Pesticides et effets sur la santé
II. Pathologies cancéreuses

2021


ANALYSE

11-

Hémopathies malignes

Les hémopathies malignes sont des tumeurs atteignant les tissus hématopoïétiques, comme la moëlle osseuse ou les tissus lymphoïdes (ganglions, rate...). Il s’agit de proliférations monoclonales qui se développent à partir des cellules sanguines ou du système immunitaire à différents stades de leur maturation. On distingue d’abord les leucémies, qui sont des « tumeurs liquides » dans le sang, et dérivent de la transformation d’un précurseur hématopoïétique dans la moelle osseuse ou d’une cellule hématopoïétique mature dans le sang. Les leucémies peuvent être lymphoïdes ou myéloïdes, aiguës ou chroniques. Concernant les lymphomes, un lymphocyte transformé dans un tissu lymphoïde secondaire génère le plus souvent une maladie se présentant cliniquement comme une tumeur solide. Les lymphomes sont classés en lymphome de Hodgkin (LH) ou en lymphome non hodgkinien (LNH) dont les sous-types sont nombreux.
Ce chapitre fait une mise à jour de la littérature épidémiologique publiée depuis la publication de l’expertise collective de l’Inserm réalisée en 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) en rappelant ces données de 2013 pour chacun des grands types d’hémopathies malignes en reprenant en détails les données par substances actives et en mettant en évidence les évolutions depuis 2013. Un chapitre complet a été consacré aux mécanismes d’action des pesticides dans les hémopathies dans la précédente expertise et seuls quelques éléments de toxicologie seront abordés pour des substances actives particulières.

Hémopathies malignes : classification, incidence, mortalité et facteurs de risque

Historiquement, ces maladies étaient regroupées en quatre ou cinq catégories : le lymphome de Hodgkin, les lymphomes non hodgkiniens, le myélome multiple et les leucémies aiguës et chroniques. Cependant, les progrès réalisés dans la compréhension des hémopathies malignes ont entraîné de nombreux changements dans la façon dont ces maladies étaient classées, diagnostiquées et traitées. En 2001, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a produit une nouvelle classification consensuelle qui définit les tumeurs malignes hématologiques en fonction de leur lignée cellulaire, des anomalies génétiques et des caractéristiques cliniques. Cette classification, mise à jour en 2008 puis en 2016 (Swerdlow et coll., 2008renvoi vers ; Swerdlow et coll., 2017renvoi vers), a été uniformément adoptée dans la pratique clinique et est incorporée dans la Classification internationale des maladies pour l’oncologie (CIM-O-3). La distinction des entités sur la base des caractéristiques morphologiques, phénotypiques, génotypiques, et cliniques reflète donc un changement de paradigme dans l’approche de la classification des hémopathies malignes. Aujourd’hui, les hémopathies malignes rassemblent plus de 160 maladies différentes du point de vue de leurs caractéristiques épidémiologiques, biologiques, cliniques ou pronostiques. Bien que le maintien des regroupements d’origine soit utile pour les comparaisons historiques, les statistiques descriptives contemporaines produisent, au moins dans les pays occidentaux, des données épidémiologiques détaillées par sous-types, pour refléter l’état actuel des connaissances. C’est pourquoi l’incidence des hémopathies malignes en France métropolitaine en 2018, résumée dans cette introduction, prend en compte les nouvelles définitions et décrit les principaux sous-types.
En revanche, la recherche portant sur les facteurs de risque a pris plus tardivement en compte cette distinction des hémopathies malignes et de ses sous-types. La première raison évidente vient du fait qu’une grande part des études étiologiques menées sur les hémopathies malignes incluait des cas anciens, dans des études réalisées durant les années 1980 et 1990, utilisant donc des classifications anciennes. La seconde raison à l’utilisation tardive de cette distinction par sous-type vient du fait que certaines entités sont rares et n’ont pu faire l’objet d’étude spécifique (jusqu’à la formation d’un consortium scientifique comme InterLymph1 ). Dans ce chapitre, nous avons décidé de garder la structure en quatre groupes de l’expertise collective de l’Inserm publiée en 2013 (lymphomes non hodgkiniens, myélome multiple, lymphome de Hodgkin et leucémie). En effet, cela permet au lecteur de se repérer et de comparer les nouvelles données épidémiologiques avec celles de la précédente expertise collective Inserm. D’autre part, il faut convenir du fait que la majorité des études publiées jusqu’à aujourd’hui sur le lien entre l’exposition aux pesticides et le risque de survenue d’une hémopathie maligne ont utilisé ces définitions historiques en quatre grands groupes nosologiques. Les chercheurs publient néanmoins depuis plusieurs années leurs résultats en tenant compte des dernières classifications et en incluant des analyses pour les sous-types les plus fréquents d’hémopathies malignes. Dans chaque chapitre, ces nouvelles données sont mentionnées lorsqu’elles émergent dans la littérature récente. Certaines catégories d’hémopathies malignes n’ont cependant pas pu être abordées, comme les syndromes myélodysplasiques ou les syndromes myéloprolifératifs chroniques, car les données sont rares ou insuffisantes. Ces entités pourront être considérées dans une prochaine édition si le niveau de connaissance s’améliore concernant leur éventuel lien avec l’exposition aux pesticides.

Incidence et mortalité des hémopathies malignes

En 2018, on estimait à 1 190 000 le nombre de nouveaux cas d’hémopathies malignes diagnostiqués dans le monde (soit 6 % des cancers), tandis que 690 000 patients sont décédés de ces maladies la même année (Ferlay et coll., 2019renvoi vers). En France métropolitaine, la même année, le nombre de nouveaux cas d’hémopathies malignes est estimé à 45 000 (25 000 chez l’homme et 20 000 chez la femme), représentant près de 12 % de l’ensemble des nouveaux cas de cancer (Defossez et coll., 2019renvoi vers).
Environ deux tiers des cas sont des hémopathies lymphoïdes (lymphome de Hodgkin et lymphomes non hodgkiniens). Les taux d’incidence standardisés sur la structure d’âge de la population mondiale (TSM) varient selon le type d’hémopathie maligne et le sexe (tableau 11.Irenvoi vers). Les hémopathies malignes sont plus fréquentes chez l’homme sauf pour la thrombocytémie essentielle. Les cinq entités les plus fréquentes sont le myélome multiple/plasmocytome (5 442 nouveaux cas), le lymphome diffus à grandes cellules B (5 071), les syndromes myélodysplasiques (4 735), la leucémie lymphoïde chronique (LLC)/lymphome lymphocytique (4 674) et les leucémies aiguës myéloïdes (3 428). Ces cinq maladies représentent 53 % de la totalité des nouveaux cas d’hémopathies malignes en 2018.

Tendances temporelles de l’incidence

L’analyse des tendances temporelles de l’incidence par type d’hémopathies malignes permet de distinguer cinq maladies hématologiques, représentant près de la moitié des nouveaux cas, dont la variation annuelle moyenne du taux d’incidence (TSM) augmente de 1 % ou plus chez l’homme et la femme : le lymphome de Hodgkin et les leucémies aiguës myéloïdes (étudiés sur la période 1990-2018), mais aussi le lymphome folliculaire, le lymphome diffus à grandes cellules B et le myélome multiple/plasmocytome (étudiés sur la période 1995-2018). Pour ces 5 localisations, le nombre de nouveaux cas augmente sur la période 1990-2018 chez l’homme et la femme, respectivement de +50 % et +64 % pour le lymphome de Hodgkin, de +114 % et +115 % pour les leucémies aiguës myéloïdes ; sur la période 1995-2018, de +181 % et +130 % pour le lymphome folliculaire, de +86 % et +82 % pour le lymphome diffus à grandes cellules B et de +96 % et +74 % pour le myélome multiple/plasmocytome (Defossez et coll., 2019renvoi vers). Pour ces cinq localisations hématologiques, on estime que 30 à 60 % de la hausse observée est due à l’accroissement et au vieillissement de la population tandis que 40 à 70 % serait due à une augmentation du risque de ces maladies dont les causes sont à étudier.

Tableau 11.I Nombre de cas incidents estimés, taux d’incidence standardisé monde en 2018 en France métropolitaine et tendances évolutives de l’incidence par type d’hémopathie maligne (d’après Defossez et coll., 2019renvoi vers)

 
Nombre de cas incidents estimés
en France
Taux d’incidence standardisé1
en France en 2018
 
Variation annuelle moyenne2
(% [IC 95 %])
 
Total
Homme
Femme
Homme
Femme
Début de période d’étude
Homme
Femme
Lymphome de Hodgkin
2 127
1 240
887
3,7
2,7
1990
1,2
[0,7-1,6]
1,7
[1,2-2,2]
Lymphomes non hodgkiniens
          
    LLC/Lymphome lymphocytique
4 674
2 770
1 904
4,0
2,1
1990
0,0
[-0,3-0,3]
-0,1
[-0,4-0,3]
    Lymphome folliculaire
3 066
1 658
1 408
2,9
2,0
1995
2,8
[2,2-3,4]
1,8
[1,1-2,5]
    Lymphome diffus à grandes cellules B
5 071
2 778
2 293
4,7
3,2
1995
1,1
[0,7-1,5]
1,5
[0,9-2,0]
    Lymphome à cellules du manteau
887
673
214
1,0
0,2
2003
2,2
[0,7-3,8]
0,0
[NC]
    Lymphome de Burkitt
220
149
71
0,5
0,2
1995
0,0
[-1,6-1,2]
0,0
[NC]
    Lymphome de la zone marginale
2 790
1 457
1 333
2,3
1,7
2003
4,7
[3,4-5,9]
4,5
[0,3-5,9]
    Myélome multiple/plasmocytome
5 442
2 822
2 620
4,2
2,9
1995
1,1
[0,7-1,5]
0,6
[0,1-1,0]
    LLP/ M. de Waldenström
1 317
892
425
1,2
0,5
1995
-2,0
[-2,4 ;-1,0]
-1,7
[-2,5 ;-0,8]
    Leucémie à tricholeucocytes
304
243
61
0,5
0,1
1990
1,2
[0,2-2,3]
0,0
[NC]
    Lymphome T/NK à cellules matures (LNH T)
1 777
997
780
1,8
1,3
2003
0,0
[NC]
2,0
[0,6-3,4]
    Leucémie/lymphome lymphoblastique à cellules
précurseurs (B, T ou SAI)
900
517
383
2,0
1,5
1995
0,0
[NC]
0,0
[NC]
Leucémie aiguë myéloïde
3 428
1 787
1 641
3,1
2,3
1990
1,2
[0,8-1,6]
0,9
[0,5-1,4]
    Leucémie aiguë myéloïde promyélocytaire
228
146
82
0,3
0,2
 
3,7
[0,2-7,3]
0,0
[NC]
Syndromes myéloprolifératifs chroniques
          
    Leucémie myéloïde chronique (LMC)
872
480
392
1,0
0,7
1990
-1,0
[-1,3 ;-0,1]
0,0
[NC]
    Myélofibrose
520
273
247
0,4
0,3
2003
0,0
[NC]
4,0
[0,8-7,3]
    Polyglobulie de Vaquez
1 129
603
526
1
0,6
2003
0
[NC]
1,7
[0,0-3,4]
    Thrombocytémie essentielle
2 057
862
1 195
1,4
1,5
2003
0,7
[-0,7 ;2,1]
1,1
[-0,2-2,5]
Syndromes myélodysplasiques
4 735
2 894
1 841
3,4
1,6
2003
0,7
[0,0-1,5]
0,5
[-0,3-1,4]

1 : taux d’incidence standardisés sur la population mondiale et exprimés pour 100 000 personnes-années ; 2 : variation annuelle moyenne du taux d’incidence entre l’année indiquée dans la colonne « début de période d’étude » et 2018 ; LLC : leucémie lymphoïde chronique ; LLP : lymphome lymphoplasmocytaire ; SMM : syndromes myéloplasiques myéloprolifératifs

En revanche, les taux d’incidence stagnent ou diminuent pour trois hémopathies malignes : la LLC/lymphome lymphocytique et la leucémie myéloïde chronique, le lymphome lymphoplasmocytaire/macroglobulinémie de Waldenström. Certaines tendances d’hémopathies malignes rares n’ont pu être estimées du fait d’effectifs trop faibles.

Survie

Depuis une quinzaine d’années, de nombreuses innovations thérapeutiques ont marqué le traitement des hémopathies malignes. Ces innovations ont un impact sur la survie des patients atteints d’hémopathies malignes, estimée dans la population générale. La dernière estimation de la survie des hémopathies malignes réalisée en France à partir des données des registres de cancer a été publiée en 2016 (Monnereau et coll., 2016renvoi vers ; mise à jour en cours qui sera publiée en 2021). L’étude portait sur 35 520 cas incidents d’hémopathies malignes diagnostiqués entre 1989 et 2010 et suivis jusqu’au 30 juin 2013 (16 hémopathies malignes les plus fréquentes). La survie nette à 5 ans est très hétérogène entre types et sous-types d’hémopathies malignes : 21 % pour les leucémies aiguës myéloïdes, 85 à 90 % pour certains lymphomes (folliculaire, de Hodgkin) ou pour la leucémie myéloïde chronique. Les hémopathies malignes de bon pronostic (taux de survie nette à 5 ans de 75 % ou plus) représentent près de 45 % des nouveaux cas d’hémopathies malignes incidents tandis que 10 % des nouveaux cas (principalement les leucémies aiguës myéloïdes) ont toujours un pronostic défavorable (taux de survie nette à 5 ans inférieur à 30 %). L’amélioration de la survie nette au cours du temps était clairement observée pour la leucémie myéloïde chronique (+34 points entre 1989 et 2010), le lymphome folliculaire (+18 points entre 1995 et 2010) et le lymphome diffus à grandes cellules B (+18 points entre 1995 et 2010) (Monnereau et coll., 2016renvoi vers). Pour les autres, on observe une amélioration plus faible de la survie à 5 ans (myélome multiple/plasmocytome : tendance à l’amélioration uniquement chez les patients de moins de 65 ans ; LLC/lymphome lymphocytique progression de 8 points). Pour les autres localisations hématologiques étudiées, la survie s’améliore globalement peu mais plus significativement chez les sujets jeunes comme pour les leucémies aiguës myéloïdes ou la leucémie/lymphome lymphoblastique. La survie du lymphome de Hodgkin reste stable. Ces résultats encourageants concernant la survie des hémopathies malignes sont également observés au niveau européen (de Angelis et coll., 2015renvoi vers), avec des taux de survie en France meilleurs que dans la plupart des autres pays pour la majorité des hémopathies malignes. Néanmoins, les données de mortalité révèlent que les hémopathies malignes (considérées dans leur ensemble) sont toujours au troisième rang des cancers les plus graves dans notre pays (Ferlay et coll., 2018renvoi vers). Les hémopathies malignes nécessitent des traitements lourds pour le patient (chimiothérapie intensive et greffe de moëlle osseuse) et pour la société (coût élevé des thérapies ciblées).

Facteurs de risque

Les facteurs de risque avérés des hémopathies malignes n’expliquent qu’une faible proportion des nouveaux cas diagnostiqués. Leur étiologie reste donc globalement en grande partie inconnue.
On peut citer d’abord les agrégations familiales de différents types d’hémopathies malignes, en particulier dans la leucémie lymphoïde chronique et les lymphomes. D’autre part les maladies héréditaires comme l’ataxie télangiectasie, le syndrome de Bloom, l’anémie de Fanconi, le syndrome de Li-Fraumeni et la neurofibromatose de type 1 sont des facteurs de risque avérés de magnitude élevée, mais ces facteurs familiaux ne sont à même d’expliquer qu’une très faible proportion des nouveaux cas car ces maladies héréditaires sont très rares.
Les facteurs de risque répertoriés comme cancérogènes certains (groupe 1)2 par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) pour les leucémies sont les suivants : le tabagisme, l’exposition au benzène, aux radiations ionisantes à forte dose et aux chimiothérapies anticancéreuses (alkylants et inhibiteurs des topo-II-isomérases). Les travailleurs du caoutchouc sont également à risque.
Les facteurs de risque reconnus des LNH sont les déficits immunitaires primitifs, l’infection par le VIH, les greffes d’organes (traitement immunosuppresseur), les agents infectieux tels que Helicobacter pylori, le virus de l’hépatite C, le virus Epstein-Barr (avec ou sans VIH) ou le virus lymphotrope humain T-HTLV-1, les maladies auto-immunes telles que le syndrome de Sjögren et le lupus érythémateux disséminé, les antécédents familiaux et personnels d’hémopathies malignes. Les agents chimiques cancérogènes certains (groupe 1) classés par le Circ pour les LNH sont les suivants : l’exposition au benzène, à la dioxine, l’oxyde d’éthylène, et au lindane (pesticide organochloré). Les travailleurs du caoutchouc sont également à risque.
La connaissance des facteurs de risque des hémopathies lymphoïdes a progressé ces quinze dernières années sous l’impulsion d’initiatives internationales comme celles portées par le consortium InterLymph. Une des plus ambitieuses posait la question de savoir si les spécificités biologiques et cliniques de chaque sous-type de lymphome se traduisaient par des différences étiologiques ? Ainsi, un large panel de facteurs de risque potentiels a été étudié simultanément (antécédents familiaux d’hémopathies malignes, maladies auto-immunes, expositions professionnelles, consommation de tabac et d’alcool, facteurs hormonaux, exposition au soleil...) pour une douzaine de sous-types de lymphomes, incluant plus de 17 000 cas et 23 000 témoins (Morton et coll., 2014brenvoi vers) : des profils étiologiques ont pu être établis confirmant, sur un fond commun, une grande hétérogénéité entre les différents sous-types histologiques d’hémopathies (Morton et coll., 2014arenvoi vers). On peut ainsi distinguer deux grands profils étiologiques différents : les LNH associés avec des facteurs de risque reliés à l’immunité (LNH diffus à grandes cellules B, LNH de la zone marginale, LNH lymphoplasmocytaire...) et ceux pour lesquels peu de facteurs de risque sont identifiés mais qui seraient plutôt associés à des polymorphismes génétiques comme le montrent les études d’association pangénomiques (LNH folliculaire, LLC/LL, LNH à cellules du manteau).
Ainsi, le fait que la majorité des facteurs de risque démontre une hétérogénéité dans leur association avec les sous-types de lymphomes n’exclut pas que plusieurs hémopathies puissent partager des facteurs de risque, notamment environnementaux.
En 2015, une monographie du Circ évalue la carcinogénicité de plusieurs substances actives de pesticides (IARC, 2017renvoi vers) dont le glyphosate classé « cancérogène probable » (voir chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »). En juin de la même année, un tableau de reconnaissance en maladie professionnelle a été créé (no 59 du régime agricole). Il est intitulé « Hémopathies malignes provoquées par les pesticides » et porte sur les lymphomes non hodgkiniens et l’exposition professionnelle aux pesticides (Lasfargues, 2017renvoi vers ; INRS, 2019renvoi vers).

Lymphomes non hodgkiniens

Les lymphomes non hodgkiniens (LNH) sont des proliférations monoclonales de lymphocytes à différents stades de leur différenciation. À bien des égards, les différents types de LNH semblent récapituler les étapes de différenciation normale des lymphocytes B ou T, et dans une certaine mesure, ils peuvent être classés selon la cellule normale correspondante. Cependant, ce n’est pas systématiquement le cas et la contrepartie normale de la cellule tumorale ne peut pas être la seule base de classification. La classification OMS distingue les types de LNH sur la base de caractéristiques morphologiques et immunologiques (Swerdlow et coll., 2017renvoi vers). Le stade de différenciation, la morphologie et les caractéristiques phénotypiques, génotypiques, et cliniques sont également utilisés pour distinguer les différents sous-types de LNH. Les LNH regroupent donc de nombreuses entités nosologiques différentes de par leur physiopathologie, leur diagnostic histologique, leur biologie et leur pronostic.
Les LNH représentent 60 % des hémopathies malignes avec environ 27 000 nouveaux cas en 2018 en France métropolitaine. Les TSM sont respectivement de 25,5 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et de 16,1 chez la femme (Le Guyader-Peyrou et coll., 2019renvoi vers). L’évolution du nombre de cas entre 1990 et 2018 est de 123 % chez l’homme (7 000 à 15 500 cas incidents) et 109 % chez la femme (5 800 à 12 100 cas incidents) dont la moitié correspond aux changements démographiques (augmentation et vieillissement de la population) et l’autre moitié correspond à une augmentation de risque. Les variations annuelles moyennes des TSM sont de 1 % entre 1990 et 2018 chez l’homme et la femme. Les tendances évolutives de l’incidence varient selon le sous-type histologique de LNH mais la majorité d’entre eux ont une évolution à la hausse.
Les principaux sous-types de LNH sont le lymphome diffus à grandes cellules B (respectivement 4,7 et 3,2 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France ; 5 071 nouveaux cas en 2018), le lymphome folliculaire (respectivement 2,9 et 2,0 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France ; 3 066 nouveaux cas en 2018), le lymphome de la zone marginale (respectivement 2,3 et 1,7 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France ; 2 790 nouveaux cas en 2018) (Le Guyader-Peyrou et coll., 2019renvoi vers). Ces trois hémopathies lymphoïdes ont une incidence qui augmente depuis les années 1990. À noter que le myélome multiple fait partie des hémopathies lymphoïdes les plus fréquentes. Il est aujourd’hui regroupé avec les LNH mais sera traité dans une partie spécifique, de même que la leucémie lymphoïde chronique regroupée aujourd’hui avec le lymphome lymphocytique (LLC/LL) en une seule entité qui sera traitée dans la partie consacrée aux leucémies. Ces cinq maladies représentent 80 % des nouveaux cas de LNH diagnostiqués chaque année en France.

Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013

Un grand nombre d’enquêtes épidémiologiques a étudié la relation entre une exposition professionnelle, mais aussi domestique, aux pesticides et le risque de développer un LNH.
Parmi elles, sept méta-analyses ont rapporté une augmentation du risque de survenue de LNH allant de 3 à 98 % chez les professionnels exposés aux pesticides comparés à la population générale. L’augmentation de risque était statistiquement significative dans cinq méta-analyses. Pour deux méta-analyses, l’une étant une mise à jour des résultats de l’autre, il n’y avait pas de significativité statistique. L’association significative la plus élevée était observée pour les travailleurs en industrie de production de pesticides avec un excès de risque de survenue de LNH de 98 %.
Les données de la cohorte prospective Agricultural Health Study (AHS) menée aux États-Unis, dans les États de l’Iowa et de la Caroline du Nord (50 000 exploitants agricoles et près de 5 000 applicateurs professionnels de pesticides) montraient une sur-incidence et une surmortalité par LNH chez les exploitants agricoles applicateurs de pesticides ou chez les applicateurs professionnels, et chez leurs conjoints, exposés aux pesticides en comparaison avec la population générale (ratios standardisés d’incidence ou de mortalité). L’excès de risque serait limité aux lymphomes à cellules B.
C’est ainsi qu’à partir des données disponibles en 2013, l’expertise collective Inserm de 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) avait conclu à la présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles chimiques ou de substances actives, chez les agriculteurs, chez les applicateurs de pesticides et chez les ouvriers de l’industrie de production de pesticides, et le risque de survenue de LNH.
Plus spécifiquement, des associations entre LNH et familles ou substances actives de pesticides ont également été recherchées. La majorité des résultats par substances actives est issue de la cohorte américaine citée ci-dessus (AHS), malgré les limites que l’on peut résumer ainsi : i) la sélection des 50 pesticides analysés (essentiellement des insecticides ou des herbicides) reflète les spécificités agricoles des deux États inclus dévolues largement aux grandes cultures et aux élevages, ii) les personnes exposées aux pesticides sont essentiellement des hommes agriculteurs blancs dont les tâches majeures associées à l’exposition sont les traitements (absence de prise en compte des contacts indirects avec les substances notamment lors de tâches de ré-entrée dans les cultures), iii) l’identification des pesticides utilisés se fait uniquement sur la déclaration des personnes interrogées (proposition des noms des matières actives avec des exemples indicatifs de noms de spécialités commerciales).
Les familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de survenue de LNH sont décrites dans des tableaux (voir addenda en fin de chapitre : tableau A11.Irenvoi vers). Le niveau de présomption de lien a été formulé d’après les résultats de plusieurs études de cohortes ou d’au moins une étude de cohorte et deux cas-témoins ou de plus de deux études cas-témoins (noté « ++ » c’est-à-dire une présomption forte de lien), ou d’après les résultats d’une cohorte ou d’une étude cas-témoins nichée ou de deux études cas-témoins (noté « + »). Les substances actives comme le lindane, le DDT, le terbufos, le diazinon, le malathion, le butilate, le phénoxyherbicide 2,4-D ou le glyphosate étaient spécifiquement associées à un excès de risque significatif dans des populations de professionnels (agriculteurs, applicateurs, éleveurs, ouvriers en industrie de production).
Dans plusieurs autres situations, qui concernent les expositions à d’autres familles de pesticides ou substances actives, ou les expositions des populations professionnelles plus largement définies que celles des agriculteurs ou des populations exposées non professionnelles, la présomption de lien reposait sur une seule étude cas-témoins (niveau de présomption faible, noté « ± »).
Des éléments de preuves étaient également décrits concernant des populations particulières chez qui un risque accru de LNH était observé pour des expositions à des familles ou substances particulières de pesticides. Il s’agit en particulier des agriculteurs porteurs d’une translocation chromosomique t(14 ;18) mais aussi des agriculteurs présentant un antécédent d’asthme ou d’hémopathies malignes (voir addenda en fin de chapitre : tableau A11.IIrenvoi vers).
Aucun élément de preuve concernant une association spécifique entre une exposition aux pesticides et le risque de survenue d’un ou plusieurs sous-types histologiques de lymphome non hodgkinien n’était apporté lors de la précédente édition de l’expertise collective publiée en 2013.

Nouvelles données épidémiologiques

S’appuyant sur les résultats acquis ces dernières années montrant un lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides (y compris certaines familles ou substances actives) et la survenue de LNH, les études les plus récentes ont cherché à mettre en évidence un effet propre des substances actives et ce sont ces études qui font l’objet de l’analyse de ce chapitre. En effet, depuis la précédente édition de l’expertise collective de l’Inserm publiée en 2013, de nombreuses études ont été publiées dont treize méta-analyses abordant l’exposition à plusieurs familles de substances actives ou se focalisant sur une famille ou une substance active particulière. Plusieurs résultats récents proviennent de cohortes, en particulier du consortium Agricoh, ainsi que d’études cas-témoins. Certaines de ces études apportent des résultats par sous-type de LNH (et/ou par substance active). Les résultats seront analysés dans une première partie par type d’études et dans une seconde partie seront synthétisés par familles et substances actives.

Analyse par type d’études

Méta-analyses

Une revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse a été publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers). Celle-ci rapporte des estimations d’associations entre les LNH et les expositions professionnelles à 21 familles de pesticides et 80 substances actives extraites de 44 articles originaux. Les phénoxyherbicides, les carbamates, les insecticides organophosphorés et l’exposition au lindane sont associés positivement à la survenue de LNH. Les risques de LNH étaient associés positivement à des substances actives spécifiques avec une hétérogénéité faible ou modérée entre études pour : le dicamba mRR = 1,4 [1,0-2,1], le dichlorodiphényltrichloro-éthane (DDT) mRR = 1,3 [1,1-1,5], le carbaryl mRR = 1,7 [1,3-2,3], le carbofuran mRR = 1,6 [1,2-2,3], le diazinon mRR = 1,6 [1,2-2,2], le malathion mRR = 1,8 [1,4-2,2], le glyphosate mRR = 1,5 [1,1-2,0] et le lindane mRR = 1,6 [1,2-2,2]. Ces associations étaient robustes aux analyses de sensibilité évaluant l’effet du sexe, du type d’étude, de la période de diagnostic, de la région géographique, de la source des témoins pour les études cas-témoins. Cependant, aucun effet-dose n’est rapporté dans cette étude. Les associations entre les pesticides et les sous-types de LNH sont étudiées dans un petit nombre d’articles montrant néanmoins que les lymphomes à cellules B sont associés positivement à l’exposition aux phénoxy-herbicides mRR = 1,8 [1,2-2,8], au glyphosate mRR = 2,0 [1,1-3,6] ou au DDT mRR = 1,4 [1,0-2,0] avec une absence d’hétérogénéité entre les résultats des études. De la même façon, le lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB) est positivement associé à l’exposition aux phénoxyherbicides mRR = 2,0 [1,1-3,6] à partir des données de deux études. Enfin, le lymphome folliculaire est associé au DDT, mRR = 1,5 [1,0-2,4] avec une hétérogénéité modérée entre les résultats des études.
Une seconde méta-analyse, récemment publiée par le consortium des cohortes d’agriculteurs Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers), étudie le rôle de l’exposition professionnelle (de façon binaire : oui/non) entre 14 familles de pesticides et 33 substances actives et le risque de LNH et de ses principaux sous-types. À partir des données de trois cohortes de travailleurs agricoles (États-Unis – AHS, France – AGRICAN et Norvège – CNAP [Cancer in the Norwegian Agricultural Population]), totalisant plus de 300 000 sujets, 2 430 cas et 3,5 millions de personnes-années à risque, les auteurs observent que la plupart des associations testées sont non significatives exceptées pour les LNH et le terbufos mRR = 1,2 [1,0-1,4], la leucémie lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique et la deltaméthrine mRR = 1,5 [1,1-2,1] et le LDGCB et le glyphosate mRR = 1,4 [1,0-1,9], après ajustement sur les autres pesticides. Aucun élément d’hétérogénéité entre les résultats des trois cohortes n’est objectivé. Des associations inverses sont observées entre les LNH et la famille large des insecticides organochlorés mRR = 0,9 [0,7-1,0] ou les phénoxyherbicides mRR = 0,8 [0,7-1,0] sans distinction d’une matière active spécifique, après ajustement sur les autres pesticides. À partir des trois cohortes évoquées ci-dessus, une autre méta-analyse du consortium Agricoh (El-Zaemey et coll., 2019renvoi vers) examine le risque d’hémopathie maligne chez les éleveurs et ne montre aucune association avec les principaux sous-types de LNH à l’exception d’un risque significativement élevé de lymphome folliculaire chez les éleveurs de bovins dans une analyse de sensibilité prenant comme groupe de référence les agriculteurs n’ayant jamais élevé aucun bétail.
Entre 2013 et 2020, dix autres méta-analyses ou analyses « poolées » ont étudié le lien entre une famille spécifique de pesticides ou une substance active sur le risque de LNH, deux sur les organochlorés (Luo et coll., 2016renvoi vers ; Kachuri et coll., 2020renvoi vers), une sur les organophosphorés (Hu et coll., 2017renvoi vers), une sur les insecticides carbamates et organophosphorés (Koutros et coll., 2019renvoi vers), trois sur le glyphosate (Chang et Delzell, 2016renvoi vers ; Pahwa et coll., 2019renvoi vers ; Zhang et coll., 2019renvoi vers), deux sur le phénoxyherbicide 2,4-D (Goodman et coll., 2015renvoi vers ; Smith et coll., 2017renvoi vers) et une sur le pentachlorophénol (Zheng et coll., 2015renvoi vers).
La méta-analyse de Luo et coll. (2016renvoi vers) évalue quantitativement, grâce à des prélèvements biologiques, l’association entre l’exposition aux pesticides organochlorés et le risque de LNH à partir de treize études publiées entre 1997 et 2011 (6 études cas-témoins nichées, une étude de cas-cohorte et 6 études cas-témoins). Le risque de LNH tous organochlorés confondus pour les études incluses est de mOR = 1,4 [1,3-1,6]. Aucune hétérogénéité significative entre les résultats n’est observée (I2 = 12,6 %). En outre, les analyses par substance active montrent des associations positives entre le risque de LNH et les expositions au dichlorodiphényldichloroéthylène (DDE, mOR = 1,4 [1,1-1,6]), à l’hexachlorocyclohexane (HCH, mOR = 1,4 [1,1-1,9]), au chlordane (mOR = 1,9 [1,5-2,5]) et à l’hexachlorobenzène (HCB, mOR = 1,5 [1,2-2,0]). En revanche aucune association n’est observée avec le DDT (voir paragraphe DDT ci-dessous).
La méta-analyse de Hu et coll. (2017renvoi vers) inclut cinq cohortes et cinq études cas-témoins dont une nichée dans une cohorte, publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté des informations sur l’exposition à au moins un des trois pesticides organophosphorés suivants : malathion, diazinon, terbufos. Une augmentation statistiquement significative du risque de LNH est observée pour l’exposition à un des trois organophosphorés : mOR = 1,2 [1,0-1,4] avec une hétérogénéité modérée (I2 = 41 %). Cette association est significative uniquement pour les études cas-témoins mOR = 1,4 [1,1-1,8] ou cas-témoins nichée mOR = 1,6 [1,0-2,4] et uniquement pour le diazinon mOR = 1,4 [1,1-1,7] avec une absence d’hétérogénéité inter-étude (I2 = 0 %).
Deux études du North American Pooled Project (NAPP) examinent le rôle de l’exposition à des insecticides spécifiques (11 organophosphorés et 2 carbamates dans Koutros et coll., 2019renvoi vers, 10 organochlorés dans Kachuri et coll., 2020renvoi vers) sur le risque de LNH et ses principaux sous-types, au sein de trois études cas-témoins réalisées en population générale dans les années 1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins canadienne publiée dans les années 1990. Dans la première étude, une association positive statistiquement significative est observée entre l’exposition au malathion et le risque de LNH OR = 1,4 [1,1-1,8] après ajustement mutuel sur les autres substances. Ce risque augmente avec une utilisation du malathion pendant 6 années ou plus, rapportée par les agriculteurs, en prenant pour référence les non-utilisateurs (OR = 1,6 [1,2-2,1] ; p de tendance < 0,01). De plus, l’évaluation du rôle du mélange de tous les insecticides organophosphorés et carbamates montre une association entre la durée d’exposition et le risque de LNH. L’augmentation d’une unité du score normalisé pondéré de l’ensemble des pesticides correspond à une augmentation de 38 % du risque de LNH ([18-61 %], p < 0,0001). Les cinq pesticides ayant le plus de poids dans cette somme normalisée pondérée sont le malathion, le carbaryl, le fonofos, le diazinon et le coumaphos. Après ajustement pour les autres pesticides étudiés, les auteurs observent également une association entre l’exposition au malathion et le LDGCB (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le lymphome folliculaire (OR = 1,6 [1,1-2,3]) avec une augmentation des risques avec la durée de l’exposition. Les risques pour la plupart des autres substances sont élevés pour plusieurs sous-types de LNH mais sont atténués après ajustements mutuels.
Dans la seconde étude du NAPP (Kachuri et coll., 2020renvoi vers), des associations positives sont observées entre plusieurs substances actives organochlorées et différents sous-ensembles de LNH. On retient principalement le lindane (OR = 1,6 [1,2-2,1]) et le lymphome folliculaire (LF), le LDGCB, le lymphome lymphocytique ; le chlordane (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le LF, le lymphome lymphocytique ; le DDT (OR = 1,4 [1,1-1,7] et le LDGCB, le lymphome lymphocytique. Les associations spécifiques aux sous-types ont été évaluées en utilisant l’ASSET (Association Analysis for SubSETs), analyse d’association basée sur des sous-ensembles qui prend en compte plusieurs comparaisons entre les expositions et plusieurs recherches de sous-types de LNH pour chaque insecticide. Les valeurs des p de tendance indiquent une relation dose-réponse significative pour plusieurs insecticides : le lindane (p = 1,7×10-4), le chlordane (p = 1,0×10-3) et le DDT (p = 4,2×10-3). Cependant, les estimations des risques observées n’augmentaient pas de façon monotone dans les catégories correspondant à une durée d’exposition plus longue. L’utilisation de pyrèthre était associée à un risque élevé de LF (OR = 3,7 [1,5-9,2]) et la relation avec la durée d’utilisation semblait monotone (utilisation > 10 ans : OR = 5,4 [1,8-16,5] ; p de tendance = 3,6×10su-3rn). Cette analyse suggère une hétérogénéité étiologique possible des LNH vis-à-vis de l’exposition aux substances actives étudiées.
Les méta-analyses sur le glyphosate de Chang en 2016 (Chang et Delzell, 2016renvoi vers) puis plus récemment de Zhang en 2019 (Zhang et coll., 2019renvoi vers) reposent sur 5 études cas-témoins publiées entre 2001 et 2009 et les données de la cohorte AHS. L’étude de Zhang et coll. a inclus l’analyse la plus récente de la cohorte AHS publiée en 2018 (Andreotti et coll., 2018renvoi vers), tandis que celle de Chang et Delzell était basée sur une analyse de l’AHS publiée en 2005 (de Roos et coll., 2005renvoi vers). La première (Chang et Delzell, 2016renvoi vers) met en évidence un risque élevé de LNH statistiquement significatif chez les agriculteurs exposés au glyphosate mOR = 1,3 [1,0-1,6] avec peu d’hétérogénéité dans les résultats des études (I2 = 0 %) et absence de biais de publication identifiable. Cette association était robuste à plusieurs analyses secondaires selon plusieurs méthodes statistiques, la permutation des résultats par ceux d’une analyse plus récente (AHS), ou les deux à la fois. La seconde méta-analyse (Zhang et coll., 2019renvoi vers) se concentre sur les sujets les plus exposés au glyphosate (en durée et en intensité) et observe un risque un peu plus élevé : mOR = 1,4 [1,1-1,8]. Une analyse secondaire à partir des données de l’AHS de 2005 et des groupes les plus fortement exposés montre un risque de LNH comparable : mOR = 1,45 [1,11-1,91]. Plusieurs analyses de sensibilité utilisant différentes catégorisations de l’exposition, selon les sous-types de LNH inclus, le lieu géographique de l’étude, l’exposition à d’autres pesticides, le type d’analyse statistique, ou l’exclusion tour à tour d’une des 6 études ont retrouvé des risques semblables. Au total, cette dernière étude rapporte un risque légèrement plus élevé que les trois autres méta-analyses (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers ; Chang et Delzell, 2016renvoi vers ; IARC, 2017renvoi vers) mais celle-ci est la seule à aborder l’analyse des groupes les plus exposés. Une autre différence notable est l’inclusion des cas de myélome multiple dans le groupe des LNH dans la dernière version de l’analyse de l’AHS (conformément à la classification OMS et à une publication du consortium InterLymph qui placent ces hémopathies malignes dans le groupe des hémopathies lymphoïdes à cellules B matures car dérivant d’une prolifération monoclonale de plasmocytes). Cependant, une analyse de sensibilité montre que les résultats ne sont pas expliqués par cette prise en compte des myélomes. En effet, une association entre le myélome multiple et le glyphosate, si elle existait, aurait pu être à l’origine de cette élévation du risque, mais cela n’est pas démontré dans la dernière analyse de la cohorte AHS et repose aujourd’hui sur un faible niveau de preuve. Aucune analyse par sous-type de LNH n’est disponible dans la méta-analyse de Zhang et coll. (2019renvoi vers). Les deux résultats allant dans le même sens et spécifiques d’un sous-type de lymphome (le lymphome diffus à grande cellules B et plus largement les lymphomes B) sont ceux de Leon et coll. (2019renvoi vers) et Schinasi et coll. (2014renvoi vers), évoqués ci-dessus.
Enfin, une méta-analyse sur des données individuelles (ou analyse poolée) publiée en 2019 examine le rôle spécifique de l’exposition au glyphosate sur le risque de LNH et ses principaux sous-types en utilisant les études cas-témoins menées aux États-Unis et au Canada (North American Pooled Project – NAPP), études dont la majorité sont prises en compte dans les méta-analyses préalablement décrites plus haut (Pahwa et coll., 2019renvoi vers). Les auteurs montrent que les sujets ayant utilisé du glyphosate ont un risque élevé de LNH (OR = 1,4 [1,1-1,8]) mais après ajustement sur l’exposition aux pesticides 2,4-D, dicamba et malathion le risque est atténué et non statistiquement significatif (OR = 1,1 [0,8-1,5]). Les auteurs font les mêmes observations concernant l’analyse par sous-type de LNH. Cependant, une association positive statistiquement significative avec le risque de LNH est observée chez les sujets ayant utilisé du glyphosate plus de deux jours par an (OR = 1,7 [1,0-2,9] ; p de tendance = 0,2) de même que chez les sujets atteints de LDGCB (OR = 2,1 [1,1-4,3] ; p de tendance = 0,2) ce qui est concordant avec les résultats des méta-analyses abordées plus haut. Ces risques élevés ne sont toutefois pas retrouvés avec la durée de l’exposition en années. La tendance vie entière est significative uniquement pour le lymphome lymphocytique lorsque l’on analyse la variable d’exposition en continu avec des risques élevés non significatifs.
Deux méta-analyses se focalisant sur le phénoxyherbicide 2,4-D ont été publiées récemment (Goodman et coll., 2017renvoi vers ; Smith et coll., 2017renvoi vers). La première qui est une mise à jour de la méta-analyse de 2015 (Goodman et coll., 2015renvoi vers) compile les données de 10 études publiées entre 1991 et 2011 dont les données de la cohorte AHS (publiées par de Roos et coll., 2005renvoi vers) et ne montre aucune association entre le risque de LNH et l’exposition (oui/non) au 2,4-D, mRR = 1,0 [0,8-1,2]. La seconde méta-analyse rassemble les résultats de 11 études cas-témoins (dont deux nichées) et une cohorte de professionnels publiés entre 1992 et 2013. Cette méta-analyse n’inclut pas les données de la cohorte AHS. Les auteurs s’intéressent aux expositions les plus élevées au 2,4-D de chaque étude et identifient une association positive statistiquement significative avec le risque de LNH : mRR = 1,7 [1,1-2,7] avec une hétérogénéité inter-études modérée (I2 = 56 %, test d’hétérogénéité p = 0,009) ce qui requiert une certaine prudence dans l’interprétation des résultats. En effet, cette méta-analyse regroupe des études ayant des méthodes d’analyse ou des conditions expérimentales différentes : scénarios d’exposition, évaluation de l’exposition, interprétation des résultats, analyses statistiques ou populations d’étude.
Enfin, une méta-analyse sur le rôle de l’exposition des professionnels au pentachlorophénol (métiers du bois ou usine de fabrication) réalisée à partir des données de 5 études cas-témoins assez anciennes (1986 à 1994), montre un risque élevé de LNH mOR = 2,7 [1,3-5,3] (Zheng et coll., 2015renvoi vers).

Cohortes

La cohorte AHS a été ré-analysée et publiée en 2014 par Alavanja en distinguant 26 familles de pesticides ou substances actives (Alavanja et coll., 2014renvoi vers). Cette analyse présente également les résultats pour cinq sous-types d’hémopathies lymphoïdes fréquents dont les myélomes multiples qui seront détaillés dans un chapitre à part. Une association positive est retrouvée entre le risque de LNH et l’exposition au terbufos (RR = 1,2 [1,0-1,5]) sans effet-dose. En revanche, des associations positives sont observées avec le DDT (RR = 1,7 [1,1-2,6]) et le lindane (RR = 2,5 [1,4-4,4]) dans la catégorie des professionnels les plus exposés (nombre total de jours d’exposition), avec des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition (tendances statistiquement significatives), bien qu’aucune association ne soit observée en binaire (exposé oui/non). L’exposition au lindane est associée à un risque élevé mais non significatif de lymphome folliculaire (RR = 1,7 [1,0-3,2]) alors que les associations augmentent avec l’exposition (en nombre total de jours) avec une tendance significative des risques (RR = 1,0 [réf], 4,9 [1,9-12,6], 3,6 [1,4-9,5] ; p de tendance = 0,04). Même observation pour le lymphome folliculaire et le diazinon, les risques augmentent avec le nombre de jours d’exposition (RR = 1,0 [réf], 2,2 [0,9-5,4], 3,8 [1,2-11,4] ; p de tendance = 0,02). L’exposition au terbufos et l’exposition au DDT sont positivement associées au lymphome lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome à cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec la même tendance significative des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition. Ces observations persistent après ajustements mutuels. Trois autres substances actives sont associées à des risques élevés sans effet-dose identifié : le bromure de méthyle (bromomethane) et lymphome diffus à grandes cellules B (RR = 1,9 [1,1-3,3]), le métalaxyl et le chlordane et le LL/LLC/LCM (RR = 1,6 [1,0-2,5] ; RR = 1,4 [1,0-2,0]). Cette analyse par substance active et sous-type de LNH a pour conséquence que la majorité des associations identifiées reposent sur un petit nombre d’exposés.
Une analyse plus récente de la cohorte AHS (Andreotti et coll., 2018renvoi vers) s’adresse spécifiquement à l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence de risque élevé avec les LNH ou ses principaux sous-types.
Enfin, une analyse de cohorte en population générale publiée en 2015 (Schinasi et coll., 2015renvoi vers), la « Women’s Health Initiative (WHI) » (76 493 femmes suivies pendant 11,5 années en médiane, 822 LNH), a évalué le risque de LNH en relation avec le fait d’avoir vécu ou travaillé dans une ferme (sans distinction) (RR = 1,1 [1,0-1,3]) ainsi que l’utilisation d’insecticides à la maison ou dans le contexte de l’emploi. Les femmes ayant déclaré qu’un service commercial avait appliqué au moins une fois des insecticides dans leur environnement immédiat, présentaient un risque plus élevé de leucémie lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL) : RR = 1,7 [1,2-2,4]. Les femmes de moins de 65 ans ayant appliqué au moins une fois des insecticides présentaient un risque également plus important de LDGCB (RR = 1,9 [1,1-3,1]) que les non-utilisatrices. Ces résultats méritent d’être répliqués pour pouvoir confirmer le lien entre l’exposition domestique aux insecticides et le risque de survenue des différents sous-types de LNH.

Études cas-témoins

Trois études cas-témoins apportent également des résultats probants. Tout d’abord une étude cas-témoins en population générale réalisée dans quatre villes américaines et publiée en 2015 (Czarnota et coll., 2015renvoi vers) étudie un mélange de 27 produits chimiques environnementaux corrélés (cinq polychlorobiphényles, sept hydrocarbures aromatiques polycycliques et quinze pesticides), mesurés dans la poussière domestique (n = 1 180). Cette étude estime les associations entre les LNH et un score pondéré basé sur les quartiles des concentrations en produits chimiques. Cet index est associé positivement avec le risque de LNH (OR = 1,3 [1,1-1,6] ; p = 0,006, pour l’augmentation d’un quartile). Les risques étaient élevés dans les quatre régions et statistiquement significatifs dans trois des quatre régions (Détroit, Iowa et Los Angeles), pour le lymphome folliculaire et le lymphome de la zone marginale (OR = 1,5 [1,1-2,0] ; p = 0,014 et OR = 2,1 [1,3-3,5] ; p = 0,006 pour l’augmentation d’un quartile, respectivement). Les résultats décrivant le poids de chacun des produits chimiques montrent une importance élevée des pesticides dans les associations décrites. Analysés individuellement, certains pesticides étaient associés au risque de LNH : les quartiles les plus élevés d’α-chlordane (OR = 1,4 [1,0-2,0]) et de γ-chlordane (OR = 1,4 [1,0-1,9]) sont associés positivement. Pour le chlorpyrifos et le dicamba, les risques étaient inversement associés au LNH.
Une seconde étude cas-témoins multicentrique réalisée en Europe (EPILYMPH) publiée en 2013 (Cocco et coll., 2013renvoi vers) a inclus 2 348 cas et 2 462 témoins dans 6 pays. Les données de l’historique professionnel et des questionnaires spécifiques sur les travaux effectués à la ferme ainsi que des questions spécifiques sur les cultures, la taille de la ferme, les parasites traités, le type et le calendrier de traitement par pesticide étaient recueillies. Le risque de leucémie lymphoïde chronique est associé à l’exposition aux pesticides non organiques (OR = 1,6 [1,0-2,5]) et aux organophosphorés (OR = 2,7 [1,2-6,0]) reposant néanmoins sur un relativement faible nombre d’exposés. Une analyse restreinte aux sujets les plus vraisemblablement exposés (expositions revues par un hygiéniste), ne montrait aucune association. Aucun effet-dose n’était identifié.
Il est également important de citer de nouveaux travaux étudiant le rôle de l’exposition professionnelle agricole aux pesticides non pas uniquement sur la survenue de la maladie mais également sur le devenir du patient au cours de son traitement. Une étude française de nature rétrospective publiée en 2019 (Lamure et coll., 2019renvoi vers) montre que l’exposition professionnelle agricole aux pesticides est associée à un échec du traitement, à la survie sans évènement et à la survie globale des patients atteints de lymphome diffus à grandes cellules B. Ce type d’étude est à encourager car il aborde un pan inconnu pour l’instant de l’impact de l’exposition aux pesticides qui, comme le montre cette étude, peut entrer en concurrence avec l’efficacité des traitements.

Synthèse des données par familles et substances actives

La synthèse des données par familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de survenue de LNH est présentée ci-dessous.

Organochlorés

L’expertise collective Inserm de 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) décrivait un nombre important d’études qui s’étaient intéressées au lien entre exposition aux organochlorés (aldrine, dieldrine, DDT, chlordane, endrine, heptachlore, lindane, méthoxychlore, nonachlore, oxychlordane, toxaphène...) et LNH (voir tableau 4.IV de l’édition 2013). Nous détaillons ci-dessous les données pour les principales matières actives.
Lindane
Dans l’édition 2013 de l’expertise collective, des augmentations statistiquement significatives de risque de LNH au sein de la cohorte AHS ont été observées avec le lindane pour la catégorie d’exposition la plus élevée de même que dans des études cas-témoins (poolées ou non) et plus particulièrement suite à son utilisation en culture. Cela a permis de conclure à une présomption forte de lien entre l’exposition au lindane (applicateurs et agriculteurs) et le risque de LNH.
Depuis 2013, une revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse a été publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers). Celle-ci rapporte des estimations d’associations entre les LNH et 21 familles de pesticides et 80 substances actives extraites de 44 articles originaux dont le lindane, dont l’exposition est associée positivement à la survenue de LNH mRR = 1,6 [1,2-2,2]. Cependant, aucun effet-dose n’est résumé dans cette étude.
En revanche, dans la méta-analyse réalisée à partir des données des trois cohortes de travailleurs agricoles du consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers), les auteurs n’observent aucune association avec le lindane (avec des risques inférieurs à 1, non significatifs) à l’exception de la LLC/LL pour laquelle le risque pour l’exposition au lindane est d’un mRR = 1,1 [0,9-1,4]. De plus une étude du NAPP (étude poolée nord-américaine) montre une association positive entre l’exposition au lindane (OR = 1,6 [1,2-2,1]) et le lymphome folliculaire (LF), le LDGCB, le lymphome lymphocytique avec une tendance significative avec la durée d’exposition non linéaire (Kachuri et coll., 2020renvoi vers).
La cohorte AHS a été ré-analysée et publiée en 2014 par Alavanja en distinguant 26 familles de pesticides ou substances actives dont le lindane (Alavanja et coll., 2014renvoi vers). Une association positive est observée avec le lindane (RR = 2,5 [1,4-4,4]) dans la catégorie des professionnels les plus exposés (nombre total de jours d’exposition) avec des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition (tendances statistiquement significatives). L’exposition au lindane semble également associée à un risque élevé de lymphome folliculaire (RR = 1,7 [1,0-3,2]) et une tendance significative à l’augmentation du risque avec l’exposition (en nombre total de jours) est observée (RR = 1,0 [réf], 4,9 [1,9-12,6], 3,6 [1,4-9,5] ; p de tendance = 0,04).
Pour le lindane, la présomption de lien reste donc élevée pour les applicateurs et agriculteurs, au même niveau que l’édition 2013. Aucune information portant spécifiquement sur l’exposition des éleveurs au lindane n’a été publiée depuis 2013, la présomption de lien reste donc inchangée (moyenne). Seule la méta-analyse du consortium Agricoh (El-Zaemey et coll., 2019renvoi vers) examine le risque d’hémopathie maligne chez les éleveurs et ne montre aucune association avec les principaux sous-types de LNH à l’exception d’un risque significativement élevé de lymphome folliculaire chez les éleveurs de bovins dans une analyse de sensibilité prenant comme groupe de référence les agriculteurs n’ayant jamais élevé aucun bétail.
DDT
L’expertise collective de 2013 rapportait des augmentations statistiquement significatives de risque de LNH chez les agriculteurs exposés au DDT permettant de conclure à une présomption forte d’un lien entre l’exposition et le risque de LNH. Cependant, le risque était atténué jusqu’à ne plus atteindre le seuil de significativité statistique après ajustement sur l’utilisation d’autres pesticides. Par ailleurs, les mesures de concentrations en DDT dans des compartiments biologiques (plasma, sérum, tissus adipeux) ou dans des poussières de maison n’ont pas permis la mise en évidence d’une quelconque relation entre ces concentrations et la survenue de LNH. Enfin, les auteurs soulignaient que certaines catégories de populations (présentant des antécédents familiaux d’hémopathie maligne, asthmatiques, porteurs de translocation t(14 ;18)) pouvaient présenter un risque accru de LNH suite à l’exposition à certains organochlorés.
Depuis 2013, la revue systématique de la littérature et méta-analyse publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) rapporte une association entre les LNH et l’exposition professionnelle au DDT (mRR = 1,3 [1,1-1,5]) basée sur 7 études (6 études cas-témoins et une étude de cohorte publiée par Purdue et coll. en 2007renvoi vers). Cette association était robuste aux analyses de sensibilités évaluant l’effet du sexe, du type d’étude, de la période de diagnostic, la région géographique, la source des témoins pour les études cas-témoins. Cependant, ce résultat n’est pas retrouvé dans la cohorte AHS (telle que publiée en 2007) et aucun effet-dose n’est présenté dans cette méta-analyse. Les associations entre DDT et les sous-types de LNH sont étudiées dans un petit nombre d’articles montrant néanmoins que les lymphomes à cellules B sont associés positivement à l’exposition au DDT, mRR = 1,4 [1,0-2,0] avec une absence d’hétérogénéité entre les résultats des études. Le lymphome folliculaire est associé au DDT, mRR = 1,5 [1,0-2,4] avec une hétérogénéité modérée entre les résultats des études.
En revanche, dans la méta-analyse réalisée à partir des données des trois cohortes de travailleurs agricoles du consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers), les auteurs n’observent aucune association avec le DDT (cohorte AHS comprise). Toutefois, pour un pesticide lipophile et persistant tel que le DDT, l’exposition pourrait rester pertinente même plusieurs décennies au-delà de la période d’utilisation active, en particulier pour son métabolite, le DDE, ce qui justifierait leur inclusion dans ces analyses. La dernière étude du NAPP (étude poolée nord-américaine) montre une association positive entre l’exposition au DDT (OR = 1,4 [1,1-1,7]) et le LDGCB, le lymphome lymphocytique avec une tendance significative avec la durée d’exposition non linéaire (Kachuri et coll., 2020renvoi vers).
Les études portant sur les biomarqueurs de l’exposition aux insecticides organochlorés dans le sérum, le plasma et les tissus adipeux et le risque de LNH ont récemment été résumées dans une méta-analyse (Luo et coll., 2016renvoi vers) montrant une association avec les organochlorés regroupés ensemble mais aucune association avec le DDT, tout en signalant des associations plus fortes avec le DDE, mOR = 1,4 [1,1-1,6], et avec d’autres pesticides organochlorés comme l’hexachlorocyclohexane (HCH), le chlordane et l’hexachloro-benzène (HCB). Plus récemment, une étude a été réalisée en Asie (Bassig et coll., 2019renvoi vers), où la forte exposition et la contamination environnementale historique de certains pesticides organochlorés (par exemple, DDT et HCH) sont différentes des populations occidentales. Cette étude cas-témoins nichée dans trois cohortes (Shanghai et Singapour) a inclus 167 cas de LNH et 167 témoins. Elle évalue l’exposition à partir des dosages pré-diagnostiques de pesticides organochlorés/métabolites et congénères de polychlorobiphényles (PCB). Les niveaux médians de p, p’-DDE, le principal métabolite du DDT et le β-HCH étaient respectivement jusqu’à 12 et 65 fois plus élevés dans les échantillons des cohortes asiatiques comparées à plusieurs cohortes aux États-Unis ou en Norvège. Une augmentation de risque de LNH a été observée chez les sujets dont les taux de β-HCH étaient plus élevés dans l’ensemble (OR 3eversus 1er tercile = 1,8 [1,0-3,2] ; ptendance = 0,049) et après exclusion des cas diagnostiqués dans les deux ans suivant le prélèvement de sang (OR 3eversus 1er tercile = 2,0 [1,1-3,9] ptendance = 0,03). Aucune association significative n’a été observée pour les autres organochlorés, y compris p, p’-DDE. Ces résultats confirment une association entre le taux sanguin de β-HCH et le risque de LNH. En revanche, bien que certaines études suggèrent que le DDT est associé au risque de LNH, ces résultats pour le p, p’-DDE ne confirment pas cette association.
D’autre part, la cohorte AHS a été ré-analysée et publiée en 2014 par Alavanja en distinguant 26 familles de pesticides ou substances actives dont le DDT (Alavanja et coll., 2014renvoi vers). Une association positive est observée entre l’exposition au DDT (RR = 1,7 [1,1-2,6]) et le risque de LNH dans la catégorie des professionnels les plus exposés (nombre total de jours d’exposition) avec des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition (tendances statistiquement significatives). L’exposition au DDT est positivement associée au lymphome lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome à cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec la même tendance significative des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition. Ces observations persistent après ajustements mutuels.
Compte tenu des données disponibles, la présomption de lien entre l’exposition au DDT et le risque de LNH reste donc élevée pour les agriculteurs, au même niveau que dans l’expertise 2013 (++).
Chlordane
Dans la version 2013 de l’expertise, la présomption de lien était faible car reposant uniquement sur une association positive mise en évidence dans une seule étude cas-témoins réalisée chez des éleveurs (Cantor et coll., 1992renvoi vers), les autres études étant menées en population générale.
Depuis lors, les études portant sur les biomarqueurs de l’exposition aux insecticides organochlorés dans le sérum, le plasma et les tissus adipeux et le risque de LNH ont récemment été résumées dans une méta-analyse qui rassemble non seulement des études faites chez les professionnels mais aussi en population générale (Luo et coll., 2016renvoi vers) et qui montre une association avec le chlordane (OR = 1,9 [1,5-2,5]). D’autre part, l’étude de la cohorte AHS publiée en 2014 par Alavanja montre que l’exposition au chlordane est associée à des risques élevés de LL/LLC/LCM (RR = 1,4 [1,0-2,0]) sans effet-dose identifié. Cette association repose sur un petit nombre d’exposés (49 sujets exposés versus 90 non exposés).
Une étude cas-témoins en population générale réalisée dans quatre villes américaines et publiée en 2015 (Czarnota et coll., 2015renvoi vers) étudie un mélange de 27 produits chimiques environnementaux corrélés, mesurés dans la poussière domestique (n = 1 180). Cette étude, évoquée plus haut, s’intéresse principalement à un score pondéré prenant en compte la concentration mesurée pour 27 produits chimiques d’intérêt (dosages de cinq polychlorobiphényles, sept hydrocarbures aromatiques polycycliques et quinze pesticides). Analysés individuellement, certains pesticides étaient associés au risque de LNH et, en particulier, les quartiles les plus élevés d’α-chlordane (OR = 1,4 [1,0-2,0]) et de γ-chlordane (OR = 1,4 [1,0-1,9]) étaient associés positivement au risque de LNH.
Enfin, la dernière étude du NAPP (étude poolée nord-américaine) montre une association positive entre l’exposition entre le chlordane (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le LF, le lymphome lymphocytique avec une tendance significative avec la durée d’exposition non linéaire (Kachuri et coll., 2020renvoi vers).
Pour le chlordane, la présomption de lien se renforce et passe de faible à moyenne compte tenu de ces résultats.
Dicamba
Dans l’édition 2013 de l’expertise collective, l’herbicide organochloré dicamba était peu abordé et n’a pas fait l’objet d’une conclusion compte tenu du faible nombre d’études publiées.
Depuis 2013, la revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse a été publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) et rapporte une association positive spécifique entre l’exposition à cette substance et le risque de LNH (mRR = 1,4 [1,0-2,1]) reposant sur les données de deux études cas-témoins réalisées au Canada et aux États-Unis et publiées en 2001 et 2003.
La méta-analyse des trois cohortes d’agriculteurs publiée en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) ne montre pas d’association positive entre l’exposition spécifique au dicamba et le risque de LNH en général mais uniquement avec le myélome multiple de façon non significative (mRR = 1,2 [0,9-1,6]). Ce résultat est décrit dans la partie portant sur le myélome.
Pour le dicamba, la présomption de lien est faible compte tenu de ces résultats qui doivent être répliqués.

Organophosphorés

L’expertise collective Inserm de 2013 décrivait un nombre élevé d’études réalisées dans le secteur agricole, principalement des études cas-témoins, poolées ou non, abordant l’exposition aux organophosphorés pris dans leur ensemble. Des associations significatives ont été observées dans pratiquement toutes les études nord-américaines. Les études cas-témoins poolées ont mis en évidence un risque significativement élevé pour certaines substances actives comme le chlorpyrifos, le coumaphos, le diazinon, le fonofos et le malathion.
Les nouvelles données sont décrites ci-dessous pour les principales substances actives retrouvées dans la revue de la littérature.
Terbufos
Dans l’édition 2013 de l’expertise collective, les auteurs avaient conclu à une présomption de lien moyenne entre l’exposition au terbufos et le risque de LNH en considérant une association positive statistiquement significative entre l’exposition à l’insecticide terbufos et le risque de LNH dans la cohorte AHS pour le niveau d’exposition intermédiaire. Cependant, étaient notés également l’absence d’effet significatif au plus fort niveau d’exposition et le manque de gradient exposition-réponse (quel que soit le groupe de référence) (Bonner et coll., 2010renvoi vers).
Depuis 2013, une méta-analyse a été publiée par le consortium des cohortes d’agriculteurs, Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) mettant en évidence une association positive significative entre l’exposition au terbufos et le risque de LNH, mRR = 1,2 [1,0-1,4]. Cette association est basée sur les données de deux cohortes AGRICAN et AHS car le terbufos n’était pas homologué pour une utilisation sur les cultures sélectionnées en Norvège (3e cohorte participant à l’analyse). Aucune hétérogénéité des effets entre les deux cohortes n’était observée. Les risques spécifiques de chaque cohorte sont mRR = 1,1 [0,8-1,5] pour AGRICAN (96 cas exposés) et mRR = 1,2 [1,0-1,5] pour l’AHS (203 cas exposés). Bien que non significatif, le risque est plus élevé pour le lymphome folliculaire mRR = 1,2 [0,8-2,2]. Par ailleurs, comme attendu, l’association entre l’exposition professionnelle au terbufos et le risque de LNH est confirmée dans l’analyse la plus récente de la cohorte AHS publiée préalablement en 2014 (Alavanja et coll., 2014renvoi vers). L’exposition au terbufos est également positivement associée au lymphome lymphocytique/leucémie lymphoïde chronique/lymphome à cellules du manteau (LL/LLC/LCM) avec une tendance significative à l’augmentation des risques avec le nombre total de jours d’exposition. Ces observations persistent après ajustements mutuels.
La méta-analyse de Hu et coll. (2017renvoi vers) inclut cinq études dont l’AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté des informations sur l’exposition à au moins un des trois pesticides organophosphorés suivants : malathion, diazinon, terbufos. Le risque de LNH n’est pas associé à l’exposition au terbufos mRR = 1,1 [0,9-1,4].
En conséquence, la présomption de lien reste moyenne car les données reposent toujours sur une seule cohorte celle de l’AHS.
Diazinon
Dans l’édition 2013 de l’expertise collective, les études cas-témoins poolées (regroupant les résultats de 4 États des États-Unis) ont mis en évidence un risque significativement élevé de LNH pour le diazinon. Dans les études non poolées, un degré de significativité statistique a été atteint pour le diazinon utilisé avant 1965. Ces résultats ont permis de conclure à une présomption moyenne d’un lien entre l’exposition au diazinon et le risque de LNH chez les agriculteurs.
Les nouvelles données depuis 2013 apportent des résultats concordants, à commencer par une revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) qui à partir de trois études cas-témoins (dont une étude cas-témoins nichée dans une cohorte) montre une association positive entre l’exposition au diazinon et le risque de LNH (mRR = 1,6 [1,2-2,2]). D’autre part, la méta-analyse de Hu et coll. (2017renvoi vers) inclut sept études dont la cohorte AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté des informations sur l’exposition à au moins un des trois pesticides organophosphorés suivants : malathion, diazinon et terbufos. L’exposition au diazinon est significativement associée au risque de LNH, mRR = 1,4 [1,1-1,7] avec une absence d’hétérogénéité inter-études (I2 = 0 %). Les résultats de l’étude AHS publiée par Alavanja et coll. (2014renvoi vers) montrent également des risques de lymphome folliculaire qui augmentent avec le nombre de jours d’exposition au diazinon (RR = 1,0 [réf], 2,2 [0,9-5,4], 3,8 [1,2-11,4] ; p de tendance = 0,02).
En conséquence, la présomption de lien entre l’exposition professionnelle agricole au diazinon et le risque de LNH est forte car reposant sur plusieurs études cas-témoins, une cohorte (AHS) et deux méta-analyses.
Malathion
La précédente expertise collective de l’Inserm avait conclu à une présomption forte de lien entre l’exposition professionnelle des agriculteurs au malathion et le risque de LNH. Cette conclusion reposait sur les résultats de plusieurs études cas-témoins, dont une nichée dans une cohorte, montrant des associations significatives avec le risque de LNH. Une étude montrait des risques plus élevés de LNH avec l’utilisation conjointe de malathion et de carbaryl.
Après 2013, la méta-analyse publiée par le Circ en 2014 (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) retrouve à partir de trois études cas-témoins (dont une étude cas-témoins nichée dans une cohorte) une association positive entre l’exposition au malathion et le risque de LNH (mRR = 1,8 [1,4-2,2]).
Une seconde méta-analyse de Hu et coll. (2017renvoi vers) inclut sept études dont la cohorte AHS, publiées entre 1992 et 2015 ayant collecté des informations sur l’exposition à au moins un des trois pesticides organophosphorés suivants : malathion, diazinon, terbufos. Cette étude montre un risque élevé, mais non significatif, de LNH chez les agriculteurs exposés au malathion, mRR = 1,2 [0,8-1,7] avec une forte hétérogénéité inter-études (I2 = 73 %). Les résultats les plus récents de l’étude AHS publiée par Alavanja et coll. (2014renvoi vers) ne montrent pas d’association.
Enfin, une analyse poolée publiée en 2019 (Koutros et coll., 2019renvoi vers) examine le rôle de l’exposition à des insecticides spécifiques (11 organophosphorés et 2 carbamates) sur le risque de LNH et ses principaux sous-types, au sein de trois études cas-témoins réalisées en population générale dans les années 1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins canadienne publiée dans les années 1990 (1 690 cas et 5 131 témoins). Une association positive statistiquement significative est observée entre l’exposition au malathion et le risque de LNH, OR = 1,4 [1,1-1,8] après ajustement mutuel sur les autres substances. Ce risque augmente avec la durée d’utilisation (p de tendance < 0,01), rapportée par les agriculteurs, avec un risque plus important pour une utilisation du malathion pendant 6 années ou plus par rapport aux non-utilisateurs (OR = 1,6 [1,2-2,1]). Après ajustement sur les autres pesticides étudiés, les auteurs observent également une association entre l’exposition au malathion et les deux principaux sous-types de LNH, le LDGCB (OR = 1,6 [1,2-2,2]) et le lymphome folliculaire (OR = 1,6 [1,1-2,3]) avec une augmentation des risques avec la durée de l’exposition.
On peut également noter qu’aucune association n’est mise en évidence dans l’étude poolée des trois cohortes publiées en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers).
En conséquence, la présomption de lien entre l’exposition professionnelle agricole au malathion et le risque de LNH reste considérée comme forte car reposant sur plusieurs études cas-témoins et deux méta-analyses.

Triazines

En 2013, la présomption de lien entre le risque de LNH et une exposition professionnelle aux triazines dans leur ensemble, chez les travailleurs en industrie de production de pesticides, a été considérée comme étant moyenne, tandis qu’elle a été considérée comme étant faible chez les agriculteurs exposés. En effet, dans la plupart des études, cette augmentation est faible, et fondée sur un petit nombre de cas. Elle n’atteint pas le seuil de significativité statistique et ne présente pas de relation exposition-réponse significative.
Depuis 2013, la méta-analyse publiée par le Circ en 2014 (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) retrouve à partir de quatre études cas-témoins une association positive entre l’exposition agricole aux herbicides de la famille des triazines et le risque de LNH (mRR = 1,5 [1,0-2,1]) avec une hétérogénéité inter-études faible (I2 = 38,5 %).
Atrazine
Les données disponibles dans l’expertise collective de 2013 montraient une augmentation non significative du risque de LNH chez les agriculteurs de la cohorte AHS en se basant sur 68 cas exposés (publié en 2004). Une ré-analyse de la cohorte publiée en 2011 avec une durée de suivi plus longue (quasi doublement du nombre de cas exposés, n = 152) n’a pas mis en évidence d’association entre l’exposition à l’atrazine et la survenue de LNH. La majorité des études cas-témoins individuelles (non-poolées) ont montré une augmentation non-significative du risque de LNH pour l’atrazine. Une analyse poolée de trois études cas-témoins (de Roos et coll., 2003renvoi vers) montrait, en ajustant sur les autres substances, des risques significatifs semblant indiquer un effet plus qu’additionnel (« superadditive ») de l’utilisation de l’atrazine en combinaison avec le carbofuran, le diazinon et l’alachlore. Une étude sur les individus porteurs d’une translocation chromosomique t(14;18) a également mis en évidence une augmentation significative de risque de LNH associé à l’exposition à l’atrazine chez ces individus par rapport aux témoins (Schroeder et coll., 2001renvoi vers).
La présomption de lien a donc été considérée par les auteurs de l’expertise comme faible. Aucun élément de preuve supplémentaire n’est disponible depuis 2013.

Carbamates/thiocarbamates

Concernant les carbamates, la synthèse de l’expertise collective de 2013 documentait leur utilisation dans le secteur agricole avec des données provenant principalement d’études cas-témoins. Les résultats de ces études montraient relativement peu de cohérence, certaines rapportant un risque significativement augmenté, d’autres non. Le seuil de significativité statistique était atteint dans une étude poolée réalisée à partir des données de trois études cas-témoins. La présomption de lien entre l’exposition aux carbamates chez les agriculteurs et le risque de LNH était considérée comme moyenne.
Depuis 2013, une revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse a été publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers). À partir des trois études cas-témoins anciennes et déjà prises en compte dans l’expertise de 2013 (1992-2001), les auteurs montrent des associations positives sans hétérogénéité inter-études (I2 = 0 %) entre l’exposition aux herbicides et insecticides carbamates et le risque LNH avec respectivement des risques mRR = 1,4 [1,1-2,0] et mRR = 1,7 [1,3-2,3].
Butilate
Dans l’édition de 2013, la présomption de lien entre l’exposition au butilate chez les applicateurs et le risque de LNH a été considérée comme moyenne car reposant sur une association statistiquement significative mise en évidence à partir des données de la cohorte AHS quel que soit le paramètre d’exposition utilisé et quel que soit le groupe de référence, avec une tendance dose-réponse statistiquement significative. Le nombre de cas exposés était toutefois assez faible. D’autre part une étude poolée de trois études cas-témoins réalisée en Amérique du nord publiée en 2001 montrait également une association positive (Zheng et coll., 2001renvoi vers).
Depuis 2013, une méta-analyse de trois cohortes d’agriculteurs publiée en 2019 par le consortium Agricoh ne montre pas d’association entre l’exposition spécifique au butilate et le risque de LNH (Leon et coll., 2019renvoi vers). La présomption de lien reste donc moyenne.
Carbaryl
Concernant le carbaryl, la synthèse de l’expertise collective de 2013 concluait à une présomption faible de lien du fait d’associations mises en évidence dans plusieurs études cas-témoins mais le risque n’était pas clairement démontré dans la cohorte AHS.
Depuis 2013, la revue systématique de la littérature accompagnée d’une méta-analyse a été publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers). Celle-ci rapporte des estimations d’associations entre les LNH et le carbaryl (mRR = 1,7 [1,3-2,3]) à partir des données de deux études cas-témoins déjà prises en compte dans l’expertise 2013.
La méta-analyse de trois cohortes d’agriculteurs publiée en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) ne montre pas d’association entre l’exposition spécifique au carbaryl et le risque de LNH.
Enfin, une méta-analyse publiée en 2019 (Koutros et coll., 2019renvoi vers) examine le rôle de l’exposition à des insecticides spécifiques (dont 2 carbamates) sur le risque de LNH, au sein de trois études cas-témoins réalisées en population générale dans les années 1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins canadienne publiée dans les années 1990 (1 690 cas et 5 131 témoins). Une association positive statistiquement significative est observée entre l’exposition au carbaryl et le risque de LNH (mOR = 1,6 [1,2-2,2]) qui s’estompe après ajustement mutuel sur les autres substances (mOR = 1,2 [0,8-1,6]).
Aucune association entre exposition au carbaryl et LNH n’est mise en évidence dans la dernière analyse de la cohorte AHS (Alavanja et coll., 2014renvoi vers) avec la nouvelle définition de l’entité LNH (incluant LLC et myélome). Cependant, une association est mise en évidence avec l’ancienne définition du groupe LNH (donnée non montrée). Les applicateurs les plus exposés au carbaryl ont un risque élevé de lymphome folliculaire, RR = 2,8 [1,0-7,4] avec une augmentation des risques avec l’exposition dont la tendance est toutefois non significative.
Au regard des nouvelles données la présomption de lien reste faible.
Carbofuran
Comme pour le carbaryl, les données disponibles en 2013 avaient permis de conclure à une présomption faible de lien entre l’exposition au carbofuran et le risque de LNH du fait d’une association mise en évidence dans une étude poolée de trois études cas-témoins tandis qu’une augmentation faible non significative du risque était observée chez les applicateurs de la cohorte AHS exposés aux plus fortes doses de carbofuran.
Depuis 2013, la méta-analyse publiée en 2014 par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) rapporte une association positive entre les LNH et le carbofuran (mRR = 1,7 [1,3-2,3]) à partir des données de deux études cas-témoins déjà prises en compte dans l’expertise 2013.
La méta-analyse de trois cohortes d’agriculteurs publiée en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) ne montre pas d’association entre l’exposition spécifique au carbofuran et le risque de LNH.
Aucune association entre l’exposition au carbofuran et LNH n’est mise en évidence dans la dernière analyse de la cohorte AHS publiée en 2014 (Alavanja et coll., 2014renvoi vers).
Enfin, une analyse poolée publiée en 2019 (Koutros et coll., 2019renvoi vers) combinant les données de trois études cas-témoins réalisées dans les années 1980 aux États-Unis et une étude cas-témoins canadienne publiée dans les années 1990 (1 690 cas et 5 131 témoins) montre un risque élevé de LNH non statistiquement significatif (mOR = 1,3 [1,0-1,7]).
Au regard des nouvelles données la présomption de lien reste donc faible.

Phénoxyherbicides non contaminés

Afin de limiter la confusion due au fait que les préparations commerciales de phénoxyherbicides peuvent être contaminées par des dérivés polychlorinés formés durant le processus de fabrication des dibenzo-dioxines polychlorinés (PCDD) et des dibenzo-furanes polychlorinés (PCDF), l’analyse réalisée en 2013 sur les phénoxyherbicides avait porté sur l’acide 4-chloro-2-méthyl phénoxyacétique (MCPA) et l’acide 2,4-dichlorophénoxy acétique 2,4-D. Les nouvelles données concernant ces composés sont considérées ci-dessous.
2,4-D
L’expertise précédemment publiée en 2013 rapportait une association statistiquement significative entre l’exposition des agriculteurs (hommes et femmes) au 2,4-D et le risque de LNH (en particulier les formes extra ganglionnaires de LNH), dans une étude cas-témoins nichée dans une cohorte d’agriculteurs californiens (Mills et coll., 2005renvoi vers). En revanche, les études cas-témoins individuelles les plus récentes (après 2005) rapportaient des associations non significatives de risque de LNH après exposition au 2,4-D. L’exposition au 2,4-D combinée à celle du malathion montrait un risque significativement augmenté dans une étude canadienne (Hohenadel et coll., 2011renvoi vers). Les auteurs avaient conclu à une présomption de lien moyenne.
Depuis 2013, la méta-analyse publiée par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) montre à partir de cinq études cas-témoins (dont l’étude cas-témoins nichée dans une cohorte) une association positive entre l’exposition au 2,4-D et le risque de LNH (mRR = 1,4 [1,0-1,9]) avec une hétérogénéité inter-études relativement élevée (I2 = 61,5 %). Deux autres méta-analyses se sont focalisées uniquement sur le 2,4-D (Goodman et coll., 2017renvoi vers ; Smith et coll., 2017renvoi vers). La première compile les données de 10 études publiées entre 1991 et 2011 dont les données de la cohorte AHS (de Roos et coll., 2005renvoi vers) et ne montre aucune association entre le risque de LNH et l’exposition (oui/non) au 2,4-D, mRR = 1,0 [0,8-1,2]. La seconde méta-analyse rassemble les résultats de 11 études cas-témoins (dont deux nichées) et une cohorte de professionnels, publiées entre 1992 et 2013 (Smith et coll., 2017renvoi vers). Cette méta-analyse n’inclut pas les données de la cohorte AHS mais celles d’une cohorte menée par Dow Chemicals incluant du personnel employé à la production d’herbicides (Burns et coll., 2001renvoi vers). Les auteurs s’intéressent aux expositions les plus élevées au 2,4-D de chaque étude et identifient une association positive statistiquement significative avec le risque de LNH : mRR = 1,7 [1,1-2,7] avec une hétérogénéité inter-études modérée (I2 = 56 %, test d’hétérogénéité p = 0,009), ce qui requiert une certaine prudence dans l’interprétation des résultats. En effet, cette méta-analyse regroupe des études ayant des méthodes différentes (scénarios d’exposition, évaluation de l’exposition, des résultats, analyses statistiques ou même des populations d’étude). Toutefois, cette étude apporte des preuves d’une relation dose-réponse en comparant les résultats pour des groupes d’exposition élevés à des groupes peu ou pas exposés. Aucun biais majeur dans la conception de l’étude, l’évaluation de l’exposition, la classification des cas ou biais de publication n’ont été détectés.
On peut également noter qu’aucune association statistiquement significative n’est mise en évidence dans l’étude poolée des trois cohortes d’agriculteurs publiées en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers).
En conséquence, la présomption de lien entre l’exposition professionnelle agricole au 2,4-D et le risque de LNH reste considérée comme moyenne. En effet, les nouvelles données suggérant une association positive reposent sur une méta-analyse contenant des études anciennes. D’autre part, aucune nouvelle donnée provenant de cohortes de professionnels ne montre d’association.
MCPA
La précédente version de l’expertise publiée en 2013 a montré qu’aucune étude de cohorte de professionnels n’avait pu mettre en évidence d’association positive statistiquement significative entre une exposition au MCPA et le risque de LNH. La plupart des études cas-témoins émanent du Canada et de pays européens, et plus particulièrement de Suède. Les quatre études suédoises ont montré une augmentation statistiquement significative de risque de LNH chez les professionnels exposés au MCPA. Les autres études cas-témoins européennes et les études canadiennes ont montré des associations non significatives. Les auteurs de l’expertise collective de 2013 concluaient à une présomption faible d’un lien avec le risque de LNH.
Depuis 2013, la méta-analyse publiée par le Circ (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers) montre à partir de cinq études cas-témoins (déjà prises en compte dans l’expertise précédente) une association positive non significative entre l’exposition au MCPA et le risque de LNH (mRR = 1,5 [0,9-2,5]) avec une hétérogénéité inter-études modérée (54,4 %). Aucune association n’est mise en évidence dans l’étude poolée des trois cohortes d’agriculteurs publiées en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers). Aucun autre élément de preuve n’a été collecté.
En conséquence, la présomption de lien entre l’exposition professionnelle agricole au MCPA et le risque de LNH reste faible.
Mécoprop (MCPP)
L’expertise de 2013 a conclu à une présomption faible d’un lien à partir des travaux d’une seule étude cas-témoins bien faite menée au Canada (Cross-Canada Study of Pesticides and Health) montrant des risques élevés de LNH chez les professionnels exposés au mécoprop (MCPP).
Depuis 2013, seule la méta-analyse des trois cohortes d’agriculteurs publiée en 2019 par le consortium Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) a étudié cette matière active et ne retrouve pas d’association avec le risque de LNH.

Glyphosate

Les résultats concernant le glyphosate sont détaillés dans le chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate ».

Données toxicologiques sur des substances actives particulières

L’analyse de la littérature épidémiologique a révélé des présomptions de lien fortes entre la survenue d’hémopathies malignes et l’exposition à certains pesticides organophosphorés (malathion et diazinon) et organochlorés (DDT, lindane). Une focalisation sur ces composés a donc été effectuée au regard de la littérature la plus récente tout en rappelant les conclusions de l’expertise collective Inserm de 2013.

Organophosphorés : malathion et diazinon

La précédente expertise collective avait conclu que certains organophosphorés sont des composés que l’on peut considérer comme génotoxiques et pro-oxydants en lien avec l’activation de certaines voies de signalisation impliquées dans la régulation de la prolifération et de la survie cellulaire (Inserm, 2013renvoi vers).
Des études récentes confirment ces observations. Ainsi, les effets génotoxiques du malathion sont observés sur des lymphocytes périphériques de rats exposés in vitro (Ojha et Gupta, 2015renvoi vers). Le lien avec la production d’espèces réactives de l’oxygène (ERO) a lui aussi été avéré par des études sur le rat Wistar (in vitro et in vivo) mais à doses relativement élevées : la production d’ERO est augmentée dans des lymphocytes exposés in vitro (Ojha et Srivastava, 2014renvoi vers) ou dans des hépatocytes après exposition des animaux adultes pendant 28 jours à une dose de 200 mg/kg/j (Lasram et coll., 2014renvoi vers). Ces traitements ou expositions sont parfois associés à une génotoxicité (Lasram et coll., 2014renvoi vers ; Ojha et Srivastava, 2014renvoi vers ; Ojha et Gupta, 2015renvoi vers) ou à un état pro-inflammatoire (Lasram et coll., 2014renvoi vers). Le Circ, dans un rapport récent, a conclu que le malathion possède des propriétés génotoxiques et pro-oxydantes (Guyton et coll., 2015renvoi vers ; IARC, 2017renvoi vers). Le malathion est aussi décrit comme un agent pro-prolifératif et perturbant la signalisation de récepteurs hormonaux comme celui des androgènes (IARC, 2017renvoi vers).
Pour le diazinon, le travail mené par le Circ (Guyton et coll., 2015renvoi vers ; IARC, 2017renvoi vers) et les publications les plus récentes (Zeinali et coll., 2018renvoi vers) suggèrent que cet insecticide exerce sur le plan mécanistique des effets i) génotoxiques importants in vivo et in vitro (dans de multiples espèces) ; ii) pro-oxydants marqués sur les mêmes modèles mais aussi chez les poissons par altération des fonctions d’enzymes anti-oxydantes, déplétion en glutathion et per-oxydation lipidique ; iii) pro-inflammatoires chez les rongeurs. À ce stade, il est plus difficile de conclure pour le diazinon quant à une stimulation de la prolifération cellulaire, ou à une immunosuppression (IARC, 2017renvoi vers).
En résumé, les mécanismes d’action du malathion et du diazinon caractérisés dans la littérature en lien avec des hémopathies malignes sont principalement la production d’ERO associée à un état inflammatoire et à une génotoxicité. Les propriétés immunosuppressives potentielles du malathion pourraient aussi être à l’origine des hémopathies malignes (IARC, 2017renvoi vers). Des résultats récents suggèrent aussi des effets de perturbation endocrinienne pour le malathion, et des altérations des profils de méthylation de l’ADN pour le diazinon au niveau de sites CpG potentiellement régulateurs de l’expression de gènes suppresseurs de tumeurs comme TP53 ou PTEN (codant une phosphatase inhibant la voie AKT) (Zhang et coll., 2012brenvoi vers ; Zhang et coll., 2012arenvoi vers).

Organochlorés : lindane et DDT

L’expertise collective de 2013 avait conclu sur la base d’études menées sur plusieurs modèles cellulaires et en particulier dans les lymphocytes humains, que le DDT et son métabolite, le DDE, pouvaient être considérés comme des molécules pro-Å“strogéniques et génotoxiques en partie de par la production d’un stress oxydant (Inserm, 2013renvoi vers). Des effets immunomodulateurs ont aussi été observés avec une inhibition de la fonction des cellules NK qui ont pour propriété de lyser les cellules tumorales. Ce type d’inhibition était aussi décrit pour le lindane. Une publication récente confirme son effet génotoxique (Ennaceur, 2017renvoi vers) précédemment évoqué dans l’expertise collective de 2013. Sur le plan mécanistique, le lindane est susceptible d’induire un stress oxydant et d’activer les processus pro-apoptotiques dans des lymphocytes humains (Michalowicz et coll., 2013renvoi vers), ce qui est cohérent avec les effets immunosuppresseurs décrits ci-dessus pour le DDT.
En résumé, les effets mécanistiques des organochlorés (production d’un stress oxydant, apoptose et immunomodulation, génotoxicité) caractérisés dans la littérature à ce jour sont en faveur de la plausibilité d’une relation entre l’exposition chronique de ces composés et l’apparition de pathologies hémato-poïétiques. Par ailleurs, bien que ces composés soient potentiellement persistants, leur capacité d’activer l’expression de cytochromes P450 (probablement par liaison à des récepteurs de xénobiotiques, également facteurs de transcription), pourrait modifier le métabolisme de nombreux organes dont le compartiment lymphocytaire et favoriser un phénotype tumoral (Khan et coll., 2013renvoi vers). Cette hypothèse intéressante mériterait d’être explorée.

Conclusion

Treize méta-analyses ont été publiées sur le lien entre l’exposition aux pesticides et le LNH. Les deux premières méta-analyses sont les plus complètes mais de nature différente, la première fait une revue exhaustive des études cas-témoins ou cohortes publiées puis rapporte des estimations d’associations entre les LNH et 21 familles de pesticides et 80 substances actives tandis que la seconde provient du consortium des cohortes d’agriculteurs et étudie le rôle de l’exposition (14 familles de pesticides et 33 substances actives) sur le risque de survenue de LNH et de ses principaux sous-types. Les autres méta-analyses s’intéressent à des familles de substances actives ou à des substances actives spécifiques : 4 abordent l’exposition à une famille ou à plusieurs familles de substances actives et 6 se focalisent sur une substance active particulière. La dernière s’intéresse spécifiquement à l’exposition d’une catégorie d’agriculteurs (éleveurs). Chacune présente des analyses par sous-type de LNH. Trois analyses de cohortes ont été publiées dont deux à partir des données de l’AHS et une cohorte en population générale (WHI). Enfin, trois études cas-témoins apportent également des résultats probants.
De la première méta-analyse (Schinasi et Leon, 2014renvoi vers), on peut retenir que plusieurs familles de pesticides sont associées positivement avec le risque de LNH (phénoxyherbicides, insecticides carbamates, insecticides organophosphorés). Plusieurs substances actives sont également associées au risque de survenue de LNH (lindane, dicamba, DDT, carbaryl, carbofuran, diazinon, malathion, glyphosate). Cependant, aucun effet dose n’est évalué dans cette étude (effet oui/non). Le risque de lymphome B est associé à l’exposition aux phénoxyherbicides (de même que le lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB)), au glyphosate et au DDT (tout comme le lymphome folliculaire). De la seconde méta-analyse provenant du consortium Agricoh, on retient que la plupart des associations testées sont non statistiquement significatives excepté pour les LNH et le terbufos ou le LDGCB et le glyphosate, après ajustement sur les autres pesticides. Aucun élément d’hétérogénéité entre les résultats des trois cohortes n’est objectivé.
Entre 2013 et 2019, dix autres méta-analyses ont étudié le lien entre une famille spécifique de pesticides ou une substance active et le risque de LNH (deux sur les organochlorés, une sur les organophosphorés, une sur les insecticides carbamates et organophosphorés, trois sur le glyphosate, deux sur le 2,4-D phénoxyherbicide, une sur le pentachlorophénol).
La première sur les organochlorés rapporte une augmentation du risque de LNH avec la famille des organochlorés, et de fortes associations avec le DDE, l’HCH, l’HCB et le chlordane. En revanche, aucune association n’est observée avec le DDT. L’étude récente du NAPP rapporte des associations positives entre plusieurs substances actives organochlorées et différents sous-ensembles de LNH, en particulier pour le lindane, le chlordane et le DDT. Le lindane avec le lymphome folliculaire (LF), le LDGCB et le lymphome lymphocytique, le chlordane avec le LF et le lymphome lymphocytique, et le DDT avec le LDGCB et le lymphome lymphocytique. Cette analyse suggère une hétérogénéité étiologique possible des LNH vis-à-vis de l’exposition aux substances actives étudiées.
Il ressort de la méta-analyse sur les organophosphorés qu’une augmentation statistiquement significative du risque de LNH est observée pour l’exposition au diazinon, mais pas au malathion ni au terbufos. Cette association est significative uniquement pour certains types d’études (cas-témoins ou cas-témoins nichées dans la cohorte). Certains de ces résultats sont retrouvés dans une autre méta-analyse portant sur l’exposition aux insecticides carbamates et organophosphorés, en particulier avec le malathion montrant un risque qui augmente avec la durée de l’exposition rapportée par les agriculteurs. Ces résultats sont également observés pour les sous-types LDGCB et lymphome folliculaire. L’évaluation du rôle du mélange de tous les insecticides organophosphorés et carbamates montre une association entre la durée d’exposition et le risque de LNH.
Concernant les méta-analyses centrées sur l’exposition au glyphosate, on peut retenir que le risque de LNH est augmenté selon les études de 30 à 45 % selon que l’on évalue le risque chez l’ensemble des sujets (exposés versus non exposés) ou uniquement dans les groupes les plus exposés. Dans une étude regroupant les études cas-témoins, les ajustements sur les expositions aux autres pesticides diminuent le risque ce qui n’est pas observé dans la méta-analyse réalisée à partir des données de cohortes d’agriculteurs (pour plus de détails, voir chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »).
Concernant le 2,4-D phénoxyherbicide, les auteurs qui s’intéressent aux expositions les plus élevées au 2,4-D de chaque étude identifient une association positive statistiquement significative avec le risque de LNH. Cependant, une hétérogénéité inter-études modérée incite à une certaine prudence dans l’interprétation des résultats.
La dernière analyse de la cohorte AHS distingue 26 familles de pesticides ou substances actives. L’association positive avec l’exposition au terbufos est retrouvée (sans effet dose-risque). En revanche, les risques de LNH associés à l’exposition au DDT, au lindane augmentent avec le nombre total de jours d’exposition bien qu’aucune association ne soit observée en binaire (exposé/non exposé). Des associations entre certaines substances actives et des sous-types de lymphomes sont observées mais elles reposent sur un petit nombre de sujets exposés comme le lymphome folliculaire et lindane, diazinon.
À noter que la dernière analyse de la cohorte AHS centrée sur le glyphosate ne met pas en évidence de risque élevé avec les LNH ou ses principaux sous-types (voir chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »).
Dans la seule cohorte féminine en population générale publiée, les femmes de moins de 65 ans ayant appliqué au moins une fois des insecticides présentaient une élévation du risque de LDGCB. Ces résultats méritent d’être répliqués pour confirmer le lien entre l’exposition domestique aux insecticides et le risque de survenue des différents sous-types de LNH.
De même, une étude cas-témoins permet d’apporter de l’information sur l’exposition à 27 produits chimiques environnementaux corrélés, mesurés dans la poussière domestique avec des résultats montrant une association positive entre l’index d’exposition mesuré et le risque de LNH et certains sous-types (lymphome folliculaire et lymphome de la zone marginale).
Enfin, il faut mentionner de nouveaux travaux étudiant le rôle de l’exposition professionnelle agricole aux pesticides sur le devenir du patient au cours de son traitement montrant que l’exposition professionnelle agricole aux pesticides est associée à un échec du traitement, à la survie sans évènement et à la survie globale des patients atteints de LDGCB.
La présomption de lien entre LNH et pesticides reste forte (++) et la synthèse actualisée concernant les familles et substances actives impliquées dans la survenue de LNH est décrite dans le tableau 11.IIrenvoi vers. Les niveaux de présomption qui étaient forts en 2013 restent inchangés (lindane, DDT, organophosphorés et malathion), en revanche les niveaux de présomption pour le diazinon et le chlordane sont plus élevés qu’en 2013 avec un passage au niveau fort pour le diazinon. Pour le dicamba, un niveau de présomption faible est rapporté pour la première fois. Le niveau de présomption reste faible (±) pour les substances actives suivantes : carbaryl, carbofuran, MCPA, mécoprop. La littérature analysée n’a pas permis de réévaluer le niveau de risque considéré comme faible en 2013 pour les substances actives suivantes : atrazine, aldrine, coumaphos, chlorpyrifos, fonofos.
Des éléments de preuves étaient également décrits dans l’expertise 2013 concernant des populations particulières chez qui un risque accru de LNH était observé pour des expositions à des familles ou substances particulières de pesticides. Il s’agit en particulier des agriculteurs porteurs d’une translocation chromosomique t(14 ;18) mais aussi des agriculteurs présentant un antécédent d’asthme ou d’hémopathie maligne (voir addenda en fin de chapitre : tableau A11.IIrenvoi vers).

Myélome multiple

Le myélome multiple (MM) est une hémopathie lymphoïde maligne d’origine plasmocytaire caractérisée par une expansion aberrante de plasmocytes dans la moelle osseuse, la présence d’une protéine monoclonale non IgM (sérique et/ou urinaire) et de lésions osseuses (lacunes à l’emporte-pièce ou déminéralisation osseuse).

Tableau 11.II Familles et substances actives impliquées dans les excès
de risque significatifs de LNH

Famille
Substances actives
Populations concernées par un excès de risque
Présomption
d’un lien
Organochlorés
  
Lindane (γHCH)
Applicateurs, agriculteurs
++
 
Éleveurs (mélange d’isomères d’HCH)
+
DDT
Agriculteurs
++
 
Professionnels
+
Chlordane1
Agriculteurs
+
Dicamba1
Agriculteurs
±*
Aldrine2
Professionnels
±
DDT + Malathion
Professionnels
±
Organophosphorés
  
Sans distinction
Agriculteurs
++
 
Personnes exposées (professionnellement
ou par usage domestique)
+
 
Professionnels
±
Terbufos
Applicateurs
+
Diazinon1
Agriculteurs
++
Malathion
Agriculteurs
++
 
Personnes exposées (professionnellement ou par usage domestique)
±
 
Professionnels
±
Coumaphos2
Agriculteurs
±
Chlorpyrifos2
Agriculteurs
±
Fonofos2
Agriculteurs
±
Carbamates/Dithiocarbamates
  
Sans distinction (carbamates)
Agriculteurs
+
 
Professionnels
±
Carbaryl
Agriculteurs
±
 
Professionnels
±
Carbofuran
Agriculteurs
±
Carbaryl + malathion
Professionnels
±
Butilate
Applicateurs
+
 
Agriculteurs
±
Triazines
  
Sans distinction
Agriculteurs
±
 
Ouvriers en industrie de production
+
Atrazine2
Agriculteurs
±
Phénoxyherbicides non contaminés par les dioxines
  
2,4-D
Agriculteurs
+
 
Professionnels
±
2,4-D + malathion
Professionnels
±
MCPA
Professionnels
±
Mécoprop
Professionnels
±
Mécoprop + malathion
Professionnels
±
Aminophosphonate glycine
  
Glyphosate1
Agriculteurs ou professionnels
+
Glyphosate + malathion3
Professionnels
±

1Matière active pour laquelle le niveau de preuve a été élevé dans l’actuelle édition comparativement à l’édition 2013
2conclusions de l’expertise collective de 2013. Pas de nouvelles informations
3voir chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »
++ au moins une méta-analyse et au moins une étude de cohorte
+ au moins une étude de bonne qualité (cohorte et/ou plusieurs études cas-témoins)
± une étude cas-témoins ; ± * deux études cas-témoins positives mais une méta-analyse négative de trois cohortes : « deux études cas-témoins positives mais une méta-analyse négative de trois cohortes » Données nouvelles

Le myélome multiple (MM) est une des hémopathies malignes les plus fréquentes en France. On estime à 5 442 le nombre de nouveaux cas en France métropolitaine en 2018. Les TSM sont respectivement de 4,2 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et de 2,9 chez la femme (rapport hommes/femmes égal à 1,4). L’âge médian du MM au diagnostic est de 70 ans chez l’homme et de 74 ans chez la femme. Les TSM ont augmenté entre 1995 et 2018 avec une variation annuelle moyenne de +1,1 % chez l’homme et +0,6 % chez la femme. Entre 1995 et 2018, le nombre de cas de MM passe de 1 440 à 2 822 chez les hommes et de 1 510 à 2 620 chez les femmes. Cette augmentation, de 96 % chez l’homme et 74 % chez la femme, est attribuable aux changements démographiques pour respectivement 58 % et 43 % alors que plus d’un tiers de l’augmentation de l’incidence (respectivement 38 % et 31 %) serait expliqué par une augmentation du risque de survenue de la maladie dans la population, soit par un meilleur diagnostic chez les patients âgés par exemple, soit par l’augmentation de la prévalence de l’exposition à des facteurs de risque (connus ou inconnus) de la maladie, dont les facteurs environnementaux.
Comme évoqué dans l’introduction de ce chapitre, le MM est regroupé selon la classification OMS des hémopathies malignes avec les hémopathies lymphoïdes B à cellules matures (la cellule « d’origine » du MM dérive du plasmocyte, un lymphocyte B qui est capable de produire des anticorps). Historiquement, le MM a pourtant été étudié séparément car c’est une entité reconnue de longue date et considérée comme distincte, c’est pourquoi une partie distincte pour cette maladie a été maintenue dans cette mise à jour de l’expertise collective. Pour autant, certaines études récentes se focalisant sur l’effet d’un principe actif de pesticide en particulier ont regroupé les cas de MM avec le groupe des LNH comme dans la dernière analyse de la cohorte AHS centrée sur l’exposition au glyphosate (Andreotti et coll., 2018renvoi vers).

Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013

Les études épidémiologiques portant spécifiquement sur le lien entre pesticides et le MM sont moins nombreuses que celles qui concernent les LNH. Pour autant, à partir des données de six méta-analyses et deux cohortes (AHS et une cohorte nord-européenne), l’expertise collective Inserm de 2013 a conclu à la présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles chimiques ou de substances actives, chez les agriculteurs et les applicateurs de pesticides et le risque de survenue de MM. Ces méta-analyses n’étaient pas totalement indépendantes car l’on retrouve un bon nombre d’études épidémiologiques dans plusieurs d’entre elles, certaines étant des mises à jour d’anciennes analyses.
Toutes les méta-analyses montrent une augmentation de risque de survenue de MM allant de 9 à 39 % chez les professionnels exposés aux pesticides comparés à la population générale. Cette augmentation de risque atteint le seuil de significativité statistique dans 3 méta-analyses sur les 4 portant sur des agriculteurs. L’augmentation est à la limite de la significativité statistique pour la quatrième méta-analyse chez les agriculteurs ainsi que pour celle reprenant les études menées dans le secteur agricole et non agricole. L’augmentation n’est pas significative dans la méta-analyse concernant l’exposition des travailleurs en industrie de production de pesticides. Les plus fortes augmentations du risque ont été observées, de manière significative, dans la méta-analyse portant sur les agriculteurs ayant travaillé au moins 10 ans dans une ferme ainsi que pour ceux qui ont été exposés au DDT.
Dans la cohorte AHS, l’incidence est augmentée sans toutefois atteindre le seuil de significativité statistique chez les applicateurs professionnels, exposés aux pesticides dans leur ensemble. Une stratification par État (Iowa et Caroline du Nord) a mis en évidence une augmentation significative du risque de MM chez les applicateurs en Caroline du Nord avec une augmentation des ratios d’incidence (41 %) et de mortalité (89 %) standardisés alors que cette augmentation reste non significative pour l’État de l’Iowa. Pour les conjoints des applicateurs privés pris dans leur ensemble, une diminution (non significative) de risque a été rapportée lors de la dernière réévaluation des données de même que pour la sous-cohorte de Caroline du Nord. Les taux de mortalité dus aux MM suivent la même tendance que les taux d’incidence.
Parmi les cohortes autres que l’AHS, l’étude nord-européenne a montré une augmentation modeste mais significative et consistante de l’incidence du MM chez les agriculteurs par rapport à la population générale : pour les deux sexes et pour tous les pays nordiques excepté le Danemark. Une légère augmentation significative du risque de MM a également été observée chez les hommes pratiquant le métier de jardinier. En France, un risque significativement augmenté de 59 % de décès par MM a été observé chez des agriculteurs et ouvriers agricoles. Chez les utilisatrices de pesticides à usage agricole en Grande-Bretagne, des augmentations du risque de MM et décès par MM ont été rapportées mais avec des intervalles de confiance très larges. Cependant, des diminutions de risque (incidence ou mortalité) de MM ont été observées dans d’autres études (Amérique du Nord et Centrale, Italie du Nord, Irlande, Costa-Rica, Australie).
Les cohortes de travailleurs exposés principalement à une classe de pesticides ou à un pesticide bien spécifique sont peu nombreuses. Elles portent généralement sur un nombre de cas très limité ce qui rend extrêmement difficile l’étude de l’existence éventuelle d’une relation entre ce type d’exposition et les MM. Signalons toutefois que les résultats de l’AHS suggèrent que le risque de MM pourrait être augmenté suite à une exposition à la perméthrine (seul agent pour lequel une augmentation significative de risque a été observée à la plus forte dose). Une tendance à l’augmentation de risque avec certaines intensités d’exposition au glyphosate est observée sans être toutefois significative. L’utilisation d’indicateurs précliniques de MM comme le MGUS (Monoclonal gammopathy of undetermined significance), pourrait constituer une approche intéressante pour évaluer des hypothèses sur l’étiologie des myélomes multiples étant donné que l’exposition aux pesticides semble induire plus de cas de MGUS que de MM proprement dit.

Nouvelles données épidémiologiques

Depuis l’expertise collective de l’Inserm publiée en 2013, cinq méta-analyses ont été publiées, deux à partir de données de trois cohortes d’agriculteurs, une spécifiquement centrée sur l’exposition au glyphosate et deux analyses poolées d’études cas-témoins dont une abordant des expositions à des pesticides spécifiques (carbaryl, captane et DDT).

Méta-analyses

Une méta-analyse récemment publiée par le consortium des cohortes d’agriculteurs, Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) étudie le rôle de l’exposition (de façon binaire : oui/non) entre 14 familles de pesticides et 33 substances actives et le risque de MM. Cette étude inclut également les LNH (voir partie LNH). À partir des données de trois cohortes de travailleurs agricoles (États-Unis – AHS, France – AGRICAN et Norvège – CNAP, totalisant plus de 300 000 sujets, 561 cas de MM et 3,5 millions de personnes-années à risque), les auteurs n’observent aucune association statistiquement significative entre l’exposition aux familles ou substances étudiées et le risque de MM. Des augmentations de risque sont suggérées lors de l’utilisation de quelques principes actifs, dont le dicamba (mHR = 1,21 [0,93-1,59], 179 cas exposés), sans preuve d’hétérogénéité des effets parmi les cohortes (I2 = 0 %). Les HR spécifiques à chaque cohorte pour l’utilisation de dicamba et de MM étaient : HR = 1,30 [0,70-2,43] dans AGRICAN, HR = 1,15 [0,79-1,67] dans le CNAP et HR = 1,28 [0,77-2,13] dans l’AHS, avec respectivement 40, 92 et 47 cas exposés.
À partir des trois cohortes évoquées ci-dessus, une autre méta-analyse du consortium Agricoh (El-Zaemey et coll., 2019renvoi vers) examine le risque d’hémopathie maligne chez les éleveurs et ne montre aucune association avec le MM à l’exception d’un risque significativement élevé de MM ou plasmocytome dans l’AHS spécifique aux éleveurs de volailles (mRR = 1,8 [1,1-3,0]) ainsi qu’aux éleveurs de moutons (mRR = 3,5 [1,7-7,5]). Ces résultats n’ont pas été systématiquement rapportés dans la littérature mais ont déjà été observés chez les éleveurs de moutons y compris dans la cohorte AHS.
La méta-analyse sur le glyphosate de Chang et Delzell en 2016 repose sur trois études cas-témoins publiées entre 1993 et 2013 et deux analyses différentes des mêmes données de la cohorte AHS publiées en 2005 (de Roos et coll., 2005renvoi vers) puis en 2015 (Sorahan, 2015renvoi vers). Un risque augmenté de MM, statistiquement significatif, était observé chez les agriculteurs exposés au glyphosate (mRR = 1,5 [1,0-2,2]) en utilisant l’analyse de 2005 de la cohorte AHS et un risque de magnitude comparable (mRR = 1,4 [1,0-1,9]), en utilisant l’analyse de Sorahan publiée en 2015. Cette méta-analyse montrait une absence d’hétérogénéité des effets entre les études (I2 = 0 %) et une absence de biais de publication identifiable. Cette association était robuste à plusieurs autres analyses secondaires.
Une analyse poolée du consortium InterLymph regroupe les données de cinq études cas-témoins réalisées entre les années 1980 et le début des années 2000 en population générale (1 959 cas et 6 192 témoins) afin d’étudier le rôle de la profession et en particulier de celle d’agriculteur sur le risque de survenue du MM (Perrotta et coll., 2013renvoi vers). La profession d’agriculteur n’était pas associée au risque de MM après ajustement sur le type d’étude, le sexe, l’âge et l’origine ethnique. Toutefois, une association avec une valeur de risque modérée à la limite de la significativité statistique est mise en évidence entre la profession de jardinier/ouvrier de pépinière et le risque de survenue d’un MM (mOR = 1,5 [1,0-2,3]).
Une autre analyse poolée nord-américaine (Presutti et coll., 2016renvoi vers) rassemble les données de trois études cas-témoins réalisées en population générale en Iowa, au Nebraska et au Canada (547 cas et 2 700 témoins) et porte plus spécifiquement sur les expositions à certaines familles ou substances actives de pesticides. Les utilisations de carbaryl, de captane ou de DDT sont toutes trois associées à un risque élevé de MM avec des risques statistiquement significatifs respectivement : mOR = 2,0 [1,3-3,2], 2,0 [1,0-3,8] et 1,4 [1,1-2,0]. Dans une analyse restreinte à l’étude canadienne, l’exposition cumulée aux substances est prise en compte : pour le carbaryl, une augmentation de risque est rapportée pour les expositions ≤ 10 jours et > 10 jours durant la vie par rapport aux non exposés (OR = 3,2 [1,4-7,2] et OR = 2,4 [1,1-5,6]). Pour le captane, une exposition ≤ 17,5 jours correspond à un risque élevé OR = 3,5 [1,3-9,3] alors que le risque reste élevé mais non significatif pour une utilisation > 17,5 jours OR = 2,3 [0,8-6,4]. Concernant l’exposition cumulée au DDT, on observe une relation dose-effet significative p = 0,04 avec des risques modérément élevés mais non significatifs pour une utilisation > 22 jours (OR = 1,9 [0,95-3,9]).

Cohortes

Une ré-analyse plus récente de la cohorte AHS (Andreotti et coll., 2018renvoi vers) s’adresse spécifiquement à l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence d’association avec le MM.
La dernière analyse de la cohorte AHS (Alavanja et coll., 2014renvoi vers) abordant plusieurs familles de substances actives, met en évidence une association entre l’exposition à la perméthrine et le risque de MM (RR = 2,2 [1,4-3,5]) avec une tendance selon le nombre de jours cumulé d’utilisation (terciles : RR = 1,0 (réf), RR = 1,4 [0,8-2,7]), RR = 3,1 [1,5-6,2] p de tendance = 0,002).
Plus récemment, une analyse de l’exposition professionnelle aux pesticides dans la cohorte AGRICAN a été publiée (Tual et coll., 2019renvoi vers). Cette étude montre un risque élevé de MM chez les agriculteurs ayant commencé à utiliser des pesticides sur les cultures dans les années 1960, en particulier chez ceux appliquant des pesticides sur du maïs (≥ 20 ans : RR = 1,7 [1,1-2,8], p de tendance < 0,01) et ceux qui utilisent les insecticides sur les animaux (RR = 1,5 [1,1-2,0]), en particulier chez les éleveurs de chevaux (≥ 10 ans : RR = 2,8 [1,2-6,3], p de tendance = 0,01).
Par ailleurs ces résultats montrent que l’incidence des cancers dans la cohorte AGRICAN comparée à celle observée en population générale (Lemarchand et coll., 2017renvoi vers) qui a montré un taux d’incidence plus élevé de MM chez les hommes et les femmes inclus dans la cohorte avec des ratios standardisés d’incidence significatifs dans les deux sexes (hommes, SIR = 1,4 [1,2-1,6] ; femmes, SIR = 1,3 [1,0-1,5]).

Cas-témoins

Une étude cas-témoins canadienne publiée en 2013 (Kachuri et coll., 2013renvoi vers) a contribué à l’analyse poolée décrite ci-dessus et publiée par Presutti (Presutti et coll., 2016renvoi vers). En plus des résultats évoqués ci-dessus dans l’analyse poolée, cette étude basée sur 342 cas et 1 357 témoins, apporte de l’information sur plusieurs expositions aux pesticides, analyse le nombre de pesticides utilisés et le nombre de jours par an d’utilisation des pesticides, ce qui caractérise mieux l’exposition telle qu’elle se produit en milieu professionnel. Des tendances positives du risque de MM sont observées avec le nombre de pesticides utilisés, pour les fongicides (p de tendance = 0,04) et les pesticides classés comme « cancérogènes probables » par le Circ (p de tendance = 0,03). Des risques accrus de MM sont observés chez les hommes ayant déclaré utiliser au moins un carbamate (OR = 1,9 [1,2-3,3]), un phénoxyherbicide (OR = 1,6 [1,1-2,3]) et trois organochlorés ou plus (OR = 2,2 [1,1-4,7]). De même, l’utilisation de l’herbicide mécoprop (utilisation supérieure à 2 jours par an) était également significativement associée au MM (OR = 2,2 [1,0-4,5]).

Conclusion

Depuis l’expertise collective de l’Inserm publiée en 2013, cinq méta-analyses ont été publiées, deux à partir de données de trois cohortes d’agriculteurs, une spécifiquement centrée sur l’exposition au glyphosate et deux analyses poolées d’études cas-témoins dont une abordant des expositions à des pesticides spécifiques (carbaryl, captane et DDT). Les deux méta-analyses réalisées à partir des données de trois cohortes de travailleurs agricoles suggèrent des associations modérées avec l’usage de certaines substances actives mais aucune association statistiquement significative n’est mise en évidence entre l’exposition à la plupart des familles ou substances étudiées et le risque de MM. En revanche, un risque significativement élevé chez les éleveurs de volailles ou de moutons est observé. Ce risque avait déjà été mis en évidence dans la cohorte AHS. Les deux analyses poolées du consortium InterLymph réalisées à partir d’études cas-témoins des années 1980 à 2000 réalisées en population générale montraient que la profession de jardinier/ouvrier de pépinière était associée au risque de survenue d’un MM, à la limite de la significativité statistique (mais pas la profession d’agriculteur) et que les utilisations de carbaryl, de captane ou de DDT étaient toutes trois associées à un risque élevé de MM.
Concernant le glyphosate, une méta-analyse d’études cas-témoins montrait un risque élevé de MM statistiquement significatif chez les agriculteurs exposés au glyphosate avec une absence d’hétérogénéité dans les résultats des études et une absence de biais de publication identifiable. Cette association était robuste à plusieurs analyses secondaires. En revanche, la récente ré-analyse de la cohorte AHS ne met pas en évidence d’association entre l’exposition au glyphosate et le risque de MM.
La dernière analyse de la cohorte AHS met en évidence une association statistiquement significative entre l’exposition à la perméthrine et le risque de MM, avec des risques qui augmentent avec l’exposition en nombre de jours d’exposition vie entière (p de tendance = 0,002).
La cohorte AGRICAN montre un risque élevé de MM chez les agriculteurs et en particulier ceux ayant commencé à utiliser des pesticides sur les cultures dans les années 1960, en particulier chez ceux appliquant des pesticides sur du maïs et ceux qui utilisent les insecticides sur les animaux.
Enfin, une étude cas-témoins canadienne montre des tendances positives du risque de MM avec le nombre de pesticides utilisés, pour les fongicides et les pesticides classés comme « cancérogènes probables » par le Circ. Les hommes ayant déclaré utiliser au moins un pesticide carbamate, un phénoxyherbicide ou trois organochlorés ou plus avaient un risque accru de MM. L’herbicide mécoprop (utilisation supérieure à 2 jours par an) était également significativement associé au risque de MM.
En conséquence, la présomption d’un lien entre exposition professionnelle aux pesticides et MM reste forte car basée sur plusieurs méta-analyses de bonne qualité montrant des associations statistiquement significatives (tableau 11.IIIrenvoi vers).

Tableau 11.III Présomption d’un lien entre exposition aux pesticides et myélome multiple

Exposition
Populations concernées
par un excès de risque
Présomption d’un lien
Pesticides (sans distinction)
Agriculteurs, applicateurs
++
 
Éleveurs
+

++ d’après les résultats de 6 méta-analyses et de deux cohortes prospectives (AHS et cohorte nord-européenne) (2013)
+ d’après les résultats d’une méta-analyse réalisée à partir de trois cohortes Données nouvelles

Le niveau de preuve pour distinguer les substances actives en lien avec le MM est plus faible (tableau 11.IVrenvoi vers). Cependant, on peut noter une association positive avec glyphosate dans une méta-analyse (études cas-témoins) qui n’est cependant pas retrouvée dans la méta-analyse des trois cohortes d’agriculteurs (États-Unis, France, Norvège), ni la dernière analyse de la cohorte AHS. L’exposition à la perméthrine est également associée à un risque accru de MM, avec des risques qui augmentent avec l’exposition (AHS). Cette exposition entraîne des altérations des paramètres hématologiques pouvant indiquer une hématopoïèse perturbée, ce qui apporte des arguments à la plausibilité biologique de l’association observée entre l’utilisation de perméthrine et le risque de MM chez les applicateurs de pesticides (Shearer et coll., 2019renvoi vers). On peut citer les associations rapportées avec le carbaryl, le captane et le DDT qui reposent uniquement sur une étude cas-témoins bien faite. Pour ces molécules la présomption de lien est considérée comme faible (« ± »).

Tableau 11.IV Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque de myélome multiple

Famille
Substances actives
Populations concernées
par un excès de risque
Présomption d’un lien
Organochlorés
  
DDT
Population générale
±
Carbamates
  
Carbaryl
Population générale
±
Pyréthrinoïdes
  
Perméthrine
Applicateurs
+
Aminophosphonate glycine
  
Glyphosate
Agriculteurs
± a
Autres
  
Captane
Population générale
±

+ d’après les résultats d’une cohorte en 2013, confirmé au suivi (AHS) Données nouvelles
± d’après les résultats d’une analyse « poolée » de trois études cas-témoins Données nouvelles
± a d’après les résultats d’une méta-analyse de trois études cas-témoins et deux analyses de la cohorte AHS qui se recoupent Données nouvelles

Lymphome de Hodgkin

Le lymphome de Hodgkin (LH) est une maladie qui atteint les ganglions superficiels ou profonds sur lesquels l’histologie affirme le diagnostic d’une prolifération monoclonale de lymphocytes B composée en proportion variable de cellules mononucléées de Hodgkin, de cellules plurinucléées de Reed-Sternberg, au sein d’un infiltrat réactionnel composite. Le LH représente environ 10 % des lymphomes avec un nombre de nouveaux cas en 2018 estimé en France à 2 130 cas. Les taux d’incidence standardisés monde sont respectivement de 3,7 et 2,7 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France métropolitaine (rapport hommes/femmes égal à 1,4). L’âge médian de survenue du LH est de 33 ans chez la femme et de 38 ans chez l’homme. Les taux d’incidence augmentent entre 1990 et 2018 de 1,2 % en moyenne par an chez l’homme et de 1,7 % chez la femme. La majeure partie de cette tendance à la hausse est attribuable à une augmentation du risque alors qu’une faible partie est due à des changements démographiques (Le Guyader-Peyrou et coll., 2019renvoi vers).

Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013

Les données épidémiologiques concernant le lien entre pesticides et le LH sont très peu nombreuses par rapport aux LNH.
Entre 1992 et 2009, 4 méta-analyses ont été publiées : une d’entre elles concerne spécifiquement le LH et les trois autres traitent de l’ensemble des cancers. Trois méta-analyses portent sur une exposition dans le secteur professionnel agricole et une concerne l’exposition de travailleurs en industrie de production de pesticides. Les résultats des méta-analyses soulignent toutes un excès de risque de survenue de LH allant de 9 % à 25 % chez les professionnels exposés aux pesticides comparés à la population générale, cette augmentation de risque n’atteint toutefois le seuil de significativité statistique que dans 2 méta-analyses sur les 4. Ces méta-analyses ne sont pas totalement indépendantes (réactualisation) et un bon nombre d’études épidémiologiques se retrouvent dans plusieurs d’entre elles. Notons que la combinaison des études portant sur des femmes n’a pas montré d’augmentation significative de risque.
Au sein de la cohorte AHS, l’incidence du LH chez les exploitants agricoles applicateurs de pesticides, chez les applicateurs professionnels, et chez leurs conjoints, exposés aux pesticides dans leur ensemble, n’est pas différente de celle de la population générale.
Sur les neuf autres études de cohortes, l’étude européenne qui fournit des données de suivi de 15 millions d’individus provenant de 5 pays nordiques (Suède, Norvège, Islande, Danemark et Finlande) a montré une très légère augmentation d’incidence de maladie de Hodgkin chez les agriculteurs de sexe masculin et une augmentation plus forte et statistiquement significative chez les agricultrices. Aucune des autres études européennes (Italie, Grande-Bretagne et Irlande) n’a présenté d’augmentation significative de risque de LH chez les utilisateurs de pesticides et travailleurs dans le secteur agricole. Une des deux études nord-américaines a mentionné une diminution (non significative) de risque de LH chez des agriculteurs canadiens alors que l’autre indique un risque accru de façon non significative de mortalité au sein d’une cohorte d’applicateurs de pesticides aériens.
Les données épidémiologiques disponibles ciblant des substances actives sont rares. Elles portent sur des nombres de cas extrêmement faibles et sont insuffisantes pour conclure quant aux risques de LH que pourraient présenter certaines des substances actives.
C’est ainsi qu’à partir des données disponibles en 2013, l’expertise collective Inserm de 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) avait conclu à la présomption faible (±) d’un lien entre l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles chimiques ou de substances actives, dans le secteur professionnel agricole et le risque de survenue de LH.

Nouvelles données épidémiologiques

Depuis la précédente édition de l’expertise collective de l’Inserm publiée en 2013, une méta-analyse spécifiquement centrée sur l’exposition au glyphosate a été publiée. De même, une mise à jour de la cohorte AHS a également été publiée sur l’exposition au glyphosate. Enfin, une étude cas-témoins canadienne a investigué les facteurs de risque du LH et en particulier le rôle de l’exposition aux pesticides.

Méta-analyses

Une méta-analyse portant spécifiquement sur le glyphosate (Chang et Delzell, 2016renvoi vers) étudie conjointement 2 études cas-témoins publiées entre 2009 et 2012 et ne met pas en évidence d’association entre le risque de LH et l’exposition au glyphosate chez les agriculteurs (mOR = 1,1 [0,7-1,6]). Pour autant, les données disponibles reposent sur de faibles effectifs (6 cas pour l’une et 38 cas pour l’autre).

Cohortes

Une ré-analyse plus récente de la cohorte AHS (Andreotti et coll., 2018renvoi vers) s’adresse spécifiquement à l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence d’association avec le LH. Les données reposent sur un effectif limité de cas exposés, ce qui ne permet pas de conclure définitivement car l’étude manque de puissance.

Cas-témoins

Une étude cas-témoins réalisée au Canada à partir de 316 cas et 1 506 témoins en population générale (Karunanayake et coll., 2012renvoi vers) ne retrouve pas d’association entre le risque de LH et l’exposition aux principaux pesticides étudiés excepté au chlorpyrifos (OR = 4,4 [1,3-14,7]) mais ce résultat repose sur 6 exposés chez les cas (1,9 %) et 6 exposés chez les témoins (0,4 %). Aucun effet dose n’a été observé. Une seconde analyse de cette étude a été publiée (Navaranjan et coll., 2013renvoi vers) pour prendre en compte la notion d’exposition multiple aux pesticides et orienter l’analyse sur les pesticides classés comme potentiellement ou probablement cancérogènes par le Circ. Le risque de LH est élevé chez les sujets ayant déclaré avoir utilisé au moins cinq insecticides (OR = 1,9 [0,9-3,8]) et, de façon plus marquée, chez les sujets de moins de 40 ans ayant déclaré avoir utilisé deux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase (OR = 3,2 [1,0-9,3]). D’autres risques élevés de LH sont observés en lien avec l’exposition aux fongicides chez les sujets de moins de 40 ans. Un risque élevé était associé à l’utilisation d’au moins trois pesticides classés probablement cancérogènes par le Circ chez l’être humain (OR = 2,5 [1,1-5,8]), mais sans augmentation du risque associé à l’utilisation de pesticides possiblement cancérogènes (classement du Circ).

Conclusion

La littérature scientifique publiée depuis 2013 est relativement peu abondante avec seulement trois études dont une méta-analyse (basée sur deux études cas-témoins) et une mise à jour de la cohorte AHS, toutes deux centrées sur l’exposition au glyphosate et basées sur des effectifs faibles, qui ne montrent aucune association avec l’exposition au glyphosate. La troisième étude est une étude cas-témoins canadienne en population générale qui montre une association avec le chlorpyrifos et repose également sur de faibles effectifs. Une seconde analyse de cette étude rapporte un risque élevé de LH associé à l’utilisation d’au moins trois pesticides classés comme « probablement cancérogènes » chez l’être humain par le Circ. Enfin, le risque chez les sujets de moins de 40 ans ayant déclaré avoir utilisé deux inhibiteurs de l’acétylcholinestérase était également augmenté significativement.
En conséquence, la présomption d’un lien entre exposition professionnelle aux pesticides et LH n’est pas modifiée (tableau 11.Vrenvoi vers).

Tableau 11.V Présomption d’un lien entre exposition aux pesticides et lymphome de Hodgkin

Exposition
Populations concernées
par un excès de risque
Présomption d’un lien
Pesticides (sans distinction)
Professionnels du secteur agricole
±

± d’après les résultats de 4 méta-analyses et d’une cohorte prospective (AHS) en 2013 ; et d’une méta-analyse (deux études cas-témoins), de la mise à jour de la cohorte AHS et d’une étude cas-témoins canadienne

Leucémies

Les leucémies sont des proliférations monoclonales de cellules du tissu hématopoïétique (tel que la moelle osseuse), bloquées à différents stades de différenciation et circulant dans le sang. Le type de leucémie dépend du type de cellule sanguine transformée (lymphoïde/myéloïde) et de la croissance rapide ou lente de cette dernière (leucémie aiguë ou chronique). Au sein de chaque groupe de leucémies (lymphoïde ou myéloïde), de nombreux sous-types sont identifiés selon des données morphologiques, immuno-phénotypiques, génétiques et cliniques.
La leucémie survient le plus souvent chez les adultes de plus de 55 ans, mais il s’agit également du cancer le plus répandu chez les enfants de moins de 15 ans (voir chapitre « Cancers de l’enfant »). Les deux types les plus fréquents de leucémie sont la leucémie lymphoïde chronique regroupée aujourd’hui avec le lymphome lymphocytique (LLC/LL) en une seule entité (respectivement 4 et 2 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France ; 4 700 nouveaux cas en 2018) et la leucémie aiguë myéloïde (LAM) (respectivement 3 et 2 pour 100 000 personnes-années chez l’homme et la femme en 2018 en France ; 3 450 nouveaux cas en 2018). D’autres formes sont plus rares comme la leucémie/lymphome lymphoblastique à cellules précurseurs (900 nouveaux cas en France en 2018), leucémie myéloïde chronique (870 nouveaux cas en 2018), ou la leucémie à tricholeucocytes (300 nouveaux cas en 2018). Les tendances de l’incidence sont à la hausse pour la leucémie aiguë myéloïde (LAM) (variation annuelle moyenne d’environ +1 % dans les deux sexes) et la leucémie à tricholeucocytes chez l’homme (cette leucémie rare étant 5 fois plus fréquente chez l’homme que chez la femme) (Le Guyader-Peyrou et coll., 2019renvoi vers).
La classification internationale des hémopathies malignes publiée et mise à jour régulièrement par l’OMS intègre des données morphologiques, immunophénotypiques, génétiques et cliniques dans le but de définir des entités biologiquement homogènes et cliniquement pertinentes (Swerdlow et coll., 2017renvoi vers). Le classement des leucémies est basé sur l’appartenance des blastes à une lignée lymphoïde ou myéloïde. Or la littérature épidémiologique sur les facteurs de risque n’a pas toujours distingué ces différentes entités. C’est pour cette raison que cette partie distincte a été conservée dans la présente expertise. Pour autant, les principales études depuis 2013 font bien la distinction entre les différents types de leucémies et la plupart des analyses présentées dans cette partie concernent soit les leucémies lymphoïdes chroniques aujourd’hui regroupées avec les LNH et les leucémies aiguës myéloïdes qui représentent la forme la plus fréquente des leucémies myéloïdes. La leucémie à tricholeucocytes, un sous-type de leucémie rare, regroupé avec les hémopathies lymphoïdes et connu depuis plusieurs décennies, a fait l’objet de quelques études. On assiste aujourd’hui à la publication d’études portant soit sur des entités de leucémies spécifiques, soit sur des substances actives spécifiques, soit un croisement des deux.

Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013

Les données épidémiologiques concernant le lien entre pesticides et leucémies regroupent sept méta-analyses publiées entre 1992 et 2009 (3 sur l’exposition dans le secteur professionnel agricole, 2 dans le secteur industriel de production de pesticides et 2 dans le secteur professionnel agricole et non agricole). Ces études rapportent une augmentation du risque de survenue de leucémies allant de 7 % à 43 % chez les professionnels exposés aux pesticides comparé à la population générale. Dans trois des sept méta-analyses, cette augmentation de risque était statistiquement significative, les résultats étaient à la limite du seuil de significativité statistique dans deux autres, et l’augmentation du risque était non significative pour les deux dernières. La plus forte augmentation du risque a été observée pour les travailleurs en industrie de production de pesticides avec un excès de risque de survenue de leucémies de 43 %.
Les résultats de ces différentes méta-analyses ne sont pas convergents, que l’on considère le type de leucémie étudié, le groupe d’exposition (agriculteur, industriel) ou le type d’étude épidémiologique (cas-témoins, cohortes). Par exemple, sur les 4 méta-analyses ayant combiné les études de cohortes, deux ont montré une augmentation statistiquement significative du risque alors que les deux autres non. Par ailleurs, la forte hétérogénéité existant entre les enquêtes épidémiologiques requiert une grande prudence dans l’interprétation des résultats.
Au sein de la cohorte AHS, l’incidence et la mortalité par leucémies observées chez les exploitants agricoles applicateurs de pesticides, les applicateurs professionnels, et chez leurs conjoints, exposés aux pesticides dans leur ensemble, ne sont pas statistiquement différentes de celles de la population générale. Cependant, quand ces valeurs sont exprimées par rapport au taux d’incidence global tous cancers (incidence relative) ou par rapport au taux de mortalité toutes causes (mortalité relative) une augmentation statistiquement significative de la mortalité est rapportée.
Les études de cohortes autres que celles de l’AHS étudiant le lien entre une exposition aux pesticides tous types confondus et les leucémies sont nombreuses en Europe, Amérique du Nord, Amérique centrale et Australie. La plus importante étude européenne fournit des données de suivi de 15 millions d’individus de cinq pays nordiques : Suède, Norvège, Islande, Danemark et Finlande. Cette étude n’a pas montré d’augmentation d’incidence de leucémies chez les agriculteurs (hommes ou femmes) ni chez les jardiniers. En France, un risque significativement augmenté de décès par suite de leucémies a été observé chez des agriculteurs et ouvriers agricoles et une augmentation non significative a été observée chez des travailleurs dans la lutte contre les nuisibles en milieu urbain. La grande majorité des études européennes, soit neuf études, émanent d’Italie. Aucune augmentation de risque de leucémies chez les travailleurs agricoles ou utilisateurs de pesticides possédant une licence pour l’achat et l’utilisation de pesticides toxiques n’est apparue dans les trois études d’Italie du Nord à l’exception d’une légère augmentation non significative observée chez les femmes et plus spécifiquement pour la forme myéloïde de leucémies.
Il est très difficile de conclure à partir des études de cohortes disponibles (AHS et autres) quant à l’existence d’une association entre l’exposition aux pesticides, tous types confondus, et la survenue de leucémies. Les raisons principales sont le peu de cohérence existant entre les résultats de ces études et leur manque de puissance. Les tendances qui semblent néanmoins ressortir sont une augmentation de risque surtout observée dans les études de mortalité qui sont nettement plus nombreuses que les études d’incidence. Il n’est pas exclu que cette augmentation puisse davantage concerner les leucémies de type myéloïde mais les différences avec le type lymphoïde semblent peu marquées. Dans la majorité des études prenant en compte le sexe, un risque plus élevé a été rapporté chez les femmes exposées par rapport au risque observé chez les hommes. À partir de ces données, l’expertise collective Inserm de 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) avait conclu à la présomption moyenne (+) d’un lien entre l’exposition aux pesticides, sans distinction de familles chimiques ou de substances actives, dans le secteur professionnel agricole et le risque de survenue de leucémie.
Une approche par famille chimique permettait de faire ressortir les principales tendances et de pouvoir identifier les substances actives potentiellement concernées et mettait en évidence des niveaux de présomption moyens pour des organochlorés, des organophosphorés et des carbamates/thiocarbamates/dithiocarbamates (voir addenda en fin de chapitre : tableau A11.IIIrenvoi vers).

Nouvelles données épidémiologiques

Trois méta-analyses ont été publiées dont deux réalisées à partir des données de trois cohortes d’agriculteurs (AHS, AGRICAN, CNAP) et portant sur l’exposition à plusieurs familles de pesticides, tandis que la troisième s’adresse spécifiquement à l’exposition au glyphosate à partir de trois études cas-témoins. Deux mises à jour de la cohorte AHS ont été publiées, une porte sur un large panel de substances actives tandis que l’autre est focalisée sur l’exposition professionnelle au glyphosate. Enfin, les analyses poolées réalisées dans le cadre du consortium InterLymph portent sur les principaux facteurs de risque analysés simultanément dont la profession d’agriculteur, sur le risque des leucémies lymphoïdes (LLC, LAL, leucémie à tricholeucocytes).

Méta-analyse

Une méta-analyse récemment publiée par le consortium des cohortes d’agriculteurs, Agricoh (Leon et coll., 2019renvoi vers) étudie le rôle de l’exposition (de façon binaire : oui/non) entre 14 familles de pesticides et 33 substances actives et le risque des principaux sous-types d’hémopathies lymphoïdes dont la leucémie lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL). Les auteurs observent une association positive entre l’exposition à la delta-méthrine mRR = 1,5 [1,1-2,1] et la LLC/LL. À partir des trois cohortes évoquées ci-dessus, une autre méta-analyse du consortium Agricoh (El-Zaemey et coll., 2019renvoi vers) examine le risque d’hémopathies malignes chez les éleveurs et ne montre aucune association avec la LLC/LL. Une autre méta-analyse portant spécifiquement sur le glyphosate, publiée en 2016 (Chang et Delzell, 2016renvoi vers), étudie conjointement les données de 3 études cas-témoins publiées entre 1990 et 2009 et ne met pas en évidence d’association entre le risque de LLC et l’exposition au glyphosate chez les agriculteurs (mOR = 1,0 [0,6-1,5]). En revanche, les deux études rapportant des associations entre une utilisation de glyphosate et le risque de leucémie à tricholeucocytes montrent un risque élevé non statistiquement significatif compte tenu des faibles effectifs (mOR = 2,5 [0,9-7,3]).
Une méta-analyse publiée en 2021 (Foucault et coll., 2021renvoi vers) a étudié l’exposition professionnelle aux pesticides et le risque de survenue de leucémie aiguë myéloïde (LAM) (3 955 cas et 9 948 témoins provenant de 14 études cas-témoins). Cette analyse reprend en grande majorité les études cas-témoins analysées dans la méta-analyse de Van Maele-Fabry et coll. (2007renvoi vers) déjà prise en compte dans l’expertise collective de 2013 et qui ne montrait pas d’augmentation de risque pour les LAM, auxquelles s’ajoutent 5 études plus récentes publiées entre 2009 et 2017. Les deux études les plus récentes ne montraient pas non plus d’augmentation de risque (Parodi et coll., 2017renvoi vers ; Poynter et coll., 2017renvoi vers). Cette méta-analyse montre que l’exposition professionnelle aux pesticides est associée à une augmentation du risque de LAM (OR = 1,5 ; IC 95 % [1,1-2,1]) avec une forte hétérogénéité entre études (I2 = 76 %, p < 0,001). Bien qu’il n’existe pas d’argument statistique pour conclure à un biais de publication, les auteurs évoquaient un potentiel biais de publication par la représentation de forme asymétrique du graphique en entonnoir. Une meilleure caractérisation de l’exposition aux pesticides et des études de plus grandes tailles sont nécessaires pour confirmer ce résultat.

Cohortes

La cohorte AHS a été ré-analysée et publiée en 2014 par Alavanja en distinguant 26 familles de pesticides ou substances actives (Alavanja et coll., 2014renvoi vers). Cette analyse présente également les résultats pour cinq sous-types d’hémopathies lymphoïdes fréquents dont une entité regroupant la leucémie lymphoïde chronique, le lymphome lymphocytique et le lymphome à cellules du manteau (LLC/LL/LCM). L’exposition au terbufos (RR = 1,4 [1,0-2,0]) est positivement associée aux LLC/LL/LCM avec augmentation des risques avec le nombre total de jours d’utilisation (RR = 1,0 (réf), RR = 1,3 [0,8-2,0], RR = 1,6 [1,0-2,5], p de tendance = 0,05). Ces observations persistent après ajustements mutuels. De même, l’exposition au DDT est positivement associée au risque de LLC/LL/LCM avec une tendance significative des risques qui augmentent avec le nombre total de jours d’exposition (RR = 1,0 (réf), RR = 1,0 [0,5-1,8], RR = 2,6 [1,3-4,8], p de tendance = 0,04). Deux autres substances actives sont associées à des risques élevés de LLC/LL/LCM sans effet-dose identifié : le métalaxyl et le chlordane (RR = 1,6 [1,0-2,5] ; RR = 1,4 [1,0-2,0]). Cette analyse par substance active et sous-type d’hémopathies malignes a pour conséquence que la majorité des associations identifiées reposent sur un petit nombre d’exposés.
Une analyse récente de la cohorte AHS (Andreotti et coll., 2018renvoi vers) s’adresse spécifiquement à l’exposition au glyphosate et ne met pas en évidence de risque élevé avec la LLC. En revanche, le risque de LAM était accru parmi les applicateurs du quartile d’exposition le plus élevé par rapport aux non-utilisateurs (RR = 2,4 [0,9-6,3], p de tendance = 0,1). Les résultats étaient comparables en utilisant une fenêtre d’exposition de cinq ans (RR quartile 4 = 2,3 [1,0-5,5], p de tendance = 0,07) et de 20 ans (RR tercile 3 = 2,0 [1,0-4,0], p de tendance = 0,04).

Cas-témoins

Une analyse simultanée des principaux facteurs de risque, réalisée par sous-type d’hémopathie lymphoïde, a été publiée en 2014 par le consortium InterLymph sous la forme d’une monographie dans le Journal of the National Cancer Institute (Morton et coll., 2014arenvoi vers). Il présentait une analyse spécifique de trois leucémies lymphoïdes : la leucémie lymphoïde chronique/lymphome lymphocytique (LLC/LL) (2 440 cas et 15 186 témoins provenant de 13 études cas-témoins ; Slager et coll., 2014renvoi vers), de la leucémie à tricholeucocytes (154 cas et 8 834 témoins provenant de 5 études cas-témoins ; Monnereau et coll., 2014renvoi vers) et de la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL) (152 cas et 23 096 témoins provenant de 16 études cas-témoins ; Skibola et coll., 2014renvoi vers). Dans ces analyses, le métier d’agriculteur n’était pas associé au risque de LLC/LL ni au risque de LAL. En revanche, il était associé positivement au risque de leucémie à tricholeucocytes (mOR = 2,3 [1,4-4,0], avec une relation dose-réponse observée avec la durée dans ce métier (OR = 1,8 [0,9-3,9] pour ≤ 10 ans comparé à la référence : aucun emploi agricole) et OR = 3,0 [1,5-5,9] pour > 10 ans versus référence ; p de tendance = 0,025). Les associations observées restaient comparables en prenant en compte les facteurs de confusion potentiels.

Conclusion

Depuis 2013, trois méta-analyses ont été publiées : deux réalisées à partir des données de trois cohortes d’agriculteurs (AHS, AGRICAN, CNAP), la troisième s’adressant spécifiquement à l’exposition au glyphosate (trois études cas-témoins). Deux mises à jour de la cohorte AHS ont été publiées, une porte sur un large panel de substances actives tandis que l’autre est focalisée sur l’exposition professionnelle au glyphosate. Enfin, les analyses poolées réalisées dans le cadre du consortium InterLymph portent sur les principaux facteurs de risque analysés simultanément dont la profession d’agriculteur, sur le risque des leucémies lymphoïdes (LLC, LAL, leucémie à tricholeucocytes).
Au regard des résultats de ces études, qui rapportent toutes des associations entre le métier d’agriculteur et/ou l’utilisation de substances particulières et le risque de leucémies, la présomption d’un lien entre exposition professionnelle aux pesticides et leucémies reste moyenne (tableau 11.VIrenvoi vers).

Tableau 11.VI Présomption d’un lien entre exposition professionnelle aux pesticides et leucémies

Exposition
Populations concernées
par un excès de risque
Présomption d’un lien
Pesticides (sans distinction)
Agriculteurs, applicateurs, ouvriers en industrie de production
+

+ d’après les résultats de 7 méta-analyses et d’une cohorte prospective (AHS) (2013) et de deux méta-analyses

Chacune des études publiées depuis 2013 distingue le type de leucémie étudiée et porte principalement sur les plus fréquentes (LLC/LL, LAM) mais aussi sur des sous-types plus rares, anciennement étudiés, comme la leucémie à tricholeucocytes. Des éléments de preuve sont observés concernant la LLC/LL : une association avec l’exposition professionnelle à la deltaméthrine à partir d’une méta-analyse de trois cohortes (sans information sur un éventuel effet-dose) ; une association avec le terbufos avec une tendance des risques qui s’élève avec le nombre de jours total d’exposition (cohorte AHS) ; une association avec le DDT chez les plus fortement exposés (cohorte AHS). La majorité des associations identifiées reposent sur des petits nombres de sujets exposés. Aucune association n’est observée avec le glyphosate ainsi qu’avec la plupart des substances évaluées. Concernant la LAM, une association positive avec l’utilisation de glyphosate est suggérée (cohorte AHS), ainsi qu’avec l’exposition professionnelle aux pesticides (méta-analyse des études cas-témoins). Malgré des effectifs faibles liés à la rareté de la leucémie à tricholeucocytes, le risque d’occurrence de ce type de leucémie est augmenté chez les agriculteurs (InterLymph) et chez ceux qui ont été exposés au glyphosate, bien que de façon non statistiquement significative (tableau 11.VIIrenvoi vers).

Tableau 11.VII Familles et substances actives impliquées dans les excès
de risques significatifs de leucémies

Famille
Substances actives
Populations concernées
par un excès de risque
Présomption d’un lien
Organochlorés
  
Organochlorés (sans distinction)
Applicateurs
+
Lindane
Applicateurs
+
DDT
Applicateurs
+
Heptachlore
Applicateurs
+
Chlordane + heptachlore
Applicateurs
+
Toxaphène
Agriculteurs
+
Organophosphorés
  
Chlorpyrifos
Applicateurs
+
Diazinon
Applicateurs
+
Fonofos
Applicateurs
+
Malathion
Agricultrices
+
Terbufos
Applicateurs
+
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
  
S-éthyl-dipropylthiocarbamate (EPTC)
Applicateurs
+
Mancozèbe
Agriculteurs
+
Pyréthrinoïdes
  
Deltaméthrine
Agriculteurs
a
Chloroacétanilides
  
Alachlore
Ouvriers en industrie de production
+
Aminophosphonate glycine
  
Glyphosate
Agriculteurs
±

+ d’après les résultats d’une cohorte ou d’une étude cas-témoins nichée ; + a d’après les résultats de la méta-analyse de trois cohortes d’agriculteurs (Agricoh) Données nouvelles
± d’après les résultats suggérés pour les LAM dans une cohorte Données nouvelles
NB : Les études de cohortes et les études cas-témoins nichées ont été analysées par famille et par substance active mais pas les études cas-témoins.

Addenda

Tableau A11.I Familles et substances actives impliquées dans les excès
de risque significatifs de LNH en 2013

Famille
Substances actives
Populations concernées par un excès de risque significatif
Présomption d’un lien
Organochlorés
  
Sans distinction
Agriculteurs 
±
Lindane (γHCH)
Applicateurs ; Agriculteurs
++
 
Éleveurs (HCH)
+
 
Exposition professionnelle
±
DDT
Agriculteurs
++
 
Exposition professionnelle
+
 
Personnes exposées
±
Chlordane
Éleveurs
±
Aldrine
Exposition professionnelle
±
DDT + Malathion
Exposition professionnelle
±
Organophosphorés
  
Sans distinction
Agriculteurs
++
 
Personnes exposées
+
 
Exposition professionnelle
±
Terbufos
Applicateurs
+
Diazinon
Agriculteurs
+
Malathion
Agriculteurs
++
 
Personnes exposées
±
 
Exposition professionnelle
±
Coumaphos
Agriculteurs
±
Chlorpyrifos
Agriculteurs
±
Fonofos
Agriculteurs
±
Carbamates/Dithiocarbamates
  
Sans distinction carbamates
Agriculteurs
+
 
Exposition professionnelle
±
Carbaryl
Agriculteurs
±
 
Exposition professionnelle
±
Carbofuran
Agriculteurs
±
Carbaryl + malathion
Exposition professionnelle
±
Butilate
Applicateurs
+
 
Agriculteurs
±
Triazines
  
Sans distinction
Agriculteurs
±
 
Ouvriers en industrie de production
+
Atrazine
Agriculteurs
±
Phénoxyherbicides non contaminés
  
2,4-D
Agriculteurs
+
 
Exposition professionnelle
±
2,4-D + malathion
Exposition professionnelle
±
MCPA
Exposition professionnelle
±
Mécoprop
Exposition professionnelle
±
Mécoprop + malathion
Exposition professionnelle
±
Aminophosphonate glycine
  
Glyphosate
Agriculteurs
±
 
Exposition professionnelle
+
Glyphosate + malathion
Exposition professionnelle
±

++ d’après les résultats de plusieurs études de cohortes ou d’au moins une étude de cohorte et deux cas-témoins ou de plus de deux études cas-témoins
+ d’après les résultats d’une cohorte ou d’une étude cas-témoins nichée ou de deux études cas-témoins
± d’après les résultats d’une étude cas-témoins

Tableau A11.II Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de LNH dans des groupes de population particulière en 2013

Famille
Substances actives
Groupe de population particulière concernée par un excès de risque significatif
Présomption d’un lien
Organochlorés
  
Sans distinction
Agriculteurs t(14 ;18), personnes avec antécédents familiaux de cancers hématopoïétiques
±
Lindane
Agriculteurs asthmatiques
±
 
Agriculteurs t(14 ;18)
+
DDT
Exposés asthmatiques, exposés allergiques
±
Chlordane
Agriculteurs asthmatiques
±
Dieldrine
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Toxaphène
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Organophosphorés
  
Sans distinction
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
  
Sans distinction carbamates
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Triazines
  
Sans distinction
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Atrazine
Agriculteurs t(14 ;18)
±
Cyanazine
Agriculteurs asthmatiques
±
Pyréthrinoïdes
  
Pyréthrinoïdes (sans distinction)
Agriculteurs t(14 ;18)
±

+ d’après les résultats de deux études cas-témoins
± d’après les résultats d’une étude cas-témoins

Tableau A11.III Familles et substances actives impliquées dans les excès de risque significatifs de leucémies en 2013

Famille
Substances actives
Populations concernées
par un excès de risque significatif
Présomption d’un lien
Organochlorés
  
Organochlorés (sans distinction)
Applicateurs
+
Lindane
Applicateurs
+
Heptachlore
Applicateurs
+
Chlordane + heptachlore
Applicateurs
+
Toxaphène
Agriculteurs
+
Organophosphorés
  
Chlorpyrifos
Applicateurs
+
Diazinon
Applicateurs
+
Fonofos
Applicateurs
+
Malathion
Agricultrices
+
Terbufos
Applicateurs
+
Carbamates/Thiocarbamates/Dithiocarbamates
  
EPTC (S-éthyl-dipropylthiocarbamate)
Applicateurs
+
Mancozèbe
Agriculteurs
+
Chloroacétanilides
  
Alachlore
Ouvriers en industrie de production
+

+ d’après les résultats d’une cohorte ou d’une étude cas-témoins nichée
NB : Les études de cohortes et les études cas-témoins nichées ont été analysées par famille et par substance active mais pas les études cas-témoins

Références

• Un ou plusieurs auteurs sont affiliés à une industrie des phytosanitaires.
•• Étude financée par un industriel des phytosanitaires
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