Fibromyalgie
2020
| ANALYSE |
16-
Syndrome dit de fibromyalgie
chez l’enfant et l’adolescent
; Wolfe et coll., 1995
), la majorité des publications sur ce sujet (40/91 articles identifiés soit 44 %) ont été écrites par une même équipe aux États-Unis, du centre de la douleur pédiatrique animée par S. Kashikar-Zuck (pédopsychologue, UC Department of Pediatrics, Cincinnati Children’s Hospital, Ohio, États-Unis). Chacune de leurs études a été réalisée à partir d’une seule cohorte de SFMJ parfois enrichie par d’autres centres de rhumatologie pédiatrique, suivie sur maintenant 20 ans, avec un nombre fluctuant de patients selon les études (voir tableau de toutes leurs études en annexe 4). À partir de cette cohorte, cette équipe a publié en moyenne 2 articles par an sur le SFMJ, ce qui a pu donner l’impression d’une abondante littérature.
).Critères diagnostiques et clinique du syndrome fibromyalgique juvénile
Critères de Yunus et Masi, 1985
). Ils identifient au sein de leurs patients des enfants atteints de symptômes évoquant ceux d’un SFM de l’adulte. Cette publication princeps survient dans un contexte particulier : celui de la première description formelle du SFM dans un groupe de patients adultes anciennement diagnostiqués comme atteints d’un syndrome polyalgique diffus ou d’une fibrosite. Yunus et Masi ont ainsi participé à la publication d’une des premières cohortes de patients adultes atteints de SFM (Yunus et coll., 1981
) à partir de laquelle ils proposent des critères diagnostiques. Sur le plan pédiatrique, en 1985, ils décrivent 33 patients âgés de 9 à 17 ans (médiane 15 ans), dont 31 filles, pour lesquels les symptômes de douleurs musculo-squelettiques ont commencé avant l’âge de 16 ans et évoluent depuis 3 à 12 mois (médiane 12 mois), qu’ils ont appariés à 33 de leurs camarades d’école (Yunus et Masi, 1985
). Ces 33 patients avaient tous des douleurs musculaires chroniques touchant plus de trois régions avec au moins quatre points « sensibles », sans autre maladie sous-jacente. Quatre-vingt-dix-sept pour cent d’entre eux avaient une douleur musculaire diffuse, 79 % une sensation de raideur et 61 % une impression de gonflement articulaire. Quatre-vingt-onze pour cent avaient une sensation générale de fatigue, 67 % des troubles du sommeil, et 100 % se réveillaient fatigués (contre 48 % des contrôles). Cinquante-quatre pour cent avaient des maux de tête, 36 % une impression d’engourdissement et 27 % des signes digestifs de type intestin irritable. Soixante-dix pour cent des patients se décrivaient comme anxieux et 55 % comme déprimés (contre respectivement 39 % et 9 % chez les contrôles). Le nombre de sites douloureux variait entre 4 et 34 (médiane 12), contre 0 à 5 chez les contrôles. Les régions les plus atteintes étaient les genoux, les chevilles, les coudes, le dos, les poignets, les trapèzes, les inter-phalangiennes proximales (IPP) et les moyens fessiers. Yunus et Masi retrouvent à l’examen physique de ces 33 jeunes patients des points douloureux identiques à ceux décrits chez l’adulte, au nombre de 5 à 31 (médiane de 12, avec 0 à 4 chez les contrôles). Le degré de gêne et de handicap était variable, avec une majorité de patients sévèrement impactés et un nombre de jours d’absence scolaire s’aggravant au fil des mois avant la 1re consultation (de 5 jours en moyenne à 13 douze mois plus tard).
Tableau 16.I Les 10 critères diagnostiques dits mineurs du SFMJ selon Yunus et Masi (1985
)
|
Anxiété
|
|
Fatigue
|
|
Troubles du sommeil
|
|
Céphalées chroniques
|
|
Syndrome de l’intestin irritable
|
|
Impression de gonflement des tissus
|
|
Impression d’engourdissement
|
|
Variations de la douleur avec l’activité physique
|
|
Variations de la douleur avec les conditions météorologiques
|
|
Variations de la douleur avec l’anxiété, le stress
|
). Dans cette étude, 22 patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ selon les critères de Yunus et Masi ont eu une étude standardisée des points sensibles avec un dolorimètre. Aucune population contrôle n’a été utilisée à titre de comparaison. Chez ce petit nombre de patients, les auteurs retrouvent en moyenne 15,5 ± 2,6 points douloureux, avec un seuil à 2,5 kg/cm2. Le nombre de points douloureux n’était pas corrélé au score d’intensité de la douleur sur l’échelle numérique, ni à la durée de la douleur.Critères ACR 1990
) (voir chapitre « Critères diagnostiques, diagnostics différentiels, comorbidités et sous-groupes »). Ils retiennent le diagnostic devant la présence de 2 critères ci-dessous, avec la possibilité d’une maladie associée :Critères ACR 2010 et suivants
). En 2016, alors que les critères de diagnostic adulte avaient encore évolué plusieurs fois, une étude de validation des « anciens » critères ACR 2010 a été réalisée et publiée par l’équipe animée par Kashikar-Zuck (Ting et coll., 2016
). Pour cela, ils ont étudié 47 adolescents (11-17 ans) au sein de leur cohorte de patients diagnostiqués comme SFMJ selon les critères de Yunus et Masi, qu’ils ont appariés à 48 contrôles atteints de douleurs chroniques localisées (céphalées chroniques ou d’autres douleurs chroniques musculo-squelettiques ou abdominales). Quarante-deux des patientes étiquetées SFMJ selon Yunus et Masi (90 %) ont été diagnostiquées comme telles selon les critères ACR 2010 et 6 (12 %) au sein du groupe contrôle. À partir de ces résultats, les auteurs concluent à une bonne sensibilité (89 %) et spécificité (87 %) des critères ACR 2010 pour diagnostiquer un SFMJ (Ting et coll., 2016
). Les auteurs ont alors également suggéré d’améliorer ces critères, en particulier en diminuant à 22 vs 40 le nombre de symptômes somatiques associés, en enlevant ceux qui semblaient redondants tels que les douleurs musculaires, la fatigue, les douleurs thoraciques, la fièvre et les diarrhées entre autres. Cette réduction du nombre de critères mineurs se retrouve dans l’évolution des critères ACR retenus chez l’adulte, qui ont évolué de 2011 à 2016.
) ou les critères ACR 2016 (Wolfe et coll., 2016
) afin de poser le diagnostic de SFMJ, alors que ces critères se sont beaucoup simplifiés. Récemment, de nouveaux critères ont été proposés chez l’adulte par un groupe international d’experts différents de ceux de l’ACR, qui n’incluent plus les signes ou syndromes associés et limitent le diagnostic à la présence d’au moins 6 régions douloureuses sur 9 avec fatigue ou troubles du sommeil depuis plus de 3 mois (Arnold et coll., 2019
) ; ces critères sont en attente de validation ultérieure chez l’adulte (voir chapitre « Critères diagnostiques, diagnostics différentiels, comorbidités et sous-groupes »).Description clinique des patients diagnostiqués
« syndrome fibromyalgique juvénile »
; Gedalia et coll., 2000
; Cheng et coll., 2005
; Eraso et coll., 2007
; Durmaz et coll., 2013
). Ces descriptions sont issues de petits échantillons (6 à 148 patients) avec des patients vus dans des centres de rhumatologie pédiatrique ou de douleur chronique essentiellement aux États-Unis (tableau 16.II
). Les patients sont majoritairement de jeunes adolescentes (84 % en moyenne) avec un âge de début du SFMJ à 14 ans en moyenne (7-18 ans). À ce jour, aucune cohorte française n’a été décrite.Tableau 16.II Études rétrospectives descriptives de patients diagnostiqués « SFMJ » entre 1985 et 2013
|
Référence
|
Lieu, Structure
|
Pays
|
Critères
|
N
|
Filles (%)
|
Âge moyen (ans, min-max)
|
|
Rhumatologie pédiatrique, Université de l’Illinois
|
États-Unis
|
Yunus et Masi
|
33
|
94
|
14,7 (13-17)
|
|
|
Rhumatologie pédiatrique, Nouvelle-Orléans
|
États-Unis
|
ACR 1990
|
59
|
79
|
13,7 (5-17)
|
|
|
Rhumatologie pédiatrique, New York City
|
États-Unis
|
ACR 1990
|
33
|
94
|
13,4 (10-20)
|
|
|
Rhumatologie pédiatrique, Nouvelle-Orléans
|
États-Unis
|
ACR 1990
|
148
|
75
|
<-18
|
|
|
Rhumatologie pédiatrique, Jiangsu Université
|
Chine
|
Yunus et Masi et ACR 1990
|
6
|
83
|
13,2 (7-16)
|
|
|
3 écoles en Turquie
|
Turquie
|
Yunus et Masi
|
61
|
77
|
14,8 (12-18)
|
) (Yunus et Masi, 1985
). Ces différences n’ont pas été rapportées par les autres auteurs, sans que l’on sache si elles ont été recherchées. Eraso et coll. ont comparé les symptômes des patients avec SFMJ ayant débuté avant 15 ans et après 15 ans. Aucune différence n’a été retrouvée entre les deux groupes (Eraso et coll., 2007
). Kashikar-Zuck et coll. ont le plus publié sur le SFMJ depuis les années 2000 en décrivant principalement une seule et même cohorte (18 à un maximum de 118 patients au fil des années) suivis au sein de l’hôpital pédiatrique de Cincinnati dans l’État de l’Ohio aux États-Unis. Les patients sont recrutés au sein des services de rhumatologie pédiatrique et de la douleur. À partir de 2008, la plupart des publications de cette équipe sont réalisées à partir d’une plus grande cohorte de patients (de 76 à un maximum de 131 patients) sélectionnés parmi des centres de rhumatologie pédiatriques de quatre hôpitaux de l’Ohio et du Kentucky. Ces séries seront suivies jusqu’à l’âge adulte avec un recul de 8 ans pour certains (voir tableau en annexe 4).
Tableau 16.III Tableau comparatif des caractéristiques des douleurs entre jeunes et adultes « avec SFM » selon Yunus et Masi (1985
)
|
Caractéristiques des douleurs
|
Jeunes (< 18 ans)
% (n = 33)
|
Adultes (> 18 ans)
% (n = 39)
|
|
Localisations
| ||
|
Gonflements subjectifs
|
61
|
23
|
|
Arthralgie des chevilles
|
42
|
15
|
|
Lombalgie
|
33
|
69
|
|
Arthralgie des mains
|
33
|
69
|
|
Points douloureux vertébraux et para-vertébraux
|
33
|
62
|
|
Facteurs aggravants ou apaisants
| ||
|
Aggravation avec hyperactivité
|
88
|
59
|
|
Aggravation avec l’anxiété
|
45
|
74
|
|
Soulagement par l’activité physique modérée
|
55
|
85
|
|
Soulagement par la chaleur
|
58
|
85
|
), dont les plus fréquents sont les troubles du sommeil (79 %), l’asthénie (72 %) et les céphalées (70 %). D’autres symptômes peuvent être présents : des arthralgies, des troubles fonctionnels intestinaux, des difficultés cognitives et des troubles psychiatriques (tableau 16.IV
). En 2007, Eraso et coll. ont été les seuls à décrire 46 patients (31 %) ayant présenté des symptômes de SFMJ avant l’âge de 10 ans au sein d’une cohorte de 148 jeunes (Eraso et coll., 2007
). Ces patients avaient significativement plus de points douloureux (15,3 versus 14,2, p = 0,004) que les patients de plus de 10 ans. Ils avaient aussi plus d’atteintes articulaires avec raideur et gonflement subjectifs et plus de douleurs abdominales au diagnostic bien que de façon non significative (tableau 16.IV
).Synthèse des études descriptives
Tableau 16.IV Symptômes associés aux douleurs musculo-squelettiques chez les patients diagnostiqués comme SFMJ
|
Référence
|
N
|
Fatigue
|
Douleurs musculo-squelettiques
|
Céphalées
|
Douleurs abdominales
|
Troubles du sommeil
|
Arthralgies
|
Dépression ou anxiété
|
|
33
|
91 %
|
97 %
|
54 %
|
27 %
|
67 %
|
61 %
|
Dépression : 55 %
Anxiété : 70 %
|
|
|
59
|
20 %
|
97 %
|
76 %
|
17 %
|
69 %
|
24 %
|
7 %
|
|
|
33
|
62 %
|
93 %
|
71 %
|
38 %
|
96 %
|
40 %
|
Dépression : 43 %
Anxiété : 22 %
|
|
|
148
|
25 %
|
100 %
|
80 %
|
25 %
|
72 %
|
22 %
|
Dépression : 9 %
Anxiété : 2 %
|
|
|
6
|
100 %
|
100 %
|
NC
|
83 %
|
100 %
|
83 %
|
Dépression : 50 %
Anxiété : 33 %
|
|
|
61
|
97 %
|
NC
|
56 %
|
10 %
|
69 %
|
15 %
|
Dépression : 21,3 %
Anxiété : 56 %
|
|
|
Moyenne
|
66 %
|
97 %
|
67 %
|
33 %
|
79 %
|
41 %
|
NC : non connu
). Les précédents critères reposant sur les points sensibles ne sont plus reconnus comme pertinents. En effet, depuis 2010, le comptage des points sensibles est abandonné. Cela évoque implicitement un manque de pertinence de l’utilisation des critères de Yunus et Masi et de l’ACR 1990 dans les études pédiatriques.Études épidémiologiques du syndrome fibromyalgique
chez les moins de 18 ans
En population générale
).
). Les parents et l’enfant remplissent un questionnaire sur la douleur. Le diagnostic de SFMJ est ainsi porté selon les critères ACR 1990 chez 21 enfants dont 7 garçons, soit 6,2 % de cette population. Il est important de noter que dans cette étude ont été identifiés 7 enfants présentant des points sensibles mais sans douleur chronique, donc non diagnostiqués comme atteints de SFMJ.
). Deux mille quatre cent huit enfants et adolescents répondent à un questionnaire au sujet de la douleur. À la suite de l’analyse de ces questionnaires, 66 jeunes, soit 2,74 %, sont considérés comme potentiellement atteints et sont revus en consultation afin de confirmer le diagnostic en recherchant les points sensibles. Vingt-neuf jeunes, soit 1,2 % de l’échantillon initial, ont finalement été reconnus comme atteints de SFMJ selon les critères ACR 1990.Tableau 16.V Prévalence du diagnostic de SFMJ estimée par études de population ou de cohorte de centres de rhumatologie pédiatrique
|
Références
|
Pays (Ville)
|
Population évaluée (âges)
|
Critères
|
Prévalence SFMJ estimée (%)
|
|
En population générale
| ||||
|
Israël
|
338 (9-15)
|
ACR90
|
6,2
|
|
|
Italie (Mantoue)
|
2 408 (8-21)
|
ACR90
|
1,2
|
|
|
Finlande (Turku)
|
1 756 (9-12)
|
CWP* proche de ACR90
|
7,5
|
|
|
Mexique
|
548 (9-15)
|
ACR90
|
1,2
|
|
|
Turquie
|
1 109 (12-18)
|
Yunus et Masi
|
5,5
|
|
|
Cohortes suivies en rhumatologie pédiatrique
| ||||
|
Canada
|
875
|
Diagnostic posé par le médecin
|
0
|
|
|
Amérique du Nord
|
5 245
|
Déclaration du praticien
|
5,1
|
|
|
Canada
|
3 362
|
ACR90
|
6**
|
|
|
Angleterre
|
4 948
|
Déclaration du praticien
|
0#
|
* Dans cette étude, la douleur chronique diffuse (CWP) est détectée avec référence aux critères ACR 1990. ** Syndrome douloureux incluant le SFMJ. # Le SFMJ était potentiellement inclus dans un diagnostic « douleurs mécaniques autres », représentant 23 %. £ Dans cette étude, le diagnostic de SFMJ n’est jamais évoqué mais il est fait mention de 9 % de patients suivis pour douleurs musculo-squelettiques.
). Mille-sept-cent-cinquante-six enfants ont participé en remplissant un questionnaire au sujet de la douleur. Trente-deux pour cent des enfants décrivent avoir mal au moins une fois par semaine, 39 % au moins une fois par mois, et 29 % n’ont jamais présenté de douleur. Le diagnostic de douleurs musculo-squelettiques chroniques diffuses (CWP) ou de syndrome polyalgique diffus est porté chez 132 enfants soit 7,5 % de l’échantillon initial, selon la définition donnée par Wolfe et coll. (Wolfe et coll., 1990
). Dans cette étude, le diagnostic de « SFMJ » n’est pas utilisé en tant que tel. Les auteurs expliquent avoir choisi délibérément le terme de CWP car plus fréquemment utilisé chez les adultes à cette époque, bien que les études pédiatriques utilisaient alors surtout le terme de syndrome douloureux idiopathique diffus défini par Malleson et coll. en 1992 (Malleson et coll., 1992
). En pratique, la différence entre ces deux concepts était mineure, la CWP étant proche des douleurs musculo-squelettiques telles qu’elles sont définies dans la FM. En effet la CWP implique une douleur bilatérale dans la partie supérieure et inférieure du corps tandis que la douleur idiopathique diffuse est définie par une douleur dans au moins trois zones du corps. Cette étude apporte un éclairage intéressant sur l’utilisation du terme SFMJ, mettant en exergue la possibilité d’un parti pris selon les équipes. La fréquence des douleurs chroniques étendues (7,5 % ici) est donc à mettre en relation non pas avec la prévalence du SFMJ, mais avec celle des douleurs chroniques diffuses.
). En cas de douleur chronique, la palpation manuelle recherchait les points douloureux sensibles et des points contrôles à l’aide d’un dolorimètre. La méthode a permis de détecter 24 enfants douloureux avec seulement 7 enfants diagnostiqués comme atteints de SFMJ d’après les critères ACR 1990, soit une prévalence de 1,2 %. Il s’agissait uniquement de filles chez qui en moyenne 14 points sensibles étaient retrouvés à la palpation.
). L’étude a porté sur des échantillons d’écoliers stratifiés selon l’âge et le sexe au sein d’établissements comptant au total 51 539 élèves : 1 109 ont été examinés, un questionnaire était rempli et un examen clinique était réalisé avec une palpation manuelle à la recherche des points sensibles. Cent trente-six enfants ont été détectés comme ayant des douleurs chroniques depuis plus de 3 mois et parmi eux, 61 (dont 48 filles) répondaient aux critères diagnostiques du SFMJ, cette fois selon les critères de Yunus et Masi. La prévalence du SFMJ est donc estimée à 5,5 % dans cette étude.
) à 6,2 % (Buskila et coll., 1993
). L’étude recherchant des douleurs musculo-squelettiques diffuses chroniques sans recherche de points sensibles propres à la FM, trouve une prévalence de 7,5 % (Mikkelsson et coll., 1997
). Ces estimations élevées peuvent être liées à :
). Depuis, une étude chinoise a trouvé chez 3 000 lycéens une prévalence de 32,8 % de douleur du cou et des épaules, et de 41,1 % de lombalgies (Zhang et coll., 2015
) ; une étude brésilienne retrouve une prévalence de 46,8 % de lombalgies chez 1 102 lycéens (Meziat Filho et coll., 2015
). L’analyse d’une cohorte norvégienne de 7 373 adolescents âgés de 13 à 18 ans (cohorte HUNT1
) donne aussi des prévalences élevées : 44,4 % de douleurs chroniques, dont 33,4 % de douleurs musculo-squelettiques (Hoftun et coll., 2011
). On peut expliquer ces chiffres par la méthodologie employée, la question posée dans les questionnaires utilisés étant souvent « douleur au moins une fois par mois » ou « par semaine » sans tenir compte de l’impact fonctionnel, induisant ainsi un nombre élevé de réponses positives à tout âge, y compris à l’adolescence (King et coll., 2011
).
), à l’international (404 206 adolescents de 28 pays suivis quant à leur santé ; Swain et coll., 2014
) et aux Pays-Bas (2 500 enfants suivis à 11 et 14 ans ; Picavet et coll., 2016
), a également montré des chiffres élevés de douleurs musculo-squelettiques chroniques (par exemple 37 % des adolescents de 15 ans rapportent avoir mal au dos au moins une fois par mois et jusqu’à une fois par jour ; Swain et coll., 2014
).
). Les données hétérogènes de prévalence du SFMJ dans la population générale pédiatrique sont donc extrêmement difficiles à interpréter.Suivi de cohortes en rhumatologie pédiatrique
; Rosenberg, 1990
; Bowyer et Roettcher, 1996
; Malleson et coll., 1996
; Symmons et coll., 1996
). Si on regarde plus en détail ces chiffres souvent cités dans la littérature, le taux de 0 % correspond plutôt à l’absence d’évocation du SFMJ plus qu’à l’absence de patients avec douleurs musculo-squelettiques comme nous le verrons plus loin. Le taux de 5,1 % provient d’un registre de maladies rhumatologiques pédiatriques créé en 1992 par des rhumatologues pédiatres de 73 centres localisés aux États-Unis et Canada (Bowyer et Roettcher, 1996
). Ce registre comprend 5 245 enfants suivis sur 36 mois entre 1992 et 1995. Toujours au Canada, une association de rhumatologues provenant de 13 centres, a analysé les données de 3 362 jeunes, vus pour la première fois entre mai 1991 et avril 1993, et retrouve une incidence du SFMJ de 0,35 % (Malleson et coll., 1996
). Au sein de cette cohorte, 6 % des patients consultent en rhumatologie pédiatrique pour des syndromes douloureux dont le SFMJ fait partie. En Angleterre, aucun enfant diagnostiqué SFMJ n’a été retrouvé au sein du registre de 23 centres de rhumatologie pédiatrique incluant 4 948 enfants suivis entre 1989 et 1995 (Symmons et coll., 1996
).
). Les congrès annuels de la Société française de rhumatologie pédiatrique (SOFREMIP) n’ont pas comporté de communications à ce sujet ces 5 dernières années2
. Deux questions se posent face à ces chiffres disparates :
). Dans cette étude, le diagnostic de « SFMJ » n’est pas évoqué. L’auteur décrit un groupe de patients (79/875 soit 9 %) suivis pour des douleurs musculo-squelettiques d’origine traumatique ou mécanique, et un groupe (259) pour lequel aucun diagnostic n’a été posé. Parmi ce dernier groupe pour lequel un suivi a été réalisé, 62 % (184) des enfants avaient des arthralgies sans retentissement fonctionnel et d’évolution favorable dans le temps. On peut supposer que le terme de « SFMJ » n’a jamais été évoqué par méconnaissance du terme dans cette étude, sachant que Yunus et Masi avaient proposé cette définition en 1985. De même, le registre de Symmons et coll. en Angleterre ne recense que des diagnostics selon une liste donnée dans laquelle le SFMJ n’est pas proposé (Symmons et coll., 1996
). Une case « autres » pouvait être cochée, dans laquelle le diagnostic était librement renseigné. Dans leur discussion, les auteurs parlent d’un taux stable de FM au cours de l’étude sans en donner le chiffre. On suppose donc que parmi les patients avec douleurs mécaniques « autres » (n = 232 ; 23 %) se trouvent des patients diagnostiqués comme SFMJ. Le seul registre de rhumatologie pédiatrique qui rapporte des patients avec un diagnostic de « SFMJ » est celui de Bowyer et Roettcher (1996
). Dans cette cohorte, les auteurs différencient 2 types de patients : ceux dits SFMJ et ceux avec douleur idiopathique. Ces derniers ne sont pas décrits, ce qui ne permet pas de comprendre la différence entre la symptomatologie des patients avec douleur idiopathique et celle des patients diagnostiqués comme SFMJ. Le diagnostic étant déclaré par le praticien, on peut se poser la question de l’utilisation du terme SFMJ en fonction de ce dernier. À noter que parmi les centres participant à cette étude, on retrouve les centres de Cincinnati et de Seattle, c’est-à-dire les deux ayant par la suite majoritairement publié sur leurs patients diagnostiqués comme SFMJ ;
). Il aurait été intéressant de savoir comment auraient été diagnostiqués les patients rapportés dans ces cohortes comme « sans diagnostic » ou avec « douleurs musculo-squelettiques » secondairement référés vers des centres de la douleur.Éléments déterminants ou renforçants décrits chez les jeunes diagnostiqués comme atteints de syndrome fibromyalgique
). Les facteurs intrinsèques contribueraient à la douleur chronique et seraient entre autres : le genre (féminin ou masculin), un seuil de douleur abaissé, une hypermobilité articulaire, une moins bonne capacité à gérer la douleur, de mauvaises stratégies d’adaptation à la douleur et une labilité émotionnelle (perte de contrôle émotionnel). Les facteurs extrinsèques prédisposeraient à la douleur chronique et incluraient les contextes social et familial, un antécédent d’expérience douloureuse ou de traumatisme de type abus physique ou sexuel, la présence de troubles du sommeil et le déconditionnement à l’effort.
) ou l’arthrite juvénile idiopathique (AJI) (Conte et coll., 2003
). Dans ces deux études, les patients diagnostiqués comme atteints d’un SFMJ ont non seulement une sensibilité à la douleur accrue, mais aussi une perception de cette douleur différente avec une intensité ressentie plus importante, à l’origine d’un retentissement fonctionnel plus marqué. Ces différences ne sont cependant pas toujours statistiquement significatives, du fait du faible nombre de patients dans chaque étude (respectivement 18 patients dans le groupe SFMJ pour l’une et 16 pour l’autre). Il en est de même si on compare la sévérité des accès migraineux chez les patients avec ou sans SFMJ (selon les critères ACR 2010) : fréquence mais aussi caractéristiques évaluées à l’aide du score d’allodynie et par la caractérisation de l’intensité des douleurs hémi-crâniennes. Les patients migraineux avec SFMJ (5/151) étaient décrits comme ayant significativement plus d’épisodes migraineux avec des scores d’allodynie plus élevés et une mauvaise gestion de la douleur avec une nette tendance à la dramatisation comparés au groupe sans SFMJ associé (p < 0,005 ; de Tommaso et coll., 2017
). Cependant, la taille très faible des échantillons étudiés doit appeler à la prudence quant à une généralisation de ces observations.Facteurs intrinsèques contribuant à la douleur chronique
Un seuil de douleur abaissé, une hyperalgésie ou une sensibilisation centrale
). Trois paramètres ont été évalués lors d’une visite médicale unique :
).Une hypermobilité articulaire
). Lorsqu’elle est symptomatique, c’est-à-dire se manifestant par des douleurs articulaires, en présence d’autres symptômes définis dans la classification proposée par le consortium international Ehlers-Danlos et en l’absence actuelle de cause génétique retrouvée, le diagnostic retenu est celui de syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile4
(Malfait et coll., 2017
).
; Mikkelsson, 1999
; Eraso et coll., 2007
; Ting et coll., 2012
). La présence d’une hypermobilité articulaire chez les jeunes diagnostiqués comme atteints de SFMJ était très variable, allant de 4 % à 81 %. Seules trois études explicitaient les critères utilisés pour définir l’hypermobilité articulaire (Gedalia et coll., 1993
; Mikkelsson, 1999
; Eraso et coll., 2007
), celle de Ting et coll. (2012
) se référant au diagnostic posé par le médecin rhumatologue (tableau 16.VI
). L’équipe de Kashikar-Zuck a comparé, au sein des patients de leur cohorte SFMJ, les symptômes de ceux avec ou sans hypermobilité (Ting et coll., 2012
). Aucune différence significative n’a été mise en évidence, ce qui est en faveur d’une association fortuite entre SFMJ et hypermobilité au vu de la fréquence de cette dernière dans la population pédiatrique. Notons que les critères utilisés dans ces études ont pu surestimer le nombre de patients avec hypermobilité. En effet, le score de Beighton (dérivé du score original de Carter et Wilkinson ; Carter et Wilkinson, 1964
) est couramment utilisé pour diagnostiquer l’hypermobilité. Traditionnellement, ce score est considéré comme positif s’il atteint 4 points sur 9 chez l’adulte. Cette définition a été très critiquée en pédiatrie, le tissu conjonctif étant plus souple et les articulations plus hypermobiles pendant l’enfance (Cattalini et coll., 2015
). Pour ces raisons, le seuil de positivité du score de Beighton a été très débattu sur le plan international chez l’enfant avec des seuils proposés à 5/9 (Junge et coll., 2013
), 6/9 pour les enfants et adolescents pré-pubères selon l’Union nationale des syndromes d’Ehlers-Danlos (UNSED5
), voire 7/9 pour d’autres (Smits-Engelsman et coll., 2011
). Récemment, le score de Beighton a été incorporé dans un ensemble plus complet de critères appelés critères de Brighton, qui tiennent compte de la nature multi-systémique possible du syndrome d’hypermobilité (Grahame et coll., 2000
) mais ces critères n’ont pas été officiellement validés en pédiatrie. Les critères diagnostiques du syndrome d’hypermobilité ont été précisés au cours d’un colloque d’experts en 2017, en les distinguant des syndromes d’Ehlers-Danlos avec anomalie identifiée du tissu conjonctif (Malfait et coll., 2017
).
). Récemment une corrélation entre présence d’une hypermobilité et sensibilisation à la douleur a été suggérée dans un groupe de 40 adolescentes (Bettini et coll., 2018).Tableau 16.VI Études portant sur l’hypermobilité articulaire chez les patients avec SFMJ
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Référence
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N
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Lieu
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Évaluation
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Outil
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Pathologie
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338 écoliers
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Israël
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Hypermobilité :
(a) hyperextension des doigts afin qu’ils soient parallèles aux avant-bras ;
(b) apposition des pouces à la surface des avant-bras ;
(c) hyperextension des coudes > 10 o ;
(d) hyperextension des genoux > 10o ; (e) flexion du tronc, genoux tendus, avec paumes au sol. 3/5 critères
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ACR
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81 % des 21 enfants avec SFMJ avaient une hypermobilité (association significative)
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22
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Finlande
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Score de Beighton
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ACR
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1 hypermobilité
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148
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États-Unis (Nouvelle-Orléans)
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Carter et Wilkinson
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ACR
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31 (21 %) avec hypermobilité
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131
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États-Unis (Cincinnati)
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Hypermobilité évaluée par le clinicien
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Y&M
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48 % d’hypermobiles
Pas de différence dans les groupes hypermobile et non hypermobile
|
Critères ACR : ACR 1990 ; Y&M : Yunus et Masi.
). Il s’agit en fait de douleurs musculo-squelettiques diffuses sans syndrome d’Ehlers-Danlos vrai.Troubles dysautonomiques
). Une dysautonomie peut être confirmée par des tests de la fonction autonome cardiaque, tels que l’analyse de la variabilité de la fréquence cardiaque et les tests de stress. Une seule étude a été réalisée au Brésil chez des patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ selon les critères ACR 2010 (Maia et coll., 2016
). Cette étude multicentrique a été réalisée chez 25 adolescentes (11-17 ans) suivies dans 4 centres de rhumatologie pédiatrique comparées à 25 contrôles (camarades de classes en bonne santé et non sportives). Une épreuve d’effort était réalisée chez toutes afin d’étudier la capacité aérobie et la fonction autonome du cÅ“ur. Le groupe SFMJ présentait une diminution de la fonction chronotrope et une diminution de la tolérance et de la capacité cardiaque par rapport aux témoins, faisant évoquer une dysautonomie. Cette observation n’a à ce jour pas été répliquée dans d’autres études.Un contrôle et une gestion de la douleur inadaptés
). Sherry a noté que ces enfants ont souvent une incongruité entre la douleur signalée qui est souvent « insupportable » et l’examen physique qui ne retrouve que peu de douleur avec un patient se déplaçant sans difficulté apparente. Ce même comportement a été observé par Schanberg et coll. (Schanberg et coll., 1996
). À noter que leur protocole ne comportait que des activités quotidiennes relativement simples telles que s’asseoir, se tenir debout et marcher et proposait d’observer le comportement de la douleur lors de mouvements plus intenses tels que : soulever, monter des escaliers, courir, sauter ou se pencher. Aucune étude pédiatrique n’a permis de comprendre cette expérience douloureuse particulière vécue et rapportée par le patient diagnostiqué avec un SFMJ comme plus intense que celle décrite par les patients atteints de rhumatismes inflammatoires par exemple (Conte et coll., 2003
; Fraga et coll., 2018
).Contexte psychologique
). Cet impact semble particulièrement marqué chez les patients diagnostiqués SFMJ, si on les compare à d’autres. La perception de la douleur, la réponse au stress, le tempérament, les troubles affectifs, l’adaptation psychologique des parents et les conflits familiaux ont été étudiés au sein d’une petite population de 16 patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ, de 16 patients atteints d’AJI7
et de 16 contrôles appariés sur l’âge et le sexe (Conte et coll., 2003
). Les patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ seraient plus tristes, plus douloureux, moins stables, plus anxieux et auraient plus de symptômes dépressifs que les patients atteints d’AJI. De même, les auteurs trouvent une moins bonne cohésion familiale dans l’entourage des patients avec SFMJ qu’avec AJI. Les parents d’enfants diagnostiqués comme atteints de SFMJ se décrivent, selon une auto-évaluation, comme ayant un niveau d’anxiété et de symptômes dépressifs plus élevé et un ajustement psychologique global inférieur à celui des parents d’enfants des autres groupes.
; Gedalia et coll., 2000
) et un trouble anxieux chez 2 % à 70 % (Yunus et Masi, 1985
; Eraso et coll., 2007
; Cunningham et coll., 2015
). Ces variations sont probablement dues à des différences de définitions et d’outils d’évaluation utilisés pour étayer ces troubles (tableau 16.IV
). En effet, l’évaluation des symptômes dépressifs et donc des troubles de l’humeur était souvent faite par questionnaire avec, dans le meilleur des cas, un diagnostic établi par un psychiatre ou un psychologue. L’utilisation du terme « dépression » n’était donc pas bien explicitée, et il n’était pas possible de savoir si cela correspondait à des symptômes dépressifs ou à un véritable épisode dépressif majeur selon le DSM-III/IV. Seuls Kashikar-Zuck et coll. ont étudié les troubles de l’humeur chez leurs patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ, à l’âge pédiatrique et à l’âge adulte, avec un score validé : le Kiddie-Schedule for Affective Disorders and Schizophrenia-Present and Lifetime Version (K-SADS-PL1) (Chambers et coll., 1985
; Kaufman et coll., 1997
), renseignés avec un psychologue. En 2008, ils étudient 76 adolescents (11-18 ans) et montrent que 67 % d’entre eux ont un trouble psychiatrique avec dans la majorité un trouble anxieux (67 %) (Kashikar-Zuck et coll., 2008a
). Ces troubles sont plus fréquents que ceux retrouvés dans la population générale (87,7 % vs 9 %-13 %). Comparé au SFM adulte, Kashikar-Zuck et coll. (2008a
) rapportent une répartition des troubles psychiatriques différente dans le SFMJ avec notamment moins de troubles dépressifs majeurs chez le jeune (26 % vs 61 %-69 % ; tableau 16.IV
). De même, lorsqu’ils étudient ces troubles chez 91 de leurs patients avec persistance de symptômes fibromyalgiques à l’âge adulte, ils mettent en évidence une persistance des troubles psychiatriques avec plus de troubles dépressifs et anxieux que chez des adultes de même âge et sexe recrutés au sein de leurs anciens camarades de classe (p < 0,001) (Cunningham et coll., 2015
).Facteurs extrinsèques prédisposant à la douleur chronique
; Mikkelsson et coll., 2008
; Lynch-Jordan et coll., 2015
). Une mauvaise gestion de la douleur avec dramatisation chez les enfants ou les parents, appelée catastrophisme, contribue au développement de facteurs prédisposants tels que l’anxiété et la dépression, et est susceptible d’induire de véritables cercles vicieux (Libby et Glenwick, 2010
).Le contexte familial
). En outre, plusieurs études retrouvent un taux important (16 % à 71 %) de mères atteintes d’un SFM dans les cohortes de jeunes diagnostiqués comme atteints de SFMJ (Buskila et coll., 1993
; Vandvik et Forseth, 1994
; Roizenblatt et coll., 1997
; Libby et Glenwick, 2010
). Une seule étude, réalisée par Kashikar-Zuck et coll., a comparé le pourcentage de mères avec SFM au sein d’une population d’enfants avec un diagnostic de SFMJ (n = 47) comparée à une population de témoins (n = 46 ; Kashikar-Zuck et coll., 2008b
). Les auteurs observent un taux plus important de mères atteintes d’un SFM dans le groupe SFMJ que dans le groupe témoin (24,3 % vs 5,7 %) ; par ailleurs, les mères d’adolescents diagnostiqués comme atteints d’un SFMJ se décrivent comme ayant présenté deux fois plus de douleurs ayant nécessité un traitement et plus de symptômes dépressifs que les mères des témoins. L’hypothèse d’une prédisposition génétique est possible, mais non encore validée à ce jour (Buskila et coll., 2005
) (voir également les chapitres « Épidémiologie du syndrome fibromyalgique » et « Neurobiologie de la douleur chronique dans la fibromyalgique et biomarqueurs »).
). Les patients atteints de DC sont sélectionnés via le web ou des prospectus distribués à des centres de douleurs ou aux praticiens suivant des patients adultes atteints de SFM. Les contrôles sont recrutés via le site web de l’université. Chaque participant répond à des questionnaires concernant leur douleur, leur niveau socio-économique, la présence d’une douleur chez leur enfant et ses caractéristiques. La réaction des parents à la douleur de leur enfant était aussi analysée via des questionnaires. Pour les parents avec DC, une brève entrevue était réalisée afin de recueillir des informations concernant leur parentalité. Au sein du groupe de parents avec DC, 39 % étaient atteints d’un SFM, et le nombre d’enfants avec des douleurs survenant plus d’une fois par semaine était supérieur à celui du groupe témoin (25,3 % vs 11,1 %). Concernant les caractéristiques sociodémographiques des parents, des différences ont été mises en évidence entre les deux groupes notamment au niveau de l’âge (41,6 ans chez les parents avec DC versus 44,6 ans en moyenne chez les contrôles), de leur niveau d’éducation et de leur revenu. De fait, le taux de parents au chômage ou handicapés était plus élevé dans le groupe avec DC, avec respectivement 12,5 % de parents au chômage contre 2,8 % dans le groupe contrôle, et 16,1 % de parents avec handicap contre 0 % dans le groupe contrôle. En ce qui concerne la parentalité, les parents du groupe avec DC cautionnent davantage la douleur chez leurs adolescents et sont donc plus susceptibles de dramatiser et de réagir avec des comportements plus protecteurs (Wilson et Fales, 2015
).
). Les parents du groupe SFMJ ont montré des niveaux plus élevés d’anxiété et de symptômes dépressifs (questionnaire Children’s Depression Inventory) ainsi qu’un ajustement psychologique en général plus faible comparativement aux parents du groupe AJI et aux parents du groupe de témoins sains. Cependant ces différences ne sont pas retrouvées dans l’étude de Reid et coll., qui analyse les interactions parent-enfant dans trois groupes (SFMJ, arthrite rhumatoïde juvénile, et contrôles non douloureux) lors d’une tâche de douleur expérimentale (Reid et coll., 1997
). Aucune étude ne permet de savoir si le contexte familial résulte d’un mécanisme d’adaptation mis en place pour faire face à un enfant atteint de douleurs chroniques ou s’il est un élément facilitateur du développement de ces douleurs chroniques.Un antécédent de traumatisme
). De nombreux patients avaient des facteurs « de stress » selon les auteurs, tels qu’une famille monoparentale (28 %), des difficultés d’apprentissage (29 %), ou, plus grave, des antécédents d’abus sexuels (9 %).
). Ces patientes ont été divisées en fonction de leur âge (enfants < 9 ans, adolescents 9-17 ans et adultes > 17 ans) et ont été comparées à un groupe contrôle apparié sur le sexe et l’âge, tiré au hasard et n’ayant pas eu de diagnostic de TSPT. Mille vingt-cinq adolescents (12,8 ans en moyenne) et 647 enfants (4,8 ans en moyenne) avec TPST ont ainsi été identifiés. Une association entre la présence d’un TPST et le développement d’une autre maladie telle que la « fibromyalgie » a été recherchée. Le terme « fibromyalgie » n’est pas explicité dans l’article : il correspond à une requête par codage où chaque information est répertoriée sous la forme d’un code selon une classification mise au point par des systèmes d’assurances maladie. Le rôle prédictif du TPST dans la survenue d’une « fibromyalgie » n’a pu être établi dans cette étude, et ceci quel que soit l’âge.
). Un abus sexuel dans l’enfance est retrouvé dans 15,4 % des cas contre 0 % chez les témoins, et un abus physique dans 6,6 % des cas contre 0 %. Ces mêmes éléments ont à nouveau été étudiés en 2017 par la même équipe (Nelson et coll., 2017). Cette fois, 86 patients diagnostiqués dans l’enfance comme atteints de SFMJ et devenus adultes, vs 24 témoins âgés de 23 ans en moyenne, ont été interrogés sur un antécédent de traumatisme (abus sexuel, abus physique entre autres) et/ou de TSPT lors d’une consultation. Dans cette population, ils retrouvent 11,2 % d’abus sexuel vs 14,8 % dans la population générale, et 14,7 % d’abus physique vs 8 % dans la population générale. Ces résultats restent néanmoins discutables pour au moins deux raisons :La présence de troubles du sommeil
).
; Cheng et coll., 2005
; Eraso et coll., 2007
). Ces études sont donc essentiellement descriptives et posent plusieurs questions dont celle de la définition du trouble du sommeil et de leur origine. En effet, aucun questionnaire validé dans les troubles du sommeil n’a été utilisé. Nous avons donc exclu ces études de notre analyse vu leur faible qualité méthodologique avec effectifs faibles. Notons cependant que la plupart des adolescents douloureux chroniques ont des troubles du sommeil (Valrie et coll., 2013
). Comme chez les adultes le lien de cause à effet ne peut être déterminé (Evans et coll., 2017
; Pavlova et coll., 2017
) (voir également le chapitre « Perturbations du sommeil et troubles psychiatriques dans le syndrome fibromyalgique »).Un déconditionnement à l’effort
). Des troubles de la marche ont été mis en évidence avec des patients ayant des plus petites foulées et une diminution de la force musculaire au niveau du genou et des hanches. Enfin, les patients rapportent plus de douleur et de peur du mouvement que les contrôles. Une étude multicentrique mexicaine de la fonction cardiaque chez 25 adolescents (11-17 ans, 18 jeunes filles) diagnostiqués comme atteints d’un SFMJ d’après les critères ACR 2010, comparés à 25 contrôles sains appariés en âge et genre, a mis en évidence une diminution de la fréquence cardiaque de recouvrement et une diminution de la tolérance et de la capacité cardiaque en faveur d’un déconditionnement à l’effort (Maia et coll., 2016
). Les auteurs de ces études suggèrent ainsi l’existence d’un cercle vicieux dans la forme juvénile de SFM similaire à celui évoqué chez l’adulte avec un déconditionnement à l’effort à l’origine d’une peur du mouvement qui aboutit à des conduites d’évitement aggravant alors la condition physique, ce qui emporte le patient dans une spirale négative favorisant la pérennité de la douleur chronique. Il est important de noter que les effectifs faibles dans ces études ne permettent pas de généraliser.Syndromes associés au syndrome fibromyalgique juvénile : facteurs d’induction, d’aggravation ou de concomitance ?
). L’hypothèse avancée est que la maladie cÅ“liaque, par le biais du mécanisme de la carence en vitamine D, pourrait provoquer des symptômes imitant la FM (Goldman et Ausiello, 2007
). Cette association est en fait non démontrée. En 2011, Taubman et coll. ont étudié la fréquence de la maladie cÅ“liaque chez 50 patients âgés de 12 à 17 ans diagnostiqués comme atteints d’un SFMJ selon les critères ACR 1990 dans l’hypothèse d’une maladie sub-clinique à l’origine du développement de la SFMJ. Un seul patient avait des anticorps anti-transglutaminases et donc une maladie cÅ“liaque, réfutant cette association (Taubman et coll., 2011
).
; Okifuji et coll., 2009
; Ursini et coll., 2011
). Une seule étude explorant cette question a été réalisée chez le jeune (da Silva et coll., 2012
). Le poids, la taille, l’impédancemétrie, les ingesta sur 24 h et les résultats du questionnaire KEDS score ont été analysés chez 23 adolescentes (10,2 à 19,9 ans) diagnostiquées comme atteintes de SFMJ (temps médian au diagnostic de 13,5 mois) vs 23 contrôles appariés sur le sexe, l’âge et le stade pubertaire. Aucune différence significative n’a été mise en évidence entre ces deux populations concernant l’IMC, le pourcentage de masse grasse, les ingesta et le comportement alimentaire. La petite taille de la population pédiatrique étudiée ici ne permet cependant pas d’affirmer ou d’infirmer cette absence d’association.
). La seconde étude menée par Kasapçopur et coll. trouve 1,8 % de patients répondant aux critères ACR 1990 de SFMJ parmi 108 patients atteints de FMF, un taux similaire à la population contrôle (Kasapçopur et coll., 2004
). Ces résultats contradictoires peuvent être liés à la différence des critères utilisés pour le SFMJ. À noter que nous n’avons pas identifié d’étude investiguant l’association possible entre spondylarthrite de l’adolescent et « SFMJ » alors que cette situation est fréquente en pratique clinique. À ce jour, il n’y a donc pas assez d’études pour conclure à une prédisposition des patients avec SFMJ à développer une maladie rhumatismale chronique et vice versa.
). Sur 47 jeunes âgés de 6 à 17 ans suivis pour douleurs abdominales récurrentes, 8 étaient diagnostiqués comme atteints de SFM selon les critères ACR 1990 avec un nombre significatif de points sensibles mais en partie différents de ceux de la FMJ concernant leur localisation.Retentissement du syndrome fibromyalgique juvénile
sur le jeune
Parcours scolaire
). En 2002, Kashikar-Zuck et coll. trouvent un taux moyen de 5,3 jours d’absence par mois dans leur cohorte SFMJ versus 3,73 chez les adolescents avec lombalgies chroniques (Kashikar-Zuck et coll., 2002
). Afin de mieux évaluer cet aspect, cette dernière équipe reprend leur cohorte pour recenser le taux d’absentéisme scolaire chez 102 adolescents (11-18 ans) à l’aide de données déclaratives fournies par les parents et des registres scolaires des lycées et collèges fréquentés (Kashikar-Zuck et coll., 2010b
). Les données ont été comparées à celles d’enfants contrôles du même État. Un taux d’absentéisme moyen de 3 jours par mois a été mis en évidence dans la cohorte SFMJ avec en moyenne un total de 27 jours d’absence sur l’année scolaire contre 9 dans la population générale. Treize patients (12,7 %) suivaient une scolarité à domicile contre 2,2 % dans la population générale. Les patients ont été comparés en fonction de leur mode de scolarisation (domicile ou non). Aucune différence n’a été retrouvée tant sur le plan de la douleur, des antécédents familiaux, du score de fonctionnement et des troubles anxieux ou dépressifs. Aucune étude ne s’est intéressée à la cause précise (douleur, fatigue, sommeil...) de l’absentéisme scolaire des patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ.Estime de soi
). Les jeunes atteints d’un SFMJ sont décrits comme moins agressifs et plus sensibles par leurs professeurs, et moins populaires par leurs pairs. Le retentissement sur l’estime de soi est le plus marqué avec des adolescents qui se perçoivent comme trop sensibles et isolés, impopulaires, non sympathiques et non éligibles à une relation d’amitié.État psychologique et fonctionnement social
; Kashikar-Zuck et coll., 2008b
; Kashikar-Zuck et coll., 2010c
; Kashikar-Zuck et coll., 2013b
).
). Les patients atteints de SFMJ avaient une perception et un score d’intensité (échelle visuelle analogique) de la douleur plus importants que les patients atteints d’AJI. Il en était de même pour la fatigue et l’incapacité fonctionnelle avec des niveaux plus élevés dans le groupe SFMJ. En revanche, aucune différence significative n’a été notée en ce qui concerne l’adaptation psychologique à la douleur dans les 3 groupes. Fraga et coll. retrouvent une augmentation significative des scores de perception de la douleur associée à une diminution significative des scores de stratégie d’adaptation chez les 50 patients atteints de SFMJ versus les 50 patients AJI et les contrôles sains (8 à 18 ans dans les deux groupes) (Fraga et coll., 2018
).
). Afin d’expliquer ce lien, ce travail évoque l’hypothèse de changement de stratégies d’adaptation face à la douleur chez les adolescents atteints d’un SFMJ en se référant à une étude faite sur des patients pédiatriques drépanocytaires comparés aux adultes (Gil et coll., 1993
). Ces fluctuations de stratégies d’adaptation perçues à l’adolescence seraient liées à une augmentation de pensées négatives qui pourraient être la cause d’un tel dysfonctionnement au quotidien. Ainsi, on observe chez ces patients des comportements de malades, des consultations médicales et un absentéisme scolaire plus fréquents que chez ceux présentant d’autres types de douleur chronique ou les contrôles sains (Liphaus et Lucia, 2001
; Conte et coll., 2003
; Kashikar-Zuck et coll., 2010c
). Ils mobiliseraient davantage de stratégies d’évitement dans les situations aversives que les sujets contrôles, pattern comportemental retrouvé chez leurs parents (Reid et coll., 1997
). Cette hypothèse suggère que ces patients pourraient bénéficier de thérapies cognitivo-comportementales (TCC) conçues pour accroître la perception du contrôle de la douleur et diminuer les cognitions négatives liées à la douleur. Une intervention au cours de l’adolescence pourrait faciliter l’apprentissage de stratégies d’adaptation efficaces avant que des schémas d’adaptation inadaptés ne se développent au risque d’aggraver le retentissement fonctionnel (Schanberg et coll., 1996
).Prise en charge du syndrome fibromyalgique juvénile
Traitement pharmacologique
). Dans ce formulaire, le ressenti du patient sur l’efficacité du médicament était aussi renseigné. Les médicaments les plus utilisés étaient les antidépresseurs (n = 37), les anticonvulsivants (n = 15), les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS, n = 14) et les antalgiques opioïdes (n = 12). Dans une moindre mesure, les patients avaient pris des myorelaxants, des antipsychotiques ou anxiolytiques et des antimigraineux. Ces médicaments étaient rapportés comme efficaces par les patients dans 50 % des cas sauf pour les anticonvulsivants qui avaient un taux d’efficacité plus faible (30 %). Les opioïdes étaient décrits comme efficaces à 70 % par les patients. Ces résultats reflètent le ressenti d’un nombre restreint de patients et ne sont pas en accord avec les résultats des études d’évaluation des traitements médicamenteux analysés ci-dessous. Ils doivent donc être considérés comme une autoconsommation de médicaments non recommandés.Antalgiques et AINS
).Les anticonvulsivants
).
; Arnold et coll., 2018
). Le schéma de l’étude menée en 2016 était un essai multicentrique (36 centres de 4 pays) contrôlé randomisé en double aveugle versus placebo mené sur 15 semaines, suivi d’une étude d’extension en ouvert sur 6 mois. Cent sept patients (12 à 17 ans) diagnostiqués comme atteints de SFMJ selon les critères de Yunus et Masi ou ACR 1990 ont été inclus, et 80 ont participé à l’ensemble de l’étude. Lors de la première phase de l’étude (15 semaines), les patients recevaient une dose croissante de prégabaline (75 mg/j jusqu’à 450 mg/j) sur 3 semaines selon l’appréciation du clinicien puis la dose était maintenue stable pendant 12 semaines. Celle-ci pouvait être à nouveau ajustée pendant la phase en ouvert. Tous les autres antalgiques devaient être arrêtés avant l’inclusion et seul l’acétaminophène (paracétamol) était toléré pendant l’étude. L’intensité de la douleur (échelle de 10) était évaluée 2 fois/j (matin et soir) par le patient et l’information collectée toutes les 24 h. L’objectif principal de l’étude était de déterminer s’il existait une différence entre le score moyen de douleur à J 0 et à 15 semaines entre les deux groupes (avec traitement ou sous placebo). Aucune amélioration statistiquement significative du score moyen de la douleur n’a été observée entre les deux groupes entre J 0 et 15 semaines (prégabaline vs placebo) avec une diminution supérieure ou égale à 30 % de la douleur identique dans les deux groupes (33,3 % versus 31,4 %). Les résultats d’efficacité secondaire comprenaient l’étude du score de douleur moyen à chaque semaine entre les deux groupes. Dans ce cas, une diminution significative a été mise en évidence entre l’intensité moyenne de la douleur hebdomadaire dans le groupe prégabaline vs placebo lors de l’évaluation à 10 semaines (p < 0,05) et à 15 semaines (p = 0,035). Les effets secondaires les plus rapportés étaient des vertiges et des nausées. Un patient a présenté une dépression sévère. L’efficacité de la prégabaline n’a donc pas été démontrée dans cette unique étude chez l’adolescent.
).Les antidépresseurs
). Cependant, seule l’efficacité du milnacipran (ISRS) a fait l’objet d’une évaluation chez les enfants et adolescents (Arnold et coll., 2015
). Les patients (13-17 ans) recevaient du milnacipran (à la dose de 50 mg, 75 mg ou 100 mg/j) pendant 8 semaines, puis une étude de sevrage randomisée en double aveugle contrôlée (1:2) avec placebo était réalisée chez les patients répondeurs lors de cette première phase (> 50 % d’amélioration de la douleur) sur 8 semaines. Enfin, tous les patients pouvaient participer à la phase d’extension de traitement par milnacipran en ouvert sur 52 semaines. L’objectif principal de l’étude était de déterminer s’il y avait une perte d’efficacité lors du retrait du médicament dans le groupe traité comparé au groupe placebo. L’étude a dû être interrompue du fait de difficultés d’inclusion (20 patients dans la phase en double aveugle). Néanmoins, la phase ouverte de l’étude a mis en évidence une légère amélioration de la douleur (5,4/10 en moyenne vs 6,5/10), de la qualité de vie et du fonctionnement global chez les patients sous milnacipran avec une bonne tolérance. Cette étude n’a pas permis de conclure sur l’intérêt de l’utilisation ou non du milnacipran.Les opioïdes
) et les directives de l’American Pain Society (APS) recommandent que les analgésiques opioïdes soient utilisés avec prudence et après épuisement de toutes les autres options thérapeutiques. En effet, leur utilisation importante dans le cadre de douleurs chroniques non cancéreuses entre 1990 et 2010 aux États-Unis s’est accompagnée d’une augmentation d’incidents graves comme intoxications accidentelles, décès par overdose dû à un mésusage et d’un usage récréatif chez les adolescents avec dépendance à l’âge adulte (Rudd et coll., 2016
; Gmuca et Sherry, 2017
; McCabe et coll., 2018
). Dans ce contexte, la non-utilisation des opioïdes dans la prise en charge de la douleur chronique chez l’enfant et l’adolescent est recommandée. Ce point est essentiel à la prévention de la dépendance, des intoxications, du mésusage et des décès possiblement causés par la prise d’opioïdes aussi bien chez les adolescents que chez les adultes (Gmuca et Sherry, 2017
; voir également le chapitre « Prise en charge médicamenteuse du syndrome fibromyalgique »).Autres médications
). L’ubiquinol-10 (COQ10H2) est la forme réduite du coenzyme Q10 et agit comme antioxydant dans les mitochondries et dans les membranes lipidiques en piégeant directement les radicaux libres ou en association avec l’α-tocophérol (Yamamoto, 2005
). Sur la base de ces données, une étude randomisée en double aveugle a été réalisée chez 10 enfants (14,7 ans en moyenne) diagnostiqués comme atteints de SFMJ selon les critères ACR 1990 (Miyamae et coll., 2013
). Elle comportait 3 phases séquentielles en double aveugle : 1) traitement de 12 semaines avec du COQ10H2 à la dose de 100 mg/j, 2) traitement de 8 semaines avec du placebo, 3) traitement de 8 semaines avec du COQ10H2. L’intensité de la douleur, la qualité de vie et la fatigue étaient évaluées par le patient en présence d’un attaché de recherche clinique en utilisant l’échelle visuelle analogique (EVA) pour la douleur et l’échelle de fatigue de Chalder. Les résultats ne montrent aucune différence sur la douleur et les dommages oxydatifs tissulaires. En revanche, la fatigue générale et l’hypercholestérolémie semblent atténuées, mais ces résultats sont peu concluants vu la taille de la population testée (10 patients).Traitements non pharmacologiques
). À 2 ans d’évolution, seuls 2 patients sur 35 pratiquent de la physiothérapie, 25 patients sur 38 poursuivent une psychothérapie mais on observe surtout l’apparition de traitements non conventionnels tels que l’acupuncture, la chiropratique, les massages, les vitamines ou la naturopathie bien qu’aucune étude ne fasse état de l’efficacité de médecines alternatives dans le SFMJ.Hygiène de sommeil
). Hoffart et collaborateurs ont étudié la qualité du sommeil chez 20 patients (12-18 ans) avec douleurs musculo-squelettiques inclus dans un programme de réhabilitation sur 3 semaines (Hoffart et coll., 2016
). Ces patients étaient évalués toutes les semaines pendant le programme et 1 mois après. L’actigraphie a montré une amélioration du nombre total de minutes endormies après la première semaine (p = 0,02) et à la fin du programme (p = 0,03), mais ce résultat n’est pas pérenne à 1 mois après l’arrêt (p = 0,21). Une amélioration était également rapportée pour la qualité du sommeil, la latence et la première phase du sommeil mais ces résultats n’étaient pas significatifs et non corrélés à l’actigraphie. Si rien ne peut être conclu de cette étude, une bonne hygiène du sommeil semble évidemment raisonnable.Psychothérapies cognitivo-comportementales (TCC)
). Dans cette étude croisée, la TCC était comparée à un programme d’auto-surveillance sur 16 semaines avec deux groupes de patients suivant les deux prises en charge mais dans un ordre inverse. Aucune différence significative n’a été mise en évidence. Cette équipe a mené une seconde étude randomisée contrôlée sur 114 patients comparant la TCC individuelle à un programme éducatif individualisé sur 8 semaines (1 séance par semaine) avec un suivi de 4 mois au décours (Kashikar-Zuck et coll., 2012
). Cent patients âgés de 11 à 18 ans (inclus entre 2005 et 2009) ont terminé le suivi. L’incapacité fonctionnelle, l’intensité de la douleur et les symptômes dépressifs étaient évalués. Une amélioration de l’incapacité fonctionnelle et des symptômes dépressifs a été mise en évidence dans les deux groupes avec une tendance un peu plus marquée dans le groupe TCC mais de manière non significative. L’intensité de la douleur (évaluée par le patient à l’aide d’EVA) n’a quant à elle été que très peu diminuée (5,7 vs 5,8) par la TCC. Enfin, Kashikar-Zuck et coll. ont montré l’inefficacité des TCC dans la remise en mouvement des patients, pourtant essentielle dans la prise en charge de toute maladie rhumatismale (Kashikar-Zuck et coll., 2013a
). Ces deux dernières études ne sont pas concluantes pour au moins deux raisons :
).
; Simons et Basch, 2016
; Fisher et coll., 2018
).Activité physique adaptée et thérapies combinées
) (voir également le chapitre « Activités physiques et thérapie multidisciplinaire dans le syndrome fibromyalgique »). On sait qu’augmenter l’activité physique adaptée chez les patients qui ont un rhumatisme inflammatoire a montré une amélioration sur les douleurs, la fatigue et la qualité de vie, cet effet ayant lui-même un bénéfice sur l’évolution du syndrome (Takken et coll., 2008
). L’évaluation, le suivi et la lutte contre l’inactivité physique et les comportements sédentaires font maintenant partie intégrante de la prise en charge rhumatologique des patients en plus des traitements conventionnels (Gualano et coll., 2017
). Plusieurs études ont évalué l’effet de l’activité physique seule ou combinée à d’autres thérapies sur le SFMJ et peuvent être réparties en 3 groupes :
; Kashikar-Zuck et coll., 2016
) ;
; Olsen et coll., 2013
) ;
). Ces exercices ont été conçus à partir des faiblesses musculaires mises en évidence lors de leur étude de la marche chez les patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ (Kashikar-Zuck et coll., 2010a
). Ce programme a été validé sur plusieurs études pilotes. Dans la première étude, il consistait en des sessions collectives de 60 minutes (30 minutes de TCC et 30 minutes d’exercice musculaire) à raison d’une fois par semaine. La tolérance et la faisabilité du programme ont été initialement testées sur 11 adolescentes de 12 à 18 ans puis le temps et le type d’exercice ont été progressivement adaptés dans les études ultérieures (Kashikar-Zuck et coll., 2016
; Tran et coll., 2017
; Kashikar-Zuck et coll., 2018
). L’évaluation avant et après le programme FIT teens (avec modification des exercices réalisés et un allongement des sessions à 90 minutes) menée chez 22 patients (12-18 ans) montre une amélioration significative des capacités physiques, de la qualité de vie et une diminution de l’incapacité fonctionnelle et de la peur du mouvement (Tran et coll., 2017
). Récemment, le programme FIT teens a été comparé à la TCC seule chez 36 patients diagnostiqués comme atteints de SFMJ (12-18 ans). L’intensité de la douleur (évaluée à l’aide d’EVA) et l’incapacité étaient mesurées avant et après le programme puis à 3 mois. Une diminution significative de la douleur a été mise en évidence dans le groupe FIT teens à la fin du programme et à 3 mois. Une amélioration de l’incapacité fonctionnelle est visible à la fin du traitement dans le groupe FIT teens comparé au groupe TCC, mais elle n’est plus significative à 3 mois (Kashikar-Zuck et coll., 2018
).
). Sherry et coll. ont quant à eux mis au point un programme plus intense associant activité physique (marche, montée d’escalier, squats, activités d’endurance, danse... 5 à 6 heures par jour) à des séances de TCC d’au moins 4 heures par semaine (Sherry et coll., 2015
). Soixante-quatre enfants ont suivi le programme pendant en moyenne 23 jours (la durée était adaptée à l’état du patient) et étaient évalués avant, à la fin et 1 an après traitement. À la fin et à un an d’évolution, les auteurs retrouvent une diminution de la douleur (p < 0,05) avec une meilleure qualité de vie et un meilleur fonctionnement scolaire (p < 0,05).
). Dans leur étude, ils retrouvent une amélioration significative de la condition physique et une diminution de l’intensité de la douleur à la fin des 12 semaines pour les deux activités. L’ensemble de ces études souligne l’importance d’une activité physique plutôt intensive, et montre qu’aucune exacerbation des symptômes n’est retrouvée suite à ces programmes.Recommandations thérapeutiques disponibles
).
). En Europe, un groupe de travail pluridisciplinaire allemand a également publié par deux fois des recommandations sur les « so-called » SFMJ, qui corroborent l’analyse des publications réalisée ici (Zernikow et coll., 2012a
; Draheim et coll., 2017
). Ce groupe préconise de :Évolution du syndrome fibromyalgique juvénile
).
). Une équipe espagnole (Calvo et coll., 1999
) a rapporté une évolution favorable dans 68 % des cas à 48 mois (Eraso et coll., 2007
). Ces études sont cependant anciennes. Les études les plus pessimistes sont celles des équipes américaines avec 0 à 20 % de guérison malgré un suivi qui peut aller jusqu’à 8 ans. Ainsi l’équipe de Kashikar-Zuck trouve un taux de guérison de 20 % chez 48 jeunes à 3,6 ans en 2010 (Kashikar-Zuck et coll., 2010c
), de 15 % chez 94 jeunes à 5,9 ans en 2014 avec 34 % de jeunes améliorés n’ayant plus tous les critères (Kashikar-Zuck et coll., 2014
), et de 0 % chez 91 jeunes à 2 ans en 2015 (même cohorte que précédemment étudiée plus en détail) avec cependant 48 % améliorés dits SFMJ subcliniques (Cunningham et coll., 2015
). Siegel et coll. et Gedalia et coll. rapportent un taux de guérison de 0 % après un suivi moyen de 2,6 ans et 18,3 mois, respectivement, avec 60 % de patients améliorés dans la cohorte de 50 jeunes évaluée par Gedalia et coll. (Siegel et coll., 1998
; Gedalia et coll., 2000
).
). La seule littérature qui soit contemporaine (publiée après les années 2000) est issue d’une même équipe qui a suivi une seule cohorte de patients, d’où des chiffres similaires. Dans cette cohorte de 91 jeunes, des troubles psychiatriques (anxiété et dépression) sont retrouvés fréquemment (70 %) à l’âge adulte (Cunningham et coll., 2015
). Cependant la dernière étude publiée en 2019 par la même équipe donne des résultats plus favorables : elle reprend le suivi de la même cohorte de 116 jeunes diagnostiqués en moyenne à 15 ans (critères Yunus et Masi) réévalués à 19, 22, et 24 ans (n = 86), avec les critères diagnostiques ACR 2010 (Kashikar-Zuck et coll., 2019
). À 8 ans de suivi, seulement 58 % des jeunes adultes répondent encore aux critères ACR 2010. Les autres ont encore des symptômes de l’ordre de douleurs légères ou modérées, de la fatigue, des troubles du sommeil, mais pas à un degré suffisant pour remplir les critères diagnostiques. Au final, il est difficile de conclure sur l’évolution des jeunes identifiés comme SFMJ dans la littérature actuelle du fait de cette grande disparité de résultats. Le taux d’amélioration semble cependant globalement important, même si la disparition totale des symptômes semble rare.Tableau 16.VII Études portant sur l’évolution du SFMJ
|
Référence
|
N
|
Lieu
|
Évaluation à
|
Outil
|
SFMJ (n ou %)
|
Guéris (n)
|
|
15
|
Israël
|
30 mois
|
ACR 1990
|
4/15
|
73 % (11)
|
|
|
45
|
New York
|
1 mois-7,6 ans (moyenne : 2,6 ans)
|
Échelle 0-10
Enquête de suivi (par téléphone pour 33)
|
100 %
|
0
|
|
|
16
|
Finlande
|
1 an
|
Questionnaire
Examen (ACR 1990)
|
4/16
|
19 % (3). Neuf ont des douleurs intermittentes
|
|
|
22
|
Espagne
|
48 mois
|
NC
|
NC
|
68,2 % (15)
|
|
|
50
|
Nouvelle- Orléans
|
18,3 mois
|
ACR 1990
|
20/50
|
0 ; 60 % sont améliorés
|
|
|
48
|
Cincinnati
|
3 ans
|
Y&M
|
60 %
|
< 20 %
|
|
|
94
|
Cincinnati
|
5,9 ans en moyenne
|
Examen avec points sensibles
(ACR 1990 et 2010)
|
52 %
|
15 % ; 34 % sont améliorés mais gardent des symptômes (FM sub-clinique*)
|
|
|
91
|
Cincinnati
|
Suivi cohorte 2014 sur 2 ans
|
ACR 1990
|
51 %
|
0 ; 48 % (44) sont améliorés mais gardent des symptômes (FM sub-clinique)
|
|
|
86
|
Cincinnati
|
Suivi cohorte sur 8 ans
|
ACR 2010
|
58 %
|
0 ; 42 % sont améliorés mais gardent des symptômes
|
NC : non connu ; Y&M : Yunus et Masi. * La « FM subclinique » correspond pour ces auteurs à des patients ne répondant plus à tous les critères de FM mais ayant toujours des douleurs avec au moins 1 signe cardinal parmi les 3 : fatigue, troubles du sommeil et troubles cognitifs. ** Cette étude a été réalisée à partir des patients de l’échantillon rapporté en 2014 (Kashikar-Zuck et coll., 2014
). Parmi les 91 patients, tous ont été classés SFMJ ou SFMJ subclinique. En 2019, aucun n’avait guéri mais 42 % étaient améliorés.
Comparaison du tableau clinique « fibromyalgie juvénile » aux autres douleurs chroniques musculo-squelettiques
Y a-t-il des différences entre jeunes atteints de douleurs chroniques diffuses (ou étendues) ou de douleurs musculo-squelettiques plus
ou moins inexpliquées et ceux atteints de « syndrome fibromyalgique juvénile » dans la littérature ?
; Picavet et coll., 2016
; Norris et coll., 2017
). Il est possible que les jeunes diagnostiqués comme atteints de SFMJ par les rares équipes qui publient à leur sujet soient les jeunes les plus sévèrement atteints des groupes souffrant de douleurs diffuses et répondant aux critères ACR 2010 (Egloff et coll., 2015
). Ces critères sont en effet larges et peu spécifiques et sont susceptibles de sélectionner des jeunes avec des plaintes fonctionnelles diverses. En utilisant un score de sévérité, Wager et coll. montrent que les jeunes les plus douloureux ont aussi le plus de troubles psychologiques et de plaintes associées (Wager et coll., 2013
).
).
; Palermo et coll., 2014
; Skrove et coll., 2015
; Goulart et coll., 2016
; Huguet et coll., 2016
; Stinson et coll., 2016
; Norris et coll., 2017
). Dans une étude menée sur 62 adolescents hospitalisés en psychiatrie, 52 % remplissait les critères SFMJ de Yunus et Masi (Lommel et coll., 2009
).
; Denk et coll., 2014
; Palermo et coll., 2014
). Les troubles psychologiques (anxiété, dépression) peuvent avoir précédé les douleurs chroniques (Tegethoff et coll., 2015
). Les antécédents d’abus sont aussi retrouvés (Gonzalez et coll., 2012
). Le développement d’une douleur chronique, diffuse ou non, après un événement traumatisant est une donnée connue chez l’enfant et l’adolescent, comme en témoigne l’étude de Noël et coll. menée dans 2 centres américains de douleur chronique de l’adolescent. Dans cette étude, 95 adolescents avec douleur chronique (de localisations variées) sont comparés à 100 jeunes indemnes (Noel et coll., 2016
). Les adolescents douloureux présentent plus de symptômes de TSPT (selon un auto-questionnaire validé pour évaluer les TSPT) que leurs pairs (32 % vs 8 %) et rapportent un nombre plus élevé d’évènements stressants. De même, un lien a été retrouvé entre la présence d’une douleur chronique et le nombre d’événements traumatisants dans l’enfance (You et Meagher, 2018
). Une étude neurophysiologique a établi une corrélation entre des antécédents de maltraitance dans la petite enfance et un seuil de douleur abaissé avec une sensibilisation centrale à l’âge adulte (You et Meagher, 2016
).
), 27 % des 2 249 jeunes consultant pour douleur chronique manquaient 2 à 5 jours par mois et 27 % plus de 5 jours par mois.
; Banez et coll., 2014
; Kashikar-Zuck et Ting, 2014
; Kamper et coll., 2016
). Quelques études se sont intéressées au devenir des douleurs musculo-squelettiques diffuses. Mikkelsson et coll. (2008
) rapportent une persistance de 30 % de douleurs chroniques diffuses à 1 an et à 4 ans d’évolution. La prise en charge intensive multimodale des situations les plus sévères de douleurs chroniques donne des résultats prometteurs avec plus de 60 % d’amélioration (Hechler et coll., 2014a
; Hechler et coll., 2014b
). D’autres études montrent une amélioration de 80 % des cas à 13 ans (Brattberg, 2004
) et une amélioration de tous les paramètres à 6 ans (Knook et coll., 2012
). Ces différences d’évolution entre les patients dits SFMJ et celle des douleurs chroniques diffuses posent de nombreuses questions. Sherry et coll. soulignent la fréquente plasticité des symptômes observée dans les syndromes de douleur chronique chez l’enfant et l’adolescent (Sherry et coll., 2015
). En effet, ces derniers peuvent débuter par une douleur localisée (tête, abdomen, rachis, membre...), puis développer une douleur généralisée ou multi-site accompagnée de multiples plaintes somatiques, et changer quelques années plus tard. Une équipe met ainsi l’accent sur la capacité de résilience, particulièrement importante chez les jeunes (Cousins et coll., 2015
).
; Hechler et coll., 2014b
; Stinson et coll., 2016
; Gmuca et Sherry, 2017
). Aujourd’hui, aucun traitement médicamenteux n’est recommandé dans la douleur chronique non cancéreuse de l’enfant et l’accent est mis sur les thérapeutiques psychologiques ou sur les programmes d’activité physique (Boulkedid et coll., 2018
; Caes et coll., 2018
).Y a-t-il un consensus international sur la distinction du syndrome fibromyalgique juvénile des douleurs chroniques diffuses
chez les jeunes ?
). Pour autant le diagnostic de ces situations de douleurs chroniques envahissantes et plus ou moins invalidantes ne doit pas se limiter à un diagnostic d’exclusion des maladies organiques. Un tel diagnostic réduirait la situation à déclarer le malade « indemne de... », affirmation qui se veut rassurante mais qui est souvent mal vécue par le patient et peut encourager la poursuite de la quête diagnostique. En effet la recherche de diagnostic devant des douleurs chroniques accompagnées de multiples symptômes conduit parents et médecins à des diagnostics divers, quelquefois posés hors des nomenclatures habituelles c’est-à-dire non validées par les sociétés savantes : ainsi maladie de Lyme « chronique », syndrome d’Ehlers-Danlos sans anomalie génétique identifiée, syndrome de fatigue chronique, sont retenus... L’étiquette diagnostique des jeunes souffrant de douleurs chroniques diffuses n’est pas consensuelle, elle fait l’objet de débat et de propositions. Certaines équipes proposent d’utiliser des termes diagnostiques généraux comme syndrome d’amplification ou de douleur amplifiée, qui inciteraient à contrôler plus étroitement l’évolution et à mettre en Å“uvre une approche de traitement plus intensive dans la mesure où l’espoir d’amélioration est réel (Hoffart et Wallace, 2014
; Sherry et coll., 2015
). L’intégration de ces douleurs chroniques dans le cadre plus général des plaintes somatoformes ou des douleurs dysfonctionnelles serait également porteuse de dynamique psychologique, tant pour l’enfant que pour ses parents et le thérapeute, confiant dans la plasticité qui caractérise l’enfant et l’adolescent (Basch et coll., 2015
). L’appellation douleur « fonctionnelle » est remise en question par d’autres et le terme de douleur primaire a été proposé (Schechter, 2014
). Les douleurs de sensibilisation centrale du système de perception sont désormais identifiées par l’IASP (International Association for the Study of Pain) sous le nom de douleurs nociplastiques, mais ce terme fait aussi débat (Aydede et Shriver, 2018
).
; Draheim et coll., 2017
). Les points forts, que nous avons traduits ici, sont les suivants :Conclusion
). L’avantage de porter le diagnostic de SFMJ pourrait être de rassurer le patient et sa famille au terme d’une errance médicale : on sait ce qu’il a, ses symptômes portent un nom et des investigations inutiles, se focalisant sur une plainte associée, pourront probablement être évitées. À l’inverse, considérer le jeune atteint d’un SFMJ à l’identique d’un adulte atteint de FM peut conduire au risque d’une surmédicalisation avec utilisation d’antalgiques, y compris d’antidépresseurs, d’antiépileptiques voire d’opioïdes dans les cas les plus sévères, sans efficacité démontrée chez le jeune (Hoffart et Sherry, 2016
; Kaufman et coll., 2017
), avec les risques iatrogènes afférents, y compris le risque de dépendance aux antalgiques ou psychotropes (Draheim et coll., 2017
). Ces incertitudes et controverses sont soulignées par les expertises autres publiées sur la fibromyalgie juvénile, qui ont recommandé de ne pas utiliser ce terme diagnostique chez l’enfant et l’adolescent et de mettre en place un accompagnement thérapeutique multimodal en portant une attention particulière aux aspects psychosociaux de la pathologie pour optimiser les chances de guérison de ces jeunes envahis de douleurs.Références
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