à l'âge. Néanmoins, la commission de la transparence a jugé son service médical rendu insuffisant.
Il est bien évident qu'il ne s'agit pas ici d'effets spécifiques. Si le piracétam produit bel et bien un effet positif significatif sur le fonctionnement cognitif, il doit, comme beaucoup de psychostimulants, produire ces effets chez la plupart des sujets, et uniquement de manière temporaire. Il ne peut donc être considéré comme un traitement pour la dyslexie.

Acides gras polyinsaturés

Dans le cadre de sa théorie magnocellulaire, John Stein (2001renvoi vers) a proposé que les magnocellules requièrent une forte concentration d'acides gras polyinsaturés pour maintenir la perméabilité de leur membrane et donc leurs capacités de réponses rapides. Il a ainsi émis l'hypothèse qu'un supplément nutritif d'acides gras polyinsaturés pourrait compenser les déficiences intrinsèques des magnocellules des personnes dyslexiques. En parallèle, certaines études ont rapporté de faibles concentrations d'acides gras dans le sang d'enfants avec trouble déficit de l'attention/hyperactivité (Stevens et coll., 1995renvoi vers), mais la plupart des essais cliniques de suppléments nutritifs pour ces enfants ont été infructueux (Stevens et coll., 2003renvoi vers). Richardson et Puri (2002renvoi vers) ont conduit un essai clinique sur des enfants avec troubles d'apprentissage dont une grande proportion étaient également dyslexiques et présentaient des troubles déficit de l'attention/hyperactivité. Le groupe expérimental a reçu des comprimés contenant une combinaison de différents acides gras polyinsaturés (oméga-3 et 6), le groupe placebo prenant des comprimés d'huile d'olive. La seule mesure de l'étude était un questionnaire portant sur divers symptômes liés à l'inattention et l'hyperactivité. Les auteurs ont rapporté une diminution significative de ces symptômes, particulièrement d'inattention, dans le groupe expérimental par rapport au groupe placebo. Aucune donnée présentée ne permet d'évaluer d'éventuels gains en lecture. On ne peut donc actuellement rien conclure sur les éventuels effets des acides gras polyinsaturés sur la dyslexie.

Psychothérapies

Il n'existe pas de traitement psychothérapique de la dyslexie abordé dans la littérature scientifique. Néanmoins, il est impossible de ne pas aborder cette approche, compte tenu de sa popularité auprès d'une partie des professionnels.
Lorsqu'un enfant présente des troubles anxieux, dépressifs ou divers troubles de comportement, cela peut engendrer une grande variété de symptômes. Dans certains cas, l'un des symptômes peut être une difficulté à apprendre à lire. Mais il s'agit de toute évidence de troubles non spécifiques à la lecture et de nature très différente de ceux qui rentrent dans le cadre de la définition de la dyslexie. Afin d'éviter les confusions et d'offrir à chaque enfant la prise en charge optimale pour lui, ce type de troubles doit simplement être diagnostiqué comme tel, pas comme une dyslexie. L'exception étant une co-occurrence avérée entre par exemple des troubles anxieux et une dyslexie, auquel cas les deux diagnostics sont appropriés.
Enfin, il faut garder à l'esprit que beaucoup d'enfants dyslexiques souffrent de leurs échecs scolaires, ce qui peut bien sûr entraîner, de manière secondaire, des troubles anxieux, dépressifs ou de comportement (Arkowitz, 2000renvoi vers). Dans ce cas, ces troubles doivent être diagnostiqués comme tels et pris en charge (Glantz, 1983renvoi vers ; Arnold et coll., 2005renvoi vers) (comme d'ailleurs pour tous les enfants, dyslexiques ou pas).
En résumé, les troubles anxieux, dépressifs ou de comportement ne sont pas des causes de la dyslexie. Néanmoins, chez les dyslexiques qui en présentent, ils doivent bien sûr faire l'objet d'un diagnostic et d'une prise en charge adaptée. On ne doit attendre de ces prises en charge qu'une amélioration des troubles psychologiques associés à la dyslexie, et non du trouble de lecture lui-même, qui doit toujours faire l'objet d'une prise en charge spécifique et à l'efficacité scientifiquement prouvée.

En conclusion,

la plus grande prudence est requise vis-à-vis de tous les traitements préconisés pour la dyslexie et les troubles des apprentissages, la plupart n'ayant pas été évalués scientifiquement, ou ayant été évalués mais donnant des résultats peu différents d'un placebo. Même les méthodes orthophoniques classiques souffrent d'une absence regrettable d'évaluation scientifique. Seules quelques-unes d'entre elles (fondées sur la rééducation des capacités phonologiques et de la lecture) ont été formalisées, structurées et évaluées aux États-Unis et ont ainsi pu être validées scientifiquement.
Outre ces quelques méthodes de type orthophonique qui n'ont pas d'équivalent direct français, quelques autres méthodes se focalisant sur des symptômes associés à la dyslexie (visuels ou moteurs) ont également été validées scientifiquement, par des études souvent isolées qui demanderaient à être répliquées. Il semble qu'il faille en attendre surtout des effets positifs sur les symptômes qui sont la cible du traitement, et seulement de manière indirecte éventuellement sur la lecture. Dans tous les cas, aucune de ces méthodes ne peut être préconisée pour tous les enfants dyslexiques, mais seulement pour ceux qui présentent clairement les symptômes visés.

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