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Med Sci (Paris). 35(4): 309–315.
doi: 10.1051/medsci/2019068.

L’édition de gènes dans la découverte du médicament et l’innovation thérapeutique

Jean-Luc Galzi*

Biotechnologie et signalisation cellulaire, CNRS-Unistra UMR 7242; École supérieure de biotechnologie de Strasbourg, 300, boulevard Sébastien Brant, 67412Illkirch, France
Corresponding author.
 

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Vignette (Photo © Inserm – Michel Depardieu).

L’innovation thérapeutique moderne, au sens large, s’appuie sur une approche multi-échelle qui combine les technologies modernes de la découverte de molécules bioactives, de l’imagerie, de la génomique fonctionnelle, de la biologie structurale et de la physiologie. La mise en œuvre de cet ensemble constitue un cadre de travail unique pour comprendre le vivant, soigner les pathologies orphelines, rares ou émergentes, cibler les phénomènes de résistance et s’attacher à la question de la qualité de la vie tout au long de l’existence.

Les solutions proposées doivent pouvoir être mises en œuvre sur des organismes vivants et les succès attendus reposent sur le franchissement d’obstacles organisationnels et scientifiques.

Un des obstacles identifiables est celui de la validation fonctionnelle détaillée des cibles qui peuvent être, selon le cas, des macromolécules, des cellules ou des organes. Ce travail s’appuie traditionnellement sur la génomique fonctionnelle, dont la méthode est celle de l’altération de l’expression de gènes et l’objet, la perturbation des phénotypes. Ceci permet d’inférer la fonction du gène via la modification de l’architecture fonctionnelle des organes atteints par sa présence et/ou absence, ou par l’altération de son intégrité. Les nouvelles méthodes d’édition des génomes permettent des avancées majeures dans ce domaine. En particulier, les interventions sur le génome sont d’une spécificité sans précédent. Leur mise en œuvre permet désormais de modifier le génome sans se limiter à quelques espèces présentant des temps de génération courts, et de recopier dans des systèmes modèles, des variations génétiques avec une précision de l’ordre du nucléotide [1].

Comment les progrès récents de l’édition des génomes permettent de tester de nouvelles hypothèses thérapeutiques, et en quoi ils conduisent à la production de systèmes modèles de meilleure qualité pour développer de nouveaux médicaments, sont les questions abordées dans cet article qui va parcourir et comparer les méthodologies, les attendus et les limitations de ces techniques.

Édition de gènes : méthodes, intérêts, limitations dans l’usage et l’innovation thérapeutique
Une brève histoire de l’édition de gène…
L’idée d’éditer les gènes (au sens anglo-saxon, on traduit par « modifier », en français) pour modifier leur séquence nucléotidique date des années 1970, lorsque Werner Arber découvrit les enzymes de restriction [2], des protéines qui servent à la défense des bactéries contre les agents qui les infectent (Figure 1). Ces enzymes clivent l’ADN étranger en des sites précis, dits sites de restriction (4 à 12 nucléotides), qui sont absents de leur propre génome. Pour le bio-technicien, il était ainsi devenu possible de couper une séquence d’ADN en un site précis puis de rabouter les extrémités créées avec d’autres morceaux d’ADN coupés par le même enzyme. Cette opération pouvait être réalisée dans un tube à essai, sur des fragments d’ADN de petite taille. Elle n’était en revanche pas compatible avec l’édition de génomes complets, en raison de la grande probabilité de présence de multiples sites de restrictions dans les génomes de grande taille. Les chercheurs ont alors cherché à obtenir une meilleure spécificité de ré-appariement et ont pour cela exploité, dans un premier temps, le processus de recombinaison homologue. Il s’agit d’un système cellulaire qui s’appuie sur l’appariement de séquences longues permettant d’effectuer la réparation d’ADN endommagé. Ce système permettait de réaliser l’édition de gène à l’échelle d’un génome complet. Cependant, le processus de recombinaison présente des effets non prévisibles. L’intégration d’un fragment d’ADN à l’intérieur d’un gène non ciblé est en effet fréquente et potentiellement dangereuse pour l’individu. Le repérage d’erreurs de réparation était à l’époque des années 1980-1990 particulièrement fastidieux car les technologies de séquençage n’avaient pas encore atteint les grands débits que l’on connaît de nos jours.

Des approches plus spécifiques sont apparues à la fin des années 1990, avec l’utilisation de nucléases complexes reconnaissant de grands fragments d’ADN : les méganucléases [3, 4], les nucléases à doigt de zinc (ZFN) [5], puis, en 2009, les TALEN (transcription activator-like effector nuclease). Les méganucléases sont des enzymes de restriction qui reconnaissent et clivent des séquences nucléotidiques longues (20 paires de bases et plus) et donc rares, voire uniques dans un génome. Ces enzymes sont très efficaces et peu toxiques, mais leur mutagénèse à des fins d’édition de gènes est complexe et difficilement généralisable. Leur emploi est donc très limité.

Les deux autres familles de nucléases (ZFN et TALEN) présentent des domaines répétés de reconnaissance de l’ADN, ce qui leur confère une grande spécificité de reconnaissance de la séquence à éditer. En revanche, la construction de telles enzymes comme outils de manipulation génétique nécessite des stratégies sophistiquées car il s’agit non seulement de protéines de très grande taille, mais de molécules constituées de domaines répétés présentant entre eux de fortes homologies. Quelques succès notoires ont été obtenus permettant de mener des études cliniques chez des patients infectés par le VIH (virus de l’immunodéficience humaine) et atteints de Sida (syndrome de l’immunodéficiences acquise) à l’aide de nucléases à doigt de zinc [6], ou dans le traitement de leucémies avec les TALEN [7, 8].

Très rapidement cette approche, techniquement lourde, a été supplantée par la technique dite de CRISPR-Cas9 inspirée du système immunitaire des bactéries et des archées [9] ().

(→) Voir la Chronique génomique de B. Jordan, m/s n° 11, novembre 2016, page 1035

Afin de comprendre le mécanisme et l’utilisation de CRISPR-Cas9, voyons brièvement ses caractéristiques : lorsqu’une bactérie est infectée par un virus qui lui est spécifique, un bactériophage, elle se défend en fragmentant l’ADN intrus et en mettant en mémoire cet évènement dans son propre ADN afin de mieux répondre à une agression ultérieure. Pour cela, elle insère des fragments de 20 à 50 paires de bases (pb) de l’ADN intrus à l’intérieur d’une séquence répétée de 29 nucléotides de son génome. Cet ensemble « séquence de l’intrus + séquence répétée », est ensuite transcrit en un ARN, appelé crARN (pour CRISPR-ARN), dans lequel la partie homologue à l’ADN de l’intrus sert à détecter sa présence, la partie répétée recrutant une enzyme, Cas9, capable de cliver l’ADN ainsi reconnu. Cette étape de liaison du crARN et de l’enzyme est réalisée grâce à un intermédiaire, tracr-ARN (trans-activating CRISPR RNA) qui est un transactivateur de Cas9. En se liant à Cas9, ce transactivateur amorce l’activité nucléase de Cas9. Simultanément, il se lie à la séquence répétée du crARN et guide l’enzyme vers l’ADN à reconnaître. La détection de l’ADN intrus est associée à une liaison de la partie nucléase et à son activation, ce qui conduit à sa dégradation. De nombreux perfectionnements de ce système ont été développés pour un usage biotechnologique et thérapeutique, et plus précisément, pour l’inactivation ou l’induction de gènes ou la mutagenèse in situ (voir Encadré).

L’édition de gènes avec CRISPR-Cas9

Dans sa version initiale, la mise en œuvre de la technique CRISPR-Cas9 nécessitait l’introduction de trois éléments distincts dans la cellule : un ADN codant le crARN guidant Cas sur le site de clivage, un ADN codant l’ARN tracrARN et un ADN codant Cas9. Très rapidement, les éléments crARN et tracrARN ont été fusionnés en un seul appelé guide (single guide-RNA ou sg-ARN), réduisant le nombre de composants du système à deux. Pour obtenir le clivage spécifique d’une séquence d’ADN, il suffisait alors d’intégrer deux éléments à une cellule, deux fragments d’ADN (ou d’ARN) ou un complexe préformé riboprotéique contenant l’ARN guide et Cas9.

Une des forces du système réside dans le fait que Cas9 ne clive l’ADN que lorsqu’elle est fixée à l’ADN cible via son ARN guide. On peut aussi altérer l’activité de Cas9 pour lui faire perdre sa capacité de clivage (dCas9, pour dead Cas9). Il en résulte une entrave à la progression des polymérases, autrement dit une inhibition de réplication ou de transcription. Certains auteurs ont fusionné un activateur de transcription à dCas9, transformant ainsi CRISPR Cas en activateur de l’expression de gènes. Ces innovations n’ont pas encore débouché sur des applications thérapeutiques. Notons toutefois dès à présent que tout comme dans le cas des nucléases à doigts de zinc et des TALEN, l’usage de CrispR Cas se heurte au problème de la spécificité de reconnaissance des séquences ciblées par les ARN guides, ce qui oblige les utilisateurs à un examen critique des résultats obtenus, et a motivé l’optimisation du système.

L’ingénierie de Cas9 a permis d’identifier une mutation qui conduit à un clivage simple brin (activité nickase, enzyme Cas9n). Dès lors, le clivage complet de l’ADN nécessite deux exemplaires du complexe sg-ARN x Cas9n, chaque exemplaire reconnaissant une séquence complémentaire, pour obtenir une coupure double brin. Cela permet d’améliorer la spécificité du système sans totalement éliminer des effets non ciblés.

Édition de gène dans le domaine thérapeutique Nous considèrerons ici les applications dans un sens large : celles qui utilisent les techniques d’édition dans le domaine des maladies génétiques, mais aussi celles qui les exploitent dans une démarche d’identification et de validation de cibles thérapeutiques (Figure 2).

Thérapies cellulaire et génique Cette approche est utilisée de manière très prometteuse dans plusieurs cas. Le premier groupe d’applications qui vient immédiatement à l’esprit est celui qui consiste à rétablir l’expression de gènes défectueux. La toute première thérapie d’édition génique chez l’homme a été développée aux États-Unis en 2017. Elle a utilisé une nucléase à doigts de zinc pour insérer à l’intérieur du gène de l’albumine le gène qui code une protéine absente chez les patients. Dans le cas de patients atteints du syndrome de Hunter1, le gène inséré est celui de l’enzyme iduronate-2-sulfatase, dont l’absence cause un maladie lysosomale dont les symptômes sont ceux d’une maladie neurodégénérative [10]. Les outils génétiques sont introduits grâce à un virus atténué qui est injecté directement dans le foie du patient. Cette thérapie est donc réalisée directement chez le patient, sans passer par une étape de traitement ex vivo de ses cellules. Elle lui fait donc courir un risque important, car toute erreur ne sera détectable qu’a posteriori.

La prise de conscience de ce risque a conduit les chercheurs à développer des approches incluant une étape ex vivo afin de pouvoir contrôler la survenue d’effets indésirables [11]. Ainsi, la société CrispR Therapeutics mène une étude clinique de phase II sur l’efficacité et la sécurité d’usage de cellules autologues modifiées capable de produire de l’hémoglobine fœtale chez des adultes atteints de beta thalassémie [12]. Ce protocole revêt un caractère générique : il peut en effet être appliqué à un nombre important de pathologies et permet d’effectuer les contrôles nécessaires (par exemple de ciblage) préalablement à l’infusion des cellules modifiées au patient.

Ces corrections de phénotypes obtenues par édition de gènes ne peuvent pas, en principe, être mimées par des médicaments, en particulier lorsque ceux-ci sont de petites molécules. Elles s’avèrent donc être des éléments très importants de l’arsenal thérapeutique. Il faut toutefois noter que les effets à long terme de ces thérapies restent inconnus, que l’effet est « théoriquement » irréversible, ce qui interdit toute approche d’essai-erreur, que leur coût sera toujours important en raison du caractère personnalisé du traitement, et que la généralisation à des cohortes importantes présentera toujours un risque non négligeable d’effets indésirables liés à la variation interindividuelle. À titre d’exemple, de nombreuses études cliniques se mettent actuellement en place dans le monde entier, principalement aux États-Unis et en Chine, pour des applications dans le domaine de l’immunomodulation du cancer. Elles se posent ainsi en concurrentes des méthodes traditionnelles qui utilisent des anticorps ou des médicaments. Deux problèmes additionnels se posent. Ils relèvent tous deux du domaine de l’immunité : (1) l’usage de vecteurs d’origine virale pour pratiquer cette thérapie est nécessaire2,, ce qui limitera le nombre d’administrations, en particulier en raison du déclenchement possible d’une réponse immunitaire vis-à-vis du vecteur qui aura pour conséquence son élimination rapide, et donc une inefficacité du traitement ; (2) la seconde préoccupation est celle de l’usage des protéines Cas9 [12, 13]. Ces protéines sont d’origine bactérienne et 70 % de la population possède des anticorps dirigés contre les protéines Cas9 qui sont utilisées en laboratoire pour l’édition des gènes [14]. Mais plus préoccupant encore, les lymphocytes T sont susceptibles de répondre à Cas9. Ainsi, des lymphocytes T CD8 et T CD4 spécifiques de Cas9 peuvent être stimulés par l’enzyme [15]. Le risque pour le patient est néanmoins limité dans le cas d’un traitement comportant une seule injection, mais l’histoire du patient devenant déterminante, une deuxième intervention peut s’avérer impossible.

Dans tous les cas, l’usage chez l’humain des méthodes d’édition des gènes place la question de la réponse immunitaire au cœur des préoccupations, car les « objets » biologiques utilisés (ADN, vecteurs viraux, protéines, etc.) sont de grande taille, donc potentiellement immunogènes, et donc neutralisés et/ou détruits par le système immunitaire. L’ingénierie biotechnologique va sans doute améliorer ces outils d’édition de manière considérable. Il est donc raisonnable d’attendre des succès, même à brève échéance, mais la sélection des patients susceptibles d’être traités sera sans doute inévitable, et les thérapies seront vraisemblablement très onéreuses en raison des batteries de tests compagnons qu’il faudra associer pour sécuriser leur emploi [16].

Identification, validation et traitement de cibles thérapeutiques L’édition de gène trouve des applications nombreuses dans le domaine de la recherche fondamentale, connu sous le nom de génomique fonctionnelle. Par la simplicité de sa mise en œuvre, elle révolutionne les méthodes d’excision/insertion de gène ou de mutagénèse in situ, et surtout, elle permet l’introduction de modifications ciblées dans des espèces animales autres que la souris qui a longtemps été le seul organisme accessible en raison de l’emploi de cellules souches embryonnaires. De nouvelles perspectives se sont donc offertes. Dans la recherche sur le médicament, l’ère de la génomique et du séquençage à haut débit a ainsi permis le développement de nouvelles stratégies fondées sur la correction de phénotypes, sans a priori sur les mécanismes par lesquels ces corrections s’effectuaient. On a nommé cette démarche criblage phénotypique, ou chimiogénomique directe [17]. Elle a été rendue accessible grâce aux évolutions dans la miniaturisation des essais [18]. Bien que cette approche soit utilisée depuis plus de vingt ans, elle se heurte à une difficulté majeure : l’identification de la cible de la molécule bioactive. En effet, le criblage phénotypique s’appuie sur des cellules, des organes ou des animaux modèles présentant le phénotype que l’on veut modifier (par exemple, la production d’un métabolite ou l’arrêt de sa production) que l’on expose à des petites molécules parmi lesquelles on recherche les composés qui provoquent le phénotype désiré. En cas de succès, les molécules identifiées sont appelées « touches » (ou hits en anglais) par référence à la pêche à la ligne. Si le processus étudié relève d’un enjeu de santé, les touches peuvent devenir des amorces (ou leads) pour le développement de nouveaux médicaments.

Cette approche phénotypique s’avère performante pour perturber des voies de signalisation ou des circuits métaboliques, mais les molécules identifiées peuvent agir à plusieurs niveaux dans chacun de ces circuits, et conduire, en fait, au même phénotype par des mécanismes différents [19]. Le fait de connaître la, ou les, cible(s) de ces molécules devient donc un enjeu pour le chimiste, qui doit les optimiser, et pour le biologiste, qui doit pouvoir expliquer leur mécanisme d’action. L’édition de gène intervient ici de plusieurs façons : les technologies d’édition à grande échelle permettent de cibler tout ou partie du transcriptome d’une espèce de façon massivement parallèle pour induire ou bloquer l’expression de gènes, ou pour modifier leur séquence. Voyons ces applications.

Surexpression de [20-22] Cette technique consiste à augmenter l’activité d’un gène donné afin de détecter si le surcroît d’activité confère une résistance à un traitement par des inhibiteurs (versus une sensibilisation pour ces mêmes activateurs) de l’activité de la protéine codée par le gène d’intérêt. Le concept exploité repose sur la notion que la surexpression du gène de la protéine cible diminue l’efficacité du médicament, pour une même dose de ce dernier. Cette méthode a d’abord été validée par des techniques de transfection de banques de plus de 10 000 ADN codants « pleine longueur » au sein desquelles on parvenait à identifier les gènes de résistance aux agents cytotoxiques anticancéreux. Les techniques d’édition de gène ont supplanté cette approche en raison de leur plus grande simplicité de mise en œuvre et du nombre plus important de gènes ciblés dans une même campagne [21, 23]. Dans cette approche, on introduit des mutations dans le gène codant Cas9 pour lui faire perdre sa capacité à cliver l’ADN ; on fusionne ce gène mutant (appelé dCas9) avec des domaines d’activation de la transcription [21]. Il en résulte une augmentation sensible de l’expression du gène ciblé. Des collections de plusieurs dizaines de milliers d’ARN guides sont disponibles pour ce type d’étude.
Réduction d’expression ou délétion de cible Il existe maintenant plusieurs exemples d’utilisation de l’édition de gènes pour l’identification de la cible de médicaments. Un exemple frappant est celui du repositionnement de médicaments dans des indications thérapeutiques nouvelles. Le criblage d’une collection de médicaments sur des lignées cellulaires d’adénocarcinome de l’œsophage a ainsi identifié des glycosides cardiotoniques (ouabaïne, digoxine et digitoxine) comme inhibiteurs de la prolifération cellulaire [24]. Le séquençage des ARN des cellules traitées par ces glycosides a montré que l’expression de la kinase MKK6 (mitogen-activated protein kinase kinase 6) était réduite, diminuant ainsi l’expression du facteur de transcription Sox9 (SRY-Box 9). La baisse d’expression de MKK6 a été reproduite, à l’aide d’ARN interférant. Un ralentissement de la prolifération des cellules cancéreuses auquel était associée une baisse du taux d’expression de Sox9 a été observé, ce qui mime l’effet des glycosides. La suppression du gène codant Sox9, par la technique Crispr-Cas9, dans des cellules cancéreuses, a montré un ralentissement de la croissance tumorale, même en l’absence de traitement, confirmant le mécanisme d’action de ces agents cardiotoniques. Il s’agit ici d’un exemple parmi d’autres de validation de cible in vitro. Le défi reste majeur lors du passage de l’in vitro à l’animal entier, voire à l’humain, chez qui il faut pouvoir démontrer « l’engagement » de la cible. Là encore, les techniques d’édition de gènes ont joué un rôle important pour démontrer, par exemple, le mécanisme d’action de la curcumine. La curcumine est une substance naturelle utilisée comme complément alimentaire et supposée exercer des effets anti-inflammatoires et anti-oxydants, mais sa cible n’est pas connue. Des auteurs chinois [25] ont identifié in vitro la cible de la curcumine. Il s’agit de la kinase de tyrosine DYRK2 (dual-specificity tyrosine phosphorylation-regulated kinase 2), un activateur du protéasome 26S, que la curcumine bloque spécifiquement, parmi 140 kinases testées. La curcumine, en association avec le carfilzomib, réduit en fait la prolifération de cellules de cancer mammaire et diminue leur caractère invasif in vitro. Elle réduit aussi la croissance de tumeurs mammaires humaines implantées chez des souris imunodéficientes. La validation de DYRK2 comme cible de la curcumine in vivo a été réalisée en montrant que la suppression du gène qui la code dans les tumeurs mime l’effet d’un traitement par la curcumine.

Il existe des exemples naturels de délétion de gènes qui ont été utilisés comme méthode de validation thérapeutique d’une cible. Un exemple récent est celui de la protéine PCSK9 (proprotéine convertase subtilisine/kexine de type 9), une protéine qui se fixe au récepteur des lipoprotéines de faible densité (LDL-R) et provoque sa dégradation. Cette réduction du nombre de récepteurs LDL-R réduit la dégradation des lipoprotéines de faible densité conjuguée au cholestérol (LDL-cholestérol) et provoque une augmentation de leur taux ; en inhibant la dégradation des LDL-R, les inhibiteurs de PCSK9 réduisent les taux circulants de cholestérol. Cette baisse du taux circulant de cholestérol a été aussi observée chez des sujets humains dépourvus de PCSK9 chez qui les accidents cardiaques sont statistiquement moins fréquents que dans la population. Inversement, certains humains surexpriment naturellement PCSK9 et présentent des taux chroniquement élevés de cholestérol. L’idée a donc été proposée d’associer le fort taux de cholestérol au risque cardiaque accru, ce qui a motivé une recherche très compétitive d’inhibiteurs de PCSK9. Deux compagnies pharmaceutiques, Sanofi et Amgen se sont affrontées sur le terrain de la production d’anticorps thérapeutiques neutralisant PCSK9 dans une étude clinique de trois ans avec plusieurs milliers de patients. Malheureusement, les résultats de l’étude ne sont pas probants, l’anticorps n’est pas efficace chez l’homme, bien qu’il bloque effectivement l’activité de PCSK9 : la baisse de risque cardiovasculaire n’est que de 15 % comparé au placebo [26]. Les raisons de cet absence de lien entre l’inhibition de l’enzyme PCSK9 et le risque cardiovasculaire ne sont pas comprises aujourd’hui. Il se pourrait que chez les sujets humains chez qui l’enzyme fait défaut, ou inversement est suractive, des mécanismes de compensation se mettent en place, mécanismes que le traitement par anticorps ne permet pas de stimuler.

Production de molécules thérapeutiques Les produits naturels d’origine végétale ou bactérienne sont reconnus comme source de composés biologiquement actifs et potentiellement thérapeutiques. Le genre Streptomyces est réputé faire partie de ce groupe de bactéries produisant des antibiotiques d’intérêt majeur. Il contient plus de 50 clusters de gènes biosynthétiques, dont une grande partie est peu ou pas exprimée. Les méthodes d’édition des génomes procaryotes ont fait des progrès notoires au cours des années récentes [27], rendant possible l’activation de ces clusters et la production de nouvelles molécules. L’insertion d’un promoteur dans un cluster, prédit comme tel mais silencieux, a conduit à la production de macrolactames, des antifongiques naturels [28]. D’autres approches de surexpression de clusters dans des hôtes non naturels permettent de cribler leur capacité de production ou d’identifier les métabolites produits [29].
Création de modèles de pathologies et découverte de médicaments La création de modèles prédictifs de pathologies humaines est un domaine dans lequel les attentes des laboratoires publics et privés sont considérables. L’avènement des technologies utilisant Crispr-Cas9 a permis de s’affranchir de l’emploi de cellules souches embryonnaires ce qui, à son tour, a nettement accéléré le processus de création de modèles animaux, et a permis l’obtention de modèles à partir de nombreuses espèces animales [30]. Ces modèles sont très puissants pour l’étude de processus biologiques fortement conservés au cours de l’évolution, mais leur caractère prédictif est nettement moins performant dans les modèles de pathologies humaines. Ils peuvent conduire à des taux importants d’attrition dans le développement de médicaments [3133]. Les développements récents de culture cellulaire en 3 dimensions ont conduit les chercheurs à s’intéresser à de nouveaux systèmes modèles obtenus à partir de matériel humain, capables de mimer l’organisation des tissus : les organoïdes, ou mini organes. Ils peuvent être obtenus à partir de cellules d’origine humaine, de sujets sains ou de patients, ce qui permet de tester des molécules thérapeutiques sur des modèles de tissus, voire de tissus connectés entre eux [34]. La possibilité de créer des organoïdes humains nourrit l’espoir de tests plus exploitables pour les mesures de toxicologie, de pharmacocinétique et d’efficacité des molécules.

Les illustrations de ce type d’approche se multiplient avec un taux de réussite encore très variable. Les conditions opératoires de production des organoïdes ne sont pas encore parfaitement maitrisées, mais les progrès sont réels et, dans ce cas aussi, les méthodes d’édition de gènes sont exploitées. L’introduction de marqueurs dans les cellules souches permettent de mieux contrôler leur différenciation et leur croissance, ainsi que la formation des cultures en trois dimensions. On obtient ainsi des modèles de rein [35], de foie [36, 37], ou de tube digestif [38], qui expriment des marqueurs de différenciation et d’environnement de plus en plus semblables à ceux détectés dans l’organe in vivo. Des organoïdes de cerveau ont ainsi pu servir à étudier les mécanismes d’infection par le virus Zika qui provoque une microcéphalie chez le nouveau-né, et à tester des molécules thérapeutiques [39]. Une expérience menée aux Pays-Bas montre que 90 % des biopsies de cancer colorectal peuvent être cultivées sous forme d’organoïdes [38]. On obtient ainsi pour chaque patient un organoïde cancéreux et un organoïde sain en fonction du site de prélèvement. Sur ces tissus modèles, on observe une excellente corrélation entre la réponse du patient et celle de l’organoïde à un traitement donné. Ainsi, les cellules p53 mutées (mutation du gène suppresseur de tumeur TP53) sont insensibles à la nutline, un activateur de p53 sauvage [40]. La réponse au 5-fluorouracile, qui bloque la réplication de l’ADN et déclenche l’apoptose [41], n’est pas prévisible à partir du génotype, mais la corrélation entre la réponse du patient et la réponse de l’organoïde est excellente. Cela ouvre des perspectives intéressantes tant pour ce qui relève de l’efficacité des traitements que de la qualité de vie des patients qui bénéficieront des traitements les mieux adaptés. Bien que cet exemple ne soit pas une illustration directe de l’apport de l’édition de gène dans la découverte des médicaments, il en a ouvert la voie. Un second niveau d’innovation du domaine des organoïdes est celui de l’utilisation des cellules souches reprogrammées. Ces cellules sont obtenues directement à partir de cellules de patients et redifférenciées pour obtenir théoriquement n’importe quel organe [42, 43]. Elles servent aussi à produire différents modèles, comme par exemple un modèle de glioblastome [44] par introduction de mutations oncogéniques identifiées chez des patients. Dans ces modèles, on réalise des traitements avec des anticancéreux et on montre une corrélation entre l’efficacité des candidats médicaments et la nature des aberrations génétiques [44]. Ces nouveaux systèmes modèles font ainsi preuve d’une meilleure prédictibilité en termes thérapeutiques, et s’avèrent aussi plus pertinents pour l’étude des mécanismes mis en jeu dans la physiopathologie.

Conclusion

La recherche de médicaments est un processus complexe au centre duquel se trouve la validation de la fonction de la cible biologique visée par le médicament. À cette question récurrente, la réponse est rarement unique car elle évolue au gré des avancées des connaissances sur les effets des médicaments, ou celles que l’on acquiert en étudiant la (les) voie(s) de signalisation qui l’implique(nt). Un des défis actuels est celui de la prise en compte de la formation de complexes multiprotéiques au sein desquels une même protéine peut exercer différentes fonctions selon la composition du complexe. À cet égard, les techniques de la génomique fonctionnelle, en particulier celles de l’édition de gène, s’avèrent être des outils précieux devenus, avec les méthodes récentes, de plus en plus faciles d’accès. L’invalidation de gènes ou la reproduction de mutations, combinées aux méthodes de production d’organoïdes humains sont pressenties devenir les outils maîtres de la découverte de médicaments dans un futur proche. La possibilité de créer des modèles à partir de tissus humains permettra aussi dans l’avenir de réduire l’attrition du développement de médicaments. Le taux d’attrition demeure encore aujourd’hui une préoccupation majeure ; il trouve son origine dans deux facteurs principaux : la faible prédictibilité pour l’homme des modèles animaux, la variabilité interindividuelle humaine. Clairement, l’édition des génomes dans un contexte d’études réalisées avec du matériel humain offre des perspectives très encourageantes de réponses à ces deux points.

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

 
Footnotes
1 La maladie de Hunter, ou mucopolysaccharidose de type II (MPS II), est une maladie de surcharge lysosomale du groupe des mucopolysaccharidoses. La mucopolysaccharidose de type II est une maladie évolutive, progressive, multisystémique.
2 Il faut en outre atteindre des titres viraux très importants. On se heurte à un problème de production et donc de prix. Une ou deux injections demandent une production d’un fermenteur de 100 litres ou plus. Le coût de production du vecteur viral est aujourd’hui de l’ordre de 1 million d’euros. L’accessibilité à ce type de traitement passe donc par une amélioration de la production du virus d’un facteur 100 à 1 000.
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