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Med Sci (Paris). 2008 January; 24(1): 97.
Published online 2008 January 15. doi: 10.1051/medsci/200824197.

Les cellules souches, porteuses d’immortalité
Nicole Le Douarin

Françoise Dieterlen-Lièvre*

UPR 2197 CNRS, 33, avenue de la Terrasse, 91498 Gif-sur-Yvette Cedex, France
Corresponding author.
 

Les cellules souches représentent le Graal de la médecine et de la recherche depuis une quinzaine d’années. Comprendre les mécanismes de leur autorenouvellement et de leur engagement dans des voies de différenciation, puis les manipuler, c’est à la fois comprendre la vie elle-même et jeter les bases d’une médecine régénérative. Le rêve de réparer les accidents de la naissance et ceux de la vie attire vers ces recherches de très nombreux laboratoires. Le livre de Nicole Le Douarin est fondamental parce qu’il situe ces recherches dans leur cadre, celui du développement de l’individu à partir d’un œuf, qu’il trace l’historique de cette question et qu’il aborde les problèmes d’éthique liés à l’utilisation thérapeutique de ces cellules.

La notion de cellule souche est issue des études in vivo et in vitro qui ont révolutionné la compréhension de l’hématopoïèse normale et pathologique. Les irradiations subies par les victimes de la bombe atomique ont amené à mettre en évidence l’indispensable présence dans la moelle osseuse de rares cellules responsables de la rénovation du sang. Des recherches semblables ont ensuite été étendues à d’autres tissus qui se renouvellent vigoureusement, tels que l’épithélium intestinal ou la peau. Elles ont montré que pratiquement tous les tissus de l’adulte sont soumis à un renouvellement grâce aux cellules souches qu’ils contiennent. Même dans le cas des neurones, dont on a longtemps cru qu’ils se différenciaient une fois pour toutes à une date précoce de la vie, certains peuvent être remplacés à partir de cellules souches situées au sein même du cerveau.

C’est parce que Nicole Le Douarin a une connaissance approfondie du développement embryonnaire qu’elle fait comprendre d’une manière lumineuse tous les aspects de ce problème, que ce soit la découverte de ces cellules si discrètes, leurs propriétés particulières ou la genèse de l’idée de les assujettir à des fins de réparation.

Est-il possible de récolter assez de ces rares cellules pour les utiliser à des fins médicales ? Pourrait-on faire appel à des cellules déjà différenciées que l’on rendrait capables de régresser et de récupérer un état multipotent ? Des résultats récents permettent de l’espérer.

Il n’en reste pas moins que les cellules souches dérivées d’un embryon au stade précoce de son développement (cellules ES) conservent un très grand intérêt à la fois pour la recherche fondamentale et pour une future application en médecine régénérative. L’auteur expose clairement les problèmes éthiques qui accompagnent les recherches sur les cellules ES en permettant au lecteur de se faire une opinion en toute connaissance des enjeux en cause.

Non content d’exposer clairement ces problèmes complexes, et les mécanismes cellulaires et génétiques sous-jacents, ce livre relate le cheminement historique qui a conduit à l’épanouissement récent de cette thématique. Il expose aussi un phénomène biologique fascinant, qui a disparu à notre détriment chez les vertébrés supérieurs, celui de la régénération, qui permet à la salamandre de reconstituer un membre amputé, ce rêve que les biologistes et les médecins essaient aujourd’hui de réaliser.

Grâce à son caractère didactique et à son style clair, ce livre aisé à lire même pour le non-initié parlera à l’honnête homme, à l’étudiant, au spécialiste, au médecin, au patient. Tous trouveront les réponses aux questions qu’ils se posent et participeront à une des grandes aventures du monde moderne.

References
1.
Le Douarin N. Les cellules souches, porteuses d’immortalité. Collection Sciences. Paris : Odile Jacob, 2007 : 410 p.