Réduction des dommages associés à la consommation d’alcool
I. Consommations d’alcool : les risques, les dommages et leur environnement

2021


ANALYSE

4-

Syndrome d’alcoolisation fœtale
et consommation d’alcool
dans la période périnatale : fréquences et facteurs associés

Les effets délétères de fortes consommations de boissons alcoolisées par les femmes enceintes sur la santé des futurs enfants sont bien documentés. Le syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) a été décrit dès 1968 par un pédiatre français (Lemoine et coll., 1968renvoi vers) et défini à l’échelle internationale quelques années plus tard (Jones et coll., 1973renvoi vers). Ce syndrome est reconnu comme une anomalie congénitale et classé également comme trouble dans la nomenclature des atteintes de la santé mentale (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux : DSM-IV et DSM-5). Il se décrit surtout par un retard de croissance intra-utérin mesurable dès la naissance, diverses dysmorphies cranio-faciales qui peuvent être perçues précocement par un professionnel averti, surtout en cas d’atteintes sévères, ainsi que des déficiences intellectuelles et troubles du développement qui apparaissent à mesure que l’enfant grandit (Crepin et Bréart, 2016renvoi vers). L’expression générique « troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale » (TSAF) a été adoptée plus récemment pour englober les diverses atteintes liées à l’alcoolisation fœtale, même si elles ne sont pas retrouvées dans leur forme la plus sévère ou toutes combinées sur un nouveau-né (Bloch et coll., 2008renvoi vers ; Hoyme et coll., 2016renvoi vers). En langue française, l’expression utilisée est « troubles causés par l’alcoolisation fœtale » ou TCAF.
Le syndrome est considéré caractéristique de l’exposition à l’alcool, au point de contenir dans son appellation le nom de l’agent toxique. L’embryon – en début de grossesse – et le fœtus – à partir de 13 semaines de gestation – a été alcoolisé, l’éthanol ayant traversé le placenta. Le sang circulant de la femme enceinte nourrit le fœtus, la concentration en alcool est quasi identique dans le sang fœtal entraînant des dommages spécifiques et dépendants de la taille, du volume et de l’immaturité de l’organisme de l’embryon d’abord, et du fœtus ensuite.
Ce chapitre fait état des connaissances sur la consommation de boissons alcoolisées dans la période périnatale. Pour ce propos, cette période inclut toute la grossesse et la période d’allaitement pour les femmes. Elle comprend également la période avant la conception pour les mères et les pères biologiques, même si la littérature scientifique sur cette période est plus récente et ne se concentre que faiblement sur les pères. L’expertise collective Inserm « Alcool. Effets sur la santé » de 2001 avait consacré deux chapitres à la période périnatale ; nous renvoyons le lecteur à ce document (Inserm, 2001renvoi vers) et présentons ici une synthèse de travaux scientifiques plus récemment publiés.

Fréquence du syndrome d’alcoolisation fœtale et troubles associés

Estimer la fréquence du SAF est un défi méthodologique car le syndrome est difficile à définir, son diagnostic est soumis à de grandes variations selon le professionnel – pédiatre, sage-femme, puéricultrice ou autre médecin – qui examine le nouveau-né, selon sa connaissance ou son expérience à utiliser les classifications en vigueur (tableau 4.Irenvoi vers). Ces réalités rendent le numérateur problématique. Par ailleurs, selon les publications, le dénominateur est un nombre de naissances vivantes, tel que disponible par les données d’état civil de la zone géographique concernée, ou bien le nombre de personnes présentes dans la population, tel que disponible par les données de recensement, produisant une prévalence pour 1 000 ou pour 10 000.
Une estimation à l’échelle mondiale produit une prévalence du SAF de 14,6 pour 10 000 personnes (IC 95 % [9,4-23,3]), obtenue par méta-analyse de 62 études publiées entre novembre 1973 et fin juin 2015 (Popova et coll., 2017arenvoi vers). Cette moyenne mondiale est très variable selon les zones géographiques de l’Organisation mondiale de la santé. Elle est le plus élevée en Europe, égale à 37,4 pour 10 000 [24,7-54,2] tandis qu’elle est estimée à 14,8 pour 10 000 [8,9-21,5] en région Afrique, 16,6 [11,0-24,0] en région Amériques et 0,2 [0,2-0,9] dans la région Méditerranée orientale.
La variabilité de la prévalence est déclinée par les chercheurs en fonction des caractéristiques spécifiques des populations. Une méta-analyse de données sur la fréquence du SAF et du TCAF en Amérique du Nord souligne les différences selon les populations (Popova et coll., 2017brenvoi vers) ; les fréquences estimées au Canada sont environ 1 pour 1 000 pour le SAF et 5 pour 1 000 pour le TCAF et elles sont 38 fois et 16 fois plus élevées, respectivement, au sein de la population autochtone (femmes aborigènes).

Tableau 4.I Critères de diagnostic du SAF et TCAF (d’après Hoyme et coll., 2016renvoi vers)

 
Dysmorphies
cranio-faciales
Retards de croissance
Anomalies du système
nerveux central
Troubles de l’attention
ou du comportement
Syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF)
Un diagnostic de SAF nécessite toutes les caractéristiques exposées dans les colonnes ci-dessous. Il peut être posé avec ou sans connaissance de la consommation de boissons alcoolisées par la future mère.
Anomalies faciales mineures, au moins 2 parmi :
1. Fissures palpébrales courtes (≤ 10e percentile)
2. Fine bordure vermillon de la lèvre supérieure
3. Philtrum lisse
Déficit de croissance prénatal et/ou postnatal :
1. Taille et/ou poids ≤ 10e percentile
Déficit de la croissance du cerveau, morphogenèse anormale ou neurophysiologie anormale :
1. Périmètre crânien ≤ 10e percentile
2. Anomalies structurelles du cerveau
3. Crises récurrentes non fébriles (les autres causes de crises ayant été exclues)
Atteinte neurocomportementale
1. Pour les enfants ≥ 3 ans
a. Avec troubles cognitifs
– Preuves de déficience globale (capacité conceptuelle générale ≥ 1,5 SD sous la moyenne, ou QI de performance ou QI verbal ou QI spatial ≥ 1,5 SD sous la moyenne)
OU
– Déficience cognitive dans au moins un domaine neurocomportemental ≥ 1,5 SD sous la moyenne (fonctions exécutives, troubles spécifiques de l’apprentissage, troubles de la mémoire ou de la parole, déficience visuo-spatiale)
b. Avec troubles comportementaux sans trouble cognitif
– Preuve d’un trouble comportemental dans au moins 1 domaine ≥ 1,5 SD inférieur à la moyenne dans les capacités d’autorégulation (altération de l’humeur ou de la régulation comportementale, attention ou contrôle des impulsions)
2. Pour les enfants de moins de 3 ans
– Preuves d’un retard de développement ≥ 1,5 SD sous la moyenne
Troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF)
Pour les enfants avec exposition prénatale documentée à l’alcool, un diagnostic de TCAF nécessite les caractéristiques suivantes :
Anomalies faciales mineures, au moins 2 parmi :
1. Fissures palpébrales courtes (≤ 10e percentile)
2. Fine bordure vermillon de la lèvre supérieure
3. Philtrum lisse
  
Atteinte neurocomportementale
1. Pour les enfants ≥ 3 ans (a ou b)
a. Avec des troubles cognitifs
– Preuves de déficience globale (capacité conceptuelle générale ≥ 1,5 ET sous la moyenne, ou QI de performance ou QI verbal ou QI spatial ≥ 1,5 SD sous la moyenne)
OU
– Déficience cognitive dans au moins un domaine neuro-comportemental ≥ 1,5 SD sous la moyenne (fonctions exécutives, troubles spécifiques de l’apprentissage, troubles de la mémoire ou de la parole, déficience visuo-spatiale)
b. Avec une déficience comportementale sans déficience cognitive
– Preuve d’une déficience comportementale dans au moins 1 domaine ≥ 1,5 SD inférieur à la moyenne dans les déficiences de l’autorégulation (altération de l’humeur ou de la régulation comportementale, l’attention ou le contrôle des impulsions)
2. Pour les enfants de moins de 3 ans
– Preuves d’un retard du développement ≥ 1,5 SD sous la moyenne
TCAF
Pour les enfants sans exposition prénatale connue à l’alcool, un diagnostic de TCAF nécessite les caractéristiques, A et (B ou C) et D :
A
B
C
D
Anomalies faciales mineures, au moins 2 parmi :
1. Fissures palpébrales courtes (≤ 10e percentile)
2. Fine bordure vermillon de la lèvre supérieure
3. Philtrum lisse
Déficit de croissance prénatal et/ou postnatal
1. Taille et/ou poids ≤ 10e percentile
Déficit de la croissance du cerveau, une morphogenèse anormale ou une neurophysiologie anormale :
1. Périmètre crânien ≤ 10e percentile
2. Anomalies structurelles du cerveau
3. Crises récurrentes non fébriles (les autres causes de crises ayant été exclues)
1. Pour les enfants ≥ 3 ans (a ou b)
a. Avec des troubles cognitifs
– Preuves de déficience globale (capacité conceptuelle générale ≥ 1,5 SD sous la moyenne, ou QI de performance ou QI verbal ou QI spatial ≥ 1,5 SD sous la moyenne)
OU
– Déficience cognitive dans au moins un domaine neuro-comportemental ≥ 1,5 SD sous la moyenne (fonction exécutive, troubles spécifiques de l’apprentissage, troubles de la mémoire, ou déficience visuo-spatiale)
b. Avec une déficience comportementale sans déficience cognitive
– Preuve d’une déficience comportementale dans au moins 1 domaine ≥ 1,5 SD inférieur à la moyenne dans les déficiences de l’autorégulation (altération de l’humeur ou de la régulation comportementale, l’attention ou le contrôle des impulsions)
2. Pour les enfants de moins de 3 ans
– Preuves d’un retard du développement ≥ 1,5 SD sous la moyenne
Maladie neurologique liée à l’alcool. ARND : pour Alcohol Related Neurological Disease
Ce diagnostic ne peut pas être posé pour les enfants de moins de 3 ans.
Il nécessite de connaître la consommation de boissons alcoolisées par la future mère et de constater une atteinte neuro-comportementale.
 
Pour les enfants ≥ 3 ans (a ou b)
a. Avec des troubles cognitifs
– Preuves de déficience globale (capacité conceptuelle générale ≥ 1,5 SD sous la moyenne, ou QI de performance ou QI verbal ou QI spatial ≥ 1,5 SD sous la moyenne)
OU
– Déficience cognitive dans au moins deux domaines neuro-comportementaux ≥ 1,5 SD sous la moyenne (fonction exécutive, troubles spécifiques de l’apprentissage, troubles de la mémoire, ou déficience visuo-spatiale)
b. Avec une déficience comportementale sans déficience cognitive
– Preuve d’une déficience comportementale dans au moins 2 domaines ≥ 1,5 SD inférieur à la moyenne dans les déficiences de l’autorégulation (altération de l’humeur ou de la régulation comportementale)
Anomalies congénitales liées à l’alcool. ARBD : pour Alcohol Related Birth Defects
Ce diagnostic nécessite de connaître la consommation de boissons alcoolisées par la future mère et de constater une anomalie congénitale listée ci-dessous.
 
Une ou plusieurs malformations majeures spécifiques démontrées dans des modèles animaux et des études humaines comme étant le résultat d’une exposition prénatale à l’alcool :
– cardiaque : anomalies de la communication inter-auriculaire, atteintes des grands vaisseaux, anomalies de la communication inter-ventriculaire, tares cardiaques conotronculaires, tronc artériel commun ;
– squelettique : fusion de l’articulation radio-cubitale, anomalies de la segmentation vertébrale, larges contractures articulaires, scoliose ;
– rénale : reins aplasiques/hypoplasiques/dysplasiques, reins en « fer à cheval »/duplications urétérales ;
– yeux : strabisme, ptose, anomalies vasculaires rétiniennes, hypoplasie du nerf optique ;
– oreilles : surdité de transmission, surdité neurosensorielle

QI : quotient intellectuel ; SD : Standard Deviation/écart-type.

La fréquence du SAF a été estimée par une enquête au sein de quatre communautés distinctes dans différentes régions des États-Unis (May et coll., 2018renvoi vers). Les auteurs montraient que l’estimation habituelle dans ces régions variait de 11,3 (IC 95 % [7,8-15,8]) à 50,0 (IC 95 % [39,9-61,7]) pour 1 000 enfants. Or, en appliquant un protocole d’examen pédiatrique rigoureux et standardisé, les estimations dans ces mêmes 4 communautés étaient beaucoup plus élevées, de 31,1 (IC 95 % [16,1-54,0]) à 98,5 (IC 95 % [57,5-139,5] pour 1 000 enfants. En effet, il y a consensus de la littérature pour suggérer que les prévalences publiées sont des sous-estimations.
En France, la fréquence du SAF est estimée à au moins 1 pour 1 000 naissances (HAS, 2013renvoi vers ; Crepin et Bréart, 2016renvoi vers). L’incidence de 1,3 pour 1 000 a été obtenue par extrapolation d’une étude conduite à Roubaix en 1991, où 1 cas était observé pour 820 naissances et 1 cas pour les atteintes moins sévères sur 200 naissances (Dehaene et coll., 1991renvoi vers). Une telle incidence correspond à un résultat entre 800 et 1 000 enfants supplémentaires atteints de SAF chaque année en France. Une étude de faisabilité, à partir des registres des anomalies congénitales, a montré la difficulté à estimer la fréquence du SAF à l’échelle de notre pays (Bloch et coll., 2008renvoi vers). La prévalence pour 1 000 naissances de 2006 et 2007 réunies ne pouvait pas être estimée pour le registre parisien en raison d’un nombre trop faible de cas. Elle était de 0,06 [0,01-0,18] pour le registre du Rhône et de 0,47 [0,22-0,90] pour le registre d’Alsace. Dans cette région, la fréquence était de 0,53 [0,25-0,97] si la définition du SAF était élargie pour y inclure des enfants sans hypotrophie. Les auteurs expliquent la fréquence plus élevée en Alsace par le fait qu’une collaboratrice aux données du registre, généticienne, était particulièrement vigilante dans le repérage des cas.
Les registres français des anomalies congénitales, membres d’EUROCAT (European Surveillance of Congenital Anomalies)1 , communiquent leurs données. De grandes variations géographiques sont constatées dans les données les plus récentes. Ainsi la prévalence du SAF, calculée sur les naissances de 2001 à 2017, varie de 0,16 [0,06-0,33] pour 10 000 naissances vivantes à Paris, 0,25 [0,09-0,54] en Bretagne, 0,36 [0,07-1,05] dans les Antilles, à 0,98 [0,56-1,59] en Auvergne et 5,75 [4,81-6,82] à la Réunion (données de mai 2019). Dans le cadre de la coordination des registres français, la décision de produire des indicateurs détaillés pour 21 anomalies congénitales a été prise selon leur importance épidémiologique en termes de fréquence et de gravité. Le SAF ne figure pas dans cette liste. Par ailleurs, aucune information, en base populationnelle, n’est disponible de façon régulière sur la fréquence des TCAF.
La complexité pour décrire et dénombrer les atteintes liées à l’alcoolisation fœtale augmente à mesure que les connaissances en matière de neuro-développement (de l’humain) se développent. De grands progrès ont été faits en matière d’imagerie, de photographies digitales et de tests neuropsychologiques très précoces qui peuvent améliorer le repérage des enfants porteurs de SAF sévères, dès les premiers jours de vie (Mukherjee et coll., 2017renvoi vers ; Mukherjee, 2018renvoi vers). En revanche, même si les atteintes du développement neurologique au cours de l’enfance sont de mieux en mieux décrites et comprises (divers troubles de la concentration, des apprentissages scolaires...), leur mise en relation avec la consommation de boissons alcoolisées par la mère durant la grossesse reste problématique. Des progrès restent à accomplir pour parvenir à délimiter plus sûrement les TCAF : progrès dans la définition, l’observation, le repérage, les étapes-clés pour diagnostiquer et les étapes-clés pour des prises en charge réparatrices ou compensatrices (Mukherjee, 2018renvoi vers).
Des travaux scientifiques récents posent également la question du risque d’anomalies congénitales cardiaques en lien avec la consommation d’alcool des futurs parents. On estime qu’un peu plus d’un quart des enfants porteurs de TCAF sont diagnostiqués avec une anomalie cardiaque congénitale (Burd et coll., 2007renvoi vers) ce qui est une fréquence anormalement élevée. Jusque récemment les résultats des études sur le risque d’anomalies cardiaques imputables à l’alcool n’étaient pas convergents (Stingone et coll., 2017renvoi vers ; Feng et coll., 2018renvoi vers). Une récente revue de littérature conclut à un excès de risque significatif pour l’ensemble des anomalies cardiaques à la fois pour la consommation maternelle (OR = 1,16 [1,05-1,27]) et pour la consommation paternelle (OR = 1,44 [1,19-1,74]) (Zhang et coll., 2019renvoi vers). Cette revue de littérature montre un effet dose-réponse pour ces deux sources d’exposition périnatale : père et mère. Les études sources proviennent de tous les continents, ce qui signifie que les modes de consommation et les produits alcoolisés consommés sont différents. Cependant, en ce qui concerne l’exposition d’origine paternelle, 21 études (sur 24) proviennent d’Asie. Par ailleurs, les auteurs appellent à la prudence d’interprétation en raison de l’hétérogénéité entre les études et des biais possibles ; de plus, la plupart des études (42 sur 45) sont des études cas-témoins.
L’impact de l’alcoolisation fœtale par le père est beaucoup moins étudié que celui par la mère. Ce faisant, la littérature scientifique rend compte du rôle néfaste de ce comportement : boire des boissons alcoolisées de façon très dissymétrique pour les futurs parents alors même que les comportements sont en grande partie collectifs ou familiaux, c’est-à-dire impliquant aussi bien des futurs pères et des futures mères. S’il est évident que la durée de la fenêtre du risque pour le fœtus de l’exposition à l’alcool est beaucoup plus brève de la part du père biologique que de la mère. Il demeure que peu d’études sur la toxicité de l’alcoolisation masculine pour la santé de l’enfant à naître sont disponibles. Dans le domaine de la fertilité, une revue sous forme de méta-analyse, publiée en 2017, a étudié la relation entre la consommation d’alcool et la qualité du sperme (Ricci et coll., 2018renvoi vers). Les résultats montrent une absence d’impact de la consommation d’alcool sur la concentration et la mobilité des spermatozoïdes, mais un impact significatif à la fois sur le volume de sperme et la morphologie des spermatozoïdes. Ces différences sont trouvées quand on compare l’absence de consommation d’alcool versus une consommation d’alcool. Cet effet est moindre lorsque la consommation d’alcool est réduite. Il n’y a pratiquement pas de différence entre une absence de consommation d’alcool et une consommation occasionnelle à la fois sur le volume de sperme et sur la morphologie des spermatozoïdes. La méta-analyse conclut à un effet délétère de l’alcool sur les paramètres du sperme notamment en cas de consommation quotidienne. Elle confirme également l’hypothèse que la consommation d’alcool agit sur la spermatogenèse, certainement par un effet de l’hypo-testostéronémie expliquant la diminution de volume de sperme par la diminution du plasma séminal (Condorelli et coll., 2015renvoi vers).

Fréquence de la consommation de boissons alcoolisées durant la période périnatale

Compte tenu de la gravité du SAF et des TCAF tout au long de la vie de la personne atteinte, les stratégies préventives ont consisté à alerter les femmes désireuses d’avoir un enfant et les femmes enceintes, en leur conseillant de réduire et de s’abstenir de consommer des boissons alcoolisées pendant la grossesse. Les études épidémiologiques se sont efforcées de produire des fréquences de consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse les plus précises possible. La difficulté réside dans la durée concernée : du début de grossesse – souvent ignorée pendant 2 à 3 semaines au moins – jusqu’à l’accouchement, prolongée éventuellement par la période d’allaitement. Au cours de ce délai les comportements de consommation ne sont pas uniformes. D’une part, ils connaissent les mêmes variations que dans la population des femmes de même âge (consommation festive du week-end, occasions particulières comme les fêtes de fin d’année ou les fêtes familiales, etc.). D’autre part, l’évolution de la grossesse (nausées, transformations hormonales et morphologiques, conditions quotidiennes de vie et de travail) peut modifier l’appétence des femmes pour ces breuvages et conduire les femmes à interrompre ou réduire à certains moments leur consommation et éventuellement reprendre au cours de la grossesse. Pour l’ensemble de ces raisons, la mesure de la consommation de boissons alcoolisées dans la période de la grossesse et de l’allaitement nécessiterait des questionnaires longs, complexes et de type prospectif, tel un journal de consommation pour éviter les oublis, si l’objectif était une quantification précise de la quantité d’éthanol absorbée.
Les données disponibles sur la fréquence de consommation sont certainement imprécises et discutées comme telles par les auteurs. L’importante méta-analyse, réalisée à partir d’études publiées de 1984 à 2014 (Popova et coll., 2017arenvoi vers), produit une fréquence mondiale de 9,8 % [IC 95 % : 8,9-11,1] de consommation d’alcool pendant la grossesse, avec de très fortes différences géographiques. La fréquence la plus élevée est en Europe : 25,2 % [21,6-29,6]. Les estimations nationales sont disponibles pour certains pays : les 5 nations où cette fréquence est le plus élevée sont toutes en Europe : l’Irlande, la Biélorussie, le Danemark, le Royaume-Uni et la Russie.
Cet indicateur (pourcentage de femmes enceintes ayant consommé des boissons alcoolisées) est utile et nécessaire pour surveiller les comportements au niveau de la population et leurs modifications, à la hausse ou à la baisse. Cela permet également d’évaluer l’impact des campagnes d’information ou de prévention relatives à la consommation d’alcool. Au-delà de ces mérites, cet indicateur est sommaire et n’informe pas sur le mode de consommation : nature/titrage de la boisson alcoolisée, quantité consommée, régularité ou répétition d’épisodes à grandes quantités alors que tous ces éléments contribuent à définir la dose globale d’éthanol c’est-à-dire à la dose d’exposition prénatale à l’alcool pour le fœtus.
Pour pallier en partie ce problème, et parce que les comportements évoluent, un autre indicateur est proposé : le pourcentage de femmes qui ont eu un ou des épisodes de fortes consommations. Dans le contexte de la grossesse, le seuil est généralement à « plus de 3 verres en une occasion », plus faible que celui de 5 verres utilisé pour la population non enceinte. Cette quantité (3 ou 4 verres) ne constitue donc pas un binge drinking ou « épisode de beuverie (entraînant l’ivresse) », bien qu’il soit appelé ainsi dans les publications. Une revue de 1984 à 2014, à partir de données de 20 pays différents (Lange et coll., 2017renvoi vers), a estimé le pourcentage de femmes qui ont bu plus de 3 verres en une occasion durant la grossesse. C’est le cas de 2,7 % (0,0 %-5,3 %) des femmes enceintes en Europe. De plus, la part des femmes qui ont bu plus de 3 verres en une occasion parmi les consommatrices de boissons alcoolisées varie de 2 % en Italie à 60 % en Autriche. L’Afrique est concernée par des pourcentages élevés, avec des proportions allant de 12 % en Ouganda à 77 % au Bénin. Les auteurs constatent que globalement dans 40 % des pays pour lesquels les données sont disponibles, plus d’un quart des femmes qui boivent de l’alcool ont eu de fortes consommations en une seule occasion. Les auteurs montrent une tendance légère à la baisse au cours des dernières années (Lange et coll., 2017renvoi vers).
La situation en France est documentée par les données des enquêtes nationales périnatales (ENP) et par les données du Baromètre Santé (BS). Sur l’ensemble des naissances vivantes de 2010, en métropole, un peu moins de 20 % des mères – interrogées dans les jours qui suivaient l’accouchement – ont répondu avoir bu des boissons alcoolisées pendant la grossesse (17 %, une fois par mois ou moins souvent et 2 %, 2 à 4 fois par mois ou plus souvent) ; à ces répondantes, s’ajoutent 3 % de femmes qui disent en avoir consommé seulement avant de se savoir enceinte (Saurel-Cubizolles et coll., 2013renvoi vers). Par ailleurs, 2,5 % des répondantes ont dit qu’il leur était arrivé de boire 3 verres ou plus de boissons alcoolisées en une même occasion – le plus grand nombre d’entre elles moins d’une fois par mois – auxquelles s’ajoutent 1 % des femmes interrogées à qui s’est arrivé avant de se savoir enceinte. Ces fréquences sont faibles, elles correspondent toutefois à environ 26 250 femmes qui ont donné naissance à un enfant vivant en 2010 à qui il est arrivé d’avoir une consommation de 3 verres ou plus alors qu’elles étaient enceintes (3,5 % pour 750 000 naissances vivantes annuelles).
Les données ne sont pas disponibles pour l’ENP réalisée en 2016. Un questionnement sur la consommation d’alcool est en cours de préparation, dans le cadre du projet de la prochaine ENP de 2021.
À partir du Baromètre Santé 2017, Andler et coll. (Andler et coll., 2018renvoi vers) ont estimé que 12 % (IC 95 % [10 %-14 %]) des femmes interrogées avaient consommé de l’alcool pendant leur dernière grossesse ; pour 11 % c’était uniquement pour de « grandes occasions » ; pour 0,5 %, la consommation était plus mensuelle et pour 0,5 %, elle était hebdomadaire ou plus fréquente. Ces données sont rétrospectives, avec un recul différent selon les femmes car les questions étaient posées aux femmes qui avaient un enfant de moins de 5 ans, c’est-à-dire pour des grossesses de 2012 à 2017. Ces pourcentages sont calculés sur un effectif assez limité : 1 614 femmes incluses dans l’estimation. Les auteurs indiquent que, sur le petit nombre de femmes enceintes répondantes (186 femmes), 11 % (7 %-16 %) ont consommé des boissons alcoolisées durant la grossesse en cours. Ceci correspondrait à environ 82 500 [51 750-122 250] grossesses exposées aux boissons alcoolisées lorsqu’on rapporte ces fréquences à 750 000 naissances.

Facteurs associés à la consommation,
avant et pendant la grossesse

De nombreuses publications sont consacrées aux caractéristiques des femmes qui consomment des boissons alcoolisées pendant la grossesse, ou qui poursuivent cette consommation alors qu’elles savent qu’elles sont enceintes. Bien que la fréquence de consommation est bien inférieure pendant la grossesse à celle observée chez les femmes en âge de maternité, les caractéristiques des consommatrices ou des fortes consommatrices occasionnelles sont assez similaires à celles décrites dans la population générale (cf. chapitre « Épidémiologie des consommations d’alcool : données récentes »).
Le pourcentage de femmes consommatrices « légères ou modérées » pendant la grossesse est plus élevé pour les femmes plus âgées, soit après 30 ans ou 35 ans, selon les populations et les modalités de classe d’âge retenues par les auteurs. Il est plus important pour les femmes qui ont un niveau d’études élevé ; c’est le cas, par exemple, en France, aux Pays-Bas, aux États-Unis, ou en Australie. De même, ce pourcentage est plus élevé pour les femmes vivant dans des ménages à revenus élevés ou classés dans les groupes sociaux les plus favorisés (Walker et coll., 2011renvoi vers ; Saurel-Cubizolles et coll., 2013renvoi vers ; O’Keeffe et coll., 2015renvoi vers). Il n’est pas différent que les femmes occupent un emploi ou non. Selon plusieurs études, le pourcentage de consommation d’alcool varie selon le rang de la grossesse, plutôt inférieur lorsque le nombre d’enfants augmente ; cette relation n’est pas retrouvée dans toutes les études. De même les résultats relatifs à la situation maritale, vie en couple ou femmes vivant sans compagnon, ne sont pas concordants.
Ce descriptif rapide des caractéristiques socio-culturelles des femmes consommatrices de boissons alcoolisées pendant la grossesse – présentant une situation sociale plutôt favorisée – est contrasté avec celui des consommatrices de tabac ou de cannabis pendant la grossesse. Pour ces produits, la fréquence de consommatrices est plus élevée dans des groupes sociaux défavorisés : femmes moins instruites, ménages moins dotés financièrement, femmes seules, ou femmes en situation de précarité sociale.
Néanmoins les études s’accordent sur le fait que les consommatrices de boissons alcoolisées sont plus souvent fumeuses de tabac pendant la grossesse que les femmes qui ne consomment pas d’alcool (Walker et coll., 2011renvoi vers ; Saurel-Cubizolles et coll., 2013renvoi vers ; Velasquez et coll., 2017renvoi vers ; Lamy et coll., 2019renvoi vers ; Reynolds et coll., 2019renvoi vers). L’association entre la consommation d’alcool et d’autres substances psychoactives apparaît moins constante, mais peu de travaux sont disponibles – en population – sur la consommation co-occurrente d’alcool et de drogues illicites.
Parmi les études sur les caractéristiques des consommatrices de boissons alcoolisées, certaines et notamment les plus récentes apportent de l’information sur le comportement de consommation excessive ou binge drinking durant la grossesse. La plupart retrouvent que ce comportement est plus fréquent parmi les femmes ayant un bon capital scolaire, ou appartenant à des groupes sociaux favorisés. Les études montrent des différences culturelles, selon les pays où les données sont collectées. Le contexte dans lequel la grossesse survient est un élément important que certaines études décrivent. Ainsi, à partir de naissances de 2012-2013 au Danemark, Iversen et coll. (Iversen et coll., 2015renvoi vers) montrent un risque augmenté de consommation forte occasionnelle (5 verres ou davantage) en début de grossesse pour des femmes dont la grossesse n’avait pas été planifiée, usagères de tabac et fortes consommatrices d’alcool avant d’être enceintes et, inversement, un risque moindre pour les femmes multipares ou celles dont la grossesse était survenue lors d’un traitement pour hypofertilité.
Les études épidémiologiques récentes adoptent des protocoles ou des stratégies d’analyse différents de celles publiées au tournant du siècle et jusqu’en 2010. Les auteurs s’intéressent au « risque de grossesse exposée aux boissons alcoolisées » en étudiant les comportements de consommation des femmes avant la grossesse. Aux États-Unis, Green et ses collègues (Green et coll., 2016renvoi vers) ont estimé que la prévalence pondérée du risque de grossesse exposée à l’alcool chez les femmes âgées de 15 à 44 ans était de 7,3 %, équivalent à environ 3,3 millions de femmes au cours d’une période d’un mois. Ces estimations sont calculées à partir de données d’enquête en population générale, avec des questions sur la consommation au cours du dernier mois parmi des femmes susceptibles de devenir enceintes – c’est-à-dire des femmes non enceintes, non stériles, qui ont des relations sexuelles avec un partenaire non stérile, et qui n’utilisent pas de contraception. Ce risque était plus élevé pour les femmes vivant en couple, ayant un niveau d’études assez élevé, qui avaient déjà un enfant et qui étaient fumeuses ou anciennes fumeuses. Il ne variait pas selon l’ethnie (Green et coll., 2016renvoi vers).
Avec une approche similaire, sur des données de 2002-2003 aux États-Unis, Cannon et coll. (2015renvoi vers) observaient que la majorité de ces femmes avaient une consommation de type binge drinking ; ils constataient que le risque était particulièrement élevé parmi les femmes affirmant qu’elles désiraient devenir enceintes.
Sur des données collectées aux Pays-Bas, dans le cadre d’enquêtes nationales réalisées auprès de jeunes mères avec un enfant de moins de 6 mois, Lanting et coll. (2015renvoi vers) estiment que 17 % des mères en 2007 et 14 % en 2010 ont consommé de l’alcool au cours des trois premiers mois de la grossesse. La consommation d’alcool était principalement d’un verre (soit environ 10 g d’alcool) moins d’une fois par mois. En 2010, plus de femmes qu’en 2007 ont consommé 1 à 3 verres ou plus de 3 verres d’alcool par occasion, respectivement 11 % à 7 % ou 1,4 % à 0,7 %. Les femmes plus âgées et celles qui ont fait des études supérieures étaient plus nombreuses à consommer de l’alcool, tout comme les fumeuses. Ces auteurs montrent que 69 % des femmes répondaient avoir consommé de l’alcool dans les 6 mois avant de se savoir enceintes en 2010 ; cette information n’était pas disponible en 2007.
Les enquêtes qui portent sur des femmes enceintes ou qui viennent d’accoucher, comme les ENP en France, ont ajouté soit une question distincte, soit des modalités de réponses dans une question plus générale pour mesurer la consommation du début de la grossesse, « avant de se savoir enceinte ». Les chercheurs peuvent également analyser les comportements de réduction ou d’arrêt total de consommation d’alcool au cours de la grossesse s’ils disposent de l’information sur la consommation avant la conception.
En Australie, une étude multicentrique a décrit la consommation d’alcool dans cette période sensible, entre la conception et la connaissance par la femme de son état de grossesse, et l’évolution de ces comportements entre 2008 et 2013 (McCormack et coll., 2017renvoi vers). La plupart des femmes (61 %) avaient consommé de l’alcool dans cette période. La consommation forte d’alcool ou des consommations occasionnelles excessives étaient plus répandues que la consommation de faible intensité. La proportion de femmes qui ont consommé de l’alcool a diminué à 18 % après la reconnaissance de leur grossesse. Parmi celles qui buvaient de l’alcool, 70 % ont cessé d’en consommer, 18 % ont réduit leur consommation et 11 % n’ont pas modifié leur consommation se sachant enceinte. Le statut socio-économique était le prédicteur le plus important de la consommation d’alcool, les buveuses étant plus susceptibles d’appartenir à des groupes sociaux plus favorisés. Les autres facteurs associés aux différentes trajectoires (cessation, réduction ou poursuite de la consommation d’alcool) étaient le niveau de consommation d’alcool avant la reconnaissance de la grossesse, l’âge, la planification de la grossesse et la consommation de substances illicites (McCormack et coll., 2017renvoi vers).
En 2005, en Nouvelle-Zélande, une enquête nationale transversale a été menée auprès de femmes âgées de 16 à 40 ans ; parmi les participantes, 10 % étaient enceintes et 34 % étaient mères (biologiques) (Parackal et coll., 2013renvoi vers). La moitié des femmes enceintes et 37 % des mères ont déclaré qu’elles avaient cessé de boire après avoir reconnu leur grossesse. Les femmes les plus à risque pour la consommation d’alcool et la consommation occasionnelle excessive au début de la grossesse étaient plus jeunes et présentaient un comportement à risque avant la grossesse en matière de boissons alcoolisées.
Une autre approche, en épidémiologie sociale ou en socio-anthropologie, de cette question de l’alcool pendant la grossesse est celle de l’impact de la grossesse sur les comportements vis-à-vis de l’alcool. Il y a une double motivation pour ces travaux : d’une part, d’un point de vue de santé publique, la persistance du risque pour le nouveau-né en cas d’allaitement maternel – l’alcool passant dans le lait maternel à une période où le système nerveux central demeure très plastique et vulnérable – et d’autre part, les transformations psychologiques et culturelles provoquées par la naissance et la transition vers la parentalité qui modifient divers comportements de la femme, du couple ou des familles et peuvent favoriser la diminution des comportements néfastes à la santé.
En France, une enquête téléphonique, réalisée en 2012 à l’échelle nationale, a permis d’estimer que la consommation quotidienne d’alcool était rapportée par 0,1 % des femmes enceintes et par 0,4 % des femmes allaitantes. Huit pour cent des femmes ont déclaré avoir consommé des quantités excessives d’alcool (1 épisode ou plus) au début de la grossesse, et 1,2 % ont déclaré avoir consommé des quantités excessives à répétition (3 épisodes ou plus). La consommation d’alcool occasionnelle était estimée à 1 % en fin de grossesse et à 6,8 % pendant l’allaitement. La consommation occasionnelle d’alcool en début de grossesse était associée à une reconnaissance tardive de la grossesse. La consommation modérée d’alcool pendant la grossesse et l’allaitement était associée à un niveau de scolarité plus élevé.
Considérant la recommandation d’abstinence formulée par les autorités sanitaires françaises, cette étude montre qu’une part non négligeable de femmes ne suit pas cette recommandation. En lien avec la diminution de la consommation d’alcool en France observée dans la population générale, la consommation quotidienne d’alcool pendant la grossesse ou pendant l’allaitement maternel est très minoritaire et a certainement diminué, mais la consommation excessive d’alcool, en particulier au début de la grossesse ou pendant l’allaitement, est signalée par une proportion encore importante de femmes.
À partir d’enquêtes sur les ménages ou les conditions de vie des familles portant sur de larges effectifs, les auteurs étudient la fréquence de consommation de boissons alcoolisées des femmes selon l’âge de leur dernier enfant, selon qu’elles allaitent ou non et établissent des trajectoires différentielles de reprise de consommation, c’est le cas par exemple de Mellingen et coll. (2015renvoi vers) en Norvège. Aux États-Unis, l’enquête NESARC (National Epidemiologic Survey of Alcohol and Related Conditions) réalisée en deux vagues, en 2001 et 2005, souligne que le « devenir mère » s’accompagne d’une baisse assez nette de la prévalence de consommation, de la quantité consommée et d’épisodes de consommation excessive, changements qui n’étaient pas observés pour les femmes qui n’ont pas eu d’enfant au cours de la même période (Matusiewicz et coll., 2016renvoi vers).

Conclusion

En termes de santé des populations, les fréquences du SAF et des TCAF sont préoccupantes compte tenu de la gravité des atteintes pour l’enfant et de la reconnaissance éventuellement tardive des troubles. La prévention primaire consiste à réduire complètement la consommation de boissons alcooliques par les futures mères, dès la période de la conception. Les données sur les consommations pendant la grossesse montrent que globalement la fréquence de consommation et les quantités consommées ont sensiblement diminué en France depuis la fin des années 1960. Les manières de consommer évoluent dans la population générale, ce qui s’accompagne de modifications identiques dans la population des femmes en âge de procréer et des femmes enceintes. La préoccupation actuelle réside dans la fréquence de consommations fortes, ponctuelles ou occasionnelles, qui entraînent une exposition forte pour l’embryon ou le fœtus si elles sont répétées ou qui peuvent être tératogènes, même isolées, si elles surviennent à une étape sensible de l’embryogenèse. La surveillance épidémiologique est nécessaire aussi bien en ce qui concerne la fréquence des atteintes fœtales que la fréquence des différents types de consommation par les femmes enceintes – et dès la conception – et par les femmes allaitantes.

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