Exposition aux agents chimiques et physiques

2008


ANALYSE

55-

Données d’exposition aux rayonnements ionisants

Les deux principales sources d’exposition aux rayonnements ionisants de la population française sont les expositions naturelles (73 %) et celles pour raisons médicales (26 %). Les expositions à des sources artificielles de rayonnements de nature industrielle ou accidentelle représentent moins de 1 % de l’exposition totale (Sugier et Hubert, 2002renvoi vers).
Les modes d’exposition aux radiations ionisantes sont divers : irradiation externe X et gamma, contamination interne par des émetteurs alpha et bêta, inhalation de radon, contamination cutanée. Les différents types de rayonnements ionisants (X, gamma, béta, alpha) sont des cancérogènes certains pour l’homme (IARC, 1988renvoi vers, 2000renvoi vers et 2001renvoi vers).
Ce chapitre fait le point sur les données existant en France pour ce qui est des expositions environnementales aux rayonnements ionisants au sein de la population générale et en milieu professionnel.

Exposition de la population générale

Au total, la dose efficace individuelle moyenne en France du fait des sources naturelles de rayonnement s’élève à 2,4 mSv par an. Selon les régions, cette dose peut être inférieure jusqu’à un facteur 2 ou supérieure jusqu’à un facteur 5 : de 1,2 mSv à 12 mSv par an (Rannou et coll., 2006renvoi vers). Celle-ci est due pour 60 % au radon, 20 % au rayonnement gamma d’origine tellurique (rayonnement des sols), 11 % aux rayonnements cosmiques et 10 % à l’eau et aux aliments (Rannou et coll., 2006renvoi vers). À ces expositions viennent s’ajouter les expositions à des sources artificielles de rayonnements de nature industrielle ou accidentelle (1 %). Différents systèmes permanents permettent une surveillance continue des débits de dose dans l’air ou l’eau, complétés par des campagnes spécifiques. Ces données servent de bases à des estimations de l’exposition de la population française aux rayonnements ionisants.

Exposition due à l’inhalation de radon

Le radon est un gaz radioactif qui provient de la désintégration de l’uranium présent dans les sols. Le radon est présent partout à la surface du globe, mais sa concentration peut être élevée dans les lieux confinés (mines, souterrains, habitations…).
Une campagne nationale de mesure de la concentration du radon domestique en France a été conduite à partir de 1982 par l’Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) en collaboration avec la Direction générale de la santé et les Directions départementales des affaires sanitaires et sociales (Ddass) (Gambard et coll., 2000renvoi vers). Les mesures ont été effectuées à l’intérieur des habitations à l’aide d’un détecteur passif installé pendant environ deux mois dans la pièce principale. À chaque mesure était associé un questionnaire renseignant sur les principaux facteurs influant sur les concentrations en radon. Au total, les données comprennent 12 261 mesures et fournissent une couverture nationale de 10 098 communes réparties dans tous les départements métropolitains et la Corse. La moyenne arithmétique brute estimée sur la base de ces mesures est de 89 becquerels par mètre cube (Bq/m3) (écart-type : 54 Bq/m3) et la moyenne géométrique est de 59 Bq/m3 (écart-type géométrique : 30 Bq/m3) (Billon et coll., 2004renvoi vers) (figure 55.1Renvoi vers).
Figure 55.1 Distribution de la concentration de radon dans l’habitat français (d’après Billon et coll., 2004renvoi vers)
Néanmoins, ces estimations brutes ne tiennent pas compte des variations saisonnières des concentrations de radon, ni de la représentativité de l’échantillon vis-à-vis de la distribution de l’habitat français. Afin d’obtenir des estimations annuelles, une méthode de correction a été appliquée pour tenir compte des variations saisonnières des concentrations de radon (Baysson et coll., 2003renvoi vers). Les données « logement-emploi-population » du recensement général de l’Insee de 1990 ont été utilisées pour redresser les moyennes départementales pour ce qui est du type d’habitat (pavillon ou immeuble) et de la période de construction (avant ou après 1948). Les données du recensement général de la population de l’Insee de 1999 ont été utilisées pour fournir une moyenne nationale pondérée sur la densité de population de chaque département. La meilleure estimation de l’exposition de la population française au radon est fournie par la moyenne arithmétique nationale corrigée sur la saison, le logement et la densité de population, soit 63 Bq/m3 (Billon et coll., 2005renvoi vers).
On dispose de peu de données pour quantifier l’évolution de l’exposition au radon en France. L’analyse des facteurs de variation des concentrations de radon fait apparaître des concentrations plus élevées dans les habitations anciennes (construites avant 1948) que dans les habitations récentes (après 1948>) (Pirard et coll., 1998renvoi vers). Néanmoins, il est possible que les améliorations de l’isolation des habitations qui sont survenues depuis le milieu des années 1970 aient pu entraîner une augmentation des concentrations de radon.

Exposition aux rayonnements telluriques et cosmiques

Une campagne de mesure des débits de dose des rayonnements gamma a été menée en France par l’IPSN, la DGS et les Ddass, dans le but d’estimer la distribution des doses externes de la population française (Rannou et coll., 1992renvoi vers). Les mesures ont été faites à l’intérieur et à l’extérieur de l’habitat. Au total, 14 031 mesures de débit de dose des rayonnements gamma ont été effectuées, dont 8 737 mesures à l’intérieur de l’habitat, et 5 294 mesures à l’extérieur de l’habitat. À partir de ces données, la dose moyenne arithmétique brute due aux rayonnements gamma d’origine tellurique est 0,47 mSv/an (Billon et coll., 2004renvoi vers; Rannou et coll., 2006renvoi vers).
Les doses dues aux rayonnements cosmiques ont été calculées en fonction de l’altitude pour l’ensemble des communes françaises. Après pondération sur la densité de population et prise en compte du temps passé à l’intérieur de l’habitat, la dose efficace annuelle moyenne due aux rayonnements cosmiques est de 0,28 mSv/an (Billon et coll., 2004renvoi vers et 2005renvoi vers). Les doses dues à ces expositions sont considérées comme stables dans le temps.

Exposition due aux retombées des accidents et des essais atmosphériques d’armes atomiques et exposition à la radioactivité artificielle

Pour l’ensemble de ces sources (rejets radioactifs des installations nucléaires, retombées des accidents nucléaires et des essais atmosphériques d’armes atomiques), la contribution à la dose individuelle moyenne est au plus de 0,1 mSv/an.

Accident de Tchernobyl

L’accident de la centrale de Tchernobyl (Ukraine) a eu lieu le 26 avril 1986. Il a entraîné le passage d’un nuage radioactif au dessus de la France fin avril début mai (IRSN, 2006arenvoi vers). De nombreux travaux ont été effectués à l’IRSN afin de reconstituer les retombées de l’accident de Tchernobyl en France (IRSN, 2003renvoi vers; IRSN, 2006brenvoi vers;). La contamination a principalement touché l’est de la France et la Corse.
Figure 55.2 Dépôts au sol de césium 137 venant de l’accident de Tchernobyl (mai 1986, reconstitution mise à jour, Modèle 2005, IRSNrenvoi vers)
L’exposition des personnes a d’abord été externe et interne par inhalation au moment du passage du panache radioactif ; ensuite les radionucléides déposés au sol ont entraîné une exposition externe aux rayonnements et une exposition interne due à l’ingestion de denrées contaminées. Compte tenu de l’hétérogénéité de la contamination environnementale, en particuliers des dépôts, de la variabilité des comportements individuels, notamment des habitudes alimentaires, et de la distribution des denrées aux échelles régionale et nationale, il n’est pas possible de relier simplement les doses reçues à une localisation géographique. L’IRSN a calculé des gammes de doses reçues qui rendent compte de la variabilité des contaminations environnementales d’une part, et des modes de vie d’autre part.
L’évolution des niveaux de contamination et des contributions des différentes voies d’exposition conduit à distinguer les années 1986 des années suivantes.
Le bilan des doses reçues pour un adulte vivant dans l’est de la France (zone la plus touchée par les retombées radioactives), toutes voies d’exposition confondues, était de 0,7 mSv pour 1986, puis de 3,8 mSv de 1987 à 2006.
Pour les enfants, la dose reçue à la thyroïde a été calculée en raison de la sensibilité connue de cette glande aux radiations, notamment aux iodes radioactifs. Compte tenu de la durée de vie courte de l’iode radioactif, les doses ont été reçues dans les trois premiers mois suivant les dépôts. En tenant compte des différences de régime alimentaire, la dose reçue à la thyroïde a pu être estimée en fonction de l’âge. Elle est résumée dans le tableau 55.Irenvoi vers.

Tableau 55.I Doses équivalentes à la thyroïde en mSv pour les enfants résidant dans l’est de la France âgés de moins de 15 ans en 1986 (d’après Vidal et Renaud, 2000)

3 mois
1 an
5 ans
10 ans
1,9 +/- 0,6
9,8 +/- 3,2
6 +/- 1,9
2,9 +/- 0,9
L’ingestion des denrées a été à l’origine de 85 à 96 % de ces doses à la thyroïde.
La possibilité de mettre en évidence un excès de cancer de la thyroïde secondaire à Tchernobyl par une étude épidémiologique a été évaluée en 2000 (rapport INVS-IPSN, 2000renvoi vers) et a conclu qu’une telle étude manquerait de puissance pour mettre en évidence cet excès par rapport aux fluctuations normales de l’incidence du cancer de la thyroïde. Cependant, des études sur d’autres facteurs de risque des cancers thyroïdiens ont été entreprises par l’InVs et l’Inserm, dont les résultats sont à venir et qui permettront sûrement de mieux comprendre l’augmentation de l’incidence du cancer de la thyroïde constatée en France.

Essais aériens d’armes nucléaires

De nombreux essais aériens d’armes nucléaires ont été effectués dans le monde entre 1945 et le début des années 1980 (Bataille et Revol, 2001renvoi vers). Compte tenu de la puissance des tirs, l’essentiel des émissions s’est produit avant 1962 (Unscear, 1993renvoi vers). Un travail a été effectué à l’IRSN pour évaluer les conséquences dosimétriques de ces essais en France métropolitaine. Les estimations reposent sur les résultats de plus de 40 000 mesures effectuées entre 1960 et 1978. Les doses individuelles maximales sont obtenues en 1963; elles sont de l’ordre de quelques dixièmes de mSv (Vray et Renaud, 2006renvoi vers).
Quarante et un essais atmosphériques d’armes nucléaires en Polynésie française ont eu lieu de 1966 à 1974. Les retombées de ces essais ont concerné l’ensemble de la Polynésie française (DSND, 2006renvoi vers). Une surveillance de niveaux de radioactivité est effectuée depuis 1964 par l’armée (DIRCEN) et le CEA puis l’IRSN. Celle-ci repose sur des prélèvements effectués sur différents atolls et dans différents milieux physiques (eau de mer, eau de surface, eau de pluie, aérosols, sols) et biologiques (denrées alimentaires, plancton pour l’essentiel). Ces données ont été régulièrement transmises à l’Unscear sous forme de rapports. Les doses efficaces maximales estimées, associées à l’ensemble des retombées de ces essais, sont de l’ordre de 1 à 5 mSv (Unscear, 2000renvoi vers).
Les doses dues à ces expositions vont en diminuant sur les deux dernières décennies.
La direction de la Sûreté nucléaire défense (DSND) a publié en 2007 un rapport sur les essais nucléaires dans le Pacifique, avec une mise à jour du calcul des doses reçues par les populations lors des essais les plus irradiants pour les populations locales (rapport DSND, 2007renvoi vers).

Tableau 55.II Doses efficaces et doses à la thyroïde (en mSv) pour les populations adultes et enfants contaminées lors des essais nucléaires aériens en Polynésie française (rapport DSDN, 2007renvoi vers)

Essai nucléaire
Localisation
Dose efficace (mSv)
Dose thyroïde (mSv)
  
Adulte
Enfant
Adulte
Enfant
Aldebaran (7/66)
Gambier
3-7
3-10
2-40
4-80
Rigel (9/66)
Gambier
0,1-0,23
0,4-0,71
1,1-2,1
4,6-7,8
 
Tureia
0,06-0,15
0,1-0,23
0,15-1
0,6-2
Arcturus (7/67)
Tureia
0,79-3,2
0,9-4
0,9-25
2-38
Encelade (6/71)
Tureia
1,3-1,9
1,5-3,5
1-8
4-27
Phoebe (8/71)
Gambier
0,2-2,6
0,5-7,9
1,3-26,7
4,8-98
Centaure (7/74)
Pirae
0,5
1,2
4
1,4
 
Hitiaa
2,5
5,2
12
49
 
Sud Teahupoo
3,6
4,5
16
40
Des études épidémiologiques sont en cours pour rechercher un excès de cancer de thyroïde au sein de ces populations.

Exposition due aux rejets des installations nucléaires

Le fonctionnement de certaines installations nucléaires entraîne des rejets radioactifs dans l’environnement, soit gazeux (via une cheminée) soit liquides (en mer ou en rivière). Ces rejets sont réglementés dans le cadre de demandes d’autorisation de rejets (Chartier et coll., 2002renvoi vers). De plus, ils font l’objet d’une surveillance permanente reposant sur des mesures de radioactivité effectuées dans les différents compartiments de l’environnement.
Les estimations des doses pouvant être délivrées aux populations riveraines du fait de ces rejets sont très faibles, de l’ordre de quelques millièmes à quelques centièmes de mSv par an (Evrard et coll., 2006renvoi vers; Rannou et coll., 2006renvoi vers).
En général, les doses à proximité d’un site donné ont diminué au cours des dernières décennies du fait de la réduction des rejets environnementaux (GRNC, 1999renvoi vers). Néanmoins, cette diminution des rejets par site dans le temps a été contrebalancée par l’augmentation du nombre et de la puissance des sites (centrales nucléaires pour l’essentiel).

Exposition pour raisons médicales

Les personnes concernées dans le cadre médical sont celles recevant des rayonnements ionisants dans le cadre d’une procédure diagnostique ou celles traitées par radiothérapie ou par traitement de médecine nucléaire pour un cancer. Seules les irradiations diagnostiques seront considérées, compte tenu du sujet qui est l’exposition environnementale de la population.
D’après le rapport de l’Unscear 2000, l’évolution mondiale de l’exposition de la population au radiodiagnostic va vers une augmentation du nombre des examens, de la dose efficace et de la dose collective (Unscear 2000renvoi vers). Cette augmentation est très variable selon les pays concernés, avec 75 % des examens réalisés dans les pays riches. Ainsi, si la dose efficace moyenne mondiale par personne et par an est de 0,4 mSv, au niveau français elle est comprise entre 0,6 et 0,83 mSv.
D’après l’état des lieux de l’exposition médicale de la population française aux rayonnements ionisants à partir des données institutionnelles faite par l’IRSN et l’InVS (rapport IRSN-InVS/DRPH 2005-10), environ 60 à 73 millions d’examens diagnostiques radiologiques sont réalisés chaque année, soit environ 1 examen par personne. Il est noté une augmentation de 5 à 8 % du nombre d’examens réalisés par an.
La dose efficace annuelle moyenne est un indicateur global de l’exposition médicale, ne permettant que de situer le niveau de cette exposition par rapport à celle des autres sources de rayonnements. Pour analyser l’exposition de la population, il est important de tenir compte de deux facteurs influençant la dose reçue et son impact. Le premier est le type d’examen réalisé. En effet, selon l’examen réalisé, on observe une grande variation de la dose reçue, avec des doses plus élevées en moyenne pour les examens scanographiques que pour la radiologie conventionnelle. Ainsi, la radiologie conventionnelle qui représente 90 % des actes réalisés ne contribue qu’à 36 % de la dose efficace totale, alors que la scanographie contribue à environ 40 % de la dose avec seulement 7 à 8 % des actes réalisés (Rannou et coll., 2006renvoi vers; rapport DRPH/2006-02). Pour un même examen, il existe par ailleurs une grande disparité des doses reçues selon la pratique médicale, la qualité des appareils, la morphologie des patients.
Le deuxième facteur à prendre en considération est celui de la sensibilité aux rayonnements ionisants de la personne soumise à l’examen. Ainsi, les fÅ“tus (lors des examens des femmes enceintes) et les jeunes enfants présentent une radiosensibilité de certains tissus accrue par rapport à celle des adultes, une espérance de vie longue, susceptible de laisser se développer le risque de cancer secondaire à l’irradiation et un manque d’ajustement des conditions techniques de réalisation de l’examen.
L’examen scanographique étant à l’origine de près de 40 % de la dose collective reçue, il est important de voir l’évolution de cette pratique. D’après les données de la CNAMTS sur le remboursement des actes scanographiques, il est possible d’avoir un aperçu de l’évolution de cette pratique en France selon les classes d’âge considérées. Ces informations ne sont cependant pas exhaustives car les scanners réalisés dans les hôpitaux publics ne sont pas comptabilisés. Cela entraîne une sous estimation du nombre d’examens réalisés en pédiatrie, surtout pour les enfants les plus jeunes pour lesquels les scanners sont principalement réalisés en milieu hospitalier. Le tableau 55.IIIrenvoi vers montre l’évolution à la hausse du nombre de scanners réalisés entre 2000 et 2002 pour toutes les classes d’âge de plus de 15 ans.

Tableau 55.III Nombre d’actes de scanographie et leur répartition en fonction de l’âge des patients (d’après CNAMTS, rapport IRSN-InVS/ DRPH 2005-10)

Âge
2000
%
2001
%
2002
%
< 1 an
265
0
214
0
222
0
1-5 ans
1 911
   0,1
2 571
   0,1
2 018
0
5-15 ans
9 568
   0,5
12 341
   0,6
10 425
   0,5
15-30 ans
175 346
   9,7
199 243
   9,6
199 574
9
30-65 ans
1 044 254
57,6
1 188 330
57,3
1 269 490
57,5
65 ans et +
582 411
32,1
668 352
32,3
724 746
32,8
Total
1 813 755
     100
2 071 051
     100
2 206 475
     100
Le suivi des pratiques radiologiques en France est nécessaire compte tenu du nombre de personnes concernées et de la dose collective délivrée. Il est particulièrement important de mieux préciser les expositions au sein des populations sensibles que sont les enfants, ainsi que la variabilité des doses reçues pour pouvoir évaluer au sein de cette population le risque sanitaire à long terme et pour cibler des actions de réduction des expositions.

Exposition due à l’activité professionnelle

Plus de 250 000 personnes sont surveillées annuellement en France pour l’exposition externe aux rayonnements ionisants. Ces doses sont aujourd’hui centralisées par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire au sein du Système d’information de la surveillance de l’exposition aux rayonnements ionisants (Siseri1 ). En revanche, il n’existe pas à l’heure actuelle de système de centralisation des expositions internes.

Expositions externes

Des bilans annuels de l’exposition externe des travailleurs surveillés du fait de leur activité professionnelle ont été publiés par l’Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) depuis le milieu des années 1990, puis par l’IRSN depuis 2003. L’exposition est mesurée grâce à des dosimètres passifs individuels (par exemple film porté à la poitrine). Au total, en 2004, le bilan des doses porte sur plus de 255 000 personnes travaillant dans l’industrie nucléaire, la recherche ou exerçant des activités médicales ou vétérinaires. La distribution des doses est très dissymétrique : plus de 95 % des travailleurs surveillés reçoivent moins de 1 mSv, et seulement quelques dizaines dépassent 20 mSv. La dose individuelle moyenne arithmétique en 2004 était de 0,25 mSv (tableau 55.Irenvoi versV ; Rannou et Couasnon, 2005renvoi vers).

Tableau 55.IV Bilan synthétique des expositions professionnelles aux rayonnements ionisants (exposition externe 2004, d’après Rannou et Couasnon, 2005renvoi vers)

Secteur d’activité
Travailleurs surveillés
Dose collective
(homme.Sv)
Dose individuelle moyenne (mSv)
Effectifs dont la dose individuelle annuelle est supérieure à 20 mSv
Activités médicales et vétérinaires
143 006
9,26
< 0,1
37
Industrie – effectif classé « non nucléaire »
36 787
20,28
0,6
10
Recherche (IPN/CNRS + Divers)
11 147
0,07
< 0,1
0
EDF (agents)
19 406
9,50
0,5
0
Cogemaa
7 201
1,76
0,25
0
CEAb
6 600
1,17
0,2
0
Entreprises extérieures (suivi IRSN et LCIE)c
31 174
21,63
0,7
4
Total
255 321
63,68
0,25
51

a L’effectif concerné est celui des travailleurs des établissements de Cogema La Hague, Cogema Marcoule, Pierrelatte, Melox, FBFC et Miramas, suivis par les laboratoires Cogema La Hague et Marcoule (effectif constitué majoritairement d’agents Cogema, mais aussi CEA, IRSN…)
b Travailleurs des établissements CEA suivis par le laboratoire de l’IRSN
c Les entreprises extérieures désignent les entreprises intervenant pour le compte des grands exploitants dans les installations nucléaires de base

L’analyse de la tendance depuis 1996 montre une décroissance ou une stabilité des doses externes selon les secteurs d’activité (Rannou et Couasnon, 2005renvoi vers). La diminution des doses externes est confirmée sur une plus longue durée par les études épidémiologiques effectuées sur les travailleurs de l’industrie nucléaire (Rogel et coll., 2005renvoi vers).

Exposition due à l’inhalation du radon

L’extraction de l’uranium en France a démarré au milieu des années 1940, et s’est poursuivie jusqu’à la fin des années 1990. Au total, environ 7 000 mineurs ont été impliqués dans l’exploitation des mines du groupe CEA-Cogema. L’exposition au radon des mineurs a fortement diminué dans le temps, en particulier grâce à l’installation de systèmes de ventilation forcée à partir de 1956. Une cohorte de plus de 5 000 mineurs a été constituée pour analyser la mortalité de ces mineurs (Rogel et coll., 2002renvoi vers; Laurier et coll., 2004renvoi vers; Vacquier et coll., 2006renvoi vers). Après 1985, l’exposition moyenne annuelle au sein de cette cohorte ne dépasse pas 1 WLM (Working Level Month : unité d’exposition au radon utilisée dans les mines, correspondant à une exposition d’un an dans une habitation ayant une concentration de 230 Bq/m3).
D’autres populations peuvent être exposées à des concentrations de radon élevées du fait de leur profession (mines, établissements thermaux…) ou parce que leur activité est effectuée partiellement en sous-sol (champignonnières, caves vinicoles…). Néanmoins, il n’existe pas actuellement en France de données permettant de recenser ces populations, et encore moins d’estimer leurs expositions. Un inventaire des situations d’exposition au radon a été lancé en France en 2005 à la demande de la Direction des relations du travail, dans le cadre de la transposition en droit français de la directive Euratom 96/29 relative aux « expositions naturelles renforcées ». Ce travail devrait fournir une estimation fiable des expositions et des effectifs de travailleurs concernés dans les années à venir.

Expositions internes autres que radon

Certaines activités, dans les domaines de la médecine, de la recherche et de l’industrie, nécessitent l’utilisation et la manipulation de radionucléides. Ces activités peuvent entraîner des contaminations internes, accidentelles ou chroniques, par inhalation, contact ou ingestion. Ces contaminations peuvent entraîner des doses internes plus ou moins élevées, délivrées de façon hétérogène aux différents organes, en fonction de la quantité, de la nature et de la forme physico-chimique des radionucléides incorporés. En France, le suivi médical des travailleurs des installations nucléaires soumis à un risque d’exposition interne est généralement pris en charge par les services médicaux du travail des exploitants nucléaires. Pour les années récentes, certains organismes ont établi des bilans, comme par exemple le bilan des examens effectués par l’IRSN (Jourdain et coll., 2005renvoi vers). Néanmoins, on ne dispose pas en France d’un recensement des contaminations ni d’un bilan national des doses délivrées. Un système de centralisation de ces informations est en cours de mise en place au sein de l’IRSN.

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